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Réflexions sur l’évangile selon Jean
F. B. Hole
Les Réflexions sur les évangiles et les Actes de F.B. Hole ont premièrement paru en anglais en 1937-1939 dans le périodique « Edification » et en 1940 à 1944 dans le périodique « Scripture Truth ».
Table des matières :
L’Évangile selon Jean a été manifestement écrit quelque temps après les trois autres Évangiles. Matthieu, Marc et Luc avaient chacun raconté, comme Dieu le leur avait indiqué, l’histoire de Jésus Christ, sa naissance, ses premières années et son entrée dans le ministère. Jean tient leur récit pour connu, sans quoi ses premiers paragraphes seraient difficilement compréhensibles. Comme le premier siècle tirait à sa fin, il s’était écoulé suffisamment de temps pour que se déclenchent des attaques contre la Personne de Christ, la vraie citadelle de la foi. Des notions philosophiques en partie païennes circulaient, se mêlant à la doctrine, ce qui aurait pu être désastreux si elles n’avaient pas été réfutées avec l’énergie de l’Esprit de Dieu. C’est pourquoi cette énergie est déployée dans les écrits de l’apôtre Jean, environ un quart de siècle après la fin de la course de Paul et de Pierre.
Les premiers chrétiens étaient très troublés par les prétendus « gnostiques », c’est-à-dire « ceux qui savent ». Nous avons appris à connaître les agnostiques. Ce sont des gens qui nient qu’une vraie connaissance de Dieu et de ce qui le concerne soit possible. Les gnostiques étaient à l’opposé : ils prétendaient avoir été « initiés » et avoir la connaissance supérieure. Leurs théories niaient en fait la divinité intrinsèque et la vraie humanité de Jésus. Il y avait ensuite ceux qui considéraient Jésus et le Christ comme deux personnes différentes. Le Christ était pour eux un idéal, un état que l’homme pourrait progressivement atteindre. Jésus était l’homme apparu dans l’histoire, à Nazareth. Le but de l’Évangile selon Jean est de réfuter ces erreurs.
Avant de considérer le début, il serait bon de lire les deux derniers versets du chapitre 20, car le dessein de l’Esprit dans cet Évangile y est défini. Les miracles rapportés sont autant de « signes » qui prouvent que Jésus est le Christ. Il n’y a donc qu’une seule et même Personne. Les miracles prouvent aussi qu’il est le Fils de Dieu, établissant ainsi sa divinité. En croyant cette vérité, on a la vie ; en la refusant, on demeure dans la mort. C’est le but de l’Esprit de Dieu dans cet Évangile ; il sera nécessaire de l’avoir présent à l’esprit tout au long de notre lecture. Nous verrons que c’est une clé très importante pour découvrir ses trésors.
Les tout premiers mots nous ramènent au moment le plus lointain que notre esprit soit capable de concevoir, c’est-à-dire le moment où a commencé la première chose qui ait jamais eu un commencement. Avant cela, il n’y avait que... Dieu. À ce point du « commencement », le Verbe (la Parole) « était », c’est-à-dire, existait. Il n’a pas commencé à ce moment-là ; il existait déjà. Son existence éternelle est proclamée, et nous sommes ramenés avant les premiers mots de Genèse 1. De plus, il était « auprès de Dieu ». Nos esprits s’arrêtent à ce moment lointain et nous découvrons qu’alors il possédait une personnalité distincte. La Parole n’est pas un terme général pour désigner la déité, en dehors de toute distinction particulière, car le fait d’être « auprès de Dieu » établit clairement une place spéciale et distincte.
Ceci étant, l’esprit critique aura tendance à discuter : « Nous ne pouvons donc pas parler de la Parole (le Verbe) comme étant Dieu au sens propre ou dans le plein sens du terme, même s’il n’est pas exactement une créature puisqu’il existait avant la création ». Un tel raisonnement est absolument réfuté par la fin du verset 1 : « la Parole était Dieu ». C’est : Dieu dans son essence même.
On a essayé d’affaiblir la force de cette déclaration si importante, en la traduisant par : « la Parole était divine » ou : « la Parole était un dieu », du fait de l’omission de l’article défini (c’est-à-dire qu’il n’est pas écrit : « la Parole était le Dieu »). Mais ceux qui connaissent le grec nous disent qu’il n’y a pas d’article indéfini dans cette langue, et que le mot traduit par « Dieu » est un mot fort, désignant la Déité (*) véritable et absolue. S’il avait été écrit que la Parole était le Dieu, cela aurait limité la divinité à la Parole et en aurait exclu les autres personnes de la Déité. Les termes sont choisis avec une exactitude divine : la Parole était véritablement et absolument Dieu.
(*) Le terme anglais the Godhead est traduit par la Déité, au sens absolu, correspondant au mot grec Θeoτης qui, dans le Nouveau Testament, se rencontre une seule fois en Colossiens 2:9 : « La plénitude de la Déité habite en lui corporellement ».
Le terme Deity est traduit par divinité quand il exprime le caractère, la nature de Dieu, avec le sens du mot grec Θeιoτης qui se rencontre une seule fois en Romains 1:20 : « Sa puissance éternelle et sa divinité se discernent par le moyen de l’intelligence » (Note du traducteur)
Le deuxième verset nous ramène aux deux premières déclarations du verset 1. La personnalité distincte qui caractérise le Verbe (la Parole) n’est pas une forme qui a été prise à un moment ultérieur. Il avait une personnalité éternelle. Au commencement il était donc « auprès de Dieu », car cette distinction de personnalité se trouve dans l’essence même de la Déité. Ainsi quatre points ont été établis au sujet de la Parole : son existence éternelle, sa personnalité distincte, sa déité intrinsèque, sa personnalité éternelle. Même si nous pouvons apprendre autre chose au sujet de la Parole, ces quatre points devraient nous inciter à nous courber dans une humble adoration.
Nous trouvons un cinquième point au verset 3 : il est l’auteur de la création, et cela au sens le plus complet. Nous en arrivons maintenant aux choses qui ont été faites, c’est-à-dire qui sont venues à l’existence. Un mot différent est utilisé dans les versets 1 et 2. Le Verbe (la Parole) n’est pas venu à l’existence : il était, car son existence est éternelle. Mais il a créé tout ce qui est venu à l’existence, puisqu’il a créé « toutes choses ». Pour ne pas laisser la moindre possibilité d’erreur, la seconde partie du verset insiste sur ce point. Ce langage est remarquable, étant donné la science moderne « faussement ainsi nommée », si largement vulgarisée, qui s’efforce de tout expliquer « sans Lui ». Les incrédules s’attachent à la théorie de l’évolution, en dépit d’un manque pitoyable de faits sur lesquels l’appuyer ; les preuves alléguées sont des plus fragiles, parce qu’on l’élimine Lui, en glorifiant l’homme. Mais en vérité il ne peut être éliminé. Parmi toutes les choses innombrables qui ont reçu l’existence au commencement, aucune ne l’a reçue sans lui.
Réfléchissons à cela ; nous avons ici l’explication des « cieux qui racontent la gloire de Dieu » et de la manifestation partielle de Dieu dans la création (Romains 1:19, 20).
La Parole a créé toutes choses. Ainsi la création, dans une certaine mesure, nous donne une fidèle manifestation de Dieu lui-même et de sa pensée. Nous exprimons nos pensées par des paroles ; et la signification de ce grand nom, PAROLE, est que Celui qui le porte est l’expression de tout ce que Dieu est. Les versets 1 et 2 montrent ainsi qu’Il EST, lui-même, absolument tout ce qu’il dit. La création, quand elle a surgi par la Parole, n’était pas un fouillis vide de sens, mais une proclamation de la puissance et de la sagesse de Dieu.
Nous arrivons à un sixième point important avec le verset 4. Le Verbe (la Parole) a la vie en lui-même. En lui, la vie n’est pas une chose reçue ; la vie, au contraire, a son origine en lui, il possède la vie dans son essence même. En rapprochant cela de tout ce qui précède, nous saisissons avec quel soin la divinité intrinsèque de la Parole est établie et préservée. Les mots employés sont simples et précis ; ils sont cependant chargés d’une plénitude de sens divine. Comme l’épée du chérubin en Genèse 3:24, ils tournoient çà et là pour garder intacte dans nos esprits la vérité concernant Celui qui est l’arbre de vie pour l’homme. Cet Évangile va bientôt nous montrer combien la vie du croyant a véritablement sa source en lui. Mais le sujet du verset 4 est plutôt : « la vie était la lumière des hommes ». Cette question est approfondie dans les premiers versets de la première Épître de Jean. La vie a été manifestée, et par conséquent le Dieu qui est lumière est apparu dans la lumière ; le croyant marche dans cette lumière.
La lumière dans laquelle les hommes doivent marcher n’est pas simplement celle de la création, aussi merveilleuse soit-elle ! C’est la lumière qui a été manifestée dans les mots et les actions de la Parole. Quand la Parole est apparue, la lumière a brillé ; mais c’est dans une scène de ténèbres qu’elle s’est manifestée. Nous lisons, en Genèse 1, comment la lumière de la création a jailli dans les ténèbres par la Parole de Dieu ; en un instant les ténèbres ont disparu. Ici nous avons une lumière d’un ordre bien plus élevé. Elle apparaît au milieu des ténèbres morales et spirituelles qui ne pouvaient être dissipées que si cette lumière était vraiment reçue. Hélas ! Elle n’a pas été comprise ! Cependant bien que les ténèbres demeurent, il n’y avait pas d’autre lumière pour l’homme que « la vie ». Il n’y a pas de contradiction dans ces affirmations car Jean, comme il le fait souvent, parle ici de choses abstraites. Il n’est pas encore arrivé au récit historique des événements.
Mais comment se fait-il que la vie qui était dans la Parole ait vraiment brillé dans les ténèbres et soit devenue lumière pour les hommes ? La réponse se trouve au verset 14. Avant d’arriver à ce verset, dans les versets 6 à 13, nous commençons à voir les choses d’un point de vue historique. Jean le Baptiseur entre en scène pour faire ressortir l’importance suprême de la « vraie lumière ». Ce Jean n’est qu’un homme, né pour être l’envoyé de Dieu ; sa mission était de rendre témoignage à la lumière. Il est vrai qu’il est désigné comme « une lampe brillante » dans le verset 35 du chapitre 5, mais le mot employé là est « lampe » plutôt que « lumière ». Jean a brillé comme une lampe et a témoigné, mais la vraie lumière est Celui qui, « venant dans le monde, éclaire tout homme ». Cela ne signifie pas que tout homme reçoive la lumière, ce qui contredirait le verset 5. Jésus n’était pas une lumière pour une partie des hommes seulement, mais il était plutôt comme le soleil qui rayonne sur le monde entier. Aucune nation ne pouvait avoir le monopole de la vraie lumière ; dès le début, cet Évangile porte donc nos pensées au-delà des étroites limites d’Israël.
Dans le reste de ce paragraphe (v. 10-13), de nouvelles déclarations de nature historique développent et éclaircissent ce qui a été dit aux versets 4 et 5. Nous avons déjà vu que la Parole est une Personne de la Déité ; sa vie a brillé comme étant la lumière des hommes, même si c’était au milieu des ténèbres. Il est maintenant ajouté que le monde était le lieu où régnaient ces ténèbres. Jésus y est entré. Hélas, le monde, qui s’était tellement éloigné, n’a pas connu Celui qui avait été son Créateur. Dans ce verset encore il ne s’agit pas d’Israël ou des Juifs, mais du monde. La lumière répandue par les prophètes pouvait être limitée à Israël, mais non pas le rayonnement de la vraie lumière.
L’apôtre Jean fait souvent mention du monde dans ses écrits. Il emploie un mot que nous avons adopté quand nous parlons du « cosmos », qui signifie l’univers comme un tout ordonné. C’est le sens du mot dans ce verset. Quelquefois, dans un sens plus restreint, il désigne seulement notre monde. En tant que Créateur, Jésus avait fait l’univers comme un tout ordonné. À un moment merveilleux, il est venu dans notre cosmos d’une manière très particulière. Il est entré dans ce cosmos plus petit et plus restreint qui s’était perverti et était devenu étranger à cause du péché. Le monde était si perverti qu’il n’a même pas connu son Créateur.
Ensuite, de façon plus précise, il est effectivement venu dans une partie assez sombre de ce cosmos où s’est accompli ce que la prophétie indiquait à son égard. Son propre peuple, Israël, auquel cette prophétie le rattachait, ne l’a pas reçu. Il a été rejeté car les ténèbres ne pouvaient pas le comprendre. Mais malgré cela, il y a des exceptions, comme cet Évangile nous le montrera plus loin. Certains l’ont reçu, croyant en son nom. Ils ne faisaient pas partie des ténèbres. Leurs yeux ont été ouverts et ils l’ont reçu ; ils ont discerné avec foi la gloire de son nom. Ils ont alors reçu de lui le droit d’être enfants de Dieu, et non d’être des Juifs meilleurs ou plus éclairés. Le mot employé ici est sans aucun doute « enfants ». Jean a l’habitude de l’utiliser, plutôt que le mot « fils » qui est davantage employé par Paul. Le sens est légèrement différent. Il évoque la même relation heureuse avec Dieu. Le mot « fils » souligne plutôt notre maturité et notre position dans cette relation. Le mot « enfants » met plutôt en évidence le fait que nous sommes véritablement nés de Dieu, ayant reçu sa vie.
C’est ce qui est souligné ici (v. 13). Le Juif se glorifiait d’être de la race d’Abraham, tout comme aujourd’hui un homme peut être fier d’être né de sang noble ou même royal. Ces âmes humbles, qui font exception à la règle en recevant Christ quand il vient, sont nées de Dieu. La volonté de la chair n’aurait jamais eu de tels résultats, car la chair est fondamentalement opposée à Dieu. La volonté de l’homme, même celle du meilleur d’entre eux, ne pourrait produire cela : c’est tout à fait en dehors des pouvoirs de l’homme. Leur naissance venait de Dieu, c’était un acte divin. Celui qu’ils ont reçu par la foi leur a donné le droit — acte souverain — de prendre la place que leur a conférée cette naissance.
Comment se fait-il que les âmes pieuses, dont nous avons un exemple en Luc 1 et 2, reçoivent le Christ à l’instant où il apparaît ? Ce n’est pas parce qu’elles sont de la descendance d’Abraham. Ce n’est pas non plus parce que la chair en elles est plus noble et qu’elle les pousse à agir, ou parce qu’elles sont influencées par la forte volonté d’un homme sage. C’est uniquement parce qu’elles sont nées de Dieu. C’est un acte divin. Quand nous arrivons au chapitre 10, nous trouvons la même réalité fondamentale exprimée différemment. Lorsque le Berger est venu à la bergerie, il y a trouvé des âmes qui sont « ses propres brebis » ; elles ont entendu sa voix et il les a menées dehors. Il y en a là beaucoup qui sont ses brebis parce qu’elles font partie de sa nation. Elles ne sont pas ses propres brebis au sens où le sont Marie de Magdala, les disciples, la famille de Béthanie, Siméon ou Anne. Ces personnes nées de Dieu sont celles qui l’ont reçu.
Au verset 14, nous reprenons maintenant le thème du verset 5 qui nous révèle un septième fait important concernant le Verbe (la Parole). Il est devenu chair et a habité au milieu de nous. Les versets 1 et 2 nous disent ce qu’il était éternellement dans son essence. Le verset 14 nous dit ce qu’il est devenu. Il est devenu chair ; c’est-à-dire qu’il a revêtu une humanité parfaite. Par ce moyen, les six autres grands faits nous sont devenus accessibles. Celui qui existe de façon absolue par lui-même n’a pu se faire connaître aux hommes qu’en se mettant personnellement en relation avec sa créature.
Le fait que le Verbe (la Parole) soit devenu chair garantit non seulement qu’il a revêtu un corps humain réel (ce que niaient quelques-uns des premiers hérétiques), mais aussi qu’il est devenu un homme dans tout le sens du terme. Pour le devenir, il a laissé de côté les anges et il a « pris la semence d’Abraham ». Il est significatif que ce soit dans cet Évangile, qui commence par une telle affirmation de sa divinité, qu’il parle de lui-même comme « d’un homme » (8:40). En fin de compte, tout ce que Dieu est se trouve révélé aux hommes dans un homme. Il a habité au milieu de nous, plein de grâce et de vérité. Le fondement de toute vérité repose sur la connaissance de Dieu. Si cette connaissance nous était parvenue séparée de la grâce, elle nous aurait renversés ; mais voici une Personne pleine à la fois de grâce et de vérité, qui a habité au milieu de nous.
Aux versets 14 et 15 se trouvent deux parenthèses. La première nous dit que les apôtres et tous ceux « qui l’ont reçu » (v. 12) ont contemplé sa gloire. Ils ont vu une gloire « comme d’un Fils unique de la part du Père », et non comme celle du Sinaï. C’était la gloire attachée à la Majesté et à ses justes exigences ; ici c’est la gloire liée à une intime relation d’affection.
La seconde parenthèse introduit brièvement le témoignage de Jean, rapporté plus complètement quelques versets plus loin. Elle montre qu’il a discerné la préexistence et donc la gloire divine de Celui à qui il rend témoignage. Historiquement il vient après lui, à la fois par sa naissance et son entrée dans le ministère, mais il existait avant lui. Il a ainsi pris la place suprême, la première.
Laissant de côté les deux parenthèses, nous lisons : « La Parole devint chair, et habita au milieu de nous... pleine de grâce et de vérité... car, de sa plénitude, nous tous nous avons reçu, et grâce sur grâce ». Le résultat pour « nous » qui croyons est de nouveau précisé ici. Seuls « tous ceux qui l’ont reçu » peuvent vraiment dire : « Nous avons reçu » de sa plénitude ; mais ceux-là, tous ceux-là peuvent le dire, Dieu en soit béni ! Une plénitude de grâce et une plénitude de vérité sont la part de chacun, même du plus faible, même s’ils n’en mesurent jamais la profondeur. L’accent est mis spécialement sur la grâce. Nous avions besoin de « grâce sur grâce », comme si on l’empilait pour en faire une montagne. La loi a été donnée par Moïse. Elle exprimait les exigences de Dieu, mais elle n’établissait rien. La grâce et la vérité sont apparues dans ce monde, et la venue de Jésus Christ les a, de ce fait, établies.
Enfin, Jean a clairement identifié cette Personne, connue parmi les hommes, Celui qui est la Parole. La Parole devint chair et habita au milieu de nous, pleine de grâce et de vérité ; et voici, cette plénitude est en Jésus Christ ! Cette préface magnifique à l’Évangile nous a conduits directement à Jésus.
À ce stade, nous avons un autre aperçu de sa gloire. Il est Celui qui révèle le Dieu qu’aucun homme n’a jamais vu. Comme le Fils unique qui est dans le sein du Père, il peut pleinement le faire connaître comme Père. Dans le mot « sein », nous avons une image humaine, mais nous ne devons pas l’utiliser dans le sens humain. Cette image est utilisée ailleurs dans l’Écriture pour indiquer la plus proche des relations et l’intimité la plus complète. Le Fils est si totalement un avec le Père et dans une telle intimité de pensée avec lui, qu’il peut le faire connaître à la perfection. Notre verset ne dit pas qu’il était, comme s’il y avait un lieu qu’il aurait pu quitter, mais qu’il est. C’est un présent éternel. Il était, dans l’éternité, il est et sera éternellement dans le sein du Père. La Parole devenant chair signifie donc la venue de la grâce et de la vérité et la pleine déclaration de Dieu comme Père.
Les versets 19 à 28 nous donnent le témoignage de Jean, rendu alors qu’il baptisait au Jourdain. Il est présenté d’une façon tout à fait différente des autres Évangiles. Tout d’abord il y a le côté négatif. Les chefs religieux sont curieux de savoir s’il est le Christ ou Élie, ou le prophète dont Moïse a parlé. Son témoignage est ferme ; il n’est aucun de ceux-là. Il est seulement la voix dont Ésaïe avait parlé, qui crie dans le désert. Son témoignage positif vient ensuite quand ils l’interrogent sur son baptême. Il y en a Un parmi eux qu’ils ne connaissent pas, tellement plus grand que Jean qu’il n’est pas digne de délier la courroie de sa sandale. Par cette image frappante, Jean exprime ce qu’il comprend de la gloire suprême de Celui qui est sur le point de se manifester.
C’est le commencement du témoignage de Jean. Il se précise et s’affermit dans les versets qui suivent.
L’incarnation et quelques-unes de ses grandes conséquences nous sont présentées dans la dernière partie du chapitre. Nous avons en Jean 1 plusieurs des noms et titres du Seigneur Jésus. Les différents offices et capacités qu’il remplit nous sont aussi dévoilés.
Les grands de ce monde remplissent des fonctions variées... Il n’est donc pas surprenant que la Parole, faite chair, remplisse de multiples offices et soit à même de s’occuper de services d’une grande variété et d’une valeur éternelle. Quand nous lisons, au verset 29, la suite du témoignage de Jean, nous rencontrons le premier de la série. Jésus est « l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde ».
Jean dit, en substance : « Voilà l’unique sacrifice efficace, qui n’aura jamais à être répété et qui a une valeur éternelle ». Dans l’Ancien Testament, l’agneau avait été spécialement choisi comme l’animal destiné aux sacrifices : c’est l’explication du titre utilisé ici. Jésus est l’Agneau que Dieu a donné. S’il enlève le péché du monde, alors l’œuvre qui est accomplie est d’une telle grandeur que tout est réglé pour l’éternité. Il n’enlève pas seulement votre péché, ou le mien, ou celui d’Israël, mais celui du « cosmos » tout entier. La chose est à faire, et voici « Celui qui la fait ». Quand nous évoquons le péché, nous pensons en général à ses diverses formes, avec des milliers de détails ; ici il est considéré comme un problème gigantesque et terrible, qui trouve sa solution finale dans le fait qu’il est ôté. Dieu veut un « cosmos », — l’univers comme un tout ordonné, —entièrement et éternellement purifié du péché. Voici Celui qui le réalise par son sacrifice. Il est le sacrifice pour toutes les périodes ; c’est là le fondement de tout ce qui suit. S’il ne l’était pas, rien ne pourrait nous conduire dans la voie de la bénédiction et de la gloire.
Jean continue à identifier Jésus comme Celui dont il a parlé auparavant. Il proclame que son baptême n’a pas seulement pour but la manifestation du résidu fidèle en Israël, mais aussi la manifestation de l’Agneau de Dieu à Israël. Il a vu le Saint Esprit descendre sur lui comme une colombe, descendre et demeurer, — non pas descendre et repartir, comme la colombe lâchée par Noé. Quand il avait reçu sa mission, Jean avait été informé que ce serait le signe distinctif de Celui dont il serait le précurseur. C’était celui qui ne baptiserait pas seulement d’eau, mais du Saint Esprit.
En disant cela, Jean présente manifestement Jésus comme celui qui, infiniment grand, apporte la bénédiction. Comme sacrifice, il ôte le péché du monde. Comme Celui qui apporte la bénédiction, il le remplit de la lumière et de l’énergie de l’Esprit de Dieu. Il est donc évident qu’il y a ici les deux aspects d’un ensemble ; et les deux déclarations précédentes ont une portée très large. Chaque croyant aujourd’hui a ses péchés ôtés et il reçoit le Saint Esprit ; c’est une infime partie de tout ce que représentent les résultats acquis. Mais ce qui est envisagé ici, c’est l’œuvre dans sa totalité, considérée de façon abstraite. Les péchés ôtés et le Saint Esprit répandu sur toute chair ne sont pas encore des faits historiques ; mais nous avons ici Celui par lequel ces deux choses vont arriver.
La déclaration finale de Jean, au verset 34, est très importante. Le témoignage qu’il avait rendu aux versets 15 et 27 lui était confirmé. Il avait devant lui le Fils de Dieu et il pouvait rendre témoignage qu’il est le Fils. Le Saint Esprit est une Personne de la Déité. Voici un homme qui a cette personne divine à sa disposition, de manière à pouvoir baptiser du Saint Esprit. Qui est donc cet homme ? Rien de moins que le Fils de Dieu, une autre personne de la Déité. Nous sommes ainsi amenés immédiatement au sujet qui est le but principal de cet Évangile (voir 20:31), le Fils était là devenu Homme ; un tel but était rendu possible. Le Fils de Dieu et la Parole ne sont qu’un.
Le lendemain, Jean rend un témoignage similaire, centré davantage sur la Personne elle-même que sur son œuvre. C’est encore la personne dans son caractère d’Agneau pour le sacrifice. C’est lorsqu’il revêt ce caractère qu’il a le plus d’attrait, comme le montre Apocalypse 5. Cette attraction se fait sentir ici ; deux des disciples de Jean, l’entendant parler ainsi, le quittent immédiatement pour s’attacher à Jésus. On ne peut rendre de service plus fidèle à Dieu que de détourner les auditeurs du serviteur humain pour les attacher à Christ. Jean le Baptiseur fut un serviteur très fidèle.
Jésus ne reprend pas les disciples qui désirent être avec lui ; il les encourage plutôt à demeurer avec lui. Il est non seulement le sacrifice et Celui qui bénit, mais encore le centre autour duquel tous doivent se rassembler. Les deux disciples avaient découvert cela par une sorte d’instinct.
Leur action suffit à le placer devant nous sous ce caractère. Bientôt le Seigneur dira : « Si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi-même » (12:32). Dans les jours à venir, cela s’accomplira de façon visible. Mais parmi les multitudes de ce jour futur, André et l’autre disciple auront l’honneur d’avoir été les premiers à découvrir en Jésus le Centre désigné par Dieu.
Le verset 42 nous montre que ce qu’André a entendu lui a révélé que Jésus était le Christ (Nous devons à nouveau penser à la fin du chapitre 20). Jésus est Celui qui baptise de l’Esprit Saint, par conséquent il est le Fils de Dieu. Il est le Centre désigné par Dieu, donc le Christ. La première chose que fait André est de chercher son frère Simon. Il lui fait part de ce qu’il a trouvé, et ainsi « il le mena à Jésus ». Il est souvent arrivé depuis, que l’homme le plus énergique et le plus remarquable a été amené au Seigneur par quelqu’un de très ordinaire. Autant que nous le sachions, c’est la chose la plus remarquable qu’André ait faite.
Simon est toujours prompt à parler, et parmi les disciples il est habituellement le premier à s’exprimer ; mais quand il est amené à Jésus, ce n’est pas lui qui a le premier mot. Jésus montre aussi qu’il connaît son nom et sa filiation et lui donne un nouveau nom. Comme nous le voyons pour Daniel et ses trois amis, les grands rois affirment que des serviteurs ou des esclaves leur appartiennent, en changeant leur nom. Quand Simon vient à Jésus, Celui-ci affirme de la même manière son droit sur lui. Mais il fait plus que cela en lui donnant un nom qui signifie « une pierre », car il se l’attache pour l’édifice qu’il a en vue. Pour le moment, Simon ne sait rien de cela. Effectivement Simon, d’après le récit, n’a rien à répondre. Ce que le Seigneur a en vue et ce qu’il dit est de toute importance.
Reportons-nous seulement à 1 Pierre 2 et nous verrons que Simon a compris et qu’il a quelque chose à nous dire à ce sujet. En venant à Christ, la Pierre Vivante, il est devenu une pierre vivante pour l’édification de la maison de Dieu qui se poursuit à l’époque actuelle. Comme il nous le montre dans ce chapitre, ce qui était vrai pour lui, l’est aussi pour nous lorsque nous venons à la Pierre Vivante, chacun à notre tour. Jésus se révèle alors clairement comme Celui qui bâtit la maison de Dieu, dans la manière dont il rencontre Simon. Ni Simon lui-même, ni les autres ne l’ont saisi à ce moment-là. C’est un autre aspect du ministère de Jésus.
Jésus lui-même prend l’initiative de trouver Philippe (v. 44). Il se présente par ces mots : « Suis-moi ». Ces deux mots sont évidemment suffisants. Ils le désignent à Philippe comme Celui qui conduit et qui a le droit de demander l’obéissance loyale de tous et de chacun. Philippe le suit et, même s’il n’a pas encore beaucoup de connaissance, il se met à chercher d’autres âmes. Il peut seulement parler à Nathanaël de « Jésus, le fils de Joseph, qui est de Nazareth ». Il donne ainsi un nom ni très élevé ni très exact à Celui qu’il venait tout juste de commencer à suivre. Cela conduit Nathanaël, dès le départ, à avoir des préjugés à l’égard du Seigneur, mais cela suffit pourtant à l’amener à un entretien avec lui.
De nouveau Jésus prend l’initiative. Par sa première exclamation concernant Nathanaël, il se révèle lui-même comme Celui qui sonde les cœurs des hommes : Voilà un Israélite, non pas sans péché, mais sans fraude, c’est-à-dire sans tromperie ni malhonnêteté ; voilà un homme droit et honnête dans son esprit devant Dieu. Jésus le sait comme le montre sa réponse à la question étonnée de Nathanaël : « D’où me connais-tu ? » Le Seigneur se révèle comme le juge de tous. Il est Celui devant qui tous les hommes sont nus et découverts et qui peut mettre tout homme à sa vraie place. Nathanaël est venu pour voir Jésus de Nazareth et il découvre quelqu’un qui sait tout à son sujet et qui lit en lui comme dans un livre ouvert. Qui donc est ce Jésus ?
La réponse de Nathanaël nous est donnée au verset 50. Nous sommes ramenés à ce verset du chapitre 20 dont nous avons déjà parlé. Jésus est « le Fils de Dieu » et il est aussi « le Roi d’Israël ». En tant qu’Israélite sérieux et pieux, Nathanaël attendait le Roi, et il aurait eu tendance à faire de ce point-là le point capital. Mais évidemment en présence de « celui qui juge les hommes et sonde les cœurs », tout l’accent est mis sur le fait qu’il est nécessairement le Fils de Dieu, et donc le Roi d’Israël. Remarquez ensuite au verset 51 que Jésus accepte l’hommage de Nathanaël : il ne le trouve pas déplacé, car c’est un fruit de la foi. En entendant les paroles de Jésus, il croit et rend hommage.
Au verset 51 il semble qu’il y ait un contraste entre entendre et voir. Ce que nous entendons produit la foi, mais un jour viendra où nous verrons des choses plus grandes que celles que nous avons entendues. Lorsque la foi sera changée en vue, nous aurons devant les yeux le Fils de l’Homme comme grand administrateur de l’univers de Dieu, cette sphère de lumière et de bénédiction. Les anges auront leur place de serviteurs, mais chacun de leurs mouvements sera réglé et accompli sous sa direction. Il remplira cet office comme Fils de l’Homme selon la prophétie du Psaume 8. En effet ce Psaume parle de lui comme ayant été fait « de peu inférieur aux anges », mais ceci à cause de la mort qu’il a soufferte, comme nous le dit Hébreux 2. Il parle aussi de sa domination sur les œuvres de l’Éternel sur la terre et dans la mer. Notre verset de Jean 1 montre que les anges lui seront soumis. Le chapitre 2 des Hébreux va plus loin en disant que l’expression « toutes choses lui étant assujetties » signifie que Dieu n’a « rien laissé qui ne lui soit assujetti ». Le Fils de l’Homme dominera sur les cieux aussi bien que sur la terre.
Avant de quitter le premier chapitre, retenons que nous n’avons pas seulement ces aperçus des différents offices remplis par la Parole devenue chair, mais aussi que ses principaux titres sont mis en lumière : Jésus ; le Messie ; le Christ ; le Fils unique ; l’Agneau de Dieu ; le Fils de Dieu ; Jésus de Nazareth ; le Roi d’Israël ; le Fils de l’Homme. Le chapitre entier est semblable à une mine richement striée de ces filons d’or.
Ce chapitre commence par l’expression : « Et le troisième jour ». Si nous retournons en arrière, nous voyons que le deuxième jour est celui où Philippe a été trouvé, et le premier celui où André et son compagnon ont découvert leur Centre en Jésus. Ces jours peuvent être considérés comme des types. Le premier est celui où l’église est rassemblée autour de Christ. Le second est celui où il est reconnu comme Fils de Dieu et Roi d’Israël par le résidu fidèle d’Israël. Le troisième est celui de la félicité et de la joie millénaires, fruits du règne du Fils de l’Homme sur toutes choses.
Lors des noces de Cana, aucune gloire extérieure ne signale la présence de Jésus. Ses disciples sont là ainsi que sa mère. Il montre bientôt, par la réponse faite à sa mère, que ce n’est pas elle qui prend les initiatives, mais lui. Il fait voir aussi que son heure n’est pas encore venue : ni l’heure de ses souffrances, ni l’heure de sa gloire quand « toutes choses » seront à sa disposition. Toutefois, très vite il manifeste sa gloire en montrant que c’est lui qui dispose de l’eau, et qu’il peut en faire ce qui lui plaît. Il change l’eau de purification en vin de joie. C’est là le commencement de ses miracles ou signes, et ce signe annonce le résultat final de son œuvre. Il ne peut y avoir de joie durable que sur la base d’une purification qu’il introduit lui-même. La joie qui jaillira enfin au jour des noces d’Israël purifié sera au-dessus de toutes les autres. Le « bon vin » est gardé jusqu’à ce jour. Ce signe qui manifeste sa gloire fortifie la foi de ses disciples et peut fortifier la nôtre.
Après quelques jours passés encore en Galilée, Jésus monte à Jérusalem pour la Pâque. Tout cela s’est passé avant que Jean soit jeté en prison, donc avant le début du ministère public du Seigneur comme les autres évangélistes le rapportent. La scène qui se passe au Temple, racontée ici, se déroule donc tout au début du ministère du Seigneur. Il est au cœur de la scène quand il arrive au temple ; et là, au centre même, la nécessité d’une œuvre de purification devient tout à fait évidente. La maison de Dieu, son Père, a été changée en une maison de trafic, — un lieu de commerce et de profit mondain.
Cela illustre comment les dispositions bienveillantes de la loi pouvaient être et ont été corrompues pour servir les convoitises de l’homme. Il y avait des instructions en Deutéronome 14:22-26 : les Juifs pouvaient prétendre qu’ils ne faisaient que ce que la loi autorisait. La loi permettait d’apporter de l’argent pour acheter ce dont ils avaient besoin. En revanche, elle n’approuvait pas les pratiques de cupidité qui avaient été introduites, transformant la maison de Dieu en un centre de commerce. Ce sont les mêmes pratiques que l’on voit de nos jours. Il y a, dans les lieux de pèlerinage, des étals où les gens achètent au prix fort cierges et autres marchandises !
Le Seigneur n’a pas encore renié le Temple. Il le traite comme la maison de Dieu et il est rempli de zèle pour elle. Personne ne peut lui résister quand il est armé de son fouet de cordes ; les trafiquants doivent pour le moment s’en aller. Les Juifs, cependant, contestent ce qu’il fait et demandent un signe, comme si l’irrésistible autorité de son action n’était pas un signe suffisant. Il répond en leur donnant le signe suprême de sa propre mort et de sa résurrection, seulement voilé sous un langage symbolique. De fait, il allait désormais, dans sa personne même, remplacer le Temple comme demeure de Dieu. Son corps est un « temple » bien plus merveilleux que celui qui avait été édifié sur le Mont Morija. La Parole devenue chair a habité au milieu de nous, et ainsi « Dieu était en Christ » d’une manière beaucoup plus profonde et intime. La plénitude de la Déité habitait en Lui. Le Temple avait rempli un certain office en Israël, mais il remplit maintenant cet office d’une manière tout à fait nouvelle.
Dès le début de cet Évangile, Jésus est considéré comme rejeté. Il prend acte, ici, de l’hostilité implacable des Juifs. Ses paroles annoncent qu’ils mettront tout en œuvre pour le faire mourir. Ils détruiront, pour autant que ce soit en leur pouvoir, le temple de son corps ; mais en trois jours il le relèvera. Remarquez comment il dit que c’est lui qui le fera. Il est également vrai, bien sûr, que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts ; mais au chapitre 10, il se présente de nouveau comme l’auteur de sa propre résurrection. Ce fait est en rapport avec l’Évangile qui nous le présente comme la Parole qui était Dieu et qui devint chair. De tous les signes qu’il a donnés, sa résurrection était le plus grand.
À ce moment-là personne ne le comprend, pas même ses disciples. C’est un autre caractère de l’évangile de Jean. Il est continuellement incompris de ses amis comme de ses adversaires. Ce n’est qu’après sa résurrection et le don du Saint Esprit qui l’a suivie que les disciples ont saisi la vraie signification de ces choses. Mais cela non plus n’est pas surprenant. Si le Verbe (la Parole) devient chair, il est vrai qu’il nous parlera avec des mots humains, mais il parlera aussi des choses élevées qu’il connaît puisqu’il est dans le sein du Père. De ce fait, ses déclarations doivent avoir une profondeur insondable, une profondeur que seul l’Esprit Saint peut révéler.
Quand le Seigneur parle de façon imagée de sa résurrection, personne ne comprend ses paroles, cependant les œuvres qu’il réalise avec puissance ont un effet sur de nombreuses âmes. Les versets qui terminent le chapitre 2 montrent que des miracles peuvent produire une certaine « croyance ». Beaucoup à Jérusalem à cette époque auraient souscrit au dicton : « Voir, c’est croire ». La croyance produite par la vue de faits indéniables n’est cependant pas la foi donnée par Dieu et qui sauve. C’est une simple conviction intellectuelle qui, lorsqu’elle est mise à l’épreuve, s’effondre facilement. C’est ce que nous pourrons voir au verset 66 du chapitre 6.
Pour le moment la situation à Jérusalem peut sembler pleine de promesses, mais Jésus lit sous les apparences et l’Évangéliste saisit l’occasion pour nous le dire. Il déclare à la fois que Jésus « connaissait tous les hommes » et qu’il « connaissait ce qui est dans l’homme ». Il redit à peu près la même chose au verset 64 du chapitre 6 ; mais cette expression dans notre chapitre est la première d’une série de remarques qui nous dévoilent l’omniscience de notre Seigneur. Cette expression est tout à fait en rapport avec le caractère de cet Évangile. Jésus lui-même, qui connaissait ces hommes, ne se fiait pas à eux. Le mot traduit par « se fiait » est le même que celui traduit par « crurent » dans le verset précédent. Cela nous aide à voir que la foi véritable n’est pas une simple conviction intellectuelle, mais le fait de s’abandonner, avec confiance et simplicité, à Celui en qui on croit.
Ce chapitre commence par le mot « mais ». Nicodème fait partie de ceux qui sont impressionnés par les miracles, mais il y a quelque chose de plus en ce qui le concerne. Les miracles auxquels il a assisté ont conduit ses pensées vers Dieu et c’est Dieu qu’il cherche. La recherche habituelle de Dieu menait au temple, et c’est ce que Nicodème aurait fait de jour. Il choisit une voie qui était inhabituelle, cherchant à s’entretenir avec ce « docteur venu de Dieu », qui n’est pas reconnu par tous ; c’est pourquoi il le fait de nuit. Il est lui-même chef et docteur en Israël, et il admet que tout ce dont il a besoin pour lui-même, c’est d’être davantage instruit. Ce n’est pas peu de chose pour ce fier Pharisien de prendre la place d’un humble élève !
Le Seigneur l’aborde tout de suite avec cette déclaration importante et catégorique concernant la nécessité absolue de la nouvelle naissance. Sans cela personne ne peut même voir le royaume de Dieu. Il peut voir les miracles et les signes, mais il ne peut pas voir le royaume. Nicodème a besoin de la nouvelle naissance et non d’être enseigné. Il se montre en effet incapable, dès le début, de comprendre les paroles du Seigneur et illustre ainsi leur vérité. Il n’y voit rien d’autre qu’une référence à la naissance naturelle et cela le laisse perplexe, ce qui introduit une deuxième déclaration catégorique qui va encore plus loin. Il ne faut pas seulement voir le royaume, mais y entrer, et pour cela il faut être né d’eau et de l’Esprit.
Ce qui s’impose, c’est une nouvelle naissance et non pas seulement une nouvelle conduite ou de nouveaux principes pour les actions ; cela signifie donc une origine entièrement nouvelle. L’origine et la généalogie de Nicodème étaient parmi les meilleures, puisqu’il était issu de la véritable race d’Abraham. De plus il avait acquis toute la culture possible dans la religion juive. Si lui, un fils d’Abraham cultivé, a besoin d’une nouvelle naissance, cela signifie alors que toute chair, même celle d’Abraham, est condamnée devant Dieu. Le fait que la nouvelle naissance soit nécessaire à tous place la sentence de condamnation sur nous tous. Par notre première naissance, nous descendons d’Adam et nous participons à sa vie et à sa nature. Ce n’est qu’en passant par la nouvelle naissance, qui nous introduit dans une autre vie et une autre nature, que nous pouvons voir le royaume ou y entrer.
Les paroles du Seigneur au verset 5 font clairement référence à la prophétie d’Ézéchiel 36:24-32. Elle prédit la purification profonde et fondamentale qui atteindra Israël au début du millénium. Dieu, alors, répandra de l’eau pure sur eux, leur donnant « un cœur nouveau ». Il placera en eux « un esprit nouveau », puis il mettra son Esprit au-dedans d’eux. Il en résultera que tout leur être sera rendu si pur qu’ils auront horreur d’eux-mêmes, de leur corruption d’autrefois. Alors Dieu les bénira. Ce passage ne nous donne pas toute la vérité à ce sujet, mais il en dévoile une si grande partie que Nicodème n’aurait pas dû être surpris par ce qu’il entendait. Comme maître en Israël il aurait dû connaître ce qu’Ézéchiel avait dit !
La loi ordonnait un grand nombre d’aspersions, en général de sang, mais quelquefois d’eau (Nombres 8 et 19). On appliquait par aspersion le sang ou l’eau. L’eau est le grand agent de purification. Ézéchiel emploie ces images familières pour enseigner que Dieu appliquerait son agent de purification à Israël pour leur renouveau spirituel. Son agent de purification est sa parole, comme nous l’indique le Psaume 119 au verset 9.
Nous trouvons donc ici que le Seigneur, dans ses toutes premières déclarations, relie son enseignement à ce qui avait été révélé par Ézéchiel ; en même temps il confirme et développe la vérité. Cependant nous avons des révélations supplémentaires à ce sujet dans les épîtres. Nous devons, de plus, nous souvenir que ce que nous lisons à ce sujet aux versets 12 et 13 du chapitre 1 a été écrit par l’apôtre Jean des années après qu’une pleine lumière a été donnée sur le sujet. Jésus affirme à Nicodème que la nouvelle naissance est une nécessité qui s’impose à toute âme qui veut voir le royaume ou y entrer ; l’Esprit en est l’agent actif, et l’eau de la Parole, l’agent passif. La condition des hommes est telle que rien de moins fondamental et radical qu’une nouvelle naissance ne suffira.
Il affirme aussi que la chair reste toujours chair, et que ce qui est né de l’Esprit participe de sa nature et reste esprit. Le verset 6 établit de façon très claire que les deux natures sont totalement distinctes et ne se fondent jamais l’une dans l’autre. L’expression, souvent répétée en Genèse 1, s’applique ici : « selon son espèce ». Il n’y a pas plus de trace d’évolution ici qu’en Genèse 1 ; aucune culture prolongée ou sélection naturelle ne peut transformer la chair en esprit.
Le sujet de la nouvelle naissance a suscité beaucoup de discussions et de controverses qui auraient pu être évitées si on avait accordé au verset 8 suffisamment d’attention. Le mot grec pour « vent » et « esprit » est le même. Comme le vent, l’Esprit est invisible, et on ne peut le saisir qu’en l’entendant dans la parole qu’il donne, ou en ressentant les effets de ses interventions. Comme le vent, aussi, il n’est pas soumis à notre autorité, et ses actions dépassent largement toutes nos pensées. La même chose s’applique à tous ceux qui sont esprit, étant nés de lui. Toutefois il y a certainement, au sujet de la nouvelle naissance et de ceux qui sont nés de nouveau, des éléments que nous ne comprenons pas ; par conséquent nos raisonnements peuvent être facilement vains ou même faux.
Au verset 11 nous avons, pour la troisième fois dans notre chapitre cette expression d’une importance particulière : « En vérité, en vérité ». Nicodème doit constater pour lui-même que le Seigneur ne parle pas comme un simple prophète. Jésus a, en lui-même, une connaissance parfaite des choses dont il parle ; il a effectivement vu ce dont il rend témoignage. Il est toujours « dans le sein du Père », comme indiqué précédemment. Néanmoins son témoignage n’est pas reçu par l’homme sans l’action de l’Esprit de Dieu. Et de quoi témoigne-t-il ? Il a parlé de vérités dont Ézéchiel a annoncé la nécessité en vue de la bénédiction terrestre pendant le millénium ; il a développé la prophétie d’Ézéchiel, et Nicodème est là, plein d’hésitation et de doute ! Il doit encore parler des vérités liées aux desseins de Dieu pour le ciel ; ces choses sont-elles susceptibles alors d’être reçues par la foi ?
