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MÉDITATIONS sur le second LIVRE des CHRONIQUES
par Henri Rossier
1° Ed. : 1913
TABLE DES MATIÈRES
1 Le règne de Salomon — Chapitres 1 à 9
1.1 Chapitre 1 — Un roi selon les conseils de Dieu
1.2 Chapitre 2 — Salomon et Hiram
1.3 Chapitres 3 à 5 — Le temple
1.4 Chapitres 6 à 7 — La prière de Salomon
1.5 Chapitres 8 à 9 — Rapports de Salomon avec les nations
2 Chapitres 10 à 36 — Les successeurs de Salomon — l’ère des prophètes
2.1 Chapitres 10 à 12 — Roboam
2.3.1 Chapitre 14 — Repos et force
2.3.2 Chapitre 15 — Force et purification
2.3.3 Chapitre 16 — Déclin d’Asa
2.4 Chapitres 17 à 20 — Josaphat
2.4.1 Chapitre 17 — L’enseignement de la loi
2.4.2 Chapitre 18 — Alliance avec Achab
2.4.3 Chapitre 19 — Josaphat et Jéhu le prophète
2.4.4 Chapitre 20 — Nouvelle guerre
2.7.1 Chapitre 23 — Avènement de Joas
2.7.2 Chapitre 24 — Règne de Joas
2.12 Chapitres 29 à 32 — Ézéchias
2.12.1 Chapitre 29 — La purification
2.12.2 Chapitre 30 — la Pâque et les Pains sans levain
2.12.3 Chapitre 31 — L’ordre de la maison de Dieu.
2.12.4 Chapitre 32 — Les trois épreuves d’Ézéchias.
2.13 Chapitre 33 — Manassé. Amon
2.14 Chapitres 34 à 35 — Josias
2.14.1 Chapitre 34 — La parole de Dieu retrouvée
2.14.2 Chapitre 35 — La Pâque et le Culte
2.14.3 Chapitre 36 — Les derniers rois
Le second livre des Chroniques continue le premier sans transition ; il ne forme primitivement qu’un seul récit dans les manuscrits hébraïques. Nous avons fait précédemment la même remarque dans le second livre des Rois, au sujet de ces divisions artificielles qui ne font pas partie de la Parole inspirée. De fait, le récit des Chroniques est continu jusqu’à la fin du règne de Salomon (2 Chron. 10), et si l’on cherche une division morale de notre sujet, ce n’est qu’au chap. 11 qu’elle devrait proprement être introduite.
Rappelons ici une vérité, déjà maintes fois mentionnée dans le premier livre, c’est que Dieu nous donne dans les Chroniques, sous une forme typique, un aperçu de ses conseils au sujet de la royauté du Christ, conseils préfigurés dans l’histoire de David et de Salomon. Salomon lui-même symbolise le règne futur de sagesse et de paix inauguré par la venue du Seigneur. C’est pourquoi, comme nous l’avons signalé dans l’histoire de David (1 Chron) Le règne de Salomon n’offre point de manquements dans les Chroniques et même avec beaucoup d’attention on ne pourrait y découvrir la moindre allusion aux fautes du roi.
Nous avons vu dans le livre précédent comment Salomon fut élevé sur le trône de son père avant d’être établi sur son propre trône. Ces deux faits nous parlent très clairement du royaume céleste actuel de Christ et de son royaume terrestre qui est encore à venir. Le récit qui s’ouvre devant nous va nous présenter ce dernier, et nous n’y trouverons pas comme dans le livre des Rois un souverain responsable et faillible, mais la figure la plus parfaite possible d’un gouvernement de sagesse et de paix administré par le roi des conseils de Dieu.
On ne peut assez faire ressortir, au début de ce livre, que le règne du Salomon des Chroniques a un tout autre caractère que celui du Salomon des Rois. Sa justice exercée en jugement envers les ennemis de son père : Adonija qui s’était opposé à David, Shimhi qui l’avait insulté et bafoué, Joab dont il avait supporté les violences et l’injustice sans pouvoir les réprimer, tout cela est omis dans les Chroniques (cf. 1 Rois 1-2). L’épisode des deux femmes prostituées (1 Rois 3:16-28) est aussi complètement passé sous silence, car si cette scène nous montre la sagesse de Salomon, elle nous la montre au service de la justice pour gouverner équitablement. Le roi ne porte pas l’investigation plus loin, et ne reprend ni ne retranche, même la plus coupable de ces prostituées. Les Chroniques ne nous présentent pas le règne de Salomon sous les caractères que nous venons de mentionner. Il est avant tout le règne de paix, auquel la sagesse préside. Il n’en est pas moins vrai que pendant le millénium «le méchant sera chaque matin retranché du pays», et que la prostitution n’y sera ni tolérée, ni même nommée ; mais la paix régnera, et c’est le sujet dont les premiers chapitres de ce livre nous entretiennent.
Dès les premiers mots de notre chapitre (1:1), Salomon nous est présenté comme s’affermissant lui-même dans son royaume, tandis qu’en 1 Rois 2:46 le royaume fut affermi dans sa main après le jugement de tous les ennemis personnels de David. Salomon s’affermit ici de sa pleine autorité personnelle, mais il n’en reste pas moins l’homme dépendant, car s’il ne l’était pas il ne serait pas le type du vrai roi des conseils de Dieu. «Demande-moi», est-il dit au Ps. 2, «et je te donnerai... pour possession, les bouts de la terre». C’est pourquoi nous trouvons dans notre passage : «Et l’Éternel, son Dieu, fut avec lui et l’agrandit extrêmement». Aussi longtemps qu’il conserve le royaume, le Seigneur reste l’homme dépendant ; quand il en aura terminé l’administration, il le remettra fidèlement entre les mains de Celui qui le lui a confié et «alors le Fils aussi lui-même sera assujetti à celui qui lui a assujetti toutes choses» (1 Cor. 15:28). Aucun empire terrestre aura-t-il jamais été semblable à ce règne merveilleux où pendant mille ans, sans une défaillance, sans un déni de justice, sans un amoindrissement de la paix, le Christ régnera sur son peuple terrestre et sur toutes les nations ?
Habituons-nous, cher lecteur chrétien, à considérer le Seigneur ainsi, pour Lui-même, et non pas seulement pour les ressources qu’il fournit à nos besoins. C’est la contemplation la plus élevée à laquelle nous soyons appelés, car nous y sommes placés, pour ainsi dire, en la compagnie de notre Dieu pour trouver nos délices dans les perfections de cette personne adorable. Combien sont nombreux les passages des Écritures où nous est révélé, non pas ce que nous possédons en vertu de l’oeuvre de Christ, mais ce que Christ est pour Dieu, en vertu de ses propres perfections. Dieu ouvre le ciel sur cet homme et dit : «Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir». Et quand Il est obligé de lui fermer le ciel au moment où Il expie nos péchés, Il dit : «Mais toi, tu es le même, et tes années ne finiront point». Et encore : «Ton trône, ô Dieu, est pour toujours et à perpétuité ; c’est un sceptre de droiture que le sceptre de ton règne. Tu as aimé la justice, et tu as haï la méchanceté ; c’est pourquoi Dieu, ton Dieu, t’a oint d’une huile de joie au-dessus de tes compagnons». En vertu de la perfection de son obéissance et de son abaissement, Dieu «l’a haut élevé et lui a donné un nom au-dessus de tout nom». Cet homme est «le premier-né de toute création» ; il a toutes les gloires et toutes les suprématies (Col. 1:15-20). C’est parce qu’il laisse sa vie afin qu’il la reprenne que le Père l’aime. En tout cela nous ne trouvons rien de ce qu’il a fait pour nous. Mais nous, en vertu de son oeuvre accomplie, nous sommes rendus capables de nous intéresser à Lui et à toutes ses perfections. Cultivons cette connaissance. Sans doute, pour notre âme, le trait par excellence de ce caractère adorable est résumé dans ce mot : «Il m’a aimé et s’est donné Lui-même pour moi» ; quelque connaissance que j’acquière de lui, elle me ramène toujours à son amour. Ainsi, quand il nous est présenté comme «le prince des rois de la terre», nous nous écrions : «À celui qui nous aime !» Mais ce que je veux dire, c’est que, ce qu’il est en Lui-même est une source inépuisable de joie pour le fidèle. Rien ne le sort davantage de son égoïsme naturel et des mesquines préoccupations d’ici-bas ; il a trouvé dans un objet parfait, avec lequel il est en relation intime et immédiate, la source de son bonheur éternel.
Aux v. 2 à 6 nous avons la scène de Gabaon, mais sans les taches qui la déparaient en 1 Rois 3:1-4. Dans notre passage le «seulement» qui marque un blâme a disparu : «Seulement le peuple sacrifiait sur les hauts lieux» ; «Seulement Salomon offrait des sacrifices et faisait fumer de l’encens sur les hauts lieux». Ici la scène est légitime, si je puis m’exprimer ainsi, et Gabaon n’est plus «le principal haut lieu» (3:4) ; il est au contraire «le lieu où était la tente d’assignation de Dieu, que Moïse, serviteur de l’Éternel, avait faite dans le désert... et l’autel d’airain qu’avait fait Betsaleël, fils d’Uri, fils de Hur, était là, devant le tabernacle de l’Éternel» (2 Chron. 1:3-5). Pas l’ombre d’un blâme ! Salomon va sacrifier sur l’autel, symbole de l’expiation, où le peuple pouvait rencontrer son Dieu. Y avait-il là quelque chose à reprendre ? Nullement. Sans doute le lieu n’était que provisoire en attendant l’érection du temple ; sans doute aussi le trône de Dieu, l’arche, ne s’y trouvait pas, car elle était désormais établie dans la cité de David ; mais, dans les Chroniques, Salomon vient à Gabaon avec son peuple inaugurer le règne de paix que Dieu pouvait introduire en vertu du sacrifice. C’est, en effet, comme nous l’avons vu, du règne de paix, bien plus que du règne de justice que le second livre des Chroniques nous entretient.
Aux v. 7 à 12, Salomon demande la sagesse à Dieu, et ici encore notre récit diffère notablement de celui des Rois (1 Rois 3:5-15). Salomon n’est pas, dans notre passage, «un jeune garçon qui ne sait pas sortir et entrer». Sans doute le premier livre des Chroniques le mentionne comme jeune garçon, mais, nous l’avons fait remarquer en étudiant ce livre, au point de vue typique, sa jeunesse correspond à la position occupée par Christ dans le ciel, sur le trône de son Père, avant l’inauguration de son royaume terrestre. Dans le livre des Rois, Salomon est ignorant et n’a pas «le discernement entre le bien et le mal» (3:9). Dans les Chroniques cette défectuosité a totalement disparu : le Roi dit avoir besoin de sagesse pour sortir et entrer devant le peuple et pour le gouverner. Il s’adresse pour cela à Celui qui l’a fait roi et dont il dépend entièrement : telle sera aussi la relation de Christ, homme et roi, avec son Dieu. Mais ce qui est plus frappant encore, c’est que, dans notre passage la question de la responsabilité est complètement omise, à l’opposé de 1 Rois 3:14 : «Si tu marches dans mes voies, gardant mes statuts et mes commandements», dit Dieu, je prolongerai tes jours». Dans les Chroniques la responsabilité de Salomon n’est mentionnée qu’une seule fois (1 Chron. 28:7-10), pour représenter la dépendance du Christ comme homme, et nullement avec la supposition qu’il puisse être trouvé en faute. Tout autre est le livre des Rois (voyez 1 Rois 3:14 ; 2:2, 6, 9 ; 6:11). Remarquons encore qu’en 1 Rois, Dieu dit à Salomon : «Parce que tu as demandé cela... voici, je t’ai donné un coeur sage et intelligent» (3:11, 12). En 2 Chroniques, Dieu lui donne la sagesse et la connaissance, «parce que c’était cela qui était dans son coeur». Type de Christ, il reçoit ces choses comme homme, mais son coeur n’a pas besoin d’être façonné pour les recevoir.
Nous ne cesserons de voir à chaque pas de nouvelles preuves de la merveilleuse exactitude avec laquelle la Parole inspirée poursuit son dessein.
Versets 14-17. Dans le fait que Salomon amassa beaucoup d’argent et d’or à Jérusalem, et que ses marchands tiraient pour lui les chevaux d’Égypte et en procuraient de la même manière à «tous les rois des Héthiens et aux rois de Syrie», on a cru voir une preuve de l’infidélité de Salomon aux prescriptions de la loi en Deut. 17:16-17. L’étude des Chroniques fait repousser une telle interprétation. L’Égypte est ici tributaire de Salomon qui la traite d’une manière équitable. Il fait profiter les nations étrangères des mêmes avantages, et il en sera ainsi sous le règne futur de Christ. La même remarque s’applique, comme nous le verrons au chap. 8, à la fille du Pharaon (8:11).
Nous trouvons ici, comme dans tous ces chapitres, le roi Salomon dépeint, au point de vue de la perfection de son règne. Les nations lui sont asservies. Les portefaix, les tailleurs de pierre, les surveillants, sont pris exclusivement d’entre les Cananéens résidant au milieu d’Israël et que le peuple n’avait pas réussi à expulser (1-2 ; 17-18 ; 8:7-9) : «des fils d’Israël, Salomon ne fit pas des esclaves pour ses travaux». Ainsi se réalise, sous ce règne glorieux, un état de choses qui, par l’infidélité du peuple, n’avait jamais eu lieu auparavant. Tout le mélange d’autrefois avec les Cananéens a disparu, et le peuple de l’Éternel est désormais un peuple libre qui ne peut être asservi. Cependant les étrangers qu’Israël infidèle n’avait pas exterminés autrefois de son pays, sont seuls traités de cette manière, tandis que les nations, en possession des richesses de la terre, et personnifiées par le roi de Tyr, sont admises à collaborer au grand oeuvre.
Salomon explique ici à Hiram le sens et la portée de l’érection du temple, et cela d’une autre manière que dans le livre des Rois : «Voici, je bâtis une maison pour le nom de l’Éternel, mon Dieu, pour la lui consacrer, pour faire fumer devant Lui l’encens de drogues odoriférantes, et pour l’arrangement continuel des pains, et pour les holocaustes du matin et du soir, des sabbats, et des nouvelles lunes, et des jours solennels de l’Éternel, notre Dieu ; cela est prescrit à Israël à toujours» (v. 4). Le temple est ici le lieu où l’on s’approche de Dieu pour le culte, lieu ouvert non seulement à Israël, mais aux nations que Hiram représente. Le temple est tellement, dans la pensée de Salomon, le lieu du culte, que les holocaustes seuls sont mentionnés ici sans les sacrifices pour le péché ; l’encens de drogues odoriférantes, symbole de la louange, occupe la première place. Quand il s’agit, en Ézéch. 45, du service millénaire dans le temple, soit pour Israël, soit pour le «prince» de la maison de David, vice-roi du Christ sur la terre, nous trouvons le sacrifice pour le péché, car tous en ont besoin. Ici la pensée est plus générale. Salomon déclare à Hiram que cette grande maison qu’il bâtit est dédiée au Dieu d’Israël «qui est grand au-dessus de tous les dieux. Et qui a le pouvoir de lui bâtir une maison, car les cieux, et les cieux des cieux, ne peuvent le contenir ?» Donc ce Dieu souverain, ce Dieu qui est au-dessus de tout et partout ne peut limiter son royaume au peuple d’Israël. Salomon, quant à lui-même, sait n’être qu’une faible image humaine du Roi selon les conseils de Dieu : «Qui suis-je, dit-il, moi, pour lui bâtir une maison ?» Cependant il est là «pour faire fumer ce qui se brûle devant Lui». Il se présente comme roi et sacrificateur, sans intermédiaire ; il offre lui-même un encens pur, comme médiateur du peuple, un encens choisi qui monte avec la fumée de l’holocauste, en parfaite bonne odeur devant Dieu, et «cela est prescrit à Israël à toujours».
Salomon confie à Hiram la direction de l’ouvrage dont lui, le Roi, est l’exécuteur, quoiqu’il le mette entre les mains des nations. Il en sera de même à l’entrée du millénium, selon ce qui nous est dit du temple en Zacharie 6:15 et aussi des murailles de Jérusalem en Ésaïe 60:10.
La subsistance des ouvriers de Hiram dépend ici entièrement du roi ; c’est lui qui l’offre et l’ordonne (v. 10), et Hiram n’a autre chose à faire qu’à l’accepter. Il en est autrement en 1 Rois 5:9-11 où Hiram demande et où Salomon accorde.
Hiram (v. 11) reconnaît par écrit (un écrit est une déclaration qui demeure et à laquelle on peut continuellement recourir) «l’amour de l’Éternel pour son peuple» en établissant Salomon roi sur eux et il «bénit l’Éternel, le Dieu d’Israël», mais comme Créateur des cieux et de la terre, belle image de la louange des nations qui, dans le siècle futur, se soumettront à la domination universelle du Très-Haut, possesseur des cieux et de la terre, représenté par le vrai Fils de David au milieu de son peuple d’Israël. C’est ainsi que les bénédictions s’élèveront vers Dieu lui-même de la part de ceux qui, autrefois idolâtres, seront soumis à la domination du Christ, roi des nations.
Hiram est prompt à exécuter tout ce que le roi demande, prompt aussi à recevoir les dons de Salomon. On ne le voit pas, dans les Chroniques, prononcer Cabul (cf. 1 Rois 9:13), avec un geste de mépris, sur les villes qui lui sont données par Salomon, et c’est ici le moyen de passer sous silence la faute commise par Salomon en aliénant l’héritage de l’Éternel. Ici, de la part du représentant des nations, tout est reconnaissance et soumission volontaire ; il est prompt à accepter et à recevoir, car refuser les dons d’un tel Roi ne serait qu’orgueil et révolte.
Les chap. 3 et 4 correspondent aux chap. 6 et 7 du premier livre des Rois, mais en diffèrent en ce qu’ici le temple a une signification particulière. Tandis que dans le livre des Rois il est d’un côté le lieu où Dieu demeure avec les siens, et de l’autre le centre de son gouvernement au milieu d’Israël, il est, dans les Chroniques, comme nous l’avons déjà remarqué, le lieu où l’on s’approche de Dieu pour lui rendre culte, la «maison de sacrifice» (v. 11, 12). En parlant d’un lieu d’approche nous ne faisons pas allusion au pécheur qui vient par le sang de Christ pour être justifié devant Dieu ; nous pensons à l’adorateur qui entre par le même chemin dans le sanctuaire. C’est ainsi qu’on voit dans l’épître aux Romains le pécheur justifié par le sang de Christ, tandis que l’épître aux Hébreux nous introduit par le même chemin dans le lieu très saint. Le fait que le temple est présenté comme lieu d’approche explique tous les détails de ces chapitres. Nous y rencontrons l’autel d’airain et le voile (3:14 ; 4:1) omis dans la description du temple au livre des Rois ; d’autre part, les demeures des sacrificateurs mentionnées dans ce dernier manquent dans les Chroniques. Le prophète Ézéchiel, qui nous fait non pas le tableau typique, mais la description réelle du règne millénaire de Christ, réunit, dans la description du temple (40-45), les caractères des livres des Rois et des Chroniques. Nous y trouvons à la fois l’autel, la porte du sanctuaire, les demeures des sacrificateurs, les attributs du gouvernement de Dieu (Ézéch. 40:47 ; 41:22 ; 41:6 ; 41:18). C’est qu’en effet le temple d’Ézéchiel représente l’Éternel, Christ, demeurant au milieu d’un peuple de sacrificateurs, exerçant son juste gouvernement, et devenu le centre du culte d’Israël et des nations ; tandis que les livres des Rois et des Chroniques, pour nous faire mieux entrer dans ses gloires, les présentent l’une après l’autre devant nos yeux.
D’autres détails frappants confirment ce que nous venons de dire. Les Chroniques ne mentionnent ni sacrifice pour le péché, ni sacrifice pour le délit ; et l’autel y est uniquement le lieu de l’holocauste et du sacrifice de prospérités. Ézéchiel, par contre, insiste sur le sacrifice pour le péché comme préparation à toutes les autres offrandes (Ézéch. 43:25-27), et les mentionne ensuite sans en omettre aucune (45:25).
Quelques mots encore sur l’autel d’airain : Cet autel de Salomon occupe, dans les Chroniques, une place très importante. Ce n’est pas l’autel du désert, conservé à Gabaon, figure de la manière dont Dieu vient rencontrer le pécheur, et peut rester juste en le justifiant, mais l’autel de l’holocauste sans lequel on ne peut s’approcher de Lui. Les dimensions de l’autel de Gabaon sont tout autres que celles de l’autel de Salomon : le premier a cinq coudées de longueur et cinq de largeur sur une hauteur de trois coudées. L’autel de Salomon (4:1) est long de vingt coudées, large de vingt coudées et a dix coudées de hauteur. Les deux dimensions principales sont exactement les mêmes que celles du lieu très saint (3:8 ; 1 Rois 6:20 ; Ézéch. 41:4). L’autel, Christ, s’adapte parfaitement au sanctuaire ; les gloires du lieu très saint correspondent à la grandeur et à la perfection du sacrifice représenté par l’autel. De plus, comme nous l’avons dit, l’autel étant spécialement ici l’expression du culte, ce dernier a aussi les mesures du sanctuaire ; sans être parfait dans toutes ses dimensions, il est digne, au plus haut point, de la scène millénaire qu’il représente.
Tout ce qui a trait au gouvernement millénaire de Christ et même aux attributs de ce gouvernement, manque entièrement dans les Chroniques ; ainsi la maison de la forêt du Liban, siège du trône judiciaire, de même le palais du roi, de même encore les chérubins, attributs du gouvernement, représentés partout dans le livre des Rois, sur les murailles du temple et jusque sur les ustensiles du parvis.
S’agit-il même de la personne de Salomon et de ses actes, la description que les Chroniques en donnent est simplifiée à dessein. Le Roi nous y est présenté, non pas en voie d’accroissement, comme dans le livre des Rois, mais établi sur le trône selon les conseils de Dieu, doué de sagesse parfaite, entouré de richesse et de gloire. Aucun détail ne nous est donné sur l’exercice de sa sagesse, soit pour discerner le mal, soit pour le juger, soit pour enseigner le bien par ses paroles et ses écrits (voy. 1 Rois 3:16-28 ; 4:29-34). Salomon est placé devant nos yeux, sur son trône, dans une attitude pour ainsi dire immuable ; la paix règne, les conseils de Dieu à l’égard de son Roi sont accomplis, et ce Roi, lui-même, est Dieu.
Cette scène de paix et de bonheur a son point de départ sur la montagne de Morija, détail, notons-le bien, qui manque dans le livre des Rois : «Et Salomon commença de bâtir la maison de l’Éternel à Jérusalem, sur la montagne de Morija, où l’Éternel était apparu à David, son père, sur l’emplacement que David avait préparé dans l’aire d’Ornan, le Jébusien» (3:1). C’était d’abord à Morija qu’Abraham avait offert Isaac sur l’autel et l’avait recouvré par une sorte de résurrection ; là, il avait été pourvu à tout ce qu’exigeait la sainteté de Dieu. C’était ensuite à Morija que, lors de la faute de David, la grâce s’était glorifiée vis-à-vis du jugement. Le règne de paix de Salomon est donc établi, à la suite de la résurrection, sur le principe de la grâce, comme le règne futur de Christ ressuscité sera entièrement basé sur la grâce triomphante à la croix. À la suite du sacrifice de Morija et en vertu de la perfection personnelle du souverain, ce dernier pourra désormais entrer dans son temple. Les portes éternelles hausseront leurs linteaux pour laisser passer le roi de gloire. Il aura une riche entrée dans son propre royaume. Nous ne trouvons que dans les Chroniques l’immense hauteur de ce portique (3:4 ; cf. Ps. 24:7, 9 ; Mal. 3:1 ; Aggée 2:7 ; 2 Pierre 1:11, 17).
Encore un détail caractéristique : on ne voit ici sur les murailles de la maison que des palmiers et des chaînes ; les palmiers sont les symboles de la paix triomphale ; les chaînes (Sharsherah) qui de même garnissent ici les colonnes ne sont mentionnées nulle autre part que sur les épaulières et le pectoral du souverain sacrificateur. Elles en rassemblent fermement les diverses parties et paraissent symboliser la solidité du lien qui forme en unité le peuple de Dieu. Plus de fleurs entrouvertes, signes d’un règne qui commence à s’épanouir, comme dans le livre des Rois ; ici le règne est définitivement établi ; plus de chérubins cachés sous l’or des murailles ; ils ne paraissent que sur le voile ; il n’y a plus de pensées secrètes, de conseils cachés de Dieu ; ils sont maintenant mis en évidence dans la personne de Christ, mais établis sur le voile qui est sa chair livrée à la mort. Dans le lieu très saint, deux chérubins debout, les ailes étendues, regardent au-dehors, «vers la maison» (3:13), fait qui n’est mentionné qu’ici, et contemplent l’ordre désormais établi du peuple de Dieu. Les colonnes Jakin et Boaz («Il établira» et «En Lui est la force») ne peuvent manquer dans ce tableau, emblèmes d’un règne désormais établi et dépendant entièrement de la puissance qui est en Christ.
Autre détail intéressant : «Salomon fit dix tables et les plaça dans le temple, cinq à droite et cinq à gauche» (4:8). 1 Rois 7:48 n’en mentionne qu’une. N’est-il pas frappant de voir les pains de proposition multipliés ainsi dix fois ? Salomon est considéré comme assis «sur le trône de l’Éternel» (1 Chron. 29:23) ; Israël s’accroît sous son règne ; ce sont toujours les mêmes tribus, mais augmentées à l’infini sous les yeux du Dieu qui les contemple et les gouverne. Le vrai Salomon, Christ lui-même, est l’auteur de cette multiplication (4:8). Dans le millénium, Israël sera au complet, comme présenté à Dieu par Christ, une offrande agréée de l’Éternel.
Au chap. 5 l’arche monte, de la cité de David, dans la maison magnifique que Salomon lui a préparée. Le tabernacle et tous ses ustensiles, qui se trouvaient à Gabaon, rejoignent l’arche dans le temple : Le souvenir de la traversée du désert reste ainsi continuellement devant Dieu. Il ne nous est pas parlé des ustensiles du parvis, ni surtout de l’autel d’airain érigé par Moïse et où Dieu venait en grâce rencontrer un peuple pécheur. Cet autel du désert est remplacé par celui de Salomon qui correspond lui-même à l’autel dressé par David sur l’emplacement de l’aire d’Ornan. L’autel de Salomon n’est mentionné que tout à fait en passant dans le livre des Rois (1 Rois 8:22) qui, comme nous l’avons dit, a un autre objet en vue que le culte. L’arche a enfin trouvé un lieu de repos, mais la scène millénaire, dont ces chapitres sont la figure, n’est pas le repos éternel et définitif pour le trône de Dieu. Les barres n’ont pas disparu, quoique leur position dénote que l’arche ne se remettra pas en voyage. Toute la scène de bénédiction millénaire décrite ici prendra fin quand les nouveaux cieux et la nouvelle terre seront établis.
Le passage du v. 11-13 de notre chapitre manque dans le livre des Rois : «Et il arriva, comme les sacrificateurs sortaient du lieu saint (car tous les sacrificateurs qui s’y trouvaient s’étaient sanctifiés sans observer les classes), et que les lévites, les chantres, eux tous, Asaph, et Héman, et Jéduthun, et leurs fils et leurs frères, vêtus de byssus, avec des cymbales et des luths et des harpes, se tenaient à l’orient de l’autel, et avec eux cent vingt sacrificateurs sonnant des trompettes, — il arriva, lorsque les trompettes et les chantres furent comme un seul homme pour faire entendre une même voix en louant et en célébrant l’Éternel, et qu’ils élevèrent la voix avec des trompettes, et des cymbales, et des instruments de musique, en louant l’Éternel de ce qu’il est bon, parce que sa bonté demeure à toujours, il arriva que la maison, la maison de l’Éternel, fut remplie d’une nuée ; et les sacrificateurs ne pouvaient pas s’y tenir pour faire le service, à cause de la nuée, car la gloire de l’Éternel remplissait la maison de Dieu». C’est bien l’image du culte millénaire où le «chant de triomphe et de louange» sera entonné (conf. 2 Chron. 20:21). L’Éternel y est loué «de ce qu’il est bon, parce que sa bonté demeure à toujours» (voyez encore sur ce cantique : 1 Chron. 16:41 ; 2 Chron. 7:3, 6 ; Ps. 106:1 ; 107:1 ; 118:136 ; Jér. 33:11). Tous les instruments de musique retentissent, comme au Ps. 150 qui décrit la même scène. C’est ici proprement la dédicace de l’autel (7:9) précédant la fête des tabernacles, mais les Chroniques seules nous montrent la gloire de l’Éternel remplissant deux fois la maison. De fait, il y eut deux fêtes, une de sept jours, la dédicace de l’autel, et une de huit jours, la dédicace de la maison ou la fête des tabernacles (7:9). Toutes deux se trouvent ici, avec le même cantique et la même présence de la gloire de Dieu dans son temple, sujet bien approprié à ce livre qui nous parle du culte et de l’accomplissement des conseils de Dieu quant à son règne.
La dédicace de l’autel remplace dans les Chroniques le grand jour des expiations (comp. Lév. 23:26-36), tandis qu’en Zacharie ce jour doit précéder l’établissement du règne messianique. Il n’est point question ici «d’affliger son âme», comme au jour des expiations (Lév. 16:29), mais de se réjouir, car, par le moyen de l’autel la bonté de Dieu qui demeure à toujours, a définitivement approché le peuple de Lui.
Le cantique : «Sa bonté demeure à toujours», si caractéristique du règne millénaire à son début est répété dans ce livre des Chroniques, les deux fois où la gloire de l’Éternel remplit le temple ; ce cantique manque entièrement au premier livre des Rois. La scène est bien plus complète ici : les conseils de Dieu quant à l’établissement de la royauté de Christ sur la terre sont enfin accomplis en type. «La gloire de l’Éternel remplit la maison de Dieu» (comp. avec 1 Rois 8:11). Le nom de Dieu remplace souvent celui de l’Éternel dans ces chapitres, faisant allusion à ses relations avec les nations qui reconnaissent le Dieu d’Israël comme leur Dieu.
Disons en terminant qu’en présence de toutes les différences de détail entre le premier livre des Rois et le second des Chroniques, tout croyant sera convaincu de la sagesse et de l’ordre divin qui président invariablement à ces récits. La plus petite omission, de même que chaque parole ajoutée dans le texte sacré, sont le fruit d’un plan d’ensemble destiné à faire ressortir les gloires diverses de Christ. Nous sommes loin d’avoir épuisé l’énumération de ces différences ; d’autres pourront en découvrir de nouvelles avec un vrai profit pour leurs âmes.
Plusieurs particularités importantes distinguent cette division de notre livre du chapitre correspondant des Rois (1 Rois 8). Dans ce dernier la fête, quoique prolongée pendant quatorze jours, ne correspond de fait qu’à la fête des tabernacles. Elle est appelée «la dédicace de la maison» (8:63) ; mais le huitième jour, grand jour de la fête, le roi renvoie le peuple (8:65, 66). Le passage des Chroniques va beaucoup plus loin ; il insiste sur le fait qu’«au huitième jour ils célébrèrent une fête solennelle» (2 Chron. 7:9) ; il introduit ainsi le type du repos général et définitif attaché au jour de la résurrection que le huitième jour préfigure. De cette manière la bénédiction n’est pas restreinte au peuple d’Israël seul, mais appartient à tous ceux qui font partie du jour de la résurrection.
Notre passage, dans les Chroniques, offre une autre remarque d’un grand intérêt : Salomon se tint devant l’autel de l’Éternel, en face de toute la congrégation d’Israël «et étendit les mains ; car Salomon avait fait une estrade d’airain, longue de cinq coudées, large de cinq coudées, et haute de trois coudées, et l’avait mise au milieu de la cour ; et il s’y tint, et fléchit les genoux en face de toute la congrégation d’Israël» et étendit ses mains vers les cieux. Toute la partie de ce passage placée entre guillemets manque dans le livre des Rois. L’estrade faite par Salomon et sur laquelle il se tient en face de tout le peuple a exactement les mêmes dimensions que l’autel d’airain en Exode 27:1. «Et tu feras», dit l’Éternel à Moïse, «l’autel de bois de sittim : il aura cinq coudées de long, et cinq coudées de large ; l’autel sera carré, et sa hauteur sera de trois coudées».
L’autel du désert était, comme nous l’avons déjà dit, l’un des ustensiles qui ne sont pas mentionnés comme ayant été apportés de Gabaon dans le temple (5:5 et 1 Rois 8:4), car un nouvel autel y avait été construit. Mais le premier pouvait-il en être absolument exclu ? Cela était impossible ! L’autel de Moïse représentait seul le lieu où Dieu pouvait rencontrer le pécheur. Type de la croix, c’était là que Dieu pouvait se montrer juste en justifiant le coupable, et que Son amour s’était mis parfaitement d’accord avec sa justice pour opérer le salut. L’autel d’airain formait la base de toutes les relations de l’Éternel avec son peuple ; il était, pour ainsi dire, la première porte d’entrée du sanctuaire. Cependant notre livre le supprime (non pas son souvenir, comme nous allons le voir) parce que l’oeuvre qui a introduit le règne du roi de paix est considérée ici comme entièrement terminée. L’autel du tabernacle, l’autel de l’expiation n’est, dans les Chroniques, que le point de départ pour amener le peuple à l’autel du temple, c’est-à-dire à l’autel du culte, caractère essentiel de l’autel de Salomon dans ce livre. Le premier autel d’airain a donc disparu, mais pour reparaître ici sous forme d’estrade, comme sur un piédestal où Salomon est placé, à la vue de tout le peuple. Le lieu où la victime pour le péché a été offerte devient celui où Salomon — Christ — est glorifié. «Maintenant», dit le Seigneur en parlant de la croix, «le fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui» (Jean 13:31). Cet autel, qui est pour tout croyant le salut définitif et sans retour, car il n’y a plus pour nous de victime pour le péché, la croix de Christ restant désormais vide de son fardeau d’iniquité — cet autel a une autre signification encore : il est la base sur laquelle la gloire du fils de l’homme est établie. C’est à cause de son sacrifice que les rênes du gouvernement sont placées entre ses mains, et qu’il est mis en vue comme le Chef de son peuple.
