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Les SOUFFRANCES du SEIGNEUR JÉSUS

M. Tapernoux

 

 

 

Table des matières abrégée :

1      « Tu souffris, ô Jésus, Sauveur, Agneau, Victime... »

2      « ... notre iniquité Te fit souffrir les plus cruelles peines »

3      « Tu souffris le tourment suprême Ô cher Sauveur »

4      « Pour sauver ta créature, Tu fus l’homme de douleurs »

5      « Pour toi, Jésus, la souffrance, les pleurs, la mort, l’abandon ! »

6      Conclusion

 

Table des matières détaillée :

1      « Tu souffris, ô Jésus, Sauveur, Agneau, Victime... »

2      « ... notre iniquité Te fit souffrir les plus cruelles peines »

2.1      La souffrance de la part du peuple

2.2      La souffrance de la part des disciples

2.3      La souffrance à cause du péché dans l’homme

2.4      La souffrance par sympathie

2.5      Les souffrances par anticipation

3      « Tu souffris le tourment suprême Ô cher Sauveur »

3.1      Les heures qui précèdent la croix (Gethsémané)

3.2      La trahison de Judas

3.3      Le reniement de Pierre

3.4      Condamnation du Seigneur

3.4.1       Condamnation par les chefs religieux

3.4.2       Condamnation par Pilate

4      « Pour sauver ta créature, Tu fus l’homme de douleurs »

4.1      Le chemin de la croix

4.2      Golgotha

4.3      Souffrances morales des trois premières heures de la croix

4.4      Les «trois heures sombres»

5      « Pour toi, Jésus, la souffrance, les pleurs, la mort, l’abandon ! »

5.1      Après les trois heures sombres – Pourquoi m'as-tu abandonné ?

5.2      Prenant le vinaigre – afin que l’Écriture fût accomplie

5.3      C’est accompli

6      Conclusion

6.1      L’amour du Christ nous étreint » (2 Cor. 5:14)

6.2      Ne pas prendre le péché à la légère – Sainteté – Colossiens 1:9

6.3      Viens, Seigneur Jésus !

 

 

1                    « Tu souffris, ô Jésus, Sauveur, Agneau, Victime... »

« Qui a cru à ce que nous avons fait entendre, et à qui le bras de l’Éternel a-t-il été révélé ? Il montera devant lui comme un rejeton, et comme une racine sortant d’une terre aride. Il n’a ni forme, ni éclat ; quand nous le voyons, il n’y a point d’apparence en lui pour nous le faire désirer. Il est méprisé et délaissé des hommes, homme de douleurs, et sachant ce que c’est que la langueur, et comme quelqu’un de qui on cache sa face ; il est méprisé, et nous n’avons eu pour lui aucune estime » (És. 53:1 à 3).

« N’est-ce rien pour vous tous qui passez par le chemin ? Contemplez, et voyez s’il est une douleur comme ma douleur qui m’est survenue, à moi que l’Éternel a affligée au jour de l’ardeur de sa colère » (Lam. 1:12).

Le sujet que nous proposons d’aborder est à la fois très vaste et très précieux.

Très vaste, tellement il y a de pages dans l’Écriture où il est question des souffrances de Christ ; que ce soit sous une forme symbolique — je pense par exemple à tout ce qui nous est dit des sacrifices du Lévitique — que ce soit par l’Esprit prophétique dans les Psaumes — que ce soit d’une manière historique par les descriptions des souffrances du Seigneur dans les Évangiles, on peut dire que la Parole entière nous parle des souffrances de Christ, « l’Homme de douleurs, sachant ce que c’est que la langueur ». Et quand il enseigne lui-même les deux disciples d’Emmaüs au chapitre 24 de l’évangile de Luc, il pose cette question : « Ne fallait-il pas que le Christ souffrît ces choses, et qu’il entrât dans sa gloire ? Et commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliquait, dans toutes les écritures, les choses qui le regardent » (v. 26, 27). Comme nous aurions aimé être là, n’est-ce pas, pour entendre de la bouche même de notre adorable Sauveur ce qu’il a enseigné, ce soir-là, aux deux disciples d’Emmaüs concernant son chemin de souffrance !

Un vaste sujet... mais aussi un sujet très précieux et nous pouvons bien, au début de ces méditations, exprimer le désir que, conduits par le Saint Esprit, ce soit toujours nos cœurs qui soient touchés et qu’il n’y ait rien d’intellectuel dans la méditation des souffrances de notre bien-aimé Sauveur, qu’il s’agisse de celles qu’il a rencontrées durant son chemin ou de celles qu’il a rencontrées sur la croix et plus particulièrement des souffrances expiatoires des trois heures de ténèbres. Rien ne touche autant nos cœurs et n’affermit nos affections pour Lui que la méditation de ses souffrances. Et pourquoi ? — Parce qu’elles sont le témoignage de l’amour qui l’a conduit dans un tel chemin.

Un sujet précieux parce que, pour parler d’abord de ses souffrances expiatoires, elles constituent le fondement même de notre salut, de notre délivrance de la puissance de Satan et de toutes les bénédictions que nous possédons en Christ. C’est par ces souffrances que notre Seigneur Jésus nous a acquis une part si glorieuse et une rédemption éternelle. Mais ces souffrances sont aussi précieuses à considérer parce qu’elles lui sont survenues dans l’accomplissement de cette œuvre par laquelle il a parfaitement glorifié Dieu Certes il l’a glorifié tout au long de sa carrière. Il a pu dire : « Ma viande est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé, et d’accomplir son œuvre », et « Je fais toujours les choses qui lui plaisent ». Mais sur la croix, et particulièrement durant les heures de ténèbres, Dieu a recueilli une moisson de gloire comme il n’en a point recueilli d’aussi belle, d’aussi éclatante, durant toute la vie d’obéissance et de dépendance de notre bien-aimé Seigneur. Vie si parfaite qu’à deux reprises Dieu a proclamé, du haut des cieux : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir » ! Et pourtant la croix n’était pas encore passée ; il fallait encore que s’accomplisse cette heure pour laquelle il était venu. Souffrances de Christ ! source de joie pour nous qui savons que l’œuvre est parfaitement accomplie, que les droits de la justice et de la gloire de Dieu ont été pleinement satisfaits. Dieu n’a plus rien à exiger du pécheur repentant ; il peut l’accueillir comme un enfant bien-aimé, il peut lui conférer cette relation d’« enfant de Dieu » et le faire entrer dans la jouissance de toutes les grâces et de toutes les bénédictions qui en découlent. C’est sur le fondement de cette œuvre accomplie à la croix que Dieu a pu donner libre cours à son amour et à sa grâce. « Là où le péché abondait, la grâce a surabondé », oui, comme un fleuve puissant qui a tout emporté. « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus ». Et ce sont ses souffrances expiatoires qui sont le fondement de toutes nos bénédictions.

Les souffrances, que le Seigneur a traversées ici-bas, il les a ressenties dans son corps, dans son cœur, dans son âme. Dans son corps il a été l’homme humble, le Galiléen qui allait son chemin, assujetti à toutes les servitudes de la condition humaine : il a ressenti la fatigue, la soif, la faim. Nous le voyons, un soir d’orage, couché à l’arrière d’une barque, dormant sur un oreiller, accablé de fatigue. Mais ces souffrances, que sont-elles comparativement à celles qu’il a rencontrées plus tard aussi dans son corps, quand se sont manifestées la violence et la brutalité des hommes : les coups, les crachats, la couronne d’épines, le roseau (mis dans sa main, utilisé ensuite pour lui frapper la tête), la flagellation ordonnée par Pilate et enfin le crucifiement ? Ces souffrances physiques de la croix, nous ne les oublions pas. Mais les souffrances que le Seigneur a connues dans son cœur lui ont été, nous n’en doutons pas, beaucoup plus sensibles encore. Il y a la haine, le mépris ; car il a été méprisé : « quand nous le voyons, il n’y a point d’apparence en lui pour nous le faire désirer. Il est méprisé et délaissé des hommes » et encore une fois : « il est méprisé, et nous n’avons eu pour lui aucune estime ». Nous l’exprimons dans un cantique :

 

« Dans l’humilité profonde,

Suivant ton obscur chemin,

Tu fus méprisé du monde,

Toi qui lui tendais la main ».

 

Oui, il a connu la haine, la méchanceté, les sarcasmes. On a tordu ses paroles, il a été épié par des agents secrets (Luc 20:20), il a tout éprouvé : l’incompréhension, l’abandon des disciples qui « le laissèrent tous et s’enfuirent » au moment où il aurait eu — pour parler à la manière des hommes — le plus besoin de leur présence.

Souffrances de son cœur, oui, mais nous pouvons parler aussi des souffrances de son âme : celles qu’il a éprouvées de la part de Dieu. C’est de son âme qu’il est question dans ce même chapitre 53 d’Ésaïe : « S’il livre son âme en sacrifice pour le péché » ; « il aura livré son âme à la mort », « il verra du fruit du travail de son âme ». Nous l’entendons s’écrier au Psaume 69 : « les eaux me sont entrées jusque dans l’âme ». À ses disciples, il dira : « mon âme est saisie de tristesse jusqu’à la mort ». Et en Jean 12, à l’approche de l’heure de la croix, il s’écriera : « maintenant mon âme est troublée ; et que dirai-je ? » Va-t-il demander : « Père, délivre-moi de cette heure ? » Non ; il ajoute aussitôt : « Père, glorifie ton nom ». Et Dieu ne peut rester indifférent à une telle soumission, à un tel désir. Alors que Jésus ressentait dans son âme, par anticipation, les souffrances qu’il allait rencontrer sur la croix, du haut des cieux Dieu proclame : « Et je l’ai glorifié, et je le glorifierai de nouveau ».

Souffrances du corps, souffrances du cœur, souffrances de l’âme ! Dans l’expression « homme de douleurs » d’Ésaïe 53, le mot douleurs est au pluriel comme pour bien marquer qu’aucune souffrance ne lui a été épargnée et qu’en outre durant, les trois heures de ténèbres, aucune ressource divine ne venait en atténuer l’acuité. Il a connu « la langueur », forme de peine qui l’accompagnait sans cesse. Tel a été notre Sauveur bien-aimé, dans ce chemin où il était entré volontairement pour glorifier Dieu et pour sauver les pécheurs perdus. Certes nous devons nous garder, lorsque nous méditons sur les souffrances du Seigneur, d’essayer de les analyser. Nous sommes ici sur un terrain saint que nous ne pouvons aborder sans avoir les pieds déchaussés. Les sacrifices du Lévitique sont différents mais parlent tous d’une seule offrande, de Christ lui-même. Dans les souffrances du Seigneur, nous retrouvons des aspects divers de ces sacrifices. Mais c’était toujours la souffrance de Christ ; il l’a ressentie pleinement ayant un cœur humain parfait. En même temps il était Dieu manifesté en chair, mystère que nous ne pouvons sonder.