Les réalités célestes, du fait de leur nature, ne peuvent qu’être totalement inaccessibles aux hommes. Leurs pieds foulent la terre, qui leur est familière, mais ils ne sont jamais allés au ciel. Voilà que se présente Quelqu’un d’entièrement compétent pour révéler les réalités célestes. Nous sommes placés devant un paradoxe étonnant : Jésus est descendu du ciel, toutefois il était dans le ciel. Cependant, si nous nous souvenons du début de l’Évangile, le paradoxe disparaît. Voici la Parole qui était Dieu et qui est devenue chair. En devenant chair, il est certainement descendu du ciel sans, pour autant, jamais cesser d’être Dieu qui est dans le ciel. Mais il dit : « Le Fils de l’Homme qui est dans le ciel ». C’est vrai, et nous devons en conclure que nous ne sommes pas libres de disserter sur sa personne avec notre intelligence comme certains ont tendance à le faire. Nous ne devons pas dire : « Dans cette position, il est complètement comme Dieu » ; ou bien : « Cela, il l’a fait entièrement comme Homme ». Nous pouvons faire une distinction, bien sûr, mais nous ne devons pas séparer ! Même dans son humanité, sa personnalité est une et indivisible. De ce fait, le Fils de l’Homme est Celui qui parle avec une compétence parfaite des réalités célestes. Quelle différence avec tous ceux qui l’ont précédé !
Après avoir mentionné les réalités célestes, le Seigneur enchaîne immédiatement en annonçant l’événement important qui doit avoir lieu avant qu’elles soient mises à la disposition des hommes et qu’elles soient pleinement révélées. Cet événement a eu comme type le serpent d’airain dans le désert ; il a été élevé comme le Fils de l’Homme l’a été sur la croix. C’est l’œuvre accomplie pour nous, en dehors de nous-mêmes. La nouvelle naissance est une œuvre accomplie en nous. Dans les deux cas Jésus emploie l’expression : il faut ; car les deux œuvres sont indispensables si nous devons avoir une relation heureuse avec Dieu. La mort du Fils de l’Homme, comme sacrifice, est pour l’homme le seul moyen d’accéder à la vie éternelle. C’est un moyen accessible à « quiconque croit en lui » ; c’est-à-dire par la foi.
Les versets 16 et 17 commencent tous les deux par « car », et sont donc étroitement liés aux versets 14 et 15. Nous découvrons que ce Fils de l’Homme, descendu du ciel et cependant encore dans le ciel, élevé sur la croix, est le Fils unique que Dieu a donné. Cela correspond d’une manière frappante à Romains 8:3, où se trouve exposée aussi la vérité symbolisée par le serpent d’airain. Moïse a fait le serpent d’airain à la ressemblance des serpents brûlants qui avaient causé bien du mal. Dieu, de la même manière, a ainsi envoyé son propre Fils, en ressemblance de chair de péché, afin que le péché dans la chair puisse être condamné dans son sacrifice pour le péché. Le péché habitait dans notre chair, dominant et corrompant notre ancienne vie. Nous avons la vie éternelle en croyant en Jésus, le Fils de Dieu. Mais le fondement de cette vie repose sur le fait que Dieu a condamné le péché à la croix. C’est là que la puissance qui dominait notre ancienne vie et agissait en elle a été condamnée, et c’est le gage qu’elle sera un jour enlevée à jamais. C’est sur cette base que la vie éternelle est donnée.
L’amour de Dieu est révélé par le don du Fils unique. C’est un amour qui n’embrasse pas seulement Israël, mais le monde. La grâce annoncée dans cet Évangile franchit les étroites limites d’Israël d’une façon surprenante. Dans les premiers versets, nous avons vu que « la vie était la lumière des hommes », et non pas celle d’Israël seulement. Nous avons trouvé aussi que la vraie lumière « éclaire tout homme ». Ici, « Dieu a... aimé le monde », et le don du Fils est la mesure de l’amour. De plus, le terme « fils unique » exprime la place suprême et exclusive qu’il occupe dans l’amour de Dieu. Le type d’Abraham et d’Isaac nous aide à comprendre. Hébreux 11 nous dit qu’Abraham a offert « son fils unique », bien qu’en réalité il ait déjà Ismaël à ce moment-là et qu’il ait eu beaucoup d’autres fils par la suite. Cependant Isaac était seul et unique dans le dessein de Dieu et dans l’affection d’Abraham. C’est avec la même force que ce terme est employé au sujet du Fils de Dieu, pour mettre en relief dans nos esprits la grandeur du don de Dieu. Dieu a donné Celui qui occupe une place suprême et unique dans ses affections.
Le verset 17 apporte une pensée supplémentaire. Comme l’indique le verset 16, la mort est la fin de la course que le monde poursuit. Le jugement et la condamnation la suivent. Périr, c’est rester pour l’éternité sans relation avec Dieu, totalement séparé de lui, c’est-à-dire dans un état de mort éternelle. La vie est donc une nécessité urgente pour les hommes. Le don du Fils unique offre la possibilité à celui qui croit en lui d’avoir non seulement une forme de vie, mais « la vie éternelle ». C’est une vie d’une qualité divine et incomparablement merveilleuse. De même, la venue du Fils dans le monde n’a pas non plus pour but la condamnation, que la loi de Moïse avait déjà apportée avec beaucoup de force ! Il est venu pour sauver. Les Israélites fidèles attendaient la venue d’une « corne de délivrance, dans la maison de David », qui les sauverait de leurs ennemis (voir Luc 1:68-71). Il y a ici quelque chose de beaucoup plus grand. C’est la délivrance du péché et de ses conséquences, et elle s’étend au monde entier.
Le Fils de Dieu n’est pas venu sur la terre dans le but de condamner ; cependant sa présence ici, puisqu’il est la Lumière, a indirectement amené la condamnation. La lumière manifeste tout et met ainsi tous les hommes à l’épreuve. La lumière agit en éclairant et en révélant ; dans sa présence l’homme réagit de deux façons. S’il fait des choses mauvaises, il aime les ténèbres et hait la lumière, car elle le condamne. S’il pratique la vérité, il accueille la lumière et vient à elle. Les versets 18 à 21 déclarent que « celui qui croit en lui » pratique la vérité, alors que « celui qui ne croit pas » fait le mal. L’un vient à la lumière et il n’y a pas de condamnation pour lui ; l’autre demeure dans les ténèbres, ce qui suffit à le condamner. Il n’a pas cru, bien que la lumière soit apparue lorsque le Fils de Dieu est venu. C’est suffisant, et il n’est pas nécessaire d’attendre l’arrivée du véritable jour de jugement. Il est déjà condamné.
Les versets 22 à 24 précisent clairement que les événements décrits ici ont eu lieu avant que Jean soit jeté en prison. Cela correspond au moment où commence le ministère public du Seigneur d’après Matthieu 4:12, Marc 1:14, Luc 3:20. Pendant une courte période, le baptême a été administré à la fois par le Seigneur (par le moyen des disciples ; voir 4:2) et par Jean. Certains Juifs saisissent l’occasion pour informer Jean de cette activité du Seigneur, comme pour l’inciter à la jalousie. Si tel était leur but, ils ont échoué complètement.
Avec fidélité et une vraie humilité, Jean reste à sa place de serviteur de Dieu, qui n’a rien qu’il n’ait reçu du ciel. Les juifs sont obligés de rendre témoignage qu’il n’a jamais prétendu être le Christ. Il a affirmé qu’il était le précurseur du Messie ; il est aussi l’ami de l’Époux. Dans cette deuxième affirmation, il parle apparemment de façon symbolique, par le moyen d’un exemple. La vérité, telle que nous l’avons en Apocalypse 19:7, n’a pas encore été dévoilée. Il a été conduit, sans doute, à s’exprimer en des termes qui correspondront exactement à cette vérité quand elle sera révélée. Il n’a pas de lien avec l’épouse, mais comme ami de l’Époux, il a pour lui un intérêt et une affection des plus profonds. Lorsqu’il entend la voix de l’Époux, sa coupe déborde de joie.
Jean prononce ensuite des mots qui devraient être gravés sur le cœur de tous ceux qui aiment le Seigneur Jésus : « Il faut que Lui croisse et que moi je diminue ». Pour la troisième fois dans ce chapitre nous trouvons : « il faut ». Au verset 7 cette expression est reliée au grand besoin de l’homme ; au verset 14 au grand amour de Dieu ; ici à l’attachement du fidèle serviteur. Comme le soleil, Christ doit s’élever au zénith avec une gloire croissante ; par conséquent, comme la lune, Jean doit s’effacer et disparaître. Il le sait et s’en réjouit, car à ce moment-là Christ est tout dans ses pensées. Il le connaît comme Celui qui vient du ciel et absolument pas de la terre. À cause de cela, Jésus parle comme personne d’autre n’en est capable. Il est en relation avec toute l’étendue des choses célestes, ce qui reste impossible au plus grand des prophètes, qu’était Jean.
Les paroles de Jean se sont réalisées et, peu après, il a dû diminuer et disparaître en prison. En cela il n’a pas été une exception à la règle. C’est normal pour tous les serviteurs de Dieu : d’une manière ou d’une autre, ils diminuent et s’en vont. C’est ce qui est arrivé à Moïse dans l’Ancien Testament et à Paul dans le Nouveau. Même s’ils ont été de grands serviteurs, nous ne devons pas avoir une trop haute opinion d’eux. Paul a eu son temps comme ardent évangéliste et fondateur d’églises. Mais ensuite il y a eu pour lui l’emprisonnement et la faillite dans les églises ; il disparaît ainsi à nos yeux. Paul diminue, mais uniquement pour que croisse l’excellence suprême de Christ. Il doit en être de même de chacun de nous, et nous devrions nous en réjouir comme l’a fait Jean.
Les premiers mots du verset 33 semblent contredire la fin du verset 32, mais le paradoxe est purement verbal. Il repose sur une de ces déclarations abstraites qui apparaissent si souvent dans les écrits de Jean. L’homme, dans sa condition naturelle, est complètement mort et insensible au témoignage divin. Le fait est formulé de façon abstraite à la fin du verset 32. Mais ensuite, d’un autre côté, Dieu travaille par son Esprit dans le cœur de quelques-uns ; ainsi, d’un point de vue pratique, nous trouvons ceux qui reçoivent le témoignage. Ils confirment par là que Dieu est vrai. Au commencement le diable a attaqué le témoignage que Dieu avait donné à Adam ; c’est ainsi que le péché a été introduit. La foi revendique la vérité du témoignage ; la vie et le salut sont ainsi introduits.
Le témoignage de Dieu avait existé depuis le moment où Dieu s’était adressé à Adam au sujet des arbres du jardin. Il atteint maintenant son apogée en Celui que Dieu a envoyé, qui connaît, pour les avoir observées, les réalités célestes dont il parle. Il en parle avec « les paroles de Dieu », possédant l’esprit sans mesure, ni limite. Il y a donc enfin un témoignage d’une portée infinie et d’une plénitude incomparable. Certainement, il dépasse complètement les facultés de l’homme naturel ; le simple croyant peut pourtant le recevoir, le confirmant comme étant la vérité de Dieu.
Les versets 35 et 36 apparaissent comme un paragraphe séparé. Les paroles du Baptiseur y sont complétées par l’Évangéliste qui peut parler dans la pleine lumière de tout ce qui a été révélé dans la Parole devenue chair. Le Fils ayant été manifesté, le Père a été révélé ainsi que les relations entre ces Personnes divines. Nous avons ici trois faits importants concernant le Fils. Il est l’objet de l’amour du Père. Toutes choses sont entre ses mains, lui ayant été données par le Père pour en disposer comme il lui convient. Il est le centre de la foi et Celui qui met à l’épreuve tout homme. Croire en lui, c’est posséder la vie éternelle. Refuser la soumission de la foi en lui, c’est être exclu de la vie et demeurer sous la colère de Dieu.
Ainsi, très tôt dans cet Évangile, nous découvrons que le Fils, comme étant la parole, est le Créateur et le Révélateur de toutes choses. Il est aussi Celui qui opère toutes choses, Celui qui dispose de toutes choses et enfin, comme objet de l’amour du Père, il est manifesté parmi les hommes et il devient la Référence absolue. Nous remarquons, au verset 36, que la vie doit être possédée et vue aussi. Cela montre l’étendue de l’expression « vie éternelle ». De plus, le contraire de « voir la vie », c’est : « demeurer sous la colère de Dieu ». Ici encore les choses sont présentées de façon abstraite. Cependant le langage est tel qu’il réduit à néant les deux théories par lesquelles les hommes s’efforcent d’échapper à la réalité solennelle du châtiment éternel. Les mots « ne verra pas la vie » réfutent la réconciliation universelle qui prétend que, d’une manière ou d’une autre, tous verront la vie à la fin. La théorie de l’immortalité conditionnelle, qui signifie la destruction des incrédules non repentis, est annulée par le fait que la colère de Dieu « demeure » sur de tels individus ; ils existent donc éternellement. À ce sujet rappelons encore le verset 3 du chapitre 20. Cet Évangile est écrit afin que nous puissions être parmi ceux qui croient et ont la vie. L’alternative terrible est placée ici devant nous très clairement.
Les derniers paragraphes du chapitre 3 font suite à l’intervention des Juifs à propos du baptême de Jean et à la réaction de ce dernier. Le Seigneur réagit à leur intervention au début du chapitre 4. Jean accepte volontiers de se mettre de côté pour que son Maître puisse avoir toute la place. Le Maître se retire en Galilée de peur qu’une rivalité ne s’installe, ce qui serait préjudiciable à son serviteur. Telle est la sollicitude de Jésus envers Jean. De plus, le Seigneur lui-même aurait été rabaissé par un tel comportement. Cela l’aurait placé aux côtés de Jean comme une sorte de chef de parti. C’est une faute analogue, dans son principe, à l’erreur des croyants de Corinthe qui associaient le nom de Christ à celui de Paul, d’Apollos et de Céphas. Cela ne doit jamais se faire.
Le chemin direct vers la Galilée passe par la région de la Samarie ; ainsi « il fallait qu’il traverse » cette contrée par nécessité géographique. Mais c’est aussi une nécessité liée à la grâce de Dieu qui lui impose un chemin qui l’amène à une certaine ville de Samarie, appelée Sichar. Jésus, la Parole devenue chair, est fatigué de son voyage. C’est un témoignage à la réalité de son humanité. Il est non seulement fatigué, mais il a aussi faim et soif. Il s’assied au bord de la fontaine vers midi, alors que l’heure la plus chaude approche. Nicodème l’avait cherché de nuit. Jésus cherche une pécheresse samaritaine à midi. L’Évangile de Jean a comme particularité de rapporter les conversations de Jésus avec des personnes et la manière dont il s’en occupe. Il relate aussi ses conversations — généralement des controverses — avec des groupes de personnes. Par contre, nous n’y trouvons jamais le récit de ses sermons plus officiels, comme le sermon sur la montagne ou les paraboles de Matthieu 13. Beaucoup d’entre nous reconnaissent que, pour s’occuper correctement d’une personne en particulier, il faut plus de compétence spirituelle que pour s’adresser à une foule, et que cela exige plus de courage. Un exemple parfait de la manière dont on s’occupe d’une personne est présenté ici.
Jésus commence par demander à boire de l’eau fraîche. La Parole faite chair prend la position de Celui qui demande humblement à une de ses créatures les plus pécheresses. Quelle merveilleuse vision en effet ! Le prenant simplement pour un juif, la femme a le sentiment qu’il se rabaisse. À la lumière de la véritable situation nous pouvons voir, nous, combien il s’est réellement anéanti lui-même et s’est dépouillé de lui-même. Mais s’approcher si humblement de cette femme permet à la conversation de débuter de manière très favorable. Quant à nous, qui désirons être utiles aux âmes aujourd’hui, nous serions en effet très sages si nous les approchions toujours avec humilité !
La femme, étonnée et curieuse, ne peut s’empêcher de demander comment il peut lui faire une telle requête. La réponse de Jésus au verset 10 place devant elle trois choses. Premièrement, il y a le fait que Dieu est un Donateur. La femme connaît peu de chose de la loi, mais ce fait le lui présente sous un éclairage entièrement nouveau.
Deuxièmement, Jésus fait connaître la grandeur mystérieuse de sa propre personne, puisqu’il est le dispensateur du don de Dieu. Elle ne voit en lui qu’un Juif qui demande à boire. Quand elle le connaîtra, elle découvrira qu’il est en réalité le Donateur d’un don d’une valeur incomparable.
Troisièmement, il révèle que ce don est « l’eau vive ». Il fait ainsi passer la pensée de cette femme du domaine matériel au domaine spirituel. Nicodème et cette femme, dont nous ne connaissons pas le nom, ont en commun, au départ, le fait qu’ils n’ont aucune idée du sens des paroles du Seigneur et encore moins des choses dont il parle. On trouve pourtant des indications de ces vérités dans l’Ancien Testament. Dans le livre de Jérémie, par exemple, l’Éternel s’était présenté deux fois comme « la source des eaux vives » (2:13 ; 17:13).
Le fait que cette femme ne comprenne pas conduit à de nouvelles révélations au verset 14. Elles se présentent encore sous trois aspects différents.
Premièrement, celui qui boit de l’eau vive, comme don de Christ, aura cette eau « en lui ». Ce don demeurera vraiment dans son être même.
Deuxièmement, cette eau sera en lui « un puits » ou « une fontaine... jaillissant en vie éternelle ». Une fontaine de vie intérieure, qui jaillit jusqu’au niveau de la source céleste !
Troisièmement, le fait de boire une telle eau et de posséder une telle fontaine procure une satisfaction durable. Le Seigneur emploie une expression très forte : « Il n’aura plus soif à jamais ».
Par l’expression « l’eau vive », le Seigneur désigne l’Esprit de Dieu. C’est évident au verset 39 du chapitre 7. Au chapitre 3, le Fils unique est le don de Dieu au monde. Au chapitre 4, l’Esprit de Dieu est le don de Dieu au croyant. Il est accordé par le Fils de Dieu, Celui qui parle, assis au puits de Sichar. Par l’Esprit, nous avons la vie en nous ; il est parlé de lui ailleurs comme de « l’Esprit de vie dans le Christ Jésus » (Romains 8:2). C’est par lui que la vie demeurant en nous jaillit jusqu’à la source divine de la vie. De cette manière, le Seigneur révèle la vie de communion, d’adoration et de satisfaction qu’il allait mettre à la disposition du croyant. Il en résulte que le croyant peut aujourd’hui anticiper la joie du millénium, joie présentée de manière symbolique, au commencement des miracles à Cana de Galilée. Le croyant peut non seulement l’anticiper, mais aussi la connaître dans une mesure plus vraie et d’une manière plus spirituelle.
Avant d’aller plus loin dans notre chapitre, notons l’enchaînement remarquable de l’enseignement depuis le récit de ce premier miracle. Nous avons eu d’abord l’œuvre accomplie en nous, c’est-à-dire la nouvelle naissance par l’Esprit et la Parole. Ensuite le témoignage nous a été donné et, en le recevant, nous confirmons que Dieu est vrai. Enfin le don de l’Esprit nous a été accordé. Il est en nous comme une fontaine intarissable, qui jaillit jusqu’à la source éternelle. Ici nous sont présentées en germe les grandes réalités qui sont développées dans les Épîtres.
Bien que la femme ignore encore la signification de « l’eau vive », nous voyons en poursuivant notre chapitre que les paroles prononcées ensuite par le Seigneur ont suffi à éveiller son désir ; elle est amenée à demander de cette eau. Avant qu’il lui en donne, il faut que sa conscience soit touchée et qu’elle soit convaincue de péché. En lui demandant d’appeler son mari, le Seigneur met le doigt sur un point très sensible de sa vie. Il continue en lui montrant que sa triste histoire est devant ses yeux comme un livre ouvert. De son côté elle voit tout de suite et reconnaît qu’il est prophète. Implicitement elle plaide donc coupable lorsqu’il l’accuse. Mais comme c’est souvent le cas en présence d’une conscience blessée, elle s’efforce de faire dévier la conversation vers une discussion religieuse, éliminant ainsi le côté personnel.
L’endroit où l’adoration devait être offerte à l’Éternel était depuis longtemps une question brûlante. La montagne de Garizim avait-elle remplacé le mont Morija comme l’affirmaient les Samaritains ? Le Seigneur saisit l’occasion pour montrer à la femme non seulement son péché personnel mais aussi l’inutilité d’un « culte » dans lequel elle était engagée avec son peuple. En disant : « Vous, vous adorez, vous ne savez quoi », il le désavoue. En disant : « le salut vient des Juifs », il la convainc de son état de péché. Elle fait partie des nations, de ceux qui sont « étrangers aux alliances de la promesse, n’ayant pas d’espérance et étant sans Dieu dans le monde » (Éphésiens 2:12). Ainsi, même pendant la discussion sur l’adoration, elle n’est pas à l’abri des remarques qui atteignent sa conscience comme des coups d’épée.
Le Seigneur, pourtant, place tout ce sujet de l’adoration sur un plan beaucoup plus élevé. Il parle d’adorer l’Éternel à la lumière de la révélation qu’il apporte, celle du « Père ». Ainsi, l’adoration est tout de suite détachée du cérémonial qui la liait à un lieu saint sur la terre. La loi liait le peuple de façon très stricte à un lieu saint où le nom de l’Éternel était établi. C’est de là que venait la vieille querelle entre les Juifs et les Samaritains. Jésus élève les pensées de la Samaritaine vers Dieu qui est Esprit, le révélant comme Père.
Cette révélation nouvelle inaugure une nouvelle « heure », qui a en fait déjà commencé. L’adoration qui va caractériser cette heure devra être conforme à la révélation qui l’a instituée. Dieu, qui est Esprit, recherche cette adoration comme Père ; c’est pourquoi, il faut maintenant que l’adoration soit « en esprit et en vérité » pour être acceptable. Remarquez de nouveau ce « il faut ». Adorer n’est pas quelque chose de facultatif ou qui peut varier selon nos goûts. Il faut adorer Dieu à sa manière à lui. Toute autre forme qui prétend être de « l’adoration » n’en est absolument pas une !
La véritable adoration est produite « en esprit » : c’est-à-dire ni par la chair, ni par une attitude physique. Cette parole du Seigneur annule les rites et cérémonies observés jusqu’ici, qui ont été un piège pour tant de personnes. Notre capacité à offrir l’adoration en esprit vient de ce que nous possédons l’Esprit de Dieu, — la fontaine d’eau jaillissant en vie éternelle — comme l’indique aussi Philippiens 3:3. L’Esprit de Dieu peut engager notre esprit à une véritable adoration n’importe quand et n’importe où ; pas simplement dans un lieu saint consacré comme dans le Judaïsme.
Il faut encore que l’adoration s’élève « en vérité » ; c’est-à-dire à la lumière de tout ce que Dieu a révélé de lui-même en Christ. Cela annule la tendance rationaliste qui est également si répandue. Les hommes parlent, par exemple, d’adorer « la grande Cause Première » à la lumière des beautés de la nature. Ils ignorent ou refusent, par contre, la vérité concernant Dieu révélé en Christ. Ce n’est qu’en lui que nous connaissons le Père qui doit être adoré. Si nous connaissons le Père ainsi, notre cœur sera certainement rempli d’une adoration ayant ce caractère spirituel qui lui est agréable.
Le Père cherche de tels adorateurs. Il s’est fait connaître lui-même pour produire cette réponse. Ce flot d’amour qui descend vers nous par cette révélation produit en nous, en retour, un flot d’amour qui jaillit en adoration. C’est ce qui lui est agréable et qu’il recherche.
La Samaritaine connaissait la promesse au sujet du Messie. Ces merveilleuses paroles du Seigneur, associées à la conviction intérieure de péché, orientent les pensées de cette femme vers sa venue. Sa réponse semble indiquer qu’elle discerne dans les paroles du Seigneur qu’il se révèle comme le Messie. Tout de suite, le Seigneur se révèle à elle, avec la plus grande clarté, comme étant le Christ. Cette révélation, elle l’accepte aussitôt ouvertement : elle retourne à la ville et fait connaître aux gens la raison de sa foi immédiate. Il doit être le Christ, car il lui a dit tout ce qu’elle avait fait dans sa vie. Il ne l’a pas décrit en détail, bien sûr ! Il lui a plutôt montré, comme en un éclair, que tout ce qu’elle a fait jusque-là peut être résumé en un mot : péché. Il en est exactement de même aujourd’hui. La foi en Christ va de pair avec une vraie conviction de péché.
Le beau paragraphe des versets 31 à 38 se présente comme une parenthèse dans le récit. Dans le verset 32, les paroles du Seigneur aux disciples ont été aussi rendues par : « Moi, j’ai une nourriture à manger que vous, vous ne connaissez pas ». Il travaille pour assembler « du fruit en vie éternelle », comme il le dit au verset 36. C’est, pour lui, une nourriture délicieuse de voir ce but atteint dans la bénédiction accordée à la Samaritaine pécheresse. C’est « la volonté de Celui qui m’a envoyé » de faire cela, dit-il. La lumière qu’il apporte doit briller pour tout homme, comme nous l’avons appris au début de cet Évangile. Nous la voyons briller ici sur une pécheresse qui se trouve en dehors du Judaïsme. La volonté de Dieu, l’œuvre de Dieu et la vie éternelle pour l’homme forment ici un tout ; quelle bénédiction pour nous qu’il en soit ainsi ! Le Seigneur indique ensuite à ses disciples qu’à leur tour ils auront part à cette œuvre bénie, soit en semant, soit en moissonnant. Dans le cas présent, c’est le Seigneur lui-même qui sème. Quand le temps de la moisson est arrivé, en Actes 8, la moisson a été très abondante.
Le paragraphe des versets 39 à 42 termine ce récit. Les hommes viennent à Christ à la suite du témoignage de cette femme. Ils sont gagnés eux-mêmes par la même conviction. Un grand nombre croit à cause de ce qu’elle dit ; un nombre encore plus grand croit après l’avoir écouté, Lui. Ils croient et désirent ardemment sa compagnie.
Ils vont encore plus loin que la femme dans leur confession. Il est non seulement le Christ, mais aussi « le Sauveur du monde ». L’orgueil religieux tout simplement aurait pu les pousser à s’enorgueillir de ce qu’il était le Sauveur des Samaritains aussi bien que celui des Juifs. Mais seule la foi pouvait les amener ainsi à saisir la grande pensée de Dieu pour « le monde », selon Jean 3:16. Ils ont entendu et ils ont connu ; et en conséquence ils ont cru.
L’évangéliste nous a amenés, par ce récit, au fait que Jésus est le Christ. Comme nous le verrons, le chapitre suivant nous conduit au fait qu’il est le Fils. En réunissant les deux, nous revenons au sujet indiqué au dernier verset du chapitre 20 de cet Évangile.
Au dernier paragraphe de ce chapitre 4, nous voyons le Seigneur de retour en Galilée, et cela nous amène au deuxième miracle mentionné par Jean. En Galilée, il reçoit un accueil qui ne lui a pas été réservé à Jérusalem, et ce second signe aussi est lié à la ville de Cana de Galilée. Le premier miracle préfigurait le temps annoncé en Ésaïe 62:4, 5. Il parle du moment où le jour des noces d’Israël arriverait et où le vin de la joie serait produit à partir de l’eau de purification. Le second miracle présente le Seigneur comme Celui qui peut apporter la vie et la guérison quand la mort semble imminente. Ce noble juif n’a pas la foi profonde qui caractérise le centurion des nations de Matthieu 8. Comme Juif, sa tendance est de demander des signes et des miracles avant de croire. Une telle croyance n’est pas une foi réelle, comme nous l’avons vu à la fin du chapitre 2. Cependant, bien que faiblement, il y avait de la foi dans le cœur de ce père.
Cette foi se manifeste de deux manières. Premièrement, il insiste dans sa requête quand la réponse du Seigneur semble, au début, insatisfaisante. Il expose pleinement la situation désespérée de son fils. Deuxièmement, il prend Jésus au mot quand la réponse qu’il reçoit est simplement l’ordre de repartir parce que son fils est vivant ; il croit sans avoir de signe pour confirmer sa parole. Voilà les marques d’une foi véritable : elle persévère et prend Dieu au mot sans signe ni miracle ni sentiments.
Le Seigneur accomplit sa propre parole. Le lendemain, l’homme voit que sa confiance a été récompensée. Jésus a dit : « Ton fils vit » ; le jour suivant, bien que ses serviteurs n’aient pas entendu Jésus parler, ils viennent à la rencontre du père et lui disent : « Ton fils vit ». La vie rendue, même au moment de la mort, constitue manifestement la pensée principale. C’est exactement ce dont a besoin l’homme en général, et Israël en particulier. L’homme n’a pas besoin de la guérison uniquement, mais de la vie. C’est le second miracle. Nous trouverons dans les chapitres qui suivent beaucoup d’instructions au sujet de la vie (concernant Jésus qui en est l’unique Source et le Donateur).
Dans les premiers versets, nous sommes ramenés à Jérusalem pour considérer un troisième miracle : la guérison de l’infirme de Béthesda. Un Juif, à la lecture de cet Évangile, pourrait dire : « En effet nous sommes dans l’état d’une nation malade, à l’article de la mort, et nous avons besoin de vie ; mais nous avons la loi. Ne devrions-nous pas y trouver la guérison ? ». Ce troisième miracle nous fournit la réponse.
Un chemin de bénédiction a été mis à la portée de l’homme par la loi de Moïse. L’homme n’avait qu’une seule chose à faire ; il ne l’a pas faite. La loi exigeait de lui la capacité de saisir le bienfait offert. Le cas de l’infirme au réservoir fait clairement ressortir l’état dans lequel se trouve tout homme mis à l’épreuve par la loi. Le péché a détruit notre faculté de faire la seule chose nécessaire exigée par la loi. C’est tellement évident dans le cas de cet homme qu’il ne fait aucune allusion à ses propres capacités qui ont disparu. Il reconnaît que personne n’est disponible pour faire pour lui ce qu’il ne peut faire lui-même. « Je n’ai personne ! » dit-il.
Cependant, par sa confession, il reconnaît son désir d’être rétabli. Une guérison complète lui est accordée immédiatement par la parole du Seigneur. Ce que la loi ne pouvait faire pour lui est accompli en un instant ; c’est l’œuvre du Fils de Dieu, présent à ce moment-là sur la terre. La loi ne pouvait rien, car elle était impuissante à cause de la faiblesse de la chair. L’homme est capable, non seulement de marcher, mais aussi de porter le lit qui avait auparavant témoigné de son infirmité. Le Seigneur lui dit de le faire, bien que ce soit le sabbat.
La loi du sabbat était très stricte. Toute forme de travail était interdite, y compris le fait de ramasser du bois et d’allumer du feu. Les Juifs réagissent donc vivement quand ils voient cet homme porter son lit. Mais il a une réponse prête pour les convaincre. L’homme qui l’a guéri lui a dit de prendre son lit ; et peu après il est capable de nommer cet homme : Jésus. Leur zèle pour le sabbat est tel que, dès lors, Jésus devient la cible de leur haine et de leur persécution.
Le Seigneur ne prononce aucune parole d’excuse, ni même d’explication. Il se contente d’affirmer quelque chose qui sape à la base cette institution légale. Sous la loi de Moïse, le sabbat avait été institué comme signe entre l’Éternel et Israël (Exode 31:12-17). Il était cependant basé sur le repos de Dieu quand la création avait été achevée. Jésus, en ce qui le concerne, rejette le sabbat. Depuis que la création avait été envahie par le péché, son Père travaillait, sans se reposer. Jésus travaillait en communion avec son Père sans observer les sabbats comme s’il leur était lié.
Cette déclaration précise attise la haine meurtrière des Juifs pour les deux raisons citées au verset 18. Il a violé le symbole de l’alliance dont ils se glorifiaient. De plus, il a ajouté à son acte l’affirmation que Dieu est son Père, proclamant ainsi son égalité avec Dieu. Notons qu’au verset 18, Jean explique pour quelles raisons les Juifs cherchent à faire mourir le Seigneur. Il ne rapporte pas l’explication donnée par les Juifs, même s’il est possible qu’ils aient donné cette explication. C’est donc le commentaire du Saint Esprit par l’intermédiaire de Jean. Cela prouve que le fait que notre Seigneur soit Fils n’implique absolument aucune pensée d’infériorité vis-à-vis du Père. Au contraire, c’est l’affirmation de l’égalité.
Au verset 19, la réponse de Jésus à la haine meurtrière des Juifs est très frappante. Le Fils, qui était ici dans son humanité, avait pris cette place pour exécuter à la perfection toute la volonté et l’œuvre du Père. C’est pourquoi il ne peut rien faire « de lui-même », c’est-à-dire en prenant une initiative indépendamment du Père. Il agit plutôt en toutes choses sous la direction et sur l’ordre du Père. Nous pensons que cela a pour but de nous amener à une vérité encore plus profonde : cette nécessité était enracinée dans le fait qu’il était parfaitement un avec le Père. Bien qu’il soit homme, il est si complètement, si parfaitement et si entièrement dans l’unité de la divinité qu’il lui est impossible d’agir séparément du Père. C’est dans ce sens que « le Fils ne peut rien faire de lui-même ». Par conséquent, cette affirmation, loin d’être un aveu d’impuissance ou même d’infériorité, est une affirmation de sa déité absolue.
« Le Père aime le Fils ». Ces cinq mots rappellent les paroles de l’évangéliste à la fin du chapitre 3. Ils résonnent ici, au verset 20, comme la voix de Jésus lui-même. Le Fils, maintenant sur la terre comme homme, a une pleine connaissance des actes du Père ; il va entreprendre des œuvres plus grandes que celles qui ont déjà été faites. Il agira comme Celui qui donne la vie et qui exécute le jugement. Vivifier c’est donner la vie. En cela le Fils agit selon sa volonté souveraine, bien qu’évidemment sa volonté soit toujours en parfaite harmonie avec celle du Père.
Au verset 21, une distinction est faite entre ressusciter les morts et vivifier. Les méchants vont être ressuscités, mais il n’est pas dit qu’ils seront vivifiés. De plus, la vivification a lieu alors qu’il n’est pas question de résurrection, comme le montre le verset 25. Le Fils ressuscitera les morts, comme il le dit aux versets 28 et 29, mais le point important du verset 21 est qu’il donne la vie comme le Père le fait. Dans les premiers versets de cet Évangile, nous l’avons contemplé ayant la vie dans son être même et manifestant cette vie afin qu’elle soit la lumière des hommes. Ici nous allons un peu plus loin : Il est Celui qui donne la vie à d’autres. En cela il agit avec le Père.
Mais en ce qui concerne le jugement, comme le dit le verset 22, il agit de la part du Père. Il y a des choses que le Fils dit ne pas connaître : fixer et révéler « les temps et les saisons » par exemple (Actes 1:7 ; Marc 13:32). Ici le Père renonce à tout jugement, le remettant entre les mains du Fils. Ces faits, cependant, ne doivent jamais être utilisés pour rabaisser l’honneur et la gloire du Père ou du Fils. Ceci est spécialement souligné en ce qui concerne le Fils au verset 23. En effet le fait qu’il ait revêtu l’humanité l’expose à être injustement mésestimé dans l’esprit de ceux qui ne le comprennent pas et ne l’aiment pas. Il sera honoré par tous à l’heure du jugement ; ne pas l’honorer aujourd’hui, c’est déshonorer le Père qui l’a envoyé. De toute évidence, le Père n’acceptera d’honneur que si en cela le Fils est également honoré.
Dans ce merveilleux discours, le Seigneur fait trois déclarations qu’il souligne particulièrement par les mots « en vérité, en vérité ». Comme nous l’avons vu, il insiste au verset 19 sur son unité intrinsèque avec le Père dans toutes ses œuvres. Au verset 24, il met de nouveau l’accent sur sa relation avec le Père. Comme étant « la Parole devenue chair », il est l’Envoyé du Père ; dans sa Parole le Père s’est fait connaître. Ainsi il ne dit pas : « Celui qui entend ma parole et qui la croit... », mais il dit plutôt : « Celui qui entend ma parole, et qui croit Celui qui m’a envoyé... ». Nous croyons le Père par la parole du Fils, de telle sorte que Pierre écrira plus tard aux croyants : « Vous qui par lui croyez en Dieu » (1 Pierre 1:21). Il annonce ici, maintenant, que le simple fait d’entendre et de croire produit trois résultats merveilleux : posséder la vie éternelle, être préservé du jugement, passer de la mort à la vie.
Ce verset capital a été utilisé des milliers de fois pour apporter lumière et conviction à des pécheurs inquiets et se posant bien des questions ! Qu’il puisse être utile encore des milliers de fois ! On est tout de suite frappé par l’autorité et l’assurance qui se dégagent de ce verset. Mais lorsqu’on l’étudie de plus près, quelle profondeur s’y découvre ! Le Fils donne la vie à qui il veut et exécute tout jugement. Il a les paroles de la vie qui conduisent l’âme à Dieu par la foi ; et dès cet instant la vie nous appartient et nous ne viendrons jamais en jugement. Nous sommes devenus les bénéficiaires de la première de ces « œuvres plus grandes » dont il a parlé ; nous ne connaîtrons jamais la seconde. Il insiste sur le côté positif en parlant de la vie sous deux aspects. Ce n’est pas seulement ce que le croyant possède, mais aussi la sphère dans laquelle il passe au-delà du royaume de la mort.
Si nous parlons de la vie en rapport avec cette création, nous traitons un sujet qui défie nos analyses et nos définitions. À l’évidence, le mot utilisé a pourtant plusieurs significations. Par exemple, nous envisageons non seulement l’étincelle de vie chez l’homme ou l’animal, mais aussi les conditions nécessaires pour que cette étincelle subsiste. Aucun poisson ne peut vivre sans eau ; aucun homme ne peut vivre sans air. De la même manière, il n’y a pas de vie spirituelle et éternelle sans la connaissance de Dieu. Il n’y a pas non plus de connaissance de Dieu sans la révélation qui nous parvient par la parole de « Celui qui est envoyé » et sans la foi qui la reçoit. À notre avis, c’est à cause de cela que Jésus dit que le croyant a non seulement la vie éternelle, mais qu’il est passé de cette mort spirituelle au domaine de la vie. La mort spirituelle est caractérisée par une ignorance totale de Dieu ; le domaine de la vie est rempli de la lumière de la connaissance du Père. Il n’est pas étonnant que Jésus insiste autant sur une déclaration si merveilleuse.
Il va plus loin, dans le verset suivant, en montrant qu’un temps va venir où cette grande œuvre de donner la vie — qui est la sienne — va se poursuivre tout spécialement. Dans ce verset l’œuvre est considérée sous l’angle de l’action souveraine du Seigneur. La foi n’est pas particulièrement mentionnée, même si, bien entendu, personne ne peut « entendre la voix du Fils de Dieu » sans la foi. Cette « heure » dure jusqu’au moment présent. À travers les siècles, des multitudes ont entendu la voix des prédicateurs de la Parole, mais sans entendre la voix du Seigneur dans cette parole. Seuls ceux qui ont entendu la voix du Seigneur ont eu la vie. Ils vivent parce que le Fils, qui est maintenant venu comme homme, a la vie en lui-même ; il l’a comme un don de la part du Père, ce que nous dit le verset suivant. La vie est en lui du fait de ce qu’il est, en lui-même. La déclaration : « en lui était la vie » (1:4) est en effet liée à son existence éternelle ; son incarnation n’est pas mentionnée avant le verset 14. Nous voyons ici que le Père donne le Fils pour qu’il soit, en tant qu’homme, l’unique source de la vie éternelle pour les hommes. Nous la possédons parce qu’elle nous est communiquée, alors que seulement ce qu’on possède naturellement et intrinsèquement peut être communiqué à d’autres. C’est sa grande œuvre, à lui seul, de donner la vie, et c’est maintenant, pour lui, le moment de l’accomplir. Sa voix a retenti dans le silence au plus profond d’innombrables cœurs : ils ont entendu et ils ont eu la vie. Nous ne devons pas inverser l’ordre des mots, comme certains ont eu tendance à le faire. Ce n’est pas : « ceux qui vivent entendront », mais : « ceux qui entendent vivront ».
Mais, de plus, le Fils de Dieu est aussi le Fils de l’homme ; ainsi il n’est pas seulement la fontaine de la vie, mais aussi le juge de tous, Celui qui a toute autorité. En tant que Fils de l’homme, il allait être « élevé », comme effet du jugement de l’homme. Bientôt nous entendrons la foule dire : « Comment, toi, dis-tu qu’il faut que le Fils de l’homme soit élevé ? Qui est ce Fils de l’homme ? » (12:34). Eh bien ! un jour prochain, ils connaîtront qui est cette Personne, et ce sera pour eux une perte irrémédiable ! Bien qu’à première vue il semble merveilleux qu’un homme soit investi de tout le jugement, cela ne doit pourtant pas nous étonner. Une autre heure viendra où les hommes entendront la voix du Fils de l’homme ; non pas seulement quelques-uns, mais tous, qu’ils soient bons ou méchants !
Seuls ceux qui entendent la voix du Fils de Dieu et ont la vie peuvent faire le bien. Porter du fruit et faire le bien sont des manifestations de la vie. Les autres ont simplement fait le mal. La voix du Fils de l’homme tirera tous les hommes de la tombe, sans exception. Il y a en effet une résurrection de jugement aussi bien qu’une résurrection de vie. Une distinction est faite ici entre les deux. Il faut se reporter à d’autres passages des Écritures pour découvrir qu’un grand intervalle de temps les sépare. Les deux résurrections toutefois sont à venir, car les mots « et elle est maintenant » (v. 25) ne sont pas employés à ce sujet.
Bien que le jugement soit entre les mains de Jésus, même en cela il n’agit pas indépendamment ou séparément du Père. Ayant revêtu l’humanité, il ne quitte pas la place qu’il a prise, mais il l’assume en perfection. S’il avait dit : « Mon jugement est juste, parce que je suis la Parole devenue chair », il aurait dit quelque chose de tout à fait vrai. Mais il fonde son affirmation sur ceci : « Mon jugement est juste ; car je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé ». Tout le jugement peut être confié, en sûreté, entre les mains d’un tel homme ; dans ce sens il dit : « Je ne puis rien faire, moi, de moi-même ».
En Matthieu 20:23, Jésus prononce des mots précis : « s’asseoir à ma droite et à ma gauche, n’est pas à moi pour le donner ». En Marc 13:32, il dit : « quant à ce jour-là... personne n’en a connaissance, pas même les anges, ni même le Fils » ; c’est-à-dire, en réalité : « Ce n’est pas à moi pour en avoir connaissance ». Ici, au verset 30, il dit : « Je ne puis rien faire, moi, de moi-même » ; c’est-à-dire, en réalité : « Ce n’est pas à moi pour le faire ». Ces trois déclarations sont, en fait, en rapport avec la place d’abaissement et de dépendance qu’il a prise pour la gloire de la déité et pour notre salut. Elles ne sont pas du tout en contradiction avec sa place suprême dans l’unité de la déité. Elles nous montrent quelque chose de ce que signifie : « Il s’est anéanti lui-même », ou « Il s’est dépouillé lui-même » (Philippiens 2). Nous avons ainsi un aperçu du vrai « kenosis » (*) dont parlent les Écritures. Nous constatons qu’il est très éloigné de la néfaste « théorie du kenosis », formulée par des théologiens incroyants, qui impute à notre Seigneur faillibilité et faute.
(*) mot qui signifie « anéantissement », « dépouillement total » ; substantif de même racine que le verbe traduit en Philippiens 2:7 par « il s’est anéanti » (Note du traducteur)
Bien qu’il soit lui-même si grand, il est ici entièrement pour accomplir la volonté du Père ; tous ses jugements sont selon les pensées du Père ; c’est cela la vérité. Même en ce qui concerne le témoignage qui lui est rendu, tout est laissé entre les mains du Père. Il est habituel que les hommes fassent eux-mêmes leur propre publicité, mais il n’en est pas ainsi du Seigneur.
Le premier témoin, Jean, n’était qu’un homme. Jésus n’a pas besoin d’un tel témoignage ; il le cite, cependant, au cas où quelqu’un écouterait et serait sauvé. Aux versets 33 à 35, Jésus rend vraiment un témoignage à Jean ; ce dernier avait rendu témoignage à la vérité comme une lampe ardente et brillante. Le témoignage de Jean était marqué à la fois par la chaleur et par la lumière, quoiqu’il soit seulement une lampe ; c’est le mot employé par le Seigneur ! Par contre, Jésus est la vraie lumière qui est semblable au soleil quand il brille dans sa force. Or le soleil n’a pas besoin du témoignage d’une simple lampe, même si elle brûle et si elle brille !
Le Père a donné à Jésus des œuvres à faire qui sont comme des rayons de lumière émis par le soleil. Elles témoignent plus puissamment de lui que tout ce que Jean peut dire. Elles sont si manifestement divines qu’elles prouvent qu’il est l’Envoyé du Père. Enfin, le Père lui-même lui a rendu témoignage (en particulier lors du baptême de Jean). Malheureusement, les hommes n’en ont pas reconnu la valeur, car ils étaient entièrement charnels. Ils voulaient quelque chose qui fasse appel à leurs facultés naturelles (la vue et l’ouïe) et ils ne connaissaient rien de cette parole du Père qui apporte un éclairage spirituel.
Il y avait, enfin, les Saintes Écritures. En effet celles-ci témoignaient de lui, et ils les étudiaient. Ils estimaient avoir en elles la vie éternelle, mais c’est Christ qui la donne et ils ne voulaient pas venir à lui. Si les hommes sont amenés à Christ en étudiant les Écritures, alors ils ont la vie éternelle par les Écritures. Dans le cas contraire, ils acquièrent seulement une connaissance d’ordre technique et théologique, et demeurent dans la mort spirituelle. Ces paroles éclairent ce qu’est la fonction vitale de l’Écriture.