Mais une autre chose frappe ici : Salomon, sur son estrade, est en réalité un intercesseur, un avocat pour Israël, plus encore qu’un roi. C’est là qu’il fléchit les genoux, qu’il étend ses mains suppliantes vers les cieux. Et, chose remarquable, il n’est pas ici, comme en 1 Rois 8:54-61, un souverain sacrificateur selon l’ordre de Melchisédec, bénissant Dieu de la part du peuple et le peuple de la part de Dieu, se levant de devant l’autel afin de se tenir debout pour bénir : Non, il ne prend sur son estrade qui fut un autel, qu’une position d’intercesseur, priant pour le peuple qui par sa conduite future, par son péché prévu, anéantirait tous les conseils de Dieu, si ces derniers pouvaient être anéantis.
Ce rôle que Salomon remplissait en faveur d’Israël, le Seigneur le remplit aujourd’hui pour nous. «Si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus Christ, le juste ; et Lui est la propitiation pour nos péchés, et non pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier» (1 Jean 2:1-2). Son office d’Avocat est basé sur la propitiation qu’il a accomplie, comme l’intercession de Salomon était inséparable de cette estrade, mystérieuse et merveilleuse figure de l’autel.
À la fin de la prière de Salomon nous trouvons (6:41-42) des paroles qui manquent dans le livre des Rois : «Et maintenant, Éternel Dieu ! lève-toi pour entrer dans ton repos, toi et l’arche de ta force ! que tes sacrificateurs, Éternel Dieu, soient revêtus de salut, et que tes saints se réjouissent en ta bonté ! Éternel Dieu, ne repousse pas la face de ton Oint ; souviens-toi de tes grâces, envers David, ton serviteur». Ces paroles sont prises du Ps. 132. Dans ce cantique, les afflictions de David avaient eu pour but de trouver des demeures pour le puissant de Jacob. Cette habitation était trouvée maintenant, mais dans l’imperfection comme la demande de Salomon en fait foi. Alors Dieu, dans le Psaume, répond au désir du roi exprimé dans les Chroniques. Il lui montre Sion, sa maison, sa sacrificature, son Oint, tels qu’il les voit dans leur perfection éternelle, en réponse aux souffrances de Christ, le vrai David. Le repos de l’Éternel est encore à venir, mais Salomon nous en présente ici le tableau anticipé.
Au chap. 7, nous trouvons ensuite les versets 1 à 3 et 6 à 7, passage qui manque dans le livre des Rois. «Le feu descendit des cieux et consuma l’holocauste et les sacrifices, et la gloire de l’Éternel remplit la maison». Dieu met son sceau et son approbation sur l’inauguration de ce règne de paix ; sa gloire remplit la maison qui lui a été préparée ; le peuple tout entier se prosterne le visage en terre sur le pavement, et célèbre l’Éternel dans l’adoration et la louange. Ce passage cadre et s’harmonise admirablement avec le caractère du culte millénaire, tels que les Chroniques nous le présentent !
Les v. 12 à 22 du chap. 7 diffèrent peu du récit des Rois. Il est cependant à noter qu’ici, comme au premier chapitre (v. 7), l’apparition de l’Éternel à Salomon a un caractère peut-être plus immédiat que dans le livre des Rois, car il n’est pas dit que Dieu lui apparut «en songe» (v. 12). La maison que l’Éternel s’est choisie est appelée une «maison de sacrifice» selon son caractère de lieu de culte que nous avons observé tout du long de ce livre. Le libre choix de la grâce de Dieu est aussi plus accentué dans nos chapitres : Dieu a choisi Jérusalem, choisi David, choisi la maison (6:6 ; 7:12). En réponse à l’office d’avocat et d’intercesseur que Salomon a pris dans le chapitre précédent, Dieu lui donne une réponse complète (v. 13-14) qui manque dans le livre des Rois. Les suites de la responsabilité du peuple et de ses conducteurs sont mises complètement en évidence dans ce passage, comme elles l’avaient été dans la prière de Salomon, mais aussi la certitude qu’en vertu de cette intercession Dieu pardonnerait leur péché et guérirait leur pays. Et il en donne l’assurance à son Bien-aimé par ce seul mot omis dans le livre des Rois : «Maintenant mes yeux seront ouverts, etc». Dès le moment où Salomon est apparu devant Dieu, la réponse à son intercession est certaine et, quelque retardée qu’elle doive être, à cause de l’infidélité du peuple, elle n’en est pas moins une chose actuelle accordée à la demande de l’oint de l’Éternel.
Pour la seconde fois dans ces livres la responsabilité de Salomon est mentionnée (v. 17-18. Voyez 1 Chron. 28:7) ; mais avec cette grande différence que les Chroniques ne montrent en aucune manière comme le premier livre des Rois, que Salomon y ait manqué. Sa responsabilité reste donc, dans notre livre, une responsabilité à la gloire de Dieu, en sorte que, comme type, nous pouvons voir que rien absolument ne manquera au roi des conseils de Dieu.
Ces deux chapitres décrivent les relations du roi Salomon avec les gentils. Le second chapitre de notre livre avait déjà parlé des Cananéens et de Hiram, roi de Tyr, mais seulement en rapport avec la construction du temple, à l’ouvrage duquel tous étaient appelés à concourir. Le premier fait qui soit relaté est la conquête pacifique, la prise de possession et l’assujettissement de toutes les villes des nations environnantes. Ici nous rencontrons un détail très intéressant pour l’intelligence des Chroniques. Le premier livre des Rois (9:11-14) nous raconte que Salomon donna à Hiram, roi de Tyr, «vingt villes dans le pays de Galilée». Hiram méprisa ce don et appela ces villes «Pays de Cabul» (bon à rien) et nous avons fait remarquer à ce sujet que si, d’une part, le territoire du pays de la promesse n’a jamais eu de valeur pour le monde, d’autre part, Salomon commettait une infidélité positive en aliénant le pays de l’Éternel. Comme toujours dans ce livre, le péché de Salomon est passé sous silence. De telles omissions renouvelées invariablement devraient montrer aux rationalistes la futilité de leurs critiques en présence d’un plan dont ils ne semblent pas se douter. Au lieu de voir Salomon donner des villes à Hiram, nous voyons, au v. 2, ce dernier donnant des villes à Salomon. Un jour arrivera où le monde dont Tyr est le représentant dans la Parole, viendra, avec ses richesses, se reconnaître tributaire de Christ, et offrira ses meilleures villes comme demeure aux fils d’Israël. Salomon les fortifie, les entoure de murailles, les munit de portes et de barres, en un mot les met en état de défense. C’est là aussi qu’il concentre sa force armée, non pas pour l’employer à la guerre, mais, connaissant le coeur insoumis des nations, il prépare cette puissance pour faire régner la paix. Pendant son long règne de 40 ans nous ne voyons Salomon engagé dans aucune guerre de conquête, mais il faut que le poids de son sceptre soit senti pour que les nations se soumettent. La Parole nous dit de Christ : «Tu les briseras avec un sceptre de fer». Sous le règne de mille ans aucune nation n’osera lever la tête devant le Roi, et Lui aura encore bien d’autres moyens de leur faire sentir le poids de son bras (voyez Zach. 14:12-16).
Tout ce qui reste des Cananéens dans le pays d’Israël est aussi asservi à Salomon (v. 7-10), tandis que les fils d’Israël sont gens de guerre et libres, mais afin de servir le Roi.
Le v. 11 nous parle des rapports de Salomon avec la fille du Pharaon : «Et Salomon fit monter la fille du Pharaon, de la ville de David, dans la maison qu’il avait bâtie pour elle ; car il dit : Ma femme n’habitera pas dans la maison de David, roi d’Israël, car les lieux où est entrée l’arche de l’Éternel sont saints». Plusieurs ont pensé que l’union de Salomon avec la fille du roi d’Égypte était une infidélité aux prescriptions de la loi. L’oubli du sens typique de la Parole peut conduire à de telles méprises. Dira-t-on que Joseph était infidèle en épousant Asnath, fille de Poti-Phéra, sacrificateur d’On (Gen. 41:50) ; que Moïse était infidèle en épousant Séphora, fille du sacrificateur de Madian ? (Ex. 2:21). De tout temps, dans leurs rapports avec les Cananéens, et bien avant l’entrée d’Israël dans la terre promise, les Pharaons avaient donné leurs filles aux divers rois de ces contrées. C’était, pour le roi d’Égypte, un moyen de se les asservir, car ils payaient un tribut au Pharaon, en échange de l’honneur d’être ses gendres. Mais jamais un roi d’Égypte ne donnait sa propre fille aux rois des nations voisines ; il leur cédait les filles de ses concubines qui n’avaient aucun droit au trône d’Égypte et n’étaient pas de sang royal par leurs mères. «La fille du Pharaon» était fille de la reine, de l’épouse légitime, et avait selon la constitution de l’Égypte droit au trône en l’absence d’un fils héritier. Cette fille-là, la fille du Pharaon et non pas «une de ses filles» fut donnée à Salomon. Une union pareille était l’affirmation des droits éventuels de Salomon sur le pays d’Égypte. Elle assujettissait la royauté du Pharaon à celle du roi d’Israël qui pouvait devenir ainsi le dominateur auquel l’Égypte devrait se soumettre ; preuve évidente que le plus ancien des royaumes de la terre consentait à subir le joug du grand roi d’Israël. Ce fait a une réelle importance comme un des traits de la domination millénaire de Christ. Un mot ajouté ici ne se trouve pas dans le livre des Rois : «Salomon dit : Ma femme n’habitera pas dans la maison de David, roi d’Israël, car les lieux où est entrée l’arche de l’Éternel sont saints». Une fille des nations, quelque antique et puissant que fût son peuple, ne pouvait habiter là où, même momentanément, l’arche avait demeuré. Malgré l’union du Roi de paix avec les nations, elles ne pouvaient jouir de la même intimité avec lui que le peuple élu. L’arche était le trône de l’Éternel en rapport avec Israël ; jamais Dieu n’avait choisi l’Égypte, mais il avait choisi Israël comme héritage, Jérusalem pour être son siège, le temple comme lieu de sa demeure, David et Salomon pour être les Bergers de son peuple.
Ce peuple, aujourd’hui méprisé et rejeté à cause de sa désobéissance, retrouvera un jour, en vertu de l’élection de grâce, une bénédiction terrestre dans le royaume de Christ, et devant la face du Seigneur. Les grandes nations de jadis, l’Égypte et l’Assyrie, y auront largement leur part, mais non celle de la proximité absolue (És. 19:23-25) ; elles seront appelées le peuple et l’ouvrage des mains de l’Éternel, mais non pas son héritage comme Israël. Sans doute, les oppresseurs acharnés du peuple de Dieu, aux jours d’autrefois, auront une place privilégiée et bénie sous le règne du Christ, mais il conviendra pour la gloire du Roi, jadis bafoué et méprisé par les nations qui opprimèrent son peuple, que ce dernier soit au comble des honneurs, à la vue de ses ennemis de jadis. Et n’en sera-t-il pas de même de l’Église fidèle, quand ceux de la synagogue de Satan viendront se prosterner devant ses pieds et reconnaître que Jésus l’a aimée ?
Les v. 12 à 16 mentionnent tout le service religieux et sacerdotal comme placé sous les yeux des nations soumises et ayant pour elles une grande importance. Tout y est réglé selon le commandement de Moïse et l’ordonnance de David. Les sacrifices sont offerts («chaque jour ce qu’il fallait»), mais les holocaustes seuls sont mentionnés selon le dessein de ce livre dont nous avons parlé plus d’une fois. Ce passage manque (v. 13-16) dans le premier livre des Rois.
Aux v. 17-18 nous retrouvons la coopération du roi de Tyr à l’éclat du règne de Salomon. Il ne s’agit plus seulement pour lui de collaborer à l’oeuvre du temple, mais de contribuer à l’opulence extérieure de ce règne glorieux où l’or était comme les pierres dans Jérusalem.
Au chap. 9 l’histoire de la reine de Sheba, si pleine d’instruction, et déjà traitée dans le livre des Rois, clôt le récit des relations intimes de Salomon avec les nations. Bornons-nous à y ajouter quelques remarques.
Hiram s’est mis à la disposition de Salomon par affection pour David, le roi de grâce qu’il a connu personnellement ; la reine de Sheba est attirée par la sagesse et la renommée du Roi, dont le règne glorieux et pacifique est l’objet de l’admiration universelle. La parole des autres la décide à venir voir de ses propres yeux : Elle «entendit parler de la renommée de Salomon». 1 Rois 10:1 ajoute : «en relation avec le nom de l’Éternel» ; mais ici Salomon, «assis sur le trône de l’Éternel» (1 Chron. 29:23), concentre pour ainsi dire en sa personne le caractère divin. Nous trouvons de même au v. 8 : «Béni soit l’Éternel, ton Dieu, qui a pris plaisir en toi, pour te placer sur son trône comme roi pour l’Éternel, ton Dieu», tandis qu’en 1 Rois 10:9, le passage correspondant dit simplement : «pour te placer sur le trône d’Israël». C’est donc l’Éternel que Salomon représente dans les Chroniques. On pourrait multiplier ces détails pour montrer que tous concourent à harmoniser dans ses moindres nuances le tableau qui nous est fait ici du règne millénaire de Christ.
La reine de Sheba n’avait pas besoin d’autre chose que de ce qu’elle avait entendu pour accourir à Jérusalem, et cependant elle n’avait pas «cru leurs paroles» jusqu’à ce qu’elle fût venue et que ses yeux eussent vu (v. 6). Ce sera en effet le caractère des croyants, dans ces temps futurs ; leur foi naîtra de la vue, tandis qu’aujourd’hui, «bienheureux sont ceux qui n’ont point vu et qui ont cru» (Jean 20:29).
Si la joie de la reine fut profonde devant les splendeurs de ce grand règne, peut-elle être comparée à la nôtre, dans le jour actuel ? N’est-il pas dit de nous : «Lequel, quoique vous ne l’ayez pas vu, vous aimez ; et, croyant en Lui, quoique maintenant vous ne le voyiez pas, vous vous réjouissez d’une joie ineffable et glorieuse (1 Pierre 1:8).
Tous les détails de ce règne incomparable intéressent la reine de Sheba ; elle jouit de tout, voit tout, énumère tout, depuis les vêtements des serviteurs, jusqu’à la rampe merveilleuse construite par Salomon pour relier son palais avec le temple. Tous les trésors affluaient à Jérusalem, centre où le roi attirait les richesses du monde entier, «tous les rois d’Arabie» et les gouverneurs des diverses contrées lui apportaient l’or, les aromates qui jouaient un rôle si considérable dans les cours orientales, les pierres précieuses, le bois rare d’algunim. L’or surtout, cet emblème de la justice divine, arrivait de toutes parts ; «le marchepied du trône» (v. 18) en était formé. Les pieds du roi reposaient sur l’or pur quand il siégeait dans son royaume. «La justice et le jugement sont les bases de ton trône», est-il dit au Ps. 89:14 (cf. Ps. 97:2) ; mais il est aussi ajouté : «la bonté et la vérité marchent devant ta face». C’était sa face que recherchaient tous les rois de la terre, pour entendre la sagesse que Dieu avait mise dans son coeur (v. 23). «Voir la face du roi» était le privilège suprême ; quiconque y était admis pouvait se déclarer bienheureux. «Heureux... tes serviteurs, dit la reine, qui se tiennent continuellement devant toi». «Bienheureux», est-il dit encore, «le peuple qui connaît le cri de joie ! Ils marchent, ô Éternel, à la lumière de ta face» (Ps. 89:15). Voir la face du roi, c’est être admis dans son intimité. Suprême honneur pour les nations futures, mais, à bien plus forte raison, notre privilège actuel ! Ah ! combien une telle faveur nous rabaisse ! nous sentons notre néant devant cette face glorieuse ; nous nous prosternons dans la poussière, devant tant de justice, et de sagesse et de bonté. Mais le voici qui s’adresse à nous : «Bienheureux», dit la reine, «ceux qui entendent ta sagesse». Ce n’est pas la voix des grandes eaux et des forts tonnerres, mais une voix plus douce que la brise parfumée de myrrhe ; une voix qui nous pénètre ; la voix du Bien-aimé, de Jedidia, la voix de l’amour ! Ces sentiments divers se fondent en un seul quand nous recherchons sa face et sommes admis en Sa présence. Et comme cela arriva à la reine de Sheba «il n’y a plus d’esprit en nous». C’est l’émerveillement, l’adoration, devant tant de sagesse, de sainteté, de justice, et de gloire ; un amour très humble parce qu’il sent aussitôt qu’il ne peut se mesurer avec cet amour ; c’est le coeur tout entier saisi d’extase, qui ne respire que pour s’anéantir dans la contemplation de l’objet aimé. Telles étaient les pensées de la Sulamithe quand elle contemplait le plus parfait parmi les fils des hommes. «Ses yeux voyaient le Roi dans sa beauté» (És. 33:17).
Les v. 27-28, répétition de ce qui nous est dit au chap. 1:15, 17 (cf. 1 Rois 10:27-29), sont la description du règne tel qu’il fut établi dès son début et tel que, dans les Chroniques, il reste jusqu’à la fin. Il a répondu selon le caractère de ce livre à tout ce que Dieu en attendait. On peut voir, d’après le v. 26, que les chars et les chevaux de Salomon n’étaient point une infraction à la loi de Moïse (Deut. 17:16), mais un moyen de maintenir le règne de paix sur toutes les nations : «Il dominait sur tous les rois, depuis le fleuve jusqu’au pays des Philistins et jusqu’à la frontière d’Égypte» (v. 26). Ces limites du royaume de Salomon en Israël correspondent à celles que les conseils de Dieu assignent à son peuple en Josué 1:4 ; elles n’avaient jamais été atteintes jusqu’alors et ne le furent jamais depuis. Elles ne seront réalisées et bien au-delà, que dans le règne futur de Christ.
Nous avons donc vu dans ces chapitres les Cananéens, Tyr, les rois d’Arabie, tous les rois depuis le fleuve à la frontière d’Égypte, la reine de Sheba, enfin tous les rois de la terre, affluer à la cour du grand Roi. Ainsi se termine l’histoire de Salomon, sans qu’un alliage quelconque ternisse le pur métal de son caractère tel que les Chroniques nous le présentent. Si nous avons fait allusion à son amour, souvenons-nous toutefois qu’il est moins ici la marque de son règne que la sagesse et la paix, mais l’Éternel y est célébré pour sa bonté qui demeure à toujours. Même sa justice n’est présentée dans les Chroniques que dans le gouvernement des nations ; le trône y est décrit (9:17-19) puisqu’il s’agit du royaume, mais la maison de la forêt du Liban où le trône se trouve avec son caractère judiciaire, manque ici complètement (cf. 1 Rois 7:2-7). Dans ce qui nous est présenté, tout est parfait, et l’on a lieu d’être étonné que des écrits émanant de personnes pieuses puissent affirmer exactement le contraire. Cela vient sans doute de la confusion que ces personnes établissent entre le livre des Rois et les Chroniques. Comme type, la Parole ne peut aller plus loin, mais souvenons-nous qu’elle ne peut faire un tableau de la perfection en prenant pour exemple le premier Adam sans passer absolument sous silence ses imperfections et ses graves péchés.
C’est à ce point de notre récit qu’il faut remarquer l’omission absolue dans les Chroniques de 1 Rois 9:1-40 : le péché sans rémission de Salomon, son amour pour beaucoup de femmes étrangères, l’idolâtrie de sa vieillesse, la colère de Dieu réveillée contre lui, les adversaires qui lui sont suscités, Hadad, l’Édomite et Rizon, fils d’Éliada (1 Rois 11:14-25) ; le jugement prononcé sur son royaume (1 Rois 11:11), enfin la révolte de Jéroboam. Or de telles omissions font éclater à nos yeux le but et la pensée générale de notre livre.
Le chap. 10 marque la seconde division des Chroniques, la première comprenant l’histoire de David et de Salomon. Jusqu’à la fin de notre livre nous avons l’histoire de la royauté de Juda, contrepartie de celle d’Israël traitée dans les livres des Rois. Mais, avant d’étudier les successeurs de Salomon, il nous faut exposer brièvement ce que leur histoire a de spécial.
Nous avons dit que les Chroniques présentent le tableau des conseils de Dieu au sujet de la royauté. Ces conseils ont été accomplis en type, mais seulement en type, sous les règnes de David et de Salomon. David, roi souffrant et rejeté, est devenu, dans son Fils, le roi de paix, le roi de gloire qui s’assied sur le trône de l’Éternel. Cependant, quoique les Chroniques aient soin d’omettre entièrement les fautes de Salomon, il n’était pas le vrai roi des conseils de Dieu. Ces mots : «Je lui serai pour Père, et lui me sera pour Fils» (2 Sam. 7:14) ne pouvaient avoir leur plein accomplissement à son égard. Le décret : Tu es mon Fils ; aujourd’hui, je t’ai engendré» (Ps. 2:7), ne le concernait pas et faisait espérer un plus grand et plus parfait que lui. Mais, pour que ce Fils futur pût être «la postérité de David» il fallait que la lignée de David fût maintenue jusqu’à son apparition ; c’est pourquoi Dieu avait dit à David «qu’il lui donnerait une lampe, à lui et à ses fils, à toujours» (21:7). Or cette lampe, comment allait-elle briller dans la maison royale, jusqu’à l’apparition du Fils promis ? Comment traverserait-elle l’air empoisonné et les ténèbres morales de l’homme sans s’éteindre, rendant ainsi impossible l’apparition du vrai héritier de David ? C’est ce que Satan a compris. Qu’il réussît à éteindre la lampe, tous les conseils de Dieu à l’égard du «juste dominateur des hommes» auraient été réduits à néant. Mais, en dépit de tous les efforts de l’Ennemi pour supprimer cette lumière, le fils de David parut dans le monde, remporta la victoire sur Satan, et devint pour l’Église le oui et l’amen de toutes les promesses de Dieu. Toutefois ce n’est pas de ce sujet révélé dans le Nouveau Testament qu’il est question ici ; comme nous l’avons vu, il ne s’agit dans les Chroniques que de la royauté terrestre de Christ sur Israël et les nations. Cette royauté fut combattue jusqu’au bout par Satan. Quand le roi que les mages adorent paraît comme petit enfant, l’Ennemi cherche à le supprimer par le meurtre des enfants de Bethléem. À la croix où il pense en finir avec lui, il ne peut empêcher qu’il ne soit déclaré roi des Juifs, à la vue de tous, par l’écriteau de Pilate ; et, quand l’Ennemi se croit victorieux, Dieu ressuscite son Oint et l’établit Seigneur et Christ aux yeux de toute la maison d’Israël.
Revenons à notre livre. Si pour les raisons données plus haut, il ne nous montre pas les manoeuvres de Satan pendant le règne de Salomon, il en parle d’une manière d’autant plus frappante pendant les règnes subséquents. L’Ennemi séduit le roi et son peuple pour les pousser à l’idolâtrie, il use de violence, pour détruire et anéantir la race royale. Mais Dieu veille pour atteindre la conscience du peuple et, quand tout semble perdu, le souffle de l’Esprit vient ranimer le lumignon qui s’éteint. Des cas surgissent où un Joram, un Achazia, un Achaz, sont assez réprouvés pour être livrés au feu consumant, car Dieu lui-même, toujours attentif aux «bonnes choses», ne peut plus reconnaître aucun bien chez ces rois et tout, absolument tout, doit tomber sous le jugement. La lampe est éteinte, c’est le règne des ténèbres les plus profondes ; Satan triomphe, mais seulement en apparence. Dieu conserve un faible rejeton de ce tronc réprouvé, dans la personne d’Achazia — oui, mais ce seul rejeton épargné dans le meurtre de la race royale, se trouve être lui-même un sarment sec destiné au feu. Nouvel anéantissement de toute la race. Est-elle bien détruite maintenant ? Non, la voici qui renaît en Joas, et l’Esprit de Dieu peut de nouveau trouver chez lui «de bonnes choses». De cette manière la succession royale se continue, en sorte que la lignée de David n’est pas anéantie par ces réprouvés (voyez Matthieu 1). Aussi la lutte entreprise contre Dieu par Satan tourne à la confusion de ce dernier. Quel est donc le secret de sa défaite ? Une chose l’explique, la seule à laquelle Satan qui en sait tant n’a jamais pensé ni pu penser. Le secret qu’il ignore c’est la grâce, car son intelligence si subtile est complètement inaccessible à l’amour. Toute cette seconde partie des Chroniques pourrait donc être intitulée l’histoire de la grâce en rapport avec la royauté de Juda. Quand la grâce peut ranimer la flamme pour entretenir la lumière du témoignage, elle ne manque pas de le faire ; quand, vis-à-vis de l’endurcissement volontaire des rois elle ne peut rien produire, elle leur suscite encore une descendance dont elle puisse attendre quelque fruit.
C’est donc à la lutte acharnée de Satan contre les conseils de Dieu que nous allons assister, en même temps qu’au triomphe de la grâce. Toute cette période est résumée dans la parole du prophète : «Qui est un Dieu comme toi, pardonnant l’iniquité et passant par-dessus la transgression du reste de son héritage ? Il ne gardera pas à perpétuité sa colère, parce qu’il prend son plaisir en la bonté. Il aura encore une fois compassion de nous, il mettra sous ses pieds nos iniquités ; et tu jetteras tous leurs péchés dans les profondeurs de la mer» (Michée 7:18-19).
Il arrive cependant un temps où la ruine paraît irrémédiable, où, dans la lutte, le triomphe de Satan semble assuré. La royauté sombre dans les flots du jugement ; quand même, comme nous l’avons vu dans les généalogies (1 Chron. 3:19, 24), de faibles représentants de la race royale, sans titres, sans prérogatives, sans autorité et sans royaume subsistent encore. Après eux la race toujours plus obscure et abaissée, se perpétue dans le silence jusqu’à un pauvre charpentier qui devient le père putatif de la «Semence de la femme». Le Christ est né !
Rien donc n’a pu annuler les conseils de Dieu, ni l’effort de Satan, ni l’infidélité des rois. Sans doute ces conseils ont été cachés pour un temps jusqu’à la venue du Messie, dépeint par anticipation dans la personne de Salomon. Le trône était resté vide, mais vide seulement en apparence, jusqu’à ce que le roi de justice et de paix pût venir s’y asseoir. Le voici ! Ce petit enfant, humilié, rejeté à son apparition, possède tous les titres à la royauté. Mais voyez-le, écoutez-le ! Les foules le cherchent pour le faire roi ; il se cache et se dérobe ; il défend à ses disciples de parler de son royaume. C’est qu’avant de le recevoir il a une autre mission, un autre service à accomplir. Il se déclare roi devant Pilate et cela le conduit au supplice, mais il va prendre un royaume qui n’est pas de ce monde. Il abandonne entre les mains de ses ennemis tous ses droits sans en garder aucun ; il est muet comme la brebis devant ceux qui la tondent. C’est qu’il lui faut remplir une tout autre tâche, l’oeuvre immense de la rédemption qui le conduit à la croix.
Cette oeuvre accomplie il reçoit, en résurrection, la sphère céleste du royaume. Comme jadis Salomon, il est assis sur le trône de son Père en attendant de l’être sur son propre trône. Ce moment viendra pour Lui, le vrai roi d’Israël et des nations, mais il n’est pas encore arrivé. Lui n’attend plus qu’un signe de son Père pour prendre en mains les rênes du gouvernement terrestre.
Dès le moment de son apparition comme petit enfant, plus n’est besoin d’une succession royale (*). Le roi existe, le roi vit, le roi trône aujourd’hui dans le ciel, il sera proclamé bientôt Seigneur de toute la terre et postérité de David pour son peuple d’Israël. Mais jusqu’à son apparition, pour maintenir sa lignée, il n’y a, nous l’avons dit, qu’un seul moyen, la grâce. De là cette particularité remarquable que, dans les Chroniques, tout ce qui peut être, chez les plus mauvais rois, le fruit de la grâce, est soigneusement enregistré. Partout où Dieu peut le faire, il le signale. Aussi ce récit n’est pas, comme dans le livre des Rois, le tableau de la royauté responsable, mais celui de l’action de la grâce dans ces hommes. L’Esprit de Dieu travaille même dans le coeur affreusement endurci d’un Manassé pour prolonger un peu la lignée royale dans un rejeton (Josias) qui gouverne selon le coeur de Dieu. Malgré ces réveils momentanés, la ruine s’accentue de plus en plus. C’est à peine si les Chroniques, en cela différentes des Rois et du prophète Jérémie, daignent enregistrer en quelques versets les successeurs de Josias, ayant hâte d’arriver à la fin, au retour de la captivité, preuve éclatante de la grâce de Dieu envers ce peuple.
(*) Nous disons «succession» parce que nous n’oublions pas que le «prince» ou vice-roi d’Ézéchiel fait partie de la semence royale (cf. Ézéchiel 46:1-18 ; 48:21).
Pour accomplir l’oeuvre de la grâce qui amènera enfin le triomphe de la royauté dans la personne de Christ, il fallait que la dispensation de la loi, sans être abolie, subît une importante modification. Sous les rois, le régime de la loi subsistait, car il ne trouve sa fin qu’en Christ ; le régime de la grâce n’était pas encore inauguré, car il trouve sa pleine expression à la croix ; mais, dans la période des rois, Dieu intervient d’une manière toute nouvelle, pour manifester ses voies de grâce sous le régime de la loi, et cela par l’apparition des prophètes.
Non que cette apparition soit restreinte au régime inauguré par les rois, car elle se manifeste dès le moment où l’histoire d’Israël est caractérisée par la ruine. Aussi nous voyons les premiers prophètes (pour ne pas mentionner Énoch, puis Moïse) apparaître lorsque la ruine est complète en Israël. Au livre des Juges, quand le peuple tout entier a failli, nous voyons surgir la prophétesse, Débora (Juges 4:4) et, plus tard, un prophète (6:7-10). Plus tard, la sacrificature étant ruinée, Samuel est suscité comme prophète (1 Sam. 3:20). Aux livres des Rois et des Chroniques, enfin, lors de la faillite de la royauté, les prophètes paraissent et se multiplient à ne pouvoir les compter (*). Ils inaugurent une nouvelle dispensation de Dieu, devenue nécessaire quand tout est ruiné, quand la loi s’est montrée impuissante à régler et à contenir la nature corrompue de l’homme, quand, même mélangée de miséricorde (lorsque les tables de la loi furent données une seconde fois à Moïse), elle n’a aucunement amélioré cet état. C’est alors que Dieu envoie ses prophètes. En certaines occasions ils n’annoncent que le jugement imminent, dernier effort de la miséricorde divine pour sauver le peuple comme à travers le feu ; en d’autres occasions, beaucoup plus nombreuses, ils sont envoyés pour exhorter, ramener, consoler, fortifier, appeler à la repentance tout en faisant ressortir les conséquences judiciaires sur ceux qui n’écoutent pas. Le prophète a donc à la fois un ministère de grâce et de jugement, de grâce parce que l’Éternel est un Dieu de bonté, de jugement parce que le peuple est placé sous la loi et que la prophétie n’abolit pas la loi. Elle s’appuie au contraire sur la loi, tout en proclamant à haute voix qu’au moindre retour vers Dieu, le pécheur trouvera miséricorde. Elle est sans doute un adoucissement de la loi, Dieu concédant à l’homme pécheur tout ce qui est compatible avec sa sainteté, mais, d’autre part, ne pouvant renier son caractère en face de la responsabilité de l’homme. La prophétie ne supprime pas un iota de la loi, mais accentue, plus que Dieu ne l’avait fait jusque-là, le grand fait qu’Il se plaît à la miséricorde et au pardon et tient compte du moindre symptôme de retour vers Lui. «Quand les prophètes», a dit un frère, «entrent sur la scène, la grâce commence à reluire de nouveau». Le seul fait de leur témoignage était déjà une grâce envers un peuple qui avait violé la loi. S’ils venaient chercher du fruit et ne trouvaient que du verjus, ils annonçaient néanmoins aux élus les promesses de Dieu en grâce, la grâce comme réparation des choses que le peuple avait gâtées. L’Évangile, survenu après cela, parle d’une nouvelle création, d’une vie nouvelle et non d’une réparation. En Ésaïe 58:13-14 on voit le caractère différent de la loi et de la prophétie, dans la manière dont elles présentent le sabbat : «Si tu appelles», dit le prophète, «le sabbat tes délices, et honorable le saint jour de l’Éternel, si tu l’honores en t’abstenant de suivre tes propres chemins, de chercher ton plaisir et de dire des paroles vaines, alors tu trouveras tes délices en l’Éternel».
(*) Liste des prophètes cités dans le second livre des Chroniques :
Nathan (9:29) ; Akhija, le Silonite (9:29 ; 10:15). Iddo (ou Jehdo), le voyant (9:29 ; 12:15 ; 13:22). Shemahia, homme de Dieu (11:2 ; 12:5, 15).
Azaria, fils d’Oded (15:1), et Oded (v.8).
Hanani, le voyant (16:7).
Michée, fils de Jimla (18:7).
Jéhu, fils de Hanani, le voyant (19:2 ; 20:34). Jakhaziel, fils de Zacharie (20:14).
Éliézer, fils de Dodava (20:37).
Élie, le prophète (21:12).
Plusieurs prophètes et Zacharie, fils de Jehoïada (24:19, 20).
Un homme de Dieu (25:7). Un prophète (25:15).
Zacharie, le voyant (26:5).
Ésaïe, fils d’Amots (26:22 ; 32:32). Oded (28:9).
Michée, le Morashtite (Jér.26:18).
Des prophètes (33:18-19 ; cf. 2 Rois 21:10). Hulda, la prophétesse (34:22). Jérémie (35:25 ; 36:12, 21). Messagers et prophètes (36:15, 16 ; cf. Urie, fils de Shemaia (Jér. 27:20).
Un caractère particulier de Dieu est donc exprimé par les prophètes. Ce n’est pas la loi, donnée au Sinaï, c’est encore moins la grâce révélée dans l’Évangile. C’est un Dieu qui, tout en montrant son indignation contre le péché, ne prend pas plaisir au jugement et dont le vrai caractère, la grâce, triomphera toujours à la fin ; un Dieu qui dit : «Consolez, consolez mon peuple» quand il a «reçu le double pour tous ses péchés». Sous la loi pure le jugement triomphe de l’iniquité ; sous la prophétie, la grâce et la miséricorde triomphent quand le jugement a été exécuté ; sous l’Évangile enfin, la grâce s’élève par-dessus le jugement parce que l’amour et la justice se sont entre-baisés à la croix. Le jugement exécuté sur Christ a fait triompher la grâce. Le jugement était contre lui au lieu d’être contre nous ; — la grâce tout entière, l’amour, Dieu lui-même, a été pour nous.
