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La Table du Seigneur — 1 Corinthiens 10:14-22

 

 

Michael Hardt

 

Il est bon parfois de reconsidérer un thème ancien avec un œil neuf. Cet article n’a pas pour but de faire de la controverse, mais d’établir aussi brièvement que possible, ce que nous croyons être le courant de pensée, et la force de l’argumentation de ce passage qui traite de la table du Seigneur.

Le contexte, comme toujours, est important. Rappelons d’abord que la première épître aux Corinthiens traite de questions pratiques que rencontre l’Assemblée sur la terre. On peut y voir une analogie avec le livre des Nombres (qui montre le peuple (terrestre) de Dieu dans sa traversée du désert). Nous n’assimilons pas Israël et l’Église, comme beaucoup le font, car ce sont deux entités entièrement distinctes. Toutefois, maintes expériences d’Israël fournissent des illustrations et des instructions pour l’Assemblée aujourd’hui.

Le chapitre 10 en est un exemple : les 13 premiers versets relatent divers incidents de l’histoire nationale d’Israël, et en tirent des leçons pour aujourd’hui. À partir de ces exemples, l’insistance porte sur le message-clé suivant : « Jouir de privilèges extérieurs n’est pas une garantie de l’approbation de Dieu ». Pour s’en apercevoir, jetons un coup d’œil aux différents cas du tableau suivant :

 

Privilège Extérieur

Pas d’approbation de Dieu

Raison

« sous la nuée » (v.1)

« ont passé à travers la mer » (v.1)

« baptisés pour Moïse » (v.2)

« ont mangé la même viande spirituelle » (v.3)

« ont bu le même breuvage spirituel » (v.4)

Mais Dieu n’a point pris plaisir en la plupart d’entre eux, car ils tombèrent dans le désert. (v.5)

convoitise (v.6)

idolâtrie (v.7)

fornication (v.8)

tenter Dieu (v.9)

murmurer (v.10)

 

 

La liste des privilèges est impressionnante (1ère colonne), mais ils n’impliquaient pas nécessairement l’approbation de Dieu : Il « n’a point pris plaisir » en la plupart de ceux du peuple. La raison (3ème colonne) en est que, tandis qu’ils « participaient » (nous reviendrons plus loin sur ce terme) à des privilèges extérieurs, leur état moral ne plaisait pas à Dieu, et ils agissaient selon des voies qu’Il ne pouvait pas approuver.

Tout ceci nous concerne tout à fait aujourd’hui : le verset 11 déclare justement que ces choses leur arrivèrent comme types pour nous, pour nous servir d’avertissement (voir aussi 10:6). Malgré ce contexte, les verset 12 et 13 sont consolants : bien que la défaillance soit possible, la défaite n’est pas inévitable. Cette introduction (10:1-13) prépare le terrain pour l’enseignement de l’apôtre en rapport avec la table du Seigneur (10:14-22). Cette liaison est soulignée par l’expression « c’est pourquoi » du verset 14.

La déclaration initiale « c’est pourquoi, mes bien-aimés, fuyez l’idolâtrie » semble être une introduction sévère au sujet de la table. Mais, comme bien souvent dans cette épître, un problème grave est l’occasion de donner un enseignement positif. Les Corinthiens s’étaient sentis libres de s’associer avec l’idolâtrie, et l’apôtre se sert de la vérité de la table pour montrer combien c’était à tort. Regardons cette argumentation en détail, et essayons, avec l’aide du Seigneur, de voir l’enchaînement des pensées, la relation entre d’une part l’idolâtrie, et d’autre part l’autel, la table et les signes (le pain et la coupe).

Un premier point à noter est que Paul parle de quatre activités extérieures : bénir la coupe, rompre le pain, manger des sacrifices Juifs et sacrifier aux idoles. Il montre ensuite que, à chaque fois, cette activité extérieure exprime et implique une communion avec un principe plus profond : communion respectivement avec le sang de Christ (10:16), avec le corps de Christ (10:16), avec l’autel d’Israël (v.18), avec la table du Seigneur (10:21), et avec la table des démons (10:21). On peut le résumer selon le tableau suivant :

 

Activité extérieure

Communion impliquée avec

Bénir la coupe

le sang de Christ

Rompre le pain

le corps de Christ

Manger des sacrifices (Juifs)

l’autel d’Israël

Sacrifier aux idoles

les démons

 

L’apôtre montre ainsi que l’association extérieure avec des cérémonies idolâtres païennes implique la communion avec les démons — une conclusion qui a sans aucun doute surpris les Corinthiens. Ils voulaient certainement argumenter dans le sens suivant : « Nous ne sommes pas impliqués dans l’idolâtrie parce que nous visitons seulement le pourtour du temple, et seulement pour manger un peu de viande ; nous sommes convaincus que les idoles ne sont rien, et nous ne croyons pas en elles ». Paul va au-devant de cette objection en déclarant qu’il savait très bien qu’une idole n’est rien (10:20), comme il l’avait d’ailleurs déjà enseigné lui-même (8:3). Cependant les incrédules croyaient aux idoles de sorte que ce qu’ils faisaient était de l’idolâtrie. Si les Corinthiens venaient à être extérieurement impliqués avec cela, ils étaient coupables de communion intérieure avec le principe qui était derrière : le culte des démons.