Le Seigneur montre ensuite qu’il connaît parfaitement ses adversaires. Il est là au nom de son Père ; l’honneur et la gloire que l’homme peut offrir ne sont donc rien pour lui. Ils n’ont rien de l’amour de Dieu en eux et, par conséquent, ils sont avides de recevoir de l’honneur, l’un de l’autre. Ils ne recherchent pas ce qui vient de Dieu. Dans leur esprit ils glorifient les hommes ; c’est comme toujours une barrière solide contre la foi, et ils ne peuvent pas croire. Jésus vient au nom de son Père, ce qui veut dire qu’il recherche la gloire du Père. Tout cela leur est étranger, et ils refusent Jésus. Si un autre venait en son propre nom, cherchant par conséquent sa propre gloire, cela leur conviendrait parfaitement et ils le recevraient. Par ces paroles, le Seigneur annonce la venue de l’antichrist, en qui la fausse gloire de l’homme atteindra son apogée.
Ces paroles exposent aussi les mauvaises intentions qui se trouvent au fond du cœur de ses adversaires, bien que Jésus ne soit pas leur accusateur. Moïse l’a été par la loi donnée par son moyen. Ils se glorifient de Moïse, car ils ont le sentiment que ce grand homme leur confère quelque honneur ; mais en réalité ils ne le croient pas. S’ils l’avaient cru, ils auraient reçu Christ. Le verset 39 s’applique à toutes les écritures de l’Ancien Testament : « Elles rendent témoignage de moi ». Le verset 46 fait allusion, en particulier, aux premiers livres écrits par Moïse : « Lui a écrit de moi ». C’est donc la clé qui ouvre tout l’Ancien Testament ; le sujet principal est le Christ, qui devait venir.
La façon dont le Seigneur relie ses paroles aux écrits de Moïse est très frappante. Si les hommes refusent le témoignage rendu autrefois par le serviteur, ils ne recevront pas le Fils lorsqu’il parlera. Et c’est bien le cas ! Les hommes qui aujourd’hui ne croient pas les livres de Moïse et nient même qu’il en soit l’auteur, ne croient pas les paroles de Jésus. C’est parfaitement clair, puisque Jésus affirme précisément ici ce qu’ils nient. Nous devons choisir entre Christ et les rationalistes modernes. Ce sont les successeurs de ses adversaires juifs ; c’est tout ! Les deux questions : « Comment pouvez-vous croire ? » et « comment croirez-vous ? » sont saisissantes. Dans la mesure où l’amour de Dieu est en nous, et où la gloire de l’homme s’estompe à nos yeux, nous accepterons et nous croirons les Saintes Écritures ; elles nous conduiront alors à Christ par la foi.
Ce chapitre nous ramène en Galilée et nous découvrons un autre des grands « signes » que Jésus a accomplis. Le miracle qui consiste à nourrir cinq mille personnes a évidemment une importance particulière puisqu’il est relaté dans chacun des quatre Évangiles. Notre chapitre nous donne l’enseignement qu’on peut en tirer et qui en fait ressortir le sens. Dans la description même du miracle, les ressources et la préconnaissance du Seigneur sont mises en relief.
Jésus s’adresse d’abord lui-même à Philippe. Comme nous l’avons vu au chapitre 1 verset 46, c’est justement le disciple qui croit les écrits de Moïse ; cependant, quand il est mis à l’épreuve ici, il ne voit pas plus loin que le pouvoir d’achat de l’argent. Jésus lui-même « savait ce qu’il allait faire ». Dans une telle situation d’urgence, on pourrait dire que d’autres serviteurs de Dieu auraient, au mieux, regardé à Dieu pour avoir une direction ; et ils l’auraient reçue ! Mais il y a ici quelqu’un qui sait ce qu’il faut faire et qui sait qu’il a le pouvoir de le faire. Il le sait avant qu’André ne parle du petit garçon avec les pains et les poissons. C’est la prérogative de Dieu d’avoir une telle connaissance et d’être capable de connaître avec une certitude absolue ce qu’on va faire. De telles déclarations sont fréquentes dans cet Évangile (voir 2:24, 25 ; 13:3 ; 18:4).
Malgré l’étendue de sa connaissance et de sa puissance, Jésus ne dédaigne pas les modestes provisions offertes par le petit garçon. Il ne laisse pas non plus de côté les disciples avec leur compréhension limitée et leur faible foi. Il fait d’eux les distributeurs de sa bonté. Les provisions appartiennent tout d’abord au petit garçon ; les mains qui distribuent sont celles des disciples ; Jésus seul possède la puissance et la grâce. C’est tellement évident pour les hommes qui profitent de cette libéralité qu’ils la rattachent au ciel, et ils déclarent que Jésus doit être le Prophète qui vient dans le monde, selon ce que Moïse avait dit. Certaines personnes sont amenées à cette conclusion à de nombreuses occasions (voir 4:19 ; 7:40 ; 9:17). Cependant, pour qu’il y ait un résultat, il faut qu’à partir de là, on en arrive à des conclusions plus profondes. Au chapitre 4, la femme est amenée à la conviction que Jésus est le Christ ; au chapitre 9, pour l’aveugle, il est le Fils de Dieu.
Les pains et les poissons ont pris trop d’importance pour ces hommes ; ils tiennent conseil pour forcer ce Prophète à devenir roi dans leur désir de prolonger une source si facile d’approvisionnement. Or nous venons de l’entendre dire : « Je ne reçois pas témoignage de l’homme » (5:34), et encore : « Je ne reçois pas de gloire des hommes » (5:41). Nous ne sommes donc pas étonnés qu’il ne veuille pas recevoir un royaume des mains des hommes. La gloire du plus grand des royaumes terrestres que l’homme puisse construire est sans valeur pour lui. Aussi se retire-t-il dans la solitude, sur une montagne, pendant que ses disciples commencent à traverser le lac. Matthieu 14:22 nous raconte qu’il contraint ses disciples de monter dans la barque pendant qu’il renvoie lui-même les foules. Le récit de Jean nous explique ses actes. Les disciples auraient accepté avec facilité et enthousiasme ce que le peuple projetait ; mais Jésus, plein de sollicitude, les écarte de cette scène de tentation.
Bien qu’il ne veuille pas accepter de royauté terrestre par une décision du peuple, il se montre Maître absolu dans d’autres domaines. Le déploiement de son autorité est toutefois réservé aux yeux de ses disciples. Le vent et la mer peuvent se déchaîner et faire de l’homme leur jouet, mais, en Seigneur suprême, il domine sur eux. Les disciples, à leur époque, avaient besoin de comprendre le Seigneur de cette façon ; il en est de même pour nous, aujourd’hui. Un royaume terrestre, avec une nourriture abondante, a facilement de l’attrait pour une intelligence charnelle. L’intelligence spirituelle se forme en le connaissant comme le Maître du vent et des vagues, et des puissances qu’ils représentent. Jésus dissipe les craintes des disciples, en se révélant ainsi à eux ; il les conduit immédiatement à leur destination, lorsqu’ils sont disposés à le recevoir dans la barque. Méditons cet épisode avec attention, car nous avons tout spécialement besoin de le connaître de cette manière. Aujourd’hui il ne s’occupe pas d’un royaume terrestre, mais il exerce sa suprématie sur les forces adverses en aidant les siens à les traverser.
La foule ne sait rien de sa traversée miraculeuse de la mer. Les hommes sentent pourtant qu’il s’est passé quelque chose d’inhabituel et ils cherchent Jésus sur l’autre rive. Ils sont curieux de savoir comment il s’est déplacé. Le Seigneur ne satisfait pas leur curiosité ; il leur montre plutôt, immédiatement, qu’il connaît les pensées secrètes de leur cœur. Au chapitre 2 versets 23 à 25, nous avons appris qu’il ne suffit pas de voir des miracles ; mais il ne s’agit même pas de cela pour eux ; ils ne pensent qu’à la nourriture qui périt ! Lui, le Fils de l’homme, sur qui le Père a mis son sceau, est Celui qui donne la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle. C’est cette nourriture qu’ils devraient rechercher.
Il y a beaucoup de similitudes entre la réponse du Seigneur à ces hommes et son approche de la Samaritaine au chapitre 4. Là il était question d’eau, ici de pain. Dans les deux cas la substance matérielle bien connue est transformée en symbole d’une grande réalité spirituelle, et celui qui écoute est placé devant cette réalité. Il n’y a, cependant, aucune preuve que ces hommes aient été bénis comme cette femme. « L’eau vive » est l’Esprit qu’il donnera. « Le pain vivant » est Christ lui-même, descendu du ciel, nourriture de la vie éternelle pour l’homme. Cette nourriture ne peut être reçue que comme un don dans lequel la Divinité tout entière est envisagée. En effet elle vient du Fils de l’homme, qui a reçu le sceau du Père ; et ce sceau, nous le savons, vient de l’Esprit.
Au début, la femme ne comprend pas mieux le sens des paroles du Seigneur que ne le font ces hommes, mais sa réponse est : « Seigneur, donne-moi cette eau... ». Eux demandent au contraire : « Que ferons-nous pour faire les œuvres de Dieu... ? ». Quelle différence révélatrice ! La question posée par ces hommes amène aussitôt la déclaration que la foi en l’Envoyé de Dieu est le point de départ de toute œuvre accomplie selon Dieu. Si les hommes ne croient pas en Celui que Dieu a envoyé, ils ne croient pas non plus véritablement en Dieu. Ils demeurent dans la mort spirituelle puisque la vie est offerte en lui. Hélas ! ils ne croient pas, comme le montre le verset 30. Au lieu de cela, ils demandent un miracle, suggérant que, s’il était suffisamment spectaculaire, il produirait de la foi dans leur cœur. Comme ils supposent que Jésus va leur rappeler le miracle de la multiplication des pains et des poissons, auquel ils viennent d’assister, ils essaient de ne pas lui accorder de l’importance, en faisant référence au miracle de la manne, donnée à leurs pères dans le désert par Moïse pendant quarante ans.
Ceci amène la déclaration catégorique du verset 32. Ce n’est pas Moïse, mais Dieu qui a donné ce pain du ciel qui n’est qu’une image du véritable pain. Le vrai pain venu du ciel est donné par Dieu, révélé comme Père par Celui qui est ce don. Il est descendu lui-même du ciel comme Celui qui donne la vie au monde. Dans le domaine de la nature, le pain entretient seulement la vie et ne la donne absolument pas ; mais le spirituel transcende toujours le physique. Le symbole sert à diriger nos pensées vers ce qui est divin, mais il ne peut jamais en contenir la plénitude. Ici Jésus est Celui qui donne la vie et Celui qui l’entretient. Il agit ainsi en relation avec le monde et non pas seulement avec la petite nation juive au milieu de laquelle il vit. Nous avons déjà remarqué cette caractéristique : la Parole devenue chair ne peut être limitée, dans sa lumière et sa puissance génératrice de vie, à un cercle plus étroit que le monde.
Leur réponse, au verset 34, semble plus encourageante ; il n’y a pourtant aucune foi, comme le montre le verset 36. Elle conduit toutefois le Seigneur à se présenter lui-même, d’une manière précise et claire, comme le pain de vie. Il dit aussi que chaque besoin sera satisfait, si on vient à lui avec une foi véritable. Il accorde le don de l’Esprit qui conduit à la satisfaction du cœur, comme on l’a vu au chapitre 4. De même ici, si on reçoit Jésus par la foi, on est comblé. Toute la plénitude de la divinité nous est révélée dans la connaissance de lui-même, et nous pouvons nous l’approprier. C’est cela qui satisfait. Ces hommes ne montrent aucune intention de venir à lui, mais le Père agit dans ses desseins et sa grâce ; il va donc y avoir une réponse.
C’est dans ce cadre que se trouve cette merveilleuse affirmation de 1’Évangile, si rassurante : « Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi ». Au chapitre 3, nous avons vu que personne n’a reçu son témoignage, et que pourtant quelques-uns l’ont reçu ! Maintenant, pour la première fois, nous découvrons ce qui se cache derrière ce paradoxe. La grâce souveraine du Père a donné des hommes au Fils, et ceux-ci, sans exception, viennent à lui. Ces heureuses personnes sont conduites vers lui, dans la mesure où elles en sont conscientes, par diverses choses qui varient suivant les cas. Par-dessus tout, il y a cependant, comme explication finale, ce don du Père à Christ ; un don d’amour, pourrions-nous dire.
Tous ceux que le Père a donnés viennent ; aucun de ceux qui viennent n’est mis dehors par le Fils. Il en est ainsi non seulement à cause de sa propre grâce et de son amour personnel pour de telles âmes, mais parce qu’elles sont le don du Père. C’est aussi parce que le vrai but de la venue de Jésus est d’accomplir la volonté du Père et de révéler ainsi son cœur. Le Père a donné ces hommes pour qu’en venant au Fils, ils reçoivent de lui la vie et ce qui l’entretient ; ainsi ils pourront être vraiment heureux parce que le Père leur a été révélé. Il est impossible qu’il y ait désaccord entre le don du Père et le fait d’être reçu par le Fils. En observant le contexte et la signification de ce passage, nous voyons avec quelle justesse et avec quel bonheur l’évangéliste dirige une âme inquiète, qui se tourne vers Christ et qui est près de venir à lui, vers ces paroles d’or : « Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi ».
Une fois encore la volonté du Père n’est pas seulement que le Fils reçoive et donne la vie à celui qui vient à lui maintenant, mais que tous soient rendus parfaits, lors de la résurrection, « au dernier jour ». Les Juifs avaient la lumière de l’Ancien Testament et ils attendaient le moment de la présence et de la gloire du Messie au dernier jour. Les paroles du Seigneur confirment largement cette pensée. Elles montrent que nous allons connaître la plénitude de la vie dans le siècle à venir, même si nous avons déjà la vie, maintenant, dans un monde marqué par la mort. Combien le lien entre les versets 37 et 39 est merveilleux ! Personne ne sera mis dehors maintenant et rien ne sera perdu dans le chemin qui mène au jour de gloire ; ces deux actes sont selon la volonté du Père.
Le verset 40 exprime la même vérité que le verset 39, mais il la développe un peu. Il s’agit des mêmes personnes qui sont décrites premièrement comme « tout ce qu’il m’a donné » puis, comme « quiconque discerne le Fils et croit en lui ». La première expression considère le point de vue du propos divin ; la deuxième montre l’acte de foi qui y correspond dans notre vie d’être responsable sur la terre. Le fait de « discerner » le Fils signifie aussi bien, selon nous, avoir la foi que croire en lui. Il y en a beaucoup qui ont vu Jésus marcher sur la terre sans réellement « discerner le Fils », dans le vrai sens du terme. Mais ceux dont les yeux sont spirituellement ouverts, qui discernent le Fils et croient en lui, reçoivent pour le présent la vie éternelle (voir aussi 20:31) ; ils entreront dans le monde de la vie de résurrection au dernier jour.
Les juifs se montrent, sans tarder, totalement dépourvus de foi. Ils ne voient Jésus que comme un homme et ils pensent connaître ses parents ; ils ne perçoivent absolument pas qu’il est le Fils, né de la descendance de David selon la chair (Romains 1:3). Ils montrent par là qu’ils n’ont aucune part à ces choses. Personne ne peut venir à Christ sans être tiré par le Père ; mais ils sont étrangers à tout cela.
Les versets 39, 40 et 44 se terminent tous par la mention de la résurrection. Ils nous présentent ce que le Père, selon son propos, a donné au Fils. Le Père « tire » la personne pour qu’elle puisse venir à Jésus. De notre côté la foi en découle ; elle amène à la possession actuelle de la vie éternelle et à la certitude de sa plénitude dans la résurrection. Le Seigneur trouve, en Ésaïe 54:13, une prophétie concernant ce travail intérieur du Père. Jésus sait ce qu’il va faire dans les enfants d’Israël qui seront rachetés et restaurés au début du siècle à venir. Il sait qu’il accomplit déjà cette œuvre à ce moment-là ; il continue à la faire aujourd’hui. Personne n’a vu le Père avec les yeux de la chair. Seuls ceux qui sont « de Dieu » le voient, et cela par la foi.
Les versets 40 et 46 sont liés par les deux expressions « quiconque discerne (ou voit) le Fils... » et « que quelqu’un ait vu le Père... ». La foi est nécessaire pour ces deux actes ; on ne voit le Père que si on voit le Fils. Méfions-nous donc des théories qui touchent à la position de Fils de Jésus. On ne peut retenir la nature divine et éternelle du Père si on rejette la nature divine et éternelle du Fils.
Les contestations des juifs suscitent encore une de ces déclarations fortes et particulièrement significatives, fréquentes dans cet Évangile. Jésus est le pain de vie ; ceux qui se l’approprient par la foi ont la vie éternelle. Cette grande réalité demeure, sans réserve ni commentaire. Les Juifs ont fait allusion à la manne dans le désert ; le Seigneur s’en sert maintenant, en contraste avec ce qu’il est lui-même. Leurs pères sont morts, et pourtant ils ont eu part à la manne. Il est le pain descendu du ciel ; avoir une part avec lui signifie être délivré de la mort. Leurs pères sont morts, spirituellement aussi bien que physiquement, car ils n’avaient pas la foi, bien qu’ils aient mangé la manne (voir Hébreux 3:19). L’homme qui mange le pain descendu du ciel ne mourra jamais spirituellement, quoi qu’il lui arrive physiquement.
Aux versets 50 à 58, le Seigneur parle au moins sept fois de le manger lui, ou sa chair, comme le pain vivant. Il parle aussi trois fois de boire son sang. Son langage est figuré, bien que très simple en réalité. Nous nous approprions de la manière la plus complète et la plus intense ce que nous mangeons et buvons. Cela nous appartient totalement et irrévocablement, et cela devient, à la fin, une partie de nous-mêmes. C’est par conséquent une image très appropriée de la foi, car c’est tout à fait ce que produit la foi d’une façon spirituelle. Du fait de son incarnation, le Fils du Père se trouvait parmi les hommes, il était réellement descendu du ciel. Par ce moyen tout ce qui était révélé en lui était mis à la disposition des hommes, mais actuellement on ne peut se l’approprier que par la foi. Les hommes doivent donc manger ce pain et, en le mangeant, ils vivent éternellement.
La dernière partie du verset 51 amène une autre pensée. Ce « pain » est sa chair, qui va être donnée non seulement pour la nation juive, mais pour « la vie du monde ». Le Seigneur indique ici qu’il avait pris un corps pour pouvoir donner sa vie. Complètement aveuglés, les Juifs se disputent entre eux. Cela amène une autre déclaration d’une extrême importance. Aucun être humain n’a de vie spirituelle en lui-même, si ce n’est en s’appropriant, par la foi, la mort du Fils de l’homme. La vie dépend de la foi au Fils qui est venu en chair, comme Fils de l’homme, et qui est mort. Avant qu’il vienne, beaucoup croyaient en Dieu selon le témoignage qu’il avait rendu ; ils vivaient devant lui. Mais maintenant que le Fils de l’Homme est venu, c’est lui le témoignage, et tout dépend de lui.
Il vaut la peine de noter le temps du verbe « manger » aux versets 51 et 53. Il signifie un acte d’appropriation, accompli une fois pour toutes. Cet acte doit avoir lieu pour qu’un homme puisse vivre pour Dieu ; il n’y a pas de vie sans l’appropriation, par la foi, de la mort de Christ. Cependant cela ne s’oppose pas au fait de manger comme une chose habituelle. C’est ce qui est exposé à quatre reprises lorsque ce mot apparaît aux versets 54, 56, 57, 58. La vie reçue doit être nourrie et entretenue ; c’est pourquoi celui qui « a mangé » continue à « manger ». En d’autres termes, celui qui a reçu la vie par l’appropriation initiale de la foi vit maintenant selon le même principe : « Le juste vivra de foi ». Il a cru et il continue à croire.
Celui qui a pris l’habitude de manger a la vie éternelle. Pour la quatrième fois, au verset 54, la résurrection est placée devant nous. La base de cette quadruple mention est sans aucun doute le fait que la vie éternelle va atteindre son expression et sa plus complète réalisation dans la résurrection au dernier jour. Deux fois seulement dans l’Ancien Testament il est fait mention de « la vie pour l’éternité » (Psaume 133:3) et de « la vie éternelle » (Daniel 12:2). Dans les deux cas, c’est le jour du Messie qui est en vue, c’est « le dernier temps ». Le chapitre 12 de Daniel parle d’une résurrection nationale pour Israël ; ils se lèveront du milieu de la poussière des nations. Dans notre chapitre il s’agit des individus ; la résurrection n’est pas une image, mais elle est réelle et fondamentale. Quand Paul parle de vie éternelle, il envisage, d’habitude, sa plénitude future dans la résurrection ; par exemple : « Vous avez... pour fin la vie éternelle » (Romains 6:22). Dans Jean elle est généralement présentée comme une réalité actuelle. Cependant, comme les paroles du Seigneur le montrent ici, cela ne nous empêche pas de penser à sa plénitude dans le siècle à venir.
Celui qui mange et boit ainsi a non seulement la vie mais il « habite » ou « demeure » aussi en Christ, et Christ en lui. De plus, il est placé dans la même relation avec Christ que celui-ci avec le Père (v. 57). Jésus était l’Envoyé du Père, et avait pour mission de le révéler ; toute sa vie était vécue à cause du Père, en tirant tout de lui. C’est précisément ainsi, vis-à-vis de Christ, que doit vivre celui qui se l’approprie habituellement par la foi. En vivant ainsi, il demeure en Christ et Christ en lui. On ne peut que s’écrier : quelle vie merveilleuse est ainsi offerte à tout croyant, et combien nous en faisons peu l’expérience ! C’est, en effet, en contraste avec la manne, le vrai pain descendu du ciel. Cette vie, à laquelle nous accédons en mangeant, demeure à toujours.
Ces enseignements remarquables de notre Seigneur éprouvent et criblent ses disciples, et beaucoup sont scandalisés. Ce qu’il dit leur paraît « dur ». Mais en quoi consiste cette dureté ? En fait, il coupe à la racine leur fierté nationale et religieuse. Il leur est insupportable de s’entendre dire : « Vous n’avez pas la vie en vous-mêmes » si vous ne mangez et ne buvez ! Pourquoi ? Ils trouvent tout à fait normal d’avoir la vie, en tant que nation choisie par Dieu. Ils n’ont pas abandonné cette idée, même s’ils pensent avoir trouvé, en Jésus, le Messie promis. Puisqu’il connaît toutes choses, il sait « en lui-même » que ces disciples protestent dans leur for intérieur ; il les soumet donc à une épreuve encore plus grande.
Ce dont Jésus parlait impliquait son incarnation par laquelle la plénitude de la divinité est descendue vers nous ; cela impliquait aussi sa mort, par laquelle la vie nous a été rendue accessible. Il parle maintenant de son exaltation et de sa gloire. Si l’idée de voir le Fils de Dieu descendre ici-bas les choquait, que diraient-ils de voir le Fils de l’homme monter au ciel ? Dans notre chapitre nous avons le premier élément et le dernier de ce « mystère de la piété » dont parle 1 Timothée 3:16 : « Dieu a été manifesté en chair... a été élevé dans la gloire ». Remarquez qu’il monte comme Fils de l’homme. C’est un miracle que Dieu descende sur la terre, ce n’est pas un miracle de moindre importance que l’Homme monte au ciel ! Jésus de Nazareth est au ciel (voir Actes 22:8). Il est là « où il était auparavant ». C’est un témoignage frappant que sa personne est une et indivisible. C’est à juste titre, cependant, que nous pouvons souligner la force et la signification de ses différents noms et titres ; il est juste aussi de distinguer entre ce qu’il était de toute éternité et ce qu’il est devenu, comme nous l’avons fait en considérant les premiers versets de cet Évangile.
L’enseignement de ce chapitre est complété par le verset 63, où le Saint Esprit est introduit. Rien qui vient de la chair n’est utile dans tout cela : c’est l’Esprit qui donne la vie. Le Père est Celui qui donne le vrai pain de vie ; le Fils est ce pain et, comme Fils de l’Homme, il donne sa chair pour la vie du monde ; l’Esprit vivifie. Tout est de Dieu et rien ne vient de l’homme. L’état de mort de l’homme est bien montré dans ce chapitre, car les paroles du Seigneur, qui sont esprit et vie, ne sont pour eux qu’une occasion de chute. L’évangéliste interrompt son récit aux versets 64 et 65 pour nous dire que Jésus parle en sachant pleinement cela. Il connaît, en lui-même, leurs pensées et leurs paroles depuis le début et, non seulement cela, mais il sait aussi qui croit et qui ne croit pas. Il connaît celui qui le trahira.
C’est apparemment à ce moment-là que beaucoup de ceux dont il est parlé au chapitre 2 (v. 23-25) se révèlent sous leur vrai jour. Ils ne possèdent pas la foi qui donne la vie, et ils disparaissent. Jésus met alors les douze à l’épreuve ; Pierre, leur porte-parole, prononce une belle confession de foi authentique. Il reconnaît l’Envoyé de Dieu, qui a les paroles de la vie éternelle. N’importe quel homme peut parler de science, de philosophie, et prononcer quelquefois des paroles de sagesse ; seul le Fils de Dieu a les paroles de la vie éternelle. Il n’y a donc pas d’alternative, pas de rival possible pour la foi de Pierre. Christ est seul et unique. Par la grâce de Dieu, il est certainement cela aussi pour nous. Pourtant, même parmi les douze apôtres, il n’est pas cela pour chacun ; le Seigneur saisit l’occasion pour montrer que le cœur de Judas est à nu devant ses yeux. Il ne l’a pas placé parmi les douze par quelque méprise sur son vrai caractère.
La Galilée est encore, à ce moment-là, la scène du ministère du Seigneur, et les cœurs de tous les hommes sont manifestés d’une manière remarquable. Nous avons vu de faux disciples qui se retirent, un vrai disciple qui confesse sa foi, et le disciple qui est un traître, démasqué. Au début du chapitre 7, nous voyons les Juifs de Jérusalem adopter une attitude d’hostilité meurtrière. Nous trouvons ensuite l’incrédulité des frères du Seigneur selon la chair. Ils ne croient pas encore vraiment en lui ; ils ne comprennent pas ses méthodes et son refus de la publicité qui attirerait les regards. Ils souhaitent qu’il manifeste ses pouvoirs dans la capitale, de manière à prendre possession du monde. Le Seigneur refuse leur conseil. Le monde ne peut pas les haïr, car ils n’en sont pas encore séparés. Ce monde hait le Seigneur, car depuis le début il en est fondamentalement séparé et il rend témoignage contre ses mauvaises œuvres.
De plus, il agit uniquement selon la volonté du Père ; son temps « n’est donc pas encore venu ». Ils agissent, eux, uniquement suivant leurs propres pensées ; leur temps est donc « toujours prêt », selon l’esprit du monde. Si nous lisons 1 Jean 3:12, 13, nous voyons que la situation d’Abel préfigurait celle du Seigneur. Les œuvres justes du Seigneur Jésus, faites au nom de son Père, témoignent contre les mauvaises œuvres des Juifs. Ils veulent sa mort et ils atteindront leur but lorsque son heure sera venue. Au moment convenable il monte à la fête des Tabernacles, alors que beaucoup le cherchent et parlent de lui secrètement. Cela nous montre que la masse du peuple n’est que trop indifférente, bien qu’elle ne s’identifie pas aux chefs qui veulent le tuer. Ils sont remplis de curiosité, de questions, et discutent de leurs différentes opinions. Ils ne sont pourtant pas assez concernés pour arriver à une décision. Quelle ressemblance avec la situation d’aujourd’hui ! Il y a des gens farouchement opposés, des sceptiques, de faux disciples prêts à tout lâcher, des masses indifférentes ; quelques-uns, par contre, comme Pierre et les dix, découvrent le Prince de la vie, qui est sans égal.
C’est au milieu de la fête que Jésus apparaît et enseigne. La puissance de ses paroles se fait sentir immédiatement et des questions sont soulevées. Il n’est pas passé par les écoles des hommes, et pourtant il parle de cette façon ! Comment cela se fait-il ? Jésus répond à leurs questions en disant que son enseignement vient de Celui qui l’a envoyé. Il est venu pour prononcer ses paroles et il le fait à la perfection. Quelles que soient les difficultés rencontrées par ceux qui le questionnent, elles viennent de leur propre attitude. Si seulement ils avaient le désir réel de faire la volonté de Dieu, ils reconnaîtraient que son enseignement vient de lui. Si nous désirons faire la volonté de Dieu, nous sommes nécessairement caractérisés par la sincérité et la soumission, et nos convictions deviennent claires et justes. Les brumes du doute envahissent l’esprit de ceux qui sont frivoles ou curieux.
Jésus ne parlait certainement pas par lui-même, mais de la part de Dieu ; sa vérité et sa justice étaient donc évidentes. Il était venu pour chercher la gloire de Dieu au lieu de rechercher sa propre gloire et de parler par lui-même. S’il n’était pas convenable pour lui de chercher sa propre gloire, bien que toute gloire lui appartienne de droit, combien moins cela le serait, pour celui d’entre nous qui le sert, de chercher sa propre gloire. Nous n’avons droit à aucune gloire. Quelle pensée convaincante et pénétrante pour chacun d’entre nous ! La mesure établie par le Seigneur doit être pour nous un test.
Pour le peuple, cependant, Moïse était le législateur ; jugés par la loi, tous étaient coupables. Jésus sait qu’ils cherchent à le faire mourir, et voilà qu’ils violaient la loi de Moïse de façon flagrante. La foule rejette ce qu’il dit. Ils ignorent peut-être les stratagèmes de leurs chefs, mais ils montrent leur animosité par cette terrible accusation : « Tu as un démon ! ». Jésus leur répond en rappelant le miracle du chapitre 5, accompli lors de sa précédente visite à Jérusalem. Il leur montre combien leurs jugements sont injustes et superficiels en ce qui concerne la manière dont ils pratiquent la circoncision. D’autres interviennent à ce moment-là et, par leurs remarques, confirment ce que le Seigneur dit de leurs intentions meurtrières. Ils contredisent la question de la foule : « Qui cherche à te faire mourir ? ». Pourtant ils ne croient pas en lui ; le fait qu’ils pensent connaître son origine humaine les induit en erreur. La réalité de la situation est néanmoins rendue évidente par ces hommes dont les propos s’annulent mutuellement.
Connaissant leurs paroles, Jésus les prend au mot quand il enseigne dans le temple. Il leur montre qu’ils le connaissent et savent qu’il vient de l’atelier du charpentier de Nazareth ; en revanche, il leur dit qu’ils ne connaissent pas Celui qui l’a envoyé. Ils ont une certaine connaissance du côté humain, mais ils sont totalement aveugles en ce qui concerne le côté divin. Il y a pourtant ceux qui sont impressionnés par ses miracles et qui ont tendance à croire qu’il pourrait être le Messie. Les pharisiens et les principaux sacrificateurs restent sur leur position d’hostilité implacable et envoient des gens pour le prendre, mais son heure n’est pas encore venue. Les versets 33 et 34 montrent qu’ils n’ont aucun pouvoir réel contre lui. Quand son heure viendra très prochainement, il s’en ira à Celui qui l’a envoyé, dans un lieu où ils n’entreront jamais ; il ira là où il a toujours demeuré. Il parle donc de sa mort et de sa résurrection d’un point de vue très élevé. Les versets 35 et 36 nous révèlent, une fois de plus, qu’ils sont tout à fait incompétents. Ils n’ont pas la moindre idée de la signification de ses paroles.
Selon Lévitique 23, le huitième jour de la fête des Tabernacles devait être « une sainte convocation ». Ce jour-là, quand la joie du peuple devait être à son comble, Jésus fait sa seconde grande déclaration au sujet de « l’eau vive ». Il sait qu’aucune de ces fêtes juives n’étanche la soif des hommes, et que quelques-uns en sont conscients. Il les invite donc à venir à lui et à boire, puisque l’Esprit va bientôt être donné à ceux qui ont cru en lui. Il a parlé à la Samaritaine de l’Esprit qui demeure dans le croyant comme une fontaine ; il parle maintenant du même Esprit qui fait jaillir des fleuves. Ils vont s’écouler du sein du croyant. Cette image nous montre que deux choses sont nécessaires pour que l’eau puisse couler : non seulement recevoir l’Esprit, mais aussi l’assimiler spirituellement. Le fleuve s’écoulera du sein et non de la tête.
Cela aura lieu « selon ce qu’a dit l’Écriture ». Ce n’est donc pas la citation d’une déclaration écrite, mais plutôt quelque chose de plus général. Par exemple, Ézéchiel 47:1-9 avait annoncé que des eaux couleraient du temple au temps du royaume à venir ; ces eaux apporteraient la vie puisque tout vivra là où parviendra la rivière. Il dit de plus que « le nom de la ville, dès ce jour » sera « l’Éternel est là » (Ézéchiel 48:35). Les eaux vives signaleront le fait que le Dieu vivant est au milieu de son peuple. Mais l’Esprit sera donné quand Jésus sera glorifié au ciel, bien avant qu’il revienne pour régner. Les fleuves d’eau vive qui coulent, spirituellement et non matériellement, signalent la présence du Saint Esprit dans les croyants et le fait qu’il habite en eux. L’Écriture avait donc parlé de ces choses. Nous voyons à plusieurs reprises se vérifier le fait que ce que le croyant connaît de façon spirituelle dans le siècle actuel sera ce dont Israël jouira de façon matérielle dans le siècle à venir.
Le verset 39 est important, car il précise clairement le lien entre la glorification de Jésus et l’effusion de l’Esprit. Par cet acte, l’Église va être formée et, comme corps, elle va être unie à sa Tête. Jésus est venu sur la terre comme un homme ; cependant quatre étapes supplémentaires sont nécessaires avant que, comme Seigneur et Christ, il ne prenne cette position privilégiée de prééminence. Ces quatre étapes sont : la mort, la résurrection, l’ascension, la glorification. Le Saint Esprit est ensuite répandu, et les eaux vives commencent à couler, à Jérusalem et ailleurs. Quand il envisage cela, le Seigneur Jésus fait la promesse du verset 38 et il ne met aucune condition pour « celui qui croit en moi ». Ce n’était pas seulement pour l’époque des apôtres, c’est aussi pour nous. Pourquoi voit-on si peu les fleuves ? Est-ce parce que notre être intérieur a été obstrué par d’autres choses, et reste peu accessible au travail divin ?
Les versets 40 à 44 nous montrent le peuple encore hésitant et perplexe. Certains expriment une opinion, et d’autres une autre. Quelques-uns veulent se saisir de lui, cependant personne ne le fait. Cela paraît se terminer en vaines discussions, mais cela révèle la présence d’un profond désaccord qui les divise. Il y a plusieurs façons d’être contre Christ ; il n’y en a qu’une d’être pour lui : c’est l’attitude prise par Pierre à la fin du chapitre 6. Ce désaccord, semblable à quelque grand canyon du Colorado, existe aujourd’hui ; en comparaison, toutes les autres divisions entre les hommes ne sont que des fossés peu profonds. Les gens continuent à être divisés à cause de lui.
À la fin du chapitre 6, Pierre rendait hommage à la puissance divine des paroles du Seigneur ; elles sont « les paroles de la vie éternelle ». Nous voyons maintenant que cette même puissance est ressentie par des hommes qui sont de l’autre côté du profond fossé qui partage en deux la nation. Les chefs religieux ont envoyé des hommes pour arrêter Jésus, mais ils reviennent sans lui. La seule explication de leur échec est celle-ci : « Jamais homme ne parla comme cet homme ». Ils ne comprennent pas ce qu’il dit, mais ils sentent qu’aucun homme n’a jamais parlé comme lui ; ses paroles le placent dans une tout autre classe de personnes. Ils sont peut-être ignorants, mais leur sensibilité n’est pas complètement éteinte.
Leurs chefs, qui les ont envoyés, sont dépourvus non seulement de sensibilité mais aussi de scrupules. Ils ne manquent pas d’un immense orgueil personnel ; au point qu’ils sont sûrs que leur rejet personnel de Jésus est définitif et ne peut être contesté, et que tous doivent l’accepter. Si la foule, ou quelques-uns parmi elle, ne l’accepte pas, cela montre seulement qu’elle est ignorante et maudite. Ainsi ces faux bergers se contentent de maudire les brebis et s’en tiennent là. Cependant leur propre ignorance commence à poindre. L’effet de leur question triomphante, pour savoir si quelqu’un des chefs ou des pharisiens a cru en lui, est gâché par Nicodème qui est à la fois pharisien et chef. Bien qu’il ne soit pas encore prêt à se montrer comme un vrai croyant, il révèle par sa question qu’il ne s’associe pas à leur incrédulité. De plus leur mépris envers la Galilée révèle seulement qu’ils ignorent d’où est venu le Christ.
La scène présentée dans les derniers versets du chapitre 7 montre quelle ressemblance étonnante existe entre ces hommes et l’homme religieux moderniste d’aujourd’hui. Il est vrai que de nos jours, la Parole de Dieu est davantage discutée que ne l’était alors la Parole vivante, mais la place suprême de l’intelligence et de la connaissance humaines s’affirme de manière aussi triomphante aux deux époques. L’expression moderne est : « Tous les érudits sont d’accord... », d’accord pour nier ou même ridiculiser la Parole de Dieu. Mais aujourd’hui, comme alors, tous les érudits ne sont pas d’accord ; les opposants ne se réduisent pas à un seul, comme Nicodème dans le sanhédrin, puisque leur foi en Christ et en sa Parole est beaucoup plus claire et déclarée que la sienne. De plus, comme les hommes religieux d’autrefois, ceux d’aujourd’hui s’appuient sur de fausses bases. Christ ne venait pas « de Galilée », comme ils auraient dû le savoir, mais ils ne se préoccupaient pas de chercher plus loin. L’incrédulité moderne est riche en spéculations, suppositions et imagination, mais malheureusement dépourvue de faits indiscutables.
Toutefois, les Juifs pensent qu’ils ont définitivement réglé la question, et ils se retirent dans le confort de leur propre maison ; pendant ce temps Jésus, la Parole faite chair, lui qui n’avait pas de maison, passe la nuit sur le mont des Oliviers. Le lendemain, il retourne de bonne heure au temple. Là il se trouve confronté justement à quelques-uns de ces adversaires qui lui soumettent un cas, en espérant qu’il se fera piéger. La foule est peut-être ignorante de la loi et maudite ; eux connaissent très bien la loi et se croient bénis par elle. Ils connaissent aussi la bonté et la grâce de Jésus. Ils placent donc la femme pécheresse au centre et citent la loi de Moïse contre elle. Le résultat n’est pas ce qu’ils attendaient. Le Seigneur dirige la loi, comme un projecteur, sur eux ; son pouvoir de conviction atteint même leur conscience endurcie. Ces hypocrites, imbus de religion, qui parlent assez facilement de malédiction pour la foule, voient maintenant la malédiction de la loi surgir sur eux, et ils disparaissent.
L’action de Jésus qui se baisse et écrit sur le sol est significative. Il y a ici, si l’on peut dire, le doigt qui a écrit autrefois la loi sur deux tables de pierre, cette loi qui a prononcé une sentence de mort contre Israël. Le même doigt avait écrit sur le plâtre du mur une sentence de mort contre un orgueilleux monarque des nations à l’époque de Daniel. Il est frappant de voir quels sont les supports de ces écrits. La loi inflexible est écrite sur de la pierre inflexible. Désormais, celui qui méprise la loi de Moïse « meurt sans miséricorde », puisque la loi ne peut être tordue comme l’est le caoutchouc (Hébreux 10:28). Le plâtre est friable et se brise facilement, comme les plus forts et les plus fiers des royaumes des hommes. Jésus écrit sur le sol. Ce qu’il écrit là ne nous est pas dit, mais nous savons qu’il allait entrer « dans la poussière de la mort » (Psaume 22:15). Il a écrit là une déclaration complète de l’amour de Dieu.
En Apocalypse 5, le livre de jugement est apporté. Un ange puissant lance ce défi d’une voix forte : « Qui est digne d’ouvrir le livre et d’en rompre les sceaux ? ». Jésus lance le même défi, bien qu’en termes différents. Le résultat du défi sera alors que « personne, ni dans le ciel, ni sur la terre, ni au-dessous de la terre » ne peut ouvrir le livre ni même le regarder ; de la même manière ici tous les accusateurs sortent, pleins de honte. Alors le « lion », qui est devenu « l’Agneau », reste seul pour exécuter le jugement. Ici, « Jésus fut laissé seul avec la femme devant lui ». Ce n’est cependant pas l’heure du jugement, mais celle de la grâce ; ainsi Celui qui a le droit de condamner n’exerce pas ce droit. Il est « plein de grâce et de vérité ». Il dirige le projecteur de la vérité vers les hypocrites et étend sa grâce en direction de la femme pécheresse, pour la délivrer du péché.
Il s’ensuit une polémique solennelle entre le Seigneur et les juifs, dont le récit remplit le reste du chapitre. Les premiers mots de Jésus, au verset 12, font référence à l’incident et sont la clé de ce qui suit. Au début de l’Évangile, nous avons vu que la Parole était l’auteur de la vie, et la lumière qui brille dans les ténèbres ; les chapitres 3 à 7 nous l’ont présentée comme source de la vie éternelle. Maintenant elle nous apparaît comme la lumière, et la fin du chapitre 12 résume cette présentation. Jésus est la lumière, non seulement d’Israël, mais du monde ; celui qui le suit, quelle que soit son origine, aura la lumière de la vie qui a été manifestée en lui. Celui qui ne le suit pas demeure dans les ténèbres, même s’il est le Juif le plus orthodoxe qu’on puisse imaginer.
Le Seigneur avait fait remarquer, au chapitre 5, combien le témoignage qui lui était rendu était étendu ; il n’était donc pas venu à eux en se recommandant lui-même. Les pharisiens s’emparent maintenant des mots qu’il vient d’employer et ils essaient de le déclarer coupable d’être inconséquent dans ses paroles. Il ne retire pas ses paroles, ni ne les explique. Il fait simplement appel à des choses de nature beaucoup plus élevée qui les convainquent de leur ignorance et de leur erreur. Chez de simples hommes, la connaissance de soi est peu développée. Ce qui est derrière eux et ce qui est devant, tout est enveloppé d’un voile de mystère impénétrable ; il n’y a pas de telles limitations en Jésus. Il se connaissait parfaitement d’une manière divine et éternelle. Ces pharisiens sont aussi ignorants de lui, que d’eux-mêmes. Ils sont également dans l’erreur puisque tous leurs jugements sont formés par la chair dans laquelle il n’habite aucun bien. Ils se trompent dans leur jugement charnel de ses paroles, même s’ils sont habiles pour se précipiter sur ce qui semble une contradiction.
Dans le cas de la femme adultère, le Seigneur a refusé le rôle de juge. Cette fonction sera la sienne dans un jour à venir, mais elle ne l’est pas encore aujourd’hui. Dans le verset 15, il dit aux pharisiens qu’il ne juge pas. Il y a cependant un paradoxe en cela, car il affirme aussi que ses jugements sont vrais, puisqu’il est si complètement un avec le Père qui l’a envoyé. Tout jugement lui appartiendra dans le siècle à venir ; il l’exécutera toutefois en plein accord avec le Père. Derrière le témoignage qui lui est rendu, il y a le poids de toute l’autorité du Père. Le fait qu’il fasse référence au Père ne sert qu’à mettre en évidence leur totale ignorance. Le Père ne peut être connu que dans le Fils, qu’ils ne veulent pas recevoir. Si seulement ils avaient connu le Fils, ils auraient alors connu le Père.
Le verset 20 rend témoignage de la puissance des paroles de notre Seigneur comme aussi de la puissance de sa Personne. Ses paroles les poussent à désirer se saisir de lui, mais quelque chose, en lui, les en empêche, jusqu’à ce que l’heure vienne où il se livrera lui-même à leur volonté. Le Seigneur continue pourtant à rendre témoignage devant eux.
Il les a accompagnés dans leur chemin et les a cherchés avec grâce. Un moment viendrait où il irait son propre chemin ; ils le chercheraient en vain et mourraient dans leurs péchés. Ils seraient alors privés de relation avec lui et avec Dieu à jamais. Ce retournement complet de situation sera non seulement justifié, mais approprié. Nous voyons de nouveau, au verset 22, que les juifs étaient totalement ignorants et que leur esprit était vil, au dernier degré. En effet ils étaient « d’en bas », dans tous les sens du terme. Cela conduit le Seigneur à faire ressortir le contraste frappant qui existe entre lui et eux. Premièrement en ce qui concerne l’origine : ils étaient d’en bas, lui est d’en haut. Deuxièmement, en ce qui concerne le caractère : ils étaient de ce monde, lui n’est pas de ce monde. Troisièmement, quant à leur fin : ils étaient sur le point de mourir dans leurs péchés et d’être exclus de la présence de Dieu ; Lui va au Père, comme il l’a déjà laissé entendre. Par la foi en Jésus, ils pourront éviter la mort ; cette foi découvrira en lui « JE SUIS ». En Exode 3:14, Dieu s’était révélé lui-même comme le grand « JE SUIS » ; c’est pourquoi, en disant cela, Jésus déclare de fait sa divinité.