 

Les souffrances du Seigneur pendant son ministère

Nous nous proposons de méditer tout d’abord sur les souffrances que le Seigneur a rencontrées dans son ministère, ce qu’il a éprouvé tout au long de sa carrière, avant la nuit où il fut livré.

Mais avant d’aborder notre sujet, j’aimerais dire quelques mots du passage des Lamentations de Jérémie qui figure en tête de ces lignes : « N’est-ce rien pour vous tous qui passez par le chemin... ? » tout en sachant bien qu’historiquement ce verset concerne Jérusalem.

Il y a d’abord une première catégorie de personnes à qui cette question pourrait être adressée : Ce sont ceux qui, sachant que Jésus est mort sur la croix, ne se soucient pas de lui ; ils sont totalement indifférents, ils passent leur chemin. N’est-ce rien pour vous ? Voyez s’il est une souffrance comme cette souffrance. J’aimerais m’adresser à ceux ou à celles qui, peut-être, sont passés jusqu’à maintenant devant la croix du Seigneur Jésus sans se demander ce que cette croix signifie pour eux personnellement. Oh ! qu’ils réalisent que le Seigneur Jésus a dû subir sur la croix le jugement qu’ils méritaient, et se tournent vers Lui en l’acceptant comme leur Sauveur !

Un deuxième groupe de personnes est interpellé par cette question : Il s’agit de ceux qui, ayant reçu le Seigneur pour leur Sauveur, n’ont pas encore répondu à l’appel qu’il leur adresse de se souvenir de ses souffrances et de sa mort. Le Seigneur a lui-même institué, dans la nuit où il fut livré, un mémorial de ses souffrances et de sa mort : « Ceci est mon corps », dit-il en rompant le pain ; il est donné pour vous. « Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang... faites ceci en mémoire de moi ». Cher ami, ce désir du Seigneur Jésus que nous nous souvenions de lui, de ses souffrances et de sa mort en participant à ce mémorial, est-ce qu’il ne vous dit rien ? Allez-vous demeurer indifférent ? Que celui qui se sent concerné par cette question réponde de son cœur au Seigneur lui-même.

Mais la même question s’adresse à nous tous : à nous qui l’avons reçu comme notre Sauveur, qui savons à quel prix nous avons été rachetés, à nous qui rappelons les souffrances du Seigneur en participant à ce mémorial qu’il a institué. N’avons-nous pas tous besoin d’être réveillés dans nos affections pour Lui ? Il y a des paroles que l’on s’habitue à prononcer, que l’on s’habitue à entendre. Il y a des gestes que l’on s’habitue à faire, et voici que le Seigneur nous interpelle, lui qui lit dans nos cœurs à tous : « N’est-ce rien pour toi ? » « Contemple et vois la souffrance que j’ai éprouvée pour toi ! » Or c’est bien dans la mesure où nos cœurs seront rendus sensibles à la souffrance du Seigneur Jésus que nous pourrons, chaque premier jour de la semaine, répondre, dans la sincérité de nos cœurs, au désir qu’il a exprimé : « Faites ceci en mémoire de moi ». Nous sommes invités à le faire jusqu’à ce qu’il vienne. Dans la gloire, nous n’aurons plus besoin d’un mémorial : nous verrons Jésus face à face. Et nous contemplerons durant l’éternité les marques de ses souffrances dans ses mains, dans ses pieds, dans son côté : témoignage éternel de l’amour dont nous avons été aimés. Mais pour le temps de son absence, pour le temps présent, notre privilège est de répondre de tout notre cœur à son désir pressant.

 

2                    « ... notre iniquité Te fit souffrir les plus cruelles peines »

2.1   La souffrance de la part du peuple

Nous lisons maintenant dans l’évangile de Jean au chapitre 1, verset 11 : « Il vint chez soi ; et les siens ne l’ont pas reçu ». Arrêtons-nous sur ce que le Seigneur a souffert de la part de son peuple et en particulier de la part des chefs de son peuple. Ce verset l’exprime sous une forme lapidaire : « Il vint chez soi »: Le Seigneur était chez lui, au milieu de son peuple ; il était son Messie, venu pour instaurer son règne en lui apportant la bénédiction, mais « les siens ne l’ont pas reçu ». Ils l’ont rejeté, ils l’ont méprisé, ils l’ont mis à mort, le clouant sur une croix ! Quelle souffrance morale pour Christ d’être ainsi rejeté de son peuple !

S’il ne l’exprime guère dans les évangiles, nous l’entendons plus d’une fois dans les Psaumes. D’abord au Psaume 22:6 : « Mais moi, je suis un ver, et non point un homme, l’opprobre des hommes, et le méprisé du peuple ». Et au Psaume 109:4, 5 : « Pour mon amour, ils ont été mes adversaires... ils m’ont rendu le mal pour le bien, et la haine pour mon amour ». Voilà ce que le Seigneur Jésus a rencontré de la part des siens, et tout particulièrement de la part des chefs de son peuple. Bien d’autres passages nous en apportent la confirmation : Ésaïe 49, parle de « celui que l’homme méprise », de « celui que la nation abhorre », du « serviteur de ceux qui dominent ». Voilà en quels termes l’Esprit prophétique a parlé du mépris que ressentirait le Seigneur de la part de son peuple. Quelques détails nous font entrer d’une manière un peu plus approfondie dans ce que Christ a éprouvé de la part de ces chefs religieux du peuple.

Tout d’abord, en Matthieu 12, alors que Jésus manifestait sa puissance en délivrant les hommes du pouvoir de Satan, que disent les pharisiens ? (v. 24) : « Celui-ci ne chasse les démons que par Béelzébul, chef des démons ».

Quelle ingratitude de leur part, et pour le Seigneur quelle souffrance ! À lui, le Fils de Dieu, qui agissait en grâce dans la puissance du Saint Esprit, on ose attribuer des relations avec Satan qui lui donnerait son pouvoir ! C’est ce que le Seigneur appelle le péché contre l’Esprit qui ne sera pardonné ni dans ce siècle, ni dans le siècle à venir. Ils l’ont traité d’instrument de Satan ! L’évangile de Jean contient plusieurs passages où ces chefs indignes accusent même le Seigneur Jésus, d’être possédé par un démon. Au chapitre 8:48: « Les Juifs répondirent et lui dirent : Ne disons-nous pas bien que tu es un Samaritain, et que tu as un démon ? » On le traite de Samaritain, ce qui dans leur bouche était une injure, et on l’accuse d’avoir un démon ! Et au chapitre 10, c’est à l’instant où le Seigneur Jésus déclare (v. 17) : « à cause de ceci le Père m’aime, c’est que moi je laisse ma vie, afin que je la reprenne », que « plusieurs d’entre eux disaient : Il a un démon, et il est fou ; pourquoi l’écoutez-vous ? » Voilà leur réponse à ces paroles si touchantes.

 

2.2   La souffrance de la part des disciples

Mais à côté de ceux qui ont fait souffrir le Seigneur volontairement, n’y a-t-il pas un petit groupe qui l’a bien souvent attristé ? S’il nous est dit en Hébreux 12 : « considérez celui qui a enduré une telle contradiction de la part des pécheurs contre lui-même », il a fallu qu’il connaisse aussi, bien qu’à un autre degré, la contradiction de la part de ses propres disciples. Les douze à l’égard desquels le Seigneur avait déployé toute sa grâce, qu’il avait enseignés avec tant de patience, eux aussi manifestent trop souvent leur totale incompréhension, leur manque de foi, de mémoire et d’amour. Nous pouvons le voir en particulier en Marc 8, où le Seigneur doit, par une succession de questions, mettre en évidence, leur ignorance coupable. Nous ne pouvons pas leur jeter la pierre, nous qui leur ressemblons si souvent, mais ce qu’il importe de considérer, c’est la souffrance que le Seigneur a éprouvée à cause du comportement des disciples. Il vient de les mettre en garde contre le levain des pharisiens et eux pensent qu’il leur dit cela parce qu’ils ont oublié de prendre des pains. Alors il leur pose une série de questions : « Pourquoi raisonnez-vous sur ce que vous n’avez pas de pains ? N’entendez-vous pas encore, et ne comprenez-vous pas ? Avez-vous encore votre cœur endurci ? Ayant des yeux, ne voyez-vous pas ?... et n’avez-vous point de mémoire ? »

Oh, toutes ces questions que le Seigneur leur adresse ! Elles expriment chacune une peine face à leur ignorance et à leur incrédulité. Nous pensons en particulier à cette scène où Jésus est dans la barque, avec les disciples. La mer s’élève, ils le réveillent : Nous périssons ! Maître ! est-ce que cela ne te fait rien ? Le Seigneur calme la tempête et leur demande : « Où est votre foi ? » Pas de foi ! Même après sa résurrection, pendant ces instants que le Seigneur a passés avec les deux disciples d’Emmaüs, que disent-ils ? « Nous espérions qu’il était celui qui doit délivrer Israël... ». Ils ne terminent pas leur déclaration, mais, en fait, ils suggèrent la pensée d’avoir été trompés par le Seigneur. Alors que leur répond-il ? « O gens sans intelligence et lents de cœur à croire toutes les choses que les prophètes ont dites ! » Quel reproche, mais aussi quelle tristesse pour le Seigneur de constater l’inintelligence, l’incrédulité, le désir d’être le plus grand, le sectarisme et puis, l’esprit de vengeance des disciples. Je pense à ce passage de Luc 9 où le Seigneur, ayant désiré s’arrêter dans un village de Samaritains, envoie ses disciples pour retenir un logement. On ne veut pas le recevoir ; alors voici que Jacques et Jean, deux disciples particulièrement proches du Seigneur, lui demandent : Veux-tu que nous disions que le feu du ciel descende sur eux, comme Élie a fait ? Le Maître doit les reprendre énergiquement, les censurer fortement, mais devant cet esprit de vengeance, quelle peine pour son cœur plein d’amour et de compassion ! Oui, le Seigneur a souffert aussi de la part de ses disciples.