Tout le rôle de la prophétie est exprimé dans le prophète Michée cité plus haut (7:18-19). Il est impossible, et c’est ce qu’annonce ici le prophète, que Dieu se désavoue lui-même, soit quant à ses jugements, soit quant à ses promesses de grâce.
Tel est le rôle des prophètes dans les Chroniques. S’ils apparaissent d’abord isolément, comme dans les Juges, puis sous le règne de Saül, de David, de Salomon, ils se multiplient ensuite à mesure que l’iniquité grandit dans le royaume. C’est ce qu’exprime le Seigneur en Matth. 21:34-36. Après les quelques esclaves du début dont les vignerons battent l’un, tuent l’autre et lapident le troisième, le maître de maison envoie d’autres esclaves en plus grand nombre que les premiers, et les vignerons leur font de même. Enfin il leur envoie son Fils.
Nous arrivons ici à la ligne de démarcation tracée dans les Chroniques entre le règne de David et de Salomon, et celui de leurs successeurs. Le sujet que nous allons aborder va nous présenter, comme nous l’avons dit plus haut, non plus les conseils de Dieu quant à la royauté, mais l’oeuvre de la grâce pour la maintenir jusqu’à l’apparition du Messie dans lequel ces conseils seront réalisés. Nous avons donc ici l’histoire ordinairement affligeante, parfois consolante des rois de Juda, car ceux d’Israël ne sont plus mentionnés que dans leurs rapports avec Juda et Jérusalem. C’est exactement la contrepartie du récit des Rois.
Fait remarquable, et qui confirme tout ce que nous avons dit spécialement au sujet de David et de Salomon, types de la royauté selon les conseils de Dieu, la Parole n’omet pas seulement ici les péchés de Salomon à la fin de sa carrière, mais jusqu’à leurs conséquences, comme elle l’a déjà fait pour les châtiments qui atteignirent David au sujet d’Urie, dans le premier livre des Chroniques ; preuve évidente que David et Salomon occupent dans ces livres une place à part. L’avènement de Jéroboam et la division du royaume sont présentés ici comme la conséquence du péché de Roboam et non de celui de son père ; de même la prophétie d’Akhija à Jéroboam s’accomplit, non pas parce que Salomon a péché, mais parce que «Roboam n’écouta pas le peuple» (10:15). Et cependant on voit, dans ce même passage qui s’en réfère à 1 Rois 11:31-33, que Dieu n’a pas le dessein de cacher les fautes de Salomon, mais que le but de l’Esprit Saint est de les omettre.
L’établissement de Jéroboam, fils de Nebath, sur le trône d’Israël est aussi passé sous silence, ce qui importe, l’histoire étant uniquement celle de Juda et non pas celle d’Israël (cf. 1 Rois 12:20). Pour la même raison notre récit omet l’établissement de l’idolâtrie par Jéroboam, l’histoire du vieux prophète, la maladie d’Abija, fils de Jéroboam, et à cette occasion la prophétie d’Akhija (1 Rois 12:25 ; 14:20).
L’histoire de Roboam comprend les chap. 10 à 12, alors que les Rois la résument en quelques versets (1 Rois 14:21-31) ; mais, détail caractéristique, ce dernier passage fait le plus sombre tableau de l’état du peuple, tandis que nos chapitres enregistrent le bien que la grâce produit dans le coeur du roi, quoiqu’il soit dit de lui (12:14) : «Mais il fit le mal ; car il n’appliqua pas son coeur à rechercher l’Éternel». Le chap. 11 nous fait connaître deux faits importants. Roboam avait eu la pensée de ramener les dix tribus sous le joug de l’obéissance, mais en le faisant il se serait opposé au gouvernement de Dieu envers Juda. Le prophète Shemahia le détourne d’une décision qui l’aurait conduit à sa perte et aurait eu les plus graves conséquences pour la tribu de Juda, sur laquelle les yeux de l’Éternel reposaient encore, malgré ses jugements. La grâce agit dans le coeur du peuple ; il écoute l’exhortation et ne donne pas suite à son dangereux dessein. Désormais le seul devoir de Roboam était d’élever des travaux de défense contre les ennemis du dehors, ennemis qui étaient son propre peuple dont le gouvernement lui avait été jadis confié. Roboam environne de forteresses le territoire de Juda et de Benjamin (11:5-12). Son seul devoir était de préserver ce qui lui restait, mais comment le faire quand déjà le mal était au-dedans et y exerçait ses ravages ? Cependant la responsabilité de préserver le peuple n’était nullement diminuée par l’existence d’un mal déjà irréparable. Ce principe est pour nous d’une grande importance. L’état de ruine irrémédiable de la chrétienté ne change absolument rien à notre obligation de défendre les âmes contre les principes délétères qui y sont à l’oeuvre. Nous avons le triste devoir d’élever des forteresses contre un monde pareil aux dix tribus, qui invoquaient le nom de l’Éternel tout en s’adonnant à l’idolâtrie, contre un monde qui se pare du nom de Christ tout en se livrant à ses convoitises. Nous avons à faire comprendre et sentir à la chrétienté qu’il y a séparation entre les vrais chrétiens et les professants que Dieu met au rang de ses ennemis. Cette inimitié amenait le conflit entre Juda et Israël, et se liait au culte idolâtre établi et imposé aux dix tribus par Jéroboam. Le maintien public et officiel du culte de Dieu en Juda eut des conséquences très bénies : «Les sacrificateurs et les lévites qui étaient dans tout Israël, se joignirent à Roboam de toutes leurs contrées ; car les lévites abandonnèrent leurs banlieues et leurs possessions, et vinrent en Juda et à Jérusalem... et à leur suite, ceux de toutes les tribus d’Israël qui avaient mis leur coeur à chercher l’Éternel, le Dieu d’Israël, vinrent à Jérusalem pour sacrifier à l’Éternel, le Dieu de leurs pères» (11:13-16). Tous ceux qui avaient un coeur non partagé pour Dieu, bien qu’ayant été englobés pour un moment dans la révolte des dix tribus, comprennent que leur place n’est pas au milieu d’elles et quittent ce terrain souillé pour venir s’établir en Juda. C’est ainsi qu’un témoignage fidèle, qu’une sainte séparation du monde, produit des fruits chez les croyants retenus jusqu’ici par leurs circonstances dans un milieu que le Seigneur ne reconnaît plus, et qu’ils sont poussés à se joindre à leurs frères qui se réunissent autour du Seigneur. Si ce rassemblement perdit bientôt son caractère, ne fût-ce pas parce que Juda et ses rois abandonnèrent le terrain divin pour sacrifier eux-mêmes aux idoles ? En effet, ce témoignage de séparation du mal dura peu de temps : «Ils marchèrent dans le chemin de David et de Salomon pendant trois ans», et durant cette période «ils fortifièrent le royaume de Juda» (v. 17). Pendant trois ans ! Que n’ont-ils continué ! C’est là qu’était la bénédiction pour Juda et son roi, et n’en est-il pas de même pour nous ? Elle pouvait être complète au milieu même de l’humiliation définitive infligée à Israël. Elle ne fut que temporaire.
Cette bénédiction momentanée, par laquelle «le royaume de Juda fut fortifié et Israël affermi», devint elle-même un piège pour Roboam. La chair s’empare même des grâces de Dieu pour s’éloigner de Lui. «Et il arriva que, quand le royaume de Roboam fut affermi, et qu’il se fut fortifié, il abandonna la loi de l’Éternel, et tout Israël avec lui» (12:1). Il suffit qu’un seul homme, préposé par l’Éternel pour paître son peuple, se détourne : son exemple sera suivi par tous. Quelle responsabilité pour lui ! Le châtiment ne se fit pas attendre : «Parce qu’ils avaient péché contre l’Éternel, il arriva, en la cinquième année du roi Roboam, que Shishak, roi d’Égypte, monta contre Jérusalem avec 1200 chars et 60000 cavaliers... et il prit les villes fortes qui étaient à Juda, et vint jusqu’à Jérusalem» (12:2-4). Juda ne devint pas la proie de son frère Israël, contre la religion duquel il se défendait légitimement ; il tomba, chute bien plus profonde, entre les mains d’un monde dont autrefois Dieu l’avait racheté à main forte et à bras étendu — et, comme jadis, il fut asservi au roi d’Égypte. Le but de Dieu en le châtiant est proclamé dans la prophétie de Shemahia : «Ils connaîtront ce que c’est que mon service, et le service des royaumes des pays» (v. 8). Ils pouvaient désormais comparer leurs trois ans d’affranchissement et de libre bénédiction, avec la servitude de l’Égypte. Il y eut, à la suite des paroles de Shemahia, le prophète : «Vous m’avez abandonné, et moi je vous ai aussi abandonnés aux mains de Shishak» un vrai travail de conscience dans le coeur du roi et des chefs, car «ils s’humilièrent, et dirent : l’Éternel est juste», et cette humiliation préserva Juda d’une entière destruction. «Quand l’Éternel vit qu’ils s’étaient humiliés, la parole de l’Éternel vint à Shemahia, disant : Ils se sont humiliés, je ne les détruirai pas ; je leur donnerai un peu de délivrance, et ma fureur ne se déversera pas sur Jérusalem par le moyen de Shishak ; mais ils lui seront asservis» (v. 7). C’est la grâce, mais, je le répète, Juda, pour avoir abandonné la parole de Dieu, est obligé d’en subir les conséquences. Tout ce travail de repentance, fruit de la grâce, manque — et pour cause — en 1 Rois 14. Nous verrons le même fait se renouveler constamment au cours de ce livre.
Quelle honte pour Roboam ! Le beau temple de Salomon n’a pas plus de 30 ans d’existence, qu’il est dépouillé de ses ornements et de tous ses trésors. Le culte a perdu sa splendeur passée ; Shishak, nous est-il dit, prit tout. Tout ! et cependant une chose reste encore : l’autel est là, Dieu est là. Pour la foi c’était, au milieu de la désolation et de l’humiliation, beaucoup plus que tout l’or emporté par le roi d’Égypte. N’en est-il pas de même aujourd’hui ? Les chrétiens sont appelés à constater tout ce qui leur manque, par suite de l’infidélité de l’Église ; et doivent ajouter : l’Éternel est juste, mais ils peuvent dire aussi : Dieu est un Dieu de grâce et ne s’est point détourné de nous. Nous trouvons ici une parole bien touchante pour nos coeurs : Quand Roboam «s’humilia, la colère de l’Eternel se détourna de lui, et il ne le détruisit pas entièrement ; et aussi il y avait en Juda de bonnes choses» (v. 12). Peu de choses, peut-être, et c’est bien ce que ce terme nous fait comprendre, mais enfin, quelque chose que Dieu pouvait reconnaître. Le jugement final était suspendu à cause de ces quelques détails favorables qui plaisaient à Dieu. Appliquons-nous, chacun individuellement, à maintenir ces bonnes choses devant ses yeux. Que ceux qui nous entourent aperçoivent quelque dévouement pour Christ, quelque amour pour lui, quelque crainte en présence de sa sainteté, quelque activité pour son service. Soyons certains qu’il en tiendra compte et qu’aussi longtemps que cela subsistera il n’ôtera pas le chandelier de son lieu.
Combien notre Dieu est équitable dans ses jugements, même en présence d’un état dont il dit : «Il fit le mal ; car il n’appliqua pas son coeur à rechercher l’Éternel» (v. 14). Merveilleuse grâce, en effet, que celle qui, ne supportant aucun mal, se plaît à reconnaître le bien, à le discerner quand l’oeil de l’homme est incapable de le voir, soit en lui-même, soit au-dehors. Mettez cela en regard de 1 Rois 14:22-24 : «Juda fit ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel ; et ils le provoquèrent à la jalousie plus que tout ce que leurs pères avaient fait par leurs péchés qu’ils commirent. Et ils bâtirent, eux aussi, pour eux-mêmes, des hauts lieux, et des statues, et des ashères, sur toute haute colline et sous tout arbre vert ; il y avait aussi dans le pays des hommes voués à la prostitution. Ils firent selon toutes les abominations des nations que l’Éternel avait dépossédées devant les fils d’Israël». En lisant ces paroles nous sommes d’autant plus émerveillés de cette infinie bonté de Dieu qui, à cause de quelques justes, ne voulait pas détruire entièrement ce peuple comme il avait jadis anéanti Sodome.
Mentionnons encore un détail avant de terminer ces chapitres. Le grand nombre des femmes et concubines de Roboam est une imitation du péché de Salomon qui entraîna la ruine de son royaume. Il semblerait que le rapport entre la conduite du fils et du père dût être mentionné. Il n’en est rien. En 2 Chroniques, Salomon, nous l’avons dit souvent, est considéré comme étant sans faute et le jugement porte sur Roboam seul. Cependant, même au milieu de ce désordre et quand Roboam élève au premier rang la fille d’Absalom, le révolté, et Abija, le fils de cette femme, Dieu aime à reconnaître que Roboam «agit avec intelligence» en dispersant ses fils par toutes les contrées de Juda pour éviter la discorde dans le royaume (11:18-23). C’est quelque chose comme la louange «de l’économe injuste parce qu’il avait agi prudemment» (Luc 16:8).
Les événements relatés dans ce chapitre sont passés sous silence dans le chap. 15 du premier livre des Rois. Ce dernier se borne à mentionner qu’il y eut guerre entre Roboam et Jéroboam tous les jours de sa vie et qu’il en fut de même entre Abija et Jéroboam. Il ajoute qu’Abija «marcha dans tous les péchés de son père, que celui-ci avait pratiqués avant lui ; et son coeur ne fut pas parfait avec l’Éternel, son Dieu, comme le coeur de David, son père. Toutefois, à cause de David, l’Éternel, son Dieu, lui donna une lampe à Jérusalem, établissant son fils après lui, et faisant subsister Jérusalem ; parce que David avait fait ce qui est droit aux yeux de l’Éternel, et ne s’était détourné de rien de ce qu’il lui avait commandé, tous les jours de sa vie, excepté dans l’affaire d’Urie, le Héthien» (1 Rois 15:3-5). Dans ce dernier passage, c’est à cause de David que Dieu donne un successeur pieux à Abija dans la personne d’Asa, son fils, et aussi à cause de Jérusalem que Dieu avait choisie comme la cité de son Oint. Ici, rien de semblable. Comme toujours, dans cette partie des Chroniques, c’est, en dépit de tout, la grâce qui domine. Tout au plus la conduite d’Abija est-elle caractérisée au v. 21, en ce qu’il imite la marche du roi Salomon, telle que le livre des Rois nous la fait connaître : «Et Abija... prit 14 femmes et engendra 22 fils et 16 filles».
La bataille entre Abija et Jéroboam, omise dans le livre des Rois, nous offre une instruction sérieuse et solennelle quant à la condition morale d’Abija. Jéroboam, le double plus fort qu’Abija, avait 800000 hommes d’élite contre 400000 de Juda. Nous trouvons la même proportion en Luc 14:31 : «Quel est le roi qui, partant pour faire la guerre à un autre roi, ne s’asseye premièrement et ne délibère s’il peut, avec 10000 hommes, résister à celui qui vient contre lui avec 20000 ?» Seulement Abija ne s’assied pas ici pour calculer. Il compte sur sa religion qui est la vraie pour résister à Jéroboam avec sa fausse religion. Son discours sur la montagne de Tsemaraïm, car il avait déjà envahi le territoire des dix tribus, le prouve. L’argument qu’il oppose à Jéroboam (v. 5-12) est composé de cinq points dans lesquels Juda est parfaitement justifié.
1° L’alliance de l’Éternel avec Juda, par David, était à toujours. Les conseils de Dieu au sujet de la royauté ne pouvaient jamais être anéantis. Abija avait raison de revendiquer contre son ennemi les conseils immuables de l’Éternel.
2° Les dix tribus étaient en rébellion ouverte, par leur roi, contre la semence de David, l’Oint de l’Éternel : «Et Jéroboam, fils de Nébath, serviteur de Salomon, fils de David, s’est levé, et s’est révolté contre son seigneur : et des hommes de rien, des fils de Bélial, se sont assemblés vers lui ; et ils se sont fortifiés contre Roboam, fils de Salomon ; et Roboam était jeune et craintif ; et il ne s’est pas montré fort devant eux» (v. 6-7).
3° Bien plus, ils étaient idolâtres et comptaient sur leurs faux dieux pour remporter la victoire : «Et maintenant vous pensez vous montrer forts contre le royaume de l’Éternel, qui est dans la main des fils de David, et vous êtes une grande multitude, et vous avez avec vous les veaux d’or que Jéroboam vous a faits, pour être vos dieux» (v. 8).
4° Et de plus ils avaient complètement abandonné le culte de l’Éternel ; ils avaient chassé les sacrificateurs, et en avaient établi à leur fantaisie, «mais pour nous», ajoute Abija, «l’Éternel est notre Dieu, et nous ne l’avons pas abandonné». Tout cela condamnait Israël et son roi ; tout cela était vrai.
5° Juda, lui, avait à sa tête Dieu, et ses sacrificateurs, et ses trompettes de rassemblement, et de fait, ce que Jéroboam faisait, c’était la guerre à Dieu. De nouveau, tout cela était vrai. Que manquait-il donc à Juda ? Le voici : Juda possédait la vraie religion, mais sans le sentiment de son péché et de sa déchéance. Ce qui lui manquait, c’était une conscience réveillée.
N’en est-il pas ainsi de nos jours ? On peut, par exemple, être protestant, posséder la Parole, avoir la connaissance du vrai Dieu, savoir parfaitement ce qui manque au catholicisme, religion semi-idolâtre, être capable d’en réfuter victorieusement les erreurs, posséder l’ensemble des vérités qui constituent le christianisme — et cependant être très éloigné de Dieu, sans force pour résister aux 20000. C’est qu’on ne s’est pas assis premièrement pour délibérer sur ses propres forces. Tout ce qu’alléguait Abija était insuffisant et ne pouvait lui faire remporter la victoire. Il lui fallait autre chose : une conscience atteinte ; le sentiment de sa propre culpabilité, non pas en se comparant aux autres et à leurs erreurs, mais en ayant affaire pour lui-même avec Dieu.
La suite de ce récit le prouve. Les 800000 hommes de Jéroboam peuvent envelopper entièrement les 400000 d’Abija. La conséquence en est que Juda est perdu ; il aurait dû commencer par là. «Et Juda se tourna, et voici, la bataille était contre eux, devant et derrière ; et ils crièrent à l’Éternel, et les sacrificateurs sonnèrent des trompettes ; et les hommes de Juda jetèrent des cris» (v. 14-15). Ce n’est qu’en partant de ce point : Je suis perdu que les trompettes au son éclatant peuvent sonner contre l’ennemi (v. 12). Au lieu, de se confier en ses trompettes contre ses adversaires il faut crier à l’Éternel pour soi-même, et ce n’est qu’alors que les trompettes peuvent retentir, c’est-à-dire que le témoignage peut être efficace. Le salut ne peut venir que de Lui et non pas des formes les plus orthodoxes de la religion. Il nous faut toujours commencer par notre propre état et non par celui des autres ; nous trouvons alors que la croix est notre seule ressource et, l’ayant trouvée pour nous-mêmes, nous pouvons l’appliquer à tous ceux qui en ont un aussi urgent besoin que nous. «Je t’ai invoqué des lieux profonds, ô Éternel !» dit le Psalmiste. «Seigneur ! écoute ma voix ; que tes oreilles soient attentives à la voix de mes supplications. Ô Jah ! si tu prends garde aux iniquités, Seigneur, qui subsistera ? Mais il y a pardon auprès de toi, afin que tu sois craint…» et seulement alors il s’écrie : «Israël, attends-toi à l’Éternel... Lui rachètera Israël de toutes ses iniquités» (Ps. 130).
S’il en est ainsi pour le témoignage, il en est de même pour le combat. Dès que, nous sentant perdus, nous avons crié à l’Éternel, la victoire est à nous. Juger les autres ne peut nous sauver nous-mêmes ; le secret de la victoire est dans la conviction que le péché nous ôte toute force et nous rend incapables de résister à l’ennemi. Cette victoire n’est pas due à un effort de notre part, puisque nous sommes incapables ; elle ne peut provenir que de Dieu même : «Dieu frappa Jéroboam et tout Israël, devant Abija et Juda. Et les fils d’Israël s’enfuirent devant Juda, et Dieu les livra en leurs mains» (v. 15-16). Dès ce moment les fils de Juda ne s’appuyèrent plus sur leur religion : «Ils furent affermis, car ils s’appuyaient sur l’Éternel, le Dieu de leurs pères» (v. 18). Toute la force de Jéroboam tomba dès lors, «et l’Éternel le frappa, et il mourut» (v. 20).
Le sentiment de leur complète impuissance procure à Abija et à son peuple une chose plus importante même qu’une victoire ; ils recouvrent Béthel, Jeshana et Éphron — mais avant tout Béthel, l’endroit où le Dieu fidèle avait fait des promesses à Jacob. En effet, le moyen d’acquérir les promesses de Dieu, c’est de commencer par se reconnaître perdu et de crier à l’Éternel. Notre infidélité nous a séparés du lieu des promesses, mais si nous nous reconnaissons perdus et crions à Dieu, nous les retrouvons toutes, car Christ nous les a acquises, lui, le oui et l’amen de toutes les promesses de Dieu. Sans Béthel, Juda était comme décapité moralement. De plus, Béthel était le lieu où l’on ne pouvait se présenter devant l’Éternel sans avoir enterré ses faux dieux (Gen. 35:2-4). C’était donc une restauration momentanée de ce pauvre peuple et de son triste roi — restauration bien partielle, car Abija n’en continua pas moins (v. 21) à suivre une voie qui avait entraîné la division du royaume.
Nous abordons le récit de l’heureux règne d’Asa, amené par la pure grâce de Dieu, comme il est dit de lui en 1 Rois 15:4 : «À cause de David, l’Éternel, son Dieu, lui donna une lampe à Jérusalem» dans la personne d’Asa. Tout est bénédiction pour Asa dans la première partie de son règne, et nous allons en voir la cause, mais aussi nous trouverons au chap. 16 la cause de son déclin.
On rencontre beaucoup de piété chez Asa. Il ôte de Juda toute trace d’idolâtrie, jusqu’aux hauts lieux que les rois, ses prédécesseurs, et même Salomon, avaient tolérés, quoiqu’il n’entre pas dans le dessein des Chroniques de mentionner la faute de ce dernier. Nous verrons au chap. 15 qu’Asa ne garda pas jusqu’à la fin cette attitude énergique. Mais il fut, en Juda, le premier roi qui, au début de son règne, jugea les hauts lieux et les abattit, tandis que Jéroboam en avait fait une institution religieuse pour les dix tribus, et y avait même établi une sacrificature spéciale (11:15), à l’encontre du culte de l’Éternel à Jérusalem. Telle est toujours la conséquence de l’abandon du Dieu qui s’est révélé dans sa Parole. L’homme ne peut pas vivre sans religion ; s’il n’a pas celle du vrai Dieu, il en inventera une fausse pour satisfaire sa conscience et répondre à ses instincts. L’athéisme lui-même est une religion qui livre l’homme, pieds et mains liés, à la superstition, c’est-à-dire au culte des démons et à l’anarchie. Quand la volonté de l’homme est devenue son dieu, Satan s’empare de lui et triomphe. Quel trouble, quelle agitation, quelle désespérance, quelle mortelle tristesse s’emparent de l’insensé qui a dit dans son coeur : «Il n’y a pas de Dieu !» Et, par contre, quel repos dans la séparation du mal et dans le culte du Dieu saint, du vrai Dieu ! La Parole insiste ici sur ce point : «De ses jours, le pays fut en repos pendant dix ans» (v. 1). «Le royaume fut tranquille devant lui» (v. 5). «Le pays était tranquille... l’Éternel lui donna du repos» (v. 6). «L’Éternel... nous a donné du repos tout à l’entour» (v. 7).
Quel usage Asa fit-il de ce repos ? Il n’agit pas comme David qui pensait à se reposer lorsque les siens allaient en campagne ; au contraire, il se servit de la tranquillité que Dieu lui accordait, pour se défendre contre l’ennemi du dehors : «Il dit à Juda : Bâtissons ces villes, et entourons-les de murailles et de tours, de portes et de barres, pendant que le pays est devant nous ; car nous avons recherché l’Éternel, notre Dieu : nous l’avons recherché, et il nous a donné du repos tout à l’entour. Et ils bâtirent et prospérèrent» (v. 6-7).
Quel enseignement l’attitude d’Asa nous donne ! Quand Dieu nous accorde du repos, c’est afin que nous puissions déployer toute notre activité pour nous prémunir contre les attaques de l’ennemi. Ce dernier ne tardera pas à revenir. Nos moyens de défense et nos forteresses sont la Parole et rien que la Parole. Utilisons les temps où nous ne sommes pas assaillis par la tourmente pour nous fonder sur la Parole et y puiser notre force de résistance. Cependant les villes fortifiées dont l’entrée est interdite à l’ennemi ne suffisent pas ; Asa possède une armée aguerrie. «Et Asa avait une armée de 300000 hommes de Juda, portant le bouclier et la pique, et de 280000 de Benjamin, portant l’écu et tirant de l’arc, tous des hommes forts et vaillants» (v. 8). Pour ne pas subir une défaite dans le combat, il faut porter les armes de la main droite et de la main gauche, et savoir avant tout se servir de l’épée à deux tranchants qui est la parole de Dieu. Ce n’est qu’à cette condition que nous pouvons, après avoir tout surmonté demeurer fermes quand le combat se présente.
L’attaque de Zérakh, l’Éthiopien, passée sous silence dans le premier livre des Rois, se produit alors. Que va faire Asa ? Il est dans le même cas que son père vis-à-vis de Jéroboam (13) ; avec 580000 hommes il lui faut combattre Zérakh qui en a un million sous ses ordres. Mais au lieu de se fier comme Abija aux mérites de sa religion pour gagner la bataille, Asa s’est assis d’avance et a délibéré s’il peut avec 10000 hommes résister à celui qui vient contre lui avec 20000. Le résultat de sa délibération ne lui laisse aucun doute ; il sort au-devant de l’ennemi. Quelle est donc la source de son assurance ? Son bon droit ? Sa religion, lui donnant la certitude, comme à son père Abija, que Dieu doit être avec lui ? Ce n’est point là qu’est le secret d’Asa. Asa est un homme de foi, ayant appris avec Dieu qu’il ne peut avoir aucune confiance dans la chair, mais qu’en dehors de lui existe une source de force à laquelle il peut immanquablement recourir. Sa relation quotidienne avec le temple de Dieu à Jérusalem la lui avait fait connaître ; il avait sous les yeux, à l’entrée du sanctuaire, cette colonne de Boaz qui signifiait : «En Lui est la force !» Aussi avec quelle assurance, au moment d’en venir aux mains, il s’adresse à l’Éternel ! «Éternel ! il n’y a pas de différence pour toi, pour aider, entre beaucoup de force et point de force. Aide-nous, Éternel, notre Dieu ! car nous nous appuyons sur toi ; et c’est en ton nom que nous sommes venus contre cette multitude. Tu es l’Éternel, notre Dieu ; que l’homme n’ait point de force contre Toi !» (v. 11) C’est dans cet esprit qu’Asa entreprend la lutte ; il reconnaît beaucoup de force à l’ennemi, à lui-même aucune, mais il s’avance au nom de l’Éternel s’appuyant sur lui, nullement inquiet de sa propre faiblesse, parce que la puissance de Dieu s’y développe. Tout ce passage est la leçon de notre force ; le plus puissant ennemi n’a aucune force contre Dieu, et il suffit de la foi pour en faire l’expérience. Satan lui-même a dû le reconnaître quand sa haine s’est attaquée à Christ : sur la croix où il croyait s’être enfin débarrassé de lui il a trouvé la puissance de Dieu dans la faiblesse de Dieu.
Les Éthiopiens s’enfuirent ; «ils ne purent reprendre leur force». C’est qu’Israël était, non pas l’armée d’Asa, mais l’armée de Dieu : «Ils furent abattus devant l’Éternel et devant son armée» (v. 13). Cette victoire d’Asa ne fut pas seulement la défaite de l’ennemi, mais une conquête positive de villes, de butin, de troupeaux, de richesses (v. 14-15). C’est ainsi que toute victoire sur l’Ennemi, basée sur le jugement de nous-mêmes, est pour nous la source d’acquisitions nouvelles et précieuses, puisées dans le trésor des richesses insondables de Christ.
Après la victoire, Asa et son peuple «retournèrent à Jérusalem». Là, dans la cité de Dieu, auprès du temple de l’Éternel, dans la communion avec Lui, ils vont renouveler leur force.
L’histoire profane ne nous dit rien de ce combat mémorable. Zérakh et son million d’hommes est une fable aux yeux des incrédules. Les monuments, nous disent-ils, ne mentionnent pas ce combat extraordinaire. Pour le croyant, ce silence est bien simple. Asa ne peut proclamer sa propre victoire sur l’Éthiopien ; c’est à Dieu, dont elle est la victoire, à l’enregistrer ; on ne peut donc trouver ce document que dans la Parole écrite. Et pensez-vous que Zérahk proclamera sa défaite ? Avez-vous jamais trouvé une inscription d’Égypte, de Syrie, de Moab ou de l’Assyrie où leurs rois enregistrent une défaite ? De ce côté-là, silence absolu. Le roi de Moab proclamera plus tard ses victoires (pierre de Moab), mais non la défaite qui les a précédées. Telle est la confiance qu’on peut mettre en l’authenticité de l’histoire écrite par l’homme.
À cette période de l’histoire d’Asa, Azaria, fils d’Oded, le prophète, vient encourager et exhorter le roi. Les prophètes de Juda, comparés à ceux d’Israël, se distinguent par leur grand nombre. Même Osée et Amos, prophètes d’Israël, ont une mission spéciale pour Juda. Il est vrai qu’Élie et Élisée, ces grands prophètes, furent envoyés exclusivement à Israël, mais leur ministère fut très particulier. Quand pullulaient déjà les prophètes de Baal et les faux prophètes, ils faisaient des miracles au milieu d’un peuple apostat, tombé dans l’idolâtrie. Leurs miracles étaient donnés pour les incrédules et non pour ceux qui rendaient hommage au vrai Dieu. C’est à peine, nous l’avons remarqué d’autre part, si l’on voit un prophète de Juda faire un miracle comme, par exemple, celui du cadran d’Achaz. Les premiers prophètes de Juda parlent ; leurs successeurs écrivent leurs prophéties. Sous Roboam, le prophète Shemahia, sous Abija le prophète Iddo, sous Asa d’autres prophètes, n’écrivent pas encore ; ce n’est que depuis le règne d’Ozias que paraissent les grands et les petits prophètes avec leurs écrits. En Israël, Élie est un prophète de jugement, Élisée apporte la grâce au milieu de la scène jugée ; les prophètes de Juda annoncent les jugements, mais exhortent les rois et le peuple à la repentance pour trouver miséricorde, car ils insistent sur la grâce. Ce n’est que dans leur prophétie écrite qu’ils prédisent un jour futur où les conseils de Dieu s’accompliront à l’égard de la royauté ; la prophétie orale ne va pas si loin et annonce des événements prochains, tandis que la prophétie écrite a une autre portée : «Aucune prophétie de l’Écriture n’est d’une interprétation particulière».
Ici, la prophétie d’Azaria ou plutôt d’Oded, son père, dont il est le porte-parole (v. 8), a le caractère de toute prophétie parlée. Elle s’adresse d’abord au roi, puis aux deux tribus restées fidèles, Juda et Benjamin. Azaria présente les conditions de l’alliance légale : «L’Éternel est avec vous quand vous êtes avec lui ; et si vous le cherchez vous le trouverez, et si vous l’abandonnez il vous abandonnera» (v. 2). Il était nécessaire que des deux côtés cette alliance fut observée ; du côté de l’Éternel elle l’est toujours, car il est fidèle, tandis qu’Israël, s’il était infidèle, tombait nécessairement sous le jugement d’un Dieu qui devait l’abandonner. Azaria rappelle ensuite les jours d’autrefois où le peuple tout entier avait été infidèle ; faisant particulièrement allusion à la période des Juges, où, par la désobéissance d’Israël, avait régné le plus complet désordre : «Pendant bien des jours il n’y eut pour Israël ni vrai Dieu, ni sacrificateur pour enseigner, ni loi ; et, dans leur angoisse, ils se retournèrent vers l’Éternel, le Dieu d’Israël, et le cherchèrent, et ils l’ont trouvé... En ces temps-là, il n’y avait point de paix pour ceux qui sortaient et qui entraient, car il y avait beaucoup de troubles parmi tous les habitants du pays, et nation se brisait contre nation, et ville contre ville, car Dieu les troublait par toutes sortes d’angoisses» (v. 3-6). Dieu, la sacrificature, la loi, avaient disparu, pour ainsi dire ; chacun était loi à lui-même. C’était le règne de l’iniquité. Alors le peuple, dans son angoisse, avait crié à l’Éternel et s’était retourné vers lui, combien de fois ! Et chaque fois ils avaient trouvé Dieu comme un Libérateur. Il n’y a «point de paix» dans l’abandon de Dieu, point de repos, ni de paix pour les méchants, dit Ésaïe, mais trouble sur trouble ; au contraire, du moment que le roi revient, comme avait fait Asa, il y a paix et repos (cf. 14:1).
Azaria ne parle pas des dix tribus ; Juda et Benjamin sont considérés par lui comme le peuple de Dieu ; Israël est déjà définitivement abandonné comme témoin de l’Éternel, quoique des siècles doivent encore s’écouler avant son rejet final.
Après l’exhortation nous trouvons l’encouragement : «Vous donc, fortifiez-vous, et que vos mains ne soient point lâches ; car il y a une récompense pour ce que vous ferez» (v. 7). N’avons-nous pas, nous aussi, quoique étant sous le régime de la grâce, à prendre garde à cette exhortation ? Selon le gouvernement de Dieu, caché maintenant, mais qui ne subsiste pas moins dans toute sa réalité, il y a une récompense actuelle, et non pas seulement future, de nos actes. Cette récompense est la paix, le repos, la force. C’est ce qu’avait éprouvé Asa, mais la suite de son histoire nous montrera combien il avait besoin — et nous tous avec lui — d’être exhorté.