Pour le moment, les juifs n’ont pas discerné cela, mais, de toute évidence, ils ont compris l’importance de ce qu’il revendiquait. En effet, ils demandent immédiatement : « Toi, qui es-tu ? ». Ils reçoivent une réponse étonnante : « Absolument ce qu’aussi je vous dis ». Il est la vérité ; son discours était une présentation de lui-même vraie et fidèle. On ne pourrait pas en dire autant des hommes les meilleurs et les plus sages. Si nous le voulions, nous ne saurions montrer, avec des mots, ce que nous sommes exactement. Si nous le pouvions, nous reculerions devant cette présentation, étant donné ce que nous sommes. Ses paroles étaient la révélation fidèle de lui-même ; nous pouvions nous y attendre : nous savons qu’il est la Parole devenue chair. Méditons cette parole de Jésus, car elle porte en elle l’assurance que, dans les Évangiles, nous avons une réelle et véritable révélation de Christ. Ils nous présentent ce qu’il a fait aussi bien que ce qu’il a dit ; mais, par ses seules paroles nous pouvons vraiment le connaître, bien que nous ne l’ayons jamais vu dans les jours de sa chair. Il dit absolument ce qu’Il est.
Le verset 26 nous montre que tout ce qu’il avait à dire au sujet des hommes était également la vérité, parce que toutes ses paroles révélaient le Père et venaient de lui. Ils ignoraient tout du Père, et ne croyaient absolument pas au Fils, présent au milieu d’eux. Quand ils auront élevé le Fils de l’homme, la démonstration sera faite qu’il était réellement « JE SUIS », et qu’en tout, le Père était avec lui. Son élévation correspond à sa mort ; quand elle sera accomplie, la résurrection surviendra, qui le déterminera « Fils de Dieu, en puissance, selon l’Esprit de sainteté » (Romains 1:4). Alors « ils connaîtront », dans le sens où ils auront une démonstration parfaitement suffisante devant les yeux. À ce moment-là, peu de gens le connaissaient vraiment, étant éclairés par la démonstration de ce qu’il était ; la plupart, en revanche, fermaient délibérément les yeux à la lumière. Cependant la manifestation qu’il est entièrement et toujours les délices du Père est là pour que tous les yeux voient la lumière.
La puissance de ses paroles se fait sentir et plusieurs croient en lui. Le Seigneur les met à l’épreuve en leur disant que celui qui est un vrai disciple, et non pas seulement un disciple de nom, est caractérisé par le fait qu’il persévère dans sa parole ; c’est-à-dire dans toute la vérité qu’il a apportée. La persévérance est toujours le critère de la réalité et, là où elle existe, la vérité est connue dans sa puissance de libération. Le diable asservit par la puissance de son mensonge ; Christ libère, par la puissance de la vérité de Dieu. Il ne flatte pas les juifs en leur disant qu’ils sont libres en tant que nation choisie par Dieu. Il place devant eux cette vraie liberté spirituelle qui est le résultat de la connaissance de la vérité. C’est de cela qu’ils ont besoin ; il en est de même pour nous.
Beaucoup ne se soumettent pas à ce test, car leur orgueil national et religieux est blessé. Ils sont peut-être la postérité d’Abraham selon la chair, mais en prétendant n’avoir jamais été esclaves de personne, alors qu’ils sont sous la domination absolue des Romains, ils montrent bien leur aveuglement. Par son affirmation absolue du verset 34, Jésus dirige leurs pensées vers l’esclavage du péché. Les hommes ne peuvent pas pratiquer le péché sans être esclaves ; c’est une pensée solennelle pour chacun de nous. L’esclave demeure dehors ; le Fils, au contraire, demeure à l’intérieur de la maison, et cela pour toujours. Le Fils n’a pas seulement cette habitation pour lui-même, mais il peut aussi affranchir l’esclave et l’introduire dans ce qui est la vraie liberté ; ainsi celui qui est réellement un disciple devient « réellement libre ».
Dans les paroles de notre Seigneur rapportées aux versets 32 et 36, on peut certainement voir en germe ce qui sera exposé plus complètement dans les épîtres. Romains 6 montre notre mort avec Christ, dont la conséquence est que nous sommes « affranchis du péché », ce qui nous introduit dans une « nouveauté de vie ». C’est la réponse au verset 32 de notre chapitre ; alors que le verset 36 trouve sa contrepartie en Galates 4:1-7, qui est lié à Galates 5:1. La rédemption, accomplie par le Fils alors que nous étions sous la loi, et l’envoi de l’Esprit du Fils dans nos cœurs, nous ont amenés dans une liberté à laquelle nous devons tenir ferme. Le Fils nous a réellement rendus libres.
Aux versets 37 à 44, le Seigneur expose très solennellement la fausseté de leur prétention à être les enfants d’Abraham. Leur revendication aurait eu quelque valeur s’ils s’étaient montrés ses enfants au sens spirituel, manifestant sa foi et accomplissant ses œuvres. Ils étaient marqués, à ce moment-là, par la haine et l’esprit de meurtre. Caïn avait montré cet esprit ; il était « du méchant et tua son frère » (1 Jean 3:12). Ils faisaient, eux aussi, les œuvres de leur père et montraient donc qu’ils appartenaient à leur père, le diable ; celui-ci est « meurtrier dès le commencement » et « il n’y a pas de vérité en lui ». La haine et le mensonge ont, tous deux, le diable pour père ; ceux qui sont caractérisés par ces deux choses trahissent, par là, leur origine spirituelle.
Jésus parle de lui-même, au verset 40, comme « un homme qui vous ai dit la vérité ». D’autres parlent de lui comme d’un homme et ne voient rien de plus en lui. Il est frappant que, dans cet Évangile qui le présente comme la Parole faite chair, il parle de lui-même comme d’un homme. Ainsi la vérité nous est présentée harmonieusement, et nous voyons clairement à la fois sa divinité intrinsèque et sa parfaite humanité. Il expose la vérité ; ceux qui ont Dieu pour Père l’aimeront, lui, ainsi que la vérité. Ses adversaires ont pour origine le Méchant ; ils ne peuvent pas entendre sa parole, c’est-à-dire la révélation qu’il a apportée. En conséquence, ils ne peuvent absolument pas comprendre son langage, les mots qu’il utilise pour se révéler. C’est ce que nous dit le verset 43.
Remarquons que les paroles du Seigneur détruisent totalement la notion fausse, si répandue, de « la paternité universelle de Dieu » ; cependant ces religieux juifs ne revendiquaient la paternité universelle d’Abraham, et donc de Dieu, que pour leur nation. Jésus dit : « Si Dieu était votre Père... ». Il exprime son désaccord. Le diable est leur père. La paternité de Dieu est réservée à ceux qui croient, comme le dit Galates 3:26.
Devant ces Juifs, se tient Celui que même ses ennemis les plus acharnés ne peuvent convaincre de péché. Il leur dit la vérité. Cette vérité honore le Père et délivre les hommes de la mort. Cependant ils refusent la vérité ; ils déshonorent le Seigneur, ils le traitent de Samaritain et disent qu’il a un démon. Ils se glorifient en Abraham, tout en reconnaissant qu’il est mort depuis longtemps. Le Seigneur vient à eux comme Celui qui sait qu’il est venu du Père et qu’il est honoré par le Père ; il va entrer dans son jour, qu’Abraham attendait avec joie et qu’il a vu par la foi.
Les juifs, comme toujours, ne comprennent pas du tout ses paroles. Jésus dit qu’Abraham a vu son jour, et ils pensent qu’il affirme avoir vu Abraham. Leur erreur sert à introduire cette grande déclaration : « Avant qu’Abraham fût, JE SUIS ». À un moment précis, Abraham « fut ». Le verbe employé ici est le même qu’au chapitre 1 (v. 14), où nous lisons que la Parole « fut faite chair » ou « devint » chair. Le verbe, utilisé dans l’expression « je suis », signifie « exister éternellement », comme nous le trouvons au chapitre 1 (v. 18) ; le Fils « est » dans le sein du Père ; ce verbe « être » est employé au passé, au chapitre 1 (v. 1 et 2), à propos de la Parole, au commencement. Jésus dit donc : « Avant qu’Abraham vienne à l’existence, JE SUIS éternellement ».
Cette déclaration exceptionnelle incite les Juifs à essayer de le lapider ; si elle avait été fausse, ils auraient eu tout à fait raison. Cela touche certainement notre cœur et nous pousse à l’adorer, lui, et à adorer la grâce qui l’a fait devenir homme et descendre si bas pour notre salut. Les intentions meurtrières des Juifs n’échouent pas parce qu’ils manquent de détermination, mais parce qu’il est hors de leur atteinte jusqu’à ce que son heure soit venue. Jésus se cache et quitte le temple.
Le long de son chemin, Jésus rencontre un aveugle qui va rendre un témoignage remarquable aux chefs d’Israël. Dans sa personne même, il devient un autre « signe » montrant que le Christ, le Fils de Dieu, est en effet là, parmi eux.
La question soulevée par les disciples peut nous paraître curieuse. Elle exprime, en fait, des pensées courantes parmi les juifs, fondées sur Exode 20:5 qui parle de l’iniquité des pères, visitée sur les fils. La réponse du Seigneur montre que le malheur peut venir sans qu’il y ait aucun élément de rétribution, mais seulement pour que l’œuvre de Dieu puisse être manifestée. Elle l’est ici, lorsque le Seigneur accomplit une délivrance complète de l’infirmité. Elle peut être manifestée, de manière tout aussi frappante, par une délivrance complète du découragement et du poids de l’affliction, alors que l’affliction elle-même persiste encore ; c’est ce qu’on voit souvent aujourd’hui. C’était alors le « jour », marqué par la présence sur la terre de « la lumière du monde ». Jésus sait que la « nuit » de son rejet et de sa mort approche. Jusqu’à ce moment-là, il est sur la terre pour faire les œuvres du Père ; cet aveugle est un sujet qui convient bien pour que l’œuvre de Dieu s’accomplisse, bien qu’il n’ait rien demandé, autant que nous le rapporte le récit.
L’action accomplie par le Seigneur est symbolique, comme le montre le nom du réservoir dont la signification nous est donnée. Jésus est « l’Envoyé », qui était devenu chair ; la terre mêlée de crachat est un symbole de sa chair. Or des yeux sains seront aveuglés s’ils ont un emplâtre de boue, et des yeux malades seront rendus doublement aveugles. Il en est ainsi des aveugles spirituels ; la chair de « la Parole » est une pierre d’achoppement et ils ne voient que le fils du charpentier. Pour nous, qui croyons en lui comme l’Envoyé, c’est plutôt le contraire. C’est par sa révélation en chair que nous avons appris à le connaître, comme le montre 1 Jean 1:1, 2. Sa chair est ténèbres pour le monde ; elle est lumière pour nous. Nous pouvons adopter ce langage dans un sens spirituel et dire : Nous nous sommes lavés et sommes revenus voyant. Le reste du chapitre montre que l’aveugle a eu les yeux du cœur ouverts aussi bien que les yeux de son corps.
Une fois que ses yeux spirituels sont ouverts, il a plus de lumière. L’opposition même qu’il rencontre sert à produire cette croissance. Les questions des voisins fusent plus par curiosité que par hostilité, et elles contribuent à faire ressortir les faits tout simples du début. Il sait comment ses yeux ont été ouverts et qu’il le doit à un Homme appelé Jésus, bien qu’il ne sache pas où il se trouve.
Son cas est si remarquable qu’ils l’amènent aux pharisiens ; ici, immédiatement, l’esprit de contestation règne. Ils n’ont aucune difficulté à trouver des raisons à leur opposition, car le miracle a été accompli le jour du sabbat.
Jésus a de nouveau violé le sabbat ; cela le condamne immédiatement à leurs yeux. Avoir une défaillance dans les pratiques religieuses est fatal. « Cet homme n’est pas de Dieu », disent-ils ; voilà la conclusion typique de l’esprit pharisaïque. D’autres, cependant, sont plus impressionnés par le miracle. Ainsi se manifeste encore une division ; cela les amène à demander à l’homme ce qu’il dit de Celui qui l’a guéri. Sa réponse montre que cet « homme, appelé Jésus », est pour lui au moins un prophète. C’est plus qu’ils ne veulent l’admettre, aussi contestent-ils la réalité de sa guérison miraculeuse.
Les parents sont appelés, maintenant, à entrer dans la discussion pour témoigner seulement que leur fils est bien né aveugle. La guérison est donc incontestable, bien que la peur amène les parents à renvoyer à l’intéressé lui-même, pour obtenir d’autres renseignements. Il apparaît clairement que le verdict des pharisiens, sur ce cas, était établi d’avance. Quiconque confesserait Jésus comme le Christ, serait exclu de tous les privilèges religieux du judaïsme. Leurs motifs méchants se trouvent donc révélés. Ils poursuivent l’interrogatoire de l’homme, non pour connaître la vérité, mais pour découvrir une raison valable, quelle qu’elle soit, pour condamner Jésus, ou bien l’homme, ou les deux.
Attribuera-t-il la gloire à Dieu, tout en convenant que l’homme par qui la puissance de Dieu s’exerce est un pécheur ? L’aveugle, guéri, évite ce piège subtil en réaffirmant simplement le seul point qui soit pour lui inébranlable. Il agit comme un général habile, qui refuse de se battre sur un terrain choisi par l’ennemi, et ne veut rencontrer son adversaire que sur sa propre position imprenable. Il refuse une discussion purement théologique, dans laquelle il n’est pas de taille à leur faire face, et tient ferme sur ce qu’il sait de l’œuvre accomplie en lui. Les paroles de cet homme, au verset 25, sont instructives pour nous. L’illettré d’aujourd’hui peut affronter humblement mais hardiment les nombreuses accusations des pharisiens et des sadducéens, s’il se contente de témoigner de ce que la grâce de Dieu a fait pour lui et en lui.
Ils essaient ensuite d’arracher à cet homme plus de précisions sur la méthode employée par Jésus. Ils espèrent trouver un point sur lequel ils pourront l’attaquer. Cependant, il s’est déjà aperçu de leur opposition, et sa question : « Voulez-vous aussi, vous, devenir des disciples ? » est légèrement moqueuse. Cela les pique tellement au vif qu’ils se mettent en colère et, tout en proclamant leur attachement à Moïse, ils se mettent dans une situation critique en déclarant leur ignorance au sujet de l’origine et des titres de Jésus. Ils adoptent l’attitude « agnostique », comme beaucoup le font aujourd’hui. Cependant, il s’agit là d’un aveu fatal. Dans ce débat, ils perdent leur calme, puis leur cause ! Le croyant simple, s’il s’en tient aux faits fondamentaux dont il peut rendre témoignage, ne souffrira aucune défaite face à l’agnostique.
Ces pharisiens, qui se font passer pour l’autorité religieuse suprême du moment, non seulement se déclarent ignorants sur cette question fondamentale, mais exigent aussi une sentence tout à fait contraire à l’évidence. Une puissance bienfaisante a indéniablement agi, accomplissant la délivrance du mal ; ils déclarent ignorer sa source, et exigent cependant que Celui qui l’a exercée soit dénoncé comme pécheur. L’homme a ressenti toutefois l’action de cette puissance ; il sait qu’elle vient de Dieu, et l’opposition inique qu’il rencontre ne fait que l’amener à la conclusion que Jésus lui-même est vraiment « de Dieu ».
Ayant perdu leur cause et n’ayant pas réussi à corrompre les pensées de cet homme, les pharisiens ont recours à la violence et le chassent dehors. En ce qui concerne le judaïsme, il est excommunié ; reste-t-il quelque chose pour ce pauvre homme, à part le paganisme avec son vide et ses ténèbres ? Oui, il reste quelque chose ! Jésus lui-même est déjà moralement en dehors du judaïsme. Comme nous l’avons déjà remarqué, il a été considéré ainsi depuis le début de cet Évangile ; cependant ce n’est que lorsqu’il a été amené hors de la porte de Jérusalem pour mourir comme un malfaiteur qu’il a été vraiment en dehors du judaïsme. Au verset 35, nous voyons le Sauveur rejeté qui trouve l’homme rejeté. Il lui pose la plus importante des questions : « Crois-tu au Fils de Dieu ? ». La question est posée sous une forme abstraite. L’homme hésite, car il désire que le Fils de Dieu soit devant lui concrètement. Où peut-on le trouver, afin de croire ? Ainsi interpellé, le Seigneur se présente lui-même, clairement, comme le Fils de Dieu. Immédiatement, et aussi clairement, l’homme l’accepte comme tel par la foi, et lui rend hommage.
Ainsi, une fois de plus, nous sommes amenés au sujet principal de cet Évangile, exprimé au verset 31 du chapitre 20. Pas à pas, l’homme a été conduit à la foi au Fils de Dieu, et à la vie en son nom. Le recouvrement de la vue a été le signe d’un travail plus grand : celui de l’ouverture des yeux de l’intelligence et du cœur. Au verset 39, nous avons le commentaire du Seigneur sur toute la scène. Il était venu dans le monde pour le jugement. Il ne s’agissait pas de condamner les hommes mais de balayer les apparences pour atteindre les hommes tels qu’ils sont vraiment. Quelques-uns, comme cet homme, ont les yeux ouverts pour voir la vérité. D’autres, comme les pharisiens, qui prétendent être ceux qui voient, peuvent être aveuglés et montrent qu’ils sont aveugles. Quelques-uns, présents, se doutent que Jésus fait allusion à eux ; leur question donne l’occasion de révéler leur position dangereuse. Leur péché se trouve dans leur hypocrisie. Ils ont une vue intellectuelle et cependant ils sont spirituellement aveugles ; leur péché demeure. Ceux qui sont réellement aveugles, et qui le confessent, sont plutôt des objets de compassion.
Il n’y a pas de vraie coupure à l’endroit où ce chapitre commence dans nos Bibles. La réponse du Seigneur, qui débute au dernier verset du chapitre 9, continue jusqu’à la fin du verset 5 du chapitre 10. Il leur expose la parabole du Berger et de la bergerie ; cela illustre le sujet dans la mesure où il ne parle pas seulement des « brebis » en général, mais aussi de « ses propres brebis ». Ces dernières connaissent la voix du Berger ; elles le reconnaissent donc. L’homme du chapitre précédent est une de « ses propres brebis ».
Le système religieux institué par Moïse était semblable à une bergerie. De cette manière les Juifs étaient enfermés, à l’écart des nations, en attendant la venue du vrai Messie. Sa porte d’entrée avait été indiquée par la voix des prophètes : il devait naître d’une vierge, à Bethléhem. Des imposteurs étaient apparus mais, n’ayant pas ces titres, ils avaient cherché à entrer d’une autre façon et, de ce fait, ils s’étaient trahis. Maintenant le vrai Berger était apparu, et entrait par la porte ; celle-ci avait été maintenue ouverte pour lui par la providence divine. Il avait été dit : « Voici, Celui qui garde Israël ne sommeillera pas, et ne dormira pas » (Psaume 121:4) ; cette main et cet œil attentifs avaient empêché Hérode de fermer la porte d’entrée devant lui. Dieu a veillé à ce qu’il ait un plein accès aux brebis.
Mais il arrive ensuite ce que personne n’avait prévu. Jésus entre dans la bergerie, non pour la réformer ou l’améliorer, mais pour appeler des élus du milieu de la foule. Ce sont « ses propres brebis ». Il les mène dehors, les conduisant dans une sphère nouvelle. Israël avait été la nation élue ; maintenant au contraire, il s’agit de quelque chose d’entièrement individuel. Il appelle ses propres brebis « par leur nom », établissant une relation personnelle avec chacune d’elles. De plus, il les mène dehors en sortant d’abord, lui-même, devant elles. Les brebis le suivent parce que cette relation existe ; elles reconnaissent sa voix et se confient en lui. Au commencement de cet Évangile, ces âmes élues sont mentionnées comme étant « nées... de Dieu » ; ce sont « tous ceux qui l’ont reçu » (1:12, 13).
Si les brebis de Christ ne suivent pas les étrangers, ce n’est pas parce que ces derniers leur sont bien connus ou qu’elles savent reconnaître leur voix, mais parce qu’elles « ne connaissent pas la voix des étrangers ». Elles connaissent bien la voix du Berger et cela leur suffit. De toutes les autres voix elles disent simplement : « Ce n’est pas la voix du Berger ». Nous avons ici, sous forme de parabole, la même réalité fondamentale exprimée par Jean quand il écrit aux petits enfants de la famille de Dieu. Il leur dit, en effet : « Je ne vous ai pas écrit parce que vous ne connaissez pas la vérité, mais parce que vous la connaissez et qu’aucun mensonge ne vient de la vérité » (1 Jean 2:21). Comme Paul le dit aussi, nous avons à être « sages quant au bien et simples quant au mal » (Romains 16:19). Cultivons cette relation avec notre Seigneur, car elle produit une intuition spirituelle qui gardera nos pieds de s’égarer.
Aveugles, comme toujours, les pharisiens ne comprennent aucune de ces choses ; mais cela n’empêche pas le Seigneur de poursuivre sa parabole. Lui-même est la porte ; car c’est par lui que doit se faire toute sortie de la bergerie et toute entrée dans le nouveau lieu de bénédiction qui sera bientôt établi. Généralement, nous donnons à cette nouvelle bénédiction le nom de christianisme, en contraste avec le judaïsme. Au verset 9 les bénédictions commencent à être énumérées. Le langage des paraboles continue à être employé, le mot « pâture » en est une preuve. Cependant, en disant : « Si quelqu’un entre », Jésus montre qu’il parle comme cet important chapitre de l’Ancien Testament, qui se termine par ces mots : « Et vous, mon troupeau, le troupeau de ma pâture, vous êtes des hommes » (Ézéchiel 34:31).
La première bénédiction du christianisme est le salut. Nous le trouvons lorsque nous entrons par Christ, la porte. Dans l’Ancien Testament, la plupart des références au salut sont en rapport avec la délivrance d’ennemis ou de difficultés. On ne pouvait pas connaître, alors, la libération spirituelle qui vient par l’évangile, puisque l’œuvre sur laquelle elle repose n’était pas encore accomplie. Lisons et assimilons Hébreux 9:6-14 et 10:1-14, et cette réalité sera très claire. Ce n’est que par la mort et la résurrection de Christ que la porte s’ouvre sur le salut, dans sa plénitude.
L’expression « il entrera et il sortira » indique qu’il y a la liberté. Dans le judaïsme, il n’y avait pas de libre accès à Dieu puisque « le chemin des lieux saints n’a pas encore été manifesté » ; les Juifs n’avaient pas non plus l’autorisation d’aller vers les nations pour proclamer ce qu’ils connaissaient de Dieu. Ils étaient enfermés dans la bergerie de la loi de Moïse, avec ses ordonnances, et ils devaient y rester. Comme chrétiens, nous avons « une pleine liberté pour entrer dans les lieux saints par le sang de Jésus », et nous pouvons sortir comme ces premiers chrétiens qui « allaient çà et là, annonçant la parole » (Actes 8:4). Dans les deux cas, nous sommes amenés bien au-delà des privilèges de la bergerie juive.
Enfin, nous pourrons « trouver de la pâture ». Ceci peut ramener nos pensées à Ézéchiel 34, où nous trouvons la terrible accusation contre les bergers d’Israël d’autrefois. Ces chefs religieux se nourrissaient eux-mêmes, mais ne nourrissaient pas les brebis. Ils donnaient un si mauvais exemple que les plus fortes des brebis opprimaient les plus faibles ; ils avaient « brouté le bon pâturage » et, de leurs pieds, avaient foulé « le reste... » (v. 18). Pour les pauvres du troupeau, il n’y avait donc pas de pâture du tout. Jésus, le vrai Berger d’Israël, conduit ses propres brebis à une abondance de nourriture spirituelle.
Les versets 10 et 11 présentent le contraste entre le voleur et le bon Berger. Ces voleurs et ces larrons sont des hommes semblables à ceux qui sont mentionnés par Gamaliel en Actes 5:36, 37 ; ce sont des imposteurs égoïstes qui ont apporté la destruction et la mort. Le vrai Berger apporte la vie ; il laisse sa propre vie pour cela. S’il n’était pas venu mourir, il n’y aurait pas eu de vie du tout pour les pécheurs ; par sa mort, la vie est rendue accessible et elle est accordée en abondance à ses brebis. Nous vivons à la lumière de la riche révélation de Dieu qui nous est parvenue par la Parole faite chair ; désormais nous avons la vie en abondance. La vie donnée aux croyants de tous les âges est peut-être intrinsèquement la même, cependant sa plénitude ne peut être connue que si Dieu est pleinement révélé. C’est ce qui est indiqué en 1 Jean 1:1-4.
Nous avons ensuite, aux versets 12 à 15, le contraste entre l’homme à gages et le bon Berger. L’homme à gages n’est pas forcément méchant comme le voleur ; mais, comme il travaille pour un salaire, il s’intéresse essentiellement à l’argent. Les brebis ont de l’intérêt pour lui dans la mesure où elles constituent son gagne-pain. Il ne s’en soucie pas vraiment, au point de risquer sa vie pour elles. Il en est tout autrement du Berger qui laisse sa vie pour elles et établit, avec elles, un lien de merveilleuse intimité. Ses brebis sont des hommes ; ils sont donc capables de le connaître d’une manière intime, à tel point que la connaissance qu’il a d’eux et la connaissance qu’ils ont de lui peuvent être comparées à la connaissance que le Père a du Fils et que le Fils a du Père. Nous devons nous rappeler que c’est en le connaissant, lui, que nous arrivons à la connaissance du Père. Rien de semblable n’était possible dans la bergerie juive avant la venue du Berger.
Les paroles du Seigneur, au verset 16, ajoutent un élément inattendu. Il était sur le point de trouver des brebis qui avaient été en dehors de cette bergerie. L’appel des élus, parmi les nations, allait avoir lieu. Nous en voyons le commencement dès le début des Actes : l’Éthiopien au chapitre 8, Corneille et ses amis au chapitre 10. Nous nous sommes souvent arrêtés sur le « il faut » que nous trouvons plusieurs fois au chapitre 3. Avons-nous déjà loué Dieu pour le « il faut » qui se trouve ici ? « Il faut que je les amène, elles aussi ». Des pécheurs, issus des nations, deviennent les sujets de l’œuvre de Dieu. Ils entendent la voix du Berger et sont attachés à lui. Ensuite, comme résultat de ce double appel (du milieu de la bergerie juive et des nations qui s’égaraient), un troupeau va être constitué ; il sera tenu uni ensemble sous l’autorité du seul Berger. Le mot, ici, est précisément « troupeau » et non « bergerie ». Des brebis retenues ensemble par des contraintes extérieures : voilà le judaïsme. Des brebis groupées en un troupeau par la puissance personnelle et l’attraction du Berger : voilà le christianisme.
Pour cela, il fallait non seulement la mort, mais aussi la résurrection. Le Berger devait être réellement frappé, comme l’avait dit le prophète, mais c’est dans sa vie de résurrection qu’il rassemble son troupeau tiré des juifs et des nations. Jésus poursuit en montrant qu’il laisse sa vie afin de la reprendre. Les deux événements sont considérés ici comme son acte propre. Il meurt en laissant sa vie ; il ressuscite en la reprenant, bien que dans de nouvelles conditions. Dans les deux cas, le Fils agit selon le commandement du Père, et il fournit au Père un nouveau motif pour l’aimer.
Les paroles du Seigneur, rapportées au verset 18, s’accordent tout à fait avec le caractère de cet Évangile. Comme cela est relaté dans les autres Évangiles, il a parlé à plusieurs reprises à ses disciples de la manière dont il serait livré aux gens des nations par les principaux sacrificateurs et les chefs ; ils le mettraient à mort. Cependant, il affirme ici que personne ne lui ôtera la vie ; sa mort et sa résurrection seront toutes deux, en effet, ses actes propres. On lui a fait ce qui, pour un homme ordinaire, entraînait inévitablement la mort ; toutefois, dans son cas, cela aurait échoué s’il ne lui avait pas plu de laisser sa vie. L’accent est mis sur sa divinité, mais aussi sur sa vraie humanité qu’il assume dans la soumission à la volonté de Dieu ; tout est en accord avec le commandement du Père. La vie était en lui ; c’était « la lumière des hommes » (1:4), même pendant qu’il était sur la terre. Maintenant il va reprendre sa vie en résurrection ; il va devenir ainsi la vraie vie des siens dans la puissance de l’Esprit, comme l’indique le chapitre 20 (v. 22).
Par ces paraboles, le Seigneur a fourni aux Juifs un résumé des grands changements qui vont avoir lieu du fait de sa venue comme vrai Berger au milieu d’Israël. Le programme divin leur est dévoilé. Hélas, les desseins de Dieu vont tellement à l’encontre de leurs pensées arrogantes que, pour beaucoup d’entre eux, les paroles du Seigneur semblent être celles d’un fou ou même pire. D’autres, impressionnés par le miracle de la guérison de l’aveugle, ne peuvent pas accepter cette opinion extrême. Comme le montrent les versets qui suivent, ils prennent la place d’honnêtes gens qui doutent ; ils veulent cependant insinuer que leur hésitation vient de son manque de clarté. Le problème se trouve, toutefois, non dans les paroles du Seigneur mais dans leur esprit. C’est ce qui s’est passé avec leurs ancêtres : quand la loi a été donnée, ils n’ont pas pu arrêter leurs yeux sur la fin de ce qui devait disparaître (2 Corinthiens 3:13). Cela signifie qu’ils n’ont jamais vu le dessein de Dieu dans tout cela. Or l’orgueil religieux recouvre, comme un voile, l’esprit de ces Juifs et ils ne peuvent percevoir « la fin » des paroles du Seigneur. De la même manière, « le dieu de ce siècle » aveugle aujourd’hui les pensées des incrédules, malgré leurs capacités ou leur intelligence en rapport avec les affaires ordinaires du monde.
Leur requête est : « Si toi, tu es le Christ, dis-le-nous franchement ». Jésus affirme aussitôt qu’il le leur a dit nettement, et que ses œuvres, aussi bien que ses paroles, rendent clairement témoignage de lui. Ensuite il leur dit franchement que leur incrédulité a mis un voile sur leurs yeux. La preuve est là, tout à fait évidente. Cependant, ils ne peuvent pas la voir parce qu’ils ne sont pas le « vrai Israël », même s’ils font partie de la nation d’Israël (voir Romains 9:6) ; ils ne font pas partie de ceux que le Seigneur appelle « mes brebis », même s’ils sont des brebis de la bergerie juive. Ils sont spirituellement morts et, par-là, insensibles. Jésus leur dit donc franchement la vérité, non seulement sur lui-même mais aussi sur eux-mêmes.
Après avoir prononcé cette condamnation contre eux, il ajoute des paroles très réconfortantes et rassurantes pour ses propres brebis. De leur côté, elles écoutent sa voix et le suivent. De son côté, il les connaît et il leur donne la vie éternelle. Cela garantit qu’elles ne périront jamais sous le jugement de Dieu, et qu’aucune puissance créée ne peut les ravir de la main du Berger. Cette assurance est renforcée par le fait que le Fils et le Père sont un. Le Fils avait pris la place de soumission sur la terre et le Père demeurait « plus grand que tous » dans le ciel, mais cela ne va pas à l’encontre du fait qu’ils sont « un ». Être dans la main du Fils implique qu’on est dans la main du Père, et le dessein de la Déité, qui met à l’abri les brebis, est garanti à la fois par le Fils et par le Père. Nous sommes face à la même réalité glorieuse dans ce magnifique texte de Romains 8:29-39.
Ces paroles réveillent les intentions meurtrières des Juifs. Ils n’en comprennent pas la portée, mais ils voient bien qu’en disant : « Moi et le Père, nous sommes un », il revendique son égalité avec Dieu. Cela aurait été un peu moins choquant s’il avait mis le Père en premier, en disant : « le Père et moi » ; mais non, il a dit : « moi et le Père ». Ils trouvent cela intolérable, car ils ne pouvaient pas se tromper sur le sens de telles paroles. Pour eux, c’est un horrible blasphème : un homme se fait Dieu. Nous acceptons ses paroles dans un esprit d’adoration, car nous savons qu’il est réellement Dieu, mais cependant, il s’est fait homme lui-même. Nous inversons les termes de leur accusation (fin du verset 33) et nous y trouvons la vérité qui sauve les âmes.
Dans sa réponse, Jésus fait référence à ses propres mots : « Je suis le Fils de Dieu », afin de prendre les Juifs sur le même terrain que celui de leur accusation : « Tu te fais Dieu ». Il ne défend pas ce qu’il revendique par une de ses affirmations péremptoires, mais par un argument fondé sur leur loi. Ceux qui sont reconnus comme « dieux », au Psaume 82:6, sont des autorités « à qui la parole de Dieu est venue ». Lui qui a été mis à part et envoyé dans le monde par le Père est le Verbe lui-même, « la Parole faite chair ». Quelle immense différence ! Ce n’est pas un blasphème, mais la simple vérité, quand il dit : « Je suis le Fils de Dieu ». D’ailleurs ses œuvres rendent témoignage à son affirmation : ce sont incontestablement les œuvres de Dieu. Elles montrent clairement que le Père est en lui, manifesté et révélé de manière vivante ; et il est dans le Père, en ce qui concerne sa vie et sa nature même. Une fois que cela est connu et cru, il n’y a plus de difficulté à le recevoir comme Fils de Dieu ; les deux affirmations recouvrent, en effet, la même réalité fondamentale, quoique avec des mots différents.
Mais le moment n’est pas encore venu pour que leur haine meurtrière agisse. Alors qu’il se retire là où Jean a baptisé au-delà du Jourdain, la foi de plusieurs est manifestée. Le témoignage de Jean est rappelé et la vérité de ses paroles est reconnue. Jean était le dernier prophète de l’ancienne dispensation ; au milieu des ruines de celle-ci, les miracles n’avaient pas leur place. Aussitôt que le Christ, le Fils de Dieu, apparaît, ils ont tout à fait leur place. Toutefois Jean a rendu à Christ un vrai témoignage, fidèle et constant, ce qui valait mieux que des miracles.
Nous aussi, nous sommes à la fin d’une dispensation. N’ayons donc pas un désir impérieux de miracles, mais imitons Jean pour la fidélité de son témoignage. Si, devant le tribunal de Christ, il pouvait être dit de nous que tout ce que nous avons rapporté à son sujet est vrai — ce serait effectivement une approbation !
Les deux premiers versets de ce chapitre indiquent que cet évangile a été écrit alors que les autres évangiles étaient bien connus. En désignant Béthanie comme la ville de Marthe et de Marie, l’auteur suppose que les lecteurs sont plus familiers avec ces femmes qu’avec le village lui-même. Au verset 2, Marie est aussi caractérisée par le fait qu’elle a oint le Seigneur. Jean ne nous en parle pas avant le chapitre suivant mais, ce fait étant bien connu, il savait qu’il pouvait, sans risque, l’identifier ainsi.
Le bref message envoyé par les sœurs de Lazare montre de façon très frappante l’intimité dans laquelle le Seigneur, en tant qu’Homme, introduisait ses amis. C’était une intimité pleine de révérence. Il y tenait toujours la place la plus élevée. Les deux sœurs ne s’adressaient pas à lui avec une familiarité inconvenante ; elles ne l’appelaient pas Jésus, mais « Seigneur » ! Cependant elles pouvaient en toute confiance parler de leur frère comme étant « celui que tu aimes ». Jésus avait rendu la famille de Béthanie suffisamment consciente de son amour ; Marthe et Marie pouvaient donc compter sur lui avec confiance.
Le commentaire de l’évangéliste au verset 5 confirme que leur confiance était bien placée. Jésus les aimait vraiment. Il aimait chacun individuellement. Nous pourrions penser que Marthe était celle qu’il avait le moins de raison d’aimer ; elle est pourtant placée en premier sur la liste ! Lazare est placé en dernier alors qu’il l’aimait certainement, comme ce chapitre le montre. Nous aurions peut-être placé Marie en tête ; elle n’est même pas mentionnée par son nom, elle est seulement « sa sœur ». Nous avons à apprendre que l’amour de Christ repose sur un fondement beaucoup plus profond que les particularités diverses des croyants. Il provient de sa nature même et il est merveilleusement impartial.
Malgré cela, l’appel au secours des deux sœurs ne reçoit pas une réponse immédiate. Il y a un retard volontaire qui permet à la maladie de se terminer par la mort, et la mort a le temps d’entraîner la corruption. Pourquoi ? Nous trouvons ici la réponse, valable pour tous les temps, à cette question qui s’élève si souvent dans le cœur des croyants. La mort n’était pas le véritable but de cette maladie ; c’était, au contraire, la manifestation de la gloire de Dieu et la glorification de son Fils. Le verset 15 montre que c’était pour le bien des disciples ; il en résulterait aussi une grande bénédiction pour les sœurs affligées (voir les paroles du Seigneur rapportées au verset 40). Par conséquent ce qui semblait si étrange et si inexplicable aboutit à la gloire de Dieu et au bien des hommes. Il y avait une réponse particulièrement merveilleuse dans l’apparente absence de réponse du Seigneur.
Les disciples ont peur quand le Seigneur décide de retourner en Judée ; ils sont semblables à des hommes qui marchent dans la nuit et qui n’ont pas de lumière. Au contraire, Jésus est semblable à quelqu’un qui marche de jour, car il est dans la lumière. Ce n’est pas la lumière de ce monde, mais celle d’un autre où ne comptent que la volonté et le chemin du Père. C’est pour cela qu’il ne bronche jamais. Maintenant il monte à Béthanie pour faire la volonté de Dieu. Les disciples le suivent, en pensant qu’ils vont mourir, comme l’indique Thomas ; mais Jésus monte vers des scènes de mort dans la puissance de la résurrection.
Quand Jésus approche, les sœurs de Lazare agissent chacune de façon particulière. Marthe, la femme d’action, sort à sa rencontre. Marie, la femme de réflexion et de compassion, reste assise dans la maison ; elle attend qu’il l’appelle. Cependant, quand elles voient Jésus, toutes les deux le saluent avec les mêmes paroles. Marthe a une foi sincère. Elle croit en sa capacité d’intercesseur auprès de Dieu et en la puissance de Dieu qui s’exercera dans la résurrection au dernier jour. Sans doute est-elle très impétueuse, mais son impétuosité provoque une des plus grandes déclarations qui nous soient rapportées. Autrefois l’Éternel s’était appelé lui-même « JE SUIS ». Le Verbe (la Parole) a été fait chair et lui aussi est « JE SUIS », mais Jésus ajoute des précisions qui complètent cette déclaration. Il dit ici : « JE SUIS la résurrection et la vie ». La résurrection est mentionnée d’abord, puisque, ici, il s’agit de ce qu’il est en relation avec les hommes. La mort règne sur Adam et sur sa race ; les hommes ne peuvent donc avoir la vie que dans la puissance de la résurrection.
Cette vérité a deux aspects et il en résulte aussi deux conséquences pour le croyant. S’il meurt, il vivra certainement. Sa foi repose, en effet, sur celui qui est la résurrection, celui qui, par conséquent, donne la vie au-delà de la mort. Mais Jésus est aussi la vie et sa puissance vivifiante atteint les hommes pour qu’ils « vivent par la foi au Fils de Dieu ». Le Seigneur emploie l’expression : « Quiconque vit, et croit en moi, ne mourra point, à jamais ». De tels hommes ne mourront jamais, c’est-à-dire qu’ils ne goûteront jamais la mort dans toute son étendue. La « maison terrestre qui n’est qu’une tente » peut être détruite, mais ce n’est pas la mort, nous nous endormirons. L’ensemble de cette déclaration avait une forme un peu mystérieuse ; elle dépassait ce qui avait été révélé jusqu’ici aux hommes. Jésus ne dévoile pas encore la vérité de son retour ; cependant il y fera allusion au début du chapitre 14. Ce sujet est développé en 1 Thessaloniciens 4:13-18. Bien que ce ne soit pas l’interprétation première de ses paroles, nous pouvons y voir une application secondaire frappante, maintenant que la vérité de son retour a été révélée. Lors de la venue du Seigneur Jésus pour enlever les croyants, il y aura effectivement la grande démonstration publique de la vérité de ses paroles : « Je suis la résurrection et la vie ».
Lorsque le Seigneur demande à Marthe si elle croit ce qu’il vient de dire, elle montre immédiatement que c’est une énigme pour elle. Comme les Juifs, elle voit probablement la résurrection au dernier jour comme une nouvelle vie dans ce monde. Dans sa réponse, elle a donc recours, avec beaucoup de sagesse, à ce qu’elle croit avec certitude : Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, dont la venue dans le monde a été annoncée. Elle est déjà parvenue à la foi à laquelle cet évangile nous conduit ; elle possède donc « la vie en son nom ». Mais, intellectuellement dépassée par les autres questions, elle appelle secrètement sa sœur pour qu’elle vienne vers le Maître.
Il existe un lien particulier de sympathie entre Jésus et Marie. Nous ne lisons pas que Marthe tombe aux pieds de Jésus, ni qu’elle pleure. La douleur de la mort pèse très lourdement sur l’esprit de Marie, comme elle pèse aussi sur l’esprit du Seigneur. Il ressent très profondément le poids de la mort, même si, dans ce cas précis, il est sur le point de l’alléger provisoirement. Cela le touche jusqu’à le faire frémir dans son esprit et même jusqu’à verser des larmes. Il ne pleure pas pour Lazare, car il sait qu’il va le rappeler à la vie dans quelques instants. Il pleure par sympathie avec les sœurs et parce qu’il éprouve dans son esprit la peine profonde que produit la mort, conséquence du péché. Le mot utilisé ici signifie « verser des larmes en silence » et non « se lamenter bruyamment », comme en Luc 19:41. Mais, depuis bientôt deux mille ans, ces larmes silencieuses de Jésus ont ému le cœur des croyants affligés.
La mort avait provoqué un frémissement dans l’esprit de Jésus. Nous voyons que la tombe produit à nouveau le même effet (v. 38), mais il allait maintenant mettre en action et manifester la puissance de sa parole. Le verset 39 commence par ces mots : « Jésus dit... ». Il y a dans ce chapitre cinq expressions frappantes qui pourraient résumer tout le récit : « Jésus, l’ayant entendu... », « Jésus aimait », « Jésus, étant arrivé... », « Jésus pleura », « Jésus dit... » (v. 4, 5, 17, 35, 39). Aujourd’hui, le croyant affligé doit attendre l’accomplissement de la cinquième expression dans le « cri » qui ressuscitera les morts, changera les vivants et les ravira ensemble pour être avec le Seigneur ; les quatre autres sont toujours vraies et pleines d’encouragement pour nous.
Sur l’ordre du Seigneur, les hommes peuvent rouler la pierre de l’entrée du tombeau. Ils agissent malgré la protestation, un peu déplacée, de Marthe, mais leur pouvoir s’arrête là. La manifestation de la gloire de Dieu, que Marthe devait voir si elle croyait, est uniquement l’œuvre du Seigneur. C’est lui seul qui vivifie et ressuscite, même si des hommes peuvent être employés pour enlever des obstacles. Cependant la puissance qui ramène Lazare à la vie ne s’exerce que dans la dépendance du Père. En présence de la foule, un témoignage complet est rendu au fait qu’il y a ici le Fils de Dieu en puissance et qu’il est ici de la part du Père, parfaitement dépendant de lui.
Jésus ne prononce que trois mots et le miracle extraordinaire s’accomplit. La mort et la corruption sont effacées ; Lazare sort, ayant encore « les pieds et les mains liés de bandes ». Dieu se sert à nouveau des hommes pour libérer Lazare de ses liens. Aujourd’hui les serviteurs de Dieu peuvent, de la même manière, prêcher la parole pour enlever des obstacles spirituels et libérer les âmes de l’esclavage. L’œuvre qui donne la vie demeure, par contre, entièrement dans les mains du Fils de Dieu. Dans ce grand miracle, le sixième que Jean mentionne, la gloire de Dieu a été manifestée puisque sa glorieuse prérogative est de donner la vie. L’homme violent ne peut tuer que trop facilement ; Dieu seul peut « faire mourir et faire vivre » (voir 1 Samuel 2:6 ; 2 Rois 5:7). Le Fils de Dieu a aussi été glorifié, car le fait qu’il soit un avec le Père dans l’exercice de cette puissance a été manifesté.
Ce miracle a beaucoup d’effet, car il a lieu tout près de Jérusalem. Il amène plusieurs personnes à croire et il pousse les principaux sacrificateurs et les pharisiens à s’acharner encore plus à faire mourir le Seigneur. Ils sont obligés d’admettre qu’il a fait beaucoup de miracles ; cependant ils ne tiennent compte que des conséquences que cela peut avoir sur leur position vis-à-vis des Romains. Dieu n’est pas du tout dans leurs pensées. Le conseil qu’ils tiennent permet à Caïphe de prophétiser.
Dieu peut se saisir d’un prophète tel que Balaam et l’obliger à prononcer des paroles de vérité. Mais il y a ici un homme qui, en dehors du fait qu’il était souverain sacrificateur cette année-là, n’a aucune prétention dans ce domaine ; c’est un homme qui prophétise sans le savoir. Quant à lui, ses paroles sont moqueuses et pleines d’un esprit de meurtre brutal, sans pitié, délibérément cruel. Le Saint Esprit les utilise, cependant, pour exprimer que Jésus va mourir pour Israël d’une manière que les Juifs ne comprennent pas. Au verset 52, l’évangéliste nous donne un commentaire supplémentaire sur les paroles de Caïphe. Israël va être, en effet, racheté par sa mort ; mais un horizon plus étendu va bientôt être dévoilé. Des enfants de Dieu existent, mais, jusqu’ici, il n’y a pas de lien particulier pour les unir. Ce lien va être créé par la mort du Seigneur Jésus. Le chapitre suivant nous éclairera sur ce sujet.