 

2.3   La souffrance à cause du péché dans l’homme

Considérons maintenant ce que Christ a souffert à cause du péché qui l’entourait: cette source de douleur et de fatigue profonde et permanente pour lui, tout au long de sa carrière. Nous ne pouvons pas le comprendre dans toute sa portée, mais n’oublions jamais que Celui qui nous occupe, le Seigneur Jésus, est Dieu manifesté en chair, le Dieu saint. Il pouvait toucher les lépreux, un cercueil sans en être souillé. Le péché ne le souillait pas, mais la vision du péché et les conséquences du péché produisaient en Lui une douleur constante.

Lisons tout d’abord en Matthieu 21:12: « Jésus entra dans le temple de Dieu, et chassa dehors tous ceux qui vendaient et qui achetaient dans le temple ; et il renversa les tables des changeurs et les sièges de ceux qui vendaient les colombes ; et il leur dit : Il est écrit : « Ma maison sera appelée une maison de prière ; mais vous, vous en avez fait une caverne, de voleurs ». Quelle souffrance pour le Seigneur de constater ce que son peuple, enseigné comme il l’avait été, avait fait du temple de Dieu ! Dieu pouvait dire : « Je me suis levé de bonne heure, les enseignant » — Or ils n’avaient rien écouté mais avaient transformé cette maison en caverne de voleurs. Le péché qui s’étalait dans un tel lieu était une source de souffrance pour notre Seigneur.

Au chapitre suivant (22:15), un piège lui est tendu par les pharisiens à propos du tribut à payer à César. Jésus, connaissant leur méchanceté, répond : « Pourquoi me tentez-vous, hypocrites ? »Souffrance profonde pour le Seigneur dans cette manifestation du péché des chefs du peuple, qui s'exprime par leur ruse et leur hypocrisie. Ne l’entendons-nous pas, de la même manière, dénoncer leur péché en Luc 11, quand il leur déclare qu’ils sont pleins de rapine et de méchanceté ? Il dénonce la corruption, lui qui était parfaitement saint, — l’hypocrisie, lui qui était parfaitement vrai, qui est la « vérité ». Dans toutes ces manifestations du cœur de l’homme, le Seigneur a souffert. Et nous pensons encore à une scène du chapitre 3 de l’évangile de Marc, lorsque le Seigneur pénètre un jour de sabbat dans la synagogue. Il s’y trouvait un homme qui avait une main sèche et les chefs religieux observent Jésus pour voir s’il allait opérer un miracle un jour de sabbat. Le Maître qui sonde les cœurs et qui voit ce qui s’y passe leur pose une question : « Est-il permis de faire du bien le jour de sabbat, ou de faire du mal ? de sauver la vie, ou de tuer ? » Ils ne répondent pas, figés dans leur traditionalisme agressif ; ils se taisent. Alors le Seigneur les regarde tous avec colère, étant attristé de l'endurcissement de leur cœur.

Nous pourrions multiplier les citations des scènes dans lesquelles le Seigneur s’est trouvé véritablement au contact du péché dans l’homme ; et ce qui le rendait, pour lui, d’autant plus pénible, d'autant plus douloureux à supporter, c'est qu’il se manifestait dans ces conducteurs religieux, responsables d’être des modèles pour le peuple.

 

2.4   La souffrance par sympathie

Une autre forme de souffrance sur laquelle nous devons nous arrêter encore, c’est celle que le Seigneur a éprouvée par sympathie. Lisons en Matthieu 9, le verset 36 : « Voyant les foules, il fut ému de compassion pour elles, parce qu’ils étaient las et dispersés, comme des brebis qui n’ont pas de berger ». Quelle sympathie que celle du Seigneur Jésus face à la souffrance humaine ! Il ne se contentait pas de constater celle-ci mais il éprouvait à son égard une compassion qui avait sa source tout entière en lui-même. Dieu manifesté en chair, souffrant de la souffrance de ses créatures. Voyons-le en Luc 19 (v. 41) lorsqu’il s’approche de Jérusalem : « Quant il fut proche, voyant la ville, il pleura sur elle, disant : Si tu eusses connu, toi aussi, au moins en cette tienne journée, les choses qui appartiennent à ta paix ! » Jérusalem, la ville du grand Roi, dans laquelle il avait annoncé la bonne nouvelle, n’avait pas connu le temps de sa visitation. Dieu était là, au milieu d’elle dans la personne du Christ, et elle l’avait refusé ! Alors Jésus pleure sur cette ville si coupable et lui annonce les terribles événements qui vont s’ensuivre quarante ans après son rejet ! Le Seigneur voyait cela à l’avance et savait que si cette ville s’était repentie elle aurait été épargnée...

Dans une autre occasion, sa parfaite sympathie s’exprime aussi par des larmes (Jean 11:33) : « Jésus donc, quand il la vit pleurer (Marie), et les Juifs qui étaient venus avec elle, pleurer, frémit en son esprit, et se troubla, et dit : Où l’avez-vous mis ! Ils lui disent : Seigneur, viens et vois. Jésus pleura ». Jésus vient et constate les conséquences du péché sur l’homme, la ruine dans laquelle la créature a été plongée par la désobéissance et il ne peut rester indifférent : il pleure. C’est le plus court verset de toute la Bible : deux mots : « Jésus pleura ». Quelle sympathie ! mais expression de quelle souffrance ! Ainsi le Seigneur Jésus partageait dans son amour parfait les peines qui sont le lot des humains au milieu de cette scène de deuil.

 

2.5   Les souffrances par anticipation

Nous abordons un dernier point concernant les souffrances que Jésus a rencontrées dans son ministère. Elles sont liées à ce qu’il appelle « mon heure ». Il en parle dès le début de son ministère, en Jean 2, lors du miracle accompli aux noces de Cana. Il avait devant lui « l’heure » pour laquelle il était venu : celle de la croix ; c’était l’heure de l’ignominie, c’était l’heure, surtout, de l’abandon de Dieu. La perspective de cette heure l’a accompagné durant toute sa carrière et plus elle se rapprochait, plus la souffrance du Seigneur augmentait. C’est ainsi que nous le voyons en Jean 12, dans ce verset déjà cité: « Maintenant mon âme est troublée ; et que dirai-je ? Père, délivre-moi de cette heure ; mais c’est pour cela que je suis venu à cette heure ». Dans l’évangile de Marc, il parle aux disciples de ce que cette heure comporterait pour lui. « Il commença à les enseigner : Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, et qu’il soit rejeté des anciens et des principaux sacrificateurs et des scribes, et qu’il soit mis à mort, et qu’il ressuscite après trois jours. Et il tenait ce discours ouvertement. Et Pierre, le prenant à part, se mit à le reprendre » (8:31, 32). Car il enseignait ses disciples et leur disait : « Le Fils de l’homme est livré entre les mains des hommes, et ils le feront mourir ; et ayant été mis à mort, il ressuscitera le troisième jour. Mais ils ne comprenaient pas ce discours, et ils craignaient de l’interroger » (9:31, 32). Le verset 34 nous apprend de quoi étaient occupés les disciples à qui Jésus venait de parler des souffrances qui l’attendaient. Ils se disputaient pour savoir lequel serait le plus grand.

Enfin au chapitre 10:32 : « Prenant encore une fois les douze avec lui, il se mit à leur dire les choses qui devaient lui arriver : Voici, nous montons à Jérusalem ; et le Fils de l’homme sera livré aux principaux sacrificateurs et aux scribes ; et ils le condamneront à mort, et le livreront aux nations ; et ils se moqueront de lui, et le fouetteront, et cracheront contre lui, et le feront mourir ; et il ressuscitera le troisième jour ». Ces trois passages expriment le contenu de ce que Jésus appelle « mon heure ». Ce que les hommes allaient faire de lui et ce que Dieu ferait aussi lorsqu’il le frapperait, tout cela passe devant lui et il ressent par avance une profonde tristesse. Il en parle une première fois à ses disciples et voici Pierre qui le prend à part pour le reprendre : Incompréhension totale de la part des disciples ! Il en parle une seconde fois et il nous est dit que les disciples ne comprirent pas ce discours. Et une troisième fois au chapitre 10, mais « ils étaient stupéfiés et craignaient en le suivant ». Quant à cette heure qui était devant lui, à la souffrance qu’il ressentait par anticipation, il n’a trouvé aucune compréhension, aucune compassion auprès des siens.

Dans ces quelques passages exprimant les souffrances endurées par Christ dans son chemin, ne trouvons-nous pas le magnifique antitype de l’offrande de gâteau, faite de fine fleur de farine pétrie à l’huile et sur laquelle était mis l’encens ? Cet encens, dont Lévitique 2 déclare qu’il devait être tout entier brûlé sur l’autel du sacrifice, était répandu sur le feu brûlant, et montait en odeur agréable vers l’Éternel. Il parle des souffrances du Seigneur non pas pour l’expiation du péché, mais de la souffrance qu’il a rencontrée dans son chemin et dans laquelle Dieu a respiré un excellent parfum. Ces souffrances que Jésus a connues pendant son ministère comportaient ce qui a été la part exclusive de Dieu. Mais nous trouvons au chapitre 6 du Lévitique une mention qui nous concerne : une part de l’offrande de gâteau était réservée aux sacrificateurs. Une part est pour nous, bien-aimés, dans ces souffrances que Christ a rencontrées sur la terre. Nous avons une communion à ces souffrances-là — et c’était le souhait de l’apôtre qui désirait « le connaître, Lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances ». Que le Seigneur nous accorde d’entrer davantage dans ce qu’il a ressenti dans son chemin d’homme de douleurs !

Le chapitre 2 du Lévitique nous apprend que l’offrande de gâteau pouvait être cuite dans le four : cela parle des souffrances cachées de Christ, que l’Écriture est bien loin de nous rapporter toutes. L’offrande de gâteau pouvait aussi être cuite sur la plaque : ce sont les souffrances publiques et visibles de Christ et celles que nous discernons, nous, à travers les Écritures. Et puis l’offrande de gâteau pouvait aussi être cuite à la poêle : souffrances intenses telles que celles de la crucifixion.

