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DANIEL

 

Philippe Tapernoux

 

Table des matières :

1     Chapitre 1    DANIEL  à  BABYLONE

2     Chapitre 3    La fournaise du roi

3     Chapitre 5    Le FESTIN de BELSHATSAR

4     Chapitre 6    DANIEL DANS LA FOSSE AUX LIONS

4.1      La condamnation inique

4.2      Portée prophétique

4.3      La fosse au lion et la délivrance

5     Chapitre 9    La  CONFESSION  de  DANIEL  et  la  RÉPONSE  de  DIEU

5.1      La confession de Daniel

5.2      La réponse de Dieu

 

 

1                    Chapitre 1    DANIEL  à  BABYLONE

ME 1925 p. 241, 262

Il y a deux grands principes dans les voies de Dieu envers son peuple ; nous les trouvons du commencement à la fin de sa Parole ; ils sont exemplifiés d’une manière frappante dans l’histoire d’Abraham et de sa descendance. Ces principes sont la grâce souveraine et le gouvernement.

Dieu avait choisi Abraham et l’avait appelé par l’action puissante de son Esprit pour l’amener à sa connaissance ; Il s’était révélé à lui dans sa gloire, et, en vertu de son propos arrêté, lui avait fait des promesses inconditionnelles de bénédictions qui auront leur pleine réalisation dans l’avenir. Son histoire nous présente donc trois autres grands principes de vérité : l’élection, l’appel et les promesses. La grâce et la puissance divines amèneront finalement la postérité terrestre d’Abraham dans les bénédictions et la gloire du royaume ; et toutes les familles de la terre seront bénies en lui (Gen. 12:3).

Outre tout ce que la bonté et la miséricorde de Dieu ont voulu faire pour Israël, nous avons à prendre garde aux voies solennelles de son gouvernement envers ce peuple, exprimées par le prophète Amos en ces termes : «Je vous ai connus, vous seuls de toutes les familles de la terre ; c’est pourquoi je visiterai sur vous toutes vos iniquités» (Amos 3:2).

Nous devons considérer attentivement «la bonté et la sévérité de Dieu», comme nous y exhorte l’apôtre Paul dans l’épître aux Romains. Les nations amenées dans les bénédictions de l’Évangile, à la suite de la chute et du rejet d’Israël, sont appelées à persévérer dans cette bonté de Dieu, sinon elles seront retranchées de l’arbre des promesses (Rom. 11:16-24). «Un endurcissement partiel est arrivé à Israël jusqu’à ce que la plénitude des nations soit entrée» (Rom. 11:25). Lorsque la grâce aura amené dans le grenier céleste toutes les gerbes de la moisson dont Christ est les prémices (1 Cor. 15:23), Dieu se souviendra de son peuple terrestre, «et ainsi tout Israël sera sauvé, selon qu’il est écrit : Le libérateur viendra de Sion, il détournera de Jacob l’impiété» (Rom. 11:26).

Les voies du gouvernement divin sont les mêmes dans tous les temps ; c’est pourquoi nous sommes appelés à passer, dans la crainte, le temps de notre séjour ici-bas, nous qui invoquons «comme Père celui qui, sans acception de personnes, juge selon l’oeuvre de chacun» (1 Pierre 1:17). Ceux que Dieu amène en relation avec lui-même sont sous sa discipline ; Il agit envers eux selon leurs voies et punit leurs iniquités en les châtiant et les humiliant, pour leur faire «du bien à la fin» (Deut. 8:16 ; Ps. 107:12, 13). Ces vérités ressortent d’une manière frappante du commencement du livre de Daniel. Les deux premiers versets se relient à la fin des livres des Rois et des Chroniques et résument le dénouement de l’histoire des rois de Juda. Le Seigneur livra en la main de Nébucadnetsar «Jéhoïakim, roi de Juda» (v. 2). Vérité solennelle ! Dieu ne peut lier sa gloire et son Nom à la rébellion et à l’iniquité de son peuple. Combien il était douloureux pour son coeur de devoir abandonner entre les mains de l’ennemi cette nation qu’il aimait, et de livrer la demeure qu’Il avait choisie pour y habiter et le lieu de son trône entre les chérubins, à la fureur de l’adversaire. Les nations étaient entrées dans son héritage ; elles avaient profané son saint temple et «mis Jérusalem en monceaux de pierres» (Ps. 79:1).

Dans son aveuglement, le peuple d’Israël s’était glorifié de ses privilèges et de sa position de mise à part des nations païennes, plongées dans les ténèbres de l’idolâtrie qui l’entouraient, ce qui semblait à ses yeux le mettre à l’abri de tout jugement : mais Dieu ne peut reconnaître un témoignage à sa gloire qui s’est corrompu entre les mains de l’homme. Il s’était attaché toute la maison d’Israël pour être son peuple, «un renom, et une louange et un ornement ; mais ils n’ont pas écouté» (Jér. 13:11). Tout cela est vrai également de l’Église professante qui, n’ayant pas persévéré dans la bonté de Dieu, sera retranchée. Les nations, entées contre nature, puisqu’elles étaient des branches sauvages, sur l’olivier des promesses, seront coupées pour faire place à Israël (Rom. 11). C’est la grâce souveraine de Dieu qui s’est occupée des gentils qui n’avaient aucune part aux promesses, «pour en tirer un peuple pour son Nom» (Act. 15:14). Mais ceux-ci, n’ayant pas persévéré dans la crainte de Dieu et l’obéissance à sa Parole, seront livrés à un esprit d’apostasie et périront dans la révolte finale sous la conduite de l’homme de péché. Avec Israël incrédule, la chrétienté recevra une énergie d’erreur pour croire le mensonge, «afin que tous ceux-là soient jugés qui n’ont pas cru l-a vérité, mais qui ont pris plaisir à l’injustice» (2 Thess. 2:11-12).

Toutefois, dans sa grâce souveraine, Dieu accomplira certainement ses conseils, soit envers Israël, soit envers l’Église. Il nous en donne le témoignage assuré dans sa Parole ; de plus il suscite, dans les temps les plus sombres, un Résidu fidèle qui maintient ses droits, proclame la vérité et la fidélité de ses promesses et attend le déploiement de sa puissance et de sa gloire. Le livre de Daniel nous donne l’histoire de ces témoins de la foi, lorsqu’avaient commencé «les temps des nations» (Luc 21:24), après la destruction du temple et du trône de Dieu en Israël. Nous y trouvons le tableau de leur fidélité, leur séparation absolue pour Dieu de l’idolâtrie environnante, les souffrances qu’ils eurent à traverser ainsi que les bénédictions que Dieu répandit sur eux pour récompenser leur attachement à sa Parole. Au milieu de la ruine, Dieu se glorifie malgré la faiblesse et l’abaissement des instruments qu’Il emploie. Son gouvernement s’était exercé à l’égard de Daniel et ses compagnons, jeunes gens de descendance royale qui, selon la prédiction du prophète Ésaïe au roi Ézéchias, avaient été emmenés en captivité, pour être «eunuques dans le palais du roi de Babylone» (És. 39:7). Cette parole s’était accomplie à la lettre selon les voies divines, toujours justes et saintes. Telles étaient les conséquences de l’infidélité des rois que Dieu avait établis sur le trône de David.

Toutefois, au milieu des humiliations et des amertumes que le péché a amenées sur son peuple, Dieu va faire briller sa grâce d’un éclat incomparable, envers ceux même qui subissaient dans leurs personnes les effets douloureux de ce gouvernement juste et saint. Bien des siècles avant la destruction de Jérusalem, l’influence corruptrice de Babylone, ses principes, ses voies, son idolâtrie, sa mondanité avaient envahi le peuple de Dieu. La fin inévitable d’une telle infidélité devait être la victoire définitive de Babylone et de ses dieux sur les coupables descendants de Jacob, et la chute complète de ce témoignage au seul vrai Dieu établi au milieu des nations. Il en a été exactement de même de l’Église, infiniment plus responsable qu’Israël en raison des privilèges et des lumières plus grands qu’elle a reçus de la part de Dieu. Nous devons ressentir douloureusement la ruine qui l’a atteinte, et le déshonneur fait à Celui qui l’avait mise à part du monde pour être le témoin de la gloire d’un Christ céleste auquel elle appartenait. Sans doute les conseils de Dieu quant à Christ et à l’Assemblée, son corps et son Épouse, auront leur plein accomplissement dans la gloire, mais, au point de vue de sa responsabilité comme témoin du Seigneur ici-bas, l’Église professante aboutit à Babylone et à l’Antichrist. Tel est l’homme dans toutes les phases de son histoire, et nous comprenons, en considérant celle-ci, l’injonction du prophète : «Finissez-en avec l’homme, dont le souffle est dans ses narines, car quel cas doit-on faire de lui ?» (Ésaïe 2:22). Il est précieux pour nous de nous rappeler que ce qui a été perdu par le premier Adam est rétabli et retrouvé dans une gloire infiniment plus grande, sur le terrain de la résurrection, dans le dernier Adam victorieux de la mort et Chef de notre salut.

L’ennemi s’était efforcé d’effacer de la mémoire de Daniel et de ses compagnons le souvenir du vrai Dieu auquel ils appartenaient, ainsi que toute distinction entre eux et le monde païen qui les entourait. Le roi leur avait assigné leur nourriture et leur boisson qui ne devaient différer en rien des siennes (v. 5). Puis, dans l’exercice de son droit souverain de chef de l’empire des nations, il leur donne de nouveaux noms qui exprimaient leur assujettissement aux faux dieux de Babylone. Satan voulait ainsi affirmer ses droits sur les fidèles témoins du Dieu vivant et vrai. Le nom de Daniel signifie jugement de Dieu. Si ce nom rappelait les voies gouvernementales de Celui qui châtie son peuple, il parlait néanmoins de ce Dieu glorieux qui s’était révélé à lui et qui est un Dieu de près et non de loin, «toujours facile à trouver» (Ps. 46:1). Daniel avait reçu le nom de Belteshatsar qui signifie «prince ou trésorier de Bel», Hanania, dont le nom veut dire grâce de l’Éternel reçoit celui de Shadrac (bienséance). Si le peuple de Dieu était demeuré attaché à Celui dont la grâce s’était si merveilleusement occupée de lui pour l’arracher à l’esclavage de l’Égypte et l’amener dans le pays de la promesse, les descendants de ses rois eussent-ils dû se trouver sous la domination d’un roi païen qui cherchait à leur faire oublier le Dieu vivant pour les placer sous le pouvoir du prince des ténèbres ? Mishaël (qui demande) reçoit le nom de Méshac, qui signifie traîné avec force. Quel contraste entre l’heureuse dépendance de Celui qui se plaît à bénir et qui «ne refusera aucun bien à ceux qui marchent dans l’intégrité» (Ps. 84:11) et la misérable condition du peuple rebelle et déchu, «traîné avec force» hors de son pays et dispersé parmi les nations ! (Lév. 26:33). Azaria (aidé de Dieu) s’appelle désormais Abed-Négo (serviteur de lumière). Dans le chemin de l’obéissance, Dieu ne refusait jamais son secours à ceux qui s’attendaient à lui. Les hommes vaillants du pays de Galaad «furent aidé» dans leurs luttes contre l’ennemi ; «car ils crièrent à Dieu dans la bataille, et il se rendit à leurs prières, car ils avaient mis leur confiance en lui» (1 Chron. 5:20). Hélas ! Israël avait oublié les leçons du passé et se trouvait maintenant sous les conséquences de sa désobéissance.

Toutefois, tous les efforts de l’adversaire ne peuvent frustrer les desseins de Dieu. Il ne peut empêcher Celui qui agit avec puissance dans le coeur de l’homme et l’incline comme des ruisseaux d’eau dans le chemin de sa volonté, d’accomplir son oeuvre de grâce en ceux qu’Il veut mettre à part pour lui-même. Aussi, en dépit de toutes ses ruses, ces quatre jeunes gens deviennent des témoins vivants de la vérité divine, au sein des ténèbres morales qui les entourent. Le même fait se produit dans le temps actuel. Tandis que le corps professant se corrompt de plus en plus, jusqu’à ce que le jugement l’atteigne et que Babylone disparaisse à jamais, comme une grande pierre jetée avec violence dans les profondeurs de la mer (Apoc. 18:21), Dieu suscite des témoins fidèles qu’Il sépare de l’apostasie générale ; Il leur révèle ses secrets, et ceux qui gardent sa Parole et ne renient pas le Nom du Seigneur deviennent ainsi les dépositaires de sa vérité et des luminaires dans un monde rempli de ténèbres.

 

Au point de vue des voies de Dieu envers la terre, la chute de Jérusalem avait une importance capitale. Depuis l’établissement d’Israël dans la terre de Canaan, le trône de Dieu avait été établi publiquement ici-bas. Il habitait dans la maison bâtie par Salomon où sa gloire était cachée dans l’obscurité du lieu très saint (1 Rois 8:12). Il manifestait ses perfections par l’exercice de son gouvernement direct sur son peuple Israël. Mais, après des siècles de longue patience, Dieu ne peut plus supporter la corruption de cette maison sur laquelle son Nom était réclamé, et où sa gloire était constamment foulée aux pieds par un peuple rebelle et idolâtre. Comme à regret, et à pas lents, la nuée, signe de la présence de l’Éternel au milieu de son peuple, quitta définitivement cette demeure souillée (Ézéch. 10:18-22), qui fut livrée entre les mains de l’Ennemi. Jérusalem et le temple furent consumés par le feu et le peuple emmené en captivité par les Chaldéens (Jér. 52:12-30). Alors commencèrent «les temps des nations» (Luc 21:24) caractérisés par le fait que le trône de Dieu n’est plus à Jérusalem et que la cité sainte est foulée aux pieds par les nations. Ces temps se sont poursuivis dès ce jour-là, et la prophétie du Seigneur à la fin des évangiles de Matthieu, Marc et Luc, nous fait connaître les événements qui les terminent. Ce dernier évangile résume toute l’histoire du peuple Juif depuis le rejet de son Messie jusqu’à l’apparition du Fils de l’homme sur les nuées du ciel «avec puissance et une grande gloire» (Luc 21:20-28), terme des temps des nations, durant lesquels l’autorité suprême leur a été donnée de Dieu. Ces temps s’achèveront par une terrible tribulation qui atteindra la terre habitée tout entière, et dont les saints célestes composant l’Assemblée seront gardés par leur enlèvement à la rencontre du Seigneur (Apoc. 3:10) ; par contre, le résidu pieux de la nation juive devra la traverser (Matthieu 24:21, 22), jusqu’à la manifestation en gloire et en puissance du Fils de l’homme pour l’établissement de son règne (Matt. 24:30).