Aussitôt qu’Asa eut entendu les paroles de la prophétie «il se fortifia». Nous trouvons ici un nouveau caractère de la force, qui ne consiste pas, comme précédemment, dans la victoire sur les Éthiopiens, mais dans la purification pratique. Asa «fit disparaître les choses abominables de tout le pays de Juda et de Benjamin, et des villes qu’il avait prises de la montagne d’Éphraïm» (v. 8). Il en est de même pour nous : Tout ce qui est abominable aux yeux de Dieu, toute souillure, doivent être résolument bannis de nos vies, afin que nous puissions jouir d’une communion sans mélange avec lui. Cela ne peut avoir lieu que par la force, l’énergie de la foi, cette énergie appelée «vertu» par l’apôtre Pierre. La vie chrétienne ne comporte pas le laisser-aller. «Fortifiez-vous», nous dit le prophète. Nous avons à notre disposition la force, la puissance de l’Esprit de Dieu, basée sur Sa parole. Rien ne nous manque ; mettons donc notre force à profit.
Asa ne se borne pas à purifier, comme il l’avait fait précédemment (14:3-5), les villes de Juda, il fait aussi disparaître les choses abominables «des villes qu’il avait prises de la montagne d’Éphraïm». À la suite de la victoire du roi, Dieu avait étendu sa spère d’action (14:14), et il était maintenant responsable d’y faire adopter les mêmes principes de sainteté que sur le territoire de Juda. Mais cela ne suffisait pas : Asa «renouvela l’autel de l’Éternel» (v. 8). Je ne doute pas qu’il ne s’agisse ici, comme en plusieurs autres passages, du renouvellement des sacrifices réguliers offerts selon la loi, sur l’autel. Cet autel, érigé par Salomon, était alors en son entier et n’avait pas besoin d’être renouvelé, comme lorsque l’impie Achaz lui en substitua un autre (2 Rois 16). En un mot, le culte de l’Éternel, selon les prescriptions de la Parole, ce culte, déjà négligé sous les règnes précédents, était rétabli selon les pensées de Dieu. Partout où nous trouvons une vraie et énergique séparation des souillures du monde, le culte des enfants de Dieu ne tarde pas à revenir en honneur.
Un autre résultat de la fidélité d’Asa fut le rassemblement d’Israël : «Il assembla tout Juda et Benjamin, et les étrangers qui étaient avec eux, d’Éphraïm, et de Manassé, et de Siméon ; car beaucoup d’Israélites passèrent à lui quand ils virent que l’Éternel, son Dieu, était avec lui» (v. 9). Le culte étant rétabli, l’unité d’Israël est réalisée dans la faible mesure qui peut appartenir à un temps de division et de ruine ; la vue de la faveur manifeste de Dieu envers son peuple fidèle, agit sur la conscience de ceux qui faisaient partie, jusque-là, des dix tribus et se trouvaient, par leur origine, associés à l’idolâtrie de Jéroboam.
«Et ils se rassemblèrent à Jérusalem, le troisième mois de la quinzième année du règne d’Asa ; et ils sacrifièrent à l’Éternel, en ce jour-là, du butin qu’ils avaient amené, sept cents boeufs et sept mille moutons» (v. 10-11). Les résultats de la victoire sont consacrés ici à l’Éternel et il devrait toujours en être ainsi. Si nos succès nous conduisent à nous reposer sur nous-mêmes, à être satisfaits de nous, à augmenter notre bien-être, la victoire sera un piège et nous détournera de Dieu au lieu de nous rapprocher de lui.
Le renouvellement de l’alliance, suite du réveil provoqué par la parole prophétique, est accompagné d’une grande joie, car «ils avaient recherché l’Éternel de toute leur âme, et ils l’avaient trouvé» (v. 15). Chaque renouvellement de l’alliance accompagne un vrai travail de conscience chez le peuple. Il l’avait rompue, le reconnaît et s’en humilie : il y revient et la bénédiction se fait immédiatement sentir. Il en fut de même sous Ézéchias, Joas, Esdras, Néhémie — alliance, faut-il ajouter, chaque fois violée de nouveau, car l’homme qui ne se connaît pas encore, doit apprendre ce qu’il est, sur le pied de sa responsabilité. Quoiqu’il en soit, la joie est la conséquence de toute restauration, même partielle et temporaire. «Ils avaient trouvé l’Éternel» et jamais, aux temps les plus sombres de l’histoire de l’homme, il ne s’est caché à ceux qui le cherchaient. Trouver l’Éternel ! quel trésor, et comment ne pas se réjouir ! Quel repos quand on l’a trouvé ! «L’Éternel leur donna du repos tout à l’entour». Au chapitre précédent nous avons vu la force qui suit le repos, dans notre chapitre le repos qui suit la force, et c’est ainsi que, dans une vie fidèle, la force et le repos se renouvellent continuellement l’un par l’autre.
Asa ne se borne pas à repousser publiquement le mal ; il purifie sa propre maison. Ces deux choses doivent s’accomplir ensemble, sinon notre vie chrétienne ne serait qu’une vaine apparence. «Même à Maaca, sa mère, le roi Asa ôta sa position de reine, parce qu’elle avait fait un simulacre pour ashère ; et Asa abattit son simulacre, et le broya, et le brûla dans la vallée du Cédron» (v. 16). En réalité, Maaca était grand’mère d’Asa, probablement appelée à la régence avec le titre de reine lors de la mort d’Abija. Avec quelle énergie Asa passe sans en tenir compte, par-dessus les liens naturels, quand il s’agit de l’honneur de son Dieu ! Rien ne l’arrête ; il ôte à Maaca tout espoir d’exercer une influence quelconque sur le peuple de Dieu et la traite aux yeux de tous comme une ennemie de l’Éternel. Puissions-nous l’imiter ! Nous n’avons que trop de disposition à traiter Satan avec ménagement quand il s’agit du péché dans nos propres familles, et cela nous oblige souvent à user des mêmes procédés quand il s’agit de la famille de Dieu. On excuse le mal tout en le blâmant ; on cherche à ne pas l’ébruiter pour ne pas, comme on pense, produire du scandale ; on supporte des doctrines contraires à la parole de Dieu et à l’honneur de Christ, pour ne pas froisser ceux qui les mettent en circulation et peut-être nous tiennent de près, et ainsi le mal s’étend et souille beaucoup de gens. Si le peuple avait vu Asa tolérer l’idolâtrie dans sa propre maison, tout en la condamnant partout ailleurs, n’aurait-il pas été entraîné à suivre son exemple, et, tout au moins, à ne pas y regarder de trop près ?
Toutes ces décisions furent à la louange d’Asa, cependant il manqua dans un seul détail, insignifiant en apparence. La Parole nous dit (14:5) qu’il «ôta de toutes les villes de Juda les hauts lieux», mais nous apprenons, au v. 17, qu’ils «ne furent pas ôtés d’Israël», c’est-à-dire comme je le pense, des villes d’Israël qu’il avait conquises (v. 8). Cela semblait avoir peu de conséquence, car il avait fait disparaître de ces mêmes villes toutes les choses abominables. Mais, quand il s’agit de la séparation du mal, rien n’est indifférent. Sans doute, Asa nous est dépeint comme ayant eu «un coeur parfait tous ses jours» (v. 17), un coeur intelligent quant à ce qui convenait à la sainteté de l’Éternel, mais sans le réaliser pleinement en pratique. Cette tolérance des hauts lieux était un grain de sable, comparée à l’ensemble de son activité, mais un grain de sable peut arrêter la machine la mieux construite, une paille dans une poutre de fer produira la rupture du pont le plus solide ; et toute la sécurité de Juda était établie sur la fidélité scrupuleuse d’Asa à son Dieu. C’est depuis ce moment, qu’après dix ans de repos et de prospérité, nous constatons le déclin chez cet homme de Dieu. Jusqu’ici la conduite fidèle d’Asa avait été l’aimant pour attirer à l’Éternel, non seulement Juda, mais Israël dans une certaine mesure, alors que, sans cette conduite, les voies relâchées d’Éphraïm auraient apporté un élément corrupteur au milieu des deux tribus. Dans son zèle, Asa n’avait pas été un homme aimable selon la chair ; son attitude vis-à-vis de sa grand-mère le prouve, car il aurait pu se borner à supprimer son idole, sans proclamer publiquement sa déchéance. Chose honorable à l’actif d’Asa ; il savait que l’amabilité mondaine ne gagne jamais les coeurs à Dieu et ne sourit qu’aux coeurs charnels. L’amour est tout autre chose que l’amabilité ; il vient de Dieu et rayonne de Lui, sur tous les hommes, en passant par le coeur de celui qui l’aime. L’amabilité est un caractère agréable du coeur naturel, qui n’a pas une source divine et ne produit jamais rien pour Dieu.
Ce que nous avons vu jusqu’ici était l’effet de la grâce dans le coeur du roi. Dieu l’avait préparé dès longtemps pour qu’il fût un instrument béni, une lampe à Jérusalem, à cause de David. Le chapitre suivant nous montrera comment cette lampe perdit sa clarté.
Jusqu’ici, nous l’avons vu, le coeur d’Asa avait été «parfait» dans deux directions. En présence de l’ennemi il avait reconnu n’avoir aucune force et s’était appuyé sur l’Éternel, pour la chercher en Lui. En présence de l’idolâtrie il avait fait preuve d’une vraie énergie pour purifier le pays et rétablir partout le culte de l’Éternel. Sur un seul point, obéissant sans doute à quelque pensée politique, il avait un peu ménagé les villes conquises sur Israël et peut-être aussi les Israélites qui s’étaient joints à Juda : il n’avait pas «ôté d’Israël les hauts lieux». Ces ménagements n’ont jamais pour le chrétien les résultats qu’il en attendait.
Notre chapitre mentionne immédiatement les mesures prises par Baësha contre Juda, la 36° année du règne d’Asa (*). Baësha, privé de plusieurs de ses villes, bâtit Rama pour prévenir dorénavant tout contact, «afin de ne permettre à personne de sortir de chez Asa, roi de Juda, ou d’entrer vers lui» (v. 1). Ne pouvant attaquer Asa sans danger, il veut empêcher dorénavant que ses sujets ne le quittent pour se joindre au témoignage de Dieu, et qu’Asa ne fasse parmi son peuple ce qu’il considère comme une oeuvre de propagande dirigée contre lui et son influence. Ce principe se renouvelle en tout temps : ceux qui, comme Baësha, ont encore une profession de vraie religion, quoique mélangée d’erreurs mortelles, ne peuvent supporter près d’eux un témoignage qui attire les âmes. Asa offrait, hélas ! par une certaine tolérance du mal une occasion à cette hostilité. Baësha ne pouvait-il pas penser : Asa se dit plus près de Dieu que nous et fait cependant les mêmes choses quand elles favorisent ses vues ambitieuses ! Asa a peur de Baësha ; depuis qu’il s’est relâché en un point, il ne peut plus estimer le monde comme un système avec lequel il ne peut faire aucun compromis, auquel il ne peut demander aucune aide. Il se rend bien compte de son manque de force, comme lors de l’attaque de l’Éthiopien, mais il n’a plus la même assurance que toute sa force est en Dieu. Le grain de poussière dans les rouages avait fait son oeuvre et, quelque insignifiant qu’il fût en apparence, il affaiblissait chez Asa la confiance en l’Éternel seul, comme source de sa force. Il se tourne vers le roi de Syrie ; il appelle à son secours une puissance alliée d’Éphraïm et, par conséquent, son ennemie à lui. C’est de la diplomatie et, au point de vue humain sans doute, une bonne politique, comme le maintien des hauts lieux. Cela s’est fait de tout temps ; on cherche à rompre une alliance et à mettre de son côté l’un des adversaires. Quand la foi s’est affaiblie, s’appuyer sur l’homme paraît plus facile que de se confier simplement en Celui qui est notre colonne de Boaz. Quelle folie ! surtout pour celui qui avait fait une fois l’expérience de cette force miraculeuse !
(*) Cette date pourrait être une simple faute de copiste.
L’infidélité d’Asa semble porter tout d’abord des fruits excellents. Ben Hadad accepte, comme tribut, l’argent et l’or tirés de la maison de l’Éternel, rompt son alliance avec Baësha et en profite pour saccager les villes d’Éphraïm et s’emparer des entrepôts de Nephthali. Baësha abandonne les travaux de Rama ; Asa et son peuple en emportent les pierres pour en bâtir des forteresses contre Israël. Le roi semble avoir échappé à un grand malheur en suivant ce chemin, mais tout le bénéfice d’une marche de foi est perdu pour lui, et il va en faire la triste expérience. Ah ! qu’il était plus heureux quand il se sentait sans force et résistait cependant à l’innombrable armée de Zérakh !
Alors Hanani, le prophète, est envoyé à Asa (v. 7-10). Plus tard Jéhu, fils de ce même Hanani, sera envoyé à Baësha, pour lui annoncer un jugement sans miséricorde (1 Rois 16:1-4). Ici Hanani annonce aussi le jugement mais, menant deuil et plein d’une pitié profonde, il est obligé de reconnaître que le coeur d’Asa n’est plus parfait devant Dieu. Il fallait que le jugement commençât par la maison de Dieu, et par son peuple, car c’est avant tout envers ceux qui le servent, qu’Il se montre un Dieu saint.
L’accusation principale, portée par Hanani, est qu’Asa ne s’est pas appuyé sur l’Éternel : «Parce que tu t’es appuyé sur le roi de Syrie, et que tu ne t’es pas appuyé sur l’Éternel, ton Dieu, à cause de cela, l’armée du roi de Syrie est échappée de ta main. Les Éthiopiens et les Libyens n’étaient-ils pas une armée nombreuse, avec des chars et des cavaliers en très grand nombre ? Et quand tu t’appuyais sur l’Éternel, il les livra entre tes mains. Car les yeux de l’Éternel parcourent toute la terre, afin qu’il se montre fort, en faveur de ceux qui sont d’un coeur parfait envers lui» (v. 7-9).
Asa avait agi follement en cela ; «désormais», ajoute le prophète, «tu auras des guerres». Il avait perdu sa force ; maintenant il perd son repos, les deux grandes bénédictions du début de son règne. Mais au lieu de s’humilier devant la parole de Dieu envoyée par le prophète, Asa s’irrite et emprisonne Hanani. Hélas ! Avec lui, il emprisonne sa conscience. Le coeur du roi n’était plus parfait ; il l’avait été quant aux idoles, mais pas quant au monde. On ne peut espérer la bénédiction quand, même en maintenant l’un des grands principes de la sainteté chrétienne, on abandonne l’autre. La joie, la paix, la force sont perdues. Et bien plus encore ; en cherchant le secours et l’amitié du monde, Asa devient ennemi de la parole de Dieu, dans la personne de celui qui en est le porteur. Il descend plus bas encore : «Asa opprima quelques-uns du peuple», ceux sans doute qui restaient attachés au prophète et déploraient les voies de ce roi, jusqu’alors si fidèle à l’Éternel. Ah ! qu’il est vrai que la pente est rapidement descendue, quand le coeur n’est plus parfait devant Dieu !
Mais Dieu n’a pas encore tout dit. Asa, précisément parce qu’il lui est cher, devient personnellement l’objet de sa discipline. La trente-neuvième année de son règne il fut, pendant deux ans, «malade des pieds, jusqu’à ce que son mal fût extrêmement grand». Chose triste à dire, la discipline ne porta pas ses fruits ! Ayant perdu la communion avec Dieu, ayant rejeté sa parole, irrité contre le prophète et ceux qui lui sont fidèles, il tombe dans l’endurcissement moral : «Dans sa maladie aussi, il ne rechercha pas l’Éternel, mais les médecins». Ce qui lui était infligé pour rapprocher son coeur de Dieu, lui sert de prétexte pour s’en éloigner encore davantage. Quand il s’agit de son propre salut il donne sa confiance à des instruments terrestres et faillibles. La grâce de Dieu ne parle plus à son coeur ; la repentance, ni l’humiliation, ces fruits de la grâce, n’y trouvent plus place. Quelle triste fin, plus commune qu’on ne le pense, pour un croyant, jadis si fidèle !
«On l’enterra dans son sépulcre, qu’il s’était creusé dans la ville de David ; et on le coucha dans un lit qu’on remplit d’aromates et d’un mélange d’épices composé selon l’art du parfumeur ; et on en brûla pour lui en très grande abondance» (v. 14). Dans sa mort, quoiqu’on y prodigue l’encens, il n’y a rien qui soit en bonne odeur à Dieu. Les aromates servent à couvrir ou à retarder la putréfaction d’un cadavre et l’encens du monde ne peut remplacer la faveur de Dieu. N’en est-il pas souvent ainsi des chrétiens qui ont recherché les faveurs des hommes ? Ceux-ci les louent après leur mort en proportion de la confiance qu’ils ont mise en eux et refusée à Dieu. Les panégyriques qui ne se seraient jamais élevés autour du cercueil d’un fidèle, abondent en raison de l’infidélité mêlée de sa carrière. Un pareil encens n’est que le témoignage rendu aux faiblesses du croyant ; et si le monde les apprécie, parce qu’elles le disculpent à ses propres yeux, Dieu rejette tout son encens comme une mauvaise odeur devant Lui !
Le règne de Josaphat offre bien des particularités instructives. D’abord, comme ses prédécesseurs, il «se fortifie contre Israël». Le vrai moyen d’être en paix avec l’adversaire est d’organiser la résistance contre lui d’une manière efficace. Dès lors Satan nous laisse en repos, mais nous ne devons jamais le traiter autrement que comme adversaire. La suite de l’histoire de Josaphat nous apprend qu’il ne garda pas toujours cette attitude, et cela à son grand dommage. Être en paix avec le roi d’Israël, tout en se défendant de lui, est tout autre chose que rechercher son alliance, comme Josaphat le fit plus tard à sa confusion. Au début de son règne tout est conforme aux pensées de Dieu : «Et l’Éternel fut avec Josaphat, car il marcha dans les premières voies de David, son père, et ne rechercha point les Baals, mais il rechercha le Dieu de son père, et marcha dans ses commandements, et non comme faisait Israël. Et l’Éternel affermit le royaume dans sa main ; et tout Juda fit des présents à Josaphat, et il eut beaucoup de richesses et de gloire. Et il prit courage dans les voies de l’Éternel, et de plus, il ôta de Juda les hauts lieux et les ashères» (v. 3-6).
Le premier livre des Rois (22:44) semble nous dire le contraire : «Seulement, les hauts lieux ne furent pas ôtés ; le peuple sacrifiait encore et faisait fumer de l’encens sur les hauts lieux». Ce passage, en apparence contradictoire, semble confirmé par notre livre même, qui dit : «Seulement, les hauts lieux ne furent pas ôtés, et le peuple n’avait pas encore disposé son coeur à rechercher le Dieu de ses pères» (20:33). Cela prouve seulement qu’au début de son règne Josaphat entreprit cette abolition et la maintint personnellement, mais que le peuple, dont la conscience n’était pas atteinte, retomba bien vite dans ces pratiques idolâtres, contre lesquelles Josaphat, affaibli par son alliance avec le roi d’Israël, ne sut pas réagir en faisant valoir son autorité pour conduire le peuple dans la voie du bien. Il en avait été de même pour Asa : Nous avons vu, au chap. 14:5, qu’il «ôta de toutes les villes de Juda les hauts lieux et les colonnes consacrées au soleil», puis, chap. 15:17, que «les hauts lieux ne furent pas ôtés d’Israël». D’autre part encore, qu’il «fit disparaître les choses abominables de tout le pays de Juda et de Benjamin, et des villes qu’il avait prises de la montagne d’Éphraïm» (15:8), puis, au premier livre des Rois (22:47) qu’il était resté dans les jours d’Asa des hommes voués à la prostitution et que Josaphat «les extermina du pays». Tout cela s’explique aisément, et souvenons-nous que Dieu ne se contredit jamais. Sous le règne de ces rois, la purification n’était que partielle et temporaire ; partout le mal renaissait, la conscience du peuple n’ayant jamais été réellement atteinte.
Mais ces v. 3 à 6 nous apprennent encore une autre vérité, en accord avec le caractère des Chroniques. Ce livre qui met la grâce en avant comme seul moyen de maintenir la descendance royale, lors de la pleine décadence de la royauté, fait toujours ressortir le bien que la grâce a produit, ne fût-ce que pour un moment, et montre qu’elle couvre une multitude de péchés. Il en est autrement quand il s’agit de la responsabilité, comme dans le livre des Rois. Dieu dévoile alors le mal dans toute son étendue et nous montre pourquoi l’exécution du jugement était nécessaire.
Ici donc, la fidélité de Josaphat est spécialement notée et Dieu la fait ressortir, non seulement pour exalter sa propre grâce, mais pour nous montrer les conséquences de la fidélité et du retour à Dieu. La force et le repos en avaient été la suite au commencement du règne d’Asa ; l’affermissement du royaume, la paix, les richesses et la gloire, furent les conséquences de la fidélité de Josaphat (v. 5).
Mais Josaphat ne se borne pas à se séparer du mal ; il a à coeur d’établir le bien, et celui-ci ne peut l’être que par la connaissance des pensées de Dieu. Il fallait que la loi, la parole de Dieu, fût enseignée en tout lieu et que le peuple se familiarisât avec elle. Chefs, lévites, sacrificateurs, s’y emploient partout avec un grand zèle (v. 7-9). Israël, avec sa religion mixte, ne semble pas avoir été gagné par la connaissance de la loi qu’il voit en Juda, et, de fait, la même chose a lieu dans tous les temps. Il est plus difficile de convaincre de la vérité ceux qui, au milieu de l’erreur, en ont conservé quelques restes, parce que cette connaissance, toute mélangée qu’elle soit, maintient chez eux l’illusion qu’ils possèdent la vérité. Les nations, au contraire, qui n’avaient ni lien, ni relation avec le peuple de Dieu, sont convaincues par la puissance que la Parole possède, et s’y soumettent. Elles reconnaissent le peuple de Dieu ; il y eut même des Philistins qui s’empressèrent de se déclarer tributaires du roi de Juda (v. 10-11). De même, quand les Corinthiens prophétisaient, on voyait les incrédules tomber sur leurs faces et reconnaître que Dieu était réellement au milieu de l’assemblée (1 Cor. 14:25). La fidélité à la parole de Dieu amena l’affermissement du royaume de Josaphat. Outre toute sa prospérité, il possédait une armée immense comparée à celle d’Asa, son père. L’un des chefs, Amasia, «s’était volontairement donné à l’Éternel» (v. 16), et Dieu lui en rend témoignage. Il était sans doute un des fruits de l’enseignement de la loi en Juda. Le besoin de se vouer au Seigneur naît dans le coeur quand on a goûté combien il est bon, et la révélation de cette bonté nous est donnée dans la Parole (1 Pierre 2:2-3). Alors on en reconnaît l’autorité et l’on sait qu’Il a le droit d’attendre l’entière consécration de nos coeurs.
Nous avons peu de chose à dire sur ce chapitre, qui est la reproduction exacte de 1 Rois 22 déjà médité autre part.
La prospérité de Josaphat lui est en piège ; car la possession des biens terrestres, même donnés de Dieu, oriente facilement nos coeurs naturels vers le monde et ses alliances. Alors, quand notre conscience nous reprend au sujet de cette infidélité, nous cherchons à la tranquilliser par la pensée qu’en somme ce monde, comme autrefois les dix tribus, n’a pas renié les formes religieuses qu’il avait à l’origine. C’est ainsi que Josaphat s’allie, par mariage, avec Achab, ce mauvais roi d’Israël ; non pas, sans doute, qu’il contracte lui-même cette union, mais il la laisse et peut-être la fait contracter à son fils Joram (21:6). De telles alliances troublent profondément notre vue spirituelle : nous commençons par excuser ceux qui, de fait, sont les ennemis de Dieu et de son peuple, puis nous agissons de concert avec eux ! Josaphat subit les conséquences de son infidélité ; son déguisement le fait prendre par les archers pour le roi d’Israël ; ils s’acharnent après lui ; Josaphat crie ; nous voyons ici à qui, détail omis dans les Rois ; «Josaphat cria, et l’Éternel le secourut ; et Dieu les porta à s’éloigner de lui» (v. 31). Ce détail caractérise les Chroniques. Josaphat crie à l’Éternel, comme jadis Abija (13:14-15), car il se rend compte que Dieu est sa seule ressource. En ce moment tout, absolument tout : les alliances, les motifs politiques et la diplomatie, les intérêts auxquels on a sacrifié ce qu’on avait de plus précieux, c’est-à-dire la, communion avec son Dieu — tout cela perd sa valeur et s’effondre devant la perspective de la mort. L’âme retrouve l’Éternel, qu’elle n’aurait jamais dû oublier pour obtenir un avantage mondain. Les «lieux profonds» engloutissent Josaphat ; il crie à son Dieu. Ah ! s’il regardait aux iniquités, ne devrait-il pas le livrer à la mort ? Alors l’Éternel, le Dieu toujours fidèle qui ne peut se renier lui-même, écoute le cri de son serviteur. Il arrête l’élan impétueux des ennemis ; il change, sans qu’ils s’en doutent, la direction de leurs pensées, et cela, au moment même où les vêtements royaux, portés par Josaphat, attiraient tous les regards sur lui.
Que doit-on penser de l’égoïsme d’Achab exposant son allié à tous les dangers pour se préserver lui-même ? Si nous recherchons l’amitié du monde, nous ne récolterons jamais autre chose chez lui que l’égoïsme, car il ne peut avoir que son «moi» pour centre de ses pensées. Jamais il ne nous donnera ce qui est contraire à ses propres intérêts. Comment Josaphat avait-il été assez insensé pour chercher autre chose que ce que Dieu lui avait donné gratuitement, la paix, la richesse et la gloire ? Ces dons ne lui suffisaient-ils pas ? Pauvre coeur charnel du croyant, conduit par des chimères à sa ruine, quand, en présence des bénédictions divines il aurait dû s’écrier : «Je ne manque de rien !» Et cependant, comme toujours dans les Chroniques, la grâce triomphe en se servant de l’infidélité même de Josaphat. Il lui faut avoir été dans cette extrémité pour apprendre à connaître l’amour et la délivrance, et les infinies ressources de son Dieu. Achab, caché aux yeux des hommes sous ses vêtements d’emprunt, n’échappe pas aux yeux de Dieu et à son jugement. Un archer tirant à l’aventure l’atteint. C’était le hasard pour le monde, mais le hasard, c’était Dieu !
Les scènes décrites dans les chap. 19 et 20 manquent complètement dans le livre des Rois, qui reprend son récit au v. 35 à 37 du chap. 20 (1 Rois 22:49-50). Il est en outre important de remarquer que les Chroniques omettent la seconde grande infidélité de Josaphat quand, après avoir fait alliance avec Achab contre le roi de Syrie, il retombe dans le même péché en s’alliant avec Joram, fils d’Achab, contre Moab (2 Rois 3). Ainsi, selon l’habitude des Chroniques, Dieu omet autant que possible les péchés des rois de Juda stigmatisés dans le livre des Rois.
Les mots du v. 1 de notre chapitre : «Et Josaphat, roi de Juda, s’en retourna dans sa maison, en paix, à Jérusalem», viennent historiquement à la suite de la guerre contre Moab, non mentionnée ici, mais l’Esprit de Dieu, dans les Chroniques, les relie à l’alliance avec Achab contre le roi de Syrie.
Après la grande délivrance accordée à Josaphat, il jouit en apparence de la paix que certes son infidélité ne méritait pas ; toutefois Dieu est un Dieu saint et il arrive un moment où le roi se trouve devant son tribunal et doit connaître le jugement de Dieu sur des voies qui offensent sa sainteté. Le prophète Jéhu qui vient au-devant de lui, est fils de ce Hanani qui avait prophétisé à Asa, père de Josaphat, lorsqu’il avait appelé la Syrie à son aide, pour résister à Baëstha. Aujourd’hui, les circonstances avaient changé et Josaphat s’appuyait sur Israël pour vaincre la Syrie. Pure politique, toujours opposée aux pensées de Dieu ! Que ce soit d’un côté ou de l’autre, on s’appuie sur l’homme, suivant les intérêts du moment ; et, sans hésitation, l’on change d’alliance pour combattre ses alliés d’autrefois. Dieu n’est pour rien dans ces combinaisons. Tout au plus, verra-t-on un coeur fidèle, comme celui de Josaphat, le consulter après s’être engagé dans un chemin de propre volonté. Mais le moment vient enfin, où Dieu exprime, par la bouche du prophète, sa réprobation sur une telle marche et sur ses motifs.
Jéhu accuse Josaphat de deux choses : «Aides-tu au méchant ?» et «Aimes-tu ceux qui haïssent l’Éternel ?»
La seconde sentence est encore plus grave que la première. Aimer le monde, c’est s’associer, se solidariser avec son inimitié contre Dieu. «Adultères», dit Jacques, «ne savez-vous pas que l’amitié du monde est inimitié contre Dieu ?» (Jacq. 4:4). «Nul serviteur ne peut servir deux maîtres», dit Jésus ; «car ou il haïra l’un et aimera l’autre..» (Luc 16:13). Malgré toutes nos explications et nos excuses c’est ainsi, de fait, que Dieu considère les choses. Retenons soigneusement cette vérité et qu’elle nous empêche de nous associer au monde sous quelque prétexte que ce soit, pour quelque oeuvre que ce soit, ayant quelque belle apparence que ce soit. Comment, si nous ne sommes pas attentifs à ces choses, pourrons-nous éviter d’être atteints par le jugement qui s’abattra sur le monde ? La grâce, sans doute, peut nous épargner et le fera, mais aimerions-nous à partager le sort de Lot qui fut sauvé comme «à travers le feu» ? S’il ne s’agissait que de notre responsabilité lors du jugement, nous serions couchés parmi les morts, mais la grâce se plaît à voir, à travers tout, chez le fidèle engagé dans un mauvais chemin, quelque chose qui correspond à sa sainteté et à sa justice, et elle en tient toujours compte. C’est la pensée consolante qui reparaît continuellement dans les Chroniques. Écoutons ce que dit le prophète : «À cause de cela il y a colère sur toi de la part de l’Éternel. Cependant il s’est trouvé de bonnes choses en toi, car tu as ôté du pays les ashères, et tu as appliqué ton coeur à rechercher Dieu» (v. 2-3). L’Esprit de Dieu avait déjà présenté cette même vérité au sujet de Roboam (12:12). En recherchant l’alliance d’Achab, Josaphat avait craint l’Éternel et avait insisté pour qu’on le recherchât, mais cela ne l’excusait nullement (18:6). Seulement c’était un point qui répondait aux pensées de Dieu et celui-ci en tient compte. N’est-ce pas le cas de dire : Quel Dieu que le nôtre
Josaphat ne répond rien au prophète ; il accepte le jugement, non sans avoir appris sa leçon. Au lieu de répondre il agit. Il reprend en Juda la tâche commencée quand il faisait enseigner la loi au peuple (17:7-9), tâche si misérablement interrompue par ses relations avec Achab au chap. 18. Il s’efforce maintenant de produire chez le peuple et chez toutes les classes de la nation un réveil pour servir Dieu et revenir à Lui : «Josaphat habita à Jérusalem. Et de nouveau il sortit parmi le peuple, depuis Beër-Sheba jusqu’à la montagne d’Éphraïm ; et il les ramena à l’Éternel, le Dieu de leurs pères» (v. 4). Pour maintenir le caractère d’un peuple saint, consacré à l’Éternel, car sa pensée dominante est l’intérêt pour le peuple de Dieu, il établit des juges en Juda, de ville en ville.». Et il dit aux juges : Voyez ce que vous ferez ; car ce n’est pas pour l’homme que vous jugerez, mais pour l’Éternel, et il sera avec vous dans ce qui concerne le jugement. Et maintenant, que la frayeur de l’Éternel soit sur vous : prenez garde en agissant ; car auprès de l’Éternel, notre Dieu, il n’y a point d’iniquité, ni acception de personnes, ni acceptation de présents» (versets 6-7). Lui qui avait si tristement marché dans les voies de l’homme (18:3), il engage les juges à ne pas juger pour l’homme, mais pour l’Éternel, preuve que sa conscience avait été atteinte par la répréhension divine. Lui, auquel Dieu avait dit : «Il y a colère sur toi», dit aux juges : «Que la frayeur de l’Éternel soit sur vous !» parce que lui-même l’avait ressentie. Rien n’est plus puissant, pour exhorter nos frères, que d’avoir eu à faire pour nous-mêmes à la discipline de Dieu, et d’y avoir appris notre leçon jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à la pleine délivrance. C’est ainsi que l’apôtre Pierre, qui peu de temps auparavant avait renié son Sauveur, pouvait dire : «Vous avez renié le Saint et le Juste».
Il n’est souvent pas besoin d’exprimer en paroles que nous avons appris de Dieu notre leçon — les actes parlent plus sûrement que les paroles pour montrer notre repentance. «S’il n’y a point d’iniquité, ni d’acception de personnes auprès de l’Éternel, notre Dieu», pourrions-nous en avoir ? Grâce à Dieu, Josaphat est bien loin maintenant de l’alliance avec Achab ou Joram !
Les sacrificateurs et les anciens sont engagés dans cette oeuvre de juste gouvernement du peuple : «Et à Jérusalem aussi, Josaphat établit des Lévites, et des sacrificateurs, et des chefs des pères d’Israël, pour le jugement de l’Éternel et pour les procès. Et ils étaient revenus à Jérusalem. Et il leur commanda, disant : Vous agirez ainsi dans la crainte de l’Éternel, avec fidélité et d’un coeur parfait. Et quelque procès qui vienne devant vous de la part de vos frères qui habitent dans leurs villes, entre sang et sang, entre loi et commandement, statuts et ordonnances, vous les avertirez afin qu’ils ne se rendent pas coupables envers l’Éternel, et qu’il n’y ait pas de colère contre vous et contre vos frères : vous agirez ainsi, et vous ne vous rendrez pas coupables... Fortifiez-vous, et agissez, et l’Éternel sera avec l’homme de bien» (v. 8-11).
Combien les paroles du roi, que nous avons soulignées, sont belles ! La colère était contre lui, Josaphat ; il ne veut pas qu’il y en ait contre son peuple. Il accepte, sans murmurer, le déplaisir de Dieu sur lui, pour que Juda n’en soit pas atteint. Cela rappelle les paroles de David à l’aire d’Ornan (1 Chron. 21:17). Tel était aussi le caractère de Christ, seulement le Seigneur se chargeait du jugement en n’ayant mérité que le «bon plaisir» de son Père. Josaphat prenait le jugement sur lui, comme ayant mérité la colère, et ayant été cause du mal qu’il voulait épargner au peuple.