En tant que sacrificateurs, mangeons, nous aussi, notre part de cette offrande de gâteau. Entrons toujours plus par la puissance du Saint Esprit et par la méditation de la parole de Dieu, dans ce qu’ont été les souffrances que notre bien-aimé Seigneur et Sauveur a rencontrées dans son chemin. Oui, qu’il nous accorde la grâce d’entrer davantage dans ce qu’il a enduré ainsi, afin que nous appréciions, d’une manière toujours plus étendue, l’immensité de l’amour dont le Seigneur nous a aimés ! N’oublions jamais que c’est volontairement qu’il est entré dans un tel chemin en déclarant : « Je viens,... pour faire, ô Dieu, ta volonté » (Héb. 10:7, 9).

 

3                    « Tu souffris le tourment suprême Ô cher Sauveur »

3.1   Les heures qui précèdent la croix (Gethsémané)

Le sujet dont nous allons nous entretenir maintenant, chers frères et sœurs, c’est celui de « la nuit pendant laquelle le Seigneur Jésus fut livré ». Le moment de la mort approche. Satan, que Christ avait lié au début de son ministère, et dont il avait ensuite pillé les biens, va revenir à l’assaut. Nous lisons d’ailleurs au chapitre 4 de l’évangile de Luc, à la fin de la tentation au désert, que le « diable se retira d’avec lui pour un temps » et la note spécifie « jusqu’à un autre temps ». Voilà cet « autre temps » qui arrive. C’est celui dans lequel l’Ennemi va mobiliser toutes ses forces pour ébranler, et effrayer, si c’était possible, cet homme parfait qui veut demeurer obéissant à son Dieu. L’intention de Satan était de détourner Jésus de ce chemin d’obéissance et s’il était parvenu à ce but, jamais l’œuvre de la croix n’aurait été accomplie. Quelle victoire c’eût été pour le diable ! Mais Jésus avait dit à ses disciples (nous lisons cela à la fin du chapitre 14 de l’évangile de Jean) : « Le chef du monde vient, et il n’a rien en moi ». Satan ne pouvait trouver en Christ, dans son être moral, aucun point où il pût l’attaquer, rien pour le détourner du chemin d’obéissance dans lequel il s’était engagé. Par l’Esprit prophétique, il avait dit en entrant dans le monde : « Voici, je viens pour faire ta volonté » et il va en donner la preuve dans ces heures de Gethsémané.

Oui, Satan vient, Satan est là ! Et alors, quel combat ! Quelle angoisse ! Relisons ce que Jésus dit aux trois disciples qu’il avait pris avec lui quand il commença à être attristé et fort angoissé. Et si nous pouvions résumer en deux mots cette scène si touchante — que nous ne méditerons jamais trop, ces mots seraient : soumission et angoisse. D’un côté parfaite soumission ; de l’autre angoisse par l’anticipation de ce que serait la coupe qu’il allait recevoir de la main du Père. Et Satan se servait de cette angoisse pour essayer de le détourner de l’œuvre qu’il avait à accomplir.

Une coupe remplie de la colère de Dieu ; une coupe qui impliquait pour lui qu’il allait être abandonné de Dieu, qu’il allait descendre dans les profondeurs des abîmes où il serait seul et où il n’aurait plus aucune des consolations de l’amour de Dieu.

Il voyait tout cela d’avance et alors il commença à être attristé et fort angoissé disant aux trois disciples : « Mon âme est saisie de tristesse jusqu’à la mort ». La mort aux yeux du Seigneur Jésus, représentait la faiblesse totale, absolue, de l’homme, la victoire de Satan, l’apogée de son pouvoir. C’était aussi le châtiment du péché, la juste vengeance d’un Dieu qui ne pouvait renoncer à aucune des exigences de sa sainteté et de sa justice. La mort, c’était tout cela pour notre bien-aimé Sauveur, pour lui qui n’avait qu’un désir tout au long de sa carrière, et qui pouvait déclarer : « Moi, je fais toujours les choses qui lui plaisent » (Jean 8:29).

Voilà maintenant le chemin qui se présentait à Jésus dans toute son horreur à Gethsémané : d’où cette angoisse et cette tristesse jusqu’à la mort. Les prophètes avaient annoncé cela dans un passage du Psaume 55 (v. 4, 5) : « Mon cœur est dans l’angoisse au-dedans de moi, et des frayeurs mortelles sont tombées sur moi ; la crainte et le tremblement sont venus sur moi, et un frisson de terreur m’a couvert ».

Ce frisson de terreur a étreint l’âme de notre bien-aimé Sauveur, en cette heure de Gethsémané où il avait devant lui la croix et toutes les souffrances, non seulement physiques mais aussi morales, qui l’y attendaient. Il savait qu’il allait être fait péché ; il savait qu’il allait être la propitiation pour les péchés, lui le Saint et le Juste ; il savait qu’il allait être fait malédiction, car il écrit : « Maudit est quiconque est pendu au bois ». Il savait qu’il allait être abandonné de son Dieu dont il n’avait cessé de goûter la communion tout au long de sa carrière terrestre ; il savait qu’il allait passer par la mort, salaire du péché, et une souffrance s’ajoutait encore à toutes les autres : il ne lui était pas indifférent, comme homme, de devoir mourir à trente-trois ans. Lisons au Psaume:102 ce qu’il dit par l’Esprit prophétique : « Il a abattu ma force dans le chemin, il a abrégé mes jours. J’ai dit : Mon Dieu, ne m’enlève pas à la moitié de mes jours ! » (v. 23, 24). Pourquoi était-il étreint de tristesse à la pensée d’être enlevé à la moitié de ses jours ? La réponse nous est donnée au dernier verset du Psaume 55 : « Toi, ô Dieu ! tu les feras descendre dans les puits de la destruction : les hommes de sang et de fourbe n’atteindront pas la moitié de leurs jours ! » Il allait être assimilé à un homme de sang ! Il allait être traité comme un malfaiteur ! Et ce jugement que Dieu prononce contre ces hommes en les retirant à la moitié de leurs jours, Christ allait le subir lui aussi.

Tout cela était contenu dans la coupe qu’il allait recevoir de la main du Père et son angoisse s’explique par tout ce qui se présentait alors devant Lui. Cette angoisse nous est décrite dans Matthieu, mais nous trouvons dans Luc quelques détails supplémentaires. Il nous est dit au chapitre 22 (v. 44) : « Étant dans l’angoisse du combat, il priait plus instamment ». Plus Satan l’attaquait, plus il se confiait en Dieu, plus il recherchait la face de son Dieu, plus il invoquait son secours. Un ange vient le fortifier, mais la lutte se poursuit, l’angoisse ne cesse pas et sa sueur devient « comme des grumeaux de sang découlant sur la terre ». Voilà jusqu’où est allée cette angoisse de notre Seigneur Jésus, angoisse telle qu’aucun homme n’en a jamais éprouvé de semblable. Et si nous insistons sur ces points, c’est bien afin que nous y pénétrions quelque peu avec le secours de l’Esprit. En Matthieu, il tombe sur sa face ; en Marc, il se jette contre terre ; en Luc, il se met à genoux. En Matthieu, la face contre terre, il s’adresse à Dieu : « Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi », mais il ajoute aussitôt : « toutefois, non pas comme moi je veux, mais comme toi tu veux ». En Marc il emploie des termes encore plus forts : « Abba, Père, toutes choses te sont possibles ; fais passer cette coupe loin de moi ». Il emploie comme un impératif, auquel succède aussitôt l’expression d’une soumission totale. Et en Luc sa supplication prend le caractère d’un combat. Mais d’un tel combat, où Dieu a envoyé un ange pour le fortifier, il est sorti victorieux.

Le voilà qui se lève, parfaitement serein : il a pris de la main du Père la coupe que Celui-ci lui a donnée à boire. Il l’a reçue : il est pleinement d’accord avec le Père. Et s’il s’avance pour accomplir l’œuvre que Dieu lui avait donnée à faire, il est souverain et le montre en se présentant devant ceux qui viennent l’arrêter. Victoire totale de notre bien-aimé Sauveur, victoire à laquelle va succéder un autre triomphe : celui de la croix.

Mais il nous faut parler des disciples qui, dans cette circonstance, ont été une cause supplémentaire de peine pour le Seigneur. Il avait enjoint à ces trois disciples : « Demeurez ici et veillez avec moi ». Il ne leur avait pas demandé de prier pour Lui, mais de veiller avec Lui. Il avait désiré leur présence, leur vigilance. Et voilà que lorsqu’il revient vers eux, après sa première prière, il les trouve dormant : « Ainsi — leur dit-il — vous n’avez pas pu veiller une heure avec moi ? » et il leur adresse une exhortation : « Veillez et priez (non pas pour moi mais pour vous), afin que vous n’entriez pas en tentation ; l’esprit est prompt, mais la chair est faible ». Puis le Seigneur s’en va ; il revient une deuxième fois et il les trouve « de nouveau dormant ; car leurs yeux étaient appesantis ». Quelle souffrance pour le Seigneur ! Aucune compassion de la part de ses disciples, aucun intérêt, aucune participation à sa douleur : ils dorment ! Il ne nous appartient pas de les condamner mais c’est à Jésus que nous pensons, lui qui, dans ce combat qu’il soutenait contre Satan et en notre faveur, aurait désiré sentir les siens veillant avec lui à ce jet de pierre qui les séparait. Il ne leur demandait rien d’autre, et ce peu qu’il leur demandait, il ne l’a pas obtenu ! Il a fallu que ce soit un ange, créature qui n’a pas le même intérêt que les hommes dans le combat qu’il livre, qui vienne le fortifier. Nous avons déjà cité ce passage du Psaume 69 où Christ peut dire par l’Esprit prophétique : « J’ai attendu que quelqu’un eût compassion de moi, mais il n y a eu personne,... et des consolateurs, mais je n’en ai pas trouvé ». Et les disciples vont bientôt le laisser et s’enfuir. Souffrance sur souffrance : telle fut la part de Christ. Et nous pouvons citer encore ce verset du Psaume 88 : « Tu as éloigné de moi amis et compagnons ; ceux de ma connaissance me sont des ténèbres ». Remercions Dieu de nous avoir donné dans les prophètes et dans les psaumes des passages qui nous permettent d’entrer d’une manière plus précise dans ce qu’à été la souffrance de notre Bien-aimé. Le prophète Zacharie avait annoncé : « Épée, réveille-toi contre mon berger, contre l’homme qui est mon compagnon, dit l’Éternel des armées ; frappe le berger, et le troupeau sera dispersé », et en effet nous lisons en Matthieu : « alors tous les disciples le laissèrent et s’enfuirent » (26:56).