Pendant «les temps des nations» qui sont près d’être accomplis (Luc 21:24), le gouvernement de Dieu ne s’exerce pas publiquement, mais d’une manière cachée et providentielle. C’est l’histoire de ces temps et des voies de Dieu pendant cette période qui a déjà duré plus de vingt-cinq siècles que nous donne le livre de Daniel. Nous y trouvons constamment l’expression «le Dieu des cieux» (Dan. 2:18, 19, 37, 44), montrant que Dieu s’est retiré dans sa demeure et a remis entre les mains des hommes, pour un temps, les rênes du gouvernement de ce monde. Durant cet intervalle, Il accomplit, depuis la mort et la résurrection de Christ et la venue du Saint Esprit ici-bas, un propos céleste caché en lui-même ; Il appelle l’Église, et la prépare pour être l’Épouse de Christ et partager sa gloire. C’est «Le mystère du Christ et de l’Assemblée» (Éph. 3:4 ; 5:32) qui ne pouvait être donné à connaître aux fils des hommes avant l’achèvement de l’oeuvre de la rédemption. La dispensation actuelle étant close par l’enlèvement des saints à la rencontre du Seigneur en l’air (1 Thess. 4:13-17), Dieu reprendra ses voies envers la terre et son peuple d’Israël. Daniel et ses compagnons nous présentent l’image du Résidu pieux qui traversera ces temps d’épreuve, dans une séparation absolue de l’iniquité qui les entourera, et en souffrant l’oppression de la puissance apostate. Ces fidèles attendront la délivrance par l’intervention de la puissance divine et la manifestation de la gloire de leur Messie : «Oh ! si tu fendais les cieux ! Si tu voulais descendre et que devant toi les montagnes se fendissent» (És. 64:1). Ils diront avec le psalmiste : «Que ton oeuvre apparaisse à tes serviteurs et ta majesté à leurs fils» (Ps. 90:16). Ils s’attacheront strictement à la Parole et aux promesses de Dieu qui sont la ressource de la foi dans tous les âges.

Quelque difficile que fût le chemin dans lequel il était appelé à servir le Dieu saint, Daniel arrêta dans son coeur qu’il ne se souillerait point par les mets délicats du roi et par le vin qu’il buvait» (v. 8). Coûte que coûte, il voulait obéir à la Parole. Il y avait, dans la loi, des instructions précises quant à la nourriture du peuple et une distinction nettement établie entre les animaux purs et impurs. De plus, les mets de la table du roi païen étaient consacrés à ses faux dieux. Daniel et ses compagnons eussent pu dire : «Il nous est impossible de nous astreindre à suivre les prescriptions de la loi et à nous soustraire à l’autorité royale qui a assigné les mets de notre table ; nous sommes sur une terre étrangère, en captivité chez nos ennemis et Dieu a mis de côté son peuple ; nous ne pouvons que nous soumettre à ceux qu’Il a placés sur nous». Ils ne raisonnent nullement ainsi et, quelle que soit la ruine qui les a atteints, ils savent que Dieu se montre toujours puissant en faveur de ceux qui le craignent : «Le plaisir de l’Éternel est en ceux qui le craignent, en ceux qui s’attendent à sa bonté» (Ps. 147:11). Ils savent qu’ils ne peuvent être des témoins approuvés et bénis de Lui, s’ils ne marchent pas dans l’obéissance à sa Parole. De plus, les faux dieux auxquels ces mets étaient consacrés ne devaient pas être reconnus par ceux qui connaissaient et craignaient le Dieu Créateur des cieux et de la terre qui a dit : «Je ne donnerai pas ma gloire à un autre, ni ma louange à des images taillées» (Ex. 42:8).

Dieu fit trouver à Daniel faveur et grâce auprès du prince des eunuques» (Dan. 1:9). En outre, Il agit dans sa puissance pour que le régime grossier auxquels ces pieux jeunes gens s’étaient astreints n’eût aucun effet fâcheux sur eux : «J’honorerai ceux qui m’honorent» (1 Sam. 2:30). C’est là un principe immuable des voies de Dieu envers les siens. Daniel et ses compagnons étaient des vases sanctifiés, mis à part par la séparation de l’iniquité pour le service du Maître et préparés pour toute bonne oeuvre. La foi et l’obéissance qui les caractérisaient les qualifiaient pour le service qu’ils devaient rendre à la cour du roi païen. «Et à ces jeunes gens, aux quatre, Dieu donna de la science et de l’instruction dans toutes les lettres et dans toute la sagesse ; et Daniel avait de l’intelligence en toute vision et dans les songes» (v. 17).

«Le secret de l’Éternel est pour ceux qui le craignent» (Ps. 25:14). Remarquons que cette crainte n’est pas la peur d’un châtiment ou d’un jugement, mais celle de déplaire à ce Dieu glorieux dont l’âme du fidèle a appris à connaître l’amour et la sainteté. Étant en relation intime et bénie avec Lui, il craint de lui déplaire, comme un fils aimant redoute de peiner son père par une conduite qui ne soit pas en harmonie avec ses pensées, son caractère et sa volonté. Le Seigneur se plaît à traiter comme ses amis et ses confidents ceux qui gardent sa Parole : «Vous êtes mes amis si vous faites tout ce que moi je vous commande» (Jean 15:14). Et encore : «Si quelqu’un m’aime, il gardera ma Parole, et mon Père l’aimera ; et nous viendrons à lui et nous ferons notre demeure chez lui» (Jean 14:23). Non seulement l’âme fidèle qui garde sa Parole recevra l’intelligence de ses pensées, mais elle aura la bénédiction ineffable de la présence divine avec elle, la communion du Père et du Fils.

Puisse l’exemple de ces témoins d’un autre âge, moins favorisés que nous qui jouissons d’une position de faveur devant Dieu et d’union avec Christ ressuscité et glorifié, nous encourager à marcher dans le chemin de l’obéissance, de la dépendance, de la confiance et de la séparation du mal, dans un jour de ruine qui ressemble à celui dans lequel ils vivaient. Daniel ne se prévalait pas de la destruction du temple et de la dispersion du peuple d’Israël pour se dispenser d’obéir à la Parole. Il doit en être de même pour nous : nous pouvons être individuellement des hommes de Dieu au milieu du naufrage de l’Église : «Mais toi, ô homme de Dieu, fuis ces choses, et poursuis la justice, la piété, la foi, l’amour, la patience, la douceur d’esprit» (1 Tim. 6:11). C’est par le moyen de la Parole que l’homme de Dieu devient «accompli et parfaitement accompli pour toute bonne oeuvre» (2 Tim. 3:17).

La sagesse et l’intelligence que Dieu donna à ces jeunes Hébreux étaient la récompense de leur fidélité. Les Proverbes nous parlent souvent de l’importance immense de la sagesse pour conduire nos pas dans le chemin de la foi à travers ce monde. L’intelligence spirituelle donnée de Dieu nous fait entrer dans ses pensées, nous en donne le discernement et la jouissance : «Nous avons la pensée de Christ» (1 Cor. 2:16), c’est-à-dire non seulement la révélation des vérités divines, mais, par l’Esprit, la capacité de les comprendre. Cette intelligence est donnée au nouvel homme créé en nous par la communication de la vie divine et l’habitation du Saint Esprit, puissance de cette vie. Pour que l’Esprit puisse librement agir dans nos âmes pour nous révéler la gloire de Christ, il faut qu’il ne soit pas contristé par l’activité insoumise de la chair. Veillons à ne pas attrister le Saint Esprit de Dieu, par lequel nous avons été «scellés pour le jour de la rédemption» (Éph. 4:30).

La sagesse est cette qualité morale donnée de Dieu par laquelle les vérités divines que l’intelligence saisit sont appliquées aux circonstances journalières du chemin de la foi, ainsi qu’à celles du service et du témoignage individuel et collectif des saints. «Acquiers la sagesse, acquiers l’intelligence» (Prov. 4:5). «Le commencement de la sagesse, c’est : Acquiers la sagesse, et, au prix de toutes tes acquisitions, acquiers l’intelligence» (Prov. 4:7). Paul priait pour que les Colossiens fussent remplis de la connaissance de la volonté divine, en toute sagesse et intelligence spirituelle, pour marcher d’une manière digne du Seigneur  (Col. 1:9, 10). La foi est comme la fenêtre de l’âme qui, étant ouverte, laisse entrer à flots la lumière de la révélation divine, de sorte que l’âme est remplie des pensées et de la volonté de Dieu. C’est ainsi qu’une marche en rapport avec cette connaissance qu’Il nous a donnée de lui-même est produite chez le chrétien, ainsi que des fruits qui sont à sa gloire.

Lorsque Daniel est appelé devant le roi, il est trouvé dix fois plus sage que tous les devins et les enchanteurs du royaume, qui n’avaient à leur disposition que les ruses et la fausse sagesse d’un monde qui gît dans le méchant. Telle est la récompense de sa fidélité inébranlable et de sa dépendance de Dieu ; telle aussi est la victoire de Celui dont le nom avait été jeté dans la poussière et le témoignage complètement ruiné par l’infidélité de son peuple. C’est ainsi que, dans d’autres temps, l’arche prisonnière chez les Philistins montra sa puissance dans le temple de Dagon (1 Sam. 5). Dieu demeure le même d’âge en âge. S’il doit mettre de côté les témoins infidèles qu’il avait honorés du dépôt de sa vérité, il en suscitera d’autres, jusqu’au jour bienheureux où «la terre sera pleine de la connaissance de l’Éternel, comme les eaux couvrent le fond de la mer» (Ex. 11:9 ; Nomb. 14:21 ; Hab. 2:14).

Rappelons-nous que le point de départ et le secret de toute bénédiction, de toute force, de toute sagesse, pour nous comme pour Daniel, se trouvent dans une obéissance complète à la Parole. «Or, à celui qui a le pouvoir de vous garder sans que vous bronchiez, et de vous placer irréprochables devant sa gloire avec abondance de joie, — au seul Dieu notre Sauveur, par notre Seigneur Jésus-Christ gloire, majesté, force et pouvoir dès avant tout siècle, et maintenant, et pour tous les siècles. Amen» (Jude 24, 25).

 

2                    Chapitre 3    La fournaise du roi

ME 1921 p. 223, 234

Le récit de ce chapitre est d’un grand intérêt pour nous. Nous y trouvons la chute morale, de l’autorité suprême confiée aux nations, l’aliénation du vrai Dieu qui caractérise celles-ci, mais aussi la fidélité inébranlable des témoins conservés par la puissance divine pendant ces temps fâcheux. L’usage que l’homme fait de la puissance que Dieu lui a mise entre les mains, mais aussi son idolâtrie, son orgueil et sa haine contre les saints, ressortent, d’une manière frappante, de la scène qui se déroule ici devant nous. Puissions-nous y puiser des instructions salutaires, soit quant au caractère moral du monde que nous traversons, soit quant au chemin que nous avons à suivre et au témoignage que nous sommes appelés à rendre au milieu de cette «génération tortue et perverse» (Phil. 2:15) qui est encore l’objet de la patience de Dieu.

Nous avons aussi, dans cette histoire, un tableau prophétique, nous présentant une illustration des événements à venir et des caractères que le mal revêtira, lorsqu’il arrivera à sa consommation pour être jugé par le Seigneur en son jour. Nous y voyons encore que Dieu ne se laisse jamais sans témoignage, et qu’au milieu de la plus sombre apostasie, la foi brille de son plus vif éclat. Il en sera ainsi lors de la grande tribulation de la fin et, comme il le fit en faveur de ses fidèles témoins à Babylone, Dieu manifestera alors sa puissance et son amour en faveur du résidu pieux qui maintiendra ses droits et refusera de participer à l’idolâtrie générale dont il sera entouré.

La leçon que Dieu avait donnée à Nébucadnetsar par le songe dont nous trouvons le récit au chap. 2, avait été complètement oubliée par lui : il en arrive toujours ainsi à l’homme déchu tant que la grâce divine n’opère pas dans son coeur. Au lieu de conformer ses voies à la révélation que lui avait donnée le Très-Haut de sa puissance, de ses droits souverains, de sa gloire et du jugement qu’il exercera contre le mal, le roi gentil s’exalte lui-même : il devient le centre unique de ses pensées et veut que tous les hommages se concentrent sur sa personne. La statue d’or qu’il fait dresser dans la pleine de Dura (v. 1), et devant laquelle tous les habitants de son vaste empire devaient se prosterner, était l’expression de son orgueil, de son éloignement du vrai Dieu et de l’abus tyrannique du pouvoir que ce dernier lui avait confié. Au lieu de servir à la gloire du Tout-Puissant et d’amener tous les coeurs à l’obéissance qui lui est due, l’autorité remise entre les mains des nations, détournée de son but, était employée à magnifier la créature en lui donnant la place qui appartient à Dieu seul. Cette scène illustre et typifie celle qui aura lieu après que le Saint Esprit qui, par sa présence dans l’Église, retient encore le débordement du mal, aura quitté ce monde avec elle : «Celui qui retient maintenant le fera jusqu’à ce qu’il soit loin» (2 Thess. 2:7). Alors paraîtra «l’homme de péché», «le fils de perdition» qui s’exaltera lui-même et fera dresser dans le temple à Jérusalem l’image de la bête romaine, en ordonnant à tous de se prosterner devant elle (Apoc. 13:11-18 ; Matt. 24:15 ; Dan. 12:11). Lorsque l’homme atteint ce degré d’iniquité et de révolte audacieuse contre Dieu, il attire sur lui un prompt jugement de la part de Celui qui a dit : «Je suis l’Éternel : c’est là mon nom ; et je ne donnerai pas ma gloire à un autre, ni ma louange à des images taillées» (És. 42:8).

Par ce culte universel rendu à l’image qui symbolisait sa puissance et sa gloire, le roi Nébucadnetsar voulait aussi cimenter les liens qui unissaient les peuples divers de son empire. Rien, en effet, n’exerce une plus grande influence pour lier les hommes les uns aux autres qu’un objet religieux commun. Quand ce dernier n’est pas Dieu, on peut être certain qu’il s’agit d’une manifestation quelconque de la puissance de Satan qui, sous une forme ou une autre, enchaîne les hommes sous son esclavage par des cérémonies qui frappent leurs sens et satisfont leurs convoitises. On comprend combien, au milieu de cet océan d’iniquité, le témoignage de Dieu, quelque faible qu’il soit, gêne l’ennemi, et avec quelle fureur il cherche à le détruire. Il en sera ainsi dans cette terrible période qui s’écoulera entre la venue du Seigneur pour ses saints célestes et sa manifestation en gloire avec eux, comme le prouvent tant de passages de la parole prophétique.

Déjà maintenant, nous voyons Satan à l’oeuvre pour unir les hommes dans la poursuite de buts communs, dans le domaine religieux, moral, politique, philanthropique ou autre, tout en excluant Dieu de leur activité. Tous ceux qui, par fidélité envers Lui se tiennent à l’écart de ces mouvements qui agitent la société, sont l’objet du mépris et de la moquerie, si ce n’est de la persécution ouverte.

Ayant ouï la proclamation royale, tous les sujets de l’empire se prosternent sans protestation aucune (v. 7), à l’exception des fidèles témoins de Dieu suscités au milieu de l’apostasie générale (v. 8-12). Les religions diverses que professaient les peuples réunis sous le sceptre du roi de Babylone ne les empêchaient nullement d’accepter son édit impie. Il n’y a aucune puissance dans un système religieux quelconque, sans Dieu pour préserver les hommes des liens de Satan. Le christianisme lui-même, retenu comme une vaine profession sans vie, n’empêche pas l’ennemi de séduire ceux qui sont rangés sous sa bannière. Lorsqu’il est question de conserver sa vie ou même de défendre simplement ses intérêts matériels que gênerait un trop grand attachement à la Parole de Dieu, on foule celle-ci aux pieds et, de propos délibéré, on se soumet à la puissance satanique qui cherche à détruire l’autorité divine. La chrétienté se prépare ainsi pour le jour de l’apostasie finale qui s’approche rapidement. Alors la Bête ordonnera à tous de prendre, en signe d’obéissance absolue, «une marque sur leur main droite ou sur leur front» (Apoc. 13:16, 17). Tous ceux dans le coeur desquels Dieu n’aura pas agi en puissance vivifiante, s’empresseront d’accepter ce signe de soumission à l’autorité diabolique de la Bête et du faux-prophète, malgré la défense formelle de la Parole divine (Apoc. 14:9-11).