Au v. 11 le roi introduit de l’ordre dans le gouvernement du peuple : le souverain sacrificateur pour les affaires de l’Éternel ; un prince de Juda pour les affaires du roi ; les lévites pour celles du peuple. Dieu est un Dieu d’ordre et regarde avec soin à ce qu’il soit maintenu dans sa propre maison. Cette vérité importante est développée dans la première épître aux Corinthiens. Le désordre est contraire à la nature de notre Dieu et nous devons nous tenir soigneusement en garde contre lui. Partout où nous le voyons surgir parmi le peuple de Dieu nous sommes responsables d’intervenir pour revendiquer le caractère de Celui auquel nous appartenons. Cet ordre exige que chaque classe de serviteurs ait sa place et sa fonction, reconnues de tous.
Ce que le prophète avait dit à Josaphat avait rencontré un écho dans sa conscience et dans son coeur. Malgré l’annonce du jugement il était consolé par les encouragements de l’Éternel : Il s’est trouvé de bonnes choses en toi ; tu as appliqué ton coeur à rechercher Dieu. Maintenant il peut exhorter son peuple à une marche active et fidèle, car il sait que «l’Éternel sera avec l’homme de bien» (v. 11).
En considérant le règne de Josaphat tel qu’il nous est apparu jusqu’ici, nous le voyons au début caractérisé par des bénédictions spéciales, suite de l’obéissance du roi. Après avoir aboli les idoles et les hauts lieux, il avait éprouvé le besoin d’enseigner le peuple et sa fidélité avait été récompensée par la soumission de toutes les nations voisines. Mais, depuis son infidélité en s’alliant avec Achab pour faire la guerre au roi de Syrie, la colère de Dieu devait l’atteindre, et le prophète Jéhu la lui annonce. Josaphat courbe la tête sous le jugement et montre par ses actes non seulement qu’il en reconnaît la justice, mais qu’il désire substituer au désordre un ordre selon Dieu dans la vie du peuple. La conséquence de son retour à Dieu ne se fait pas attendre. Ce n’est pas la paix, mais la guerre. Nous pouvons être certains de nous y exposer quand nous revenons d’une mauvaise voie, car la repentance qui nous fait retrouver la communion avec Dieu ne peut convenir à Satan, dont le désir est de nous séparer de Lui. Alors que l’état spirituel de Josaphat était prospère, l’ennemi, réduit au silence, était obligé de courber la tête ; mais il veillait patiemment, à l’affût du moment où une faute irrémédiable ayant été commise, le roi aurait encouru la colère de l’Éternel et serait perdu. Comme toujours, Satan ne tenait pas compte de la grâce de Dieu qui avait trouvé de bonnes choses en Josaphat et de l’oeuvre que cette grâce avait produite dans la conscience du roi ; il ne pouvait comprendre que Dieu se servît du jugement inévitable, déchaîné par la guerre, pour affermir son serviteur et briser les pièges de l’ennemi. Il en a été ainsi de tout temps. Aux premiers siècles de l’Église quand, ayant perdu son premier amour, elle était menacée d’un jugement qui ôterait sa lampe de son lieu, elle fut jetée dans la fournaise et subit une tribulation de dix jours. Dieu la permettait pour restaurer son assemblée ; Smyrne devint, avec Philadelphie, la seule église où le Seigneur n’eût pas à prononcer de menaces nouvelles. Il en est de même ici : la guerre s’allume, le jugement est déchaîné, la colère a son cours, mais nous assistons à un tout autre spectacle, à ce que la grâce produit en faveur du peuple et de son roi.
Voyons quels éléments composaient l’armée ennemie. D’abord Moab. En nous reportant au chap. 3 du deuxième livre des Rois nous comprenons la cause de sa haine. Josaphat était monté avec Joram, le roi d’Israël, contre lui, et alors même que, de fait, Israël seul semblait avoir combattu, c’était particulièrement à Juda que Moab en voulait. Il en est souvent ainsi ; l’alliance avec le monde professant tourne avant tout au désavantage des fidèles. Moab se venge de l’humiliation subie, en attaquant, non pas Israël, mais Juda, relativement si faible. Mais n’oublions pas la raison principale de cette hostilité : Juda représentait le vrai Dieu et c’est lui que visait l’orgueil de Moab exalté par Satan.
Les alliés de Moab sont les fils d’Ammon auxquels David avait fait subir jadis une si humiliante défaite et une portion d’Édom (*), cet Édom, devenu pour un moment l’allié de Joram et de Josaphat contre Moab (2 Rois 3:9), et maintenant celui de Moab contre Josaphat.
(*) Les Ménunim ou Maonites faisaient partie du territoire d’Édom, c’est-à-dire de la montagne de Séhir (v. 10). Il existe encore aujourd’hui une ville de Maan à l’est du Wady-el-Aarabath dans cette région. En ce temps-là, du reste, Édom n’était plus un royaume compact (1 Rois 22:48).
L’attaque de cette confédération était, comme nous l’avons dit, la conséquence de la faute du roi, reconnue depuis par ses actes, mais dont le jugement de Dieu était le résultat inévitable. Aussi nous est-il dit (v. 3) : Josaphat craignit. Mais ce roi pieux ne peut en rester là, quoiqu’il ait mérité le jugement de Dieu. Il fait la seule chose possible : «Il craignit, et tourna sa face pour rechercher l’Éternel». En recherchant l’Éternel, rencontrera-t-il la colère ? Aucunement ; il rencontre la grâce, sujet capital de toute cette partie du livre. Cependant, tout en recherchant l’Éternel, «il proclama un jeûne par tout Juda» (v. 3) ; c’est l’humiliation et le brisement d’esprit, reconnaissant la justice du coup qui l’atteint, lui et son peuple, mais comptant sur un Dieu abondant en compassions. Juda s’assembla dans le même esprit, «pour chercher secours de la part de l’Éternel : et on vint aussi de toutes les villes de Juda pour rechercher l’Éternel» (v. 4). L’esprit qui anime le roi s’étend et son exemple est suivi par le peuple. Alors Josaphat peut se présenter pour tous devant Dieu, dans son temple.
Il rappelle à l’Éternel qu’Il est le Dieu de leurs pères, le Dieu des cieux, à la puissance duquel rien ne peut résister, qui domine sur les nations et les avait dépossédées pour donner leurs royaumes à son peuple. Il revient au caractère de Dieu, tel qu’il était au commencement, et Dieu ne pouvait changer ; c’était la sécurité d’Israël. Puis il avait reconnu leur père Abraham comme son ami. Eux-mêmes l’avaient reçu au début comme leur Dieu, en lui bâtissant un sanctuaire. Dieu y avait accepté la supplication de Salomon ; ayant égard, non pas à Josaphat, mais à l’intercession du roi de ses conseils à laquelle il ne pouvait manquer d’être attentif. Jadis ils avaient épargné Édom, la montagne de Séhir, par obéissance à Dieu, mais Séhir, dans un temps de déclin, profitait de leur bas état pour se venger et leur rendre le mal pour le bien. Dieu le supporterait-il ? ne les jugerait-il pas ? Sans doute, s’il tenait compte de leur état actuel, c’était eux, Juda, qu’il devait juger ; mais estimerait-il pour rien toute sa grâce passée ? Jamais ! Cependant il leur appartenait à eux, de prendre devant lui la place qui convenait à leur juste abaissement, aussi bien qu’à leur foi. Josaphat ne dit pas comme auparavant (19:11) : «Fortifiez-vous et agissez», mais : «Il n’y a point de force en nous devant cette grande multitude qui vient contre nous, et nous ne savons ce que nous devons faire». Il raisonne comme Asa, son père, au temps de sa fidélité (14:11), mais il sait aussi, comme lui, qu’aucune force ne peut résister à l’Éternel. La seule, l’unique ressource est donc : «Nos yeux sont sur toi !» N’est-ce pas la pensée exprimée au Ps. 123 ? «Voici, comme les yeux des serviteurs regardent à la main de leurs maîtres, comme les yeux de la servante à la main de sa maîtresse, ainsi nos yeux regardent à l’Éternel, notre Dieu, jusqu’à ce qu’il use de grâce envers nous !»
Tout Juda, comme plus tard au temps de Néhémie, assiste à cette scène. «Avec leurs petits enfants, leurs femmes et leurs fils», ils s’associent tous à la supplication de Josaphat. Alors ils reçoivent par Jakhaziel, fils de Zacharie, la merveilleuse réponse de l’Esprit de Dieu : «Soyez attentifs, vous, tout Juda, et vous, habitants de Jérusalem, et toi, Josaphat. Ainsi vous dit l’Éternel : «Ne craignez point, et ne soyez point effrayés à cause de cette grande multitude ; car cette guerre n’est pas la vôtre, mais, celle de Dieu. Demain, descendez contre eux : Voici, ils vont monter par la montée de Tsits, et vous les trouverez au bout de la vallée, devant le désert de Jeruel. Ce n’est point à vous de combattre en cette affaire ; présentez-vous, et tenez-vous là, et voyez la délivrance de l’Éternel qui est avec vous. Juda et Jérusalem, ne craignez pas et ne soyez pas effrayés ; demain, sortez à leur rencontre, et l’Éternel sera avec vous» (v. 15-17).
N’est-il pas remarquable que nous ne trouvions ici aucun reproche, aucune allusion même éloignée à l’infidélité du peuple et de son roi ? Tout est grâce. Le péché a été comme englouti par la grâce. Ah ! cette parole si rassurante, deux fois répétée : «Ne craignez pas et ne soyez point effrayés», c’est l’Esprit de Jésus. Combien de fois en présence de l’homme pécheur, il répète dans les évangiles : «Ne crains pas». Il veut qu’on ait confiance dans sa puissance et sa bonté. Sa bonté est sa gloire, comme il le dit à Moïse et comme on le voit au Ps. 63. Trois fois il les encourage par ces paroles : «Descendez, présentez-vous, sortez à leur rencontre», et deux fois il leur dit : «L’Éternel sera avec vous !»
Dieu ne demande à son peuple qu’une chose, la foi en Sa parole. Il faut qu’elle se montre avant qu’ils aient reçu ce que cette parole leur promet. Il faut que la foi anticipe la victoire, car elle est la confirmation des choses qu’on ne voit point encore ; il faut qu’elle compte entièrement sur Dieu, sans aucune confiance en l’homme ; il faut enfin qu’elle comprenne que cette guerre n’est pas la leur, mais celle de l’Éternel, contre Satan qui voudrait anéantir les conseils de Dieu à l’égard de son peuple. Ils n’avaient rien à faire qu’à se tenir là pour voir la délivrance de l’Éternel, exactement la même parole que Moïse avait dite au peuple à sa sortie d’Égypte (Exode 14:13).
Aussitôt que la promesse de la délivrance est donnée, elle est assurée pour la foi sans être encore obtenue. «Il engloutira la mort en victoire», dit le prophète, et l’apôtre ajoute : «Grâces à Dieu qui nous donne la victoire». Alors le roi et le peuple tombent sur leurs faces devant l’Éternel pour l’adorer et les lévites se lèvent pour le louer (v. 18-19).
Après ces actions de grâces anticipées, le peuple sort vers le désert de Thekoa. Josaphat se tient devant le peuple et dit : «Croyez à l’Éternel, votre Dieu, et vous serez affermis ; croyez ses prophètes, et vous prospérerez». La seule chose nécessaire, c’est la foi ; la foi en Dieu, la foi en sa Parole, représentée par les prophètes. Comme jadis, comme aujourd’hui, comme toujours en un temps de ruine, la Parole est la ressource suprême ; c’est à elle que le peuple est toujours renvoyé.
Devant les troupes équipées, la louange retentit pour la seconde fois : «Célébrez l’Éternel, car sa bonté demeure à toujours ! «Aucun cantique ne revient plus souvent que celui-là dans l’Ancien Testament. Il est d’habitude la proclamation de la grâce qui seule a pu introduire le règne de gloire, mais ici le chant de triomphe avant que la victoire soit remportée, parce que cette victoire est assurée à la foi.
Ce triomphe est de source entièrement divine : «L’Éternel mit des embûches contre les fils d’Ammon et de Moab et ceux de la montagne de Séhir». L’homme n’est ici pour rien, tandis qu’en d’autres occasions il est appelé à agir et à combattre. C’est que Dieu veut donner à son peuple aujourd’hui, comme au commencement de son histoire, le sentiment de son impuissance et de la puissance qui combat pour lui.
Les ennemis se détruisent les uns les autres et Juda voit d’en haut leur défaite, comme nous, quand nous entrons au Sanctuaire du Dieu fort ; seulement, dans notre chapitre, nous assistons à la victoire définitive, tandis que la foi seule la réalise aujourd’hui en attendant que le Dieu de paix brise Satan sous nos pieds.
Le «chant de triomphe» anticipait la victoire (v. 22) ; elle est arrivée maintenant, et Juda la célèbre dans la vallée de Beraca, qui signifie «bénédiction», image du lieu où Dieu sera loué à toujours pour la victoire remportée en notre faveur. Tout ce tableau est, en figure, l’accomplissement des conseils de Dieu envers son peuple par le jugement de leurs ennemis, après quoi le peuple revient à Jérusalem avec joie, Josaphat à sa tête ; tous les instruments de louanges, comme au Ps. 150, célébrant le triomphe de l’Éternel (v. 28). C’est le prélude du repos qui reste pour le peuple de Dieu : «Et le royaume de Josaphat fut tranquille, et son Dieu lui donna du repos tout à l’entour» (v. 30). «Et la frayeur de Dieu fut sur tous les royaumes des pays, quand ils entendirent que l’Éternel combattait contre les ennemis d’Israël» (v. 29).
Dans tous ces détails il est impossible de ne pas reconnaître la peinture anticipée du règne millénaire de Christ et des événements par lesquels il sera introduit. L’abaissement d’Israël, réduit à un faible résidu, son retour à Dieu, l’intervention directe de l’Éternel en sa faveur, la victoire définitive remportée par le Seigneur lui-même sur l’ennemi de la fin, le règne de paix introduit par elle, le roi d’Israël conduisant lui-même son peuple à Jérusalem, les accords incessants de joyeuse louange devant Dieu, le repos définitif du royaume. Le règne de Salomon nous plaçait d’emblée au milieu de la pleine bénédiction millénaire ; la fin du règne de Josaphat décrit la manière dont il sera établi.
Remarquons encore que nous trouvons les mêmes expressions au commencement et à la fin du règne de Josaphat : «Et la frayeur de Dieu fut sur tous les royaumes des pays» (17:10 ; 20:29). Au commencement cette frayeur était le fruit de la fidélité du roi, fruit qui ne put durer ; à la fin elle est le fruit de la fidélité de Dieu, quand tout a manqué du côté de l’homme, et ce fruit dure à toujours. Toute cette scène, type de l’accomplissement des conseils de Dieu, ne trouve, pour cette raison même, aucune place dans le livre des Rois.
Au v. 31-37 nous trouvons, par contre, un court tableau et comme un résumé du règne de Josaphat au point de vue de sa responsabilité, tableau qui sort du cadre habituel des Chroniques. Ce point de vue semble avoir pour but de nous introduire dans les règnes affreux de Joram et d’Achazia, où leur responsabilité seule est en question, sans que la grâce puisse intervenir, sinon pour leur ménager un rejeton. Et ce n’est pas à cause d’eux, mais à cause des promesses faites à David, et en vue du règne futur du Christ. Ce passage revient en arrière pour décrire en quelques mots les faits qui eurent lieu sous le règne d’Achazia, roi d’Israël, et précédèrent la victoire sur Moab, décrite dans notre chapitre. Il correspond à 1 Rois 22:42, 44, 49. Sous le régime de la responsabilité, Josaphat n’abolit pas les hauts lieux (v. 33), tandis qu’au chap. 17:6, où il nous est présenté sous le régime de la grâce qui agit dans son coeur, les hauts lieux sont ôtés. Nous nous sommes déjà expliqués sur cette prétendue contradiction. Un détail est encore ajouté ici ; l’état de Juda lui-même ne correspondait pas aux pensées de Dieu : «le peuple n’avait pas encore disposé son coeur à rechercher le Dieu de ses pères» (v. 33).
Enfin notre passage rapporte une alliance commerciale entre Josaphat et Achazia, mais sans le correctif qu’y apporte le premier livre des Rois (22:50). Dans ce dernier passage, nous voyons en effet, qu’après la destruction de sa flotte à Etsion-Guéber, Josaphat, comprenant l’avertissement que Dieu lui donnait, refusa de renouveler l’entreprise avec Achazia. Ici rien de semblable. Seul le jugement de Dieu sur Josaphat lors de la première occasion nous est rapporté. S’il s’agissait, ici, des résultats de la grâce dans le coeur du roi, caractère spécial des Chroniques, le refus de Josaphat d’entrer dans une nouvelle association n’aurait pu être omis. L’intervention du prophète Éliézer, fils de Dodava, omise dans les Rois, confirme ce que nous essayons de faire ressortir, c’est-à-dire que ce court passage parle de la responsabilité seule et sort du caractère habituel du livre. En effet, Éliézer annonce le jugement sans l’atténuation que nous avons observée lors de la prophétie de Jéhu (19:3). Il dit : «Parce que tu t’es lié avec Achazia, l’Éternel a détruit tes oeuvres», et les navires furent brisés, et ne purent aller à Tarsis.
En tout cela, Josaphat était, en effet, très coupable. Qu’avait-il besoin de richesses acquises au prix de l’alliance avec le chef d’un peuple dont le jugement était déjà décrété, et à l’égard duquel il connaissait, par sa propre expérience, la pensée de Dieu ? L’Éternel ne lui avait-il pas donné abondance de richesses au début si fidèle de sa carrière ? (17:5 ; 18:1). Pourquoi vouloir en puiser à une autre source ? Pauvre Josaphat ! pauvre aux yeux de Dieu, puisqu’il n’appréciait, ni n’estimait les richesses que Dieu donne et se trouvait assez pauvre lui-même pour vouloir les richesses que Dieu ne donne pas !
Tout cela est profondément instructif pour nous. Si nous avons senti qu’il ne nous est pas possible de nous associer au monde pour combattre l’Ennemi de Dieu„ sommes-nous autorisés davantage à rechercher cette association en vue d’améliorer notre situation temporelle ? Nous n’y trouverons certainement pas ce que nous y cherchions. Nous ne pouvons aimer à la fois Dieu et «l’injuste Mammon», car ce serait servir deux maîtres. On ne peut aimer l’un sans haïr l’autre ; il nous faut donc choisir et refuser résolument, comme le fit à cette occasion Josaphat dans le livre des Rois, toute offre du monde dans ce but. Nous devons comprendre que, poursuivre le gain avec lui, n’est pas meilleur qu’essayer de combattre le mal à ses côtés. Cet esprit n’est que trop fréquent parmi les enfants de Dieu. S’ils ont quelque intelligence ils ne peuvent penser à faire triompher l’Évangile en combattant contre Satan avec ses propres esclaves, mais peut-être ne considèrent-ils pas du même oeil l’association avec le monde en vue de satisfaire leur besoin de richesses. Que Dieu nous garde de ces deux écueils ! Et s’il juge bon de donner des richesses à ses serviteurs, qu’elles leur viennent de Lui seul, afin d’être non employées pour eux-mêmes mais administrées au service de leur Maître auquel elles appartiennent !
Le récit du règne de Joram, contenu dans le second livre des Rois (8:16-24), correspond en substance à ce qui nous est dit aux v. 5 à 10 de ce chapitre, mais, à part ces quelques versets, tout ce qui nous est dit ici de Joram est nouveau. Nous avons parlé, dans les Méditations sur le second livre des Rois, des difficultés chronologiques soulevées au sujet de ce règne ; elles tombent devant le fait que Joram fut chargé de la régence du vivant de Josaphat, son père, au moment où ce dernier, s’alliant avec Achab, cherchait à reconquérir Ramoth de Galaad, occupé par le roi de Syrie. De là cette parole en 2 Rois 8:16 : «La cinquième année de Joram, fils d’Achab, roi d’Israël, et Josaphat étant roi de Juda, Joram, fils de Josaphat, roi de Juda, commença de régner». Ce fut pendant sa régence que Joram extermina ses sept frères, établis par Josaphat dans les villes fortes de Juda (v. 3). La date en est confirmée par ce qui nous est dit au v. 4 : «Joram s’établit (ou s’éleva) sur le royaume de son père, et s’y fortifia» ; elle l’est encore, par le fait que l’écrit d’Élie, qui n’avait pas encore été enlevé au ciel, fait mention du meurtre des frères de Joram (v. 13). Ces détails confirment la parfaite exactitude du récit biblique.
Nous avons dit plus haut que les règnes de Joram et d’Achazia, son fils, ne présentent pas un seul fait qui ne doive attirer un jugement définitif sur Juda. Cependant l’Éternel reste fidèle à ses promesses et ne détruit pas «la maison de David, à cause de l’alliance qu’il avait faite avec David et selon ce qu’il avait dit, qu’il lui donnerait une lampe, à lui et à ses fils, à toujours» (v. 7). La révolte de Libna, ville sacerdotale (v. 10), semblerait indiquer que du moins la sacrificature en Juda protestait contre les abominations du roi. La raison de cette révolte nous est donnée : Joram «avait abandonné l’Éternel, le Dieu de ses pères». La maison royale n’était épargnée qu’en vue de l’héritier futur qui devait en descendre.
Toutefois les conséquences de la conduite révoltante de Joram ne se font pas attendre. Édom, jusqu’ici tributaire de Juda, et qui n’avait pas de roi, mais un gouverneur (1 Rois 22:48), se révolte, «et ils établirent un roi sur eux» (v. 8). Joram le combat avec succès, mais sa victoire est sans fruit, car Édom est resté «jusqu’à ce jour» affranchi du joug de Juda.
Joram «fit aussi des hauts lieux dans les montagnes de Juda» ; c’était bien pire que de ne pas détruire ceux qui existaient, comme avaient fait plusieurs de ses prédécesseurs : Joram les crée et les établit, ce qu’aucun roi de Juda n’avait fait avant lui. Bien plus, il favorise la prostitution à Jérusalem et «il y poussa Juda» (v. 11). Quel tableau ! C’est abandonner volontairement Dieu pour l’idolâtrie ; c’est, en un mot, l’apostasie et le complet oubli de la sainteté de Dieu, à laquelle Joram préfère la corruption et la souillure.
Jusqu’ici nous avons vu le rôle des prophètes de Juda pour reprendre, exhorter, encourager et remplir les coeurs de crainte devant les jugements prochains de l’Éternel. Maintenant ces précieux auxiliaires manquent. Seul «un écrit d’Élie», prophète d’Israël et prophète de jugement, parvient au roi Joram. Élie avait surveillé les premiers actes de ce règne de violence et avait écrit contre le roi. Cet écrit, conservé après l’enlèvement du prophète, vint à Joram. «Ainsi dit l’Éternel, le Dieu de David, ton père : Parce que tu n’as pas marché dans les voies de Josaphat, ton père, ni dans les voies d’Asa, roi de Juda, mais que tu as marché dans la voie des rois d’Israël, et que tu as fait que ceux de Juda et les habitants de Jérusalem se sont prostitués selon les prostitutions de la maison d’Achab, et aussi parce que tu as tué tes frères, la maison de ton père, qui étaient meilleurs que toi, — voici, l’Éternel te frappera d’un grand coup dans ton peuple et dans tes fils et dans tes femmes et dans tous tes biens, et toi-même de grandes maladies, d’une maladie d’entrailles, jusqu’à ce que tes entrailles sortent par l’effet de la maladie, jour après jour» (v. 12-15).
Les trois faits articulés par Élie pour justifier le jugement de Dieu, sont l’abandon de l’Éternel, la corruption et la violence, tout ce qui caractérise le péché de l’homme, au sujet duquel Dieu avait jadis détruit le monde par le déluge. Mais Dieu est patient envers le peuple : il ne parle pas d’autre chose que d’un jugement personnel sur le roi. Joram est frappé dans ses entrailles qui sortent par l’effet de cette épouvantable maladie, et meurt dans de «cruelles souffrances». Ainsi s’accomplit à la lettre la prophétie d’Élie. Joram avait choisi «la voie des rois d’Israël» ; il est condamné par un prophète d’Israël, le seul témoin public qui restât au milieu de l’idolâtrie des dix tribus et de leur roi.
Les défections continuent ; ce n’est plus seulement Édom, mais les Philistins et les Arabes qui s’élèvent contre Juda ; ces nations envahissent son territoire ainsi que Jérusalem, pillent les trésors du roi, emmènent ses fils et ses femmes et massacrent les premiers, comme il avait lui-même massacré ses frères. Il ne lui reste de sa famille qu’un seul rejeton. Joakhaz, autrement dit Achazia, car l’Éternel voulait conserver un lumignon à David et à ses fils. Joram meurt «sans être regretté» ; on ne brûle pas d’aromates pour lui comme pour Asa. S’il est enterré dans la cité de David, l’honneur de partager les tombeaux des rois est refusé à son sépulcre.
Que deviendra le lumignon que Dieu conserve encore à David ?
Les détails de ce chapitre se rencontrent pour la plupart au second livre des Rois (8:25-29 ; 9:27-28 ; 10:13-14 ; 11:1-3).
Joram était l’aîné des fils de Josaphat ; jusque là la lignée des rois suivait ; pour ainsi dire, la voie normale, mais il ne reste à Joram que son plus jeune fils, Achazia. Les habitants de Jérusalem l’établissent roi ; ainsi l’ordre divin est entamé de tous côtés ; la lampe est près de s’éteindre, mais Dieu qui avait parlé par les prophètes ne peut mentir. N’a-t-il pas dit, en parlant de Jérusalem : «Là je ferai germer une corne à David, j’ai préparé une lampe à mon oint» (Ps. 132:17). Quelle lampe, hélas ! que ce rejeton des rois ! Épargné dans une scène de meurtre et de carnage, témoin des jugements terribles de Dieu sur son père, n’aurait-il pas dû élever les yeux vers l’Éternel et reprendre contact avec le Dieu d’Israël ? Au lieu de cela il obéit à toutes les mauvaises influences qui l’entourent, sans écouter les avertissements d’en haut ; il se confie en sa mère, Athalie, fille d’Omri, femme ambitieuse et cruelle. «Elle était sa conseillère à mal faire» (v. 3) ; il prend pour conseillers les gens de la maison d’Achab qui le conduisent «à sa ruine». C’est sur leur avis qu’il fait alliance avec Joram, fils d’Achab. Ramoth de Galaad, possession d’Israël, était restée au pouvoir du roi de Syrie, depuis la vaine entreprise d’Achab pour la recouvrer, en compagnie de Josaphat, grand-père d’Achazia. Ce dernier n’hésite pas à venir en aide au méchant (cf. 19:2), tellement son coeur est étranger à la crainte de l’Éternel.
Mais, si pour Josaphat c’était une faute, atténuée par le zèle que, d’autre part, il montra pour l’Éternel, ce péché, renouvelé sans vergogne, malgré la condamnation prononcée sur Josaphat par le prophète, n’a plus même ici de circonstance atténuante. Joram, roi d’Israël, blessé par les Syriens, se retire à Jizreël pour y panser ses plaies. Achazia vient l’y visiter et y rencontre son sort : «Ce fut, de la part de Dieu, la ruine complète d’Achazia, d’être venu vers Joram». Il sortit avec ce dernier «contre Jéhu, fils de Nimshi, que l’Éternel avait oint pour retrancher la maison d’Achab». Joram meurt, les fils des frères d’Achazia et les princes de Juda sont massacrés par Jéhu ; Achazia s’enfuit pour se cacher dans la Samarie. Il est découvert, poursuivi, blessé, se sauve à Meguiddo, y est découvert de nouveau, amené à Jéhu et mis à mort (v. 9 : cf. 2 Rois 9:27-28). Ses serviteurs emmenèrent son corps à Jérusalem où il fut enterré dans les sépulcres des rois, ses pères, car ils dirent : «Il est fils de Josaphat, qui rechercha l’Éternel de tout son coeur» (v. 9). Le seul témoignage qui pût lui être donné, la seule raison pour laquelle l’Éternel ne le livre pas aux chiens, comme Achab, est que Dieu se souvient de son grand-père. C’est à cause de lui qu’une grâce est accordée à cet indigne descendant, ne fût-ce que dans la mort, car sa vie avait fini sous le jugement de Dieu.
Et voici encore une scène affreuse de meurtre qui se déroule. Joram avait massacré ses frères ; les ennemis de Juda massacrent tous les fils de Joram, sauf Achazia ; Jéhu tue Achazia et massacre tous les fils de ses frères ; enfin Athalie extermine toute la semence royale afin de régner seule. Et malgré tout la lampe de l’Oint de l’Éternel n’est pas éteinte. Dieu garde, au milieu de cette scène de meurtre un faible nourrisson qui est, dans la première partie de son règne, le type du Messie attendu. Préservé, comme le sera Jésus plus tard, lors du massacre des enfants à Bethléem ; caché loin de tout regard, comme Jésus lors de la fuite en Égypte, tel Joas se présente à nos yeux. Il s’élève, dans la pureté de son enfance, hors d’une race condamnée, seul rejeton sur l’épaule duquel soit mise la clef de David, germe sortant d’une terre aride ; élevé dès sa jeunesse sous l’oeil de Dieu dans son temple, il nous apparaît comme Celui qui disait : «Ne me faut-il pas être aux affaires de mon Père ?» C’est ainsi que Joas débute dans la carrière.
Mais, remarquons-le, il est en même temps le type du Seigneur prenant en mains les rênes du gouvernement de son royaume. C’est en la septième année, l’année sabbatique, année du repos de la terre, qu’il paraît aux yeux de tous. Jusque-là, Joas avait été caché six ans dans la maison de Dieu, comme l’est le Seigneur avant sa manifestation future. Quand les portes du temple s’ouvriront, quand il sortira du ciel qui l’avait contenu jusque-là, ce sera pour être à la fois vengé de ceux qui avaient comploté sa perte, et proclamé d’une commune voix le vrai Roi de son peuple, le seul qui ait le droit de porter la couronne.
Aucun règne n’offre un contraste plus absolu entre son commencement et sa fin que celui de Joas dans les Chroniques. Un détail particulier, et qui tranche avec tout ce que nous avons si souvent remarqué jusqu’ici, c’est que dans l’histoire de Joas le mal est mentionné plus encore que le bien, tandis que le second livre des Rois en omet une partie. L’explication de ce fait est facile : Le commencement du règne de Joas nous est présenté comme un essai d’accomplissement des conseils de Dieu à l’égard de la royauté. Se montrera-t-elle digne de la faveur divine qui repose sur elle ? Si elle l’est, le roi des conseils de Dieu s’appellera Joas. Comme nous allons l’apprendre, il n’en fut pas ainsi, mais les commencements de ce règne furent si favorisés qu’ils semblaient près de réaliser les pensées de Dieu.
Un autre point est mis en lumière dans notre chapitre. La proclamation de la royauté n’a pas lieu sans que la sacrificature lévitique soit rétablie dans toutes ses fonctions (v. 1-9), car elle est inséparable de la royauté selon les conseils de Dieu et lui est subordonnée. De plus la souveraine sacrificature, dans la personne de Jéhoïada, est intimement associée à la royauté, et cette association est l’un des traits remarquables des Chroniques, bien que la royauté et la sacrificature ne reposent pas ici sur la même tête comme lorsque le Christ «sera sacrificateur sur son trône». Toute la sacrificature lévitique assiste ici au sacre du roi (v. 8). Tous les chefs concourent aussi à cette solennité ; et le peuple entier y assiste. Tous portent les armes de David (v. 9) et le règne de Joas se relie ainsi directement à celui de David, autrefois rejeté.
«Et toute la congrégation fit alliance avec le roi dans la maison de Dieu ; et Jéhoïada leur dit : Voici, le fils du roi régnera, selon ce que l’Eternel a dit touchant les fils de David» (v. 3). À la suite de cela, tout le service sacerdotal est rétabli (v. 18-19), et le roi, sur lequel est placé la couronne et le témoignage, le roi, dont le règne de justice réalise tout ce qui est écrit dans la loi, s’assied sur le trône de son royaume. Il règne «selon ce que l’Éternel a dit touchant les fils de David» ; il est «le fils du roi» ; il est l’Oint, acclamé par tous au cri de : Vive le roi ! Il est réellement, en type, le Prince de vie !
Cette scène glorieuse ne s’établit que sur la vengeance. Athalie, la royauté usurpée et idolâtre qui a pensé en finir à jamais avec la famille de David, tombe devant la royauté renaissante, avec toute l’idolâtrie instituée par elle. De même l’Antichrist, meurtrier, persécuteur et idolâtre, tombera avec toute sa puissance devant la royauté renaissante, à la fraîche aurore du règne miraculeux du fils de David. «La joie et les cantiques» sont l’heureux accompagnement de cette scène.
«Athalie, cette méchante femme, et ses fils, avaient dévasté la maison de Dieu et, toutes les choses saintes de la maison de l’Éternel, ils les avaient aussi employées pour les Baals» (v. 7). Le premier soin de Joas fut de restaurer le temple et il envoya les sacrificateurs et les lévites par les villes de Juda, afin de recueillir l’argent nécessaire à cette oeuvre. Le tribut ordonné par Moïse dans le désert, pour servir à l’édification du tabernacle (Exode 30:11-16 ; 35:4-9, 20-29), devait être employé à la restauration du temple, mais les lévites ne se hâtèrent point ; les brèches n’étaient pas réparées, et les dons servaient sans doute à l’entretien de la sacrificature.
En tout cela, Joas s’en tient à la Parole seule. Depuis les années du désert les circonstances avaient changé. Moïse ordonnait un tribut pour construire le tabernacle ; celui-ci avait disparu et fait place à un temple. Fallait-il s’en tenir à l’ordonnance primitive donnée dans de tout autres circonstances ? De plus, le temple était souillé, dépouillé de tous ses trésors, détruit en partie. Fallait-il prendre tant de peine à le réparer ? Ne pouvait-on pas employer le tribut de Moïse à entretenir les lévites ? Sans doute, on raisonnait ainsi autour de Joas, mais tout cela n’était pas selon Dieu, quand même un pieux souverain sacrificateur ne s’y opposait pas. Son opinion n’eut aucune valeur pour Joas ; et le jeune roi reprit le vieux souverain sacrificateur, la Parole ayant plus d’autorité pour lui que les pensées de l’homme le plus éminent. Il faut que ce que la Parole ordonne serve à l’usage auquel la Parole le destine ; on ne peut, sans infidélité, changer quelque chose aux prescriptions divines. L’incrédulité du coeur naturel dira ces ordres surannés, mais ils ne le sont pas, car la Parole est immuable et éternelle. Travailler à la maison n’est pas la même chose que secourir les serviteurs qui se dépensent pour le Seigneur et sont dignes de leur salaire ; il y avait une dîme pour les lévites, mais chaque chose a sa place, et la plus urgente de toutes était, pour Joas, de réparer les brèches de la maison. Il se montrait ici plus lévite que les lévites ; il suivait les traces de Celui qui dit : «Le zèle de ta maison m’a dévoré».