 

3.2   La trahison de Judas

Dans cette nuit où le Seigneur fut livré, deux autres sujets de souffrance ont accablé son âme. La première est la trahison de Judas. Être livré par un des siens : par un de ceux qui l’avaient suivi tout au long de son ministère, quelle immense douleur ! Judas avait été au bénéfice des soins de son Maître. Celui-ci lui avait manifesté une confiance toute particulière puisque nous lisons en Jean 12 qu’on lui avait confié la bourse ; mais il dérobait ce qu’on y mettait car il était voleur.

L’Esprit de Dieu attache une importance particulière à cette trahison de Judas ; car dans l’évangile de Jean, chaque fois que son nom est mentionné, il est ajouté « qui aussi le livra », et au chapitre 6 de cet évangile (v. 70) le Seigneur peut dire : « l’un d’entre vous est un diable ».

Ainsi nous pouvons comprendre un peu ce que fut pour le Seigneur le fait d’avoir dans son sillage celui dont il savait qu’il le livrerait, qu’il serait le traître (Ps. 55:12-14). Et dans quelles conditions a-t-il livré son Maître ? Il aimait l’argent ! Cela ressort des paroles qu’il adresse aux principaux sacrificateurs : « Que voulez-vous me donner, et moi, je vous le livrerai ? » Trente pièces d’argent : cela lui a suffi ! Il était satisfait de recevoir trente pièces d’argent pour livrer le Seigneur Jésus à ses ennemis et le conduire à la mort.

Si nous allons plus loin, nous voyons de quelle manière perfide et infâme Judas a livré son Maître : il cherchait une bonne occasion ! Dans Marc 14, « il cherchait comment il le livrerait commodément ». S’approchant du Seigneur il s’écrie : « Je te salue, Rabbi » et il l’embrasse avec empressement, c’est-à-dire avec une marque particulière d’affection — d’affection feinte. Jésus lui répond : « Ami, pourquoi es-tu venu ? » « Judas, tu livres le Fils de l’homme par un baiser ? » Mais rien ne pouvait plus atteindre sa conscience. Car après avoir reçu le morceau de la main même du Seigneur, ce qui était un geste particulier d’amitié, il avait encore endurci son cœur. Alors Satan était entré en lui et dès lors rien ne pouvait l’arrêter.

 

3.3   Le reniement de Pierre

Mais il fallait que s’ajoute à cette souffrance celle que lui causerait le reniement de Pierre.

Le récit qu’en fait Matthieu 26:69-75 montre une gradation dans les trois paroles de reniement. La première fois, il le nia devant tous, disant : je ne sais ce que tu dis ! La deuxième fois, il le nia avec serment, affirmant : je ne connais pas cet homme ! Et la troisième fois, il se mit à faire des imprécations et à jurer : Je ne connais pas cet homme ! Quelle dut être la peine du Seigneur devant la lâcheté de son disciple ! Et dans les termes dont Pierre s’est servi pour ce reniement, quel mépris ! « Je ne connais pas cet homme ! » celui même auquel il avait dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Matt. 16:16) et aussi, quelques heures auparavant : « avec toi, je suis prêt à aller et en prison et à la mort » (Luc 22:33).

Certes Pierre aimait le Seigneur Jésus, mais il se confiait en son amour à lui. « Je suis prêt à aller avec toi ». Le Seigneur l’a laissé en faire l’expérience après l’avoir averti : « avant que le coq chante, tu me renieras trois fois ». Et dans l’évangile de Luc, il est ajouté, au troisième reniement, lorsque le coq chanta : « Le Seigneur, se tournant, regarda Pierre ». Oh ! ce regard de Jésus ! Regard chargé certainement d’une tristesse indicible, mais aussi chargé de grâce, car Jésus avait en vue la restauration de son cher disciple. Ce n’est pas le coq qui, en chantant, a réveillé Pierre, qui l’a amené à se ressouvenir des paroles de Jésus, mais c’est le regard de Jésus... Et nous savons la suite, avec quelle persévérance, avec quel amour touchant, le Seigneur a poursuivi cette œuvre de restauration jusqu’au dernier chapitre de l’évangile de Jean où il confie à Pierre rien de moins que le soin de paître ses brebis.

 

3.4   Condamnation du Seigneur

3.4.1       Condamnation par les chefs religieux

Revenons à l’ultime étape du chemin de notre Seigneur : sa condamnation d’une part par les chefs religieux de son peuple, de l’autre par l’autorité civile instituée par Dieu pour faire régner la justice.

Condamnation du Juste par les chefs religieux de son peuple ! Et nous pouvons remarquer que, dès le début, leur décision était déjà prise. Il nous est dit positivement qu’ils cherchaient — tout le sanhédrin — quelque faux témoignage contre Jésus, de manière à le faire mourir. Ils ne cherchaient pas à établir la vérité, ils ne cherchaient pas à recueillir de vrais témoignages, mais ils en cherchaient de faux, et l’Esprit a bien tenu à ce que ce détail soit consigné pour faire ressortir l’entière responsabilité de ces juges coupables qui se sont comportés comme des criminels. Lorsque les faux témoins exposent leurs faux témoignages, le Seigneur garde le silence. Il est là comme il le sera jusqu’au bout, comme un agneau qui est mené à la boucherie, comme une brebis muette devant ceux qui la tondent. Il sera — ainsi que l’annonce le Psaume 38 — comme un sourd qui n’entend pas, comme un muet qui n’a point de réplique. Quel mystère ! Et voici tout d’un coup Caïphe, le souverain sacrificateur, qui se lève et interpelle : « Je t’adjure, par le Dieu vivant, que tu nous dises si toi, tu es le Christ, le Fils de Dieu ». Alors, face à cette adjuration, celui qui est la Vérité répond : « Tu l’as dit ». Il ajoute ces paroles solennelles : « De plus, je vous dis : dorénavant vous verrez le Fils de l’homme assis à la droite de la puissance, et venant sur les nuées du ciel » (Matt. 26:64).

Alors Caïphe, ayant entendu la réponse du Seigneur, provoque la décision. Mais remarquons bien que devant le sanhédrin, comme devant Pilate tout à l’heure, ce ne sont pas les faux témoignages des hommes qui ont constitué le motif de sa condamnation. C’est son vrai témoignage à lui, le témoignage à la vérité, le témoignage à ce qu’il était : « Oui, je suis le Fils de Dieu » et c’est cela qui, chez ces hommes méchants, va entraîner sa condamnation : « Qu’avons-nous encore besoin de témoins... Il mérite la mort ». Et aussitôt ils ne peuvent plus contenir les manifestations de leur haine contre le Seigneur : ils se lèvent, le couvrent de crachats, lui donnent des soufflets, et on peut dire que cette violence qui commence à se manifester ici contre le Fils de Dieu va se poursuivre sans trêve jusqu’au moment de sa crucifixion. Il nous faut revenir à ce que l’Esprit prophétique nous révèle des sentiments du Seigneur dans ces moments-là, face à cette condamnation injuste et à ces traitements odieux de la part des chefs de son peuple : « Car à cause de toi j’ai porté l’opprobre, la confusion a couvert mon visage. Je suis devenu un étranger à mes frères, et un inconnu aux fils de ma mère ; car le zèle de ta maison m’a dévoré, et les outrages de ceux qui t’outragent sont tombés sur moi » (Ps. 69:7 à 9). Effectivement la haine de ces chefs s’élevait contre Dieu lui-même et les outrages qu’ils adressaient au Seigneur, c’est à Dieu qu’ils étaient destinés. Alors s’accomplit cette parole prophétique : « J’ai donné mon dos à ceux qui frappaient, et mes joues à ceux qui arrachaient le poil ; je n’ai pas caché ma face à l’opprobre et aux crachats » (És. 50:6).

 

3.4.2       Condamnation par Pilate

Lorsqu’il comparaît devant Pilate, nous voyons que, là aussi, ce ne sont pas les accusations des Juifs qui seront le motif de la condamnation de Jésus, mais bien ce que lui-même dit au début de son interrogatoire. Quand Pilate lui demande : « Es-tu, toi, le roi des Juifs ? », il répond : « Tu le dis ». Devant son peuple, Jésus a proclamé qu’il était Fils de Dieu ; devant l’autorité civile, il proclame qu’il est le roi des Juifs. Et c’est sur ce point-là que va reposer la condamnation du Seigneur par Pilate, comme le confirme l’écriteau que celui-ci fait et qu’il place au-dessus de la croix. Marc précise au chapitre 15 (v. 26) que l’écriteau concernant le sujet de son accusation portait écrit : « Le roi des Juifs », en hébreu, en grec et en latin.

Nous connaissons la réaction des chefs religieux qui disent à Pilate : « N’écris pas : Le roi des Juifs ; mais que lui a dit : Je suis le roi des Juifs » et le gouverneur de répondre : « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit ». Pilate, sans s’en rendre compte, était un instrument entre les mains de Dieu pour proclamer qu’effectivement celui qui était crucifié était bien le Messie, le roi de son peuple.

Nous ne nous arrêterons pas à la proposition de Pilate de relâcher « Barabbas » ni à la réponse unanime du peuple, poussé par ses chefs, mais cela aussi a été une souffrance pour notre bien-aimé Sauveur. Ils lui ont préféré un meurtrier. Ensuite les soldats ameutèrent contre lui toute la cohorte — plusieurs centaines de soldats qui vont exercer contre Jésus toute leur brutalité, toute leur grossièreté. Moquerie, blasphèmes, violences, rien n’a été épargné à notre bien-aimé Sauveur ; et il n’a pas ouvert sa bouche. Pensons à Lui, dans cette scène horrible : le visage tuméfié par les coups, couvert par les crachats. Il vient d’être flagellé. Selon la loi romaine, seuls des criminels particulièrement coupables pouvaient être soumis à ce supplice et pourtant Pilate venait de proclamer à plusieurs reprises : « Il est innocent. Je ne trouve aucun crime en cet homme ». Oui, il nous faut le contempler dans cette ignominie pour discerner la gloire morale qui brille sur son front. Et ce n’étaient pas encore les souffrances de la croix. Après s’être moqués de lui, ils lui ôtent le manteau, le revêtent de ses vêtements et vont l’emmener pour le crucifier... Il a tout supporté. Pourquoi ? Par obéissance à son Dieu ! Il ne pouvait, en aucune manière, dévier du chemin tracé.