Remarquons aussi le rôle que joue la musique dans cette scène ténébreuse. Lorsque l’ennemi s’en sert, elle agit sur les sens et endort la conscience. Les instruments de musique ont été inventés par les descendants de Caïn pour rendre aussi agréables que possible, sans Dieu, une terre souillée par le meurtre d’Abel, et faire oublier à une génération impie le jugement prononcé sur le meurtrier. Le monde est coupable aujourd’hui d’avoir mis à mort le Fils de Dieu, et il cherche à oublier la sentence prononcée contre lui et à embellir la scène de son rejet, en s’entourant de tout ce que son intelligence peut imaginer pour atteindre ce résultat. C’est ainsi que le développement de la civilisation, les progrès des arts et des sciences, servent à cacher à l’homme le vrai caractère de cette scène de violence et de corruption, sur laquelle fondront soudain les jugements divins. L’ennemi est derrière toute cette activité fiévreuse par laquelle on cherche à améliorer l’état de ce monde ; c’est lui qui en dirige le cours, en agissant par tous les ressorts qui font mouvoir le coeur naturel loin de Dieu. Ce n’est qu’en retenant la vérité avec puissance dans nos âmes, que nous serons gardés de ses pièges. Il en fut ainsi des trois fidèles témoins qui résistèrent à l’ordonnance du roi. Leur attachement à la Parole les conduisit à une séparation absolue de l’iniquité : leur refus de participer à l’idolâtrie qui les entourait attira immédiatement sur eux la haine et la persécution des ennemis de la vérité. Il aurait pu sembler qu’un si petit témoignage, au milieu de cette foule immense, n’éveillerait l’attention de personne, mais il n’en fut rien. Satan a l’oeil sur ceux qui défendent les droits du Seigneur et fait tout ce qui est en son pouvoir pour annuler et détruire cette lumière qui brille au sein des ténèbres. Dans le temps actuel aussi, un petit noyau de fidèles, servant humblement le Seigneur dans le chemin de l’obéissance, attire davantage les regards qu’un grand rassemblement religieux sur un terrain de conformité au monde.

Les trois jeunes Hébreux sont maintenant appelés à rendre raison de leur foi devant le roi païen. Ils le font avec une sainte hardiesse et une confiance absolue en la fidélité et la puissance de Dieu (v. 16 et 17). Comme Sankhérib (2 Chron. 32:9-15), Nébucadnetsar lui avait jeté un défi en niant qu’il pût délivrer ses serviteurs de sa main (v. 15). Aussi Dieu se devait à lui-même d’intervenir en puissance et de manifester sa gloire en faveur de ses humbles témoins qui comptaient sur lui. Il n’est pas nécessaire que ceux-ci répondent à l’insolent défi lancé au Dieu du ciel (v. 16). Ce dernier se chargera bien, en effet, de fermer la bouche de ses ennemis et de montrer son bras étendu pour la délivrance de ses bien-aimés. Il garde «dans une paix parfaite ceux qui se confient en Lui» (És. 26:3) et leur dit : «L’Éternel combattra pour vous, et vous, vous demeurerez tranquilles (Ex. 14:14). La réponse des trois jeunes Hébreux contient deux déclarations précieuses : 1° «Notre Dieu peut nous délivrer de la fournaise de feu ardent», c’est-à-dire qu’il peut détourner de nous l’épreuve qui se prépare. 2° Toutefois, si même Il permet celle-ci, «il nous délivrera de ta main». Comment ces fidèles pouvaient-ils déclarer avec tant d’assurance que, si même ils étaient jetés dans la fournaise, leur délivrance était certaine ? Sur quoi se fondait leur foi devant la mort qui les menaçait ? Ils croyaient au Dieu de la résurrection, comme Abraham qui fut pleinement persuadé que Dieu pouvait lui rendre son fils unique en le ressuscitant d’ente les morts, «d’où aussi en figure, il le reçut» (Hébr. 11:19) ; ils croyaient que, pour eux également, Dieu pouvait déployer cette puissance qui les ramènerait sur la terre des vivants, s’il permettait que la mort les atteignît. Ainsi, lors même que Dieu parût ne pas intervenir en leur faveur, ils ne pouvaient douter de son amour, de sa puissance et de ses promesses, et ils refusent catégoriquement de sortir du chemin de l’obéissance à la Parole pour échapper à la souffrance et à la mort (v. 18). C’est ainsi que, «par la foi, ils éteignirent la force du feu» (Hébr. 11:34), et que, par le déploiement de la puissance divine, l’ennemi fut confondu et réduit au silence.

Toutefois, avant d’intervenir pour la délivrance des siens, Dieu permet que leur foi soit soumise à une douloureuse épreuve (v. 19). Il faut que l’âme soit entièrement rejetée sur les ressources divines et qu’un témoignage éclatant soit rendu à la gloire de Celui dont le nom avait été couvert d’opprobre par l’idolâtrie du roi et de son peuple. Il en fut de même plus tard au tombeau de Lazare. Le Seigneur aurait pu guérir ce dernier, mais la gloire du Fils de Dieu allait être manifestée d’une manière bien plus éclatante par sa résurrection d’entre les morts (Jean 11). Il en sera ainsi également du résidu fidèle à la fin : amené dans la fournaise de la grande tribulation et près d’être englouti par la fureur de ses adversaires, il sera l’objet de l’intervention visible et toute-puissante du Seigneur de gloire, et amené au port après une orageuse traversée (Jér. 30:6-8).

Avant le déploiement manifeste de la puissance de Dieu pour la délivrance de ses serviteurs, Il leur fait expérimenter sa sympathie et sa tendresse dans l’épreuve. Après les avoir délivrés de leurs liens, le Seigneur vient marcher avec eux dans la fournaise (Dan. 3:25). C’est aussi l’expérience bénie de la foi au jour actuel. Puissions-nous, bien-aimés, connaître les tendres sympathies de son coeur durant le voyage à travers l’aride désert, en attendant le déploiement de sa puissance qui mettra un terme à toutes nos souffrances, à toutes nos larmes et nous réunira autour de Lui dans la gloire.

L’épreuve des trois fidèles témoins eut trois résultats bénis : 1° Les liens par lesquels leurs ennemis les avaient attachés avant de les jeter dans la fournaise, furent consumés par le feu (v. 25). Souvent des liens coupables, n’ayant rien de commun avec ceux que les adversaires des jeunes Hébreux avaient mis sur eux, nous enserrent et nous privent du caractère de témoins du Seigneur dans ce monde. Il faut le feu de l’épreuve pour les détruire, si la puissance de la Parole ne suffit pas pour cela. Si «cela est nécessaire», le divin Affineur nous place dans le creuset, mais il s’assied devant son feu comme «celui qui affine et purifie l’argent» (Mal. 3:3), afin que la foi triomphe, et que l’épreuve à laquelle elle est soumise, au lieu de lui être préjudiciable, produise un fruit précieux qui sera «trouvé tourner à louange, et à gloire et à honneur dans la révélation de Jésus Christ» (1 Pierre 1:7).

2° Leurs liens étant rompus, ils purent marcher librement avec le Fils de Dieu dans la fournaise (v. 25). Ils avaient marché avec lui dans le palais du roi, aussi il vient à eux et leur donne de goûter sa communion bénie dans la fournaise du roi, en y marchant avec eux. Il s’est abaissé jusqu’à nous, dans une grâce parfaite, et s’identifie avec les siens dans la souffrance et dans l’opprobre qu’ils rencontrent par amour pour son Nom. C’est ainsi que l’apôtre Paul peut dire à la fin de sa course : «Tous m’ont abandonné, mais le Seigneur s’est tenu près de moi et m’a fortifié» (2 Tim. 4:16, 17).

3° Enfin la puissance de Dieu qui avait été manifestée d’une manière si éclatante en gardant et en bénissant ses fidèles témoins dans la fournaise, le fut encore à la vue du roi et de tout son peuple, en les délivrant entièrement de l’épreuve. Ils sortirent de la fournaise et tous purent constater que le feu n’avait eu aucune puissance sur eux. (v. 27). Il en sera ainsi pour ceux qui, à la fin, refuseront de rendre hommage à la Bête et que Dieu gardera miraculeusement dans un lieu préparé dans le désert durant mille deux cent soixante jours (Apoc. 12:6) ; puis viendra leur délivrance par l’apparition du Seigneur de gloire et leur entrée dans le royaume.

Le roi proclame la grandeur et la puissance du Dieu du ciel qui a délivré ses serviteurs et invite tous ses sujets à se prosterner devant lui (v. 28, 29). C’est ainsi que, lorsque sera établi en gloire le royaume du Fils de l’homme, longtemps rejeté, les réchappés des nations le craindront et le serviront (Ps. 22:27-31 ; És. 45:23). En ce jour-là, toute la terre sera pleine de sa gloire (Ps. 72:19 ; Hab. 2:14). «Il engloutira la mort en victoire ; et le Seigneur, l’Éternel, essuiera les larmes de dessus tout visage, et il ôtera l’opprobre de son peuple de dessus toute la terre, car l’Éternel a parlé» (És. 25:8).

 

3                    Chapitre 5    Le FESTIN de BELSHATSAR

ME 1926 p. 283, 319

Malgré tous les témoignages de la sagesse, et de la puissance de Dieu donnés sous le règne de Nébucadnetsar, ses descendants en perdirent le souvenir. Maintenant le mal est à son comble et le jugement est imminent. Le temps de la patience de Dieu est arrivé à son terme. Il doit à sa gloire de manifester son indignation contre la rébellion persistante de ses créatures.

Les caractères moraux de la scène que nous présente ce chapitre sont d’autant plus instructifs pour nous qu’ils sont semblables à ceux qui se manifestent de plus en plus clairement aujourd’hui au sein de la chrétienté apostate. Il y a une différence importante entre l’état de choses dépeint au chapitre précédent et celui que nous trouvons sous le règne de Belshatsar. Dans le premier, nous voyons le mal arrêté dans ses progrès par la discipline exercée sur le chef de l’empire, tandis que, dans celui qui nous occupe, les digues opposées par Dieu au flot impétueux du mal sont rompues et l’iniquité atteint un tel degré qu’un jugement immédiat doit fondre de la part de Dieu sur ceux qui se moquent si ouvertement de lui. La fin du royaume de Babylone était décrétée par Celui qui étant «le Dieu des rétributions», devait rendre à l’ennemi de son peuple tout le mal qu’il avait fait.

Aujourd’hui, les voies divines, à l’égard du monde qui a rejeté le Fils venu en grâce, revêtent les mêmes caractères. Un temps de patience s’écoule depuis la Pentecôte jusqu’au retour du Seigneur, mais les hommes en profitent pour se corrompre et se révolter toujours davantage contre Dieu : «Parce que la sentence contre les mauvaises oeuvres ne s’exécute pas immédiatement, le coeur des fils des hommes est au-dedans d’eux rempli d’envie de faire le mal» (Eccl. 8:11). Le jugement est prononcé contre un tel état de choses, mais Dieu accomplit ses conseils de grâce, avant d’exécuter la sentence, et l’homme en use pour se moquer de lui. Quand le mal sera arrivé à son comble, Dieu y mettra fin au jour de Christ.

Le temps de Belshatsar n’est pas caractérisé par la persécution ouverte contre les témoins de Dieu, comme l’avait été celui de Nébucadnetsar (Dan. 3). Le tableau que nous offre ce règne est celui du monde dans sa poursuite ardente des distractions et dans la gratification de ses passions. C’est là aussi un trait frappant des jours où nous vivons, de même que cela caractérisait Babylone, à la veille du jugement qui allait fondre sur elle. Malgré le mépris que l’on a pour ceux qui servent fidèlement le Seigneur, on les laisse, en général, suivre leur voie sans les persécuter. Dieu est tellement mis de côté qu’il ne vaut pas la peine de s’occuper des faibles témoins qui défendent ses droits et vivent dans la séparation du présent siècle. Toutefois, n’oublions pas que c’est le Seigneur qui a mis devant nous «une porte ouverte que personne ne peut fermer» (Apoc. 3:8), et sachons en profiter pour faire briller sa lumière au milieu des ténèbres qui nous entourent.

Belshatsar réunit ses courtisans pour un grand festin et ici apparaît un caractère moral de cette scène, encore plus grave que ceux que nous avons déjà considérés. Le roi jette un audacieux défi au Dieu vivant, en faisant apporter les vases d’or et d’argent que Nébucadnetsar avait tirés du temple, pour y boire en l’honneur des faux dieux, et exalter la victoire remportée par ceux-ci sur le Dieu d’Israël. La captivité à Babylone du peuple élu et la destruction de son temple semblaient exalter la supériorité des idoles sur le Créateur des cieux et de la terre. C’est ainsi que Satan se plaît à pousser l’homme, esclave de ses passions, à déshonorer Celui qui lui a donné la vie et à renier sa relation avec lui et sa dépendance de lui.

Lorsque la sacrificature représentée par les fils d’Éli se fut complètement corrompue, Dieu laissa tomber entre les mains de l’ennemi, l’arche, symbole de sa présence au milieu de son peuple (1 Sam. 2 à 5). De même, Il permit que les vases employés au service de sa maison fussent emmenés à Babylone, parce que sa gloire avait été profanée par ceux qui avaient le privilège de s’approcher de lui dans son temple. Toutefois, Celui qui a dit : «Je suis l’Éternel... je ne donnerai pas ma gloire à un autre, ni ma louange à des images taillées» (És. 42:8), ne pouvait demeurer sans témoignage de sa sainteté et de son opposition aux faux dieux. Si, à cause de l’infidélité de son peuple, Il avait dû livrer son sanctuaire aux mains de l’ennemi, Il voulait montrer au monarque impie qu’Il est le grand Dieu créateur des cieux et de la terre, et que les idoles des nations ne sont que néant. Sennachérib avait jeté un défi semblable au Dieu d’Israël en disant : «Aucun dieu d’aucune nation ni d’aucun royaume n’a pu délivrer son peuple de ma main ni de la main de mes pères ; combien moins votre Dieu vous délivrera-t-il de ma main ! (2 Chron. 32:15). Un jugement foudroyant ne tarda pas à répondre à une telle audace (2 Chr. 32:21, 22).

Il en sera de même à la fin du temps actuel de la patience de Dieu. Dès que sera manifestée l’apostasie et l’opposition audacieuse à la gloire du vrai Dieu, le ciel s’ouvrira, et le Fils de l’homme, autrefois abaissé, paraîtra pour anéantir l’orgueilleux rebelle qui osera s’élever contre lui. Le Seigneur des seigneurs «consumera par le souffle de sa bouche» cet instrument de Satan.