Une fête de Pâque est mentionnée ici ; c’est la troisième fois dans cet évangile. En Lévitique 23, il en est parlé comme d’un des « jours solennels de l’Éternel ». Dans l’évangile selon Jean, il s’agit toujours d’une fête des Juifs, car Jésus est considéré comme étant rejeté par son peuple depuis le début ; en conséquence, le peuple et ses fêtes sont désavoués par Dieu. Les chefs religieux sont maintenant sur le point de mettre le comble à leur infamie en se servant de la Pâque comme d’une occasion pour mettre à mort le Fils de Dieu. Leur culpabilité n’est pas diminuée par le fait que Dieu avait tout déterminé à l’avance pour l’accomplissement de ce que la Parole de Dieu annonçait ; de cette manière, « Notre pâque, Christ, a été sacrifiée » (1 Corinthiens 5:7).
Six jours avant la Pâque, Jésus vient à Béthanie. Tout ce qui est rapporté entre le verset 1 de ce chapitre et le verset 25 du chapitre 20 se passe donc pendant une courte période de sept à huit jours ; c’est certainement la semaine la plus merveilleuse de l’histoire du monde. Dans la maison de Béthanie habitent trois personnes qui sont les objets de l’amour du Seigneur Jésus et qui l’aiment en retour. Une occasion propice se présente à eux, maintenant, pour montrer leur amour. Dans les jours qui vont suivre, il y aura la mort et la résurrection du Fils de Dieu, lui-même.
À la fin du chapitre 10 de l’évangile de Luc, nous voyons un certain désordre et des plaintes dans la famille de Béthanie. Ici, lorsque la puissance du Seigneur a été démontrée par la résurrection de Lazare, tout est en ordre et en harmonie. Tout ce qui se passe dans cette soirée, empreinte de simplicité, a Christ pour centre. Il est celui que chacun honore ; nous lisons en effet : « On lui fit donc là un souper ». Nous pouvons certainement y découvrir un enseignement. Tout rentre dans l’ordre quand Christ est le but suprême et quand sa puissance de résurrection est connue.
Marthe est l’hôtesse ; elle sert le Seigneur. Lazare prend part au souper avec lui. Marie lui exprime la ferveur de son cœur en répandant sur lui son parfum de grand prix. Nous voyons donc comment le fait de « le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection » (Philippiens 3:10) conduit au service, à la communion et à l’adoration. Tout se déroule d’une façon heureuse et, justement à cause de cela, nous entendons une critique méchante qui vise le geste de Marie. Cela commence par Judas Iscariote ; mais l’évangile de Matthieu montre que les autres disciples font écho à ses paroles.
Le monde est incapable d’apprécier la vraie adoration ; Judas, en dépit de ses dehors honnêtes, appartient entièrement au monde. Dominé par la convoitise, il est devenu voleur et, de plus, hypocrite ; il dissimule son égoïsme sous un apparent souci des pauvres. Il prétend être un homme rempli de sens pratique, tout à fait conscient de l’utilité d’avantages matériels sûrs pour les pauvres. À son avis, Marie, poussée par des sentiments stupides, gaspille un produit de valeur. Le monde a exactement la même opinion aujourd’hui. La religion qui convient à ses goûts est celle qui accorde une grande importance aux avantages matériels et terrestres pour l’homme. Aujourd’hui, comme alors, les croyants à l’esprit charnel sont très enclins à être d’accord avec le monde et à refléter ses opinions.
Jésus fait taire la critique hostile, en disant : « Permets-lui de faire cela » (*). Ces mots peuvent bien s’inscrire dans notre mémoire. La véritable adoration se passe entre l’âme du croyant et le Seigneur ; personne d’autre ne peut s’interposer. En Romains 14, le croyant est considéré comme un serviteur, et la pensée de ce chapitre est aussi : « Permets-lui de faire cela » (**). De plus, le Seigneur sait comment interpréter le geste de Marie. Il en donne une explication plus complète que celle que Marie elle-même aurait pu donner, bien qu’elle connaisse la haine des chefs et qu’elle perçoive intuitivement que la mort de Jésus approche. Il est également significatif que Marie de Béthanie ne se joigne pas aux autres femmes lorsqu’elles se rendent au tombeau avec les aromates qu’elles ont préparés.
(*) L’expression anglaise est : laisse-la tranquille, ce qui explique la suite.
(**) Ici : laisse-la tranquille.
Nous pouvons dire que ce que Marie a accompli, l’a été « pour Jésus seul ». Pour Judas, c’était « les pauvres » qui comptaient ; pour les autres disciples eux-mêmes, c’était « Jésus et les pauvres ». Pour un grand nombre de Juifs qui affluent à Béthanie, à ce moment-là, ce sont « Jésus et Lazare » qui les attirent ; ils sont curieux de voir un homme qui a été ressuscité d’entre les morts. Ceux de la maison de Béthanie avaient concentré leur affection sincère sur Jésus. Contrairement à eux, les principaux sacrificateurs ont concentré sur lui leur haine la plus meurtrière. Elle les aveugle à tel point qu’ils envisagent de faire mourir Lazare, le témoin de sa puissance. Ils sont très religieux, mais absolument sans scrupules ; ils oublient l’avertissement du Psaume 82:1-5.
Le lendemain, Jésus se présente à Jérusalem comme le roi d’Israël ; cela se passe exactement comme Zacharie, le prophète, l’avait dit. Aucun souverain ne pourrait se permettre de se présenter officiellement dans sa capitale d’une manière aussi humble. Mais pour lui, qui était la Parole faite chair, toute cette gloire, comme elle était possible à cet instant-là, aurait été une perte et non un gain. Cet événement est rapporté dans les quatre évangiles, mais Jean ajoute deux détails particuliers. Il souligne d’abord le contraste entre les disciples et leur maître. À chaque instant, Jésus savait exactement ce qu’il allait faire (voir 6:6) ; les disciples participent, sans rien comprendre à ce qu’ils font ! La signification de tout cela ne leur apparaît que lorsqu’ils reçoivent le Saint Esprit, comme conséquence de la glorification de Jésus. Jean montre ensuite que l’élan d’enthousiasme populaire, manifesté à ce moment-là, avait été suscité par la résurrection de Lazare ; c’est en elle que s’était déployée la gloire de Jésus, comme Fils de Dieu.
Ce qui vient de se passer a trois conséquences. Les pharisiens sont humiliés et pleins d’amertume ; ils prêtent au témoignage du peuple une profondeur de conviction qui n’existe pas. Mais des Grecs, montés à la fête, désirent s’informer ; leur désir de voir Jésus est la garantie qu’un jour les nations marcheront à sa lumière, et les rois, à la splendeur de son lever (voir Ésaïe 60:3). C’était le moment où Jésus aurait dû être reçu et acclamé par son propre peuple. L’heure était venue où il aurait dû être glorifié comme Fils de l’homme. Le Seigneur, lui, savait bien que la mort seule l’attendait, parce qu’il était le Messie rejeté. Elle serait le fondement de toute la gloire dans les jours à venir. Il se met donc à parler de cette mort.
Au verset 24, nous trouvons une autre de ses déclarations magistrales. La vie qui demeure et s’épanouit, en portant beaucoup de fruit, ne peut être obtenue qu’en passant par la mort. Il est nécessaire que Jésus meure pour que du fruit pour Dieu soit récolté ; ce fruit sera de la même nature que lui-même. Emmanuel est venu, la Parole s’est faite chair, et sa valeur intrinsèque et sa beauté ne peuvent s’exprimer par des mots. Cependant, ce n’est que par la mort que Jésus va « fructifier et multiplier » ; ainsi apparaîtra une multitude d’hommes, « selon sa nature », à la gloire de Dieu. C’est ce qui occupe les pensées du Seigneur, tandis que d’autres pensent encore à la gloire terrestre.
Le premier résultat de la mort du Seigneur Jésus est qu’il y aura du fruit pour Dieu. Le second est le nouveau mode de vie sur la terre qui en résulte pour les disciples. Jésus va laisser sa vie dans ce monde, sa vie parfaite. En ce qui nous concerne, la vie sur cette terre est complètement gâchée par le péché et elle est sous le jugement. Si nous aimons cette vie, nous ne ferons que la perdre. En la regardant sous son vrai jour, nous apprenons à la haïr ; si nous agissons ainsi, nous conservons la vie, la seule qui soit digne d’être possédée, jusqu’à la vie éternelle. C’est pour nous une parole dure, mais elle est d’une extrême importance. Nous pouvons le constater par le fait que Jésus prononce des paroles d’une importance semblable en trois autres occasions ; ces quatre déclarations sont rapportées six fois dans les évangiles. Aucune autre parole de notre Seigneur ne nous est répétée ainsi. Il n’est pas exagéré de dire que notre dimension spirituelle et notre prospérité sont déterminées par la mesure dans laquelle ces paroles laissent leur empreinte sur notre cœur et notre vie.
Le verset 26 découle naturellement du verset 25. Nous ne pouvons vraiment servir le Seigneur que si nous le suivons ; nous ne pouvons réellement le suivre que si nous avons la même attitude que lui par rapport à la vie. Jésus n’a pas aimé sa vie dans ce monde quand, à l’image du grain de blé, tombant en terre, il est mort. L’apôtre Paul a partagé cette pensée (voir 2 Corinthiens 4:10-18 ; Galates 2:20 ; 6:14). Comme serviteur de Christ, il nous surpasse tous de loin. La récompense du serviteur est d’être avec son maître et d’être honoré par le Père.
À une autre occasion, Jésus avait dit que tout serviteur parfait serait « comme son maître » (Luc 6:40). Ici, nous voyons que le serviteur sera avec son maître. Il y a encore une autre instruction, ici. Nous avons l’expression : « Si quelqu’un me sert... ». Qui est celui qui parle ? C’est le Fils de Dieu, humble et rejeté ! Qui est-ce qui le sert, quand il est impopulaire et rejeté ? Ceux qui le font sont honorés par le Père ; l’honneur leur sera donné publiquement au grand jour des récompenses. Les plus grandes distinctions honorifiques du monde sont sans valeur à côté !
L’évangile selon Jean ne fait aucune mention de la tristesse de Gethsémané. Ici, il nous est cependant permis de voir combien le fardeau de sa mort prochaine pesait sur l’âme du Seigneur. Sa divinité n’atténuait pas son trouble ; elle lui donnait plutôt une capacité infinie pour le ressentir. Il ne pouvait pas désirer cette heure qui approchait. Sa connaissance absolue de tout et son infinie sainteté le faisaient inévitablement reculer devant la mort ; toutefois sa prière n’était pas d’en être délivré, mais que le nom du Père soit glorifié en elle. Ce désir était si parfait et si merveilleux pour le Père qu’une voix s’est fait entendre des cieux. Les autres évangiles nous montrent comment la voix du Père s’est fait entendre au baptême du Seigneur et lors de sa transfiguration. Ces moments étaient plus intimes ; il semble qu’il n’y ait eu aucune difficulté pour comprendre ce qui était dit. À cause de la mort prochaine du Seigneur Jésus, la voix se fait entendre ici publiquement, pour la foule ; cependant les hommes ne la reçoivent pas et ils interprètent le son qu’ils entendent comme la voix d’un ange, ou comme un coup de tonnerre. Dieu parle aux hommes distinctement et directement, mais ils ne comprennent rien ! Il en sera toujours ainsi, à cause de la condition déchue de l’homme.
Le Père répond que son nom a déjà été glorifié dans tout le chemin de Jésus sur la terre et, plus spécialement, par la résurrection de Lazare ; Dieu glorifiera encore son nom par la mort et la résurrection de son Fils. C’est un autre grand résultat de la mort de l’unique « grain de blé ». Il y a d’abord beaucoup de fruit qui est produit et, par conséquent, chaque disciple entre dans un nouveau genre de vie et de service ; enfin le nom du Père est glorifié. Il y a encore quelque chose de plus, car le verset 31 introduit le monde et son prince.
Le jugement de ce monde a eu lieu à la croix. Notre langage s’est approprié les deux mots grecs employés ici. C’est à la croix qu’a eu lieu la crise de ce cosmos. Ce mot signifie un lieu ordonné, en contraste avec le chaos. Mais ce cosmos est tombé, hélas, sous la direction du diable ! La mort de Christ a révélé le vrai caractère de ce monde, l’amenant donc sous une juste condamnation. Elle a brisé aussi la puissance de l’usurpateur qui était devenu son prince et l’a dépossédé légalement. Elle semblait être le plus grand triomphe de Satan, mais ce fut sa défaite totale.
C’est le Seigneur lui-même qui donne la révélation merveilleuse des résultats de sa mort ; d’une manière caractéristique, il place en dernier celui qui le concerne personnellement. Il déclare, dans ses paroles, qu’il va mourir crucifié. À cette époque, les Romains exécutaient les condamnés à mort de cette manière. Comme le cœur des Juifs déborde d’animosité contre lui, il va mourir de la façon la plus ignominieuse, renié à la fois par les Juifs et par les nations. Il a été « élevé de la terre », afin de pouvoir être retranché avec mépris ; le couperet tombe, pour ainsi dire, sur sa cause et sur son nom. Le résultat est précisément le contraire. Celui qui a été jadis crucifié sera le centre d’attraction universel et éternel ! C’est Jésus qui va attirer à lui tous ceux qui seront amenés dans le vaste cercle divin de bénédiction. Nous avons ici un premier élément de ce qui est exposé plus complètement en Éphésiens 1:9-14. Loin d’anéantir la gloire du Seigneur, la croix devient le fondement sur lequel elle repose, et la base de sa manifestation la plus parfaite. Nous en avons le témoignage touchant en Apocalypse 5:5-14.
Au verset 23, les premiers mots de Jésus parlent du Fils de l’Homme glorifié ; les derniers, au verset 32, mentionnent son élévation. Les juifs savent que, quand le Christ viendra, il doit demeurer éternellement (v. 34). Le titre de « Fils de l’homme » ne leur est pas inconnu ; on le trouve dans l’Ancien Testament. Ils connaissent le Fils de l’Homme qui doit recevoir le royaume (voir Daniel 7). Qui est donc ce Fils de l’homme qui doit souffrir ? Ils ont oublié l’expression du Psaume 8 : « le Fils de l’homme... fait de peu inférieur aux anges ». Cet humble Fils de l’homme est la lumière des hommes. S’ils ne croient pas en la lumière pour devenir des enfants de lumière, de profondes ténèbres viendront sur eux et ils seront perdus. Sur cet avertissement, Jésus s’éloigne d’eux.
L’évangéliste résume la situation dans les versets 37 à 43. Jésus avait fait beaucoup de miracles devant les Juifs, mais ils ne croyaient pas en lui, parce que leurs yeux étaient aveuglés. C’est le dieu de ce siècle qui travaille pour aveugler les hommes (voir 2 Corinthiens 4:4). Toutefois il y a des moments où Dieu permet spécialement cela comme châtiment gouvernemental, et cela peut alors lui être attribué. C’est le cas ici, comme à l’époque d’Ésaïe ; cela se reproduira environ 35 ans plus tard, quand le témoignage à Christ glorifié sera refusé (voir Actes 28:25-27). La génération incrédule persiste et elle sera encore là quand le jugement final tombera à la fin des temps.
En Ésaïe 6, le prophète raconte comment il a vu le roi, l’Éternel des armées. Jean nous dit cependant qu’Ésaïe « vit sa gloire et parla de lui » ; il fait clairement référence à Jésus. Par ailleurs le verset 40 de notre chapitre est tiré d’Ésaïe 6 où se trouve l’expression : « la voix du Seigneur ». En Actes 28, Paul cite ces paroles comme étant celles de l’Esprit Saint. Ceci nous éclaire utilement sur l’unité des personnes divines. Nous ne pouvons pas les séparer, bien que nous puissions les distinguer.
Les Juifs sont tellement aveuglés qu’« ils ne peuvent pas croire ». Leur intelligence spirituelle est obscurcie, au point que croire est devenu une impossibilité pour leur esprit. Quelle que soit la clarté de la lumière qui brille devant eux, ils sont incapables de la percevoir. Cependant, quelques chefs n’ont pas le même aveuglement. Leur esprit est ouvert à ce qui est évident et les miracles qui ont été accomplis ont produit en eux une conviction intellectuelle. Mais la conviction intellectuelle n’apporte pas la vie, tout en étant un élément essentiel de la foi vivante. Elle ne peut pas produire de fruits (c’est-à-dire faire des œuvres), mais elle est « comme un corps sans esprit » (Jacques 2:26). La foi vivante conduit l’âme à Dieu, par Christ. Ces chefs ne connaissaient pas ces vérités car, s’ils les avaient expérimentées, ils n’auraient pas aimé la gloire des hommes plutôt que celle de Dieu. Ce même critère s’applique aujourd’hui. Celui qui croit réellement dans son cœur que Dieu a ressuscité Christ d’entre les morts ne manquera pas de reconnaître publiquement Jésus comme Seigneur. Si les hommes ne le déclarent pas, c’est qu’ils ne croient pas vraiment.
Dans les versets 44 à 50, le Seigneur résume la situation existante au moment où il met fin à son témoignage. Dans les chapitres 3 à 7, la pensée principale est la vie ; Jésus est présenté comme « Celui qui donne la vie ». À partir du chapitre 8, le grand thème est la lumière ; Jésus est considéré comme « Celui qui apporte la lumière ». Au verset 12 du chapitre 8 se trouvent les premières paroles du Seigneur sur ce sujet ; les dernières sont au verset 46 de notre chapitre. Nous ne sortons des ténèbres que si nous venons à la lumière de Christ. La lumière qui a brillé en lui était la pleine révélation de Dieu ; celui qui vient dans la lumière du Seigneur croit et voit celui qui l’a envoyé. Il était la Parole faite chair, et n’était pas inférieur au Père qu’il révélait, même s’il avait pris une place de soumission pour le faire connaître et accomplir chacun de ses commandements.
À ce moment-là, le commandement du Père n’est pas le jugement ; c’est, au contraire, la vie éternelle. Voilà pourquoi il s’est caché de ses adversaires, plutôt que de les anéantir par sa puissance. Cependant le jugement viendra, au moment convenable. Le juge est désigné et les hommes seront jugés sur la base de la révélation qu’il a apportée. Le Seigneur se met immédiatement à accomplir l’œuvre qui est devant lui : « sauver le monde » et apporter « la vie éternelle ». Il continue donc à parler, suivant le commandement du Père, et à agir, selon que le Père l’a commandé (voir 14:31). La croix est nécessaire, comme fondement du salut et de la vie. Dans l’immédiat, ce qui est devant le Seigneur, c’est de réunir ses disciples une dernière fois pour pouvoir leur communiquer pleinement le dessein de l’amour du Père.
Ce chapitre commence par décrire dans quel esprit Jésus réunit ses disciples pour le dernier souper de la Pâque. Les autres évangiles racontent tout ce qu’il est nécessaire de savoir sur les circonstances du moment ; ici nous découvrons l’atmosphère d’amour divin qui rend cet événement plus merveilleux. Jésus sait parfaitement que sa mort approche. Elle est envisagée comme le fait de passer d’un monde, déjà jugé, au Père. Le Seigneur laisse derrière lui, sur la terre, des hommes qui sont reconnus comme étant « les siens ». Au chapitre 10, il avait parlé d’eux comme de « ses propres brebis » ; il indiquait qu’il laisserait sa vie pour elles. Nous découvrons maintenant comment son amour avait été versé sur elles. Il les aima « jusqu’à la fin », c’est-à-dire la mort, en ce qui concerne ce monde. Mais la mort elle-même n’est pour le croyant que la porte qui conduit vers la vie éternelle ; l’amour demeure donc pour l’éternité.
Les trois premiers versets dévoilent des circonstances qui, sans cette révélation, n’auraient été connues que de Dieu. Qui peut vraiment connaître l’amour qui remplit le cœur de Christ ? Qui peut discerner la haine et la ruse du diable qui le poussent, à ce moment-là, à insuffler dans le cœur de Judas la pensée épouvantable de trahir son maître ? Et qui d’autre connaît ce qui remplit l’esprit de Jésus, à cette heure solennelle ? Il nous est toutefois permis de le savoir. Rien n’est caché aux yeux du Seigneur alors que, devant lui, il y a la mort par laquelle il s’en va au Père. Il sait qu’il est venu de Dieu afin de pouvoir le révéler parfaitement et racheter entièrement les hommes. Il sait qu’il s’en va à Dieu, comme Homme ressuscité, premiers fruits d’une grande moisson de bénédiction et chef d’une nouvelle création. Bien qu’il s’avance pour se livrer lui-même entre les mains des méchants, il sait qu’en fait le Père a mis toutes choses entre ses mains, des mains capables de tout administrer parfaitement. Toutes choses sont à sa disposition et la prophétie d’Ésaïe : « Le plaisir de l’Éternel prospérera en sa main », sera certainement accomplie.
Pleinement conscient de tout cela, Jésus prend au milieu de ses disciples l’humble place de celui qui sert. Le plaisir de l’Éternel doit prospérer dans la main de son serviteur (voir Ésaïe 53). Cela s’accomplira dans un immense univers de bénédiction, lors de la gloire future. Mais nous le voyons déjà réalisé, à la veille des souffrances du Seigneur, lorsque, de ses propres mains, il lave les pieds des disciples. En cela il est le serviteur de l’Éternel, comme il le sera dans le jour à venir ; les deux formes de service sont l’une et l’autre merveilleuses. Il sert Dieu, en servant les siens.
La vive protestation de Pierre est repoussée pour que l’acte du Seigneur soit expliqué. Pierre perçoit clairement la merveilleuse humilité de ce geste, et cela provoque sa protestation. Il lui est cependant clairement dit qu’il ne connaît pas le vrai sens de ce que le Seigneur a fait ; il le comprendra lorsque le Saint Esprit sera venu. Nous devrions aussi le comprendre. Quel en est donc le sens ? Les paroles de Jésus, rapportées au verset 8, nous éclairent. Il parle d’avoir une part avec lui ; si nous devons avoir le bonheur de partager avec lui, il doit accomplir envers nous le service symbolisé par le lavage des pieds. Par nos pieds, nous sommes en contact avec la terre ; nous devons donc être débarrassés de la poussière et de la souillure.
Les paroles du Seigneur (v. 10) donnent une explication supplémentaire sur ce sujet. Il emploie deux mots différents pour parler du fait de se laver : le premier signifie laver entièrement ou baigner. Il dit donc que celui qui est baigné a besoin de se laver seulement les pieds. Il fait ainsi une allusion évidente au double lavage des sacrificateurs. Ils devaient se laver tout le corps lors de leur consécration qui avait lieu une fois pour toutes (Lévitique 8:6) ; ils devaient ensuite répéter le lavage des mains et des pieds chaque fois qu’ils entraient dans le sanctuaire (Exode 30:19). Quand nous sommes nés de nouveau, nous avons tout le corps lavé ; nous sommes alors nés « d’eau et de l’Esprit ». Après avoir rappelé aux Corinthiens le mal dans lequel ils étaient tombés autrefois, Paul pouvait leur écrire : « Vous avez été lavés », même si la plupart d’entre eux avaient encore un esprit charnel. Ainsi le Seigneur dit aux disciples : « Vous êtes nets » ; il ajoute : « mais non pas tous », en pensant à Judas. En dépit de tout ce qu’il professait, Judas n’était pas né de nouveau.
Ce geste symbolique du Seigneur, ainsi que ses explications, constitue une introduction parfaite aux merveilleux chapitres qui suivent. Dans les chapitres 14 à 16, les communications que Jésus fait aux disciples les introduisent, pour ainsi dire, dans le lieu saint. Au chapitre 17, par contre, nous le voyons pénétrer, seul, dans le lieu très saint. Après la mort du Seigneur et son ascension au ciel, le Saint Esprit ayant donc été donné, nous découvrons que tous les croyants partagent le privilège d’avoir une pleine liberté pour entrer dans le lieu très saint. Mais que ce soit pour les disciples d’autrefois ou pour nous-mêmes aujourd’hui, cette purification de la souillure de la terre est nécessaire, en plus de la nouvelle naissance, si nous devons jouir d’une part avec lui dans le sanctuaire de la présence de Dieu.
Le Seigneur lui-même accomplit encore ce service miséricordieux envers nous, exactement selon nos besoins. Cela fait partie de son travail de souverain sacrificateur et d’avocat au ciel. Toutefois il est notre seigneur et maître et donc, pour nous, un exemple à suivre. La Parole est le plus grand moyen de purification, comme il est écrit au Psaume 119:9. À notre avis, il faut plus de talent pour l’employer comme l’eau purificatrice que pour l’utiliser comme une lampe brillante ou comme une épée tranchante ; ce talent vient de Dieu. Nous serons heureux, en effet, si nous l’acquérons et l’exerçons dans nos contacts avec les croyants. Comme l’indique le verset 17, il est plus facile d’acquérir de la connaissance dans ces vérités que de les pratiquer. En les mettant en application, nous serons restaurés et rafraîchis.
L’exhortation en Galates 6:1 est en rapport avec cela. Cependant le « lavage des pieds », au sens spirituel, s’appliquerait aux souillures en rapport avec le cœur et l’esprit, qui ne nous ont pas encore conduits à nous laisser surprendre par une faute. Si nous savions mieux le réaliser, cela nous aiderait à nous empêcher mutuellement d’être « surpris » et de tomber.
Voici le moment où se révèle le vrai caractère de Judas. À la fin du chapitre 6, les paroles du Seigneur montrent qu’il le connaissait parfaitement, depuis le début. Quand Jésus a choisi les disciples, il a agi avec une préscience divine ; Judas est celui qui accomplira la prophétie du Psaume 41:9. Le Seigneur lui a pourtant donné un service et l’a envoyé comme les autres. Ceux qui ont reçu Judas, et les autres disciples, ont reçu le Maître ; ils ont aussi reçu Dieu lui-même, le Seigneur étant venu d’auprès de lui. L’indignité personnelle du serviteur n’annule pas ce grand principe.
Cependant la terrible chute de Judas est une réelle douleur pour le cœur du Seigneur ; la souffrance n’est pas diminuée par sa prescience divine qui lui permettait de voir la fin avant le commencement. La ferme déclaration du Seigneur que l’un des douze qu’il a choisis va se révéler traître produit aussi du trouble dans l’esprit des disciples. Le verset 22 montre que, dans leurs pensées, il n’y avait aucun soupçon à l’égard de Judas. Il leur paraissait tout à fait sincère, si bien que la bourse commune lui avait été confiée. Le camouflage trompeur, employé par Satan, est presque parfait. Y a-t-il jamais eu une illustration plus frappante des versets 13 et 14 de 2 Corinthiens 11 ?
Qui est celui qui va livrer le Seigneur ? C’est une question délicate ! Un seul des disciples, à ce moment-là, est qualifié pour la poser. La position physique du « disciple que Jésus aimait » est un indice de son état spirituel. Pierre le comprend et lui fait signe de demander ce renseignement. La réponse est donnée sous la forme d’un signe. C’était un honneur pour un invité de recevoir, de la part de l’hôte, « un morceau trempé ». Mais le disciple honoré va se révéler comme étant le traître.
Nous pouvons distinguer trois étapes dans sa chute. Tout d’abord, la convoitise non jugée le conduit même à devenir voleur (12:6). Puisque Judas n’a pas eu entre les mains les trois cents deniers que représentait le parfum, Satan met ensuite dans son cœur le désir d’en récupérer une partie pour lui-même (13:2) ; finalement il se contente de dix pour cent de cette somme ! Enfin Satan entre en lui. Le Maître du mal prend personnellement le commandement afin qu’il ne puisse y avoir aucune erreur dans les préparatifs qui doivent entourer la mort du Seigneur.
Le Seigneur accepte la situation et lui dit d’agir rapidement. Il semble que Satan ne puisse pas agir librement dans cette affaire sans la permission divine. Une fois la permission accordée, Judas, entièrement dominé par Satan, se lève et sort. Il sort dans la nuit, dans tous les sens du terme.
Une atmosphère de paix règne à l’intérieur de la chambre haute lorsque Judas est sorti dans la nuit. Débarrassé de sa présence, le Seigneur commence aussitôt son discours d’adieu qui répand une lumière divine sur tout ce qui va arriver. Il peut enfin parler librement, même si, jusqu’à présent, ses disciples n’ont pas bien compris le sens de ses paroles. Les deux premières phrases qu’il prononce nous présentent un résumé merveilleux. Chacune présente deux grands faits.
L’heure était venue où le Fils de l’homme aurait dû être glorifié publiquement, comme les prophètes l’avaient dit. Au lieu de cela, il allait bientôt entrer dans la mort. Mais ce qui était merveilleux, c’est qu’il allait être glorifié dans cette mort même. Là, en effet, toute la perfection divine et humaine de sa personne allait être manifestée de façon éclatante. En relation avec cela, il y a le deuxième fait que Dieu est parfaitement glorifié en lui. Dans le premier homme et dans sa race, Dieu a été représenté de façon tout à fait fausse, et déshonoré. La parfaite révélation de Dieu est portée à son plus haut degré dans la mort du Seigneur Jésus ; son caractère et sa nature sont revendiqués et manifestés.
De plus, parce que Dieu a été glorifié, le Fils de l’Homme va être glorifié en Dieu lui-même. Christ est maintenant caché en Dieu, mais il est là comme « Celui qui est glorifié » (voir Colossiens 3:3). Le fait que le Fils de l’homme doive être glorifié de cette manière n’avait pas été révélé auparavant. Cette glorification donne donc une tournure inattendue aux événements ; de même la deuxième partie de ce verset montre que cette glorification cachée doit avoir lieu « tout de suite ». Il n’est pas nécessaire d’attendre le royaume visible pour qu’elle ait lieu ! Le don de l’Esprit, qui vient demeurer dans les croyants, découle de cette gloire actuelle et cachée. Par conséquent, il en découle aussi le privilège et la bénédiction qui sont la part de celui qui croit au Seigneur Jésus.
Pour que Christ soit glorifié de manière céleste et immédiate, les liens terrestres avec ses disciples devaient être rompus. À ce moment-là, ils ne pouvaient pas le suivre, en effet, dans sa nouvelle demeure. Pour la première fois, le Seigneur s’adresse à ses disciples comme à « ses enfants ». Il les considère comme ceux qui ont été introduits dans la famille de Dieu (voir 1:12). Il est remarquable de voir qu’une grande partie de la première épître de Jean est fondée sur les paroles du Seigneur rapportées au verset 34.
Nous entrons dans la famille de Dieu en étant nés de lui ; la vie même de cette famille est amour, car Dieu est amour. Le Seigneur montre clairement que, pendant qu’il est dans la gloire cachée du ciel, les enfants qu’il a laissés dans ce monde de ténèbres et de haine doivent montrer leur caractère de disciples en manifestant l’amour. La gloire là-haut dans le ciel, et l’amour, ici sur la terre, telle était la pensée divine. La première est parfaite, mais, hélas, combien le second est imparfait !
Cette séparation proche est une énigme et un chagrin pour les disciples. Pierre exprime ce qu’ils ne comprennent pas. Le Seigneur répond en affirmant que ni Pierre, ni les autres disciples ne pourront le suivre lorsqu’il passera par la mort pour entrer dans sa gloire de ressuscité. Ils y parviendront toutefois, à la fin. Pour Pierre, cette remarque avait un sens particulier (voir 21:18-19) ; mais elle a certainement une application pour chacun de nous. Jésus a tracé un chemin à travers la mort qui aboutit à la résurrection ; nous devons tous prendre ce chemin. Pierre, mécontent de l’affirmation du Seigneur, ne fait que montrer sa confiance insensée en lui-même. À cette heure solennelle, le disciple présomptueux et sûr de lui se découvre, tout comme l’a été le traître.
Jésus a prononcé une parole d’avertissement, mais elle est immédiatement suivie d’une parole de grâce infinie. Il savait bien que les disciples, malgré tous leurs manquements, l’aimaient véritablement et que la pensée de son départ les affligeait douloureusement. C’est ce qui explique les paroles du début de ce chapitre. Les disciples commençaient à pressentir qu’ils n’allaient plus voir le Seigneur, présent au milieu d’eux ; ce fardeau pesait sur leur cœur. Le Dieu invisible, pourtant, avait toujours été une réalité pour eux, le centre de leur foi. Ne pourrait-il pas en être de même de Christ ? En effet, il en serait de même. Comme centre de la foi, il serait une vivante et brillante réalité pour d’innombrables personnes, alors que, s’il restait comme il était, il ne pourrait être vu que par un petit nombre et à un seul endroit à la fois. Pour des cœurs troublés, le premier sujet de consolation est donc celui-ci : Christ est ressuscité comme vainqueur de la mort et il est le centre de la foi toute simple.
Le deuxième sujet de consolation est le fait qu’une place est préparée et assurée au ciel, dans les nombreuses demeures de la maison du Père. Or les disciples étaient des gens qui avaient tout investi dans leur conviction d’avoir trouvé le Messie, présent physiquement sur la terre. Ils avaient abandonné la position qu’ils avaient occupée ; si Jésus les quittait, à quoi bon avaient-ils tout laissé ? Comme ils l’apprennent ici, c’est pour une place de plus grande intimité, d’un rang plus élevé, qui est éternellement hors d’atteinte de la mort. Quel échange merveilleux ! Le temple terrestre avait été, pour le Seigneur, la maison de son Père (voir 2:16). Cette demeure est maintenant mise de côté ; c’est au ciel que se trouve la véritable « maison du Père », dans laquelle il va entrer. En elle, il y a plusieurs demeures, comme l’indiquaient les nombreuses chambres du temple terrestre qui en était la figure. La place des disciples, et la nôtre, va être préparée par son entrée au ciel. Il nous la garde comme étant notre précurseur (voir Hébreux 6:20).
Un jour doit donc venir où les croyants entreront dans le lieu qui est préparé pour eux. Nous trouvons donc un troisième sujet de consolation au verset 3. C’est la venue personnelle du Seigneur Jésus pour nous prendre auprès de lui, afin que nous puissions être avec lui dans la maison du Père. D’après l’Ancien Testament, les disciples auraient dû savoir qu’une venue personnelle de l’Éternel aurait lieu. On trouve, par exemple : « Ses pieds se tiendront, en ce jour-là, sur la montagne des Oliviers... Et l’Éternel, mon Dieu, viendra, et tous les saints avec toi » (Zacharie 14:4-5). Mais les disciples n’avaient pas compris que « l’Éternel » et « Jésus » étaient une seule et même personne. Ils ne connaissaient rien non plus de la venue du Seigneur pour prendre les croyants près de lui, car elle n’avait pas été annoncée. C’était une révélation tout aussi nouvelle que le fait que les croyants aient une place au ciel et que le Messie soit là comme le centre de la foi, au lieu d’être présent sur la terre, de manière visible.
Nous pouvons ajouter que le verset 1 nous présente en germe cette vie « par la foi au Fils de Dieu » dont parle Paul, en Galates 2:20. De la même manière, le verset 2 nous donne la vérité de l’appel céleste, exposée plus complètement en Éphésiens 1:3-6, Hébreux 2:9 ; 3:1. Le verset 3 nous annonce, pour la première fois, la venue du Seigneur pour chercher les siens. Leur enlèvement au ciel, dans sa présence, se trouve plus largement développé en 1 Thessaloniciens 4:14-18. Cette vérité apporte de la consolation aux cœurs troublés.
Jésus reconnaît que ses disciples savent où il va et qu’ils en connaissent le chemin. Thomas a un esprit matérialiste, qui le conduit à douter facilement. Son objection entraîne une des grandes déclarations du Seigneur. Jésus est le chemin qui mène au Père ; il est la vérité au sujet du Père et la vie qui donne la puissance pour pouvoir vraiment connaître le Père. Le Fils est le seul chemin pour aller au Père. Comme nous avons la vie déchue d’Adam, nous sommes incapables de le connaître ; une telle connaissance n’est possible que pour ceux qui participent à la vie de Christ. Plus nous méditerons ces paroles, plus nous comprendrons que Christ est suffisant pour tout ; ces paroles rendent hommage au fait que la plénitude de la Déité habite en Lui (voir Colossiens 1:19 ; 2:9).
La demande plaintive de Philippe révèle que lui aussi désirait qu’on lui montre le Père de façon palpable (v. 8). Il ne se trompait pas, mais il manquait de discernement pour voir ce qui avait été manifesté en Christ, la Parole devenue chair. Au début de sa première épître, Jean dit que la Parole avait pu, de ce fait, être « entendue, contemplée et touchée ». Le Père avait donc été parfaitement manifesté. Les paroles de Jésus étaient les paroles du Père ; ses œuvres étaient faites par le Père qui demeurait en lui. Le verset 17 fait allusion au fait que le Saint Esprit était avec les disciples, demeurant en Christ ; au verset 10, c’est le Père qui demeure en lui. Nos pensées sont donc ramenées à ce qui est écrit en Colossiens 1:19.
Les paroles et les œuvres du Seigneur confirment l’importante déclaration qu’il fait ici à deux reprises. Quant à son essence, sa vie et sa nature, Jésus était « dans le Père », comme aussi le Père était en lui ; en Jésus, il a été montré et manifesté. Les disciples doivent le croire simplement parce que le Seigneur l’affirme ; sinon ils doivent recevoir le témoignage de ses œuvres, qui le déclarent si clairement. De plus, le jour approchait où des œuvres semblables, ou même plus grandes, devaient être accomplies par les disciples, parce que Jésus s’en allait au Père (v. 12). Comme nous l’avons appris au chapitre 7, cela sous-entendait la venue du Saint Esprit. Ce jour-là, les disciples découvriraient qu’ils seraient en Christ et que Christ serait en eux (voir v. 20). Cela explique sans doute la possibilité d’accomplir ces « plus grandes œuvres ». Avant sa mort et sa résurrection, le Seigneur était « à l’étroit » (Luc 12:50) ; après leur accomplissement et le don de l’Esprit, Jésus pourrait agir librement par son moyen à travers ses disciples. Dans le ministère du Seigneur, il n’y a eu aucun jour où 3000 âmes se soient converties, comme à la Pentecôte ; son travail n’a pas non plus couvert l’immense territoire situé « depuis Jérusalem, et tout alentour, jusqu’en Illyrie » (Romains 15:19), comme l’a fait celui de l’apôtre Paul.
Aux versets 13 et 14, le Seigneur réconforte ses disciples en leur présentant la puissance de son nom. Il va les laisser pour qu’ils soient ses représentants. Si leurs requêtes sont vraiment faites en son nom, elles seront certainement exaucées. Il agirait lui-même en leur faveur, bien qu’étant absent. En agissant ainsi, son intention ne serait pas seulement de défendre ses propres intérêts, mais aussi de glorifier le Père. Ce but serait ainsi atteint dans le service du Seigneur Jésus ressuscité et glorifié, comme il l’avait été pendant les heures sombres de sa mort.
Sans doute le fait d’agir et de demander en son nom se rapporte spécialement aux apôtres ; mais cela s’applique aussi à nous tous. Souvenons-nous que nous n’avons le droit d’utiliser le nom de notre Maître qu’en ce qui concerne sa cause et ses intérêts. Si nous essayons de nous en servir simplement pour faire avancer nos désirs personnels, nous sommes coupables de ce que la loi de notre pays qualifie d’activité illégale ; c’est une faute qui est punie sévèrement. Bien entendu, la promesse ici s’applique seulement si la prière est faite sincèrement en son nom.
Jusqu’ici, nous avons eu devant nous cinq sujets particulièrement consolants. Ils ont été prévus pour que les cœurs affligés des disciples soient sûrs qu’ils auraient beaucoup d’avantages, même s’ils perdaient la présence du Seigneur Jésus au milieu d’eux. Récapitulons ces sujets d’encouragement ! Jésus leur serait toujours accessible, comme centre de leur foi. Il leur assurait une place dans la maison du Père. Jésus reviendrait, afin que les disciples puissent être au ciel avec lui. En attendant, le Père s’était fait pleinement connaître à eux, en lui. Ils devaient rester dans le monde comme les représentants du Seigneur, et l’autorité de son nom donnerait de la puissance à leurs prières. Nous arrivons maintenant à un sixième sujet qui apporte la même consolation.
La venue du Saint Esprit est promise avec certitude. Le Seigneur pense que les disciples l’aiment vraiment. L’amour vrai s’exprime toujours par l’obéissance. L’amour lui-même est la nature de Dieu. Cela semblait évident. S’appuyant sur cette certitude, Jésus, monté au ciel, priera le Père ; en réponse à sa requête, l’autre Consolateur viendra. Or le « consolateur » est quelqu’un qui se tient à côté d’une personne pour l’aider. C’est ce que Jésus lui-même avait été parmi ses disciples sur la terre ; il le serait encore, bien que séparé d’eux au ciel ; en effet le mot « avocat » a le même sens que le mot « consolateur » (1 Jean 2:1). L’Esprit remplira ce rôle pour nous, sur la terre ; une fois qu’il sera venu, il demeurera avec nous éternellement.
Le Consolateur est aussi l’Esprit de vérité. La grâce et la vérité « vinrent par Jésus-Christ » (1:17). Comme nous venons de le voir, l’Esprit est la vérité présentée de façon objective. L’Esprit de vérité va venir maintenant ; il demeurera dans les croyants et fera ainsi pénétrer en eux la vérité subjectivement. C’est pourquoi, au verset 2 de la deuxième épître de Jean, nous lisons que la vérité « demeure en nous », par l’Esprit, de même qu’elle « sera avec nous à jamais », en Christ. Le monde ne partage pas ces privilèges. Il n’a pas la nature divine et n’a pas une conduite caractérisée par l’obéissance ; c’est pourquoi il ne peut pas recevoir le Saint Esprit. Il ne le voit pas et ne le connaît pas, car il est occupé à des choses matérielles.
Tout ce que le Seigneur avait dit rassurait les disciples : ils n’étaient pas « abandonnés », ni « orphelins ». Il viendrait à eux, en effet, par le Consolateur ; sa présence serait donc une réalité pour leur cœur.
Le Consolateur, l’Esprit Saint, est donné au croyant comme sceau de son amour et de son obéissance. Nous ne pouvons donc éprouver la pleine bénédiction due au fait qu’il habite en nous que dans la mesure où notre obéissance est rendue parfaite. L’obéissance est le fruit de l’amour, et la preuve de son existence (v. 15). Le fruit de l’obéissance est une place particulière dans l’amour du Père et du Fils. Il y a en même temps une manifestation spéciale du Fils.
Elle doit entraîner une manifestation spéciale du Père, dans la mesure où nous ne le connaissons que révélé dans le Fils. La manifestation objective est parfaite, complète et durable. Par contre, la manifestation subjective à chacun de nous individuellement, par la puissance du Consolateur, dépend de notre degré d’obéissance et d’amour.
La question de Jude, au verset 22, est suscitée par le fait que les pensées des disciples étaient entièrement centrées sur la manifestation publique du Messie, telle qu’elle était annoncée dans l’Ancien Testament. Ils ne saisissent pas encore la manière dont Dieu agira désormais ; le Seigneur Jésus va être connu par la foi en la puissance du Saint Esprit. Le Seigneur répond en développant les paroles qu’il a prononcées auparavant. Il dit, maintenant, que le fait de garder sa parole est le fruit de l’amour. Il ne s’agit pas de « ses paroles », mais de « sa parole », au singulier ; c’est la vérité qu’il a apportée, envisagée dans sa totalité. Une telle obéissance, accompagnée d’amour, suscite l’appréciation et l’amour du Père ; le Père et le Fils font alors leur demeure chez le croyant, sans aucun doute par le moyen du Saint Esprit qui demeure en celui qui croit ; ces grandes déclarations sont développées dans la partie du discours consacrée au Consolateur. Ainsi les mots du Seigneur Jésus, par lesquels sa parole nous est transmise, deviennent le test de notre amour. Ils nous conduisent à la parole du Père, qui a envoyé le Fils. Si nous méprisons ses paroles, nos démonstrations d’amour à son égard s’avèrent vaines et fausses.
Cela nous conduit à un autre rôle du Consolateur. Comme il est « l’Esprit de vérité », il est celui qui enseigne les disciples. Notons le contraste existant entre les deux expressions : « ces choses » et « toutes choses » (v. 25 et 26). De la mort du Seigneur Jésus découleront sa glorification et le don du Saint Esprit ; cela permettra une révélation plus profonde de la vérité divine. Le Consolateur fera connaître et enseignera avec puissance, aux disciples, toutes les choses appartenant au domaine de la révélation. Christ, présent comme un homme parmi eux, leur avait fait connaître beaucoup de choses ; quand l’Esprit viendra, tout leur sera révélé. Nous trouvons ici, à l’égard de la révélation et de l’enseignement la promesse du même développement, grâce à la venue du Saint Esprit, qu’au verset 12, à l’égard des œuvres. De plus l’Esprit leur rappellera toutes les choses qu’ils ont entendues de Christ.
Nous avons maintenant la joie de voir que ces choses se sont réalisées à la lettre. Les quatre évangiles ont été écrits comme fruit de ce que le Seigneur a dit, le Saint Esprit rappelant ses paroles à la mémoire des apôtres. Les épîtres, par contre, sont le fruit des enseignements supplémentaires, et plus nouveaux, de l’Esprit ; elles répandent la pleine lumière de la foi chrétienne et des conseils de Dieu.
Nous avons déjà remarqué que la venue du Consolateur constituait le sixième sujet de consolation donné par Jésus à ses disciples. Nous découvrons maintenant le septième, le dernier dans ce chapitre ; c’est : la paix. En partant, Jésus leur laisse la paix, léguée comme résultat de son œuvre expiatoire. De plus, il leur donne cette paix qu’il nomme spécialement la sienne ; c’est la paix liée à sa confiance parfaite dans le Père, parce qu’il le connaît et est soumis à sa volonté. Tout ce qu’il donne provient de sa propre plénitude et cela les unit à lui-même ; ce n’est pas selon la pauvre mesure de ce monde.