« Il s’est abaissé lui-même, étant devenu obéissant jusqu’à la mort, et à la mort de la croix ». Voilà le chemin qu’il suivait et qu’il suivra jusqu’à son terme, jusqu’à ce qu’il ait accompli l’œuvre de notre salut.

 

Amour impossible à comprendre,

Le Fils de Dieu, le Créateur,

Vers nous, pécheurs, voulut descendre

Sous les traits du vrai Serviteur.

 

Ce grand amour qui s’humilie,

Plus bas encore est descendu :

Le Fils de l’homme offre sa vie

Et meurt pour un monde perdu !

 

Voilà le but qui était devant lui et il va aller jusqu’au bout, jusqu’à l’instant où il pourra proclamer, dans un cri de victoire : « C’est accompli ! »

 

4                    « Pour sauver ta créature, Tu fus l’homme de douleurs »

4.1   Le chemin de la croix

Nous arrivons maintenant à l’heure de la croix, ultime étape de ce long et douloureux chemin. C’était « l’élément principal » — si l’on peut s’exprimer ainsi — de ce que le Seigneur appelait : « Mon heure ». « Jésus sortit, portant sa croix ». Il était entré dans ce monde (Jean 10) comme un petit enfant né dans une étable, couché dans une crèche et, jusqu’à la croix, il a été l’homme de douleurs. Cette dernière scène que nous abordons sera la plus douloureuse de toutes.

Jésus « sortit portant sa croix... » L’évangile de Jean, qui nous présente le Seigneur Jésus comme le Fils de Dieu, ne parle pas de l’intervention de Simon le Cyrénéen que les soldats romains contraignirent de porter la croix de Jésus.

Les hommes ont inventé une histoire à ce sujet, prétendant que le Seigneur était tellement affaibli qu’il ne pouvait pas porter sa croix et que c’est pour cela qu’on avait contraint Simon le Cyrénéen de le faire à sa place. La Parole ne nous dit rien de semblable, et nous lisons ici que Jésus porte sa croix. S’il avait fallu, il l’aurait portée jusqu’au Calvaire. N’ajoutons pas à l’Écriture ce qu’elle ne nous dit pas.

Il n’était pas seul à porter une croix. Deux brigands, deux criminels condamnés à mort lui font escorte. Voilà la compagnie dans laquelle le Seigneur a été placé par les chefs du peuple. Est-ce que nous nous représentons ce cortège ? De ces trois hommes qui vont être crucifiés, l’un est le Fils de Dieu venu en chair, celui dont l’innocence a été proclamée plusieurs fois par Pilate ; et il était là ayant déjà subi le supplice de la flagellation ainsi que toutes les brutalités, toutes les humiliations dont nous nous sommes entretenus précédemment. Il s’avance, ne se défend pas, suit son chemin, chemin d’obéissance dans lequel il n’a qu’un but, qu’une pensée : accomplir la volonté de Dieu. Et l’accomplissement de cette volonté comportait aussi cette scène : les soldats, la foule, les chefs du peuple, tout le peuple de Jérusalem, tout ce cortège bruyant, haineux, qui accompagne Jésus portant sa croix.

Il sort de Jérusalem, la ville qui tue les prophètes, et qui lapide ceux qui lui sont envoyés, parce qu’il fallait qu’il souffre hors de la porte. Il était le parfait bouc Azazel chargé des péchés de son peuple, chassé hors du camp d’Israël. Il va souffrir et mourir hors de la porte, hors de Jérusalem.

 

4.2   Golgotha

Ils arrivent à Golgotha. Quel puissant écho ce lieu n’a-t-il pas évoqué au long des âges dans le cœur des croyants ! Golgotha ! Le lieu où le Fils de Dieu a été élevé de la terre comme il l’avait annoncé : « Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme ». Voici l’heure qui s’approche. Golgotha ! Le lieu où il a accompli pour nous une rédemption éternelle ; le lieu où il a pleinement glorifié Dieu. Golgotha ! Le lieu où le Seigneur va être abandonné de son Dieu, où, dans une solitude totale, descendant dans les profondeurs des abîmes, il va être frappé de Dieu qui détourne sa face de lui. Oui, Golgotha, c’est tout cela. Puisse ce nom, placé une fois de plus par l’Esprit devant nos cœurs, ranimer en nous de saintes affections pour notre bien-aimé Sauveur, car c’est le lieu où il a été conduit et où se sont déroulés ces événements qui touchent à l’éternité ! Événements qui constitueront le thème éternel de notre louange quand nous serons réunis autour de lui, dans la maison du Père.

« Ils le crucifièrent, et deux autres avec lui, un de chaque côté, et Jésus au milieu ». Admirons une fois de plus la sobriété de la parole de Dieu. Aucun lyrisme, pas de détails ; une sobriété éloquente qui nous montre avec une évidence flagrante ce que l’homme a fait de Dieu manifesté en chair. Voilà la place que l’homme a donnée au Seigneur Jésus : une croix sur laquelle il l’a cloué, avec un brigand à sa droite, un autre brigand à sa gauche. Quelle souffrance morale ! Il ne lui était pas indifférent d’être mis au rang des iniques, comme il l’a annoncé par l’Esprit prophétique, d’être « compté parmi les transgresseurs ». Et si cela a été écrit près de 750 ans avant que le fait se réalise, c’est bien que ce fait devait comporter pour Christ une souffrance profonde. Les Psaumes et les prophètes sont là pour nous aider à le comprendre.

« Je suis devenu semblable au pélican du désert ; je suis comme le hibou des lieux désolés. Je veille, et je suis comme un passereau solitaire sur un toit » (Ps. 102:6, 7).

Quelle solitude que celle du Seigneur Jésus sur la croix ! Tous les disciples l’avaient abandonné. Tous sont contre lui. Et finalement, Dieu l’abandonne. Remarquons en passant que ces images du pélican et du hibou correspondent à deux oiseaux impurs : il y a une leçon en cela pour nous, manifestement : les hommes ont traité la personne sainte du Seigneur Jésus comme un homme impur, comme un transgresseur et notre attention est attirée sur cette réalité par le Saint Esprit.

« Car des chiens m’ont environné, une assemblée de méchants m’a entouré ; ils ont percé mes mains et mes pieds ; je compterais tous mes os. Ils me contemplent, ils me regardent ; ils partagent entre eux mes vêtements, et sur ma robe ils jettent le sort. Et toi, Éternel ! ne te tiens pas loin ; ma Force ! hâte-toi de me secourir. Délivre mon âme de l’épée, mon unique de la patte du chien. Sauve-moi de la gueule du lion » (Ps. 22:16-21). Tous ces gens qui entourent le Seigneur sont appelés des chiens — animal impur aussi — une assemblée de méchants. Il annonce prophétiquement : « ils ont percé mes mains et mes pieds » ; ils partagent entre eux mes vêtements, et sur ma robe ils jettent le sort ». Quand nous lisons de tels passages, comment comprendre qu’il y ait encore des incrédules ! Voilà des portions de la parole de Dieu qui ont été écrites environ dix siècles avant que ne se réalisent les événements auxquels ils se rapportent, et ils sont d’une telle précision — même dans les détails — que nous ne pouvons qu’admirer la perfection de cette Parole.

Mais revenons à notre sujet : les souffrances de la crucifixion. Relisons au Psaume 22, le verset 14 : « Je suis répandu comme de l’eau, et tous mes os se déjoignent ; mon cœur est comme de la cire, il est fondu au-dedans de mes entrailles ». Nous savons qu’il s’agit là d’un langage symbolique, mais ce sont des paroles par lesquelles l’Esprit veut exprimer les souffrances physiques de la crucifixion. Ce supplice était si cruel que pour abréger leurs souffrances, on brisait les jambes des suppliciés, ce qui eut lieu pour les deux brigands. Il fut, comme dit l’apôtre dans la première épître aux Corinthiens, « crucifié en infirmité ». Lui, le Fils de Dieu, le Tout-Puissant, qui a manifesté une puissance divine extraordinaire, ressuscitant des morts, guérissant des malades, délivrant ceux qui étaient assujettis à la puissance de Satan, a accepté d’être « crucifié en infirmité ».

 

4.3   Souffrances morales des trois premières heures de la croix

Mais arrêtons-nous maintenant aux souffrances morales que le Seigneur a rencontrées dans les trois premières heures de la croix. Matthieu 27, aux versets 39-44, nous en fait le récit : « Ceux qui passaient par là l’injuriaient, hochant la tête, et disant : Toi qui détruis le temple et qui le bâtis en trois jours, sauve-toi toi-même. Si tu es Fils de Dieu, descends de la croix. Et pareillement aussi les principaux sacrificateurs avec les scribes et les anciens, se moquant, disaient : Il a sauvé les autres, il ne peut se sauver lui-même ; s’il est le roi d’Israël, qu’il descende maintenant de la croix, et nous croirons en lui. Il s’est confié en Dieu ; qu’il le délivre maintenant, s’il tient à lui ; car il a dit : Je suis Fils de Dieu. Et les brigands aussi qui avaient été crucifiés avec lui l’insultaient de la même manière ».

Une première constatation nous frappe dans ce court paragraphe, c’est le grand nombre de personnes qui sont mentionnées ici ; nous y voyons d’abord ceux qui passaient par là, la foule anonyme des curieux, puis les principaux sacrificateurs, puis les scribes, et puis les anciens, et pour finir les brigands. Or nous trouvons une évocation de cette scène au Psaume 57:4 : « Mon âme est au milieu de lions ; je suis couché parmi ceux qui soufflent des flammes, — les fils des hommes, dont les dents sont des lances et des flèches, et la langue une épée aiguë ». Ne retrouvons-nous pas dans ces expressions, comme un reflet de la souffrance infligée au Seigneur Jésus par les paroles de méchanceté et de moquerie qui lui étaient adressées ? Il était victime de ce venin mortel — comme l’appelle l’apôtre Jacques — qui produisait dans ce cœur si divinement sensible, une souffrance intense. Voilà ce qu’il doit entendre de la bouche de tous ses ennemis qui étaient là devant lui, eux auxquels cependant il avait témoigné, tout au long de sa carrière, une grâce inlassable. Dans le Psaume 22, nous avons un autre écho de cette souffrance : « Tous ceux qui me voient se moquent de moi ; ils ouvrent la bouche, ils hochent la tête : il se confie à l’Éternel : qu’il le fasse échapper, qu’il le délivre, car il prend son plaisir en lui !... Beaucoup de taureaux m’ont environné, des puissants de Basan m’ont entouré ; ils ouvrent leur gueule contre moi, comme un lion déchirant et rugissant ». Et aussi au Psaume 69 :4: « Ceux qui me haïssent sans cause sont plus nombreux que les cheveux de ma tête ».