Dès que la profanation du roi et de ses compagnons de débauche eut été accomplie, la réponse divine ne se fit pas attendre. Si le peuple «formé» pour lui et qui devait raconter sa «louange» (És. 43:20), est incapable de lui rendre témoignage, Dieu saura prendre en main sa propre cause et défendre ses droits et sa gloire jetés dans la poussière : «En ce même moment, les doigts d’une main d’homme sortirent et écrivirent vis-à-vis du chandelier, sur le plâtre de la muraille du palais du roi ; et le roi vit l’extrémité de la main qui écrivait» (v. 5). C’est ainsi qu’à la fin de l’histoire de ce monde, «les habitants du monde apprendront la justice» (És. 26:9). Les «signes et les prodiges» se multiplieront dans les cieux et sur la terre lorsque le grand jour de la colère du Dieu tout-puissant sera près d’éclater (Apoc. 6:15-16).

Pendant le temps de la grâce, nous ne voyons pas de miracles propres à frapper les hommes. La Parole de Dieu doit suffire à convaincre le pécheur de sa responsabilité et de l’amour du Sauveur. Elle suffira pour condamner, au jour du jugement, ceux qui ne l’auront pas reçue (Luc 16:29 ; Jean 12:48). Par contre, lorsque la parenthèse durant laquelle Dieu prépare un peuple pour le ciel sera terminée et que l’Église aura été enlevée de la scène du témoignage, Dieu manifestera de nouveau visiblement sa puissance aux yeux des hommes, comme ce fut le cas dans la scène qui se déroule sous nos yeux. Le message adressé ainsi au roi ne contenait pas une parole de grâce. C’était un jugement final et inexorable, parce que tous les appels de Dieu avaient été foulés aux pieds. Devant cette manifestation solennelle de sa puissance et de sa gloire, le roi impie et ses courtisans sont frappés de terreur. Il en est toujours ainsi lorsque Dieu s’approche de l’Homme dans Sa majesté. Loin de son Créateur, celui-ci s’enorgueillit de sa force, mais combien vite il est réduit au silence quand la voix redoutable du Juge se fait entendre !

Si grande était la frayeur du monarque que «ses genoux se heurtèrent l’un contre l’autre». Que sera-ce quand les hommes devront comparaître, avec toutes leurs iniquités devant Celui qui sera assis sur le «grand trône blanc pour être jugés selon leurs oeuvres !

L’impuissance des sages de Babylone, si souvent constatée dans ce livre, éclate en présence de la gloire de Dieu qui brille devant les yeux épouvantés des témoins de cette scène. Le roi promet de riches récompenses à celui qui lira les paroles écrites sur la muraille, mais Dieu confond la sagesse de ce monde. L’angoisse du roi est extrême. Elle nous rappelle celle des hommes lorsque les jugements commenceront à fondre sur la terre : «Devant le grand bruit de la mer et des flots, ils rendront l’âme de peur, et à cause de l’attente des choses qui viennent sur la terre habitée, car les puissances des cieux seront ébranlées» (Luc 21:25, 26).

La reine, probablement la mère du roi, car ses femmes étaient au festin, entre dans la salle. Il semble que le souvenir de Daniel et de son témoignage fidèle et puissant avait exercé une influence assez profonde sur elle pour la tenir à l’écart de cette scène d’iniquité. Elle engage le roi à le faire appeler, dans l’assurance qu’il donnera l’interprétation du prodige. Remarquons maintenant la place qu’occupait Daniel dans le milieu corrompu qui l’entourait. Son caractère d’homme de Dieu brille de tout son éclat dans le chemin de séparation absolue dans lequel il marchait. Il ne pouvait suivre le courant d’iniquité qui entraînait Babylone vers le jugement : ce principe est très important à considérer pour nous, car il est à la base de notre témoignage pour Dieu au sein de la ruine. Sans cette séparation du présent siècle mauvais, il est impossible de rendre un témoignage fidèle au Seigneur. Cette mise à part amène la souffrance et l’opprobre, car elle juge le monde, mais elle est absolument nécessaire et nous est impérieusement tracée dans la Parole (2 Cor. 6:14-18).

En général, les temps actuels ne sont pas caractérisés par la persécution ouverte contre les témoins du Seigneur. Ils ressemblent de manière frappante à ceux des derniers jours de Babylone. Maintenant, comme alors, les hommes sont animés d’un tel esprit d’indépendance qu’ils laissent volontiers les témoins du Seigneur suivre le chemin de la fidélité à la Parole, tout en méprisant et haïssant leurs voies, pourvu qu’ils puissent eux-mêmes assouvir leurs convoitises et leur soif de jouissances. Dieu est oublié dans cette poursuite ardente du gain et du plaisir ; Il est traité comme un Être importun dont il faut parler le moins possible et que l’on espère n’avoir jamais à rencontrer. La patience dont Dieu use envers un monde qui a rejeté et mis à mort son Fils est un motif de plus pour que l’homme manifeste toute sa perversité, en donnant carrière à ses passions, dans la vaine pensée que le jugement ne l’atteindra pas : «Tu as fait ces choses-là, et j’ai gardé le silence, tu as estimé que j’étais véritablement comme toi ; mais je t’en reprendrai, et je te les mettrai devant les yeux» (Ps. 50:21). La sentence prononcée contre le mal ne s’exécute pas immédiatement, parce que Dieu attend pour faire grâce ; mais l’homme en profite pour se plonger toujours davantage dans le péché (Eccl. 8:11). Il en sera ainsi jusqu’à ce que le mal soit à son comble et que, pour le maintien de sa gloire et la manifestation de sa haine contre la rébellion de ses créatures, Dieu doive intervenir en puissance pour y mettre un terme.

«Alors Daniel fut introduit devant le roi» (v. 13). Jusqu’alors il s’était tenu dans une séparation absolue de la scène corrompue au milieu de laquelle il était appelé à servir le Dieu vivant. Cette fidélité inébranlable le qualifiait pour apporter au roi impie le message du Très-Haut, et lui donnait le discernement nécessaire pour traiter, comme il convenait, les offres de récompense du monarque terrifié par les manifestations de la puissance divine. «Daniel répondit et dit devant le roi : «Que tes présents te demeurent et donne tes récompenses à un autre» (v. 17). Il ne voulait aucune association quelconque avec un monde mûr pour le jugement. Vrai fils d’Abraham, qui n’avait pas voulu être enrichi par les biens du roi de Sodome «depuis un fil jusqu’à une courroie de sandale» (Gen. 14:23), il se contentait comme lui des richesses «du Dieu Très-Haut, possesseur des cieux et de la terre» (v. 22). La foi rend l’homme de Dieu capable de refuser «les richesses de l’Égypte» et de choisir «l’opprobre du Christ», comme le fit aussi Moïse en son temps (Héb. 11:26).

Avant d’interpréter le message divin, Daniel rappelle au roi sa culpabilité, son mépris des avertissements qu’il avait reçus et son oubli des témoignages éclatants que, sous le règne de son père (*), Dieu avait donnés de sa haine de l’idolâtrie et de la puissance dont Il dispose «pour abaisser ceux qui marchent avec orgueil» (Dan. 4:3-7). La marche fidèle du pieux serviteur de Dieu le rendait capable de discerner l’écriture tracée sur la muraille et d’affronter le roi pour lui annoncer le jugement qui allait fondre sur lui, parce qu’il avait refusé de prendre garde à la main miséricordieuse tendue vers lui. N’ayant pas voulu sa répréhension, il n’avait à attendre désormais que le jugement inexorable de la part de Celui en la main duquel était son «souffle» et à qui appartenaient toutes ses «voies» (v. 23), et qu’il n’avait pas glorifié. Maintenant la frayeur de Dieu venait sur lui «comme une subite destruction». Comme Élie devant Achab, Daniel se présente avec un courage indomptable devant le roi et ses courtisans pour leur déclarer le foudroyant message du Très-Haut. Il se tenait devant Dieu et recevait de sa part l’intelligence de ses pensées, aussi bien que la force nécessaire pour les communiquer à d’autres, sans aucune crainte de ses ennemis.

(*) Ou «grand-père», car de fait, Belshatsar était le petit-fils de Nébucadnetsar.

Demandons-nous pourquoi, si souvent, nous n’osons pas confesser le nom du Seigneur devant les hommes et craignons d’affronter leurs sarcasmes. Rappelons-nous que c’est maintenant que nous avons à le faire et que, si nous manquons cette occasion unique de rendre témoignage à ses droits et à sa gloire, nous ne la retrouverons plus jamais : «Car quiconque aura honte de moi et de mes paroles parmi cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l’homme aura aussi honte de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père, avec les saints anges» (Marc 8:38; Luc 9:26).

Daniel rappelle au roi que c’est du Dieu Très-Haut que Nébucadnetsar avait reçu «la grandeur, l’honneur et la majesté», ainsi que l’hommage de tous les peuples de son vaste empire (v. 18, 19). L’homme méconnaît ce fait important et qui s’applique à tous les dons qui lui ont été départis par le Créateur et Gouverneur de l’univers. Quelque humble que puisse être sa condition présente ici-bas, il a reçu de Lui le souffle de la vie, cette âme immortelle qui ne cesse pas d’exister lorsque Dieu dit : «Retournez, fils des hommes» (Ps. 90:3) jusqu’à la poussière ; car «la poussière retourne à la terre et l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné» (Eccl. 12:7). L’entendement, cette faculté morale donnée à l’homme par laquelle il peut connaître son Créateur et le servir, l’élève infiniment au-dessus de la bête qui ne possède pas nette intelligence. L’homme est ainsi responsable de demeurer dans l’obéissance à Dieu, à qui appartiennent toutes ses voies : Il prend connaissance de toute sa vie et lui demandera compte un jour de tous ses actes coupables, de toutes les paroles dures qu’il a proférées contre lui (Jude 15).

L’élévation accordée au roi des nations n’avait fait que développer l’orgueil de son coeur et endurcir sa conscience, pour la rendre insensible aux avertissements divins (v. 20). Alors, selon les principes immuables de son gouvernement de l’univers, Dieu le précipite «du trône de son royaume ; sa dignité lui fut ôtée et il fut chassé du milieu des fils des hommes» (v. 21). «L’orgueil va devant la ruine, et l’esprit hautain devant la chute» (Prov. 16:18). Le monarque hautain et rebelle en fit l’expérience, lorsque son intelligence lui fut ôtée et que «son coeur fut rendu semblable à celui des bêtes, jusqu’à ce qu’il connut que le Dieu Très-Haut domine sur le royaume des hommes, et qu’il y établit qui il veut» (v. 21). La pensée arrêtée de Dieu est d’établir un royaume des cieux sur la terre et d’amener tous les habitants de la terre à être soumis à l’autorité de son Oint. Le Fils de l’homme, autrefois abaissé jusqu’à la mort de la croix, et maintenant ressuscité et élevé dans la gloire, recevra «la domination et l’honneur et la royauté... Sa domination est une domination éternelle qui ne passera pas, et son royaume un royaume qui ne sera pas détruit» (Dan. 7:14). Déjà maintenant, ses droits méconnus ici-bas ont été revendiqués dans la gloire, et le royaume des cieux fut inauguré lorsque Dieu lui dit : «Assieds-toi ici, ma droite, jusqu’à ce que je mette tes ennemis pour le marchepied de tes pieds» (Ps. 110:1 ; Matthieu 22:44). En son absence, ce royaume revêt une forme mystérieuse que le Seigneur dépeint en paraboles (Matt. 13), mais la gloire et la puissance qui lui appartiennent seront pleinement manifestées en son jour (Apoc. 11:15-18). Alors, semblables au monarque humilié sous la puissante main de Dieu, les nations élèveront les yeux vers les cieux et béniront «Celui qui vit éternellement, duquel la domination est une domination éternelle, et dont le royaume est de génération en génération... Il agit selon son bon plaisir dans l’armée des cieux et parmi les habitants de la terre ; il n’y a personne qui puisse arrêter sa main et lui dire : Que fais-tu ?» (Dan. 4:35-36).

Daniel rappelle au roi cette histoire solennelle dont tous les détails lui étaient bien connus, mais que, semblable à tous ceux que Dieu avertit en vain aujourd’hui, Belshatsar n’avait pas prise à coeur, pour en tirer profit et marcher dans Sa crainte. Bien au contraire, il s’était élevé contre «te Seigneur des cieux», le Roi de ceux qui règnent, dont toutes les oeuvres sont vérité et les voies jugement» (4:37), et l’avait provoqué à la colère en exaltant les dieux d’or et d’argent «qui ne voient et n’entendent et ne comprennent point» (v. 23). Derrière ces vaines idoles se cache le dieu de ce siècle, Satan, le redoutable adversaire sous la puissance duquel l’homme s’est délibérément placé en rejetant l’obéissance et l’hommage qui sont dus à Dieu seul, ce qui l’entraîne à sa ruine éternelle. La folie d’une telle conduite est dépeinte avec force dans les paroles du prophète : car qui peut délivrer l’homme au jour de la colère du Dieu saint, jour où Il «punira le monde pour sa malice et les méchants pour leur iniquité», jour où Il fera «trembler les cieux» et où «la terre sera ébranlée de sa place, par la fureur de l’Éternel des armées» ? (És. 13:9-13).

Il n’y a pas une parole de grâce dans le message adressé au roi, parce que la longue patience et les appels de Dieu avaient été foulés aux pieds par lui et son peuple idolâtre et corrompu. L’heure de la rétribution avait sonné. «La vengeance de l’Éternel, la vengeance de son temple» (Jér. 50:28), dont la destruction était pour ce roi impie un sujet de joie et de triomphe, fondait maintenant sur lui comme le vautour sur sa proie. Il en sera de même à la fin du temps actuel de la patience de Dieu. Les longs siècles durant lesquels sa grâce s’est déployée envers les hommes, n’ont fait que manifester la méchanceté irrémédiable qui les caractérise et amasser le poids de sa colère qui fondra sur un monde coupable du meurtre de son Fils : «Le grand jour de l’Éternel est proche ; il est proche et se hâte beaucoup» (Soph. 1:14).

«Et toi, son fils Belshatsar, tu n’as pas humilié ton coeur, bien que tu aies su tout cela» (v. 22). Il savait que le Dieu du ciel avait donné à Nébucadnetsar la gloire et la puissance, et qu’Il l’avait abaissé lorsque, dans son orgueil, il avait abandonné son Créateur. Malgré cela, il avait déshonoré et outragé ce grand Dieu qui ne donnera pas sa gloire à un autre (És. 42:8). Non seulement il ne s’était pas humilié devant Lui, mais il avait dépassé tous ses prédécesseurs en impiété et en rébellion. Aussi le terme de la patience et de la longue attente de Dieu était-il arrivé et l’heure de la vengeance avait sonné pour lui.