Ayant ainsi exposé aux disciples ces grands sujets d’encouragement, le Seigneur termine par la même note qu’au début : « Que votre cœur ne soit pas troublé, ni craintif ! ». C’est exactement la même parole qui nous parvient, lorsque nous nous trouvons face aux difficultés actuelles.
Mais les disciples allaient connaître non seulement la paix, mais aussi la joie. C’est ce qu’ils ont éprouvé après le don du Saint Esprit ; ils l’ont expérimenté même avant (Luc 24:52). Les disciples se rendaient compte que Jésus s’en allait et ils devaient pourtant comprendre qu’il venait à eux par l’arrivée du Consolateur. Il y avait pourtant quelque chose de plus ! Jésus s’en allait au Père pour entrer, de ce fait, dans tout ce que cela comportait : approbation infinie et gloire dans l’amour du Père. Ce serait une très grande joie pour lui ; puisque les disciples l’aimaient, ce serait également une joie pour eux. N’avons-nous pas aussi connu cette joie ? La pensée de sa joie n’est-elle pas parmi les plus profondes de nos joies ?
Les derniers mots de ce verset, « mon Père est plus grand que moi », ont troublé certaines personnes. Mais ici, c’est le Verbe, la Parole faite chair, qui parle ; il parle dans sa condition d’homme humble sur la terre. C’est pour cette raison que, en ce qui concerne sa position ou son rang, le Père est plus grand que lui ; en ce qui concerne son être et sa nature, lui et le Père sont un.
Les paroles du Seigneur, au verset 29, apportent beaucoup de lumière sur tout le contenu de ce chapitre. Ce dont il a parlé n’est pas encore arrivé, car son œuvre de rédemption doit d’abord s’accomplir. Quand elle sera terminée, ces événements se produiront. Jésus le dit aux disciples maintenant afin que, dans les jours qui suivront, ils puissent croire. Le Seigneur indique par là que nous sommes dans une période où la foi est de toute importance. L’époque d’Israël a été caractérisée par des choses visibles et palpables. Toutes les vérités dont Jésus venait de parler aux disciples doivent être saisies par la foi et non par la vue. La paix et la joie pénètrent, toutes deux, dans notre cœur par la foi.
Ainsi, maintenant nous voyons que Paul parle de « toute joie et paix en croyant,... par la puissance de l’Esprit saint » (Romains 15:13). Pierre nous dit aussi : « Croyant en lui, quoique maintenant vous ne le voyiez pas, vous vous réjouissez d’une joie ineffable et glorieuse » (1 Pierre 1:8).
Le Seigneur montre ensuite que ses entretiens avec les disciples s’achèvent. L’accomplissement complet de l’œuvre que le Père a commandée se trouve maintenant devant lui. Avant que ce but soit pleinement atteint, Satan, le prince de ce monde, revient, exerçant le pouvoir des ténèbres ; mais il ne trouvera aucun point sur lequel il pourrait attaquer le Seigneur. Satan n’a rien en Christ, parce que le Père a tout ; c’est-à-dire tout son amour et toute son obéissance. Le diable rencontre, non pas l’homme dans un état d’innocence, comme Adam en Eden, mais l’Homme dans un état de sainteté et de justice absolues et, en même temps, la Parole qui est Dieu. Nous trouvons ici la réalité de ce que représente le serviteur hébreu, décrit en Exode 21:2-6 : « j’aime le Père » ; cette expression équivaut à : « j’aime mon maître..., je ne veux pas sortir libre ». De même, en Jean 13:1, nous avons la déclaration de l’amour du Seigneur Jésus pour ceux qui sont symbolisés par « la femme et les enfants », dans l’image du chapitre 21 du livre de l’Exode.
Il semblerait que les mots : « Levez-vous, partons d’ici ! » indiquent que Jésus et les disciples quittent la chambre haute et que le contenu des deux chapitres suivants ait été prononcé sur le chemin de Gethsémané. Le changement de position correspond à un changement de thème.
Dans ce chapitre, Jésus considère ses disciples comme étant dans le monde, avec le privilège et la responsabilité qui s’y rattachent. Il ne les voit plus, comme au chapitre 14, à leur nouvelle place et dans leur nouvelle condition devant le Père. De même qu’il leur a donné sa place devant le Père au chapitre précédent, ils sont maintenant identifiés à lui, dans sa place devant le monde. Il est le vrai cep ; eux sont les sarments.
En parlant de lui-même comme du cep, le Seigneur emploie une image appliquée à Israël dans l’Ancien Testament (Psaume 80:8-18 ; Ésaïe 5:1-7). Dans le Psaume, la ruine du cep est prononcée, mais il est question du « provin » (le sarment) et du « fils de l’homme que tu as fortifié pour toi ». Dans le livre d’Ésaïe, la raison de la ruine nous est clairement donnée. Israël, comme cep, n’a rien produit sinon des raisins sauvages, sans valeur. Il n’y a pas eu de fruit pour Dieu. Jésus lui-même est le sarment fortifié pour l’Éternel ; il se présente maintenant comme la vraie source de tout fruit pour Dieu sur la terre.
Jésus est le cep, ses disciples sont les sarments, son père est le cultivateur. Chaque sarment qui tire de lui sa vie, porte du fruit. Il peut y avoir des sarments, en Jésus, qui n’ont pas un lien de vie avec lui ; ceux-là ne portent pas de fruit. L’activité du cultivateur s’exerce dans chaque cas. Quand le sarment porte du fruit, il le nettoie, afin qu’il porte plus de fruit. Quand il n’y a pas de fruit produit, il ôte le sarment qui est finalement détruit (voir v. 6). Judas Iscariote vient de nous donner un triste exemple de cette dernière catégorie.
Le verbe utilisé au verset 2 est « nettoyer », et non « tailler ». Le Père purifie le croyant qui porte du fruit, bien que celui-ci soit déjà net, à cause de l’action de la Parole. Le Seigneur a parlé d’un double lavage au chapitre 13 (v. 10-14). Nous rencontrons ici la même pensée. Lorsque le sarment est nettoyé (lavé) par l’action du Père, des obstacles sont ôtés et la vie du cep coule plus librement en lui ; il produit donc plus de fruit. La preuve la plus sûre que nous sommes en Christ est que nous demeurons en Christ ; la preuve la plus sûre que nous demeurons en Christ est que nous produisons du fruit, dans la vie et le service. Le véritable caractère et les voies de Christ se manifestent en nous. Séparés de lui, nous ne pouvons rien faire. Si nous demeurons en lui, il y a beaucoup de fruit ; nous sommes en communion de pensée avec lui, si bien que nous demandons librement et que nos désirs sont exaucés ; le Père est glorifié et il est prouvé, de manière indiscutable, que nous sommes de vrais disciples.
C’est un grand privilège, aussi bien qu’une grande responsabilité, d’être laissés sur la terre pour porter du fruit ; c’est un privilège encore plus grand de savoir que nous sommes, nous-mêmes, les objets de l’amour divin.
L’amour de Jésus reposait sur ces disciples (il repose aussi sur nous), tout comme l’amour du Père repose sur lui. Nous avons à demeurer dans la connaissance, la conscience et la jouissance de son amour. Pour réaliser cela, il faut obéir à ses commandements. Nous savons très bien qu’au moment où nous désobéissons à sa parole clairement exprimée, notre conscience nous tourmente, nous ne sommes plus en communion avec sa pensée et nous ne jouissons plus de son amour. Si nous nous conduisons avec obéissance, nous demeurons dans son amour, nous entrons dans sa joie et notre propre joie est complète.
Le verset 12 semble étroitement lié au verset 10. Jésus a parlé de garder ses commandements, en général ; il y a, cependant, un commandement qu’il a déjà signalé d’une façon particulière (13:34), il y revient de nouveau. L’amour doit abonder entre les disciples, selon le caractère de l’amour parfait de Jésus à leur égard. L’amour qui découle de la possession de la nature divine doit circuler au sein de la famille de Dieu. La chair est en chacun de nous et les divergences entre les croyants sont innombrables, d’où les multiples occasions de conflits et de torts. Le commandement du Seigneur est que l’amour de la nature divine triomphe sur les conflits de notre nature charnelle. Comment avons-nous obéi à ce commandement ? Notre défaillance à cet égard explique pourquoi nous demeurons si peu dans son amour et pourquoi sa joie demeure si peu en nous. Cela signifie aussi que nous sommes de piètres disciples et que nous glorifions bien peu le Père.
L’amour humain a ses limites (v. 13). Le Seigneur enseigne ses disciples à se considérer les uns les autres comme des amis parce qu’ils sont tous, individuellement, ses propres amis. Ils sont, en effet, caractérisés par l’obéissance à ses commandements. Jésus s’en allait pour laisser sa vie pour eux, mais il s’est trouvé en lui un amour qui surpassait de beaucoup tout ce qui était connu parmi les hommes. C’est son amour, non pas un amour simplement humain, qui allait imprimer son caractère sur l’amour mutuel des disciples.
Dès qu’ils ont été liés à Jésus, les disciples ont été ses serviteurs. Le Seigneur indique qu’il les considère, désormais, comme ayant une position plus élevée, celle d’amis. Cette amitié est bien réelle, dans la mesure où il leur a fait connaître tout ce qu’il a entendu de son Père. C’est lui qui révèle l’amour et les propos de son Père. Le Seigneur, en disant cela, pense à la venue du Consolateur. Comme il le leur a déjà dit, le Saint Esprit leur donnera la capacité de discerner ces vérités. Tous les croyants ont aujourd’hui accès à cette place privilégiée sur le même fondement simple de l’amour et de l’obéissance. C’est de là que vient le terme d’amis (3 Jean 15). À la fin du premier siècle, s’accomplit la prophétie de Paul concernant des hommes qui prononceraient des paroles perverses, « pour attirer les disciples après eux » (Actes 20:30). Diotrèphe en est un exemple. Cependant il y a des croyants marqués par l’amour et l’obéissance (en contraste éclatant avec Diotrèphe) et reconnus comme « amis ». Certains se trouvent avec Jean, se joignant à la salutation ; d’autres avec Gaïus, et ils sont salués chacun par leur nom.
Bien que Jésus donne ainsi une place très élevée à ses disciples, il a toujours la prééminence absolue parmi eux. Ils sont ses amis, mais c’est entièrement son choix, et non le leur. Ses droits souverains demeurent intacts. Ils sont choisis comme des amis et désignés pour porter un fruit qui demeurera, en contraste avec le monde où ils se trouvent, qui passe. Il y a, ensuite, un autre résultat heureux. Comme amis et porteurs de fruits, les disciples auront accès au Père, au nom du Fils, et ils ont la certitude d’une réponse favorable. On peut penser que l’expression : « tout ce que vous demanderez... en mon nom » a une grande portée. Certainement, mais rappelons-nous que ceux qui demandent sont « des amis », auxquels a été révélé tout ce qui se rattache au Père. Cela concerne le nom et la gloire du Fils. Les disciples étant en communion de cœur avec le Seigneur, il est évident que chaque demande sera en accord avec le propos du Père ; la réponse sera donc certaine.
Comme pour rappeler le lien très étroit entre ces vérités et l’amour entre les disciples, le Seigneur répète son commandement de s’aimer les uns les autres (v. 17). Le Seigneur savait d’avance combien cette parole serait nécessaire tout au long de l’histoire de son peuple. Il donne donc ce commandement trois fois dans ces dernières paroles, prononcées avant qu’il souffre.
Le commandement de notre Seigneur, que l’amour soit manifesté comme étant le lien entre ses disciples, devient plus important à cause de la haine du monde. L’amour circulant à l’intérieur et la haine harcelant de l’extérieur, telle est la situation envisagée comme résultat de son rejet et de sa mort. Méditons cela car, au fil des siècles, la tendance a été de renverser la situation. Alors que le cœur des croyants s’est laissé entraîner à aimer le monde extérieur et à solliciter ses faveurs, la froideur, la destruction et même la haine ont trouvé place à l’intérieur.
L’amour et la haine naissent, tous deux, de la relation intime qui existe entre les disciples et leur Seigneur. Nous avons déjà vu cela à propos de l’amour, nous le voyons ici, de nouveau, à propos de la haine. Le monde a haï Christ bien avant de haïr les disciples ; il les haïssait parce qu’ils avaient été choisis du milieu du monde et que, par conséquent, ils n’étaient pas du monde. Au moment où le Seigneur parle, la haine n’a été manifestée que par les Juifs, auxquels il s’est présenté lui-même. Jésus est considéré comme rejeté depuis le début de cet évangile ; par conséquent, les Juifs sont envisagés comme ayant perdu leur place de peuple privilégié. Un homme tel que Nicodème, avec tous ses privilèges, a besoin de naître de nouveau comme un misérable étranger. C’est pour cette raison que les Juifs sont ici identifiés au monde ; les distinctions antérieures sont balayées par la présence de Christ rejeté.
De plus, la haine engendre la persécution (v. 20). Les serviteurs doivent s’attendre à être traités comme leur maître. En définitive, tout est à rattacher au fait que le monde ignore Dieu et qu’il le hait quand il le voit révélé parfaitement en Christ. Cette révélation met tout en lumière. Le Seigneur parle de ses paroles (v. 22) et de ses œuvres (v. 24) ; toutes les deux mettent en évidence le péché des Juifs, d’une manière qui rend vaines toute question et toute excuse. En voyant le Fils, ils ont vu le Père ; en haïssant le Fils, ils ont haï le Père, et cela sans cause, comme l’Écriture l’avait annoncé.
Cependant il reste encore un témoignage, celui du Consolateur. Il complètera le témoignage puisqu’il est l’Esprit de vérité, envoyé par Jésus glorifié et venant néanmoins du Père. Le Fils, devenu homme sur la terre, avait révélé le Père, et son témoignage avait été refusé. Cependant le témoignage serait encore maintenu par le Consolateur. Venu d’auprès du Père, le Saint Esprit rendra témoignage au Fils, monté au ciel ; il maintiendra ainsi la révélation que Jésus avait faite. Ils peuvent rejeter le Fils : c’est ce qu’ils ont fait par la Croix. Mais quelqu’un va venir, et ils ne pourront pas le chasser ainsi ; un témoignage permanent sera assuré. Le témoignage de l’Esprit est le dernier à être rendu. Cela explique l’extrême gravité du péché contre le Saint Esprit, le fait d’outrager l’Esprit de grâce.
Le verset 27 parle du témoignage qui doit être rendu par les apôtres ; il le distingue du témoignage du Consolateur. Ils ont témoigné de tout ce qu’ils avaient vu et entendu « dès le commencement ». C’est ce que nous trouvons au début de la première épître de Jean, dans laquelle le poids et la valeur de ce témoignage nous sont révélés. Ils ont aussi été désignés comme témoins de la résurrection du Seigneur Jésus. Le témoignage qu’ils ont rendu aux grands événements et aux grandes vérités, sur lesquels tout est fondé, est d’une extrême importance. Cependant un enseignement supplémentaire était nécessaire. Il va être donné par le témoignage nouveau de l’Esprit de vérité, rapporté dans le livre des Actes. En premier lieu, il est rendu particulièrement par Etienne. Il est ensuite donné par le très grand persécuteur converti, Saul de Tarse, devenu l’apôtre Paul. La différence entre le témoignage des apôtres et celui du Saint Esprit est celle-ci : le premier a porté sur les grands événements de la vie, de la mort, de la résurrection et de l’ascension de Christ ; le deuxième va concerner la signification de ces événements, leur portée et tout le dessein de Dieu fondé sur eux.
Quelques avertissements supplémentaires suivent dans les premiers versets du chapitre ; pour éviter que, n’étant pas préparés à la persécution, les disciples ne trébuchent. Nous trouvons un commentaire des versets 2 et 3 dans les passages suivants : Actes 8:3 ; 9:1-2:1 Timothée 1:13. Saul de Tarse persécutait jusqu’à la mort « ceux qui étaient de la voie » ; il le faisait par ignorance, par incrédulité. Certainement il ne connaissait, à ce moment-là, ni le Père ni le Fils.
Jésus s’en va vers celui qui l’a envoyé ; les disciples ressentent suffisamment la perte qu’ils vont subir, pour être remplis de tristesse. Ils verraient les événements sous un autre éclairage s’ils cherchaient davantage à savoir où allait le Seigneur, et ce qu’entraînerait sa présence auprès du Père. Son départ va leur être profitable. Ils vont subir une perte, évidemment, mais il y aura aussi un gain qui la compensera. C’est une déclaration étonnante ! Cependant le Seigneur continue à insister sur cette vérité. Il dévoile encore les bienfaits qui découleront de la venue du Consolateur, venue qui dépendait du départ de Jésus au ciel. Il parle premièrement de ce que l’arrivée du Saint Esprit signifiera pour eux.
Par sa présence et son activité mêmes, l’Esprit sera sur la terre un témoignage permanent devant le monde. Le verbe « convaincre » (ou confondre) ne signifie pas : « faire naître dans le monde une conviction telle qu’il se convertira », mais plutôt, que la venue du Saint Esprit mettra tellement en évidence ces trois grandes réalités : le péché, la justice et le jugement, qu’elle laissera le monde sans excuse. Le Saint Esprit vient ; c’est la conséquence immédiate du départ au ciel de Jésus, celui que le monde incrédule a chassé. La bonté parfaite, personnifiée dans le Fils de Dieu, avait été devant leurs yeux et elle avait été entièrement rejetée. Quel péché que celui-ci, une terrible erreur de jugement ! Le péché a été mis en évidence par la présence du Consolateur, venu parce que le Seigneur Jésus s’en était allé.
Mais Jésus a traversé la mort et la résurrection ; par son ascension, il est entré dans la gloire du Père. La justice divine est ainsi revendiquée et manifestée. Le sujet ici n’est pas le pardon des péchés et notre justification, comme au chapitre 3 de l’épître aux Romains ; c’est l’établissement de la justice aux yeux de tous, dans toutes les sphères touchées et corrompues par le péché. La mort de Christ était l’acte suprême de l’injustice du monde ; sa glorification est l’acte suprême de la justice divine et la garantie que la justice finira par s’imposer en tous lieux. C’est ce que dit Paul, en Actes 17:31. Or l’Esprit est venu de la part de Christ glorifié, témoin permanent de ces choses. Mettre simplement le péché en évidence n’aurait pas suffi : son opposé, la justice, qui finira par abolir le péché, doit aussi être manifesté.
La troisième réalité, le jugement, est la conséquence normale de ce qui précède. Si le péché de l’homme est réglé selon la justice divine, le jugement ne peut être évité. Paul discourait devant Félix du « jugement à venir », et le gouverneur romain tremblait, mais le sujet de notre passage est plutôt le fait que le prince de ce monde a été jugé à cause de son attitude envers Christ et par la puissance de la croix. Au chapitre 12, Jésus avait parlé du jugement du monde et du rejet de son prince. Ces faits solennels sont établis par la présence du Saint Esprit. Si le prince, le chef du monde, est jugé, le monde qu’il dirige est, lui aussi, jugé. Satan est encore appelé « le dieu de ce siècle » (2 Corinthiens 4:4), puisque les hommes l’adorent sans le savoir, en se tournant vers toutes leurs idoles. Il est « le prince » en tant qu’auteur et chef des grandes intrigues du monde.
Le fait que le Consolateur soit venu et ait mis cela en évidence, nous est maintenant utile et profitable. Voir le diable sous son vrai jour, le monde tel qu’il est en réalité, voir l’opposition entre le péché et la justice mise en évidence, sont des sujets de la plus haute importance. Le témoignage est, en fait, rendu contre le monde, mais il est aussi donné pour notre profit et notre instruction. S’il avait retenu davantage notre attention et celle de l’Église, au cours de son histoire, nous nous serions gardés beaucoup plus purs du monde que nous ne l’avons fait. Les mots très forts que nous lisons en Jacques 4:4 se comprennent beaucoup plus facilement à la lumière de ces paroles du Seigneur.
Dans les versets 13 à 15, ce ministère de l’Esprit est particulièrement utile. Il semble se classer sous trois titres : « Il vous conduira... Il vous l’annoncera... Il me glorifiera ».
L’esprit va conduire les disciples dans toute la vérité. Dans le verset précédent, le Seigneur a indiqué qu’il a encore beaucoup de choses à leur révéler, mais qu’ils ne sont pas encore en état de les recevoir. Nous trouvons dans la première épître de Jean (2:20, 27) que les croyants peuvent comprendre seulement quand ils ont reçu l’onction de l’Esprit. Après la venue de l’Esprit de vérité, le Seigneur a transmis par son moyen tout ce qu’il avait encore à dire ; toute la vérité a été ainsi révélée. L’Esprit a guidé les disciples dans cette révélation. Les apôtres sont sans doute plus particulièrement en vue ici, mais les épîtres ont été écrites pour nous « conduire dans la vérité ». Les croyants de toutes les époques, et de la nôtre, ont pu ainsi entrer dans la connaissance de toute la vérité. Est-ce que nous nous sommes consacrés à ces choses, pour qu’elles nous guident ?
L’Esprit doit ensuite montrer aux disciples « ce qui va arriver ». Le livre de l’Apocalypse et certains passages des épîtres ont été écrits comme résultat de ce ministère envers les apôtres. Aujourd’hui nous pouvons en bénéficier nous-mêmes. Les écrits prophétiques nous font connaître ce qui devait arriver, à la fois dans l’Église et dans le monde. Nous ne sommes donc pas dans l’obscurité, bien que le rejet et l’absence de Christ aient introduit une période de l’histoire du monde caractérisée par « la nuit ».
Enfin, la mission du Consolateur est de glorifier Christ qui a été déshonoré par le monde. Il le fait en nous annonçant ce qui appartient à Christ, afin que nous découvrions que tout ce qu’a le Père, est aussi au Fils. Ne mésestimons pas l’extraordinaire portée de cette grande déclaration ! Nous avons déjà entendu deux fois que le Père a mis toutes choses entre ses mains (3:35 ; 13:3). Cela pourrait, cependant, être interprété comme le fait que toute administration lui a été confiée ; c’est ce qui s’est produit pour Joseph, en Égypte, avec ce qui appartenait au Pharaon. Il y a, en fait, un enseignement beaucoup plus profond. Tout ce qu’a le Père, est au Fils ! C’est Jésus qui le dit, sur la terre, dans son chemin d’humiliation. Ce mot « est » se trouve en dehors du temps : il suggère quelque chose d’éternel. Ce qui était au Père, a toujours été au Fils ; c’est encore vrai et cela le sera toujours. Celui qui parle ainsi (v. 15) proclame qu’il est Dieu, Un avec le Père dans l’unité de la Divinité. Le Fils est glorifié, en effet, lorsque cette vérité est reconnue grâce au ministère du Consolateur.
À première vue, la transition entre les versets 15 et 16 n’est pas évidente. Le Seigneur reprend l’idée que son départ sera profitable aux disciples parce qu’il implique la venue du Consolateur. Bientôt ils ne verront plus Jésus, puis « encore un peu de temps » et ils le verront. Mais ce moment où ils le reverront ne peut exister que « parce qu’il s’en va au Père » ; car, alors, l’Esprit sera donné. Dans cette déclaration remarquable, le Seigneur emploie deux mots différents. Le premier terme signifie contempler, ou regarder comme un spectateur ; le second veut dire percevoir ou discerner. « Un peu de temps » et ils ne le verront plus ; ils ne contempleront plus sa marche et ses œuvres. Il s’écoulera encore « un peu de temps » et, ayant reçu le Saint Esprit, ils verront Jésus d’une façon nouvelle ; ils le discerneront par la foi, avec l’œil intérieur de leur cœur rempli de l’Esprit. Ils le verront dans une mesure inconnue auparavant. Béni soit Dieu de ce que nous pouvons dire aussi : « Nous voyons Jésus... couronné de gloire et d’honneur » (Hébreux 2:9).
À ce moment-là, la parole du Seigneur était obscure pour les disciples ; une explication supplémentaire est donc donnée. Le monde allait atteindre son but, en ce qui concernait Jésus ; sa mort était imminente. Le monde se réjouirait d’être débarrassé de lui ; pour les disciples il y avait, par contre, la perspective de pleurs et de lamentations. Toutefois, au-delà de la mort, il y avait sa résurrection et son ascension vers le Père. Ceci bouleverserait tout. Les douleurs de l’enfantement illustrent cela et mettent en relief l’idée de la joie qui survient après la tristesse, mais aussi celle de l’apparition d’une vie nouvelle. Or la tristesse des disciples ne faisait que refléter celle du Seigneur ; elle était si profonde, et d’une nature telle, qu’elle est appelée : « le travail de son âme » (Ésaïe 53:11). Par contre, Ésaïe 53:10 annonce à l’avance « qu’il verra une semence » ; cela aura lieu évidemment dans la résurrection et dans la gloire. Les disciples ne pouvaient pas partager ses souffrances expiatoires ; toutefois, dans une faible mesure, ils partageaient sa tristesse, mais probablement d’une manière très égoïste. Ils devaient bientôt partager réellement sa joie.
Le contexte du verset 22 semble indiquer que le Seigneur fait allusion au bonheur qui remplira les disciples quand ils le rencontreront après sa résurrection. Il évoque aussi leur joie lorsqu’ils connaîtront sa gloire, grâce au don du Saint Esprit. C’est encore plus net dans le verset 23. L’expression « en ce jour-là » n’indique pas seulement les quarante jours pendant lesquels les disciples ont vu le Seigneur, avant la Pentecôte, mais plutôt toute la période de son absence et de la présence personnelle de l’Esprit dans l’Église. Ce « jour » n’est pas encore terminé ; c’est encore notre privilège de prier par le Saint Esprit, et donc de demander au Père, au nom du Fils.
Le mot « demander » se trouve deux fois dans ce verset. En réalité, le Seigneur utilise deux mots différents. On peut les différencier en utilisant « interroger » ou « s’informer », pour le premier terme, et « demander » ou « supplier », pour le deuxième. Le Seigneur avait répondu à toutes leurs questions et ils étaient venus à lui avec toutes leurs demandes d’information. Maintenant cette période se terminait. Mais il leur a révélé le Père ; cette révélation produira son effet en eux, dès que l’Esprit sera donné. Ils recevront de la puissance pour prendre leur place de représentants du Fils, et donc pour demander en son nom. Leurs prières seront exaucées s’ils demandent en étant dirigés par l’Esprit, car elles seront selon la pensée du Père. Des exemples frappants de prières semblables nous sont donnés dans la dernière partie du chapitre 4 des Actes et au chapitre 12. Ceci est aussi illustré par la prière d’Etienne mourant (Actes 7:60). La conversion de l’homme qui, comme un mauvais génie, préside au martyre de ce croyant, est une réponse à la demande exprimée dans la prière : « Seigneur, ne leur impute point ce péché ».
La pensée dominante du verset 25 est toujours le changement qui sera introduit par la venue du Consolateur. Elle aura des conséquences sur la façon même dont va être présentée la vérité concernant le Père. Jésus l’a fait connaître en accomplissant ses œuvres. Tous les miracles ou « signes » présentés dans cet évangile, sous la forme de paraboles ou d’allégories, ont été un exposé de la grâce, de la puissance et de la gloire du Père. Dans les épîtres, nous lisons des déclarations claires à son sujet et concernant son propos, sa gloire et son amour ; elles ont été données par l’inspiration du Saint Esprit. Tout cela est arrivé le jour dont le Seigneur avait parlé, quand les disciples ont eu la possibilité de demander en toute liberté en son nom, connaissant l’amour du Père.
Les paroles de la dernière partie du verset 26 ne sont pas en contradiction avec le fait que Jésus est notre intercesseur au ciel. Elles soulignent seulement l’amour du Père pour les croyants et la place d’intimité qu’ils ont en sa présence. Le verset 27 montre l’attitude des disciples envers Jésus ; elle est faite d’amour et de foi. Avons-nous cette attitude ? Nous aussi, nous serons alors placés sous la bénédiction de l’amour du Père. Nous avons besoin de l’intercession pleine de grâce de Christ, car nous sommes faibles et nous avons souvent des défaillances, mais nous sommes cependant dans une place d’amour et de faveur auprès du Père ; nous n’avons pas besoin d’intercession pour l’occuper. Même si certaines personnes peuvent penser qu’elle est nécessaire, Dieu en soit béni, ce n’est absolument pas le cas !
Les disciples croyaient que Jésus était venu de Dieu, mais ils avaient toujours du mal à saisir la pensée qu’il était venu d’auprès du Père ; ils n’avaient pas encore réalisé, comme le montrent leurs paroles, que leur intelligence était limitée. Tant que l’Esprit n’a pas été donné, ils sont limités dans leur compréhension (voir v. 31), leur puissance et leur courage (voir v. 32). Ces mêmes hommes qui ont ici l’esprit confus et qui, peu après, seront dispersés et s’enfuiront, vont se rassembler le jour de la Pentecôte avec un esprit clair et un cœur courageux comme celui d’un lion. Intelligence et courage : ces deux qualités devraient nous caractériser aujourd’hui. Est-ce qu’il en est ainsi ?
Le Seigneur n’a aucun soutien de la part de ses disciples pour l’heure sombre qui est devant lui ; il peut cependant avancer dans une parfaite dépendance du Père et avec la certitude de sa présence constante. Jésus affronte donc la haine et l’opposition du monde avec une paix parfaite et il en sort totalement vainqueur. Le Seigneur explique qu’il a communiqué tout cela à ses disciples afin qu’à leur tour ils aient la paix en lui, comme lui-même possède la paix dans le Père. De plus, son triomphe sur le monde est la preuve qu’une puissance victorieuse est aussi à la disposition des disciples. Il vient de parler de la haine et de la persécution du monde. Il se peut que ses séductions et ses sourires soient plus dangereux pour nous. Mais, quoi qu’il en soit, notre sécurité repose sur Christ. C’est seulement en étant nés de Dieu et en croyant que Jésus est le Fils de Dieu que nous sommes victorieux du monde (1 Jean 5:4, 5).
Souvenons-nous des six derniers mots du chapitre précédent, lorsque nous lisons le premier verset. Celui qui avait vaincu le monde « leva ses yeux au ciel, et dit : Père, l’heure est venue : glorifie ton Fils... ». Quand on connaît le Père et la lumière du ciel, quelle est la valeur du monde ? Quelle est l’importance de ses menaces ou de ses persécutions ? Le Fils de Dieu lui-même est ici, jouissant pleinement de cette connaissance et de cette lumière ; il a donc, en quelque sorte, le monde sous ses pieds. Il va se présenter maintenant devant le Père ; il va aussi lui présenter ses disciples afin qu’ils soient gardés du monde qu’ils vont traverser. Ils ont été engendrés par Dieu ; ils connaissent Jésus comme le Fils de Dieu qui a révélé le Père. Quand l’écrivain Bunyan, dans « Le Voyage du Pèlerin », décrit un homme avec une couronne de gloire « devant les yeux », il place très justement le monde « derrière son dos ».
Au verset 4 du chapitre suivant, l’évangéliste témoigne que Jésus savait « toutes les choses qui devaient lui arriver ». Ici, Jésus s’adresse au Père ; il est conscient que l’heure pour laquelle il est avant tout venu dans le monde, est arrivée. Dans ce chapitre incomparable, nous pouvons entendre le Fils s’entretenir avec le Père. Nous sommes transportés ainsi dans cette atmosphère divine ; nous voyons sa grande œuvre achevée et nous passons, en esprit, au-delà de la croix. Ce sont des mots qui défient toutes les capacités de l’analyse humaine et qui dépassent toutes les facultés de la pensée. Nous pouvons toutefois les considérer tout au long des versets, en relevant les requêtes que Jésus a faites au Père et les déclarations concernant ce qu’il a déjà accompli.
Sa première demande est : « Père,... glorifie ton Fils ». Le Fils a été serviteur, sur la terre, pour le plaisir et la gloire du Père. À maintes reprises, cet évangile en a rendu spécialement témoignage. Conformément à cela, la première demande du Seigneur Jésus est de pouvoir encore servir et glorifier le Père, non plus dans l’humiliation, sur la terre, mais parmi les splendeurs du ciel. Il le fera en exerçant l’autorité sur toute chair, qui lui est accordée d’une manière particulièrement merveilleuse. Il déploiera bientôt cette autorité sur tout homme, en exécutant le jugement ; il l’exerce déjà en accordant la vie éternelle à tous ceux que le Père lui a donnés. Jésus est la source et la fontaine de cette vie pour les hommes. Nous avons la vie et nous recevons l’Esprit de la part de l’Homme glorifié. Le Père est glorifié en cela d’une manière qui surpasse la gloire solennelle qui sera la sienne à l’heure du jugement.
Or toute vie est marquée par les conditions qui l’entourent, par son environnement. La vie éternelle peut être vécue uniquement dans la connaissance du seul vrai Dieu, comme Père, et de Jésus Christ, l’envoyé du Père. C’est sans aucun doute ce qui explique que la vie qui dure éternellement n’est mentionnée que deux fois dans l’Ancien Testament. Dans ces deux cas, c’est simplement une allusion prophétique à ce qui sera goûté durant le millénium. C’était une promesse, plutôt qu’une bénédiction connue et éprouvée. La loi offrait la vie sur la terre. Le siècle de la vie éternelle a commencé quand le Fils de Dieu est apparu et a été glorifié dans le ciel, ayant achevé son œuvre sur la terre.
Dix fois, dans ce chapitre, Jésus prononce l’expression : « J’ai... » ; il proclame ainsi la plénitude de tout ce qu’il a accompli. Les deux premières fois se trouvent au verset 4 ; il insiste sur la perfection de son œuvre, pour appuyer sa demande d’être glorifié. Il faut noter que c’est sur la terre qu’il a glorifié le Père. C’est cet endroit particulier du vaste univers où Dieu avait été tout spécialement déshonoré par le péché et la chute du premier homme et de sa race. Cette grande œuvre avait été confiée à Jésus ainsi que celle, parallèle, de la propitiation pour le péché, afin que les pécheurs puissent être rachetés. Passant en esprit au-delà de la croix, il proclame l’achèvement et la perfection de son œuvre. Aucun homme ne pourrait prononcer de telles paroles. L’œuvre des serviteurs de Dieu les plus éminents reste fragmentaire et inachevée. Dans le cas contraire, aucun d’eux n’oserait s’approcher de Dieu, celui qui sonde les cœurs et les voies, et se prononcer sur son propre travail en déclarant qu’il est parfaitement achevé ; cela dénoterait une présomption des plus insolentes. Mais ici c’est le Fils qui parle, sans le moindre orgueil.
Cependant Jésus est réellement homme ; c’est ce qui nous frappe à la lecture du verset 5. Il répète qu’il demande la gloire, cette gloire particulière qu’il partageait avec le Père, avant que le monde fût. Il va être réinvesti de cette gloire, mais cette fois comme le Fils, en tant qu’homme, celui qui est ressuscité. Nous avons ici une réalité merveilleuse et de la plus haute importance : un homme ressuscité, le Christ Jésus, est investi de la gloire incréée de la Déité. Dans cette gloire se trouve le chef de l’Église, le chef de la race choisie à laquelle nous appartenons. Qui peut mesurer les conséquences qui découlent de cette grande réalité ?
La race choisie apparaît au verset suivant. Ceux qui en font partie sont désignés par l’expression : « les hommes que tu m’as donnés du monde ». Dès le début, ils sont ainsi clairement différenciés du monde ; ils en sont retirés par le Père et ils sont donnés au Fils. Ils étaient au Père selon son conseil, avant que le temps fût ; ils ont été donnés au Fils, pour qu’il puisse les amener à la connaissance du Père en leur manifestant son nom. À la fin de sa prière, Jésus parle de faire connaître le nom du Père, ce qui met l’accent sur ses paroles. Toutefois, ici, le mot utilisé est manifester ; cela s’est réalisé plutôt dans la vie et dans les œuvres du Seigneur Jésus. « Celui qui m’a vu, a vu le Père ». De ceux qui lui ont été donnés, Jésus dit à Dieu : « Ils ont gardé ta parole ».
Cela nous touche, quand nous pensons à ce qu’étaient ces hommes, si lents, si insensibles et si inintelligents ! Que penser de la manière dont ils vont se comporter ? Quelle lâcheté, quels reniements dans les heures qui vont suivre ! Le Fils les voit, en fait, à la lumière du propos divin. Il sait que le Père a la puissance d’accomplir en eux, finalement, tout ce qu’il s’est proposé. Il les considère donc comme s’ils saisissaient complètement ce qu’ils ne réalisent encore que dans une très faible mesure. Est-ce qu’il n’agit pas de la même manière avec les croyants aujourd’hui, en intercédant pour eux ? Dans le verset suivant, Jésus reconnaît aussi que les disciples ont cru que tout ce qu’ils avaient vu manifesté en lui venait du Père. Dans cet évangile nous le voyons attribuer tout au Père. Ses paroles et ses œuvres sont celles du Père. Il ne parle ni n’agit de lui-même, bien qu’il soit la Parole et le Fils. Il a si réellement revêtu l’humanité et pris une place de dépendance, qu’il a pu manifester le nom et la gloire du Père.
Au verset 8, Jésus ne parle pas de « la parole », mais « des paroles » qui lui ont été données et qu’il a transmises aux disciples. « La parole » correspond à tout ce qui est révélé, considéré comme un ensemble ; « les paroles » sont les mots nombreux et variés par lesquels Jésus leur a communiqué « la parole ». Les disciples ont reçu ces paroles et ils ont été dirigés par elles vers le Père lui-même. Ils les ont en effet reçues, mais ont-ils compris la plus petite partie de leur signification ? Dans quelle mesure les avons-nous saisies, nous qui possédons le Saint Esprit ? Cependant c’est déjà beaucoup de recevoir et de croire sans réserve ce que Jésus dit, parce que c’est lui qui le dit. Tout ce qu’il a dit nous mettra en relation avec le Père qui l’a envoyé.
Jusqu’ici nous avons entendu le Fils présenter sa première requête, la plus importante. Il demande à être glorifié, comme homme ressuscité, afin de glorifier le Père d’une manière nouvelle. Nous l’avons aussi entendu mentionner quatre œuvres qu’il avait parfaitement accomplies. Il avait glorifié le Père sur la terre. Il avait achevé l’œuvre qui lui avait été donnée. Il avait manifesté le nom du Père aux disciples. Il leur avait donné les paroles que le Père lui avait données. Nous trouvons sa deuxième requête au verset 9 ; elle n’est pas pour lui-même, mais pour ses disciples. Il commence en les séparant du monde d’une manière irréfutable.
L’ancien mur de séparation avait été élevé entre les Juifs et les nations. Jusque-là, la distinction avait été assez marquée. Elle commençait maintenant à disparaître et à être remplacée par celle qui existait entre les disciples qui recevaient le Seigneur Jésus et le monde qui le rejetait. Si un juif agissait ainsi, il perdait sa place privilégiée ; il n’était plus qu’un de ceux qui composaient le monde. Remarquons comment le Seigneur dépeint ici ses disciples. Ils appartiennent au Père, à cause de son dessein et de son choix ; ils sont ensuite donnés par lui au Fils. Ayant été ainsi donnés, ils sont considérés comme appartenant à la fois au Père et au Fils. Mais chacun en particulier est un vase, ou un instrument, dans lequel le Fils va être glorifié.
« Tout ce qui est à moi est à toi ; et ce qui est à toi est à moi ». Méditons ces paroles. Un homme peut dire : Tout ce qui est à moi, est à toi. Personne ne pourrait dire : Tout ce qui est à toi, est à moi ; il se rendrait coupable d’une prétention impardonnable et blasphématoire. Mais le Fils pouvait parler de cette manière en toute bienséance et vérité ; il est un avec le Père.
Jésus place les disciples devant le Père, comme les objets de sa seconde requête. Il en mentionne ensuite la raison : il allait quitter le monde pour aller au Père, tandis que les disciples étaient laissés sur la terre. Ces derniers connaissaient mal ce qu’était le monde, avec ses dangers et ses pièges ; Jésus le connaissait parfaitement. Seule la puissance protectrice du Père, allant de pair avec sa propre sainteté, serait suffisante pour les garder. Les disciples n’allaient pas seulement être préservés ; ils allaient être gardés dans une unité dont le modèle est celle du Père et du Fils. Jésus avait révélé ce saint nom de Père. Il y avait dans ce nom une puissance et une grâce qui pouvaient unir les disciples. Ces vertus se trouvaient aussi dans la vie éternelle que donne le Fils, liée au don de l’Esprit qui allait bientôt être répandu. De plus ces hommes étaient laissés pour être les témoins de leur Seigneur, alors que lui s’en allait. Pour que leur témoignage soit efficace, il était essentiel qu’il soit caractérisé par l’unité. Le livre des Actes et les épîtres nous montrent avec quelle perfection cette unité de témoignage a été conservée.
Jusqu’ici les disciples avaient été gardés par le Fils, au nom du Père. Le seul qui manquait n’était en rien un vrai disciple, c’était le fils de perdition. Ce triste événement même arrive pour que les Écritures soient accomplies. Concernant tous ceux qui lui ont été donnés par le Père, Jésus peut dire : « j’ai gardé ceux que tu m’as donnés ». Pour la cinquième fois, dans ce chapitre, nous trouvons l’expression : « j’ai... ». Alors qu’il quitte le monde, Jésus place ses disciples dans la position qui était la sienne sur la terre (v. 13). Il avait été sur la terre au nom de son Père, et avait trouvé sa joie à servir ses intérêts. Les croyants allaient être désormais sur la terre, au nom du Seigneur, et ils auraient la même joie accomplie en eux en servant le Père comme représentant le Fils.
Mais pour cela, ils auraient besoin de discerner la pensée et le dessein du Père ; c’est pour cette raison que le Fils leur avait donné sa parole. Nous avons ici, pour la sixième fois, l’expression « j’ai... ». Cette fois cela ne concerne pas « les paroles », mais « la parole », c’est-à-dire l’ensemble de la révélation que Jésus avait apportée. Jusqu’ici les disciples n’avaient que très peu compris sa plénitude, mais de ce fait ils avaient été séparés du monde à cause de ce qu’ils savaient. Ils en étaient aussi séparés du fait de leur origine, car ils n’étaient pas du monde, comme Jésus n’en était pas. Quant à leur place, ils étaient dans le monde. Le Seigneur n’a pas désiré qu’ils en soient ôtés, mais plutôt qu’ils soient gardés du mal.
Il y a ici une chose très claire pour laquelle le Seigneur ne fait pas de demande. Par une étrange contradiction, des âmes sérieuses ont cherché, à travers les siècles, à se retirer du monde pour une vie monacale. Parmi ces personnes, il y avait beaucoup de croyants. On peut se séparer ainsi à l’abri d’épais murs de pierre ou sans aucun mur. De toute façon le résultat est le même. Si nous transformons la séparation ordonnée par Dieu en un isolement dans un monastère, nous finirons toujours par produire, dans notre solitude, les mêmes maux que ceux que nous avons à éviter. Le monde offre, en effet, un danger mortel pour nous. Mais c’est à cause de ce que nous sommes en nous-mêmes. Un ange saint ne rechercherait pas les faveurs du monde et ne craindrait pas non plus sa désapprobation ; cela le laisserait complètement indifférent. C’est le monde qui présente, pour ainsi dire, le microbe contagieux ; il le fait de l’extérieur. Le problème principal se trouve cependant en nous-mêmes, à l’intérieur ; ce sont les tendances de la chair. L’isolement dans un monastère ne peut rien y changer.
Le Seigneur demande, avec insistance, que les disciples soient sanctifiés par la vérité. En effet, elle entraîne une séparation en élevant une protection spirituelle, qui préserve des maladies spirituelles. L’idée fondamentale dans la sanctification est le fait de mettre de côté. Le Fils a donné la parole du Père ; elle nous introduit dans tout son amour, ses pensées, ses propos et sa gloire. Tout cela constitue la vérité, c’est-à-dire une réalité d’ordre divin. Le monde vit généralement dans un domaine irréel et imaginaire. Il s’efforce d’établir ses systèmes qui n’ont pas de fondement solide et finiront par disparaître. Si nous connaissons les réalités divines, nous devons nécessairement nous séparer des chimères du monde. Cela nous exposera à sa haine, mais produira aussi une forte résistance spirituelle à ses pièges et nous protégera contre ses microbes. Voilà une séparation durable, car elle est produite par la parole du Père et la vérité.
Au verset 18, nous trouvons pour la septième fois l’expression : « j’ai… ». Jésus, celui qui est saint et parfait, avait été envoyé dans le monde par le Père, pour le représenter et le faire connaître. Maintenant il envoie ses disciples, de la même manière. Ils doivent le représenter et le faire connaître. Ce qui les qualifie pour cette fonction, c’est la sanctification dont parle le verset précédent. Si son plan avait été de les placer dans la solitude d’un monastère, une telle mission n’aurait pas été possible ; elle ne l’aurait pas été, non plus, s’ils n’avaient pas été sanctifiés par la vérité. Mais ce service est réalisable avec la protection spirituelle que confère la vérité.
Une condition supplémentaire est toutefois nécessaire (v. 19). Le Seigneur Jésus doit être mis à part lui-même, dans la gloire du ciel. Il pourra ainsi répandre son Esprit sur eux et devenir le centre qui attire leur cœur, et le modèle auquel ils doivent être rendus conformes, au moment convenable. Jésus est saint à cause de ce qu’il est en lui-même, et parce qu’il est Dieu. La seule sanctification possible pour lui est donc sa mise à part dans le ciel. Remarquons que, d’après ce verset, il se sanctifie lui-même. C’est encore un hommage à sa divinité, car aucun homme ne pourrait se mettre à part lui-même dans la gloire du ciel !