Ces passages nous permettent d’entrer un peu dans ces souffrances que notre adorable Sauveur a éprouvées du fait de tous ses adversaires qui ne cessaient de déverser sur lui leur haine, par leurs moqueries, leurs sarcasmes, leurs défis.

Mais le Seigneur Jésus n’a jamais douté qu’il ne puisse être délivré par Dieu ; sa confiance en Dieu ne l’a jamais quitté et nous voyons cela au Psaume 3 où ce qu’exprime l’Esprit prophétique paraît bien se lier à ce moment de la croix : « Éternel ! combien sont multipliés mes ennemis, et sont nombreux ceux qui s’élèvent contre moi. Beaucoup disent de mon âme : Il n’y a point de salut pour lui en Dieu... Mais toi, Éternel ! tu es un bouclier pour moi ; tu es ma gloire et celui qui élève ma tête » (v. 1-3). Même à ce moment-là, au milieu de cette foule haineuse d’adversaires, où tous étaient contre lui, où notre Sauveur était submergé par le grand nombre de ses ennemis — et il le dit — il ne s’est pas départi de sa confiance en Dieu : « Tu es ma gloire et celui qui élève ma tête ».

 

4.4   Les «trois heures sombres»

Passons maintenant au paragraphe suivant, Matthieu 27:45 ss : « Mais, depuis la sixième heure, il y eut des ténèbres sur tout le pays, jusqu’à la neuvième heure. Et vers la neuvième heure, Jésus s’écria d’une forte voix, disant : Éli, Éli, lama sabachthani ? c’est-à-dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Une première remarque : la brièveté de la Parole sur ces instants qui marquent le sommet des souffrances de notre Sauveur. Il y a là manifestement une sainte réserve de la part du Saint Esprit et nous pouvons en tirer une leçon. Abordons une telle scène avec retenue et dans le sentiment de la sainteté de ce qui est placé devant nous.

« Mais, depuis la sixième heure... » Ce « Mais » marque une césure entre ce qui a précédé et ce qui va se passer. C’est le commencement des souffrances expiatoires, c’est le moment où va se réaliser ce que nous lisons en particulier en Ésaïe 53 : « Il plut à l’Éternel de le meurtrir ; il l’a soumis à la souffrance ». C’est le moment où il va offrir son âme en sacrifice pour le péché, où il va livrer son âme à la mort. C’est là que s’accomplit « le travail de son âme ». Toutes ces expressions nous font pénétrer au cœur des souffrances de notre Seigneur et Sauveur tout en restant là, à distance. Les hommes sont mis de côté, on ne les entend pas durant ces trois heures de ténèbres. Ils n’ont plus rien à dire.

Mais c’est Dieu que Jésus va rencontrer comme un juge, un juge qui ne peut renoncer à aucune des exigences de sa justice et de sa sainteté vis-à-vis même de son propre Fils bien-aimé, celui qui toujours, n’avait recherché qu’une chose : le glorifier et faire sa volonté. C’est que Dieu va déverser sur lui les flots de sa colère, tandis qu’il s’écriera : « Un abîme appelle un autre abîme à la voix de tes cataractes ; toutes tes vagues et tes flots ont passé sur moi ». Expressions symboliques qui nous aident un peu à comprendre cette indicible souffrance ! Nous contemplons de loin en adorant car en effet c’est là que notre Seigneur a été fait péché pour nous afin que nous devenions justice de Dieu en Lui. C’est là qu’il est devenu malédiction, car il est écrit : Maudit est quiconque est pendu au bois. Alors Dieu détourne sa face de lui. Il nous faut lire quelques versets dans les Lamentations de Jérémie qui, tout en s’appliquant directement à la souffrance du prophète à cause de la ruine de Jérusalem donnent une expression à ce qu’un homme fidèle peut éprouver en traversant un tel châtiment de la part de Dieu, châtiment rendu nécessaire par les péchés du peuple. Sans être proprement celles de l’expiation, dans lesquelles personne, sinon Christ, ne pouvait entrer, ces paroles nous amènent au seuil de cet abîme. Au chapitre 3, versets 1-15 : « Je suis l’homme qui ai vu l’affliction par la verge de sa fureur. Il m’a conduit et amené dans les ténèbres, et non dans la lumière. Certes c’est contre moi qu’il a tout le jour tourné et retourné sa main... Il a fait une clôture autour de moi... Même quand je crie et que j’élève ma voix, il ferme l’accès à ma prière. Il a barré mes chemins avec des pierres de taille ; il a bouleversé mes sentiers ». Au verset 43 : « Tu t’es enveloppé de colère », au verset 44 : « Tu t’es enveloppé d’un nuage, de manière à ce que la prière ne passât point ». Alors se sont réalisées aussi les paroles du Psaume 22 où Dieu s’est tenu loin de son salut, des paroles de son rugissement. Il n’y a eu à ce moment-là pour lui aucune consolation et, quand il élevait ses yeux vers le ciel, il n’y rencontrait qu’un trône de justice, et d’une justice inflexible, un trône entouré des nuages de la colère. Ce sont des images symboliques dont la Parole se sert pour nous aider à mesurer ce qu’a été la part de notre bien-aimé Sauveur. Il convient que nous nous arrêtions aux détails que nous rapportent les versets 45 et 46 de Matthieu 27. Depuis la sixième heure, il y eut des ténèbres sur tout le pays. Pourquoi des ténèbres ? Il convenait qu’au moment où Dieu mettait son Bien-aimé dans des lieux ténébreux — comme il est dit au Psaume 88:6 — toute la création soit plongée dans les ténèbres physiques. Il convenait que tous les êtres, toutes les choses, soient enveloppés de ce voile ténébreux, car il se déroulait une scène unique dans les annales de la terre et du ciel : Dieu, le Dieu juste frappait son propre Fils.

Dieu se détourne de lui et cache sa face. Quand nous pensons à cette communion dont le Seigneur Jésus n’a cessé de jouir avec son Dieu tout au long de sa carrière terrestre... ! Elle était de tous les instants, c’est pourquoi il peut dire en vérité : « Le Fils de l’homme qui est dans le ciel ». Vient le moment où l’homme parfait est privé de cette communion. Elle est interrompue ! Pourquoi ? Parce qu’il est là comme la propitiation pour nos péchés, comme le Péché personnifié ; il est le serpent d’airain dressé sur la perche ! Le Dieu juste et saint ne peut alors que détourner ses yeux de lui et l’abandonner.

Tout ce que Dieu était dans sa nature, en sainteté, en justice, en lumière, en gloire, en majesté, était nécessairement contre le péché. Or voilà que ce Dieu juste et saint a devant lui un Être dans lequel le péché est pour ainsi dire incorporé, qui est chargé de l’immense fardeau de toutes nos fautes. Dieu va-t-il renoncer à tout ce qui constitue sa nature ? Non, il revendique tous ses droits face à cet homme qui est son Fils et l’abandonne, parce qu’il ne peut faire aucune concession aux exigences de sa justice, de sa sainteté et de sa gloire que nous, nous avions foulées aux pieds comme pécheurs. Et c’est Christ qui prend notre place sous le courroux de Dieu et qui est abandonné.

 

Quand vint l’heure suprême

Tu fus abandonné,

Le Dieu très-saint lui-même

De toi s’est détourné.

Insondable mystère,

Toi, l’objet de son cœur,

Rencontras sa colère,

Dans toute sa rigueur.

 

5                    « Pour toi, Jésus, la souffrance, les pleurs, la mort, l’abandon ! »

Comprendrons-nous jamais, même dans la gloire, ce qui s’est déroulé entre un Dieu immuable dans tous les attributs de sa gloire et son Bien-aimé, volontairement offert pour le sacrifice suprême, pour l’expiation de nos péchés ? Sujet inépuisable d’adoration pour nos cœurs, et en même temps mystère que nous ne sonderons jamais !

 

5.1   Après les trois heures sombres – Pourquoi m'as-tu abandonné ?

« Vers la neuvième heure, Jésus s’écria d’une forte voix, disant : Éli, Éli, lama sabachthani ? c’est-à-dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Matt. 27:46). Vers la neuvième heure (qui correspond à 15 heures pour nous) notre Seigneur pousse ce cri déchirant. Il avait, dans toutes les souffrances qui nous ont occupés jusqu’à maintenant, gardé le silence. Les lèvres closes, il avait été mené comme un agneau à la boucherie, il avait été comme une brebis muette devant ceux qui la tondent et pourtant, quelles injures, quelles douleurs il avait rencontrées ! Il n’a rien dit, il n’a fait aucun geste pour se protéger. Jésus a reçu les coups, les soufflets, sans un mot ; mais maintenant, au terme des trois heures de ténèbres, au moment où sa souffrance atteint ce degré suprême d’intensité, il ne peut plus retenir son cri. Et il est remarquable de constater que l’Esprit nous le donne dans les termes mêmes dont le Seigneur s’est servi, en langue araméenne, comme s’il voulait que nous l’entendions, nous aussi, « Éli, Éli ! Dieu Fort, mon Dieu Fort, mon Dieu Saint ! »

Avons-nous jamais entendu Jésus au cours de sa carrière parler à Dieu dans ces termes ? Jamais... ! En Matthieu 11, alors qu’il constate l’échec de son service à l’égard des villes dans lesquelles il avait accompli la plupart de ses miracles et qu’il prononce les malheurs contre Chorazin, Bethsaïda, Capernaüm, que dit-il ? « Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre », et il ajoute : « Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi ». Dans la prière qu’il adresse pour les siens, il s’adresse au Père : « Père saint » et un peu plus loin : « Père juste ». À Gethsémané, il dit : « Père », et même « Abba Père ». En dépit de l’heure tragique qu’il traversait, il jouissait intégralement de la communion avec son Dieu, son Père. Mais ici, dans le cri, plus de communion, plus rien de l’amour du Père pour Lui ! « Éli, Éli (Mon Dieu Fort), pourquoi m’as-tu abandonné ? »

À ce « pourquoi » nous pouvons donner la réponse ; en fait, c’est nous qui sommes la réponse, car il est dit dans l’Écriture qu’il a été frappé pour nos transgressions, qu’il a été meurtri pour nos iniquités, que le châtiment qui nous apporte la paix a été sur Lui et que par ses meurtrissures nous sommes guéris, ainsi nous pouvons bien dire que nous sommes la réponse à ce « pourquoi ». Plus exactement, nous sommes une réponse, parce qu’il y en a d’autres et qui sont peut-être d’un niveau plus élevé, plus glorieux encore que celle-là. Il y a avant tout la gloire de Dieu. Il fallait, pour que Dieu soit glorifié, que tous ses droits soient rétablis vis-à-vis de l’homme et ils ne pouvaient l’être que par la soumission absolue de Christ allant jusqu’à l’abandon de Dieu.