Il en sera de même bientôt pour le monde apostat qui rejette aujourd’hui le témoignage du Saint-Esprit. Quand le terme de la patience de Dieu sera arrivé, sa colère fondra sur ceux qui «n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés» (2 Thess. 2:10). La profession chrétienne devenue «Babylone la grande» sera jetée avec violence comme une pierre dans les eaux du jugement et ne reparaîtra plus à jamais (Apoc. 18:2). Le vaste système de corruption, d’idolâtrie et de mondanité, qui a usurpé pendant tant de siècles la place du témoignage de Dieu ici-bas sera balayé par un jugement inexorable et définitif, «car le Seigneur Dieu qui l’a jugée est puissant» (v. 8). «Ses péchés se sont amoncelés jusqu’au ciel, et Dieu s’est souvenu de ses iniquités» (v. 5). Les caractères moraux de la Babylone antique, sa corruption, sa haine du peuple de Dieu, son idolâtrie se retrouvent dans l’édifice de mensonge, d’iniquité, d’opposition aux vrais témoins du Seigneur que Satan a réussi à élever au sein même de la chrétienté. En outre, cette chrétienté, qui a renié ses relations avec l’Épouse céleste et s’est prostituée aux «rois de la terre» (v. 2), a encore la prétention d’être une prophétesse et de donner, dans une «coupe d’or», la vérité divine aux âmes, mais cette coupe est «remplie d’abominations»  (17:4). Le centre et le foyer de cette corruption se trouvent à Rome d’où sont émanées tant d’idolâtrie et de persécutions contre les saints de Dieu. Aussi Jean voit-il la prostituée «enivrée du sang des saints et du sang des témoins de Jésus» (v. 6). «Et en elle a été trouvé le sang des prophètes et des saints et de tous ceux qui ont été immolés sur la terre» (18:24). Puissions-nous écouter l’avertissement de la Parole : «Sortez du milieu d’elle, mon peuple, afin que vous ne participiez pas à ses péchés et que vous ne receviez pas de ses plaies» (v. 4). De même que le fidèle Daniel, nous sommes appelés à nous tenir éloignés de ce tourbillon qui emporte les hommes vers le jugement. Dans cette place de séparation, nous pourrons, comme lui, les avertir du danger qui les menace et, sans craindre leur courroux et leurs moqueries, nous pourrons proclamer le jugement qui va fondre sur eux et les supplier «d’être réconciliés avec Dieu» (2 Cor. 5:20).

L’heure du jugement avait sonné pour Babylone et il n’y avait plus de remède. Chaque minute qui s’écoule nous rapproche également du jour fatal établi par Dieu et connu de lui seul, «auquel il doit juger la terre habitée tout entière, par l’Homme qu’il a destiné à cela, de quoi il a donné une preuve certaine à tous, l’ayant ressuscité d’entre les morts» (Actes 17:31). Combien il est solennel de penser que nous sommes à la veille de ce moment d’angoisse où «l’homme vaillant poussera des cris amers» ! (Soph. 1:14).

«Qui de nous séjournera dans le feu consumant ? Qui de nous séjournera dans les flammes éternelles» ? (És. 33:14).

C’était de la part du Dieu des cieux, méprisé par le roi Belshatsar, qu’avait été envoyée la main mystérieuse qui écrivait la sentence sur la muraille. Il était trop tard pour parer au jugement inexorable qui allait fondre sur la cité, dont l’iniquité était montée jusqu’aux cieux. Le jour était venu où Dieu punirait «ses images taillées», et où, dans toute sa terre, gémiraient «ses blessés à mort» (Jér. 51:13, 52). Longtemps le peuple de Dieu avait souffert de sa cruelle oppression. Les fils d’Israël et les fils de Juda avaient été ensemble «opprimés» par elle. Aussi Dieu dit : «Je rendrai à Babylone et à tous les habitants de la Chaldée tout le mal qu’ils ont fait en Sion devant vos yeux» (v. 24).

Le jugement de l’Église apostate qui a foulé aux pieds pendant des siècles les saints de Dieu sera plus terrible encore : «Ô ciel, réjouis-toi sur elle, et vous les saints et les apôtres et les prophètes ! car Dieu a jugé votre cause en tirant vengeance d’elle» (Apoc. 18:20). Alors «le mystère de Dieu sera terminé, comme il en a annoncé la bonne nouvelle à ses esclaves les prophètes» (10:7). La patience de Dieu à l’égard du mal fut souvent une énigme pour la foi des saints écrasés sous le poids de la persécution et de la haine d’ennemis acharnés à détruire le nom et le témoignage du Seigneur. Tout en retenant le flot de l’iniquité par sa providence et son gouvernement, Dieu a souvent permis, pendant le temps de la grâce, que le méchant triomphe et prospère, tandis que, pour l’amour de lui, les justes étaient «estimés comme des brebis de tuerie» (Rom. 8:36). Dans ce grand jour de rétribution, le mystère des voies de Dieu s’éclairera. Il rendra «la tribulation à ceux qui font subir la tribulation» à ses bien-aimés et donnera à ceux-ci le repos et la gloire «dans la révélation du Seigneur Jésus du ciel».

Les mots écrits sur la muraille étaient en chaldéen, langue de Babylone, plus familière aux sages du roi qu’à Daniel. Aussi leur incapacité totale de déchiffrer le message divin fait-elle ressortir l’ignorance absolue de l’homme quant aux pensées de Dieu, l’impossibilité dans laquelle il se trouve de comprendre la révélation divine, de se l’approprier et d’en faire profiter les autres. Mais Dieu manifestait le bon plaisir qu’il trouvait en son serviteur Daniel qui avait «appliqué son coeur à comprendre et à s’humilier devant son Dieu» (Dan. 10:12). Daniel avait honoré Dieu en refusant de s’associer à l’iniquité et à l’idolâtrie qui l’entouraient à Babylone ; aussi Dieu l’honore maintenant en lui donnant l’intelligence de ses pensées et la sagesse pour les communiquer aux autres. Il peut, sans hésiter, déchiffrer et expliquer le redoutable message adressé au roi et à ses grands, message que les sages de Babylone, frappés d’aveuglement, n’avaient pas compris : «Voici l’interprétation des paroles : Mené (compté) : Dieu a compté ton royaume et y a mis fin» (v. 26). Les jours de l’homme sont comptés. «Tu m’as donné des jours comme la largeur d’une main» (Ps. 39:6). Maintenant sa fin était venue.

«Thekel (pesé) : Tu as été pesé à la balance, et tu as été trouvé manquant de poids» (v. 27). Toute la vie de l’impie monarque avait été pesée à la balance du sanctuaire et dans toute cette carrière qui s’était déroulée dans la satisfaction des convoitises mondaines, rien ne répondait aux exigences de la sainteté de Celui dont «les yeux sont trop purs pour voir le mal» (Hab. 1:13). Il en est exactement de même de tout homme dans son état de chute et d’éloignement de Dieu. Quelle découverte pour une âme amenée dans la lumière de sa présence et qui doit s’écrier : «Malheur à moi ! car je suis perdu !»

Upharsin (divisé) : «Pérès : Ton royaume est divisé et donné aux Mèdes et aux Perses» (v. 28). Non seulement sa vie était ôtée de la terre, mais son administration lui était enlevée. Il avait été un économe infidèle et son royaume lui est retiré. Tous les biens que Dieu départit à l’homme ici-bas constituent cette administration dont il est responsable envers son Créateur. Infidèle à tous égards, il est sous une sentence de condamnation qui, tôt ou tard, s’exécute et l’éloigne de la scène de son activité dans ce monde. Il doit alors rencontrer Dieu comme Juge, car : «Il est réservé aux hommes de mourir une fois et après cela le jugement» (Héb. 9:27). Heureux ceux qui, par la foi, se réfugient à l’abri de la croix. Sachant alors que le Christ a été offert une fois pour porter leurs péchés, ils attendent son retour glorieux pour leur délivrance éternelle. Dans l’intervalle, ils pourront employer à son service les biens terrestres dont l’administration va leur être ôtée, en attendant de recevoir ceux qui leur appartiennent, les richesses de gloire qui leur ont été acquises par son oeuvre de rédemption (Luc 16:1-13).

En vain le roi veut détourner le coup qui le menace, en comblant Daniel de récompenses (v. 29). L’heure de la vengeance avait sonné pour Babylone et son prince, et rien ne pouvait détourner la main du Tout-Puissant, ni annuler son décret. Le roi est tué en cette même nuit et le royaume passe aux mains des Mèdes et des Perses, selon la révélation qui en avait été donnée à Nébucadnetsar dans la statue d’or (Dan. 2:32, 39). «Que celui qui est injuste commette encore l’injustice ; et que celui qui est souillé se souille encore» (Apoc. 22:11). Il était trop tard pour apporter aucun changement à la destinée éternelle du roi impie qui avait bravé le Dieu des cieux. Il en sera de même bientôt de la génération actuelle qui foule aux pieds les appels de la grâce. Puissions-nous prendre à coeur les avertissements de la Parole qui nous dit : «Que celui qui est juste pratique encore la justice et que celui qui est saint soit sanctifié encore» (v. 11).

 

4                    Chapitre 6    DANIEL DANS LA FOSSE AUX LIONS

ME 1927 p. 123, 137, 141

4.1   La condamnation inique

La fin du règne de Belshatsar, dont le chapitre précédent nous donne le récit, nous amène au terme de la première monarchie à laquelle Dieu avait confié le pouvoir suprême après la chute et le jugement de Jérusalem. «Les temps des nations» qui durent encore aujourd’hui, mais dont la fin approche rapidement (Luc 21:24), avaient commencé avec Nébucadnetsar, la tête d’or de la statue qu’il avait vue en songe (Daniel 2). Cette puissance gentile dont le centre était à Babylone faillit complètement à sa responsabilité, et le royaume, confié entre ses mains, sombra dans la rébellion ouverte contre Dieu, comme nous le montre l’histoire de Belshatsar (Daniel 5). Maintenant commence une nouvelle monarchie générale, celle des Médo-Perses, figurée dans la vision du chap. 2 par la poitrine et les bras d’argent de la statue (Dan. 2:32, 39). Cette partie était inférieure à la précédente, non en étendue, mais par son éloignement de la source de sa puissance qui ne lui avait pas été conférée directement par Dieu, comme celle du premier roi. Cette infériorité se manifeste en ce que l’autorité suprême n’était plus exercée d’une façon absolue, par le chef de l’empire de la part de Dieu, et comme étant responsable envers lui seul (Dan. 5:19), mais comme étant limitée par «la loi des Mèdes et des Perses» (6:15), établie par les grands du royaume, et à laquelle le roi devait se soumettre. On comprend qu’une autorité suprême, absolue entre les mains d’un monarque qui ne l’exerce pas dans le sentiment de sa responsabilité envers Dieu et dans sa crainte, devienne facilement une tyrannie insupportable. Entre les mains du Roi des rois qui dominera «en la crainte de Dieu» (2 Sam. 23:4 ; Ps. 72), cette autorité sera la source d’une bénédiction parfaite et immuable.

Au commencement du chap. 6, nous trouvons de nouveau Daniel occupant un poste important dans le royaume, ce qui nous montre que le nouveau roi avait conscience de sa valeur morale et avait du respect pour sa piété. Tel n’avait pas été le cas de Belshatsar, à l’égard duquel Daniel avait observé une séparation absolue. Toutefois le coeur de l’homme est le même dans tous les temps : cette nouvelle épreuve à laquelle Dieu le soumettait, en établissant un second empire, et en plaçant en d’autres mains l’autorité suprême, allait aboutir, comme la précédente, à une ruine complète. À certains égards, la monarchie perse était moralement supérieure à la première, et quelques-uns des souverains de cet empire furent, dans la main de Dieu, des instruments pour le rétablissement et la délivrance de son peuple (voir Esdras et Néhémie). Néanmoins le récit que nous avons sous les yeux prouve avec quelle facilité l’homme se détourne de son Créateur et devient l’instrument de l’ennemi dans sa haine contre les témoins du vrai Dieu. Puisse l’exemple de Darius nous donner une leçon salutaire et nous garder du chemin de l’orgueil et de l’apostasie, dans lequel la chrétienté professante s’engage de plus en plus.

Il y avait en Daniel une sagesse extraordinaire, fruit de sa longue carrière de fidélité, de piété et de crainte de Dieu (v. 3). Il était alors très âgé, puisqu’il avait vécu à Babylone pendant tout le temps de la monarchie babylonienne qui avait duré soixante-dix ans. Dès sa jeunesse, il avait arrêté dans son coeur de ne pas se souiller par le contact de l’idolâtrie qui l’entourait, et sa vie s’était écoulée dans la séparation du mal et la communion avec son Dieu. Combien précieux pour Celui qui a les yeux trop purs pour voir le mal, était un témoignage semblable au milieu de la ruine de son peuple ! Arrivés aussi à la fin d’une économie caractérisée par le naufrage de l’Église, puissions-nous imiter la foi de cet homme de Dieu ; ainsi que son attachement à la Parole. Cette fidélité de Daniel attire sur lui la haine des hommes (v. 4). Cela est vrai dans tous les temps (2 Tim. 3:12). L’aversion qu’ils éprouvent pour ceux qui marchent dans l’obéissance à Dieu est la conséquence du fait qu’ils aiment mieux «les ténèbres que la lumière», parce que leurs oeuvres sont mauvaises (Jean 3:19, 20). Ce fut le «chemin de Caïn»  (Jude 11) qui haïssait son frère «parce que ses oeuvres étaient mauvaises et que celle de son frère étaient justes» (1 Jean 3:12). Telle est encore aujourd’hui l’opposition du coeur de l’homme déchu, à la vie de Dieu manifestée chez ses enfants.

Les ennemis de Daniel l’entouraient et complotaient contre lui dans les ténèbres (v. 4). C’est ce que firent aussi les adversaires du parfait Serviteur, tant que dura son ministère de grâce au milieu d’eux. C’est ainsi que, de siècle en siècle, se manifeste aussi la haine du coeur de l’homme contre Dieu et la malice de l’Adversaire. Heureux sommes-nous si, semblables à Daniel, nous sommes trouvés fidèles dans l’administration qui nous est confiée ! «Ils ne pouvaient trouver aucun sujet d’accusation ni aucune faute, parce qu’il était fidèle» (v. 4). Hélas ! combien souvent le témoignage de notre vie ne répond pas aux paroles de nos lèvres, jetant du blâme sur le beau Nom qui est invoqué sur nous : «Ce qui est requis dans des administrateurs, c’est qu’un homme soit trouvé fidèle» (1 Cor. 4:2). Puisse le Seigneur dire à chacun de nous, au jour de sa gloire : «Bien, bon et fidèle esclave, tu as été fidèle en peu de chose, je t’établirai sur beaucoup : entre dans la joie de ton Maître» (Matth. 25:21, 23). Appliquons-nous avec ardeur à lui «être agréables», en vue du jour de la manifestation devant son tribunal (2 Cor. 5:9). Cherchons à être des lettres de Christ, connues et lues de tous les hommes, afin qu’au jour de la visitation ceux-ci se souviennent des bonnes oeuvres qu’ils ont observées chez ceux qui marchent dans le chemin de l’obéissance et que, leur volonté propre ayant été brisée par l’épreuve, «ils glorifient Dieu» (1 Pierre 2:12), en reconnaissant que c’est sa grâce qui est la source de tout le bien produit chez les siens.

Connaissant la fidélité de Daniel, non seulement à l’égard de son souverain terrestre, mais aussi relativement à «la loi de son Dieu», ses ennemis lui tendent un piège. Sa piété leur était si connue qu’ils étaient assurés que le seul moyen d’arriver à leurs fins était de l’obliger à enfreindre ce qui, pour lui, était une obligation impérieuse, plus précieuse et importante que la vie même, à savoir l’hommage qu’il devait rendre à son Dieu. Comprenant qu’il préférerait la mort à la désobéissance, ils «consultent ensemble» comme le firent plus tard les adversaires de Christ, pour se saisir de lui par ruse et le faire mourir (Matth. 26:3).