Ces choses n’ont-elles pas une voix pour nous ? Notre temps, nos ressources, nos peines, ne doivent-ils pas être employés à cimenter les liens, détruits aujourd’hui, qui rejoignaient ensemble les précieux matériaux de l’édifice de Dieu, de son Assemblée ? Est-ce pour Dieu une chose sans importance, que l’habitation où il demeure ici-bas par l’Esprit soit à l’honneur ou au déshonneur de son hôte divin ? À nous à réparer ses brèches, à y déployer notre zèle et notre énergie, afin que Dieu soit honoré par l’union cimentée entre ses enfants, seul remède à la ruine complète. Il n’y a qu’une maison de Dieu : tout ce qui s’édifie à côté d’elle n’a pour Lui aucune valeur. Que de ressources dépensées en pure perte pour ce qui n’est que des maisons humaines. Ainsi les dons récoltés par les lévites ne servaient de rien pour l’Éternel et se dépensaient en pure perte.
Il fallait désormais que le tribut de Moïse fût employé tout entier à la réfection de la maison de Dieu. Le roi commande (non pas Jéhoïada, comme dans le livre des Rois) de placer un coffre à la porte de la maison de l’Éternel, pour recueillir les offrandes. Quand tout le travail est achevé, ce qui reste est employé à faire des ustensiles d’or et d’argent pour le temple (v. 14). Ce passage n’est point en contradiction avec 2 Rois 12:13 qui nous dit simplement que pendant l’ouvrage l’argent ne fut employé à rien d’autre.
Tout est beau, tout est pur au début de ce règne. Selon la coutume des Chroniques les hauts lieux, conservés par Joas (2 Rois 12:3), sont passés sous silence. Tant que la royauté représente, pour ainsi dire, celle du Messie promis, ce livre la considère comme pure et sans reproche, mais tout change ; une scène de deuil et d’horreur va s’ouvrir devant nous.
Tout le passage compris entre les v. 15 et 22 manque dans le livre des Rois.
Jéhoïada meurt et on l’enterre «dans la ville de David avec les rois, car il avait fait du bien en Israël, et pour Dieu et pour sa maison» (v. 16), preuve nouvelle de l’union intime entre la royauté et la sacrificature dans les Chroniques.
Dès cette mort tout change. Joas se montre indigne de répondre aux pensées de Dieu quant à la royauté. Sa sécurité et sa force étaient dans son union avec la sacrificature, et quand elle disparaît tout croule. Désormais «les chefs de Juda» deviennent conseillers du roi en le flattant : «Ils s’inclinèrent devant le roi ; alors le roi les écouta» (v. 17). Ils n’avaient en vue, en s’emparant de l’esprit de Joas, que de rétablir l’idolâtrie en Juda. Deux chemins s’ouvraient devant Joas : Rester fidèle à la maison de Dieu où il avait passé ses jeunes années, et se joindre aux serviteurs de l’Éternel, ou bien se tourner du côté du monde et chercher l’amitié de ceux qui le dominent. Il abandonne le premier parti et choisit le second ; le coeur naturel incline toujours vers ceux qui le flattent, et les chefs de ce monde sont les instruments de Satan, pour conduire les hommes aux idoles. Aussi vit-on le peuple «abandonner la maison de l’Éternel, le Dieu de ses pères, et servir les ashères et les idoles».
Et voici les prophètes qui réapparaissent. Quelle preuve de la longue patience de Dieu tant qu’il reste encore une lueur d’espoir pour le peuple ! «L’Éternel envoya parmi eux, pour les ramener à lui, des prophètes qui témoignèrent contre eux, mais ils n’écoutèrent point. Et l’Esprit de Dieu revêtit Zacharie, fils de Jéhoïada, le sacrificateur, et il se tint debout au-dessus du peuple, et leur dit : Ainsi dit Dieu : Pourquoi transgressez-vous les commandements de l’Éternel ? Vous ne réussirez point ; car vous avez abandonné l’Eternel, et il vous abandonnera aussi» (v. 19, 20).
Joas a tout oublié : l’affection profonde et le respect pour la mémoire du souverain sacrificateur ; l’amour qu’il doit au fils d’un tel serviteur, à bien plus forte raison, quand ce fils est le porteur de la parole de Dieu, pour détourner le peuple et son roi de leurs mauvaises voies. Quels ravages effrayants peut faire en quelques moments l’infidélité, dans un coeur qui lui a ouvert la porte ! Qu’y a-t-il d’étonnant à ce que les grands et le peuple conspirent contre la sacrificature qui leur porte ombrage et contre le prophète qui les exhorte ? mais Zacharie, fils de Jéhoïada, est lapidé par l’ordre du roi, dans le parvis de la maison de l’Éternel ! Le coeur se soulève devant tant d’ingratitude et de cruauté. «Joas ne se souvint pas de la bonté dont Jéhoïada, père de Zacharie, avait usé envers lui, et il tua son fils» (v. 22).
On se demande comment une chose pareille fut possible chez un roi dont les débuts annonçaient un règne juste et sans tache. Nous en avons dit quelques raisons en étudiant le deuxième livre des Rois, mais ici ces raisons ne sont pas données. Ce règne a sombré dans la violence et le crime. Le coeur du roi, aveuglé par Satan, devient la proie de cet ennemi terrible, dès qu’il tourne le dos à la sacrificature et à la maison de l’Éternel.
Satan, en s’emparant de Joas, pensait anéantir les conseils de Dieu. Il a été, il est, il restera trompé en cela, malgré tous ses efforts, car Dieu a Christ en vue et la chute d’un Joas ne détruit pas ses conseils. Toutefois il faut que le jugement s’exécute contre le mal. Le cri vengeur, sorti de la bouche du prophète mourant : «Que l’Éternel regarde et redemande !» (v. 22) est le cri de la loi violée. Christ et son sang prononcent de meilleures choses qu’Abel ou Zacharie : «Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font». Sur la croix, il intercède pour les transgresseurs, et son sang dit : Grâce ! grâce ! Étienne, qui subit le sort de Zacharie, s’écrie : «Seigneur, ne leur impute point ce péché» ; mais ici, je le répète, nous nous trouvons sous le régime de la loi, alors même que le ministère des prophètes en avait modifié le caractère.
Le fait que Zacharie est tué dans le parvis «entre le temple et l’autel», aggrave infiniment le péché du roi. Dieu, sur son trône entre les chérubins, assistait à cette scène, tandis qu’au début du règne, Athalie, cette méchante femme, avait été arrachée du parvis pour être mise à mort dans la maison du roi. Joab, frappé quand il saisissait les cornes de l’autel, ne le fut pas devant l’arche que David avait recueillie en Sion.
Vers. 23-27. L’attaque de Hazaël, dont le motif n’est pas donné dans le deuxième livre des Rois, est ici la réponse au cri de vengeance de Zacharie.
Tous les chefs du peuple qui avaient conspiré contre le prophète pour le faire mourir, reçoivent le juste châtiment de leur iniquité (v. 23). Ces versets correspondent, avec beaucoup de différences, à 2 Rois 12:17-21. Ainsi l’armée de Syrie entre ici «avec un petit nombre d’hommes» à Jérusalem, à la honte de la «très grande armée» de Joas (v. 24). Ils s’emparent de tout et envoient les dépouilles à Damas. Dans le second livre des Rois, Joas cherche à se soustraire à l’ennemi en donnant à Hazaël toutes les choses saintes, et l’or du temple et celui de la maison du roi. Notre passage ne fait mention de ce fait qu’avec ces mots : «la grandeur du tribut qui lui fut imposé» (v. 27). Le tribut payé, Hazaël se retire de devant Jérusalem. Dans notre passage il y rentre et «fait justice de Joas» (v. 24). Il est probable qu’entre ces deux événements ce dernier s’était rebellé contre le roi de Syrie, car il n’est pas fait mention ici du butin, mais de la vengeance exercée contre les chefs du peuple et le roi. Joas est laissé par l’ennemi dans «de grandes maladies», conséquences, sans doute, de toutes ses angoisses, mais avant tout du jugement de Dieu qui le poursuit. Et de plus, ses serviteurs conspirèrent contre lui, qui s’était allié aux conspirateurs. L’épée vengeresse du Dieu saint l’atteint : un Moabite et un Ammonite, deux idolâtres, sont les meurtriers de ce roi qui avait rétabli le culte des idoles. Le sang du juste est vengé ; Joas n’a pas même l’honneur du sépulcre des rois, semblable en cela à l’impie Joram qui subit le même sort (21:20) ; solennel exemple d’un jugement exécuté jusque dans la mort, car le Seigneur montre aux hommes qu’il veut être craint !
Amatsia succède à Joas, son père. Dieu, dans sa patience, recommence toujours, pour ainsi dire, l’épreuve de la royauté. Ce règne va-t-il avoir une meilleure issue que le précédent ? Non, c’est la même histoire qui recommence. D’abord la fidélité et la crainte de Dieu, puis une chute retentissante. Amatsia «fit ce qui est droit aux yeux de l’Éternel, non pas toutefois d’un coeur parfait» (v. 2). Il manquait quelque chose à sa piété et le second livre des Rois (14:3-4) nous renseigne à ce sujet. Il n’abolit pas les hauts lieux quoique lui-même n’y sacrifiât point, mais le peuple y sacrifiait et cela dénotait chez Amatsia une coupable indifférence quant à l’état de la nation dont il était responsable. Répétons ici que Dieu, dans sa grâce, mentionne aussi peu que possible dans les Chroniques le fait que les hauts lieux sont tolérés. C’est comme s’il était résolu à ne nous entretenir que des choses produites dans le coeur par la grâce, et à ne pas insister sur une faiblesse qui provenait souvent, chez les rois pieux, du manque d’autorité et d’énergie pour réprimer les tendances idolâtres de leur peuple.
Une autre chose est, par contre, à la louange d’Amatsia ; il suit l’exemple donné par Joas, son père, aux jours de sa jeunesse et de sa prospérité. La Parole, représentée alors par «le livre de Moïse», est obligatoire pour lui et c’est elle qui dirige ses décisions. S’il détruit les meurtriers de son père, comme Salomon jadis les ennemis de David, il ne met pas à mort leurs fils, car il fait «selon ce qui est écrit dans la loi, dans le livre de Moïse, où l’Éternel a commandé, disant : Les pères ne mourront pas pour les fils, et les fils ne mourront pas pour les pères ; car chacun mourra pour son péché» (v. 4 ; cf. Deut. 24:16).
Mais ce n’était pas toute la Parole, et, pour produire une marche fidèle, il la faut tout entière. Ce même Moïse avait dit dans les Nombres (33:52) : «Vous dévasterez tous leurs hauts lieux». Combien souvent dans une vie chrétienne, fidèle du reste, le manque de soumission à certaines parties de la parole divine, gâte et corrompt le témoignage. Qui pourra nous dire que cette tolérance au sujet de l’une des pratiques, peut-être la moins odieuse de l’idolâtrie, ne fut pas pour quelque chose dans l’épouvantable défection dont la carrière d’Amatsia nous donne l’exemple ?
Pour le moment sa vie n’avait pas encore sombré dans le mal ; mais nous trouvons chez Amatsia une conscience peu exercée quant à l’association avec Israël, déjà voué au jugement. Trouvant sans doute son armée peu nombreuse, et il y avait en effet, une différence immense entre sa force militaire et celle de Josaphat (17:12-19), il embauche des volontaires d’Israël au nombre de cent mille, comme mercenaires à sa solde, pour cent talents d’argent. Ce n’était plus une direction positive, un texte formel des Écritures, qui devait régler ici la conduite du roi, mais la communion de pensées avec Dieu et l’exemple des bénédictions attachées à la foi. Ne devait-il pas savoir que l’Éternel pouvait «délivrer avec peu ou beaucoup de gens» ? Asa n’avait-il pas, avec la même armée qu’Achazia, anéanti le million d’hommes de Zerakh ? (14:8-9). Nos fautes, en ce cas, viennent, en somme, toujours d’un manque de confiance en Dieu et d’une confiance aveugle aux ressources humaines. Amatsia a négligé de consulter l’Éternel, mais celui-ci ne le laisse pas sans exhortations. Un prophète, un homme de Dieu, vient à lui pour l’avertir. Tandis que les dix tribus sont abandonnées à elles-mêmes, Dieu révèle ses pensées par ses prophètes là où se trouve un peuple qu’il reconnaît encore. Il exhorte, avertit, annonce les jugements en cas de désobéissance, mais tout cela est mélangé de grâce. La prophétie n’abolit la loi en aucune manière, mais, bien au contraire, s’appuie sur elle ; la loi et la prophétie se présentent comme ayant une égale autorité. C’est, en effet, sur la loi de Moïse qu’Amatsia s’appuie au v. 4 et sur la parole du prophète qu’il change de conduite au v. 10. S’il s’était endurci, le régime de la loi n’étant pas aboli, il encourait un jugement sans miséricorde ; mais la parole de répréhension du prophète est pleine de grâce et de douceur : «Ô roi ! que l’armée d’Israël ne marche pas avec toi ; car l’Éternel n’est pas avec Israël, avec tous les fils d’Éphraïm. Que si tu vas, fais-le, fortifie-toi pour la bataille ; Dieu te fera tomber devant l’ennemi ; car c’est en Dieu qu’est le pouvoir pour aider et pour faire tomber» (v. 7-8). Amatsia écoute le prophète, mais Dieu veut, pour qu’il se souvienne de ce sérieux avertissement, que son acte de propre volonté porte certains fruits amers. Tout d’abord la question se pose : «Que faire quant aux cent talents que j’ai donnés à la troupe d’Israël ?» Cet acte d’obéissance entraînait une perte d’argent, mais qu’il aurait évitée s’il ne s’était pas engagé, sans consulter l’Éternel, dans un chemin qui le déshonorait. Combien de misères matérielles ou morales le sentier uni de la foi nous épargne ! Sans doute, certaines difficultés s’y rencontrent toujours, mais ces épreuves ne sont mélangées d’aucune amertume, comme on le voit dans l’épître aux Philippiens, — que dis-je ? d’aucune amertume ? Elles sont l’occasion d’une joie sans mélange. Certes, l’apôtre n’avait rencontré que difficultés sur son chemin et l’épître aux Philippiens en énumère un grand nombre : ses chaînes, ses besoins matériels, la haine de ceux qui cherchaient à ajouter de l’affliction à ses liens, le manque d’harmonie parmi les chers enfants de Dieu, les ennemis de la croix de Christ marchant dans le chemin chrétien, tous cherchant leur propre intérêt, et d’autres choses encore ; mais il était soutenu au-dessus de toutes ses épreuves, car elles étaient la participation aux souffrances de Christ et non pas le châtiment de sa conduite.
Que faire ? dit Amatsia ; le prophète répond : «Il appartient à l’Éternel de te donner beaucoup plus que cela». Le roi n’a rien à faire qu’à croire que Dieu veut lui donner, mais sa foi sera nécessairement mise à l’épreuve. En sortira-t-elle victorieuse ? Il souffre d’être obligé de renoncer aux «cent talents qu’il avait donnés à la troupe d’Israël» sans en tirer aucun profit. Il voit la colère des hommes d’Éphraïm embrasée contre Juda, car ils considéraient leur licenciement comme une offense (v. 10). Il traverse encore d’autres tribulations : «Ceux de la troupe qu’Amatsia avait renvoyée, afin qu’elle n’allât pas à la guerre avec lui, tombèrent sur les villes de Juda, depuis Samarie jusqu’à Beth-Horon, et y frappèrent trois mille hommes et enlevèrent un grand butin» (v. 13). Si la foi d’Amatsia remporte, comme le prophète le lui avait fait entendre, une victoire signalée sur les Édomites, il lui faut, comme discipline, être battu d’autre part par ces hommes dans lesquels il avait mis sa confiance. Amatsia a-t-il appris sa leçon, s’est-il humilié devant Dieu en remportant d’un côté une victoire, fruit de la libre grâce de Dieu, en subissant de l’autre une défaite, fruit de son indépendance ? La suite de son histoire nous montre qu’en réalité l’humiliation lui était étrangère. La victoire l’exalte ; il s’attribue la défaite des Édomites et oublie Dieu. Honte à lui ! il l’oublie si complètement «qu’il apporta les dieux des fils de Séhir, et se les établit pour dieux, et se prosterna devant eux et leur brûla de l’encens» (verset 14) ; il adore ces mêmes dieux qui n’avaient pas délivré leur peuple de sa main ! Décidément cette fois la colère de Dieu s’embrase contre lui, et cependant il lui envoie un prophète pour tenter encore de l’amener à la repentance. «Pourquoi recherches-tu les dieux d’un peuple qui n’ont pas délivré leur peuple de ta main ?» Ce «Pourquoi» n’est-il pas touchant ? Amatsia va s’humilier peut-être, se reconnaître coupable. Le «Pourquoi» lui ouvre la porte de la repentance. Comme cet effort pour le ramener fait bien partie de la vocation miséricordieuse du prophète ! Amatsia avait écouté un premier prophète, mais sans conviction profonde du mauvais chemin dans lequel il s’était engagé ; que va-t-il répondre maintenant au second ? Au lieu de tenir compte de la colère de Dieu contre lui, c’est sa colère à lui qui s’embrase contre l’homme de Dieu. Est-ce que je t’ai établi mon conseiller ? Comment oses-tu t’adresser à moi ? Cesse de parler : pourquoi te mettrait-on à mort ? L’orgueil parle par la bouche royale. La victoire sur Édom n’a fait que nourrir la haute idée qu’il a de lui-même. Certes, il peut se passer du prophète et de ses questions, lui qui a pu se passer de l’Éternel ! En effet, l’homme de Dieu se détourne, mais non pas sans avoir prononcé ces paroles solennelles : «Je sais que Dieu a résolu de te perdre, parce que tu as fait cela, et que tu n’as pas écouté mon conseil».
Cette sentence n’arrête pas Amatsia ; il y a des temps où le coeur, volontairement endurci, est abandonné à lui-même, où l’homme est livré à Satan qui en fait son jouet. L’orgueil d’avoir vaincu Édom, l’amer ressentiment contre Éphraïm qui a saccagé les villes de Juda, font naître dans le coeur d’Amatsia le dessein de provoquer le roi d’Israël et de se venger de lui. Il rejette complètement l’idée d’une discipline de Dieu à son égard, car jamais un esprit de vengeance ne s’accorde avec un coeur humilié. Joas, roi d’Israël, répond à ce cartel par un apologue, montrant qu’une fois déjà Jéhu a foulé aux pieds Juda qui avait cherché des alliances matrimoniales dans la famille du roi à Samarie. Amatsia «n’écoute pas» ; cet endurcissement venait de la part de Dieu, comme jadis celui du Pharaon. Il est battu, fait prisonnier, amené à Jérusalem. La muraille de Jérusalem est détruite entre la porte d’Éphraïm et la porte du coin ; la ville elle-même, les trésors du temple, les trésors du roi sont mis au pillage. Amatsia reste encore quinze ans après la mort de Joas, sans qu’on le voie revenir à Dieu.
Et, circonstance solennelle ! depuis le moment où il s’est détourné, une conspiration, ourdie contre lui, couve pendant de longues années, jusqu’au jour où elle éclate. Devant elle le roi s’enfuit à Lakis. Que ne cherchait-il son refuge auprès de Celui qu’il avait offensé ? Une telle décision pouvait encore suspendre le jugement, car c’était le seul refuge où le jugement ne pût entrer, et la ville la mieux fortifiée ne pouvait empêcher la colère de Dieu d’atteindre le roi.
Jusqu’ici, sauf deux règnes absolument pervers, les rois commencent avec Dieu, dont la grâce est là pour les encourager à persévérer dans cette voie ; mais leur fin n’est pas comme leur commencement, elle aboutit au naufrage. Nous n’avons pas encore atteint la période des réveils où nous trouverons le tableau plus consolant des rois qui ont appris à compter exclusivement sur la grâce.
Le second livre des Rois ne mentionne que très sommairement le contenu de ce chapitre. Voyez 2 Rois 14:21-22 et 15:1-7.
Nous retrouvons pour le règne d’Ozias (Azaria) le même principe que pour ceux de Joas et d’Amatsia : la grâce de Dieu établissant un nouveau roi, le bénissant abondamment à l’entrée de son règne, puis, pour une cause ou pour l’autre, ce règne finissant par un désastre moral et le jugement qui en est la conséquence. Comme d’habitude, le début de ce règne nous est présenté par les Chroniques sans la tache des hauts lieux.
Ozias bâtit Éloth (ou Élath), ville située près d’Étsion-Guéber, sur le bras oriental de la mer Rouge, et qui avait jadis appartenu à Salomon (8:17), puis avait passé aux mains d’Édom. Le début de ce règne fut, de tout point, excellent. «Ozias rechercha Dieu pendant les jours de Zacharie, qui avait l’intelligence des visions de Dieu ; et pendant les jours où il rechercha l’Éternel, Dieu le fit prospérer» (v. 5). Ce Zacharie n’apparaît dans aucun autre passage ; il est certain qu’il était de race sacerdotale ; de plus, il avait l’intelligence des visions de Dieu ; il était donc un prophète et, plus encore, un voyant, tous les prophètes n’ayant pas nécessairement ce caractère. Souvent ils recherchaient la vérité dans leurs propres Écritures, les étudiaient et en recevaient l’intelligence, mais n’étaient pas nécessairement à même d’expliquer les visions de Dieu. Joseph avait ce don, Daniel était dans le même cas que Zacharie ; il avait «l’intelligence en toute vision et dans les songes» (Dan. 1:17), et, de plus, à l’exemple d’autres prophètes, il comprenait la pensée de Dieu par l’étude de leurs écrits (Dan. 9:2).
L’intelligence des visions de Dieu nous rend capables d’enseigner et d’exhorter les autres. La prophétie n’est pas nécessairement une révélation de choses nouvelles, elle ne l’est pas du tout de nos jours où les saintes Écritures nous donnent la révélation complète des pensées de Dieu, cependant le prophète d’aujourd’hui possède une intelligence des mystères de Dieu (des choses cachées, mais qui ne le sont plus, étant maintenant révélées dans la Parole), intelligence qui le rend capable d’édifier, de consoler, d’exhorter (1 Cor. 13:3). C’était précisément ce dont avaient besoin les rois de Juda qui traversaient des temps de ruine, comme nous en traversons aussi maintenant. C’était ce que faisait Zacharie. Sous son ministère, Ozias rechercha l’Éternel et prospéra. Comme lui, il nous faut être attentifs à la parole de Dieu et aux mystères qu’elle nous révèle. Si nous sommes diligents pour chercher à les comprendre, nous entrerons comme Ozias dans une ère de prospérité spirituelle. Seulement n’oublions pas que cette prospérité elle-même nous met aux prises avec l’ennemi. Ceux qui étaient aux portes de Juda étaient les plus acharnés. En ces temps difficiles les Philistins s’étaient emparés d’une partie du domaine d’Israël et s’y maintenaient. Nous pouvons comparer cet ennemi à la chrétienté nominale, établie, sans y avoir aucun droit, dans les limites qui n’appartiennent qu’au peuple de Dieu. Qu’avons-nous à faire vis-à-vis d’elle ? Ce que fit Ozias quand il abattit les murailles des Philistins et bâtit des villes au milieu d’eux. C’est ainsi que nous devons, dans l’intérêt du peuple de Dieu, prouver l’inanité des prétentions de la chrétienté et élever bien haut les principes divins de la Parole, comme seul moyen de lui résister.
Après cela, Ozias peut porter la guerre au-delà de ses limites. «Dieu l’aida contre les Philistins, et contre les Arabes qui habitaient à Gur-Baal, et contre les Maonites (Édomites). Et les Ammonites apportèrent des présents à Ozias ; et son renom parvint jusqu’à l’entrée de l’Égypte, car il était devenu extrêmement fort» ! (v. 7-8). Appliquant cela au combat de l’Évangile, nous trouvons qu’il suit habituellement la même marche. Il commence comme Gédéon, et tant d’autres, dans un cercle restreint, souvent le cercle de famille, pour s’étendre au-delà. André amène d’abord son frère Simon à Jésus ; le démoniaque guéri va raconter dans sa maison les grandes choses que Dieu lui a faites ; les apôtres prêchent à Jérusalem ; de là l’Évangile s’étend à la Samarie, puis à Césarée parmi les prosélytes gentils, enfin, par Paul, aux nations. Si, après avoir été convertis, nous sommes fidèles dans notre entourage, soyons certains que le Seigneur étendra nos limites.
«Et Ozias bâtit des tours à Jérusalem, sur la porte du coin, et sur la porte de la vallée, et sur l’angle, et les fortifia» (v. 9). Les tours sont élevées pour défendre les portes. Deux de ces tours regardent la vallée de Hinnom, où Joas, roi d’Israël, venait d’abattre la muraille après avoir vaincu Amatsia (25:23). Ozias fortifia aussi la «porte de l’angle», partie faible et exposée des fortifications de Jérusalem, par laquelle on pouvait avoir accès au temple et s’en emparer. En un mot, Ozias ne se contenta pas de réédifier ce que l’ennemi avait détruit, mais il chercha à mettre le temple de Dieu à l’abri des attaques. Tout cela exigeait un très sérieux travail ; appliquons-nous à faire de même. Ce n’est pas tout, de combattre au-dehors ; il nous faut avoir soin de l’Assemblée de Dieu.
«Et il bâtit des tours dans le désert, et creusa beaucoup de puits, car il avait beaucoup de bétail dans le pays et sur le plateau, et des laboureurs et des vignerons dans les montagnes et en Carmel ; car il aimait la campagne» (v. 10). Outre qu’il avait à combattre les ennemis du dedans et du dehors et à garantir la cité de l’Éternel, il avait à tenir tête à bien d’autres dangers. Les tours d’observation du désert servaient à signaler non seulement les bêtes sauvages, mais, bien plus encore, les pillards de troupeaux. Il appartenait aux fonctions du roi de remplir l’office de berger et de mettre les brebis à l’abri. Cette sollicitude pour les troupeaux confiés à sa garde se manifesta encore d’une autre maniêre : Ozias creusa beaucoup de puits en vue d’abreuver ses gens et son bétail. Ainsi avaient agi les patriarches, Isaac en particulier, ce grand creuseur de puits, ce grand chercheur d’eau vive. Il savait que, sans cette eau vive, ni hommes, ni brebis ne pouvaient subsister — image frappante de la parole de Dieu que l’ennemi cherche toujours à nous dérober (preuve en soient toutes les attaques qu’il dirige contre elle), comme jadis les Philistins bouchaient et remplissaient de sable les puits creusés par Abraham (Gen. 25:15).
Il nous est dit encore, chose bien rare dans l’Écriture, qu’Ozias «aimait la campagne». Il portait intérêt aux troupeaux et à leurs pâturages, aux laboureurs peinant pour récolter «le fruit précieux de la terre», le froment qui donne la nourriture et la force, aux vignerons travaillant pour apporter la joie au coeur de l’homme «accablé de maux».
Toute cette activité n’empêchait point les soins constants du roi pour son armée, pour le perfectionnement des armes offensives, et, à Jérusalem, des machines de défense (v. 11-15).
Une telle sollicitude pour toutes les branches du gouvernement et de l’administration, une telle science d’organisation ne se rencontrent guère dans l’histoire des rois, sauf dans celle de Salomon. C’est ainsi que, malgré le contraste douloureux entre le présent et le passé du royaume, malgré sa division et son abaissement, malgré ses ennemis du dedans et du dehors, l’Éternel se plaisait à ébaucher de nouveau l’histoire du roi de ses conseils, afin de montrer que la ruine ne l’empêchait pas de faire monter «devant lui comme un rejeton, et comme une racine sortant d’une terre aride» (Ésaïe 53:2). Le Seigneur était avec Ozias : «Son renom s’étendit au loin ; car il fut merveilleusement aidé jusqu’à ce qu’il devint fort» (v. 15).
Jusqu’ici, pas une tare, pas une faiblesse n’est signalée dans la vie de ce roi ; (le livre des Rois qui a un tout autre but en mentionne). S’il continuait ainsi, le Libérateur d’Israël était enfin trouvé ! Hélas ! l’heure du naufrage venait de sonner ! «Quand il fut devenu fort, son coeur s’éleva jusqu’à le perdre» (v. 16). L’orgueil d’Ozias s’alimenta des bénédictions reçues et il s’éleva contre Celui même auquel il devait son élévation. Usurpant le droit qui appartenait aux seuls sacrificateurs de faire fumer l’encens sur l’autel d’or, il entra dans le temple de l’Éternel, où ne pénétraient que ceux qui avaient été sanctifiés pour y exercer les fonctions sacerdotales. Lors de la révolte de Coré (Nomb. 16:36-40), les encensoirs d’airain de tous ceux qui avaient conspiré contre Moïse, avaient été martelés pour en plaquer l’autel d’airain ; figure indiquant, d’une manière frappante, que les prétentions de l’homme naturel à faire agréer son offrande devant Dieu n’ayant d’autre place que l’autel du sacrifice pour le péché, doivent être cloués à la croix de Christ. Une seule offrande, une seule intercession, étaient valables en elles-mêmes, sans avoir besoin d’expiation, une seule était reconnue comme efficace, celle d’Aaron avec son encensoir (Nomb. 16:47). Les sacrificateurs — et nous-mêmes — ne pouvaient être consacrés à Dieu et remplir le rôle d’intercesseurs qu’en vertu du sacrifice et du sang porté sur le propitiatoire (Lév. 8:24-28). Notre souverain sacrificateur intercède en vertu de sa perfection personnelle, et cependant il ne revêt cet office sacerdotal qu’à la suite de sa mort et de sa résurrection. Il en est de la louange comme de l’intercession : elle appartenait aux sacrificateurs seuls et le souverain sacrificateur en était le chef. Cela aussi s’applique à nous, chrétiens. En vertu de la rédemption nous sommes une famille sacerdotale et aucune personne étrangère à cette famille, fût-elle même un roi Ozias, ne peut prendre notre place dans le culte rendu à Dieu. Tout cela semble avoir été sans importance pour le roi aveuglé par son orgueil. Avait-il puisé l’idée de son acte profane dans ce que faisait son père, quand il brûlait de l’encens aux dieux d’Édom ? (25:14).
Les sacrificateurs ne pouvaient que s’opposer à un tel acte. Eux avaient été sanctifiés, placés sous l’aspersion du sang versé à l’autel d’airain, oints de l’huile de l’onction, pour se présenter devant Dieu comme adorateurs et intercesseurs. N’en est-il pas de même pour nous, chrétiens ? Purifiés de tout péché par le sang de la croix, oints du Saint Esprit de la promesse, mis à part pour Dieu, nous pouvons nous présenter dans le sanctuaire pour adorer, ayant nos coupes d’or pleines de parfum, qui sont les prières des saints.
Ozias, repris par les sacrificateurs, s’emporte. En y regardant de près, on trouve chez lui, chez ses prédécesseurs et leurs conseillers, une certaine jalousie contre la sacrificature selon Dieu, source de toute sorte de mauvaises actions (Voyez 24:17-22 ; 25:14). Il ne peut convenir à l’homme dans la chair d’être exclu de la présence de Dieu et de son culte, et de ne pouvoir former quelque anneau d’une chaîne qui puisse relier à Dieu la créature déchue. De là vient l’animosité du monde religieux contre les enfants de Dieu qui ne peuvent ni partager, ni reconnaître ce qu’il appelle son culte.
À cause de cette transgression un jugement immédiat tombe sur Ozias. Semblable à Marie, soeur d’Aaron qui, étant prophétesse, avait voulu s’égaler à celui qui était roi en Jeshurun et prophète plus que nul autre ; — semblable à Guéhazi qui, méprisant la gloire de Dieu et de son prophète, fut atteint de la souillure dont un Gentil avait été guéri ; — semblable à Joab, outrageant l’Éternel par le meurtre d’Abner et voyant la lèpre s’attacher à sa famille pour ne plus la quitter (Nomb. 12:10 ; 2 Sam. 3:29 ; 2 Rois 5:27), le roi est frappé de lèpre pour avoir méconnu la sainteté de Dieu. Lui-même, avec le vain remords de son acte et la conscience de son impureté se hâte de sortir de la présence de l’Éternel, sous le châtiment qui lui est infligé. Il n’y a pas de rémission pour lui, comme il y en eut pour Marie ; le roi, désigné pour accomplir les conseils de Dieu, est déclaré impur à jamais, banni de sa présence, exclu de sa maison, séparé de ce peuple sur lequel il avait été sacré roi, dans une maison d’isolement, incapable de gouverner, un mort-vivant, obligé de conférer le gouvernement à son fils Jotham (verset 21).
La malédiction divine repose sur cet homme qui, au début de son règne, avait fait ce qui était droit aux yeux de l’Éternel et l’avait recherché jusqu’au jour où il s’éleva. Il est même privé du tombeau des rois, ses pères ; il est enterré dans le champ de leur sépulture, mais non dans leur sépulcre. Souveraine expression du déplaisir de Dieu ; même dans leur mort ces rois, comme Joram, comme Joas, sont privés des honneurs de la sépulture.
L’année de la mort d’Ozias, Ésaïe, le prophète, eut une vision. Devant le Seigneur, assis sur un trône haut et élevé, les pans de sa robe remplissant le temple, cet homme de Dieu dit : «Malheur à moi ! car je suis perdu ; car moi, je suis un homme aux lèvres impures, et je demeure au milieu d’un peuple aux lèvres impures ; car mes yeux ont vu le roi, l’Éternel des armées» (Ésaïe 6:5). Ce n’était pas seulement Ozias qui était impur et souillé devant l’Éternel ; c’était aussi le prophète. Ésaïe voit la gloire de Christ (Jean 12:41), le vrai, seul roi des conseils de Dieu qui ne soit pas même effleuré par la souillure, le seul aussi dont la présence juge toute souillure : devant lui le prophète accepte le jugement, et mieux encore, le prononce sur lui-même. De plus il passe condamnation sur l’état du peuple, de ce peuple aux lèvres impures au milieu duquel il habite. Ainsi tout était perdu, du côté de la royauté, du peuple et du prophète. Le septième malheur (voyez les six premiers au chap. 5), plénitude de la malédiction était prononcée ! Que reste-t-il ?