Mais n’y a-t-il pas comme une troisième réponse à ce grand « pourquoi » de la croix : la glorification de Christ. Nos cœurs se réjouissent de savoir que Dieu n’a pas attendu pour le glorifier : il l’a fait dès son élévation dans la maison du Père et il en a donné témoignage en envoyant le Saint Esprit sur la terre. Comme Pierre le déclare aux Juifs en Actes 2:33 : « Ayant donc été exalté par la droite de Dieu, et ayant reçu de la part du Père l’Esprit Saint promis, il a répandu ce que vous voyez et entendez ». La glorification de notre bien-aimé Seigneur et Sauveur: voilà une réponse précieuse à ce « pourquoi ».

« Pourquoi m’as-tu abandonné ? » Nous pouvons aussi nous arrêter à ce petit mot « tu ». Pour Jésus, la souffrance des souffrances, c’est qu’il était abandonné de son Dieu, c’est qu’il subissait les coups de la justice de Celui qu’il n’avait cessé de glorifier. « Toi, que j’ai glorifié, toi qui as été pour moi tout au long de ma carrière, le Père avec lequel j’ai entretenu une communion si douce et si permanente. Pourquoi toi ? Pourquoi m’as-tu, toi, abandonné ? » Et si nous lisons le Psaume 88, dont plusieurs versets décrivent des peines et des douleurs dans lesquelles Christ est pleinement entré, nous serons frappés de retrouver ce « tu » et ce « toi » et de constater qu’ils reviennent comme un leitmotiv. Cela nous aide à comprendre que l’essentiel de la souffrance du Seigneur dans cet abandon, c’est le fait que c’était son Dieu qui le lui infligeait ; la colère qui se déversait sur Lui procédait de son Dieu. « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » Le Seigneur, dans ce moment était réellement abandonné ; totalement seul. Il portait, « sous ce poids d’un moment... l’éternité de notre châtiment ».

 

5.2   Prenant le vinaigre – afin que l’Écriture fût accomplie

Ajoutons encore quelques pensées au sujet de la fin des heures de la croix. Nous lisons en Jean 19:28-30 : « Après cela Jésus, sachant que toutes choses étaient déjà accomplies, dit, afin que l’Écriture fût accomplie : J’ai soif. Il y avait donc là un vase plein de vinaigre. Et ils emplirent de vinaigre une éponge, et, l’ayant mise sur de l’hysope, ils la lui présentèrent à la bouche. Quand donc Jésus eut pris le vinaigre, il dit : C’est accompli. Et ayant baissé la tête, il remit son esprit ». Certes, le Seigneur ressentait une soif physique intense, mais n’éprouvait-il pas aussi une soif spirituelle ? Puisque toutes choses étaient déjà accomplies, il avait, lui le céleste Étranger, comme une soif ardente de quitter ce monde, de retourner au Père, de rentrer dans sa demeure, de goûter les plaisirs de la droite de Dieu, loin de cette scène de misère, de haine, de péché et de mort dans laquelle il avait vécu trente-trois ans et où il avait éprouvé toutes ces souffrances. Et aussitôt après avoir pris le vinaigre, il dit : « C’est accompli ». Il est remarquable que, pour cette expression, le texte original utilise une forme verbale qui n’existe pas en français et qui caractérise un acte accompli une fois et qui se perpétue : « c’est accompli et cela reste accompli ». Cela souligne le fait que l’œuvre de la croix a été accomplie parfaitement dans son déroulement, mais aussi que sa valeur est éternelle ; et c’est le Seigneur Jésus lui-même qui le proclame. C’est lui qui nous dit cela et quelle sécurité cela nous donne ! Si de faux docteurs viennent tordre les Écritures au sujet de la pleine et éternelle valeur de l’œuvre de la croix, écoutons la voix même du Seigneur qui nous dit : « C’est accompli ». Mon Sauveur l’a dit lui-même ; par conséquent c’est une œuvre parfaite à laquelle il n’y a rien à ajouter et qu’il n’est pas nécessaire de renouveler.

 

5.3   C’est accompli

« C’est accompli » : un cri de triomphe après le cri déchirant de douleur suprême. Le Seigneur n’a pas été épuisé par les heures de la croix, comme certains l’ont prétendu ; il possède encore toute sa force pour crier d’une forte voix : « C’est accompli ». La volonté de Dieu est accomplie, l’œuvre que le Père lui avait donnée à faire est achevée, le salut des pécheurs est assuré, la gloire de Dieu est revendiquée : tout est accompli. Tout ce que le Père voulait mener à bien par cette œuvre est maintenant définitivement, éternellement achevé et, bien plus encore qu’au lendemain de la création, Dieu a pu considérer tout ce que son Bien-aimé a fait, « et voici, cela était très bon » (Gen. 1:31). Et pour nous il reste la paix et la joie qu’apporte dans nos cœurs ce cri de victoire de notre Sauveur.

 

6                    Conclusion

Nous avons pu ainsi, chers amis, considérer, au cours de ces méditations, ce que notre Seigneur a souffert. Nous avons conscience de l’avoir fait bien incomplètement. C’est un sujet infini, et nous ne l’épuiserons jamais. Nous y découvrirons toujours de nouvelles merveilles. Mais dans ce que nous avons pu contempler ensemble, nos cœurs, je le souhaite, ont été émus devant de telles souffrances, endurées avec une telle soumission. Quels enseignements pourrons-nous alors tirer de ce que l’Esprit a placé devant nos yeux ? Trois au moins sur lesquels il faut nous arrêter :

 

6.1   L’amour du Christ nous étreint » (2 Cor. 5:14)

Premièrement, le fait que toutes ces souffrances expriment d’une manière sublime l’immensité de son amour envers nous. L’apôtre pouvait dire : « L’amour du Christ nous étreint » (2 Cor. 5:14). Est-ce que nous nous laissons étreindre par l’amour du Christ ? S’il en est ainsi, nous réaliserons la suite du passage : « afin que ceux qui vivent » — qui vivent de la vie de Christ — « ne vivent plus pour eux mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité ». Il me semble que c’est là une des conclusions majeures que nous pouvons tirer de ces méditations. Qu’aimant mieux le Seigneur, ayant comme touché du doigt la qualité de son amour à Lui, nous ayons à cœur de répondre à cet amour par un dévouement plus grand pour sa personne et par un service plus fidèle pour Lui ! Cela comprend tout : l’apôtre ne parle pas de ceux qui le servent, mais de ceux « qui vivent » : cela englobe tous les secteurs de notre vie, toute notre activité : une recherche continuelle de ce qui glorifie le Seigneur.

 

6.2   Ne pas prendre le péché à la légère – Sainteté – Colossiens 1:9

Deuxième conclusion: nous savons que le Seigneur Jésus a souffert pour nos péchés durant les trois heures de ténèbres. Et il a rencontré toutes les autres formes de souffrance sur le chemin qui conduisait à ces heures de la croix. Est-ce que, après cela, nous allons prendre le péché à la légère ? Sachant ce qu’il en a coûté à Christ pour nous délivrer de la puissance du péché, nous délivrer du pouvoir de Satan, nous délivrer du jugement que nous méritions, n’aurons-nous pas à cœur de suivre un chemin de sainteté, de marcher d’une manière qui soit à sa gloire ? L’apôtre exprime ce désir dans son épître aux Colossiens chapitre 1:9 : « que vous soyez remplis de la connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle, pour marcher d’une manière digne du Seigneur pour lui plaire à tous égards » ! Voilà, semble-t-il, la seconde conclusion qui découle de ce que l’Esprit a placé devant nous.

 

6.3   Viens, Seigneur Jésus !

J’en ajouterai une troisième : Nous avons parlé du « travail de son âme » selon l’expression d’Ésaïe 53 et cette expression est liée au fruit que le Seigneur va recueillir : « il verra du fruit du travail de son âme, et sera satisfait ». Le mot travail implique fatigue et souffrance. Sachant combien le Seigneur se réjouit à la pensée de recueillir bientôt son épouse auprès de Lui, celle pour laquelle « il s’est livré », celle qu’il « nourrit et qu’il chérit » comme le dit l’apôtre en Éphésiens 5, n’aurons-nous pas à cœur aussi de l’attendre avec plus de réalité ? Que sa venue ne soit pas pour nous une vérité abstraite mais un vrai besoin de nos cœurs ! Unissons nos voix à celle de l’Esprit qui, avec l’Épouse, répète : « Viens, Seigneur Jésus ! »

« Affirmer » c’est « affermir » disait un de nos frères. Si nous affirmons le désir de voir notre Seigneur Jésus, ce désir sera affermi en nous. Que l’Esprit agisse en chacun de nous pour affermir le désir de voir enfin face à face celui qui nous a tant aimés, celui qui a tant souffert pour nous, afin de contempler — et nous le ferons durant l’éternité — les marques des souffrances de la croix sur son corps glorieux, preuve sublime et sans égale de son amour pour nous.

C’est Lui, bien-aimés, qui, à la fin du saint Livre, rendant témoignage de ces choses, déclare : « Je viens bientôt ! » Avec tous ses bien-aimés, d’un même cœur, d’une même voix, répondons-lui : « Amen ; viens, Seigneur Jésus ! »