Tous les grands du royaume se réunissent en foule auprès du monarque et obtiennent de lui la signature d’un édit portant que quiconque ferait «une demande à quelque dieu ou à quelque homme que ce soit, durant trente jours», sinon au roi, serait «jeté dans la fosse aux lions» (v. 7-8). La promulgation d’un pareil décret plaçait Darius dans la position qu’occupera l’Antichrist à la fin, et donnait à cette scène solennelle le caractère typique de l’iniquité consommée de l’homme à la fin de son histoire de révolte contre Dieu. Quand l’homme de péché se présentera comme étant Dieu est réclamera les hommages dus à Celui qui a créé les cieux et la terre, Il appellera sur lui la vengeance immédiate du Tout-Puissant.

En dépit des lumières que bien lui avait données et du respect qu’il avait pour Daniel, le roi perse accepte de prendre la place du vrai Dieu en signant l’impie défense que lui imposent les ennemis de son fidèle serviteur. Tel est l’homme, incapable de faire le bien et prompt à faire le mal et à se mettre au service de l’adversaire, pour accomplir ses desseins meurtriers. L’histoire d’Hérode nous fournit l’exemple d’un fait analogue. Sa conscience lui dictait du respect pour Jean-Baptiste ; mais, incapable de réagir contre la tentation que Satan plaçait devant lui, il devient son instrument pour mettre à mort le fidèle témoin du Seigneur (Marc 6:14-29). Quels que soient les désirs et les bonnes intentions du coeur naturel, il demeure toujours vrai que «la chair ne se soumet pas à la loi de Dieu et qu’elle ne le peut pas». Malgré les reproches de sa conscience, l’homme est tout à fait incapable d’éviter le mal et d’accomplir le bien.

L’édit blasphématoire du roi étant signé, le chemin de Daniel est clairement tracé. Tant que l’obéissance à l’autorité peut se concilier avec celle qui est due à Dieu et à sa Parole, le fidèle doit s’y soumettre implicitement en reconnaissant qu’«il n’existe pas d’autorité, si ce n’est de par Dieu, de sorte que celui qui résiste à l’autorité résiste à l’ordonnance de Dieu» (Rom. 13:1, 2). Par contre, si le pouvoir devient satanique en exigeant des fidèles ce qui est incompatible avec la fidélité à Dieu, alors «il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes» (Actes 5:29). Sans bravade aucune, Daniel persévère paisiblement dans le chemin de dépendance de Dieu dans lequel il avait toujours marché. S’il n’avait pas vécu dans cette dépendance avant qu’arrivât le jour de l’épreuve, il aurait été pris au dépourvu, lorsque celle-ci fondit sur lui et n’aurait pu tenir tête à l’orage. Il s’était fortifié en Dieu et dans la puissance de sa force et, «au jour mauvais», il pouvait «tenir ferme» (Éph. 6:10-12). Lorsque l’ennemi fond sur nous avec tous ses artifices, il est trop tard pour revêtir l’armure complète de Dieu. Mettons donc à profit les jours paisibles dont nous jouissons pour nous exercer à la piété, en nous adonnant à la prière et au jugement de nous mêmes, afin que nous soyons prêts à résister victorieusement aux assauts de l’adversaire.

Daniel, sachant que l’édit impie était signé, entre dans sa maison et, «ses fenêtres étant ouvertes du côté de Jérusalem», s’agenouille trois fois le jour pour prier et rendre grâces «à son Dieu, comme il avait fait auparavant» (v. 10). L’épreuve ne le trouve pas désarmé et sans force. Il avait marché dans une étroite communion avec son Dieu, avant que l’orage de la persécution l’at-teignît, de sorte que, quand les circonstances deviennent adverses, il a toute la force de Dieu à sa disposition pour les traverser. Non seulement il prie, mais il rend grâces comme il l’avait fait auparavant. Souvent, lorsque le chemin devient sombre et difficile, nous sommes accablés sous le poids de l’adversité et, au lieu de faire entendre la voix de la louange, nous ne savons plus que gémir et nous plaindre. Imitons la foi de Daniel qui se confie implicitement en Celui auquel il avait rendu un si fidèle témoignage dans le pays de l’idolâtrie et qui, dans la détresse, est «toujours facile à trouver» (Ps. 46:1).

Pourquoi Daniel ouvre-t-il les fenêtres de sa chambre haute «du côté de Jérusalem» pour prier et rendre grâces à Dieu ? Ce simple fait nous montre combien la Parole habitait richement en lui et réglait toutes ses voies. Il se souvenait de la prière de Salomon, lors de la dédicace du temple, et prenait l’attitude prescrite par le grand roi à ceux qui, sous les conséquences de leurs fautes, se trouvaient, par le juste jugement de Dieu, dans le pays de l’exil : Si, rentrant, en eux-mêmes, «ils reviennent à toi», et prient l’Éternel, «en se tournant vers la ville que tu as choisie... alors écoute dans les cieux leur prière et leur supplication» (1 Rois 8:44-53). Daniel prenait la place qui convenait à lui captif, quoiqu’il fut personnellement fidèle, approuvé de Dieu et le dépositaire de ses pensées. Il savait, qu’en réponse à la requête de Salomon, l’Éternel lui avait dit : «J’ai entendu ta prière et la supplication que tu as faite devant moi» (1 Rois 9:3). Dans un jour de ruine tel que le nôtre, il nous convient d’en mener deuil et de la confesser comme étant le résultat de notre propre infidélité. Puis, comme Daniel, sachons puiser dans la Parole les instructions nécessaires à ceux qui sont appelés à glorifier le Seigneur au milieu de la confusion et du désordre afin que notre attitude et notre conduite tout entières lui soient agréables. Il y a un chemin tracé pour nous dans les temps sombres de la fin comme il y en avait un pour les captifs de Babylone.

Daniel s’agenouillait pour prier. Cette attitude exprimait l’humble dépendance de Dieu qu’il réalisait, ainsi que l’oubli de soi-même et le sentiment de la grandeur infinie de Celui devant lequel son âme s’inclinait dans une intime confiance en son amour, sa fidélité et sa puissance.

La foi s’appuie simplement sur Dieu et ne craint nullement les conséquences qui peuvent résulter de sa fidélité. En s’attendant ainsi à lui, elle peut compter sur son intervention puissante dans la détresse et peut déjà rendre grâces pour la délivrance, avant que celle-ci soit réalisée. Ce fut ainsi que Josaphat, sur le point de rencontrer l’adversaire, «établit des chantres qui disaient en sortant devant les troupes équipées : Célébrez l’Éternel, car sa bonté demeure à toujours» (2 Chr. 20:31). Au  moment où ils commençaient le chant de triomphe et la louange, l’Éternel opéra une grande délivrance. Il n’a pas besoin de nous pour accomplir ses merveilles ; Il nous invite seulement à le faire intervenir dans nos peines et nos dangers pressants, en nous assurant que si nous croyons ses promesses, nous ferons l’expérience de sa fidélité et de sa miséricorde.

Les ennemis de Daniel s’empressent de dénoncer au roi le mépris de l’édit qu’il avait promulgué (v. 13). Ils trouvent le fidèle serviteur de Dieu dans l’attitude de la prière et de la supplication à son Dieu. Cette expression répétée plusieurs fois dans ce récit, nous montre combien étaient agréables à Celui que les hommes méprisent, et dont ils oublient les droits et la gloire, la piété et la dépendance de son humble témoin. Sans craindre les conséquences de sa fidélité. Daniel proclamait hautement le lien qui, par la foi, l’unissait au Dieu vivant et vrai, Créateur des cieux et de la terre, qui seul est digne d’être invoqué par ses créatures, et qui est «le Conservateur de tous les hommes, spécialement des fidèles». Dans un jour d’apostasie comme celui qui va se lever sur la terre, et dont la scène que nous considérons était l’image anticipée, combien sera précieux au Seigneur le témoignage de ces fidèles affligés qui refuseront de rendre hommage à la bête et au faux prophète et qui, malgré de nombreuses et amères détresses, seront secourus et délivrés.

Les ennemis de Daniel étaient heureux de se débarrasser de lui (v. 13-15). Les hommes haïssent la lumière qui les condamne, les fidèles répandant autour d’eux la bonne odeur de Christ. Projetée sur les oeuvres des ténèbres, cette lumière en fait ressortir le caractère odieux et les reprend. Aussi rien n’est plus puissant qu’une vie de sainteté pour convaincre de péché ceux qui marchent dans les ténèbres (*). Si cette lumière que répand une vie de piété comme l’était celle de Daniel pénètre dans les coeurs, elle peut les amener à la connaissance du Dieu Sauveur. Si elle est repoussée, elle provoque la haine et la persécution. Il en fut ainsi du Témoin par excellence qui rencontra de la part de ses créatures, en révolte contre Dieu, une opposition acharnée allant jusqu’à la mort de la croix.

(*) Reprendre et convaincre sont exprimés par le même mot dans l’original. Si nous nous laissons convaincre et juger, nous sommes repris et éclairés (voir Jean 16:8).

Le roi était affligé de devoir appliquer à Daniel la sentence qu’il avait prononcée contre tout transgresseur de l’édit (v. 14). Sa conscience lui reprochait une iniquité pareille contre un homme qui l’avait servi fidèlement, tout en servant son Dieu. Comme Hérode qui «craignait Jean, le sachant homme juste et saint» (Marc 6:20), il redoutait les conséquences de son jugement impie, sans avoir la force morale nécessaire pour résister aux méchants qui l’entouraient. C’est ainsi que, malgré lui, l’homme est entraîné dans la voie où Satan le conduit. Esclave de ses passions et de celui qu’il a choisi pour maître, il court à la rencontre de la perdition éternelle. Dénué de sens moral et de crainte de Dieu, le roi finit par céder aux sollicitations de son entourage et donne l’ordre que Daniel soit jeté dans la fosse aux lions (v. 10).

 

4.2   Portée prophétique

Pour résumer brièvement le sujet qui nous occupe, nous remarquerons que nous trouvons, dans les scènes qui se déroulent devant nous aux chap. 5 et 6, le tableau typique des deux grands caractères du mal qui seront manifestés à la fin de l’histoire de ce présent siècle, à savoir Babylone et la Bête. Au chap. 5, c’est Babylone, dans son idolâtrie, sa corruption, son luxe, sa grandeur, son mépris des choses saintes. L’instrument par lequel elle est jugée n’est pas meilleur qu’elle devant Dieu, puisque, comme nous venons de le voir, le chap. 6 nous présente en Darius un développement plus grave encore de l’iniquité et de la révolte de l’homme déchu. Par son édit blasphématoire, Darius devient le type de l’homme de péché qui «s’oppose et s’élève contre tout ce qui est appelé Dieu ou qui est un objet de vénération» (2 Thess. 2:4). En défendant d’adresser aucune requête à un dieu quelconque excepté à lui-même, le roi perse, dans son orgueil, voulait se faire égal à Dieu, ce que fera d’une manière absolue le terrible personnage de la fin, dans lequel le péché de la créature apostate trouvera sa pleine consommation. Avec la permission divine, le mal devant être pleinement manifesté et jugé, le dragon donnera toute sa puissance à la Bête et au faux prophète, formant ainsi avec ces deux instruments de sa haine contre Dieu et de son orgueil, une effrayante contrefaçon de la Trinité. «Des miracles, des signes et des prodiges de mensonge» viendront confirmer les prétentions de l’inique, afin que tous ceux qui n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés, reçoivent une énergie d’erreur qui les placera inévitablement sous le pouvoir du mensonge, de sorte qu’ils acclameront la Bête et lui rendront hommage.

Au chap. 17 de l’Apocalypse, nous avons le même ordre d’événements prophétiques que dans le livre de Daniel. D’abord, nous y trouvons l’Église apostate, sous l’image de Babylone, dans sa gloire mondaine, sa corruption, son mépris audacieux des droits de Christ, sa haine des saints. Puis elle est jugée par le moyen de la Bête et des dix rois subordonnés à celle-ci, comme le fut Babylone autrefois par la puissance médo-perse. Ensuite la Bête manifeste un caractère satanique encore plus prononcé que la prostituée. De concert avec l’Antichrist, son lieutenant spirituel, elle usurpe la place de Dieu lui-même. Ce sera l’apogée de la révolte de la créature, qui attirera sur elle un prompt jugement. Le Seigneur apparaîtra soudain dans sa puissance et sa gloire et anéantira ces deux rebelles qui seront jetés vivants dans le lac de feu (Apoc. 19:20).

Comme nous l’avons remarqué, le caractère personnel de Darius ne doit pas être confondu avec celui de l’inique de la fin, bien que son édit fît de lui un type de la Bête, dans ses prétentions et sa révolte contre le vrai Dieu. Il avait une haute estime pour la piété de Daniel et sa conduite lui reprochait l’acte odieux dont il s’était rendu coupable à son égard : «Ton Dieu que tu sers continuellement, lui dit-il, te sauvera» (v. 16). Combien était remarquable le témoignage du fidèle serviteur qui était à cette heure l’objet de la haine et de la malice de ses ennemis ! Sa marche intègre s’imposait au respect du roi et aggravait la responsabilité de celui-ci, tout en prouvant que, malgré sa coupable opposition au vrai Dieu, il n’était pas insensible à ce témoignage suscité au milieu des ténèbres dans lesquelles il était plongé. Le roi a le sentiment intime de la grandeur et de la puissance de Celui que servait si fidèlement Daniel, en contraste avec les idoles qui ne sont que néant et mensonge. Il reconnaît qu’Il est le Dieu vivant (v. 20, 26), devant qui marchait Daniel et qu’il honorait, puisqu’il préférait sacrifier sa vie plutôt que de méconnaître ses droits, en donnant sa gloire à un autre. Le monde qui nous entoure et observe notre marche pourrait-il nous rendre témoignage que nous servons continuellement le Seigneur ? N’arrive-t-il pas souvent, au contraire, que «l’enseignement de notre Dieu Sauveur» (Tite 2:10) est «blâmé» à cause des infidélités de ceux qui professent lui appartenir, au lieu d’être «orné» par leurs bonnes oeuvres ?

4.3   La fosse au lion et la délivrance

Combien était admirable cette activité spirituelle qui mettait l’âme de Daniel en relation continuelle avec Dieu et qui était entretenue par une dépendance constante de lui ! Rappelons ici trois grands caractères moraux du Résidu fidèle que nous trouvons dans ce livre : 1° Par obéissance à Dieu et à sa Parole, il s’était séparé rigoureusement de la corruption et de l’idolâtrie qui l’entourait à Babylone (Dan. 1). 2° Comme résultat et récompense de sa fidélité, Dieu lui accordait l’intelligence de ses pensées, montrant ainsi au monarque païen que si, dans Son gouvernement, Il avait dû châtier et livrer entre ses mains son peuple infidèle, son amour et ses desseins étaient toujours concentrés sur lui (chap. 2). 3° Dieu s’identifiait avec ceux qui ne reniaient pas son Nom, les reconnaissait publiquement comme ses témoins et marchait avec eux dans la fournaise où les avait conduits leur fidélité. Ils avaient marché avec lui dans le palais du roi et le Fils de Dieu marchait avec eux dans la fournaise du roi (chap. 3).

La pierre scellée du cachet du roi qui fut mise à l’entrée de la fosse (v. 17) nous rappelle celle qui fut placée sur la tombe du Seigneur (Matt. 27:66). Le but en était le même, et dans les deux cas, ne servit qu’à rendre plus complètes la défaite et la confusion des adversaires. Toutes les précautions prises par les méchants pour empêcher la manifestation de la grandeur de Dieu en faveur de ceux qui sont les objets de leur haine, ne servent qu’à faire éclater la gloire de Celui qui se montre puissant en faveur de ceux qui le craignent. Le roi était dans l’angoisse et il passa la nuit dans le jeûne et l’insomnie.