Le verset 17 nous explique que la vérité a la puissance de nous sanctifier par la parole du Père qui a été donnée par le Fils (voir v. 14). Le verset 19 ajoute que la gloire de Christ a la puissance de nous sanctifier, grâce au ministère de l’Esprit ; ce dernier allait être envoyé aux disciples à la suite de la glorification du Seigneur. En résumé nous pouvons dire ceci : ce qui sanctifie le croyant aujourd’hui, c’est la révélation du Père par le Fils et la connaissance, par l’Esprit, de la gloire de Jésus, comme Homme ressuscité.
Le verset 20 doit toucher le cœur de chacun de nous. Le Seigneur a prié pour le petit groupe de disciples qui l’entourait à ce moment-là. Il élargit maintenant ses demandes pour nous associer, nous aussi, avec lui. Bien que vingt siècles se soient écoulés depuis que les premiers disciples ont annoncé l’évangile, notre foi en est encore la conséquence. Leur ministère oral s’est éteint depuis longtemps, mais leur parole demeure sous la forme des écrits inspirés du Nouveau Testament. C’est le fondement solide de toute évangélisation depuis ce jour jusqu’à aujourd’hui. Cela devrait aussi toucher notre cœur de voir que la première des deux requêtes en notre faveur est que nous soyons un.
L’unité que le Seigneur désire est un fondement essentiel. Nous avons à être un, comme le Père est dans le Fils et le Fils dans le Père. Il y a, entre eux, l’unité de leur existence absolue, et par conséquent une unité de vie, de nature et de témoignage. Nous tirons véritablement notre vie et notre nature du Fils et du Père, à tel point que le Seigneur Jésus pouvait dire de ceux qui croient : « afin qu’ils soient un en nous ». Cette expression montre l’égalité du Père et du Fils. Si une telle unité n’existe pas, rien de ce qui est visible n’a de valeur. Sans elle, une union ecclésiastique correspond seulement à la mise en commun d’une multitude de matériaux hétérogènes. Quand cette requête serait exaucée, la nature divine caractériserait tous les croyants. La formation de cette unité cachée chez des personnes si différentes en apparence (Juifs et nations), comme l’annonce Jean 10:16, est une preuve satisfaisante de la mission divine de Christ. Jésus ne dit pas que le monde croira, mais les preuves sont suffisantes pour qu’il puisse croire.
L’unité qui fait l’objet de la prière du Seigneur sera rendue parfaite dans la gloire, bien qu’elle soit d’abord établie par la grâce. Nous trouvons de nouveau l’expression : « j’ai » ; cette fois, elle est liée à la gloire. Jésus a fait don à ses disciples, dont nous faisons partie, de la gloire que le Père lui a donnée. Le temps n’entre pas dans les relations entre les personnes divines. C’est pour cela que Jésus ne dit pas : « je la leur donnerai », mais : « je la leur ai donnée ». Quand nous considérons les événements du point de vue du conseil et du propos de Dieu, nous trouvons ailleurs des déclarations tout aussi absolues (voir Romains 8:30 et Éphésiens 2:6). Il est en effet merveilleux que la gloire que le Père a donnée à Jésus, en tant qu’homme, soit maintenant irrévocablement la nôtre, parce qu’il nous l’a donnée. Le but recherché est que notre unité, en lui, soit amenée à la perfection. Elle est ensuite montrée au verset 23 : le Père est manifesté dans le Fils et ce dernier est manifesté dans les croyants glorifiés. Ce sera vraiment une unité rendue parfaite ! Le monde connaîtra alors que le Père a envoyé le Fils et qu’il a aimé les croyants comme il a aimé le Seigneur. La gloire manifestera l’amour.
Cela amène la deuxième requête du Seigneur ; elle est formulée pour englober tous les croyants de la période de la grâce. Il leur a donné sa gloire ; il demande maintenant au Père de les placer avec lui, dans sa compagnie. Il désire que nous soyons au ciel, avec lui, dans la gloire. Cependant le privilège le plus merveilleux sera de contempler la gloire suprême qui sera la sienne. Auparavant il avait demandé à être glorifié, auprès du Père, de la gloire qu’il avait auprès de lui avant que le monde fût. Cette gloire, sans commencement, avait été la sienne dès l’éternité, en tant que personne de la Trinité. Il en a été maintenant réinvesti, mais d’une façon nouvelle. Il la reçoit comme un don du Père, en tant qu’homme ressuscité. Étant glorifiés avec lui, nous allons contempler sa gloire. Elle sera éternellement pour nous le témoin de la perfection de tout ce qu’il a accompli comme homme et de l’amour du Père dont il avait été le centre de toute éternité.
Le monde est plongé dans l’ignorance du Père. Jésus s’adresse à ce dernier comme celui qui est « saint », quand il prie pour que ses disciples soient gardés dans le monde (v. 11) ; leur séparation va être déterminée par la sainteté du Père. Au verset 25, Jésus considère le monde dans son péché et son aveuglement ; il s’adresse donc au Père comme celui qui est « juste ». La justice divine est ainsi placée en opposition avec le péché du monde, comme au chapitre 16 (v. 9 et 10). Le Seigneur était venu comme celui qui était envoyé par le Père, pour le révéler. Les disciples avaient reçu cette révélation, en recevant Jésus, car il leur avait fait connaître le nom du Père. Voici maintenant les dernières fois où nous rencontrons l’expression : « J’ai ». Le Seigneur dit : « Moi je t’ai connu... Je leur ai fait connaître ton nom ».
Jésus avait parlé, au verset 6, de la manifestation du nom du Père ; elle a été réalisée par sa vie. Il n’était pas nécessaire d’y ajouter quoi que ce soit. Il avait fait, aussi, une révélation du nom du Père par ses paroles ; il la complètera dans le futur, quand il ressuscitera d’entre les morts. Il nous est permis d’en entendre quelque chose dans cet évangile (20:17). L’amour du Père est centré sur le Fils de façon absolue. Le Nom du Père a cependant été révélé aux disciples pour que son amour soit « en eux », c’est-à-dire pour qu’ils en jouissent consciemment. Comme l’amour du Père demeure ainsi dans leur cœur, ils sont qualifiés pour être une expression de Christ qui sera manifesté « en eux ».
Cette merveilleuse prière, épanchement du Fils en communion avec le Père, doit obligatoirement dépasser nos pensées. Cependant c’est ce qui peut, par-dessus tout, apporter dans notre cœur la chaleur de l’amour divin. C’est une joie de remarquer que ce chapitre commence par le Fils glorifié par le Père, et qu’il se termine par le Fils manifesté et donc glorifié dans les saints.
Jésus s’est entretenu avec le Père et il a exprimé ses désirs. Il va maintenant à la rencontre de ses adversaires qui sont menés par le traître ; il ira ensuite vers la mort qui doit être la sienne. En accord avec le caractère de cet évangile, un témoignage frappant est rendu au fait qu’il sait tout. Il s’avança, sachant parfaitement « tout ce qui devait lui arriver ». Il s’agit non seulement des situations extérieures, mais aussi de tout ce que cela impliquait comme fardeau intérieur. Nous trouverons des déclarations d’une portée analogue dans les chapitres 6:6 ; 13:3.
Mais la scène, dans le jardin situé au-delà du Cédron, nous offre aussi une démonstration du fait que Jésus peut tout. Les hommes cherchent Jésus de Nazareth. Ils sont jetés à terre, lorsqu’il leur répond : « C’est moi », rappelant la manière dont l’Éternel se nommait dans l’Ancien Testament. Ne pouvant faire autrement, ils lui rendent hommage, bien qu’à contrecœur. Ainsi les preuves de sa divinité sont là, alors même qu’il se livre entre les mains des hommes ; en effet il est ici l’homme soumis à la volonté du Père. La parole du Seigneur nous montre que son désir était de protéger ses disciples (voir v. 8). L’action de Pierre, pleine de zèle, mais déplacée, ne fait que manifester la complète unité de pensée entre Jésus et le Père. Il accepte tout comme venant de ses mains, même si les plus hautes autorités religieuses des juifs sont ses principaux adversaires. L’esclave du souverain sacrificateur, Malchus, joue un rôle important dans son arrestation. Jésus est d’abord conduit devant le tribunal d’Anne et de Caïphe. C’est à Caïphe de décider et il est déjà résolu à faire mourir le Seigneur.
Les versets 15 à 18 sont une parenthèse, comme les versets 25 à 27. Ils nous racontent la triste histoire de la chute de Pierre. Ce que le Seigneur avait dit à l’avance est ainsi accompli (voir ch. 13:38). Il est remarquable que ce soit un des rares épisodes rapportés par les quatre évangélistes. Dieu ne prend pas plaisir à rappeler les péchés de ses enfants. Nous pouvons être sûrs qu’il y a là un avertissement et un enseignement nécessaires aux croyants de toutes les époques. En effet, la confiance en soi est une des tendances de la chair les plus courantes et le plus profondément enracinées. Si elle n’est pas jugée et repoussée, elle mène invariablement au désastre. La vraie circoncision spirituelle implique de n’avoir aucune « confiance en la chair » (voir Philippiens 3:3). C’est une leçon que nous n’apprenons qu’à travers de nombreuses expériences douloureuses.
« L’autre disciple », qui est connu du souverain sacrificateur, est très certainement Jean lui-même. Ses liens avec le souverain sacrificateur lui donnent une position et un privilège un peu mondains. Il s’en sert pour introduire Pierre dans cet endroit dangereux. La question posée au verset 17 laisse supposer que la servante, qui est portière, sait que Jean est un disciple de Jésus. Il n’a pas été tenté de le nier, comme Pierre. Ce qui fait trébucher un disciple peut ne pas avoir d’effet sur un autre. En outre, Satan sait parfaitement comment tendre ses pièges. Le fait que la troisième personne qui interroge Pierre soit un parent de Malchus qu’il a blessé dans le jardin, est un coup de maître du diable. Cela entraîne le troisième reniement de Pierre, le pire de tous ; son péché est consommé et sa défaite est totale.
Les versets 19 à 24 donnent des détails sur le déroulement des événements dans le palais du souverain sacrificateur. Ils forment un lien entre les versets 14 et 28. En interrogeant Jésus sur ses disciples et sa doctrine, les juifs essayent de trouver une raison pour l’inculper. Ils avaient déjà décidé de le condamner à mort, mais ils avaient besoin d’un motif. Les autres évangiles nous disent qu’ils ont cherché des témoins contre lui, mais n’en ont pas trouvé. Cela explique une irritation telle qu’ils frappent notre Seigneur, quand il les renvoie à ceux qui l’ont entendu. Matthieu nous dit qu’ils vont jusqu’à chercher de « faux » témoins contre lui.
Il convient de remarquer le contraste entre Jésus, au verset 23, et Paul dans Actes 23:5. Un abîme sépare le maître et le plus dévoué de ses serviteurs. La réponse de Jésus était convaincante. Personne n’aurait pu rendre témoignage du mal ; personne ne pouvait le convaincre de péché.
Le récit de Jean, concernant le procès devant le souverain sacrificateur, est très bref. Par contraste, il nous donne d’une manière plus complète que les autres ce qui s’est passé chez Pilate, le gouverneur romain. Paul parle du « Christ Jésus qui a fait la belle confession devant Ponce Pilate » (1 Timothée 6:13). Les détails de cette belle confession nous sont particulièrement révélés ici.
Toutefois, nous avons d’abord un aperçu de la terrible hypocrisie des chefs des juifs. Entrer dans le prétoire les souillerait, pensent-ils ! Cependant, eux-mêmes n’avaient aucun scrupule à commettre un meurtre et à chercher des menteurs pour donner une apparence de décence à leur action. Hélas ! La chair religieuse est capable d’aller très loin. À juste titre, Pilate désire une accusation précise. Comme les chefs n’en ont aucune à proposer, ils essaient au début de le forcer à précipiter son jugement, avec le vague motif que Jésus est un malfaiteur. Dénoncer pour des raisons vagues, en évitant des charges précises, est un procédé habituel chez les persécuteurs religieux. Cette irrégularité fait que le gouverneur souhaite renvoyer le cas aux chefs des juifs. Leur réponse montre qu’ils ont décidé de faire mourir Jésus. Cela accomplit, cependant, ce que le Seigneur avait lui-même annoncé concernant sa mort (voir 3:14 ; 8:28 ; 12:32). Ils finissent toutefois par choisir de l’accuser d’avoir cherché à se faire roi. La question du Seigneur rapportée au verset 34 le laisse supposer, et cela nous est révélé au chapitre suivant (voir 19:12).
La « belle confession » devant Pilate comprend au moins quatre points importants. Premièrement, le Seigneur confesse hardiment qu’il est roi. Le contexte montre qu’en disant cela, il se réfère non seulement au fait qu’il est le vrai Fils de David selon la chair, mais aussi qu’il occupe cette place en tant que Fils de Dieu (voir Psaume 2).
Deuxièmement, Jésus affirme que son royaume n’est pas « de ce monde », ni « d’ici ». Ce royaume ne porte pas le caractère ou l’empreinte de ce monde et il n’y puise pas son autorité et sa puissance ; il les puise, naturellement, dans le ciel et il porte un caractère céleste. Au lieu de s’exprimer positivement, Jésus aborde le sujet sous cet angle négatif qui condamne et rejette implicitement ce monde et ce lieu. C’est une déclaration courageuse, en présence de celui qui représente la plus grande puissance de la terre.
Troisièmement, Jésus affirme qu’il est né pour être roi, puisqu’il est venu dans le monde comme témoin de la vérité. David a dit que celui qui apporte la lumière de la vérité est le seul capable de détenir le pouvoir royal (voir 2 Samuel 23:3). Au début de cet évangile, nous avons vu que « la grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ ». À ce moment crucial, la grâce a été rejetée et la vérité est discutée. Dehors se trouvent les hommes qui incarnent le mensonge et l’hypocrisie. Pilate détient le pouvoir judiciaire ; il a donc la responsabilité de discerner la vérité et de juger en conséquence. Sa question : « Qu’est-ce que la vérité ? » semble cependant posée avec scepticisme et légèreté. Cela montre que le jugement est séparé de la justice, dans son esprit. Comme juge romain, il ne connaît que trop les hommes et leurs tromperies et il pense que rechercher la vérité revient à poursuivre un mirage. Mais cela n’excuse pas sa folie qui est mise en évidence lorsqu’il tourne le dos à Christ et sort vers les Juifs menteurs, immédiatement après avoir posé sa question.
Quatrièmement, Jésus affirme qu’il n’est pas seulement le témoin de la vérité mais la véritable incarnation de la vérité elle-même. Dans son discours d’adieu, il a dit à ses disciples : « Moi, je suis... la vérité ». Maintenant, face à ses adversaires, la même chose est sous-entendue dans ces paroles remarquables : « Quiconque est de la vérité, écoute ma voix ». Jésus est la vérité, d’une manière si absolue que tout homme doit s’éprouver par rapport à lui. Ceux qui ont été engendrés par la parole de la vérité (Jacques 1:18) sont « de la vérité » et ils écoutent sa voix. Il est remarquable de voir combien fréquemment dans cet évangile notre attention est attirée sur le fait d’écouter la voix ou la parole du Seigneur (voir par exemple : 3:34 ; 4:42 ; 5:24, 25, 28 ; 6:68 ; 7:17 ; 8:43 ; 10:4, 16, 27 ; 12:48-50). Pour nous, écouter est fondamental ! Nous devons être « sur la bonne longueur d’onde » pour écouter. Seul le fait d’être engendrés de Dieu, par la parole de la vérité, peut nous mettre sur la bonne longueur d’onde.
Les paroles et les actes de Pilate montrent clairement qu’il ne désire pas écouter la voix de Jésus. Il quitte la présence de la vérité pour renouer le contact avec le monde de mensonge. Il a toutefois suffisamment de sens critique pour s’apercevoir combien le procès contre le Seigneur est faux, et pour déclarer qu’il n’y a en lui aucun crime. Mais il échoue dans sa tentative pour détourner les accusateurs de leur but en suivant la coutume de relâcher un prisonnier à la Pâque. Sa proposition est rejetée pour mettre clairement en évidence l’hostilité implacable des Juifs.
Quelques mots suffisent à exprimer leur rejet total du Seigneur : « Pas celui-ci, mais Barabbas ! ». Ils sont unanimes ; tous poussent le même cri. Le commentaire de l’évangéliste, à ce sujet, est tout aussi net et concis : « Or Barabbas était un brigand ». Sans exagérer, nous pouvons dire que ce cri est celui qui est le plus lourd de conséquences dans toute l’histoire. Il dirige le cours du monde, depuis bientôt deux mille ans, et il scellera finalement son destin. Nous pourrions dire, en particulier, qu’il a dirigé le triste déroulement de l’histoire des Juifs. Que n’ont-ils pas subi de la part de ceux qui les ont pillés, au cours des siècles ! Mais s’ils contestent, et si même ils souhaitent se plaindre contre Dieu, il suffit de les renvoyer à ce que leurs chefs ont exigé unanimement. Celui qui est l’incarnation de la grâce et de la vérité, ils le rejettent. Barabbas le brigand, ils le réclament ! C’était aussi, par ailleurs, un révolutionnaire et un meurtrier, comme d’autres évangiles le montrent. La part des Juifs a toujours été vol, révolution et meurtre, en surabondance.
Selon le saint gouvernement de Dieu, ils n’ont récolté, en effet, que ce qu’ils ont semé. Ceci est vrai pour les nations en général, quoique peut-être à une plus petite échelle. À plusieurs reprises, au cours des siècles, se sont levés des hommes doués d’une forte personnalité, dans lesquels la pensée de Barabbas a ressurgi. Actuellement la terre gémit sous ce même problème. Quand nous considérons les souffrances de tant de peuples, nous avons à nous rappeler cette phrase : « Or Barabbas était un brigand ».
Dans le premier verset de ce chapitre il faut remarquer les mots : « alors donc ». Pilate avait déjà rendu le verdict qu’il n’y avait en Jésus « aucun crime ». Mais parce que les Juifs ont réclamé Barabbas et ont rejeté Jésus, il le prend et le fait fouetter. Toute tentative de manifestation de la justice humaine normale est balayée. Toute convenance civique est bafouée. S’alignant sur l’action du juge, les soldats font de même avec leur brutalité habituelle. Cependant la main de Dieu pèse si lourdement, sur Pilate même, qu’il est obligé de déclarer une deuxième et une troisième fois qu’il n’y a dans le Seigneur « aucun crime ». C’est une proclamation bien plus complète que s’il le déclarait simplement innocent des charges précises portées contre lui. Le gouverneur romain essaye de rejeter la responsabilité de la condamnation à mort sur les juifs. Ces derniers la refusent pourtant, tout en déclarant que, selon leur loi, il mérite la mort puisqu’il s’est fait Fils de Dieu.
Les juifs répondent que Jésus doit mourir, car il s’est dit Fils de Dieu. Ils exigent cependant que Pilate le condamne parce qu’il s’est dit Roi d’Israël. Au début de l’évangile nous avons entendu Nathanaël lui rendre ce double hommage ; nous pouvons le lui rendre encore, grâce à Dieu, aujourd’hui. Mais il est condamné sur ces deux chefs d’accusation.
La remarque de l’évangéliste, au verset 8, projette des flots de lumière sur la situation du gouverneur. L’histoire profane nous apprend qu’il a considérablement éveillé l’hostilité des Juifs lors de ses débuts comme gouverneur. Il craint donc de les irriter davantage. Toutefois il est convaincu de l’innocence du prisonnier, dont le comportement paisible le met encore plus mal à l’aise. L’accusation de s’être fait « Fils de Dieu » éveille des craintes, probablement superstitieuses, mais néanmoins fortes ; elle suscite la question : « D’où es-tu ? ».
Si cette question était le fruit d’un réel exercice spirituel, le Seigneur aurait certainement répondu, comme il l’avait fait aux deux disciples qui avaient demandé : « Où demeures-tu ? » (voir ch. 1). Comme la question était inspirée par la superstition et la crainte, le Seigneur ne donne pas de réponse. C’est ce qui conduit Pilate à affirmer, d’un ton menaçant, qu’il détient de César le pouvoir de vie et de mort. La réponse du Seigneur augmente ses craintes, car le prisonnier prend calmement la position de juge. Jésus lui montre, de façon péremptoire, que l’autorité passagère qu’il possède, comme gouverneur, vient de quelqu’un qui est au-dessus de César. Il se prononce aussi sur le degré de culpabilité de Pilate et sur celui des Juifs. Ces derniers manifestent leur hostilité extrême et le gouverneur n’est que leur instrument. Toutefois, bien qu’il soit moins coupable qu’eux, sa culpabilité ne fait aucun doute. C’est une situation accablante pour le gouverneur romain qui se trouve, sans le savoir, en présence de la Parole incarnée. Quelle est alors la réponse à la question de Pilate, restée sans réplique ? Certainement que Jésus est lui-même « d’en haut », venu de la source même de l’autorité du gouverneur romain.
Cet épisode accroît fortement le désir de Pilate de relâcher Jésus, mais les juifs, avec habileté, savent comment exercer une pression décisive. À cause de la tension qui existait auparavant entre lui et les juifs, il est obligé de considérer leur cri comme une menace directe de l’accuser devant César, s’il relâche Jésus (voir v. 12). Les chefs des Juifs eux-mêmes « ont aimé la gloire des hommes plutôt que la gloire de Dieu » (12:43). Le gouverneur attache plus d’importance à l’approbation de César qu’à un jugement selon la vérité et la justice.
Cependant, Pilate lance un dernier appel. Au verset 31 du chapitre précédent, nous l’avons vu faire une suggestion destinée à toucher l’orgueil national des juifs. Au verset 39, il a posé de nouveau une question qui fait appel à leur coutume. Dans notre chapitre, il s’adresse à leurs sentiments (v. 13 et 14). Mais tout ce qu’il essaye de faire, avec le désir de renoncer à la responsabilité de prononcer un jugement contre le Seigneur, est infructueux. Tout est dirigé pour que la culpabilité des juifs, et plus spécialement celle des souverains sacrificateurs, soit proclamée clairement de leurs propres lèvres. Ils mettent un comble à leur cri : « Pas celui-ci, mais Barabbas ! », en disant : « Nous n’avons pas d’autre roi que César ».
La prophétie d’Osée disait : « Les fils d’Israël resteront beaucoup de jours sans roi, et sans prince... » (3:4). Les deux tribus avaient eu les rois de la lignée désignée par Dieu ; les dix tribus, des princes de leur propre choix. Osée a déclaré qu’ils n’auraient bientôt ni l’un ni l’autre. Mais comme si cela ne suffisait pas à ces hommes méchants, ils acceptent maintenant délibérément le pouvoir absolu des nations. Ils ont fait appel à César et c’est sous le joug de fer d’une lignée de despotes que Dieu a trouvé bon de les laisser. Depuis vingt siècles, les deux noms de Barabbas et de César pourraient servir à résumer leur histoire de souffrance. Barabbas a été le premier à incarner l’esprit révolté et sans loi de l’homme ; l’ordre imposé par une puissante dictature a été vu en César. Depuis vingt siècles, les Juifs souffrent ; tantôt à cause de la cruauté organisée des autorités et tantôt à cause de la populace désorganisée. Ils ont été écrasés, pour ainsi dire, entre les deux pierres d’une meule. Ils auront encore à souffrir sous les dernières formes de César et de Barabbas, qui s’avéreront pires que les premières.
Quand Pilate a amené Jésus dehors pour lancer son dernier appel, il a siégé au tribunal, dans le lieu appelé le Pavé ; cela indiquait qu’il allait prononcer un jugement sur cette affaire. Jean s’arrête ici pour nous donner une indication d’heure (voir v. 14). Il semble y avoir une contradiction avec celle qui est donnée très clairement en Marc 15:25 ; ceci a entraîné de nombreuses discussions et controverses. Nous ne pouvons que poser la question suivante : Si Jésus a été crucifié à la troisième heure, comment peut-il être écrit que Pilate a prononcé son jugement vers la sixième heure ? La réponse semble être la suivante : notre évangéliste, s’occupant de ce qui s’est passé devant le juge romain, utilise l’heure romaine, proche de la nôtre ; Marc compte selon la coutume juive. S’il en est ainsi, tout est clair. Il était environ 6 heures du matin lorsque l’interrogatoire de Pilate s’est terminé et environ 9 heures du matin quand Jésus a été crucifié. La « préparation de la Pâque » durait 24 heures ; elle commençait à 6 heures le soir précédent. Dans ces 24 heures se trouvent accumulés les événements les plus extraordinaires de tous les temps, et même de l’éternité.
Dans notre évangile, rien n’est dit des moqueries ajoutées par les soldats romains quand Jésus leur a été livré. Ce n’étaient que des gestes grossiers de païens, qui n’allaient pas très loin. Au verset 16, il est dit que Pilate le « leur » a livré. Jésus a donc été livré aux principaux sacrificateurs et aux huissiers, dont il a été parlé au verset 6. Ils étaient ses persécuteurs et ses accusateurs. Ils étaient remplis de haine. Ce sont eux qui le haïssent, lui et son Père. Pilate le leur a livré pour qu’ils puissent commettre leur plus grand péché en le remettant aux bourreaux des nations.
Comme le montrent les autres évangiles, le Seigneur avait employé des expressions telles que « prendre sa croix » et « porter sa croix ». C’est une image de la condamnation à mort que chaque disciple doit être prêt à recevoir du monde. On voit ici toute la force de cette image : « Il sortit, portant sa croix, et s’en alla au lieu appelé lieu du crâne ». Ce lieu tirait son nom de la forme particulière du rocher, mais il est plein de signification par ailleurs ! Un crâne parle de la fin humiliante de toute la puissance et de la gloire de l’homme. Il se peut que ce crâne ait un jour contenu le plus brillant et le plus puissant des cerveaux qui ait jamais existé chez un homme vivant ; et voilà ce qu’il en reste ! Le Fils de Dieu accepte la condamnation à mort, comme de la part de l’homme. Il se rend pour la subir en un lieu qui symbolise la fin de toute la gloire humaine.
De plus, Jésus accepte, de la main des hommes, la mort sous sa forme la plus honteuse. La crucifixion était une mort spécialement caractérisée par le rejet et la honte. En tant qu’invention romaine, elle exprimait le mépris hautain avec lequel ils mettaient à mort les barbares qu’ils avaient conquis. Ils les clouaient à une croix, comme des gens méprisables. Jésus est livré à une telle mort par les chefs des Juifs. Jean ne nous donne qu’un récit très bref et très simple de cet événement extraordinaire. Le Seigneur de gloire est crucifié. Nul besoin de commentaire.
Mais quand c’est accompli, Pilate intervient ; il fait un écriteau et le met sur la croix. Il semble qu’aucun des évangélistes ne cite tous les mots de l’écriteau : c’est Jean qui s’en rapproche le plus. Le texte intégral est peut-être celui-ci : « Voici Jésus de Nazareth, le Roi des juifs ». Pour les Juifs, cet acte du gouverneur est certainement provocateur et voulu. Ils lui avaient forcé la main pour condamner Jésus ; il prend sa revanche en déclarant publiquement que ce Jésus de Nazareth, que les Juifs haïssent, est leur roi. C’est la dernière chose qu’ils veulent admettre, ils protestent donc. Mais cette fois Pilate est inflexible. Il refuse de changer quoi que ce soit ; sa réponse sèche : « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit », est devenue presque proverbiale.
Dans tout cela nous pouvons voir la main de Dieu. La Parole est devenue chair et a habité au milieu de nous. Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. Il était connu parmi les hommes comme Jésus de Nazareth, un titre de mépris. Quand il était entré à Jérusalem la semaine précédente, il y avait eu quelques témoignages à sa gloire ; s’il n’en avait pas été ainsi, comme nous le dit Luc, les pierres auraient aussitôt crié. Mais ici, il n’y a aucun témoignage rendu par l’homme. Une planche, gravée par la main de Pilate (ou sous ses ordres) proclame donc que Jésus de Nazareth, le méprisé, est, en effet, roi des Juifs. Il est remarquable de voir comment notre Seigneur lui-même a adopté ce titre de honte et l’a tressé comme une guirlande pour son front, une fois ressuscité et glorifié. Fait stupéfiant : Jésus de Nazareth est au ciel (voir Actes 22:8).
L’écriteau est rédigé dans les trois principales langues de l’époque. Il y a l’hébreu, la langue de la loi de Moïse, la langue de la religion ; le grec, la langue de la culture des nations ; le latin, la langue de l’impérialisme des nations. Ainsi, le monde entier est impliqué dans la mort du Seigneur Jésus.
Au verset 23, les soldats romains apparaissent vraiment comme les instruments de la mort du Seigneur. Ils accomplissent aussi les prophéties qui se trouvaient dans les Écritures depuis environ mille ans et qu’ils ignoraient. Au Psaume 22, David avait parlé du partage de ses vêtements entre les soldats, et du sort jeté sur sa robe. Les quatre soldats ont accompli cette prophétie et Jean rapporte les circonstances qui ont conduit à une réalisation aussi précise. La tunique du Seigneur était sans couture, tissée entièrement depuis le haut. Des détails qui pourraient nous paraître insignifiants conduisent à l’accomplissement de la parole de Dieu.
Cependant, on ne peut s’empêcher de penser que ce détail est mentionné parce qu’il a une valeur symbolique. Tout ce qui concerne notre Seigneur, à la fois quant à sa personne et à son œuvre, était d’une seule pièce, tissé sans aucune couture. Il en est autrement pour l’homme, dans son état de perdition. Le symbole qui convient pour l’homme et son travail, est la ceinture de feuilles de figuier à laquelle Adam et sa femme ont eu recours, après leur péché. Ils ont cousu ensemble des feuilles de figuier. L’ensemble était un raccommodage minutieux. Quel contraste avec la tunique sans couture !
Jésus est apparu devant les hommes, revêtu de cette tunique, symbole de sa perfection ; elle ne devait pas être déchirée. Jean est le seul à parler de cette tunique ; il nous dit qu’elle était « tissée tout d’une pièce depuis le haut ». Par contre, à la différence des autres évangiles, il ne mentionne pas le fait que le voile du temple ait été déchiré « depuis le haut jusqu’en bas ». Tout ce qui concerne le Seigneur témoigne du fait qu’il est venu du ciel et qu’il est au-dessus de tout. Et c’est aussi à partir d’en haut que l’ancien ordre de choses a été mis de côté au moment de sa mort.
Il est particulièrement frappant de trouver les versets 25 à 27 dans cet évangile, écrit pour montrer la gloire divine de Jésus afin que nous puissions croire qu’il est le Christ, le Fils de Dieu. Puisqu’il est présenté de cette manière, nous aurions pu supposer qu’il ne fallait pas tenir compte d’éléments aussi insignifiants que les relations humaines. Mais c’est tout le contraire ! À travers tout l’évangile, nous avons remarqué combien la réalité de son humanité est soulignée. Toutes les perfections humaines ont été manifestées entièrement en lui, et même au moment de sa souffrance la plus profonde, nous le voyons montrer parfaitement l’affection que l’on témoigne à des proches. L’heure avait sonné pour l’accomplissement des paroles du vieillard Siméon adressées à Marie : « Une épée transpercera ta propre âme ». Selon le prophète Zacharie, l’épée de l’Éternel est sur le point de se réveiller contre le vrai Berger d’Israël (13:7). Une autre épée doit aussi transpercer l’âme de sa mère, et le Berger y a pensé.
Jésus ne dit que sept mots, quatre à Marie et trois à Jean. Leur signification est cependant claire et ils font vibrer une corde d’amour qui entraîne une réponse immédiate. Jésus confie sa mère au disciple qu’il aimait ; ce dernier, connaissant son amour, l’aimait en retour. On peut faire confiance à l’amour, surtout lorsque ce n’est pas simplement de l’affection humaine, mais qu’il a sa source en Dieu et qu’il découle de l’appréciation de l’amour de Jésus.
Au verset 28, nous voyons une nouvelle preuve du fait que le Seigneur Jésus connaît tout ; ces révélations caractérisent cet évangile. Quelques versets auparavant, nous avons vu les soldats accomplir les Écritures, bien qu’en étant totalement inconscients. Maintenant, nous voyons Jésus lui-même, en cette heure sombre, promener ses regards sur l’ensemble des prophéties. Il est parfaitement conscient que, parmi toutes celles qui parlent de sa mort, une seule reste à accomplir. Au Psaume 69, David avait écrit : « Dans ma soif, ils m’ont abreuvé de vinaigre ». C’était un détail, mais chaque parole de Dieu doit être accomplie en son temps. En cette heure de souffrance, Jésus est capable de s’élever au-dessus de ses circonstances, non seulement pour discerner ce qui n’a pas été réalisé, mais aussi pour dire ce qui est nécessaire à sa réalisation immédiate. Personne n’aurait pu faire l’un, ni l’autre.
Il est remarquable que les soldats aient donné à Jésus du vinaigre mêlé de fiel et de myrrhe, juste avant qu’il soit crucifié. Cependant, il ne l’acceptera pas, selon ce qui est rapporté en Matthieu et Marc. C’est sans doute parce qu’il ne voulait rien prendre pour atténuer ses souffrances physiques et qu’il n’éprouvait aucune soif à ce moment-là. Les prophéties divines doivent être accomplies avec exactitude et précision.
Jean ne fait aucune mention des trois heures de ténèbres, ni de l’abandon ni du grand cri qu’il entraîne, ce qui était annoncé d’avance au premier verset du Psaume 22. Ces faits ne montrent pas particulièrement la divinité de Jésus, point important sur lequel Jean insiste, conduit par l’Esprit de Dieu. Ce qui la manifeste, c’est le cri triomphant avec lequel sa vie terrestre s’achève. Le Psaume 22 se termine par les mots : « Il a fait », dont l’équivalent, dans le Nouveau Testament, est : « C’est accompli ». Il est venu dans le monde dans la pleine connaissance de tout ce que le Père lui avait confié. Il le quitte maintenant, en sachant parfaitement que tout était accompli ; rien ne manquait. Le prophète avait annoncé que l’Éternel « livrerait son âme en sacrifice pour le péché » et c’était accompli. Comme conséquence la foi peut, aujourd’hui, adopter et faire sien le langage d’Ésaïe 53:5, tout comme le résidu repentant d’Israël le fera, un jour futur.
Là aussi notre Seigneur est unique. Certains serviteurs de Dieu ont pu, comme Paul, parler avec confiance de leur course achevée. Aucun n’aurait osé affirmer avoir mis la touche finale à l’œuvre qu’il avait à faire ; ils l’avaient transmise à leurs successeurs. Par contre, l’œuvre du Seigneur est entièrement la sienne. Il l’a achevée parfaitement. Il peut évaluer sa propre œuvre et annoncer qu’elle est terminée. Tous les autres devront soumettre humblement leur travail à l’examen et au jugement de Dieu, un jour à venir.
Matthieu et Marc nous rapportent que Jésus a expiré après avoir crié d’une voix forte. Il semble que Luc et Jean nous donnent chacun une partie de cette dernière parole. Si cela est vrai, le Seigneur a dû dire : « C’est accompli. Père, entre tes mains je remets mon esprit ». La première partie met l’accent sur sa divinité, c’est donc Jean qui la cite ; la seconde met l’accent sur sa parfaite humanité, vécue dans la dépendance de Dieu, c’est donc Luc qui la rapporte. Fidèle aussi au caractère de son évangile, Jean décrit la mort même du Seigneur d’une manière particulière : « Il remit son esprit ». Le sage de l’Ancien Testament avait dit : « Il n’y a point d’homme qui ait pouvoir sur l’esprit pour emprisonner l’esprit, et il n’y a personne qui ait de la puissance sur le jour de la mort... » (Ecclésiaste 8:8) ; il y a cependant, ici, quelqu’un qui possède cette puissance. Il est capable à un moment d’élever la voix avec une force intacte, et à l’instant suivant de remettre son esprit ; il accomplit ainsi ses propres paroles citées au chapitre 10. En effet, Jésus a parlé de laisser sa « vie » (ou son « âme »), lorsqu’il a dit : « Personne ne me l’ôte, mais moi, je la laisse de moi-même ; j’ai le pouvoir de la laisser et j’ai le pouvoir de la reprendre ». Mais ces deux déclarations s’accordent parfaitement, car nous savons tous que, quand l’esprit humain quitte le corps, la vie terrestre de l’homme s’arrête. Quand Dieu rappelle son esprit, il doit partir. Nous sommes en présence de celui qui a toute autorité sur son esprit ; il le remet au Père et laisse donc sa vie.
Nous trouvons au chapitre suivant que Jésus, après avoir laissé sa vie, l’a reprise par la résurrection. Le reste de notre chapitre est rempli des activités diverses des hommes ; certains agissent en ennemis, d’autres en amis : mais tous travaillent ensemble à l’accomplissement final des conseils de Dieu, exactement comme il l’avait dit dans sa Parole.
Les Juifs sont sur le devant de la scène, eux qui sont ses adversaires les plus implacables. Ils étaient rigoureusement attachés au côté rituel de la religion et, comme le sabbat de la Pâque était important, il était particulièrement saint à leurs yeux. Ils ne pouvaient pas entrer dans le prétoire sans se souiller ! (ch. 18). Nous voyons maintenant que leur esprit légaliste répugne à l’idée que des cadavres d’hommes méchants soient exposés, ce jour-là, à la vue du ciel et des hommes. Ils avaient évidemment raison, car c’était un commandement donné en Deutéronome 21:23. C’était en effet le genre d’ordonnance qu’ils aimaient observer, tout en négligeant des sujets beaucoup plus importants. Ce sont donc eux qui ont demandé que la mort soit accélérée en brisant les jambes. Ils ont contribué ainsi indirectement à l’accomplissement d’une des nombreuses prophéties qui convergeaient vers ce grand jour où Jésus est mort.
Nous aurions pu penser que la vie du Seigneur se serait prolongée bien au-delà de celle des autres. En fait, c’est le contraire qui s’est produit, uniquement parce qu’il a laissé sa vie volontairement. S’il ne l’avait pas fait, l’acte humain de le crucifier n’aurait eu aucun effet contre lui. Il est significatif aussi de voir que Jean ne désigne pas les autres crucifiés comme étant des brigands ou des malfaiteurs ; ce sont simplement « deux autres » (v. 18). Il n’avait pas besoin de mentionner leur caractère particulièrement mauvais pour augmenter le contraste. La grandeur du Fils de Dieu est telle qu’il suffit de dire que ce sont deux autres hommes.
À la demande des Juifs, Pilate a donné aux soldats des ordres qui ont entraîné deux conséquences. Premièrement, aucun des os de notre Seigneur n’est brisé, alors qu’on brise les jambes des deux autres pour accélérer leur mort ; l’Écriture est donc ainsi accomplie. L’expression doit faire référence au Psaume 34:20, et aux instructions données pour l’agneau de la Pâque en Exode 12, et répétées en Nombres 9. Remarquons comment l’Esprit de Dieu identifie pleinement l’agneau avec le Seigneur Jésus : ce qui est dit de l’agneau peut s’appliquer au Seigneur. Paul dit également que « Notre pâque, Christ, a été sacrifiée » pour nous (1 Corinthiens 5:7).
Deuxièmement il y a le geste délibérément cruel et vengeur du soldat, avec sa lance. Voyant que Jésus est mort et qu’il n’a donc pas le droit de lui briser les os, il lui enfonce une lance dans le côté. Il agit sans comprendre la profonde signification de son geste. Une fois de plus, ce qui faisait partie du conseil divin s’est cependant réalisé et l’Écriture a été accomplie. Le prophète Zacharie avait déclaré qu’un jour l’esprit de grâce et de supplications serait répandu sur la maison de David et les habitants de Jérusalem, et : « ils regarderont vers moi, celui qu’ils auront percé » (12:10). Remarquons comment l’acte d’un fonctionnaire subalterne est considéré comme étant accompli par ceux dont la détermination et la volonté étaient à l’origine de tout ce qui était arrivé. Le soldat romain n’était que l’instrument de cette méchanceté ; dans l’avenir, le résidu repentant d’Israël reconnaîtra cet acte comme celui de sa nation. Même aujourd’hui, ne reconnaissons-nous pas ce coup de lance comme l’expression terrible de la haine de l’homme et du rejet plein de mépris du Fils de Dieu ?
Mais l’Évangéliste attire particulièrement notre attention sur le résultat de cet acte cruel. « Un des soldats lui perça le côté avec une lance ; et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau ». C’est à cela que Jean se réfère au verset 35, quand il affirme solennellement la vérité de son récit pour produire la foi chez le lecteur. Tout d’abord, le fait que le côté du Seigneur a été percé montre publiquement que la mort a réellement eu lieu. Ensuite, par ce moyen, son sang a vraiment été répandu. Pour réaliser l’importance de ce fait, nous pouvons simplement nous rappeler que « sans effusion de sang il n’y a pas de rémission » (Hébreux 9:22). Christ est donc mort et son sang a été répandu ; nous savons quels résultats miséricordieux et bénis en découlent enfin, pour chacun de nous, lorsque notre foi s’empare de ces vérités et se repose sur elles. Nous ne sommes donc pas surpris que Jean affirme avec force que son témoignage est véritable.
Du côté percé du Seigneur, est sortie, en fait, de l’eau aussi bien que du sang. Réfléchissons à ce que cela signifie, car Jean s’y arrête de nouveau au chapitre 5 de sa première épître. Nous y lisons en effet que Jésus Christ est venu « par l’eau et par le sang » ; l’accent est mis sur le fait que c’est « non seulement dans la puissance de l’eau, mais dans la puissance de l’eau et du sang ». Si le sang parle d’expiation vis-à-vis de la justice divine, l’eau parle de purification morale ; les deux sont absolument essentiels et nous ne les trouvons que dans la mort de Christ. Il y a toujours la tendance à séparer les deux. Lorsque Jean a écrit, certains insistaient sur l’eau et ignoraient ou sous-estimaient la valeur du sang. Cette tendance existe toujours. En effet beaucoup aiment considérer sa mort comme ayant sur nous un effet moral ; par contre ils repoussent l’idée que sa mort ait payé les gages du péché et accompli ainsi l’expiation. Évidemment on peut trouver à l’autre extrême ceux qui ne reconnaissent rien d’autre que le sang versé pour nos péchés. Ils négligent la nécessité de cette purification morale dont la mort de Christ est le fondement absolument essentiel.
Dans l’évangile, Jean nous rapporte ce qui s’est passé, alors que, dans son épître, l’eau et le sang sont considérés comme rendant témoignage, conjointement avec l’Esprit. Ils rendent témoignage « que Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie est dans son Fils » (1 Jean 5:11). Le sang et l’eau sont sortis d’un Christ mort. L’Esprit a été répandu par Christ ressuscité et glorifié. Ensemble, ils rendent témoignage que nous avons la vie éternelle dans le Fils de Dieu, alors qu’il n’y a pas de vie en nous.
Joseph d’Arimathée apparaît maintenant, au moment précis où il peut servir le propos de Dieu. Il est mentionné dans chaque évangile ; chacun nous fournit quelque détail particulier à son sujet. Matthieu nous dit qu’il était riche et disciple. Marc l’appelle un conseiller honorable qui attendait le royaume de Dieu. Luc dit qu’il était homme de bien et juste ; il ne s’était pas joint au conseil et à l’action de la grande majorité du sanhédrin pour faire mourir Jésus. Jean admet qu’il était disciple, mais en secret, par crainte des Juifs. Apparemment il avait été dans une situation comparable à celle des pharisiens mentionnés aux versets 42 et 43 du chapitre 12. Cependant, il est remarquable que, à cette heure si sombre où tout semble désespérément perdu, comme le prouve l’attitude des disciples sur le chemin d’Emmaüs (Luc 24), Joseph ait trouvé le courage d’aller demander à Pilate le corps de Jésus. Marc nous dit qu’il est entré courageusement auprès de Pilate et Dieu a dirigé la décision du gouverneur. Ésaïe avait dit qu’il serait « avec le riche dans sa mort », bien qu’on lui ait donné son sépulcre avec les méchants. Les Juifs auraient préféré qu’il soit jeté sous un tas de pierres, avec les corps des malfaiteurs. Mais Dieu a accompli sa parole, d’abord par la hardiesse soudaine de Joseph, et ensuite par le désir de Pilate de contrarier les plans des Juifs, car il était irrité contre eux. Dieu dirige partout, et toutes choses servent sa puissance.
C’est le moment où Nicodème réapparaît. Il est mentionné trois fois dans cet évangile alors qu’il ne l’est nulle part ailleurs. Nous le voyons d’abord comme quelqu’un qui cherche, mais qui a besoin d’être abaissé de sa position élevée de pharisien, docteur et chef en Israël. Il faut qu’il soit né de nouveau. À la fin du chapitre 7, il soulève calmement une objection au méchant conseil et aux actions du sanhédrin. Il défend ce qui est juste et il est remis à sa place à cause de sa protestation. Nous le voyons faire ici un pas de plus. Il s’est associé à Jésus dans sa mort plus clairement qu’il ne l’a jamais fait pendant sa vie. Lui aussi a dû être riche, à en juger par la quantité d’aromates qu’il a apportée. La croix a paralysé les hommes qui s’étaient hardiment associés au Seigneur durant sa vie et son ministère ; elle a donné par contre à ces hommes timides et prudents le courage d’agir avec hardiesse alors que jusque-là ils étaient restés inconnus, dans l’ombre. En vérité, le Tout-puissant a des serviteurs partout !