Il reste ce que tout récit des Chroniques a pour but de faire ressortir. D’abord le roi, le vrai roi, l’Éternel des armées, qui résume en lui-même toutes les perfections du royaume futur, et dans lequel sont accomplis tous les conseils de Dieu — ensuite la grâce ; la grâce ayant pour base le sacrifice de la Victime consumée sur l’autel de Dieu. Ainsi, l’iniquité du prophète était ôtée et la propitiation était faite pour son péché (v. 7). Il semble qu’avec l’histoire d’Ozias cette grande vérité soit mise particulièrement en lumière : La grâce, basée sur le sacrifice, est la seule ressource du meilleur des rois, du plus grand des prophètes.
L’énoncé de cette vérité nous porte à remarquer que les jugements prononcés sur les rois dans ce livre, n’impliquent point nécessairement leur sort futur et éternel. Ce qui nous est montré dans les Chroniques c’est le gouvernement de Dieu quant à la terre et ses conseils quant à la royauté terrestre, mais nullement ses conseils quant à la gloire céleste de Christ et aux bénédictions éternelles qui sont la part des élus. Un roi frappé de lèpre, chassé de la présence de Dieu, exclu des sépulcres des rois, a perdu tout droit aux privilèges du royaume sur la terre, mais la grâce de Dieu, quant au ciel, n’est pas anéantie par ces jugements. Nous en rencontrons de nombreux exemples, à commencer par de lui de Salomon, tel que le livre des Rois nous le présente. Cette remarque est importante pour garder nos pensées dans les limites que la Parole leur assigne et pour les empêcher d’opposer l’une à l’autre des vérités qui, sorties de leur place, cesseraient d’être des vérités. Il est parfaitement vrai que tel roi idolâtre et meurtrier peut être perdu éternellement, mais il est tout aussi vrai que tel autre roi, fidèle d’abord, puis devenu transgresseur, et jugé sévèrement ici-bas, peut être sauvé comme à travers le feu. En toutes choses nous sommes appelés à ne pas confondre les vérités que la parole de Dieu nous présente, et cela est doublement nécessaire quand nous avons à faire à l’Ancien Testament qui nous présente la responsabilité de l’homme et les résultats du gouvernement de Dieu ici-bas.
Dans ce chapitre, Jotham est personnellement sans reproche : «Il fit ce qui est droit aux yeux de l’Éternel, selon tout ce qu’avait fait Ozias, son père ; seulement il n’entra pas dans le temple de l’Éternel» (v. 2). La Parole compare son règne au début de celui d’Ozias qui fut «si merveilleusement aidé» ; il en différa en ce qu’il n’imita pas l’orgueil de son père qui voulut usurper la place de la sainte sacrificature dans le temple. Ozias avait commencé sa carrière en prenant garde à la parole prophétique, et avait prospéré, mais avait abandonné la Parole, lorsque dans sa prospérité il avait pris confiance en lui-même et s’était enorgueilli. Jotham fut attentif aux conséquences de la conduite de son père et se garda de suivre le même chemin. C’est une grande bénédiction d’avoir les yeux et les oreilles attentifs aux voies du Seigneur. En cela consiste proprement «la crainte de Dieu» et l’on peut dire que cette dernière caractérisa la vie de Jotham. Peut-être son père avait-il eu, par Zacharie, plus d’intelligence des visions de Dieu, était-il entré plus avant dans la connaissance de la révélation divine. Cependant, quelque précieuse que fût cette connaissance, elle n’avait pas mis Ozias à l’abri d’une chute très grave. Il est de toute importance pour nous de retenir cette vérité. Jotham évita soigneusement ce qui avait causé la ruine de son père, c’est-à-dire la désobéissance à la parole de Dieu que cependant il connaissait si bien ; il «régla ses voies devant l’Éternel, son Dieu» ; il marcha avec droiture, selon la parole du prophète Michée qui commença à prophétiser sous son règne : «L’Éternel est-il impatient ? Sont-ce là ses actes ? Mes paroles ne font-elles pas du bien à celui qui marche avec droiture ?» (Michée 2:7). Aussi nous est-il dit que «Jotham devint fort». Ozias, de même, au début de son règne, était «devenu extrêmement fort» (26:8). La force accompagne toujours l’obéissance ; mais elle devient un piège, quand nous la considérons comme notre force. C’est ce qui était arrivé à Ozias : «Il fut merveilleusement aidé jusqu’à ce qu’il devint fort» (26:15). À l’encontre d’Ozias, Jotham vit ses forces rester dans leur entier, parce qu’il «régla ses voies devant l’Éternel, son Dieu». «À celui qui règle sa voie, je ferai voir le salut de Dieu», est-il dit au Ps. 50. Régler sa voie, c’est la former sur un modèle invariable, comme on règle une montre sur un régulateur. Jotham régla sa voie d’après les pensées que Dieu avait exprimées quant à son Oint ; il chercha à ressembler à ce modèle, donné de Dieu, et y réussit. Comme d’habitude, ce qu’il pouvait y avoir de défectueux en lui quant au service de l’Éternel, ne nous est pas donné dans les Chroniques, mais le livre des Rois nous dit : «Seulement les hauts lieux ne furent pas ôtés ; le peuple sacrifiait encore et faisait fumer de l’encens sur les hauts lieux» (2 Rois 15:35). Sans doute Jotham, qui réglait ses voies, n’avait aucune communion avec les hauts lieux, mais il manquait de l’autorité nécessaire pour les interdire au peuple. Ici nous voyons clairement que si l’état moral du roi était bon, celui du peuple était mauvais : «Le peuple se corrompait encore» (v. 2), et nous voyons de même en 2 Rois 15 : «Le peuple sacrifiait encore sur les hauts lieux». C’était donc l’état du peuple qui attirait surtout le déplaisir et nécessitait la discipline du Seigneur. Le livre de Michée, ainsi que le Ps. 50, déjà cité, exposent cela tout au long. C’est l’état du peuple qui est en question dans le prophète, et non celui du roi. Michée commence à prophétiser sous Jotham et nous parle du peuple, de ses principaux — chefs et princes — de ses prophètes, sans même mentionner le roi. Lisez Michée 1:9 ; 2:2, 3, 8-10 ; 3:1-2, 5-12 ; 6:2-5 ; 7:2, 3, 18 ; partout vous trouvez l’état du peuple, présenté comme cause principale du jugement. Ce sera désormais ce qui caractérisera la prophétie jusqu’à la fin. Elle s’adressera au peuple et mettra à nu son état. Jusqu’ici tous les prophètes, si nombreux, mentionnés dans les Chroniques, s’adressent au roi ; mais quand la prophétie, prononcée sous les rois, est écrite et n’est plus parlée, elle nous présente l’état du peuple même et des pouvoirs qui le constituent. En ce jour-là, le peuple n’était plus excusable. En présence de la piété et de la marche fidèle de Jotham, sa conscience n’aurait-elle pas dû parler ? C’est le contraire qui a lieu.
La piété de Jotham se manifeste d’une manière bien intéressante dans la défense de la maison de Dieu. Ozias (26:9) avait bâti des tours pour protéger la ville, Jotham, pour protéger le temple. «Ce fut lui qui bâtit la porte supérieure de la maison de l’Éternel ; et il fit beaucoup de constructions sur la muraille d’Ophel» (v. 3). Ophel, situé au sud-ouest de Jérusalem, mettait les jardins du roi, etc., en rapport avec le temple. Jotham compléta les travaux de défense qu’Ozias avait négligés : «Il bâtit des villes dans la montagne de Juda, et il bâtit dans les forêts des châteaux et des tours» (v. 4). Enfin il fit la guerre contre le roi des fils d’Ammon qui, sans doute (cf. 26:8), refusait de reconnaître la suzeraineté de Juda. Durant trois années, à la suite de la victoire de Jotham, il lui payèrent un lourd tribut. Sa force provenait de sa piété, et cette dernière lui était assez précieuse pour lui défendre de s’élever.
Les Chroniques omettent intentionnellement un fait, rapporté en 2 Rois 15:37 : «En ces jours-là, l’Éternel commença d’envoyer contre Juda Retsin, roi de Syrie, et Pékakh, fils de Remalia». Ce dernier fait est mis en connexion avec le péché de Juda ; c’est contre lui que Dieu envoie ces ennemis, et non contre Jotham ; mais, dans les Chroniques, la beauté de ce règne aurait été affaiblie si l’agression d’Israël et de la Syrie avait pu être interprétée comme due à quelque infidélité du roi. Au milieu des ruines de la royauté en Juda, le coeur s’épanouit devant l’exemple de Jotham. Imitons-le, et réglons nos voies devant notre Dieu !
Le règne d’Achaz est particulièrement mauvais en ce qui concerne ses relations avec l’Éternel, et n’oublions pas que ces relations sont le point essentiel, unique même, de tout bon règne en Juda. On ne peut assez insister sur le fait qu’Israël, bien différent en cela des autres nations, n’avait ni destinée, ni raison d’être, à part du culte du vrai Dieu, et cela nous explique le rôle si prépondérant de l’élément religieux et sacerdotal dans l’histoire de la royauté, telle que les Chroniques nous la présentent. Lorsque le roi, représentant responsable du peuple devant Dieu, était fidèle, le temple, la sacrificature, l’observation du culte et des fêtes, caractérisaient son règne avant toute autre chose ; quand il ne maintenait pas le culte de l’Éternel et tombait dans l’idolâtrie, il était responsable de la déchéance nationale qui en était la suite et des jugements de Dieu contre le peuple.
Cependant nous venons aussi de voir que, sous le règne de Jotham, le peuple, en dépit de la fidélité du roi, se corrompait toujours plus, ce qui justifie la sentence prononcée contre lui et ses conducteurs par tous les prophètes qui se succédèrent dès cette époque.
Le rétablissement du culte en Juda, comme son abandon, avait donc une importance capitale. Abandonné, il rabaissait Juda au niveau des nations idolâtres et le livrait aux mêmes jugements ; rétabli, il attirait de nouveau la faveur de Dieu sur ce pauvre peuple alors même qu’il marchait si rapidement à la ruine.
Dès le début, les rois d’Israël avaient abandonné le culte du vrai Dieu pour établir des idoles nationales, aussi les jugements de Dieu qui les avaient atteints depuis le commencement étaient à la veille de devenir définitifs. Juda allait-il subir le même sort ? Sans aucun doute, car Dieu n’a pas deux poids et deux mesures ; mais un seul fait restait encore en faveur de Juda, c’est que Dieu avait des desseins à son égard, qu’il avait aimé et choisi Jérusalem pour être le siège de la royauté et un fils de David pour l’exercer. Or ce n’était pas autre chose que la grâce, sans laquelle, comme nous l’avons dit souvent, rien ne pouvait subsister, mais aussi que Dieu ne pouvait cesser d’exercer sans se renier lui-même. Cela seul nous fait comprendre ces alternatives de jugement où tout semble perdu, de restauration, où tout semble retrouvé, et qui caractérisent la période de la fin. L’histoire d’Achaz nous fournit un exemple solennel de la première alternative.
Son histoire diffère sensiblement de celle du second livre des Rois, sauf que le rôle d’Achaz est odieux dans l’un comme dans l’autre récit. Loin d’atténuer son idolâtrie, les Chroniques en aggravent encore le récit, en nous disant : «Même il fit des images de fonte pour les Baals ; et il fit fumer de l’encens dans la vallée du fils de Hinnom» (v. 2-3). L’abominable culte de Moloch qui exigeait des sacrifices humains, le fait qu’il sacrifiait lui-même sur les hauts lieux, servent de prélude à ce mauvais règne.
Le passage contenu entre les v. 5 et 15 de notre chapitre diffère du récit de 2 Rois 16. Dans ce dernier, Jérusalem assiégée par Retsin, roi de Syrie, et Pékakh, roi d’Israël, est préservée de l’entrée de ces princes alliés. Les Chroniques se taisent sur cette délivrance, ainsi que sur la prise d’Élath par Retsin, ville recouvrée jadis par Amatsia (26:2), et si importante pour la puissance maritime de Juda. Le récit des Chroniques nous apprend, par contre, qu’un grand nombre des captifs de Juda tombèrent aux mains de Retsin qui les emmena à Damas. Dès ce moment il ne nous est plus parlé de ces captifs, mais nous pouvons conclure, d’après les paroles d’Ézéchias (29:9), que Tiglath Piléser, roi d’Assyrie, après s’être emparé de Damas, ne les rendit pas à Achaz, lorsque ce dernier descendit à Damas pour le voir. Tiglath Piléser «le traita en ennemi», nous dit le v. 20.
La défaite infligée à Juda par Pékakh, roi d’Israël, eut une toute autre gravité. En un jour Pékakh tua cent vingt mille hommes de Juda, propres à la guerre, «car ils avaient abandonné l’Éternel, le Dieu de leurs pères». Le jugement de Dieu n’est donc plus seulement, comme nous l’avons dit, la conséquence de l’infidélité du roi, mais de celle du peuple lors du règne du fidèle Jotham. Un fils du roi et un prince destiné à la régence du royaume sont pris et massacrés ; deux cent mille captifs, tant hommes que femmes, sont emmenés par Israël avec un grand butin. Le royaume de Juda, si éprouvé, frappé de tant de coups, semble définitivement effondré. Cependant, malgré tout, Dieu ne permet pas que le fils de Tabeël soit substitué à la vraie descendance de David, comme les princes alliés en avaient l’intention (voyez Ésaïe 7:6), car Dieu ne peut être infidèle à ses propres promesses.
Mais voici qu’un prophète se lève en Israël, chose bien rare depuis Élisée, et particulièrement en des jours où déjà les dix tribus étaient abandonnées de Dieu. Au moment où les prophètes qui si souvent s’adressaient de vive voix aux rois de Juda, se taisent, la voix d’Oded se fait entendre en Israël (v. 9). C’est que le Seigneur n’avait pas encore décrété l’anéantissement de la royauté de Juda, et voulait encore préserver pour un moment une partie de ce peuple coupable. Quand il ne peut plus faire entendre la voix des prophètes en Juda, il en envoie un à Israël en faveur de Juda. Quelle grâce pour ce peuple dont l’état devait attirer la vengeance céleste !
Oded montre à son peuple que sa victoire n’est que le résultat du courroux de Dieu contre Juda, mais qu’Israël l’avait massacré «avec une rage qui était parvenue jusqu’aux cieux» ; et maintenant Israël voulait «s’assujettir comme serviteurs et servantes les fils de Juda et de Jérusalem !» Oded proclame devant tous que le centre divin du gouvernement est en Juda et revendique le choix de cette tribu par l’Éternel. Si un prophète d’Israël disait ces choses, quelle n’aurait pas dû être l’humiliation des dix tribus ! «N’avez-vous pas avec vous», leur dit-il, «ne concernant que vous, des péchés contre l’Éternel, votre Dieu ?» (v. 10). En effet, Éphraïm avait, dans ces choses, une part qui ne concernait que lui. À cause de ses péchés, «l’ardeur de la colère de l’Éternel était sur lui» ; c’était à quoi il devait prendre garde. Si ceux d’Israël étaient la verge de Dieu pour punir leurs frères, étaient-ils moins coupables parce que leurs frères avaient mérité ce jugement ?
Cet appel d’Oded ne manque pas d’actualité pour nous-mêmes. Quand surgissent entre chrétiens des conflits et des divisions, conséquence humiliante de leur péché, la guerre qui s’allume entre eux est un jugement sévère qui les atteint. Mais est-il moins sévère pour le parti qui succombe que pour celui qui triomphe ? Ce dernier a-t-il, étant vainqueur, davantage l’approbation de Dieu que son adversaire ? Nullement. La colère de l’Éternel repose également dans ce conflit, sur les victorieux et sur les vaincus. «N’avez-vous pas avec vous, ne concernant que vous, des péchés contre l’Éternel, votre Dieu ?»
«Et maintenant, écoutez-moi», ajoute Oded : «Renvoyez les captifs que vous avez emmenés captifs d’entre vos frères» (v. 11). Il ne fallait pas, souvenons-nous-en, que cette victoire fût d’aucun profit pour Israël. Hommes, femmes, et tout le butin devaient être renvoyés. Le peuple ne devait pas même avoir la pensée que, s’il était vainqueur, sa cause était juste. S’il avait été l’épée de l’Éternel contre Juda et l’avait maniée avec rage, il devait se souvenir que cette même épée était dirigée maintenant contre lui.
Quatre hommes d’entre les chefs d’Éphraïm acceptent par la foi les paroles du prophète. Elles agissent sur leur conscience et les rendent capables de parler au peuple avec une entière conviction, car ils reconnaissent avoir part, eux-mêmes, au péché, à la faute, au crime de tous. Ils se lèvent contre ceux qui viennent de l’armée et leur disent : «Vous ne ferez point entrer ici les captifs, car, pour notre culpabilité devant l’Éternel, vous pensez ajouter à nos péchés et à notre crime ; car notre crime est grand, et l’ardeur de la colère est sur Israël» (v. 13). Les paroles d’Oded : «L’ardeur de la colère de l’Éternel est sur vous», produisent une telle impression sur la conscience de ces quatre hommes fidèles, qu’ils les répètent : «L’ardeur de la colère de l’Éternel est sur Israël». Dieu parle par leur bouche, parce que la Parole a d’abord exercé son autorité sur leur conscience, et elle possède une puissance de conviction qui soumet les âmes. Quelque impuissants que soient en apparence les quatre instruments dont elle se sert, Dieu a le dessus ; ces hommes sont écoutés ; le peuple laisse à elle-même cette multitude de captifs sans ressources, exténués, et qui avaient perdu tous leurs biens.
Mais là ne s’arrête pas l’énergie de la foi chez les quatre qui avaient exhorté leurs frères. Eux seuls achèvent la tâche, eux seuls sont honorés par le plein résultat de leur oeuvre. La Parole insiste là-dessus : «Ces hommes qui ont été nommés par leur nom se levèrent». Ils prennent les captifs, donnent des vêtements à tous ceux qui sont nus, emploient pour eux ce qui se trouve dans le butin, les chaussent, les font manger et boire, les oignent d’huile. Quelle sollicitude ! Qui a pu disposer ces quatre hommes à une telle tâche ? Le changement opéré dans leurs coeurs par la parole de Dieu ! Chez eux, trois choses se succèdent d’une manière admirable : la foi en la Parole, la repentance qu’elle produit, enfin l’amour, inséparable de l’oeuvre de Dieu dans le coeur, l’amour pour les coupables, l’amour pour nos frères. C’est ainsi qu’ils accomplissent l’oeuvre de la grâce envers d’autres. Demandons-nous si à ce moment-là, une telle foi, un tel dévouement, une telle énergie, se seraient trouvés en Juda ? Sans hésiter nous pouvons répondre par la négative. Israël était déjà voué au jugement final et, à cet instant suprême, la parole de Dieu retentit au milieu de ce troupeau que l’on va conduire à l’abattoir. Quatre hommes écoutent ; quatre justes sont trouvés, bien moins nombreux que les yeux d’Abraham n’en discernaient à Sodome, et leur foi sauve Israël de la destruction immédiate déjà décrétée sur ce peuple par la colère de Dieu !
L’oeuvre de ces hommes n’est pas terminée ; il leur faut encore ramener tous ces malheureux dans leur pays pour les mettre à l’abri. Jéricho, jadis ville de malédiction, aujourd’hui la ville des palmiers, la ville de la protection paisible, Jéricho, dont les eaux mauvaises avaient été jadis assainies par le prophète, devient leur refuge. Ce n’est qu’après les avoir amenés sous la protection de leur Dieu, que ces quatre hommes les quittent pour retourner à Samarie. Alors seulement leur mission est accomplie.
Suivons l’exemple de ces hommes et marchons dans le même chemin, par la foi, dans le jugement de nous-mêmes, ne craignant pas d’annoncer au monde religieux qui nous entoure le sort qui lui est réservé, dévoués sans lassitude et sans restriction à tous les misérables, remplis de cette énergie d’amour qui n’est satisfaite que lorsqu’elle a amené les âmes sous la protection du Sauveur, dans l’heureuse sécurité des enfants de Dieu !
Vers ce temps-là et devant l’envahissement de Juda par Pékakh et Retsin, Achaz fit appel à l’Assyrie, ce qui lui fit refuser hypocritement la proposition d’Ésaïe de demander un signe à l’Éternel (Ésaïe 7:10-12). Son parti était pris, son plan dressé ; décidément il avait confiance en l’homme et aucune confiance en Dieu. Pauvre Achaz ! il eut beau enrichir l’Assyrien, pour se le concilier, de tous les trésors du roi, de ses chefs, et de la maison de l’Éternel ; s’appauvrissant pour gagner la protection de Tiglath-Pilézer, il n’en retira rien. Ce dernier «vint contre lui, et le traita en ennemi et ne le fortifia pas» ; «il ne lui fut d’aucune aide» (v. 20, 21).
Si vous cherchez le secours et l’appui du monde, au lieu de vous confier en Dieu, vous qui vous vantez de porter le nom de Christ et qu’Il a enrichis de tant de privilèges, vous y trouverez ce que trouva Achaz. Et ce misérable, non content de chercher un tel appui, substitua les dieux de Syrie au vrai Dieu, disant : «Puisque les dieux des rois de Syrie leur sont en aide, je leur sacrifierai, et ils me seront en aide» (v. 23) ; il abandonna l’humble autel de Dieu, l’autel de l’expiation, pour le remplacer par le somptueux autel des dieux de Damas ; il tint pour rien les ustensiles du sanctuaire, les brisa et les détruisit ; enfin, chose inouïe, il ferma les portes de la maison de l’Éternel, comme on ferme la porte d’une maison inhabitée ou mise en location, abolissant du même coup le culte et la sacrificature, et interdisant au peuple l’accès jusqu’à Dieu. La conduite d’Achaz s’appelle l’apostasie, le plus complet abandon du Dieu d’Israël.
Dieu le supprime ; il meurt, «mais on ne le mit pas dans les sépulcres des rois d’Israël» (v. 27). Il semble, et nous y reviendrons, que ce soit la sentence définitive, jusque dans la mort, par laquelle Dieu montre sa réprobation finale.
Ce chapitre et les suivants font ressortir le caractère des Chroniques, comparé à celui du livre des Rois. Ce dernier, en effet, ne parle pas du rétablissement du culte, de la purification du temple, de la réorganisation de la sacrificature lévitique ; les Chroniques, au contraire, les présentent comme seule condition selon laquelle la royauté des fils de David, et Juda même, comme peuple, pouvaient subsister. Aussi, dans les Chroniques, le jugement est arrêté ou suspendu, à chaque rétablissement du culte, même après que le règne d’Achaz semble avoir enlevé à la grâce toute possibilité de continuer ses voies envers Juda et la maison de David.
De ce qui est contenu entre le v. 3 du chap. 29 et le v. 19 du chap. 31 nous ne trouvons pas un seul mot dans le livre des Rois. Ce dernier s’étend, beaucoup plus que les Chroniques, sur les attaques du roi d’Assyrie qui, dans le livre des Rois, ont une portée considérable au point de vue prophétique. Un trait plus saillant encore, c’est que les Chroniques n’ont pas un seul mot sur la prise de Samarie par Shalmanéser et la transportation des dix tribus à Kholakh, en un mot, sur la réjection définitive d’Éphraïm. Que pouvait-il, en effet, en être dit ici ? Dès le début, l’histoire des dix tribus avait été caractérisée par l’abandon des relations avec Dieu et de son culte pour y substituer des idoles ; selon le principe des Chroniques, cet état de choses était, dès son origine, condamné sans rémission. Pas un seul moment Dieu n’avait pu dire d’Israël ce qu’il disait de Juda : «Il y avait en Juda de bonnes choses».
Le règne d’Ézéchias n’est donc pas opposé ici à l’état du royaume d’Israël, d’autant plus que, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, on trouvait, pendant le règne d’Achaz, plus de foi et d’obéissance en Israël qu’en Juda. Dieu fait ressortir ici le contraste entre le règne d’Ézéchias et celui d’Achaz. Si la grâce de Dieu n’avait eu en vue ses promesses et leur accomplissement dans l’avenir, c’en était fait de Juda à ce moment-là. Le culte de l’Éternel aboli, les portes du temple fermées, ôtaient à Juda toute raison de subsister comme peuple de Dieu ; Ézéchias est suscité : aussitôt tout change. Aux profondes ténèbres succède tout à coup la lumière qui rayonne du sanctuaire par ses portes ouvertes : «La première année de son règne, au premier mois, Ézéchias ouvrit les portes de la maison de l’Éternel, et les répara» (v. 3). Alors il assembla les sacrificateurs et les lévites, et lui, dont le père avait commis ces abominations, sans enfreindre le commandement : «Honore ton père», confessa hautement le péché commis : «Nos pères ont été infidèles, et ont fait ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, notre Dieu, et l’ont abandonné, et ont détourné leurs faces de la demeure de l’Éternel, et lui ont tourné le dos» (v. 6). Ce reniement de Dieu avait eu pour conséquences la colère, la destruction, l’épée, la captivité (v. 8-9), mais combien devait être terrible l’état qui avait nécessité de pareils jugements ! «Ils ont fermé les portes du portique» : Plus d’entrée en la présence de Dieu pour lui rendre culte ! «Ils ont éteint les lampes» : Nuit profonde là où les sept lampes de l’Esprit auraient dû répandre leur pleine lumière. «Ils n’ont pas fait fumer l’encens» : Plus d’intercession devant l’autel d’or ou devant le propitiatoire. «Ils n’ont pas offert l’holocauste dans le lieu saint au Dieu d’Israël» : Plus d’offrande sur l’autel d’airain pour rendre agréé celui qui s’approchait de Dieu. C’était en un mot l’abolition de tout le culte d’Israël !
Et il y avait plus encore : Le sanctuaire lui-même, la demeure de Dieu au milieu de son peuple, était souillé (v. 15-17). Il avait donc fallu que l’Éternel qui patientait encore avant que sa gloire quittât toutes ces abominations, habitât au milieu de la souillure ! Ah ! combien Satan avait habilement réussi dans ses desseins ! Bannir Dieu de devant les yeux du peuple — supprimer le peuple aux yeux de Dieu qui ne pouvait tolérer une nation impure et idolâtre, — ôter l’autel de l’expiation, seul moyen de renouer le lien avec l’Éternel, — enlever au Messie futur sa gloire comme fils de David — l’Ennemi semblait avoir définitivement atteint tout cela. Mais ce dernier est encore une fois trompé dans son attente, comme il le sera toujours. Le Créateur de toutes choses montre qu’il peut aussi créer des coeurs pour Sa gloire. Sa grâce se met à l’oeuvre et produit Ézéchias. Quel zèle le Saint Esprit allume dans le coeur de cet homme de Dieu ! Sans perdre un seul jour il entreprend son travail de purification et l’achève au seizième jour du mois. La première condition de ce travail était de se sanctifier soi-même. C’est ce que firent les lévites, les sacrificateurs et les employés du sanctuaire. En effet, comment pouvaient-ils purifier quoi que ce soit s’ils étaient eux-mêmes souillés ? Cette oeuvre exigeait un soin minutieux : aucune impureté, même la plus petite, ne pouvait être tolérée : il fallait que les sacrificateurs pussent dire : «Nous avons purifié toute la maison de l’Éternel». Tous les ustensiles devaient être en état, et tout ce qu’Achaz avait rejeté pendant son coupable règne devait être sanctifié et placé devant l’autel, car l’eau ne suffisait pas, quoiqu’elle soit inséparable du sang de la victime, c’est-à-dire la purification inséparable de l’expiation.
Après la purification du sanctuaire on trouve le sacrifice pour le péché (v. 20-30). Il est offert : 1° pour le royaume ; 2° pour le sanctuaire ; 3° pour Juda. La substance même de cette purification était l’aspersion du sang, et il en est de même pour nous : «Le sang de Jésus Christ son Fils nous purifie de tout péché». Cette aspersion est faite sur l’autel d’airain, seul lieu où Dieu et le pécheur se rencontrent, où Dieu puisse, du même coup, juger et abolir le péché. La purification s’étend, selon le désir et la pensée du roi, bien au-delà des limites de Juda, «car le roi avait dit que l’holocauste et le sacrifice pour le péché seraient pour tout Israël» (v. 24). Ézéchias est le premier roi, depuis la division du royaume, qui désire que tout Israël purifié monte à Jérusalem pour y adorer. Si la déportation des dix tribus avait eu lieu à ce moment-là, leurs misérables restes auraient attiré de même la sympathie du coeur d’Ézéchias. Il avait le désir de voir Israël se reformer en unité autour du sanctuaire, pour venir adorer Dieu à Jérusalem et en cela il représentait le caractère futur du roi des conseils de Dieu.
La propitiation accomplie, il est possible d’offrir la louange à l’Éternel. Elle est rendue «selon le commandement de David, et de Gad, le voyant du roi, et de Nathan, le prophète» ; seulement il est ajouté que «le commandement était de la part de l’Éternel par ses prophètes» (v. 25). Toujours, dans cette période de l’histoire d’Israël, la prophétie occupe la première place pour diriger le peuple. Ensuite «les instruments de David»sont employés et les «trompettes des sacrificateurs», annonçant une ère nouvelle, retentissent au moment où commence l’holocauste. L’holocauste était l’offrande, dans la bonne odeur de laquelle on était accepté et rendu agréable à Dieu. Comment, dans ce moment même, les instruments de la louange n’auraient-ils pas retenti tous ensemble ? Le roi et ceux qui sont avec lui, se prosternent, remplis de joie et ordonnent aux lévites de «louer l’Éternel avec les paroles de David et d’Asaph, le voyant». En toutes choses on constate ici un retour strict à la parole inspirée de Dieu.
Le sanctuaire, le royaume, la sacrificature, Juda, tout Israël, ayant été purifiés par le sang du sacrifice, et désormais consacrés à l’Éternel (v. 31 ; cf. Ex. 28:41), Ézéchias les engage à s’approcher. On assiste presque à la scène décrite en Hébr. 10:19-22, et qui est l’heureux résumé de toute l’épître. Tous ces adorateurs sont acceptés de Dieu selon la valeur de l’holocauste ; seulement on voit ici combien ce service était défectueux et précisément du côté où l’on était en droit de l’attendre complet. Les sacrificateurs se trouvent être en petit nombre et les lévites doivent les remplacer pour écorcher les holocaustes, «car les lévites furent plus droits de coeur que les sacrificateurs pour se sanctifier» (v. 34). Ce fut précisément le contraire qui arriva, dans les livres d’Esdras et de Néhémie ; là, les lévites manquaient. De toute manière, que ce fût l’un ou l’autre, c’était un grand mal et qui peut facilement s’appliquer au christianisme actuel. Ou bien les adorateurs — les sacrificateurs — sont en tout petit nombre et la conséquence en est que les ministères — les lévites — occupent leur place et remplissent des fonctions qui, proprement, ne leur appartiennent pas ; ou bien, quand il y a quelque intelligence du culte, les adorateurs sont en grand nombre, tandis que les ministères montrent beaucoup d’indifférence à s’acquitter de leur tâche.
«Et le service de la maison de l’Éternel fut rétabli. Et Ézéchias et tout le peuple se réjouirent de ce que Dieu avait disposé le peuple ; car la chose fut faite soudainement» (v. 36). Ainsi, selon le précieux enseignement des Chroniques, c’était la grâce toute seule qui, par la puissante action du Saint Esprit avait préparé le roi et agi dans le coeur du peuple pour produire cette restauration.
La piété rend toujours intelligent. L’âme qui va boire à la source et jouit de la communion avec le Seigneur, ne peut être embarrassée de savoir ce qui Lui convient et quelle est la conduite qui le glorifie. Tout cela paraît clairement dans le cas d’Ézéchias. Il semblait bien difficile, au milieu des circonstances d’alors, de connaître le chemin à suivre : Le royaume divisé ; Éphraïm idolâtre et les deux tribus et demie au-delà du Jourdain descendues au même niveau ; la transportation des dix tribus, fait accompli ; quelque pauvre grappillage restant encore en Israël ; Juda, purifié seulement d’hier de l’abominable idolâtrie d’Achaz.
Fallait-il s’accommoder de cet état de choses et accommoder sa conduite et celle du peuple à la misérable condition dans laquelle on se trouvait ? Non ; en vertu de la purification qui avait eu lieu, le peuple pouvait revenir aux choses qu’il avait connues et pratiquées au commencement. Quelle était la toute première de ces choses ? La Pâque, prélude de la fête des pains sans levain. Commémorer le sacrifice rédempteur était le premier pas de ce retour aux choses anciennes. «Depuis les jours de Salomon, fils de David, roi d’Israël, rien de semblable n’avait eu lieu à Jérusalem» (v. 26). Nous avons ici la preuve que l’on peut jouir des plus complètes bénédictions en des jours de ruine et alors même que, depuis Salomon, quand il y avait encore une prospérité relative, ces bénédictions avaient manqué.
Ézéchias comprit cela, mais il comprit aussi qu’il appartenait au peuple tout entier de se trouver présent à la célébration de la Pâque, car ce peuple était un et c’était pour un seul peuple que la Pâque avait été offerte. L’unité du peuple de Dieu n’existait plus aux yeux des hommes et cette vérité était restée complètement ensevelie pendant près de 250 ans. Le premier depuis Salomon, Ézéchias comprit qu’en dépit de toutes les apparences contraires, cette unité existait et qu’il était possible de la réaliser. Posons-nous la même question : L’unité de l’Église est-elle sans importance parce qu’elle n’est plus visible, dans son ensemble, comme témoignage devant le monde ? Au contraire, quand tout est définitivement ruiné, il est d’autant plus important de mettre en lumière les vérités qui étaient dès le commencement. L’unité du peuple de Dieu est une de ces vérités ; elle fait même partie des conseils de Dieu, selon lesquels l’Assemblée forme un seul corps avec le Christ glorifié dans le ciel. On comprend donc l’importance que la Pâque avait aux yeux d’Ézéchias. Elle était non seulement le mémorial de l’oeuvre qui avait mis le peuple à l’abri du jugement de Dieu et l’avait racheté d’Égypte, mais aussi le témoin que cette oeuvre avait été faite pour le peuple tout entier. Elle était aussi, et notre chapitre y insiste particulièrement, le point de départ de la fête des pains sans levain, symbole de la vie de sainteté pratique qui se lie à la rédemption. Toutes ces bénédictions étaient retrouvées dans la célébration de la Pâque sous Ézéchias, par le fait qu’il revenait aux choses instituées dès le commencement.