Le roi s’écrie : «Daniel, serviteur du Dieu vivant, ton Dieu que tu sers continuellement, a-t-il pu te délivrer des lions» ? (v. 20). Combien il est désirable que ce caractère de serviteurs du Dieu vivant soit tellement empreint sur toute notre marche et notre conduite que le monde même nous en rende témoignage ! Le nom du Dieu vivant implique le néant des faux dieux qui ne voient, ni n’entendent.

Le roi avait dit : «Ton Dieu», Celui auquel tu appartiens, que tu connais et que tu sers continuellement ; Daniel répond : «Mon Dieu» : Le Dieu que je possède, qui m’a amené dans une relation vivante et personnelle avec lui-même, Celui qui délivre les siens dans la détresse, qui répond à la foi et honore la fidélité.

Avec quelle joie Daniel peut annoncer au roi la délivrance merveilleuse dont il venait d’être l’objet de la part de son Dieu ! Quelle nuit bénie il avait passée dans la fosse, entouré de la protection de Celui qui commande à la nature entière et dont la présence, réalisée dans son âme, lui avait apporté la paix, la bénédiction et la délivrance de toute atteinte du pouvoir de l’ennemi. Dieu avait envoyé son ange pour fermer la gueule des lions. Les anges «puissants en force qui exécutent sa parole, écoutant la voix de sa parole», sont les serviteurs empressés du Très-Haut. «Ce sont des esprits administrateurs envoyés pour servir en faveur de ceux qui vont hériter du salut» (Hébr. 1:14). Lorsqu’il s’agit des circonstances extérieures des rachetés ici-bas, les anges sont les instruments de l’intervention divine en leur faveur (Act. 10:3 ; 12:7-10). L’ange qui délivra les apôtres de la prison ne fut pas envoyé pour annoncer l’Évangile, mais, les ayant libérés de leurs chaînes, il les conduisit dehors et leur dit : «Allez, et vous tenant dans le temple, annoncez au peuple toutes les paroles de cette vie» (Actes 5:19). Ces hommes, affranchis de l’esclavage de Satan et du péché, sont employés ensuite par le Seigneur pour porter le message du salut à ceux qu’Il veut arracher à leur captivité.

Daniel marchait fidèlement devant Dieu et devant les hommes : devant Dieu et devant le roi, il était sans reproches (v. 22). Il avait la cuirasse de la justice pratique qui le garantissait des attaques de l’ennemi. Il se recommandait «comme serviteur de Dieu» (2 Cor. 6:4) par toute sa marche intègre et droite. Quel exemple pour nous qui sommes appelés à servir le Seigneur dans des jours de ruine, semblables à bien des égards à ceux dans lesquels il vivait ! Pour cela, il faut que notre activité se déploie «devant notre Dieu et Père», dans une dépendance constante de lui, afin que les fruits de la vie qu’Il nous a donnée se manifestent dans notre «oeuvre de foi», notre «travail d’amour» et notre «patience d’espérance de notre Seigneur Jésus Christ» (1 Thes. 1:3). La déchéance de l’Église n’est pas une excuse pour marcher dans le relâchement et la désobéissance, pas plus que ne l’était pour Daniel, la misère et la dispersion de son peuple. Cet état de choses était, au contraire, un motif de plus pour cet homme de foi, comme il doit l’être pour nous, de veiller et de prier nuit et jour. C’est ainsi que nous jouirons de l’approbation du Seigneur et pourrons devenir les dépositaires de ses pensées et ses témoins devant le monde.

Daniel fut tiré de la fosse et, à la confusion de ses adversaires, «aucun mal ne fut trouvé sur lui, parce qu’il s’était confié en son Dieu» (v. 23). Cette confiance de la foi reçut une récompense éclatante. L’homme de Dieu, fidèle et dépendant, fut honoré devant tous ; sa foi fut connue de tous, et Dieu fut glorifié, au milieu de ce peuple idolâtre, par le déploiement de sa puissance en faveur de son témoin humble et obéissant. Une scène infiniment plus glorieuse se déroula aux portes de Jérusalem, lorsque l’Homme de douleurs qui, dans sa soumission parfaite à la volonté du Père, était descendu dans «le puits de la destruction», fut «ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père», et fut ainsi «déterminé Fils de Dieu en puissance». Le bon plaisir que le Dieu saint avait trouvé dans l’obéissance jusqu’à la mort du Fils de son amour fut manifesté avec éclat, lorsqu’il sortit triomphant du tombeau et s’assit à la droite de la Majesté dans les cieux. Bientôt les portes du royaume s’ouvriront toutes grandes devant lui.

Le jugement des ennemis de Daniel suit de près sa délivrance (v. 24). Il en sera ainsi au jour de Christ qui sera un jour de bénédiction et de gloire pour tous ceux qui l’ont suivi, honoré et servi dans la souffrance ; et un jour de colère, de tribulation et d’angoisse pour ses ennemis. Une destruction subite fondra sur ceux-ci et ils n’échapperont point.

Le déploiement de la puissance de Dieu en bénédiction et en délivrance pour son fidèle témoin et en jugement sur ses ennemis amène le roi à confesser qu’Il est le Dieu vivant que l’on doit craindre et honorer (v. 26). C’est un tableau anticipé de la bénédiction de ce jour glorieux où tous les coeurs seront soumis à l’autorité du grand Roi. Une «paix multipliée» sera répandue par toute la terre, car l’oeuvre de la justice sera la paix, repos et sécurité à toujours» (Ésaïe 32:17). Darius invite tous les peuples à l’obéissance au seul vrai Dieu, dont le «royaume ne sera, pas détruit et dont la domination durera jusqu’à la fin» (v. 26). Tel sera le fruit béni de l’intervention de sa puissance pour ôter le mal de la terre et amener tous les coeurs à la soumission due à son Oint. «Il sauve et il délivre», dit Darius (v. 27). «Il délivrera le pauvre qui crie à lui et l’affligé qui n’a pas de secours» (Ps. 72:12). Daniel en fit l’expérience bénie. Plus tard ses saints, dans la détresse, exposés à la fureur de l’Antichrist, seront aussi les objets de la miséricorde et pourront le célébrer «pour sa bonté et pour ses merveilles envers les fils des hommes». Ne pouvons-nous pas joindre notre voix à ce concert de louanges et raconter les grandes choses que notre Dieu Sauveur a faites pour nous ? Au jour de gloire qui s’approche, il y aura, dans les cieux et sur la terre, une même voix pour rendre hommage à l’Agneau. Les saints célestes entourant son trône, son peuple terrestre pour lequel Il opérera «des signes et des prodiges» et qu’Il délivrera, comme Daniel le fut «de la puissance des lions» (v. 27), et enfin les nations amenées à l’obéissance de la foi, donneront gloire à Dieu en disant : «À Celui qui est assis sur le trône et à l’Agneau, la bénédiction et l’honneur et la gloire et la force, aux siècles des siècles !» (Apoc. 5:13).

Le dernier verset nous amène à la fin du témoignage du fidèle serviteur dont l’Esprit de Dieu nous raconte l’histoire dans ce livre. «La fin d’une chose vaut mieux que son commencement», nous dit le sage prédicateur (Eccl. 7:8). Jusqu’au bout de sa carrière, Daniel prospéra (v. 28), parce que Dieu était avec lui dans le chemin de la fidélité et de l’obéissance, dans lequel il avait marché avec tant de persévérance et de piété. Puissions-nous nous souvenir de l’exemple qu’il nous a donné et, considérant l’issue de sa conduite, imiter sa foi (Héb. 13:7). Après avoir servi fidèlement son Dieu dans l’opprobre et la souffrance, il se repose maintenant avec «les esprits des justes consommés» (Héb. 12:23), en attendant le grand jour de la gloire : «Et toi, va jusqu’à la fin ; et tu te reposeras, et tu te tiendras dans ton lot, à la fin des jours» (Dan. 12:13). Jusqu’à la fin du temps qui lui fut accordé ici-bas, il suivit humblement la voie de la justice, en rendant un témoignage inébranlable aux droits du vrai Dieu. Il attend maintenant dans la paix ineffable du paradis de Dieu le jour de la rémunération et de la gloire. Puisons comme lui à la source de la force et de la sagesse, afin de suivre ses traces dans la voie de l’obéissance jusqu’à la fin. Notre sentier sera alors celui du juste, dans lequel la lumière resplendit et va en croissant «jusqu’à ce que le plein jour soit établi» (Prov. 4:18).

 

 

 

5                    Chapitre 9    La  CONFESSION  de  DANIEL  et  la  RÉPONSE  de  DIEU

ME 1920 p. 190, 212, 230

5.1   La confession de Daniel

La chute et la destruction de Babylone amenèrent un changement important dans les voies de Dieu, changement annoncé dans la vision du chapitre 2 de Daniel, à savoir la fin du premier empire auquel il avait confié la monarchie générale à la suite du jugement exercé sur Jérusalem. La suprématie sur les nations ayant été retirée au royaume babylonien fut confiée à l’empire médo-perse : la poitrine et les bras d’argent qu’avait vus le roi Nébucadnetsar dans le songe prophétique que Dieu lui avait donné (Dan. 2:32).

Or, la première année du règne de Darius le Mède, Daniel comprit par la lecture des Saintes Écritures que la désolation de Jérusalem devait durer soixante-dix années, comme Jérémie l’avait annoncé (Jér. 29:10), et que l’accomplissement de la miséricordieuse promesse de Dieu quant à la restauration de son peuple devait être à la porte. Nous ne voyons pas Daniel ici dans le caractère d’un prophète recevant directement d’en-haut la révélation des pensées divines, mais comme un homme de Dieu qui prenait son plaisir à méditer la Parole écrite, profitant ainsi des ressources mises à la portée de tous les fidèles pour entrer dans la connaissance des pensées et des voies du Très-Haut.

C’est là un exemple important et précieux pour nous qui possédons toute l’Écriture et avons le privilège de nous en nourrir pour être instruits par elle. L’effet produit sur l’âme de Daniel par cette communication divine est digne de notre attention. Il n’est pas rempli de joie et d’exaltation à la pensée que son peuple sera rétabli dans sa terre et que les jours de sa gloire passée vont revenir. Au contraire, il est pénétré d’une profonde humiliation devant Dieu et, du sein de sa douleur, il élève son âme à Lui, en repassant et en confessant en sa présence l’infidélité et la révolte d’Israël, ainsi que le jugement qui en a été la conséquence. Il était nourri de la Parole et dirigé par elle dans toute son attitude : lors de la dédicace du temple, Salomon avait demandé à Dieu de répondre en grâce à la supplication que son peuple captif lui adresserait en se tournant, avec un coeur contrit, vers la ville qu’il avait choisie (1 Rois 8:48). Daniel prend cette place (Dan. 6:10) et montre ainsi son intelligence de la Parole, sa foi et sa soumission au jugement divin.

De plus, l’état d’âme requis de ceux qui se trouveraient dans ces circonstances était celui de la repentance, de la douleur et de la confession de leurs iniquités (1 Rois 8:47). Daniel s’en souvient et s’exprime exactement comme Salomon l’avait prévu dans sa requête ; aussi il peut compter sur la miséricorde de Dieu et sa fidélité dans l’accomplissement de ses promesses. La délivrance d’Israël ne pouvait être le résultat de quelque combinaison politique ou de quelque événement inattendu, comme ceux sur lesquels les hommes de ce monde comptent pour faire aboutir leurs desseins. Il est important pour nous de nous en souvenir à l’heure actuelle, où tous les regards se tournent de nouveau du côté de la Palestine, et où ceux qui ne mettent pas leur confiance aux déclarations divines placent leur attente dans la diplomatie de ce monde pour amener à bonne fin les aspirations du peuple juif. Sa restauration ne pouvait avoir lieu que par l’intervention directe de Dieu.

Daniel comprenait que, en réponse à l’humiliation et à la confession de l’iniquité qui avait amené le jugement sur Israël, la grâce et la puissance divines seraient manifestées pour accomplir la délivrance promise. C’est là un principe important des voies de Dieu à l’égard des siens dans tous les temps : «Humiliez-vous donc sous la puissante main de Dieu, afin qu’il vous élève quand le temps sera venu» (1 Pierre 5:6). Il recherche Sa face dans la prière et le jeûne (v. 3). Celui-ci est l’expression du renoncement de soi-même pour être entièrement consacré à la recherche de sa présence ; «le sac et la cendre» étaient le signe d’une douleur et d’une humiliation profondes devant Lui (Joël 2:12 ; Esther 4:1).

Daniel invoque «le Dieu grand et terrible» (v. 4), selon la relation dans laquelle le peuple se trouvait avec Lui sous l’alliance de la loi. Celle-ci n’a jamais été appliquée à Israël dans toute sa rigueur, car les deux pierres avaient été brisées par Moïse au pied de la montagne, avant que les commandements qu’elles contenaient eussent été communiqués au peuple (Ex. 32:19). Ensuite de l’intercession de Moïse, Dieu se révéla comme Celui qui punit les coupables, mais qui pardonne aussi, car il est «miséricordieux, lent à la colère, et grand en bonté et en vérité» (Ex. 34:6). L’alliance était donc désormais revêtue de ce double caractère : la justice, dont la loi était l’expression, était requise du peuple, mais elle n’excluait pas la miséricorde. Dieu avait devant les yeux la personne de Celui dont le tabernacle révélait d’avance les gloires et qui, un jour, accomplirait l’oeuvre nécessaire à la satisfaction de sa justice. Il pouvait ainsi supporter, restaurer et bénir son peuple, tout en le châtiant pour ses iniquités, selon son juste et saint gouvernement, sous lequel il était placé.

C’est là le terrain sur lequel Daniel se place dans sa prière. Il ne revendique pas les promesses inconditionnelles faites en grâce souveraine à Abraham : selon celles-ci, Dieu bénira Israël d’une manière immuable à la fin, mais le moment de leur accomplissement n’était pas encore arrivé. Aussi le fidèle serviteur de Dieu prend-il la même place que Moïse, lorsqu’il intercédait pour le peuple coupable, et qu’il se fondait sur la révélation du caractère de Dieu qu’il venait de recevoir.

Du côté de l’Éternel, l’alliance a été gardée fidèlement, mais l’homme a complètement failli. C’était là ce qui remplissait le coeur de Daniel de douleur et de honte. Personnellement, il avait été sans reproche, mais il s’identifiait entièrement avec sa nation dans sa culpabilité et son opprobre et pouvait dire : «Nous avons péché contre Toi» (v. 5, 6). Tous les hommes de Dieu ont senti profondément la ruine de son témoignage, en relation avec son Nom et sa gloire. L’infidélité de ceux qui en sont les porteurs devant le monde rejaillit sur Celui dont ils devraient être les représentants auprès des hommes (Lament. 1:12 ; Néh. 1:4-11).

Non seulement Dieu avait donné sa loi à Israël, mais il lui en avait constamment rappelé le souvenir par ses prophètes, en lui annonçant les conséquences de sa désobéissance. Toutes les classes du peuple avaient été averties et toutes avaient persévéré dans leurs mauvaises voies (v. 6). Aussi la confusion de face convenait-elle à tous en la présence du Dieu qu’ils avaient offensé (v. 7). Ne doit-il pas en être de même aujourd’hui pour nous qui avons tous contribué à la ruine actuelle de l’Église ?