La force de l’enseignement de l’apôtre est que les Corinthiens auraient du réaliser le principe selon lequel l’association extérieure implique une communion intérieure, parce qu’il s’appliquait déjà au temps de la loi (10:18). Il le renforce en utilisant deux mots grecs différents pour exprimer la « communion » : l’un, « metecho », correspond à une association extérieure, et il est normalement traduit par « participer » ; et l’autre « koinonia » exprime une communion intérieure, et il est normalement traduit par « communion ». Dans chacun des quatre cas de la colonne de droite du tableau précédent, l’apôtre utilise le mot « koinonia », montrant par-là que l’activité extérieure implique une communion intérieure (versets 16, 18 et 20 ; la traduction J.N. Darby utilise effectivement le mot « communion » dans chaque cas).

En concluant, l’apôtre déclare que les deux communions impliquées sont incompatibles. « Vous ne pouvez boire la coupe du Seigneur et la coupe des démons ; vous ne pouvez participer à la table du Seigneur et à la table des démons. » (10:21). Il utilise ici le mot plus faible « metecho », car même l’association extérieure est à proscrire, car elle impliquerait une communion intérieure (koinonia) avec deux principes opposés.

Bien d’autres commentaires pourraient être rajoutés sur ce passage, et il en existe déjà de nombreux. Pour être bref, nous nous en tiendrons aux deux questions suivantes :

·       l’enseignement sur la table du Seigneur a-t-il trait à ce que nous faisons lors de la cène, ou à ce que nous faisons pendant tout le reste de la semaine ?

·       comment le chrétien peut-il aujourd’hui vivre et « participer » à la table du Seigneur d’une façon qui Lui plaise ?

 

La réponse à la première question est que l’enseignement sur la table du Seigneur concerne aussi bien la cène que la vie durant les reste de la semaine. Le texte parle clairement des signes (le pain et la coupe ; v. 16, 17, 21). C’est pourquoi la table du Seigneur ne peut pas en être séparée ; mais l’enseignement du ch. 10 ne concerne pas la façon ou la manière dont on y participe (ceci est traité au chapitre 11 — (*)), mais la vérité exprimée dans cette action, à savoir :

·       que nous avons communion avec le sang de Christ, et le corps (physique) de Christ (10:16), et

·       que nous sommes membres du corps de Christ (l’Assemblée).

 

(*) Le chapitre 11 parle de deux autres aspects de la fraction du pain : c’est un mémorial (11:25), et ceux qui rompent le pain annonce la mort du Seigneur (aux créature intelligentes) (11:26)

 

Autrement dit, nous exprimons la communion avec Christ et avec ceux qui sont membres de Son corps.

Il s’ensuit que, à cause de la vérité impliquée et exprimée lorsque nous prenons les signes (au cours de la cène bien sûr), il y a des implications sur tout ce que nous faisons durant le reste de la semaine. Dans le contexte immédiat de Corinthe qui a donné lieu à ces instructions, cela signifiait : « si vous prenez les signes le jour du Seigneur (= dimanche), vous ne pouvez pas vous associer avec l’idolâtrie pendant le reste de la semaine ». Le même principe s’applique aujourd’hui : « si nous prenons les signes le jour du Seigneur (=dimanche), nous ne pouvons pas nous associer à ce qui déshonore Christ pendant le reste de la semaine ».

Pour qu’il ne subsiste aucun doute, disons clairement que ce qui a été dit ci-dessus n’implique en aucune manière que la table du Seigneur soit la table matérielle sur laquelle les signes sont posés. Dans l’Écriture, une table représente la communion, et la communion exprimée en prenant les signes exclut la participation avec toute communion qui déshonore le Seigneur.

 

La seconde question concerne tout croyant aujourd’hui — et elle est difficile. Vu la fragmentation de la profession chrétienne, où faut-il aller… ? La réponse n’est pas dans une « étiquette », ni dans l’adresse de tel groupe particulier de chrétiens. Mais si l’on veut chercher un lieu pour participer aux signes d’une manière conséquente avec la table du Seigneur, ne faut-il pas rechercher les caractères suivants :

·       la reconnaissance de l’unité du corps de Christ : nous participons au pain parce que nous sommes membres de ce seul corps, non pas parce que nous sommes membres d’une quelconque organisation ou dénomination (10:17),

·       la reconnaissance de l’autorité du Seigneur (c’est Sa table !), et donc celle de l’Écriture (10:21),

·       la séparation d’associations mauvaises, et l’absence de « participation » extérieure avec ce qui déshonore le Seigneur (10:21).

Que le Seigneur nous aide à être davantage conscients de ce que nous exprimons quand nous participons aux signes (le pain et la coupe), et à L’honorer en vivant d’une manière qui soit en accord avec la communion de Sa table.