Remarquons la fin de ce chapitre. Près du lieu de la crucifixion il y avait un jardin et un sépulcre taillé dans le roc. Seul Matthieu nous dit que c’était le tombeau de Joseph ; il dit aussi qu’il était neuf. Luc et Jean insistent davantage sur ce point, en disant que personne n’y avait jamais été déposé. Le psalmiste avait annoncé que l’Éternel ne permettrait pas que « son saint voie la corruption » (Psaume 16:10). Cela signifiait que le corps sacré et saint de Jésus n’a pas connu la corruption, bien qu’il soit passé par la mort. Mais cela voulait dire aussi que son corps ne devait avoir aucun contact, même extérieur, avec la corruption. Lorsque Dieu accomplit sa parole, il le fait minutieusement et entièrement.
Ainsi, la main du Tout-puissant a couvert de son ombre tous les hommes et tous les événements. Tout ce qui avait été déclaré auparavant par de saints hommes s’est réalisé. Le conseil de l’Éternel subsiste à toujours.
Dans notre évangile, Marie de Magdala n’apparaît que dans les scènes finales. Le jour de la résurrection, elle est parmi les derniers à rester près de la croix et parmi les premiers à aller au sépulcre. Il n’est pas facile de rassembler les récits des quatre évangélistes pour reconstituer la suite historique des événements. Marie semble être venue avec d’autres femmes de très grand matin. Elle a ensuite couru informer Pierre et Jean que le sépulcre était ouvert et vide, puis elle est revenue à proximité.
Les autres femmes ne sont pas du tout mentionnées ici. Nos pensées sont centrées sur Marie, pour que nous saisissions l’enseignement spirituel apporté par ses actes et ses paroles.
D’après ce que Marie dit aux apôtres, au verset 2, il est évident que le Seigneur est l’objet suprême qui remplit tout son cœur. Il est remarquable qu’elle ait choisi d’aller vers ces deux disciples, car, peu de temps avant, Pierre avait gravement péché. Toutefois, comme le montre le chapitre suivant, il aime vraiment le Seigneur ; quant à Jean, c’est le disciple que Jésus aimait. Leur amour, pour le moment, s’est peut-être un peu refroidi, mais il existe toujours ; et Marie, remplie d’un amour ardent, le sait bien.
L’amour des deux disciples est mis en évidence par la façon dont ils répondent à la nouvelle apportée par Marie. Ce qu’elle leur dit stimule leur affection et leur énergie. Ils courent avec empressement et Jean dépasse Pierre. L’explication naturelle est, sans doute, qu’il est le plus jeune ; mais il y a aussi une explication spirituelle. Jean est plus profondément marqué par l’amour du Seigneur envers lui ; il le montre par la manière dont il se nomme. Sur Pierre pèse la honte de s’être confié dans son propre amour pour le Seigneur ; lorsqu’il a été mis à l’épreuve, il s’est effondré publiquement de façon scandaleuse. Celui qui est plus attiré par l’amour de Christ court le plus vite. C’est ce que nous trouvons au Cantique des cantiques : « Tire-moi : nous courrons après toi » (1:4).
En dépit de sa chute déshonorante, Pierre court quand même ; arrivé au sépulcre, il est le plus courageux des deux et il entre tout de suite à l’intérieur. Cela pousse Jean à le rejoindre. Ils sont donc deux à témoigner que les linges, dans lesquels le corps saint avait été enveloppé, ne sont pas en désordre. Leur disposition suggère que le corps du Seigneur n’a pas été enlevé par d’autres, mais que Jésus est sorti de la mort sans déplacer tant soit peu les linges. Le verset 19 montre que des portes fermées ne sont pas un obstacle pour le corps ressuscité de notre Seigneur ; de même, sans aucun doute, les linges avaient été laissés tels qu’ils étaient.
Au verset 8, Jean parle pour lui-même ; il a cru, même s’il n’a fait qu’accepter ce qu’il avait devant les yeux. Pierre n’est pas mentionné. La foi, qui existait sans doute, ne peut pas agir quand l’âme est assombrie par le manquement et le péché, et qu’elle n’est pas encore restaurée. Mais bien que Jean ait cru, sa foi n’était pas une foi intelligente car, comme les autres, il n’était pas éclairé par la compréhension de l’Écriture. Sinon, il aurait su qu’il fallait que le Christ ressuscite d’entre les morts (voir Actes 17:3) ; cela aurait tout expliqué. Ainsi, bien qu’il y ait de la foi, il y a aussi de l’ignorance ; cela nous fait comprendre le verset 10. L’exemple donné par Pierre et Jean, au matin de la résurrection, est suivi dans l’après-midi par Cléopas et son compagnon (Luc 24).
La conduite de Marie tranche de manière éclatante avec tout le reste. Les deux disciples s’en retournent chez eux, convaincus que le corps de Jésus n’est pas là. Marie est aussi convaincue qu’eux, mais elle quitte sa maison pour s’attarder près du sépulcre, et pleure à cause de sa profonde affliction. Ils connaissaient le Seigneur comme celui qui les avait appelés à quitter leur barque et leurs filets. Elle le connaît comme quelqu’un qui l’a délivrée de l’emprise de sept démons. Cette délivrance extraordinaire avait produit chez elle un grand amour. Deux anges lui apparaissent ; il n’est pas dit qu’elle ait été effrayée par leur présence.
C’est remarquable car, dans les autres évangiles, la peur est mentionnée lors de chaque apparition angélique. Le cas de Marie illustre bien le fait qu’un attachement irrésistible peut chasser du cœur tout autre sentiment. Sa réponse à la question des anges montre combien Jésus, qu’elle appelle « mon Seigneur », remplit toutes ses pensées. Elle répond comme si elle rencontrait des anges tous les jours ! Elle cherche son Seigneur, mais elle ne sait pas où il est. Elle suppose que ce sujet les préoccupe autant qu’elle. Jusque-là, apparemment, aucune pensée au sujet de la résurrection du Seigneur ne lui a traversé l’esprit. Elle pense seulement que d’autres ont enlevé son corps. Elle cherche un Christ mort.
À ce moment-là, le Seigneur ressuscité intervient. Elle se retourne et le trouve là, debout ; cependant elle ne le reconnaît pas. Le même détail caractérise la rencontre avec les deux disciples d’Emmaüs cet après-midi-là, et avec le reste des disciples dans la chambre haute, ce soir-là. C’est le même Jésus, mais avec une différence due au fait qu’il est revêtu d’un corps ressuscité (ressuscité, mais pas encore glorifié) ; c’est pourquoi ils ne le reconnaissent pas immédiatement. Elle pense que c’est le jardinier. Lui, le grand pasteur ressuscité d’entre les morts, sait très bien qu’il y a là une de ses brebis qui lui est entièrement dévouée, qui le cherche lui seul et qui pleure, car elle ne sait où le trouver.
Il se révèle à elle, en l’appelant simplement par son nom ; elle lui répond immédiatement : « Marie ». Tout ce qui est rapporté aux versets 11 à 15 montre cependant qu’elle cherchait son corps mort. Comme elle a trouvé le Seigneur vivant, sa première pensée est de reprendre les relations sur le fondement qui existait auparavant. C’est ce qui explique les premiers mots que le Seigneur lui adresse : « Ne me touche pas ». Étant donné la nouvelle relation qu’il allait lui révéler, et par elle aux autres disciples, il lui montre nettement que les relations ne peuvent pas reprendre comme avant. Sa mort et sa résurrection ont tout changé. Il reste un homme, comme avant sa mort ; cependant, après avoir laissé sa vie, il l’a reprise dans un nouvel état et une nouvelle condition appropriés aux cieux dans lesquels il va monter. Dorénavant les relations avec lui doivent avoir une nouvelle base.
Après avoir dit à Marie : « Ne me touche pas », le Seigneur ajoute : « Car je ne suis pas encore monté vers mon Père ». Il sous-entend donc que Marie sera en relation avec lui, à ce moment-là. Son ascension vers le Père implique la venue du Saint Esprit sur les disciples, ce qui a été très clairement établi dans cet évangile (7:39 ; 14:16 ; 15:26 ; 16:13). Marie a été remplie de l’Esprit Saint, à la Pentecôte, avec les autres disciples ; son âme a été alors introduite dans une relation beaucoup plus intime avec son Seigneur ressuscité que ce qu’elle avait expérimenté jusque-là quand le Seigneur était sur la terre.
Il est certain que les apôtres ont été bien plus privilégiés que nous, dans la mesure où ils ont « entendu,... vu,... contemplé et... touché... la parole de la vie » (1 Jean 1:1). Mais, tandis qu’ils marchaient avec Jésus, à travers le pays d’Israël, ils ne discernaient pas la vraie signification de ce qu’ils observaient. Comme les versets 17 et 20 du chapitre 14 nous l’ont montré, ce sera seulement lorsque l’Esprit demeurera en eux qu’ils connaîtront qu’ils sont en Jésus et lui en eux. Ils posséderont sa vie et un lien nouveau sera établi. Or nous aussi, nous avons l’Esprit de Dieu. Bien que la manifestation extérieure de la parole de la vie nous soit parvenue seulement par l’intermédiaire des écrits inspirés, et non directement comme pour les apôtres, nous pouvons la réaliser intérieurement dans une pleine mesure. Nous ferons bien de méditer profondément ce sujet.
Ce verset important contient un autre enseignement. Jésus appelle les disciples « mes frères ». Ils ont été auparavant désignés comme étant « les siens » (13:1) et il les avait appelés : « mes amis » (15:14) ; aucun de ces termes ne souligne la nouvelle relation comme l’expression : « mes frères ». Nous apprenons donc qu’il a établi ce lien parce qu’il est le ressuscité, qui a traversé la mort et en a triomphé. Cette relation n’existe pas à cause de son incarnation, mais à cause de la puissance de sa résurrection. Il a vraiment participé « au sang et à la chair » et a pris « la semence d’Abraham » pour traverser les souffrances de la mort. Ayant goûté la mort pour chacun et ayant été rendu parfait par les souffrances, il est devenu le chef de notre salut. Parce qu’il est celui qui sanctifie, il reconnaît ceux qu’il sanctifie comme étant ses frères (Hébreux 2:9-16). En devenant un homme, il est venu près de nous, afin de pouvoir, dans son humanité parfaite et sans tache, prendre en main notre cause. L’ayant prise en main et ayant accompli pour nous la délivrance par sa mort et sa résurrection, il nous élève près de lui en nous identifiant à lui dans la résurrection. Par conséquent, ce lien avec lui est fondé sur sa résurrection et non sur son incarnation. C’est un point très important à ne pas oublier.
Le message que Marie va porter aux autres disciples leur annonce cette nouvelle relation avec Dieu et non pas seulement avec le Seigneur. Son Père est notre Père, son Dieu est notre Dieu. Il nous introduit dans sa propre relation avec Dieu, parce que nous sommes associés à lui. Notre relation avec Dieu découle de la sienne et de nos relations avec lui. Il n’a pas dit : notre Père et notre Dieu, comme si nous étions sur le même plan que lui. Notons bien cela, car sa prééminence absolue doit toujours être reconnue avec actions de grâce. Bien qu’il parle de nous comme « mes frères » nous ne le trouvons jamais appelé dans les Écritures notre frère, ni même notre frère aîné. De telles expressions laisseraient supposer qu’il est celui qui est descendu près de nous plutôt que celui qui nous a élevés près de lui. Elles voileraient aussi sa position prééminente.
Dans sa merveilleuse vie sur la terre, le Seigneur Jésus avait révélé le Père, car ce dernier demeurait en lui. Il pouvait donc dire : « Celui qui m’a vu, a vu le Père ». C’est ce que nous avons trouvé en étudiant le chapitre 14. Il avait aussi enseigné aux disciples à regarder à Dieu comme à leur « père céleste », pour tous leurs besoins et leurs circonstances dans ce monde ; nous trouvons cela dans les autres évangiles, mais une révélation plus complète est faite ici. Nous ne perdons pas la bénédiction et le bénéfice de la révélation précédente, ni ceux de sa manifestation comme le Tout-puissant ou l’Éternel. Nous avons besoin d’être rendus intelligents et de nous réjouir dans la connaissance de Dieu comme « le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ » (Éphésiens 1:3 et 1 Pierre 1:3). Les paroles du Seigneur à Marie étaient la première révélation de cette relation plus complète et plus élevée. Les épîtres du Nouveau Testament nous présentent ensuite Dieu de cette manière. Il est en effet un « Père céleste » pour nous, dans tous les événements de cette vie ; mais ne nous arrêtons pas à cela, comme s’il n’y avait rien d’autre ; en tant que chrétiens, notre vraie relation avec Dieu repose sur un fondement plus élevé.
Marie de Magdala, la femme au cœur sensible et plein d’amour, est la première à entendre ces révélations merveilleuses. Elle en est devenue la messagère pour nous tous. Elle peut témoigner qu’elle a vu le Seigneur, qu’il lui a confié ce message ; par son moyen il l’a envoyé aussi aux autres disciples.
Plus tard, ce même jour, le Seigneur apparaît à Simon Pierre, à Cléopas et à son compagnon qui étaient en route vers Emmaüs ; mais Jean n’en fait pas mention. Cependant, les autres évangiles montrent clairement que, au fil des heures, les disciples avaient pu entendre les deux témoins de sa résurrection, Marie et Pierre ; leur témoignage les avait conduits à se retrouver à Jérusalem alors que le soir approchait. Lorsqu’ils sont assemblés, Cléopas et son ami se joignent à eux, leur apportant un troisième et un quatrième témoignage. Puis, les portes étant fermées, Jésus lui-même se tient au milieu d’eux, et se fait connaître par ses mains et son côté percés ; il remplit leur cœur de joie.
Les portes avaient été fermées par crainte des Juifs. Sa présence comme ressuscité fait que la joie apaisait leur crainte. Cependant il leur manquait encore un élément qui leur serait apporté uniquement quand l’Esprit de Dieu les remplirait. Le jour de la Pentecôte, la crainte avait complètement disparu, et ils étaient remplis de hardiesse et de puissance.
Le Seigneur Jésus doit toujours tenir la place centrale. Il l’a occupée au moment de sa mort (19:18). Ici, il l’occupe dans la résurrection ; ainsi s’accomplit sa parole rapportée dans l’évangile de Matthieu (18:20). Le soir du jour de la résurrection, les disciples sont assemblés en son nom, bien que ne croyant qu’en partie les témoins de sa résurrection. Jésus vient au milieu d’eux, sous une forme visible. La principale différence pour nous aujourd’hui, c’est qu’il prend place, sous une forme invisible, là où des disciples sont assemblés en son nom. Quand sa présence est réalisée, le résultat est le même qu’ici : paix et joie. La parole de paix est sortie de ses lèvres. La joie a suivi lorsque leurs yeux ont confirmé ce qu’ils avaient entendu.
Au premier chapitre des Actes, Luc nous dit que Jésus s’est présenté lui-même, vivant, « avec plusieurs preuves assurées » : en particulier ses mains et son côté percés qu’il montre à ses disciples. Ces marques saintes l’identifient incontestablement. La mort et la résurrection avaient été accomplies et étaient comme deux colonnes jumelles sur lesquelles la paix qu’il avait annoncée était fermement établie. Le Seigneur les a salués deux fois, en leur disant : « Paix vous soit ! ». Il savait très bien qu’ils ne seraient pas capables de recevoir ce qu’il voulait encore leur communiquer tant que cette paix ne serait pas effective dans leur cœur. Il en est de même pour nous aujourd’hui. Tant que nous ne jouissons pas d’une paix sûre, en Dieu, nous ne pouvons faire aucun progrès spirituel.
Après avoir annoncé la paix pour la deuxième fois, le Seigneur ressuscité envoie ses disciples en utilisant des paroles concises, mais lourdes de sens. Chaque évangile présente une mission avec des différences caractéristiques. Matthieu (28:19) la présente dans des termes propres à frapper un lecteur juif. Ceux qui étaient envoyés allaient faire des disciples, non plus dans le cercle très restreint indiqué auparavant dans cet évangile (10:5-11), mais parmi toutes les nations. Ils avaient à baptiser pour le nom qui avait été révélé en Christ, mais non pas du baptême de Jean, ou d’un autre baptême semblable. La mission était formulée afin de s’appliquer à ceux qui pourraient faire des disciples après le départ de l’Église. En Marc (16:15) également, l’aspect universel de l’évangélisation et du service apostolique est souligné. C’est aussi le cas en Luc (24:47), où le point important semble être la plénitude de la grâce. C’est à Jérusalem, la ville la plus méchante, que la grâce pouvait commencer et s’étendre à toutes les nations. Les trois évangiles synoptiques ont cependant ceci en commun : la mission est toujours en rapport avec l’évangélisation et le service des apôtres.
Mais dans Jean, comme il convient à cet évangile, la pensée est plus profonde. Le Seigneur Jésus avait été envoyé d’auprès du Père, afin que le Père puisse être manifesté en lui. Comme le chapitre 14 l’a si bien expliqué, il était dans le Père quant à son être, sa vie et sa nature ; par conséquent le Père était en lui, et il a été ainsi pleinement révélé. Maintenant, étant mort et ressuscité, il s’en va au Père. Il laisse des disciples dans le monde. Il les envoie afin qu’ils y soient pour lui, comme lui-même avait été envoyé pour être pour le Père. Pour comprendre leur mission, nous devons premièrement comprendre la mission même du Seigneur comme envoyé du Père.
Remarquons combien de fois, dans cet évangile, le Seigneur est présenté comme celui que le Père a envoyé dans le monde. Sous des formes légèrement différentes, il en est parlé plus de quarante fois. Il est bien présenté comme celui qui était Dieu et qui était auprès de Dieu (Jean 1:1). Il n’était donc pas originaire du monde, comme s’il en était issu. Il est venu d’en haut et il a apporté avec lui tout ce qu’il était. Ses paroles et ses œuvres étaient toutes du Père. Quelque chose de nouveau va maintenant se réaliser ; quand le Seigneur l’a institué, il accomplissait ce qu’il a dit lui-même dans sa prière au Père (voir 17:18). Il s’en allait et les envoyait maintenant de sa part.
Le fait que les disciples n’étaient pas du monde, comme Jésus lui-même n’en était pas, était le véritable motif pour lequel ils étaient envoyés. Le verset 16 du chapitre 17 l’affirme aussi. Il y avait cependant une différence. Ils faisaient autrefois partie du monde ; il y avait donc pour eux un lien à briser et de nouveaux liens à établir. Ceci nous amène au verset 22 de notre chapitre.
Le Seigneur leur confie une mission et leur fait ensuite un don, associé à un geste particulier. Il souffle en eux et dit : « Recevez Esprit Saint » ; en effet l’article défini « le » est absent dans l’original. Nous devons observer le lien entre ce qui est dit ici et le récit de la création d’Adam (Genèse 2:7). En ce qui concerne son corps, Adam a été formé de la poussière du sol ; mais sa partie spirituelle a été créée lorsque Dieu a soufflé dans ses narines une respiration de vie. C’est ainsi qu’il est devenu une âme vivante. Or notre Seigneur, qui est le dernier Adam, est un esprit vivifiant, ou qui fait vivre (1 Corinthiens 15:45). Nous le voyons ici souffler dans ses disciples la vie qu’il possède comme ressuscité.
Mais, puisqu’il en est ainsi, pourquoi Jésus a-t-il dit : « Recevez l’Esprit Saint » ? Parce que sa propre vie, en tant qu’homme ressuscité, est vécue dans l’énergie de l’Esprit Saint. Il a été « mis à mort en chair, mais vivifié par l’Esprit » (1 Pierre 3:18). D’après le chapitre 2 des Actes, le jour de la Pentecôte, les disciples ont en effet reçu le Saint Esprit comme personne divine, venant demeurer dans leur corps même. Nous avons ici un événement qui le prépare. Le jour même où Jésus a débuté sa vie de ressuscité, vivifié dans et par l’Esprit de Dieu, il l’a communiqué aux siens.
Nous devons relier cet acte important à ce qui précède et à ce qui suit. Comment pourraient-ils être envoyés dans le monde, pour y être pour lui comme il avait été envoyé par le Père, s’ils ne possédaient pas sa vie de ressuscité ? La vie naturelle qu’ils avaient reçue d’Adam ne leur donnait aucune compétence pour une telle mission. Ils n’avaient absolument aucune puissance avant que le Saint Esprit soit répandu abondamment à la Pentecôte. Ils avaient maintenant la vie et la nature qui rendaient possible cette mission. Nous ne trouvons pas cet acte dans les autres évangiles, mais nous lisons : « Il leur ouvrit l’intelligence pour comprendre les Écritures » (Luc 24:45). Nous pensons qu’être rendu intelligent est la conséquence du fait que Jésus a soufflé en eux sa vie de ressuscité.
Cependant, dans notre évangile, deux conséquences en découlent. Premièrement les disciples ont été rendus capables de témoigner dans le monde, comme envoyés de la part du Seigneur ; deuxièmement, ils ont été investis de pouvoirs administratifs pour remettre ou retenir les péchés (bien sûr, ce n’est pas en relation avec l’éternité, mais c’est uniquement en gouvernement). Nous voyons, dans l’évangile selon Matthieu, que le Seigneur, avant sa mort et sa résurrection, avait indiqué que de tels pouvoirs devaient être conférés à Pierre (16:19). Ils devaient aussi être donnés à l’ensemble des apôtres (18:18). Dans chaque cas le Seigneur regardait à l’avenir. Ici la puissance est réellement accordée. À l’origine, sans aucun doute, la puissance était apostolique. Nous voyons Pierre l’exercer en Actes 5:1 à 11 ; le Saint Esprit le confirme clairement. Par contre, en 1 Corinthiens 5:3-5, 12, 13, c’est Paul qui l’exerce ; il demande à l’église d’agir avec lui, en retenant le péché du méchant. En 2 Corinthiens 2:4 à 8, il appelle l’église à avoir l’attitude contraire, car le méchant s’était repenti. Ils vont remettre ou pardonner (v. 10).
Dans les autres évangiles, le nom de Thomas n’apparaît que dans la liste des apôtres ; tout ce que nous savons de lui est contenu dans l’évangile selon Jean. Il est mentionné aux chapitres 11 et 14. Ce qu’il dit, à ce moment-là, nous aide à comprendre le côté de son caractère qui apparaît ici. C’était certainement un homme à l’esprit simple et plein de sens pratique ; il était aussi trop porté au matérialisme ; par conséquent il était difficile de le convaincre de quelque chose qui dépassait les limites de l’expérience humaine. Nous sommes maintenant très près du verset qui établit le but vers lequel cet évangile est destiné à nous conduire. Nous allons considérer le dernier et le plus important des miracles que Jean a placés devant nous. L’exemple de Thomas a donc une valeur particulière.
Thomas n’était pas présent le soir de la résurrection. Quand il entend le témoignage des autres disciples, résumé dans ces cinq mots si importants : « Nous avons vu le Seigneur », il n’est pas préparé à l’accepter. Doutant avec obstination, il déclare qu’il ne croira pas, sauf s’il a un signe visible, palpable et tout à fait incontestable. Il exige une preuve qui montrera très clairement que celui qui est apparu est le même que celui qui est mort sur la croix. En réalité, en contestant ainsi le témoignage des disciples, Thomas a lancé un défi à son Seigneur ressuscité. Si le Seigneur y répondait, cela lèverait pour lui tous les doutes concernant sa résurrection.
Avec grâce, le Seigneur condescend à y répondre, une semaine plus tard. Une nouvelle fois, il apparaît au milieu des disciples bien que les portes soient fermées. Une nouvelle fois, il les salue avec les mots : « Paix vous soit ». Il commande ensuite à Thomas de faire exactement ce qu’il avait dit, pour avoir la preuve visible et palpable qu’il désirait. Il donne aussi, en plus, une preuve spirituelle. Ce que le Seigneur dit à Thomas montre que le défi lui était parfaitement connu, même s’il avait été lancé alors qu’il était ressuscité, mais absent. À la fin du chapitre premier nous avons trouvé un incident semblable : Jésus a montré à Nathanaël qu’il l’avait vu, alors qu’il ne se savait pas observé sous le figuier ; Nathanaël a été convaincu et l’a ensuite confessé comme le Fils de Dieu et le roi d’Israël.
Cela se passait quand il était un homme sur la terre ; cependant il s’est révélé comme Celui qui voit tout. Ici « les jours de sa chair » sont terminés et il est ressuscité, mais il se révèle comme Celui qui entend tout. Tout cela a un effet bouleversant sur Thomas. Une fois convaincu, le sceptique obstiné est vraiment persuadé ! Quelques minutes plus tôt, il traînait loin derrière les autres disciples ; maintenant, d’un saut en avant, par sa confession enthousiaste, il les devance nettement. Nathanaël a été clair dans sa confession dès le départ ; Thomas, à la fin, est encore plus précis. Il n’y a encore que cinq mots. Mais quels mots ! « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
Ceux qui nient la divinité de notre Seigneur ont cherché à se soustraire à la force de cette expression. Ils l’ont considérée comme une simple exclamation qui ne serait adressée à personne en particulier. Le récit déclare pourtant clairement que ces mots étaient adressés au Seigneur ; dans l’original leur forme est pleine de force puisque l’article défini est employé deux fois. Jésus, le ressuscité, est pour Thomas le Seigneur et le Dieu. Ce qui est encore plus significatif c’est que le Seigneur répond : « Parce que tu m’as vu, tu as cru ». Il considère donc incontestablement l’exclamation, pleine de joie, de Thomas comme la foi qui saisit la réalité de sa résurrection. Autrement dit, il accepte la confession comme étant vraie. Il n’y a pas de plus grand péché que celui d’un homme qui accepte les honneurs ou la louange dus à Dieu ; le châtiment dramatique d’Hérode en est un témoignage (Actes 12). Lorsque Jean est tombé aux pieds d’un ange saint, comme s’il allait lui rendre hommage, la réponse immédiate a été : « Garde-toi de le faire » (Apocalypse 22:9). Au lieu de reprendre Thomas, Jésus a approuvé sa confession et l’a qualifiée de foi.
La divinité absolue de Jésus étant ainsi reconnue, le but de cet évangile est atteint, et les versets 30 et 31 terminent ce chapitre d’une manière appropriée. Tous les miracles dont nous avons le récit ne sont qu’une infime partie de la totalité. Ceux qui sont rapportés sont cependant tout à fait suffisants. Dans cet évangile, ils sont spécialement choisis pour offrir de nombreuses raisons pour croire en Jésus comme le Christ, le Fils de Dieu ; c’est la foi en cette vérité qui apporte la vie par son nom.
Remarquons que la dernière preuve, et la plus décisive, du fait que Jésus est le Fils de Dieu est qu’il a accepté que la divinité lui soit personnellement attribuée. Nous pouvons dire ceci : s’il est Dieu, il est le Fils de Dieu, et inversement, s’il est le Fils de Dieu, il est Dieu. Notons aussi que sa qualité de Fils est l’élément essentiel de cet évangile. Il fait remonter la personne de Jésus jusqu’aux profondeurs insondables de l’éternité passée, et il ne donne aucun détail sur le fait qu’il soit né d’une vierge. Si nous saisissons réellement cet évangile par la foi, nous serons convaincus que sa qualité de Fils est éternelle et qu’il ne l’a pas revêtue en venant dans le monde.
Remarquons encore la signification des paroles du Seigneur, au verset 29. Il y a quelque chose de meilleur que d’accepter des preuves visibles et palpables ; c’est de croire la parole, sans autres preuves. Thomas illustre sans aucun doute la manière dont un résidu pieux d’Israël découvrira la vérité, un jour à venir. La parole du prophète s’accomplira : « Ils regarderont vers moi, celui qu’ils auront percé » (Zacharie 12:10). C’est alors qu’ils s’écrieront : « Mon Dieu, nous te connaissons... » (Osée 8:2). La bénédiction supérieure de ceux qui croient sans voir, est la part de tous ceux qui reçoivent aujourd’hui l’évangile par la foi, qu’ils soient Juifs ou gens des nations.
Nous ne pouvons rendre à Dieu un plus grand hommage de reconnaissance que de le prendre au mot entièrement et simplement, sans demander une confirmation visible ou tangible. Comme la lumière peut se décomposer dans les couleurs de l’arc-en-ciel, ainsi le nom divin est composé de plusieurs caractéristiques de valeur et d’importance égales. Dieu souligne cependant que sa parole est vraie et que nous pouvons nous y fier ; en effet, nous lisons : « Tu as exalté ta parole au-dessus de tout nom » (Psaume 138:2). Combien cela est à propos, si nous réalisons que le péché est entré au commencement parce que l’homme n’a pas cru la parole de Dieu ! L’époque actuelle où l’évangile est annoncé est une période particulière où les hommes croient sans voir. Il est écrit : « Lequel, quoique vous ne l’ayez pas vu, vous aimez ; et, croyant en lui, quoique maintenant vous ne le voyiez pas, vous vous réjouissez d’une joie ineffable et glorieuse, recevant la fin de votre foi, le salut des âmes » (1 Pierre 1:8, 9).
Ce passage nous donne un aperçu du bonheur particulier dont le Seigneur a parlé à Thomas. Ce bonheur peut être le nôtre ; plus notre foi sera ardente et simple, plus nous en jouirons profondément. Que chaque lecteur de ces lignes puisse connaître complètement la plénitude de bonheur qui en résulte et que ce soit également la part de l’auteur !
D’après les derniers versets du chapitre 20, toutes les preuves que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, ont été données. Cette vérité n’est pas développée dans le chapitre 21 ; il y a les récits des entretiens du Seigneur avec certains de ses disciples, conversations qui sont entièrement passées sous silence dans les autres évangiles. On peut les considérer de deux manières différentes : premièrement, comme des images ou des types d’événements à venir ; deuxièmement, comme montrant les voies de grâce du Seigneur envers les disciples, en ce qui concerne leur avenir.
Le verset 14 nous permet de comprendre la signification de ces versets, comme images de circonstances futures. Au commencement, l’évangéliste a attiré notre attention sur certains jours. Au début du chapitre 2, il y a une manifestation de la gloire de Jésus le troisième jour, image du millénium. Nous avons maintenant devant nous ce qui est appelé la troisième manifestation de Jésus, ressuscité d’entre les morts ; de nouveau nous découvrons que cela a une signification en relation avec la même période.
Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, la première manifestation a eu lieu le jour même de la résurrection. Tout ce qui est rapporté à ce sujet touche à la part de l’église, en relation avec le Seigneur ressuscité. La deuxième manifestation, dans le même chapitre, parle du réveil de la foi dans le résidu d’Israël, lorsque les juifs, à la fin, regarderont vers celui qu’ils auront percé. Cela est présenté en Thomas. Nous arrivons maintenant à la troisième, quand le matin du millénium se lèvera et que le Seigneur sera révélé comme le maître de chaque circonstance et comme celui qui pourvoit à chaque besoin. Les trois jours, signalés aux chapitres 1 et 2, ont respectivement le même sens.
La pensée principale de cet évangile est la révélation du Père, dans la personne du Fils, et pour nous l’affirmation que Jésus est véritablement le Fils de Dieu. Nous n’avons ainsi aucun doute sur cette révélation ; au contraire, sa lumière brille dans notre âme avec toute sa splendeur. Il est donc remarquable que cet évangile commence et se termine par ces rappels figurés des diverses périodes dans lesquelles Dieu s’est révélé aux hommes ; cependant, la préoccupation de l’évangile est ce qui demeure éternellement au-dessus de toutes ces différences. Il se peut qu’elles entraînent des mesures différentes de compréhension chez les croyants, mais ce qui est à saisir sera toujours pareil.
Jean nous a donné un récit du reniement de Pierre. Il n’a rien dit cependant de ses larmes amères, versées juste après que le Seigneur l’eut regardé, ni de l’entretien personnel de Pierre avec son Seigneur ressuscité, à la fin du jour de la résurrection. Au début de ce chapitre, nous trouvons Pierre qui retourne à la pêche et qui prend six autres disciples avec lui. Le Seigneur ne l’avait pas appelé, au début, pour ce genre de pêche. Tout en sachant que le Seigneur lui avait pardonné, il se comporte comme si son appel au service avait pris fin. Toutefois, le Berger ressuscité allait restaurer pleinement son âme et les conduire tous dans les sentiers de justice.
Leur sortie sur le lac est un échec. Le verset 3 la résume ainsi : « Cette nuit-là ils ne prirent rien ». Quand le matin arrive, tout est complètement changé, car Jésus est là ; le filet est plein de gros poissons. Pas de filet rompu ou de nacelle qui enfonçait, comme en Luc 5. Pierre ne s’est pas non plus jeté à terre pour confesser qu’il était un homme pécheur, bien que sa triste chute ait été si récente. Au contraire, il s’est jeté dans la mer, pour aller Jésus le plus vite possible. De nouveau nous constatons combien l’accent est mis sur Pierre quand il est question de l’amour qui agit ; Jean, en revanche, manifeste davantage l’amour qui est clairvoyant.
Parvenus au rivage, les disciples se trouvent devancés, malgré l’importance de leur prise. Le Seigneur leur a préparé du feu, du poisson et du pain ; c’est lui qui pourvoit à tout. Voilà une image des disciples sortant et ramenant sous la direction du Seigneur une grande moisson, tirée de la mer des nations. C’est ce qui caractérisera le début du millénium. C’est aussi une leçon adressée à Pierre et aux autres, pour leur montrer qu’ils n’ont pas besoin de retourner à leur occupation ordinaire, même si le Seigneur l’a particulièrement bénie. Sa main avait déjà préparé leur nourriture. Les disciples reconnaissent que c’est bien leur Seigneur ressuscité qui se trouve là, non à cause de ce qu’ils ont vu de leurs yeux, mais à cause de ce qu’il a fait, qui est unique.
Le Seigneur commence alors à s’occuper plus particulièrement de Simon Pierre. Sa chute s’était produite quand il se chauffait au feu du monde, en compagnie des serviteurs du souverain sacrificateur, qui était terriblement hostile à son maître. Il se trouve maintenant près du feu que son Seigneur a allumé. Il est non seulement réchauffé, mais aussi nourri par lui, en compagnie de serviteurs aussi dévoués que lui à son maître. Trois fois Pierre avait été mis à l’épreuve et, chaque fois avec plus d’insistance, il avait renié son Seigneur. Maintenant, à trois reprises, le Seigneur sonde la conscience et le cœur de Pierre, augmentant chaque fois la sévérité de l’épreuve.
Dans les versets 15 à 17 deux mots différents sont employés pour le verbe « aimer ». Ceux qui connaissent l’original disent que le premier n’est pas utilisé pour « aimer » en dehors du Nouveau Testament et de la version des Septante ; l’Esprit de Dieu l’a saisi et consacré pour exprimer l’amour de Dieu. Le second est basé sur le mot utilisé pour des amis et signifie plutôt : aimer avec des sentiments, ou d’une vive affection. On a dit que ce mot indiquait moins de discernement et plus d’émotion.
Le Seigneur ne s’adresse pas à Pierre avec le nouveau nom qu’il lui avait donné, mais avec son ancien nom : « Simon, fils de Jonas ». Il lui demande : « M’aimes-tu plus que ceux-ci ne m’aiment ? ». C’est exactement ce qu’il avait prétendu lui-même, en disant : « Si même tous étaient scandalisés, je ne le serai pourtant pas, moi » (Marc 14:29). Cette question a dû être très douloureuse, car, vu ce qui s’était passé, il semblait aimer le Seigneur beaucoup moins que les autres. Que pouvait-il répondre ? Seulement ceci : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime » (c’est-à-dire, en fait : j’ai de l’affection pour toi). Il a utilisé le mot le plus faible, montrant qu’il avait déjà baissé dans sa propre estime.
Une deuxième fois, Jésus pose la question en utilisant le même mot qu’avant, mais sans comparer Pierre et les autres disciples. Il dit simplement : « M’aimes-tu ? ». C’est comme s’il disait : « M’aimes-tu réellement un peu ? ». Cette question sonde la blessure d’une manière encore plus profonde. Pierre est de nouveau incapable d’accepter le défi et il persiste dans ses propres paroles : « Tu sais que je t’aime » (j’ai de l’affection pour toi).
La troisième question pénètre encore plus profondément, car Jésus adopte cette fois le langage de Pierre et demande : « M’aimes-tu ? » (c’est-à-dire : as-tu de l’affection pour moi ?). Il met donc Pierre au défi de s’attribuer même le droit de dire qu’il a de l’affection pour lui. Cela le pique au vif et le sonde en profondeur. Il réalise qu’il ne peut avoir la prétention d’aimer et que sa conduite a démenti même un simple sentiment d’amitié. Il se rejette donc entièrement sur son Seigneur qui sait tout, en disant : « Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime » (j’ai de l’affection pour toi). Il reconnaît ainsi, de fait, que son affection a des proportions si faibles que seule la parfaite connaissance divine pourra la percevoir. Mais elle existe ! Pierre le savait et il savait que son Seigneur le saurait.
Ainsi, Pierre est conduit avec beaucoup de miséricorde, mais avec une grande fermeté, au jugement de lui-même, c’est-à-dire de l’état qui l’avait amené au péché et à la catastrophe. Il faut confesser le péché commis, et confesser aussi le mauvais état qui y a conduit. C’est cela qui est très instructif et salutaire pour nous. Deux maux vont de pair : l’amour-propre et la confiance en soi ; ils étaient à l’origine de la faute et Pierre ne serait pas parfaitement restauré devant le Seigneur tant qu’il ne les aurait pas jugés. De plus son péché s’était produit sous les yeux de tous, et la confiance que les autres disciples avaient en lui devait être sérieusement ébranlée. Comme le Seigneur est plein de grâce pour s’occuper de Pierre jusqu’à sa restauration en présence de plusieurs disciples !
Le Seigneur agit encore plus merveilleusement. Chaque fois que Pierre affirme sa réelle affection pour le Seigneur, malgré son lâche reniement, il lui dit qu’un service très important va lui être confié. Le Seigneur emploie trois expressions différentes : « Pais mes agneaux » ; « Sois berger de mes brebis » ; « Pais mes brebis ». Être le berger des brebis suppose qu’on les nourrit, mais cela va plus loin et englobe de nombreuses activités comme la surveillance, la conduite, la protection.
Il est bien évident qu’un service pastoral a été confié à Pierre. Il est très frappant de voir comment il exhorte les autres à poursuivre ce service pastoral (1 Pierre 5). Il donne des avertissements contre les abus qui ont tout envahi dans l’histoire de l’église. Ces abus sont à leur comble dans l’imposant système religieux qui prétend que son chef à Rome est le successeur de Pierre. Ils ne sont que la conséquence de la chute de l’homme, car des choses tout à fait semblables se sont produites en Israël et l’Éternel les a dénoncées par Ézéchiel (chap. 34). Aujourd’hui le denier de Saint Pierre est de l’argent soutiré au troupeau pour l’entretien du prétendu successeur de Pierre, au lieu de pourvoir aux besoins du troupeau. Sinistre déformation, et triste parodie !
Les faux bergers qui ont servi après le départ de Pierre ont vite oublié que les agneaux et les brebis appartenaient au Seigneur. Le message donné à Pierre n’est pas : « Nourris tes brebis », mais : « Nourris mes brebis » ; voilà toute la différence. Il faut remarquer encore que le Seigneur parle une fois d’être le berger et deux fois de nourrir. C’est là-dessus qu’il insiste. Agir comme berger signifie être compétent et ferme pour s’occuper des brebis et les conduire. Il y en a beaucoup qui aiment exercer une autorité, même dans l’église de Dieu. Dispenser la nourriture spirituelle est une autre affaire, beaucoup plus difficile. Celui qui est capable de donner de la nourriture spirituelle n’aura pas beaucoup de difficultés à exercer une certaine autorité spirituelle.
Nous pouvons encore remarquer que, lorsque Pierre avait reçu sa mission, c’était un homme brisé et humilié. À cet homme, quand il a été pleinement relevé, le Seigneur a confié ses agneaux et ses brebis. Rappelons-nous l’exhortation de l’apôtre : « Frères, quand même un homme s’est laissé surprendre par quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez un tel homme dans un esprit de douceur, prenant garde à toi-même, de peur que toi aussi tu ne sois tenté » (Galates 6:1). Il va sans dire qu’un homme spirituel devrait être doux et pleinement conscient du fait qu’il peut, lui aussi, faire une chute. Pierre était tombé ; maintenant humilié et relevé, il a acquis cet esprit tendre et doux qui caractérise l’homme spirituel. C’est à de tels hommes que le Seigneur confie ses agneaux et ses brebis.
Le Seigneur donne une nouvelle mission à Pierre, et lui indique le caractère particulier du service qu’il a à accomplir. Il lui montre ensuite que ce qu’il s’était vanté de faire, avec l’énergie de la jeunesse, il le ferait réellement alors que son énergie naturelle aurait diminué. Il avait dit : « Je laisserai ma vie pour toi », et cependant il avait lamentablement échoué. Son désir avait été juste, bien que sa prétention ait été excessive ; elle devait être réprimandée. Son désir serait donc réalisé, mais par une puissance autre que la sienne. Les paroles du Seigneur, au verset 18, indiquent qu’il glorifiera Dieu par le martyre, mais aussi par la manière dont il le subira. C’est une allusion à la crucifixion. Il allait suivre le Seigneur en s’occupant de ses brebis et, jusqu’à un certain point, il subirait une mort semblable. Quelle grâce merveilleuse à l’égard du disciple qui a failli ! Et quel enseignement pour nous ! Le cas de Jean, surnommé Marc, nous fournit aussi un exemple de quelque chose qui, commencé dans la chair, peut cependant être rendu parfait par l’Esprit. C’est le contraire absolu de Galates 3:3.
Pour le moment, Pierre détourne les yeux de son maître et les fixe sur un compagnon qui n’est autre que l’auteur de cet évangile. Jean est certainement plus jeune, mais il a déjà été très proche de Pierre en plusieurs occasions. L’intérêt de Pierre est probablement sincère ; ce n’est pas une simple curiosité qui le pousse à demander ce qui va arriver à Jean. Il semble que la réponse soit double.
Tout d’abord, l’accent est mis sur le fait qu’un disciple (que ce soit Pierre, ou nous-mêmes) ne doit pas être occupé de ses frères, mais de son Seigneur. Ce que le Seigneur a décidé à l’avance pour Jean n’est pas le problème de Pierre. Il a, lui, à suivre le Seigneur. Peu nombreux aujourd’hui sont ceux qui, en parlant de leur frère, disent : « Et celui-ci, que lui arrivera-t-il ? ». Beaucoup disent par contre : « Regarde ce que cet homme a fait ! ». Il est facile, et cela ne coûte guère, d’être préoccupé par ce que font les autres, surtout s’ils n’agissent pas bien. En revanche, il en coûte beaucoup d’être vigilant sur soi-même. À chacun de nous, comme à Pierre, le Seigneur dit : « Toi, suis-moi ».
Ensuite, il y a quelque chose de secret ou de caché dans ce qui est dit de Jean, comme au verset 18 concernant Pierre. Cela n’indique pas qu’il ne mourra pas et demeurera donc jusqu’à la seconde venue du Seigneur, mais plutôt que son ministère aura un caractère particulier. Le mot traduit ici par « demeure » se rencontre dans les écrits de Jean aussi souvent que dans tout le reste du Nouveau Testament. Il est traduit de différentes façons comme demeurer, continuer, habiter, rester. Or le ministère de Jean, comme le montrent son évangile et ses épîtres, s’occupe particulièrement des vérités de la révélation de Dieu qui demeurent, que rien ne peut toucher ni ternir. Dans l’Apocalypse, il a été le dernier des apôtres à voir le Seigneur dans sa glorieuse majesté ; il a reçu de lui, par son ange, la révélation la plus complète des événements futurs. Ceux-ci nous conduisent à la seconde venue du Seigneur et même à l’état éternel.
Le verset 23 nous avertit du danger de tirer des conclusions à partir de la Parole de Dieu et d’élever ensuite ces conclusions au rang d’affirmations catégoriques. Si une parole s’était répandue parmi les frères qu’il était possible que Jean ne meure pas, étant donné ce que le Seigneur avait dit, peut-être que cela n’aurait pas mérité de remarque. Mais ils disaient que Jean ne mourrait pas, au lieu de dire qu’il était possible qu’il ne meure pas. Les paroles inspirées sont uniques et nous devons faire attention aux conclusions que nous en tirons.
Le dernier verset de notre évangile est très caractéristique. Il nous rappelle que ce qui est écrit, concernant les œuvres du Seigneur sur la terre, n’est qu’une infime partie du tout. Cela est vrai même si nous réunissons les quatre évangiles. C’est aussi vrai pour ses paroles que pour ses œuvres. C’est un fait qui nous aide à expliquer des choses qui peuvent paraître contradictoires. Par exemple, le Seigneur a dû faire et dire des choses analogues, à de nombreuses reprises durant les années de son service incessant dans les différentes régions de la Judée et de la Galilée. Enfin, il n’y a pas d’exagération dans ce qui est dit du monde et des livres. Jean a retracé pour nous quelques-unes des paroles et des œuvres incomparables de la Parole faite chair ; bien qu’en petit nombre, elles sont suffisantes pour nous convaincre que, dans la Parole incarnée, nous avons le Christ, le Fils de Dieu. Bien que la Parole ait revêtu en la personne de Christ une forme finie, cette Parole est infinie. Jésus a donc mis le sceau de l’infini sur tout ce qu’il a fait et dit. Le monde et les livres ne peuvent contenir cela.
Nous ne pourrons jamais sonder à fond tout ce que Jésus a fait. C’est sur cette note que se termine cet évangile.