Daniel invoque les compassions et le pardon de Dieu, en rappelant les rébellions et la ruine absolue du peuple (v. 9). C’est, comme s’il avait dit : «Il n’y a plus pour nous d’autre ressource que ta miséricorde, car nous nous sommes rebellés contre toi : si tu agis selon ta justice, c’en est fait de nous». Nous trouvons le même principe dans l’intercession de Moïse. Dieu avait dit : «C’est un peuple de cou roide» (Ex. 32:9). Moise répond : «Si j’ai trouvé grâce à tes yeux, Seigneur, que le Seigneur marche, je te prie, au milieu de nous ; car c’est un peuple de cou roide ; et pardonne nos iniquités et nos péchés, et prends-nous pour héritage» (Ex. 34:9). C’est comme s’il avait dit : «Précisément parce que c’est une nation rebelle, il n’y a que ta grâce qui puisse la faire entrer dans le pays ; aussi ta présence avec nous nous est indispensable. Puisque, du côté de l’homme, la ruine est sans remède, déploie tes ressources de grâce pour nous bénir». C’est ainsi que la foi s’appuie sur la révélation que Dieu donne de lui-même et en fait le fondement de ses requêtes. Si nos demandes sont formées par la Parole, Dieu pourra nous exaucer, parce qu’elles seront en harmonie avec sa volonté.

«Tout Israël a transgressé ta loi» (v. 11). Enseigné de Dieu comme tant d’autres serviteurs fidèles de l’ancienne économie, Daniel voyait le peuple dans son unité selon ses pensées, bien que, depuis des siècles, elle n’existât plus d’une manière visible. Élie agissait d’après le même principe en élevant un autel de douze pierres, lors même que dix tribus étaient tombées dans l’idolâtrie et avaient suivi l’impie Jéroboam dans sa révolte contre la maison de David (1 Rois 18). L’apôtre Paul aussi se souvenait des «douze tribus» (Actes 26:7), dans un jour de dispersion et de ruine. Le jour viendra où Dieu rassemblera «tout Israël» sous le sceptre de son Messie longtemps rejeté (Rom. 11:26).

«L’exécration et le serment» écrits dans la loi de Moïse avaient été versés sur le peuple rebelle (v. 11). Dieu avait prononcé une malédiction solennelle, accompagnée d’une parole de serment, contre la désobéissance de ce dernier (Deut. 27:15 ; 28) ; et Daniel reconnaît la justice du châtiment, tout en implorant sa miséricorde et son pardon. Aucun peuple n’a souffert autant qu’Israël, parce qu’aucun autre n’a joui de privilèges pareils aux siens. Malgré tous les châtiments de Dieu, son peuple était resté dur et insensible ; comme nous le voyons dans le livre de Jérémie : il s’était révolté jusqu’au bout et n’était pas revenu à l’Éternel. Aussi «l’Éternel avait veillé sur le mal» (v. 14). Il avait pris soin que tous les maux annoncés par sa Parole vinssent sur lui. Et maintenant, quelle était la ressource du résidu repentant ? La grâce et la puissance souveraines manifestées dans la délivrance du pays d’Égypte (v. 15). Pourquoi a-t-il agi ainsi envers son peuple ? Pour sa propre gloire : c’est le seul motif qu’il ait de bénir l’homme coupable et déchu. Daniel se tient fermement sur ce terrain-là selon la connaissance personnelle qu’il avait acquise du coeur de Dieu, en marchant avec Lui. Il lui demande de lever sa face sur son sanctuaire désolé, d’incliner son oreille au cri des siens et d’ouvrir ses yeux pour contempler leur détresse : c’est ton peuple, ta ville, le lieu de ton habitation appelé de ton nom (v. 16-19). Ta gloire est identifiée avec cette nation que tu as choisie, mise à part et rachetée. C’est aussi le terrain sur lequel nous pouvons nous placer dans nos requêtes pour l’Assemblée, malgré sa ruine présente, en prenant la même attitude que Daniel. Dieu agit envers nous à cause de lui-même : «à cause de son grand amour dont il nous a aimés» (Éph. 2:4). Étudions cette prière de Daniel et imitons sa foi.

 

5.2   La réponse de Dieu

Nous voyons, par la réponse de Dieu, combien lui était agréable cette intercession ardente de son fidèle serviteur en faveur de la sainte cité et du peuple qu’il avait choisis. Avant qu’il eût fini de parler, un message divin lui est adressé. La prière de la foi recevra sûrement son exaucement. Quelquefois celui-ci est retardé pour l’exercice de nos âmes, comme nous le voyons au chap. 10, mais Dieu recueille nos requêtes et nous donne sa paix, en attendant la pleine bénédiction. La gloire de Dieu dans son peuple était la grande préoccupation de Daniel. Jérusalem était pour lui «la sainte montagne» où Dieu avait sa demeure, que les nations avaient profanée à cause de l’iniquité dont elle s’était rendue coupable.

L’ange Gabriel vole «avec rapidité» auprès de lui «vers le temps de l’offrande de gâteau du soir» (v. 21). Les anges «puissants en force» exécutent la Parole de Dieu (Ps. 103:20). Bien que les sacrifices fussent interrompus depuis la destruction du temple, le souvenir en était toujours vivant dans le coeur de Daniel et sa foi en saisissait la portée. «L’offrande de gâteau» accompagnait les holocaustes du matin et du soir (Ex. 29:38-46 ; Ps. 141:2). Ces sacrifices préfiguraient l’excellence de la Personne et de l’oeuvre de Christ, qui monte continuellement devant Dieu comme un parfum d’agréable odeur. C’est en vertu de l’oeuvre de la croix que Dieu pourra accomplir un jour ses bonnes pensées de grâce envers Israël et l’introduire dans toutes les bénédictions promises aux pères. Il était donc à propos que ce message de miséricorde parvint à Daniel à l’heure où était offerte l’oblation qui typifiait le parfait sacrifice sur lequel repose l’accomplissement des promesses divines.

L’ange était venu pour éclairer l’intelligence du prophète (v. 22). La Parole écrite, qui est la révélation des pensées de Dieu, s’adresse à 1’intelligence spirituelle, à l’entendement renouvelé des croyants, et elle apporte à l’âme la communication du propos et des voies de Celui qui nous l’a donnée. Nous avons besoin que cette Parole nous soit appliquée par l’Esprit, afin que nous la saisissions, la goûtions et en recevions toute la bénédiction. Par le moyen du messager céleste, Daniel reçoit la douce assurance que ses prières et sa confession étaient agréables à Dieu : «Tu es un bien-aimé» (v. 23). Il était un objet de sa faveur, quoique subissant, dans sa personne et ses circonstances, la peine du péché de son peuple, sous son juste et saint gouvernement (voir És. 39:7 et Dan. 1)

Il pouvait sembler à Daniel que la prophétie de Jérémie 29:10 annonçait la pleine restauration et la bénédiction finale du peuple de Dieu après les soixante-dix ans de captivité, mais il doit apprendre que cette restauration ne serait que partielle et que la délivrance finale promise aux pères n’aurait lieu qu’après un délai de soixante-dix semaines d’années, déterminées par Dieu. Les caractères et les événements principaux de cette longue période qui devait encore avoir son cours, avant que le royaume fût établi en puissance et en gloire, nous sont dépeints ici avec une clarté divine. Lorsque sera terminée cette douloureuse phase de l’histoire du peuple coupable, quoique bien-aimé de Dieu, les promesses immuables faites à la foi auront leur plein accomplissement et Israël entrera, sous le sceptre de son Messie, dans la gloire et les bénédictions du règne de paix et de justice. Remarquons que celles qui sont énumérées ici sont spirituelles et que la prospérité temporelle qui les accompagnera n’est pas même mentionnée. Telle est la réponse de Dieu à l’humiliation de son serviteur qui ressentait si profondément la ruine morale et la culpabilité de son peuple. Il ôtera pleinement «la transgression, les péchés et l’iniquité» d’Israël (v. 24. Comp. Ex. 34:7 ; Ps. 51:2, 3), sur le fondement de l’oeuvre de la rédemption. «Un coeur nouveau» sera donné au «peuple de franche volonté» au jour de la puissance de son Roi (Ézéch. 36:26 ; Ps. 110:3). Il sera ainsi amené sur un terrain de relation bénie et immuable avec Dieu. «La justice des siècles» deviendra en Christ la part inaliénable d’Israël. La bénédiction ne dépendra plus de son obéissance à la loi, mais de la justice satisfaite à la croix. «La vision et le prophète» seront «scellés» (v. 24) : toutes les révélations relatives à l’avenir glorieux réservé au peuple terrestre de Dieu ayant eu leur accomplissement, le ministère prophétique sera terminé. C’est alors que seront «finies» les prières de «David, fils d’Isaï» (Ps. 72:20), parce qu’elles auront reçu leur plein exaucement dans la joie et la gloire du royaume millénaire. Christ, «Le saint des saints» (v. 24), prendra possession de son trône : «J’ai oint mon Roi sur Sion» (Ps. 2:6). Les paroles du psalmiste nous déclarent le propos de Dieu, dont l’accomplissement en puissance aura lieu à ce moment-là. C’est par le Saint Esprit que sera établie et maintenue la bénédiction du royaume (És. 32:1 ; 11:1, 2).

Nous avons ensuite le point de départ des soixante-dix semaines, puis leur division en trois périodes : 1° «Depuis la sortie de la Parole pour rétablir et rebâtir Jérusalem», à savoir l’édit du roi de Perse Artaxerxès, autorisant Néhémie à relever la muraille et à réédifier la ville (Néh. 2), une première phase de sept semaines d’années devait s’écouler dans la lutte et le trouble (v. 25). 2° Une seconde période de soixante-deux semaines d’années suivrait, soit en tout soixante-neuf semaines ou 483 ans, «jusqu’au Messie le prince» (v. 25). Ce dernier devait être manifesté sur la scène selon les promesses divines, mais, fait solennel, il «sera retranché et n’aura rien» (v. 26). Le Messie (ou Oint) devait souffrir et mourir, au lieu de prendre possession de son royaume : «Il vint chez soi et les siens ne l’ont pas reçu» (Jean 1:11). Le propos de Dieu quant à la terre est renvoyé à un jour à venir. Les conséquences qui, dans le gouvernement de Dieu à l’égard de son peuple, devaient résulter, pour celui-ci du rejet et de la mort de Christ, sont annoncées ensuite : «Le peuple du prince qui viendra détruira la ville et le lieu saint» (v. 26). L’incrédulité et la méchanceté de la nation rebelle à l’égard de son Roi devaient amener sur elle des souffrances inexprimables. La cité et le lieu saint furent détruits par les Romains, «peuple du prince qui viendra». Ce dernier sera le chef de l’empire romain qui, à la fin, «confirmera une alliance avec la multitude» des Juifs ramenés dans leur pays (v. 27).

«Jusqu’à la fin» d’une période dont la durée ne nous est pas révélée, il y aura «guerre, un décret de désolations» (v. 26) sur Israël apostat. Ce temps est celui qui s’écoule depuis la mort du Seigneur Jésus jusqu’à la fin de l’économie actuelle de la grâce et du salut, laquelle se terminera par l’enlèvement des saints ressuscités et glorifiés. C’est une parenthèse qui sépare la soixante-neuvième et la soixante-dixième semaine.

«La fin» du peuple coupable et de la ville à laquelle se rattachaient toutes ses espérances, devait être accompagnée d’un «débordement» (v. 26) de calamités inouïes. Dans leur aveuglement, les Juifs, en livrant leur Messie, s’écrièrent : «Que son sang soit sur nous et sur nos enfants» (Matt. 27:25). Cette parole eut son accomplissement dans leur histoire depuis ce jour-là. Haïs, persécutés, dispersés par toute la terre, ils subsistent néanmoins comme le monument de la fidélité et de la vérité des promesses divines (Jer. 33:19-26).

3° Comme nous l’avons remarqué, entre les versets 26 et 27, s’écoule une parenthèse dans les voies de Dieu envers la terre, qui comprend tout l’espace de temps accompli depuis la destruction de Jérusalem, jusqu’au rétablissement final de l’empire romain et du peuple juif dans son pays ; c’est alors que commencera la dernière semaine d’années qui termine la période prophétique annoncée, par l’ange à Daniel. La parenthèse actuelle embrasse donc toute l’économie de la grâce, durant laquelle, Israël étant mis de côté pour un temps, Dieu accomplit son conseil de gloire à l’égard de l’Église (Rom. 11:7, 8). Puis celle-ci ayant été enlevée de la terre, les Juifs seront ramenés dans leur pays dans l’incrédulité. Sous la conduite du faux roi, l’Antichrist, ils feront une alliance de sept ans avec le chef de l’empire romain. Cette alliance, appelée «un pacte avec le shéol» (És. 28:15), aura pour but de mettre cette nation rebelle à l’abri de «l’Assyrien», le «fléau qui inonde» (És. 28:15), «le désolateur» (Dan. 9:27), ou «roi du Nord» (Dan. 8:23-27 ; 11:40-45), grand ennemi extérieur d’Israël à la fin. Mais cette alliance impie amènera précisément ce fléau sur le peuple : «Au milieu de la semaine», la bête ou chef de l’empire, d’accord avec l’Antichrist, «fera cesser le sacrifice et l’offrande» (v. 27) dans le temple rebâti à Jérusalem et remplacera le culte de l’Éternel par l’idolâtrie appelée «l’abomination de la désolation» (Dan. 12:11 ; Matt. 24:15).

La cessation des sacrifices est déjà prédite en Dan. 7:25. Pour échapper à la mort qui atteindra ceux qui refuseront de participer à cette affreuse apostasie (Apoc. 13), le résidu fidèle devra fuir (Matt. 24:15-22) et Dieu lui préparera une retraite (Apoc. 12:6-14), où il sera à l’abri pendant les quarante-deux mois de la fin. Ce sera le moment de «la grande tribulation» de laquelle sera gardée l’Église par son enlèvement à la rencontre du Seigneur (Apoc. 3:10), tandis que d’autres saints la traverseront (Apoc. 7:14). Elle se terminera par l’apparition du Seigneur en gloire et en puissance et la destruction de tous ses ennemis (2 Thess. 2:8 ; Apoc. 19:11-21).

Ainsi, «à cause de la protection» accordée par le peuple apostat et son chef l’Antichrist, aux «abominations» (Dan. 9:27), Dieu enverra «un désolateur», «l’Assyrien, verge de sa colère» (És. 9:5, 6), qui tombera à son tour sur les montagnes d’Israël «et il n’y aura personne pour le secourir» (Dan. 11:45 ; 8:25). Sa main de fer s’appesantira sur les Juifs «jusqu’à ce que la consomption» (ou jugement qui termine et consomme la colère gouvernementale de Dieu contre son peuple És. 10:23), soit versée sur «la désolée» (v. 27). Cette expression désigne tout spécialement Jérusalem qui a déjà été détruite tant de fois et qui doit encore subir ce dernier assaut de l’ennemi avant sa complète délivrance. Alors «la terre sera pleine de la connaissance de l’Éternel, comme les eaux couvrent le fond de la mer. Et, en ce jour-là, il y aura une racine d’Isaï, se tenant là comme une bannière des peuples : les nations la rechercheront, et son repos sera gloire» (És. 11:9, 10).