Cet état a-t-il duré ? Non, sans doute, et cela tenait à ce que le peuple, lié avec l’Éternel par l’alliance de la loi, se montra, comme toujours, incapable de garder les termes de son contrat. L’appel pressant, adressé au peuple par le roi, ne fut écouté qu’un instant. Il faudra une alliance nouvelle, basée sur la fidélité de Dieu seul pour que ces choses soient réalisées à toujours. Le récit que nous avons sous les yeux appartient encore à l’ancienne alliance, contrat bilatéral, mais dans lequel, comme nous l’avons vu tout le long des Chroniques, Dieu aime à déployer son caractère de grâce et de miséricorde, ne se détournant jamais de celui qui revient à Lui. L’exhortation des versets 6 à 9 est basée sur cette alliance légale, quoique non dépourvue de miséricorde. Ézéchias exerce proprement ici le ministère prophétique, que, depuis Salomon, nous avons vu à l’oeuvre, ministère qui contient une révélation partielle de la grâce de Dieu, bien faite pour toucher le coeur et atteindre la conscience du peuple : «Fils d’Israël, retournez à l’Éternel, le Dieu d’Abraham, d’Isaac, et d’Israël, et il reviendra au reste d’entre vous qui est échappé à la main des rois d’Assyrie. Et ne soyez pas comme vos pères et comme vos frères, qui ont péché contre l’Éternel, le Dieu de leurs pères, et il les a livrés à la destruction, comme vous le voyez. Maintenant ne roidissez pas votre cou, comme vos pères ; donnez la main à l’Éternel, et venez à son sanctuaire qu’il a sanctifié pour toujours, et servez l’Éternel, votre Dieu, afin que l’ardeur de sa colère se détourne de vous. Car si vous retournez à l’Éternel, vos frères et vos fils trouveront miséricorde devant ceux qui les ont emmenés captifs, et ils reviendront dans ce pays ; car L’Éternel, votre Dieu, fait grâce et est miséricordieux, et il ne détournera pas sa face de vous, si vous revenez à lui» (v. 6-9).
Combien tous ces appels sont touchants, en des jours où déjà le feu du jugement avait entamé le peuple de tous côtés. Il restait encore une ressource qui lui était indiquée : Voudrait-il la saisir ?
Remarquons en passant que, dans la chrétienté professante, l’Évangile prêché au monde ne va guère au-delà de l’appel que nous venons de citer, de ce que j’appellerais : l’évangile des prophètes. Un chrétien de cette catégorie disait devant moi à un mourant : «Le salut, c’est la main de l’homme qui saisit la main de Jésus Christ» (conf. v. 8). L’immense majorité des «Cantiques du réveil» ne dépasse pas cette limite.
Ce qui restait d’Éphraïm n’était plus qu’un résidu méprisable laissé dans le pays par le roi d’Assyrie, mais il y avait encore quelques grapillages à récolter dans la vigne d’Israël, et il suffisait de ces quelques-uns, unis aux restes de Juda, pour représenter l’unité du peuple avec les privilèges qui s’y rattachaient. Hélas ! combien leur état était peu satisfaisant ! Avaient-ils songé à se sanctifier pour célébrer la Pâque ? Même un grand nombre de sacrificateurs avaient négligé cela et «une grande partie du peuple, beaucoup de ceux d’Éphraïm, et de Manassé, et d’Issacar, et de Zabulon, ne s’étaient pas purifiés» (v. 18). Le mémorial ne pouvait être offert dans ces conditions par les sacrificateurs ; la fête des pains sans levain, figure d’une vie de sainteté pratique, ayant pour point de départ le sang de l’agneau pascal dont elle était inséparable, ne pouvait être célébrée par ceux qui gardaient de la souillure. Aussi cette cérémonie se ressentit de ces manquements ; elle ne fut célébrée que le second mois, selon Nomb. 9:11. Dieu avait pourvu d’avance dans sa Parole à un état aussi misérable, donnant ainsi à la sacrificature le temps de se sanctifier. Quant à la souillure du peuple qui célébrait la fête, Ézéchias intercéda et Dieu fut attentif à sa prière. N’est-ce pas profondément touchant ? Un commencement de plaie avait été la conséquence de cette désobéissance, quelque peu semblable à celle des Corinthiens qui «mangeaient et buvaient un jugement contre eux-mêmes» (1 Cor. 11:29-30), mais «Ézéchias pria pour le peuple, disant : Que l’Éternel, qui est bon, pardonne à tous ceux qui ont appliqué leur coeur à rechercher Dieu, l’Éternel, le Dieu de leurs pères, bien que ce ne soit pas conformément à la purification du sanctuaire. Et l’Éternel écouta Ézéchias et guérit le peuple» (v. 18-20).
Malgré cette purification incomplète, l’appel si pressant d’Ézéchias avait été entendu. «Des hommes d’Aser, et de Zabulon, et de Manassé s’humilièrent et vinrent à Jérusalem» (v. 11), toutefois, d’une manière générale, «quand les courriers passaient de ville en ville, dans le pays d’Éphraïm et de Manassé, et jusqu’à Zabulon, on se riait et on se raillait d’eux» (v. 10).
En est-il autrement dans les temps actuels où un jugement, bien plus terrible que celui d’Israël, est près de fondre sur la chrétienté ? Écrivez comme Ézéchias, envoyez partout votre message, disant : Le peuple de Dieu est un peuple ; qu’il se hâte de se rassembler pour rendre culte. Qu’il témoigne, autour de la table du Seigneur de cette unité formée par le Saint Esprit ; qu’il se purifie de tout mélange avec un monde souillé, et, quel que soit son abaissement, il pourra retrouver les bénédictions premières ! Pensez-vous que vous trouverez beaucoup d’âmes attentives, ou bien votre appel rencontrera-t-il plutôt l’indifférence, les railleries ou le mépris ?
Ce ne fut pas un motif de découragement pour Ézéchias. Il eut le bonheur de voir plusieurs des lévites, pris de honte, se sanctifier et prendre la place qu’ils n’auraient jamais dû se laisser enlever, «selon la loi de Moïse, homme de Dieu» (v. 16). Ainsi la parole de Dieu, telle qu’elle était révélée alors, devint leur règle pour le service de l’Éternel.
Mais que pensait-on en Israël de ces rêveurs qui, dans leurs utopies, voulaient reconstituer l’unité du peuple ? N’était-il pas plus raisonnable d’accepter les choses telles qu’elles étaient et de s’en contenter ? Sans doute on n’allait pas jusqu’à vouloir présenter la ruine, la captivité, l’idolâtrie et le désordre, comme un développement de la religion des pères. Cette monstrueuse prétention était réservée à la chrétienté finissante qui appelle «bien» et «développement spirituel» tout le mal qu’elle a causé. Excellente raison fournie par Satan au monde religieux pour ne pas s’humilier. Que les réchappés d’Israël se groupent sous la bannière des veaux de Béthel, les restes de Juda sous celle d’Ézéchias, cela semble aujourd’hui bon et désirable. Si ces réchappés, si contents de leur état, étaient venus à la Pâque, certes ils auraient trouvé autre chose que cela. La nuit où elle fut offerte en Égypte le peuple n’eut qu’une bannière, la bannière de l’Éternel, pour sortir d’Égypte et passer la mer Rouge, conduit en Canaan à travers le désert. Ézéchias n’avait d’autre pensée que de réunir le peuple de Dieu sous la bannière de l’Éternel.
Le résultat béni de son obéissance et de sa fidélité ne se fit pas attendre : «Les fils d’Israël qui se trouvèrent à Jérusalem célébrèrent la fête des pains sans levain pendant sept jours, avec une grande joie». «Et toute la congrégation résolut de célébrer encore sept jours ; et ils célébrèrent les sept jours avec joie» (v. 23). «Et il y eut une grande joie à Jérusalem» (v. 26). Le coeur de tous était rempli à déborder, car une vraie joie a besoin de se communiquer à d’autres. C’est ainsi que le Psalmiste disait dans le Cantique du bien-aimé : «Mon coeur bouillonne d’une bonne parole ; je dis ce que j’ai composé au sujet du roi ; ma langue est le style d’un écrivain habile» (Ps. 45:1).
Il y a mille sujets de joie pour le racheté ; voyez, par exemple, Jean 15:11 ; 16:24, 22 ; 17:13, mais on trouve le plus grand de tous dans la contemplation de Christ et de son oeuvre, et dans la communion avec lui (1 Jean 1:4 ; Jean 16:22). Que nous le voyions petit enfant dans une crèche (Luc 2:10) ; que nous le contemplions comme l’Agneau de Dieu, la Parole faite chair, ou comme l’Époux, associant son Épouse avec lui-même (Jean 3:29) ; ou ressuscité et prenant place au milieu des saints rassemblés (Jean 20:20) ; ou montant au ciel (Luc 244, 52) ; ou, symbole d’une scène future, entrant comme roi à Jérusalem (Luc 19:37) ; ou près d’être révélé aux siens (1 Pierre 1:8) — toujours la joie déborde dans les coeurs qui sont occupés de Lui. Il est clair que cette joie est rarement sans mélange (je ne veux pas dire qu’elle ne soit pas «accomplie» ) tant que nous sommes dans ce corps d’infirmité et dans un milieu qui détourne si facilement nos yeux de Lui comme de notre seul objet, et cependant combien elle est grande ! Mais, combien aussi sa joie à Lui diffère de la nôtre ! Elle se manifeste dans le salut d’êtres perdus, tandis que la nôtre découle de la possession d’un Objet parfait. Sa joie est celle du bon Berger qui a trouvé sa brebis perdue, la joie du Saint Esprit, la même joie que celle du Père se jetant au cou du fils prodigue. Quand Dieu nous présente la joie de cette oeuvre d’amour, il ne fait pas mention de notre propre joie ; elle est certes trop incomplète et misérable pour être mise en regard de la joie divine ! Celle du fils prodigue disparaît devant la joie du Père qui le tient dans ses bras. Il se réjouit d’ouvrir sa maison à son enfant, de le revêtir de la robe du fils premier-né, de le nourrir des mets de sa table, mais pouvons-nous nous représenter la joie future du Père, et du Fils quand il aura tous les siens autour de Lui comme fruit du travail de son âme et qu’il en sera pleinement satisfait ? «L’Éternel... se réjouira avec joie à ton sujet : il se reposera dans son amour, il s’égayera en toi avec chant de triomphe !» (Soph. 3:17).
La paix est peut-être plus profonde encore que la joie. C’est la calme jouissance de la présence de Dieu, entre lequel et nous il n’y a plus ni barrière, ni obstacle, ni voile, ni une question quelconque à régler. La paix n’a pas beaucoup de paroles, ni beaucoup de discours. Elle est le «repos dans l’amour», comme dit notre passage de Sophonie, tandis que la joie a besoin de s’épancher, de se communiquer. Cependant la joie, dans sa plus haute expression, n’est pas la manifestation exubérante d’un bonheur qui éclate comme un feu d’artifice bien vite éteint. Quand un nouveau converti a trouvé le salut, on assiste souvent à une joie délicieuse à contempler, mais qui ne dure pas, parce que l’âme, jeune encore, a besoin de faire connaissance d’elle-même. Pour que la joie soit durable, il faut une chose plus grande que d’avoir trouvé le salut ; il faut avoir trouvé le Sauveur, une personne qui satisfasse à tous nos besoins, réponde à tous les désirs de notre âme. Telle était la joie que l’apôtre recommandait aux Philippiens, certain qu’elle ne pourrait jamais être ébranlée : «Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur !»
La joie de Juda et d’Israël leur fit prolonger la fête des pains sans levain, qu’ils célébrèrent, comme nous avons vu, pendant deux fois sept jours. Il n’y a pas de ressort plus puissant pour prolonger une vie de sainteté pratique, que la joie de la présence du Seigneur, et, d’autre part, rien n’entretient cette joie comme une vie sainte, séparée de tout ce que le monde aime et recherche.
Nous trouvons à la fin du chapitre une réponse bénie de l’Éternel à l’intercession sacerdotale. «Les sacrificateurs, les lévites, se levèrent et bénirent le peuple ; et leur voix fut écoutée, et leur prière parvint à sa demeure sainte dans les cieux» (v. 27). Au milieu de la ruine, le peuple, en petit nombre sans doute, avait retrouvé l’ordre de la maison de Dieu, mais aussi la jouissance de la présence du Seigneur dans une mesure inconnue jusque-là. Et qui nous dit, mes frères en Christ, que notre obéissance à la Parole et la joie que les bénédictions, promises à la fidélité, nous ont apportée, ne gagneront pas d’autres âmes et ne leur feront pas désirer de se joindre au témoignage du Seigneur ?
L’abolition de l’idolâtrie, qui n’est pas attribuée ici à Ézéchias lui-même (cf. 2 Rois 18:4), est produite chez le peuple à la suite de la fidélité du roi. Remarquons que le renversement des idoles au milieu de Juda et d’Israël n’a lieu que lorsque le temple de Dieu a été ouvert et purifié, et le culte rétabli comme au commencement (v. 1-4).
Ce fait est très important : Il est inutile d’entreprendre le renversement de l’erreur si l’on n’a commencé par établir la vérité fondée sur la parole de Dieu. De plus, la puissance pour renverser le mal ne sera jamais tout à fait efficace si ce qu’on a d’abord édifié n’est pas la vérité sans mélange, telle que la Parole nous l’enseigne. Si les adversaires peuvent nous prouver que nous ne sommes pas nous-mêmes, en bien des points, sur le terrain de la Parole que nous défendons, nous avons perdu toute autorité dans la lutte. Lorsque le peuple, rassemblé à Jérusalem, eut savouré la grande joie qui accompagnait les bénédictions retrouvées, il comprit qu’il était impossible de laisser subsister une religion étrangère à côté du culte du vrai Dieu.
En disant ces choses, nous n’oublions pas qu’avant de célébrer la Pâque le peuple avait déjà ôté «les autels qui étaient dans Jérusalem, et... tous les autels à encens» et les avait jetés dans le torrent du Cédron (30:14). Cela n’infirme en aucune manière ce que nous venons de dire. Il est évident qu’il était impossible d’associer la célébration de la Pâque et des pains sans levain à des pratiques idolâtres. Il fallait que le lieu où se célébrait la Pâque et où Dieu demeurait dans l’assemblée de son peuple fût complètement purifié de tout élément étranger, avant que la fête pût être célébrée. Il en est de même aujourd’hui pour la table du Seigneur : elle ne peut être associée avec la religion du monde, et, s’il en est autrement, elle ne sera jamais un puissant motif pour une sainte conduite, représentée par la fête des pains sans levain.
La purification de toute idolâtrie était d’autant plus sérieuse que déjà le peuple en avait éprouvé les bienfaits à Jérusalem ; il la fallait maintenant complète, absolue. Éphraïm et Manassé, quelque petit que fût leur nombre, s’étant joints à Juda pour la Pâque, étaient responsables de prendre chez eux les mêmes dispositions que Juda. S’ils avaient agi autrement, ils auraient créé un lien entre leur idolâtrie passée et le culte de l’Éternel, ce qui aurait été une monstruosité. Aussi «tous ceux d’Israël qui se trouvèrent là s’en allèrent par les villes de Juda, et brisèrent les statues, et abattirent les ashères, et démolirent les hauts lieux et les autels dans tout Juda et Benjamin, et en Éphraïm et Manassé, jusqu’à ce qu’ils eussent tout détruit» (v. 1). L’unité du peuple qui venait d’être réalisée dans la fête primordiale de la Pâque était maintenant mise en pratique par une action commune contre ce qui déshonorait l’Éternel.
Après ces choses Ézéchias établit l’ordre de la sacrificature, paye de sa personne et de ses biens pour les sacrifices et les fêtes solennelles, ordonne que ceux qui s’emploient au service du sanctuaire ne soient pas négligés. Aujourd’hui, comme alors, il est nécessaire d’observer en toutes choses l’ordre qui convient à la maison de Dieu, mais, en aucune manière, un ordre établi par l’homme ; la Parole seule doit le déterminer et le régler. En cela, comme en toutes choses, il faut s’attacher «à la loi de l’Éternel» (v. 4). Pour connaître l’ordre et l’organisation de la maison de Dieu, n’interrogeons pas nos propres pensées, mais consultons des Écritures telles que la première épître aux Corinthiens et la première épître à Timothée. Nous y trouverons cette organisation tout entière comme le Saint Esprit nous la révèle. Nous ne pouvons en aucune manière nous dispenser pour l’ordre de l’assemblée, comme pour toute autre chose, de ce que la Parole nous enseigne, ni lui substituer notre propre organisation.
Sur l’ordre du roi, le peuple s’acquitte largement de la dîme en faveur des sacrificateurs et des lévites, «afin», dit Ézéchias, «qu’ils s’attachassent à la loi de l’Éternel» (v. 4). Les serviteurs de Dieu ont besoin d’être encouragés dans leur oeuvre par l’intérêt et la coopération du peuple de Dieu. Quand une vraie piété accompagne la restauration selon Dieu, l’amour est toujours actif à l’égard des ouvriers du Seigneur et les fidèles ne laissent manquer de rien ces chers serviteurs, leurs frères. Cette activité d’amour diffère totalement d’un salaire fixe pour des services rendus, d’un salaire imposé pour certaines fonctions dont l’ouvrier s’est chargé. Le but de la dîme était d’attacher les lévites à la loi de l’Éternel, et non de leur donner le moyen de gagner leur vie. Combien de tels principes, même en un temps où ils étaient donnés par la loi et n’étaient par conséquent pas le fruit de la grâce, sont différents de ce que pense la chrétienté professante au sujet du ministère !
Le peuple prend à coeur l’ordre du roi ; la dîme est apportée libéralement et dépasse de beaucoup ce qui était recommandé par la loi de Moïse (Voyez Deut. 14:26-29 ; 18:3-7 ; 26:12 ; Nomb. 18:12-19). Ézéchias et les chefs, témoins de cette libéralité, bénissent l’Éternel et son peuple Israël. De même l’apôtre Paul, quand il considérait l’oeuvre de la grâce dans le coeur des frères, soit à Philippes, soit à Thessalonique, rendait grâces à Dieu, reconnaissant tout le bien produit par le Saint Esprit dans leurs coeurs, et bénissait aussi ceux qui étaient les instruments de cette libéralité. Ce zèle amène l’abondance ; chacun mange et est rassasié, et il reste encore des monceaux. Il en fut de même lors de la multiplication des pains. Ézéchias est ici le faible type du roi selon les conseils de Dieu, dont il est dit : «Il rassasiera de pain tes pauvres». Le service est considérablement augmenté par cette prospérité, fruit de la grâce de Dieu dans les coeurs. Il en est tout autrement quand c’est le monde qui enrichit les serviteurs de Dieu. Ici l’ordre préside aux distributions (v. 14-19) et plusieurs y sont employés. Ce n’est pas une fonction sans importance qu’un service occupé exclusivement de soins matériels. De tels emplois sont modestes, sans doute, et n’ont pas d’apparence, mais sans eux tout l’ordre de la maison de Dieu serait en souffrance. On voit en Néhémie 13:10-14 quelles conséquences la négligence de la dîme eut pour tout le service de Dieu et le culte.
Toute cette organisation terminée, l’Éternel aime à rendre témoignage à Ézéchias et à nous dire qu’il eut son approbation. Pourrait-il en dire autant de nous ? «Ézéchias fit ainsi dans tout Juda. Et il fit ce qui est bon, et droit, et vrai, devant l’Éternel, son Dieu» (v. 20). Quelle parure du croyant, que ces trois choses : la bonté, la droiture et la vérité ! C’était la parure de Christ homme ; elle faisait déborder la louange sur les lèvres du Psalmiste quand il voyait Celui qui était «plus beau que les fils des hommes», paré de «vérité, et de débonnaireté, et de justice» (Ps. 45:4). Il nous est dit encore (v. 21), que toute l’oeuvre d’Ézéchias fut entreprise «pour rechercher son Dieu» et qu’il «agit de tout son coeur». Beau témoignage rendu à cet homme de Dieu ! Un coeur non partagé, un oeil simple, occupé à rechercher son Dieu, tel était le secret de sa vie spirituelle, aussi la Parole ajoute : «Il prospéra».
Ce portrait d’Ézéchias termine la première division de son histoire, division complètement omise dans le livre des Rois, et qui nous présente son histoire morale dans ses rapports avec le service de l’Éternel. Le chapitre suivant va nous entretenir de son attitude vis-à-vis d’un monde ennemi de Dieu.
Dans ce chapitre le récit diffère considérablement de celui des Rois, tandis que ce dernier reproduit presque mot pour mot celui d’Ésaïe (chap. 36-39), excepté la «prière d’Ézéchias» omise à la fois dans les Chroniques et dans les Rois, et dont nous avons parlé précédemment (*).
(*) Méditations sur le second livre des Rois.
«Après ces choses et cette fidélité, Sankhérib, roi d’Assyrie, vint et entra en Judée, et campa contre les villes fortes, et il pensait en forcer l’entrée» (v. 1). Qu’il est précieux d’entendre Dieu reconnaître ici la fidélité de son serviteur ! Sous ce rapport Ézéchias avait été sans reproche et avait récolté, dans ce monde, une abondance de joie et de prospérité. Mais si sa vie religieuse avait l’approbation de Dieu, allait-il montrer la même fidélité vis-à-vis du monde ? Notez que l’attaque de l’Assyrien est présentée ici comme une épreuve et nullement comme un jugement de Dieu dont l’Assyrien aurait été l’instrument contre Ézéchias. Toute l’histoire passée des rois et du peuple de Juda, que nous venons de parcourir, appelait ce jugement, mais ce n’était pas au moment où Ézéchias avait montré un coeur intègre envers Dieu que le châtiment serait tombé sur lui et sur son peuple. Il en était tout autrement des dix tribus dont l’histoire avait abouti à la transportation définitive, dans le temps même où Dieu voyait encore «de bonnes choses» en Juda. Ce dernier était revenu à l’Éternel et avait détruit les idoles, quoique, de fait, son coeur ne fût pas changé, comme nous le voyons en Ésaïe 22. Ce n’était pas non plus qu’Ézéchias fût puni du fait d’avoir mal agi en se révoltant contre le roi d’Assyrie (2 Rois 18:7), circonstance sur laquelle, du reste, les Chroniques se taisent. Dans tout le chapitre qui nous occupe, Ézéchias est, non pas châtié, mais mis à l’épreuve, précisément parce qu’il avait été jusque-là fidèle à son Dieu.
La première de ces épreuves est donc l’assaut de l’Assyrien qui pense forcer l’entrée des villes fortes et s’emparer de Jérusalem. Devant cette attaque, qu’est-ce qu’Ézéchias avait à faire ? La grâce de Dieu le lui suggère : «Et quand Ézéchias vit que Sankhérib venait, et qu’il se dirigeait contre Jérusalem pour lui faire la guerre, il tint conseil avec ses chefs et ses hommes forts pour arrêter les eaux des sources qui étaient en dehors de la ville ; et ils lui aidèrent. Et un grand peuple se rassembla, et ils bouchèrent toutes les sources et le torrent qui coulait au milieu du pays (*), disant : Pourquoi les rois d’Assyrie viendraient-ils et trouveraient-ils des eaux abondantes ?» (v. 2-4). Ézéchias était décidé à ne pas laisser entre les mains de l’ennemi les sources qui alimentaient la ville, soit à l’Orient, soit à l’Occident. Si l’Assyrien en avait pris possession elles lui auraient fourni une précieuse ressource pour continuer le siège de Jérusalem en même temps que le peuple de la ville aurait été réduit à mourir de soif. Sankhérib ignorait le vaste travail auquel Ézéchias et son peuple s’étaient livrés pour parer à ce danger. Alors que Jérusalem était abondamment pourvue d’eau vive, il fait dire au peuple par ses serviteurs : «Ézéchias ne vous incite-t-il pas pour vous livrer à la mort par la faim et par la soif ?» (v. 11). Dieu rend témoignage au roi de tout le zèle qu’il déploya à ce sujet : «Ce fut lui, Ézéchias, qui boucha l’issue supérieure des eaux de Guihon, et les conduisit sous le sol, à l’occident de la ville de David» (v. 30). On a retrouvé les travaux, formidables pour ce temps-là, par lesquels les sources de Guihon et de la fontaine qui déborde furent conduites jusqu’au-dedans des murs de Jérusalem. Tout cela montre une grande prévoyance devant cette dangereuse épreuve.
(*) Proprement : «Le torrent qui débordait» dans la vallée du Cédron.
Nous pouvons tirer nous-mêmes de ce fait une sérieuse leçon. Au Ps. 87:7, les habitants de Jérusalem disent : «Toutes mes sources sont en toi». Il en est de même pour nous ; toutes les sources auxquelles nous nous abreuvons sont en Christ. Il est lui-même la source d’eau vive et peut dire : «Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive». Nos sources sont la connaissance de Christ et la communion avec Lui. C’est ce que l’Ennemi de nos âmes, le monde, cherchera toujours à nous enlever. Il sait fort bien qu’un christianisme qui ne s’abreuve pas à la source, qui ne s’alimente pas de Christ, ne peut nous faire vivre. Tout son effort consiste donc à séparer le chrétien de Christ et il a mille moyens d’occuper nos coeurs et nos pensées d’autre chose que de Lui. De plus, il a la prétention de posséder ce qui est notre propriété exclusive. N’acceptons pas qu’il nous dérobe nos sources, n’acceptons pas davantage son affirmation qu’il les possède. Quand nous avons affaire à lui, prouvons-lui clairement la vanité de ses prétentions. C’est le plus grand service que nous puissions lui rendre ; il ne peut découvrir Christ que dans la ville de Dieu en faisant partie du peuple de Dieu. Si nous «bouchons les sources», nous pouvons prouver au monde qu’il ne les a pas et lui montrer que le seul moyen de les posséder c’est d’être, non pas du côté des ennemis, mais des amis de Christ. Notre activité ne doit pas se borner à ne pas nous laisser dépouiller par le monde ; il nous faut déployer toute l’énergie possible pour mettre Christ à la portée de tous ses rachetés, afin qu’ils s’abreuvent constamment d’eau vive et des richesses insondables de Christ. Ce n’est pas un Christ banal dont nous avons besoin, un Christ qui soit aussi bien la propriété du monde que la nôtre ; il nous faut un Christ n’ayant rien de commun avec l’image que s’en fait le monde, qui le façonne pour ainsi dire à son usage. Il faut que ces eaux qui coulent au milieu du pays deviennent pour nous comme les eaux de Guihon, cachées profondément sous la surface du sol et qui atteignent le coeur même de la cité de Dieu.
Tel fut le premier soin d’Ézéchias, mais, d’autre part, il ne négligea rien pour la défense de Jérusalem. Lui qui avait bouché les sources porta aussi sa sollicitude sur la muraille : «Et il s’encouragea, et bâtit toute la muraille où il y avait des brèches, et l’éleva jusqu’aux tours, et bâtit une autre muraille en dehors ; et il fortifia Millo dans la ville de David» (v. 5). Ce n’est pas qu’Ézéchias eût confiance dans ses ressources et sa force pour résister au roi d’Assyrie bien au contraire, quand celui-ci se présente, il s’écrie : «Il n’y a point de force pour enfanter» (Ésaïe 37:3), et il sait que le secours ne peut se trouver que dans la dépendance de Dieu seule ; mais tout cela n’exclut nullement une vigilance constante à l’égard de l’ennemi. Si, par négligence, nous avons laissé des brèches s’établir, par lesquelles l’adversaire peut monter à l’assaut, il faut diligemment les réparer au lieu de les laisser s’agrandir. De plus, Ézéchias «fit beaucoup de javelines et de boucliers». En prévision d’une attaque il fallait des armes pour tous. Cette nécessité subsiste encore aujourd’hui. Pour combattre victorieusement l’ennemi il ne suffit pas qu’une ou deux personnes éminentes parmi le peuple de Dieu soient pourvues des armes nécessaires. Ces armes, comme nous le voyons en Éph. 6, ne sont pas seulement la Parole, mais un état d’âme conforme à la connaissance de Dieu. Sans doute, quand l’ennemi se présente, c’est Dieu qui combat pour son peuple, comme Ézéchias le dit ici : «Fortifiez-vous et soyez fermes... car avec nous il y a plus qu’avec lui : avec lui est un bras de chair, mais avec nous est l’Éternel, notre Dieu, pour nous aider et pour combattre nos combats», mais cela n’empêche nullement de se «revêtir de l’armure complète de Dieu» (Éph. 6:11). Dieu veut, d’un côté, chez les siens la confiance et la dépendance qui caractérisèrent si remarquablement la carrière d’Ézéchias ; mais il veut, de l’autre côté, l’énergie de la foi qui lutte, résiste et tient ferme avec les armes de l’Esprit pour que le Seigneur soit glorifié dans notre combat, comme il doit l’être dans notre marche.
Chose humiliante ! cette délivrance, opérée par l’Éternel, ne pouvait être que momentanée. Si l’Assyrien ne put s’emparer de Jérusalem, Babylone le fit plus tard, parce que, non seulement le coeur du roi s’était élevé, mais qu’avant tout, le coeur du peuple n’était pas changé. «Vous n’avez pas regardé», dit Ésaïe, faisant allusion au siège de Jérusalem par Sankhérib, «vers celui qui a fait cela, ni tourné vos regards vers celui qui l’a formé dès longtemps» (És. 22:11). Aussi le jugement historique par Babylone eut lieu pour ce peuple, avant le jugement prophétique par l’Assyrien des derniers jours. Ce dernier jugement, nous en trouvons la description très intéressante au chap. 22 d’Ésaïe, qui fait allusion aux événements historiques dont nous nous occupons pour annoncer ce qui aura lieu à la fin des temps. D’abord, v. 1-6, nous rencontrons une allusion évidente au siège de Jérusalem par Nebucadnetsar tel qu’il nous est décrit en 2 Rois 25:4-5, puis, aux v. 7-11, une allusion tout aussi frappante au siège de Jérusalem par Sankhérib sous Ézéchias ; mais ce siège révèle l’état moral du peuple (v. 11), et a pour résultat, non pas sa délivrance, mais son jugement, son iniquité ne lui étant pas pardonnée (v. 14). Toute cette scène se termine par la destruction de Shebna, l’administrateur infidèle, l’Antichrist ; et l’établissement d’Éliakim, Christ, qui portera, en justice, toute l’administration du royaume de David (v. 15-25). Aux deux événements contenus dans ce chapitre, correspond le premier siège de Jérusalem aux derniers jours, tandis que, de fait, le siège de Jérusalem par Sankhérib, sous Ézéchias, est une image du second siège prophétique dans lequel Jérusalem sera épargnée et son dernier ennemi, l’Assyrien, détruit par l’apparition du Seigneur (*).
(*) Pour plus amples détails sur la portée prophétique des deux sièges de Jérusalem, voyez : «L’histoire prophétique des derniers jours et les Cantiques des degrés», par H. R.
Dans les v. 9 à 15 de notre chapitre, Sankhérib envoie ses serviteurs à Jérusalem vers Ézéchias et vers tous ceux de Juda qui étaient à Jérusalem. Ici se montre l’illusion de l’ennemi. Il dit : «En quoi vous confiez-vous, que vous demeuriez assiégés dans Jérusalem ?» (v. 10). Il tient le peuple pour «assiégé» avant même qu’il ait commencé le siège. Il se doute bien peu que lui, Sankhérib, soit l’assiégé de Dieu et ignore que sa puissance et l’immense armée dont il couvre le pays, conquérant toutes ses villes fortes, ne tiendra pas un jour devant une poignée de gens faibles et angoissés, mais dont la confiance est en l’Éternel. «Si Dieu est pour nous, qui serait contre nous ?» Sankhérib dit : «Ézéchias ne vous incite-t-il pas, pour vous livrer à la mort par la faim et par la soif ?» (v. 11), et il ignore que Jérusalem possède déjà, à elle seule, toutes les sources d’eau cachées et les canalisera bientôt en vue d’agressions futures ! D’où proviennent, chez l’ennemi, de pareilles illusions ? De ce qu’il ignore Dieu et Sa puissance. L’orgueil de Sankhérib lui fait estimer son pouvoir à lui, bien plus haut que celui du Dieu d’Israël, qu’il assimile aux idoles des nations. Il confond les faux dieux avec le vrai Dieu. Pour lui, la folie consiste à ne vouloir qu’un seul Dieu, qu’un seul autel. Le monde d’aujourd’hui est-il très éloigné de pareilles pensées ? Il est vrai qu’il n’en est pas encore arrivé, comme Sankhérib, à «outrager le Dieu vivant», mais a-t-il plus d’estime pour Dieu que pour ses propres idoles, et ne cherche-t-il pas, dans les objets de ses convoitises, de quoi endormir sa conscience à l’égard du jugement qui s’avance à grands pas ?
Dans notre livre Sankhérib met particulièrement l’accent sur ces mots : «Combien moins votre Dieu vous délivrera-t-il de ma main !» (v. 15) Quel réveil terrible aura cet homme orgueilleux et impie ! La destruction de son armée, la honte, ses propres enfants devenus ses meurtriers.
Sankhérib méprise et blasphème l’Éternel, et l’assimile aux idoles (voyez 14, 15, 16, 17, 19), et cela est mis en relief dans notre récit dont la brièveté contraste avec celui des Rois et d’Ésaïe. Ses serviteurs parlent «contre l’Éternel, le vrai Dieu, et contre Ézéchias». Quel privilège pour ce roi pieux ! La haine de l’ennemi le désigne comme compagnon du Dieu souverain ! En effet, Ézéchias, suivant en cela l’exemple de Christ, pouvait dire : «Les outrages de ceux qui t’outragent sont tombés sur moi», et encore : «Celui qui me rejette, rejette Celui qui m’a envoyé» (Ps. 69:9 ; Luc 10:16).
L’ennemi cherchait à faire peur au peuple de Jérusalem et à «les épouvanter, afin de prendre la ville» (v. 18). Il en est ainsi de tout temps. Quand Satan ne réussit pas à nous séduire il cherche à nous effrayer afin de s’emparer de nos biens, de nous dépouiller de notre bonheur, et de remplacer la sécurité et la paix dont nous jouissons sous la protection de notre Dieu, par l’agitation, les angoisses et les douleurs. Tenons fermes, comme Ézéchias, et nous assisterons à la défaite de l’adversaire : «Le Dieu de paix brisera bientôt Satan sous nos pieds», et rien n’arrêtera ce jugement. L’armée de Sankhérib est exterminée par l’ange de l’Éternel ; lui-même tombe sous les coups des «fils de ses propres entrailles» en présence du dieu impuissant dont il cherchait la protection et qu’il opposait au Dieu vivant, tandis qu’Ézéchias délivré, protégé tout à l’entour, est comblé de biens et élevé aux yeux de toutes les nations (v. 22-23).
Ainsi se termina la première épreuve d’Ézéchias, à la gloire du Dieu dont il était le serviteur.
Au v. 24 nous trouvons la seconde épreuve. Bien différents sont les récits de 2 Rois 20:1-11 et d’Ésaïe 38:1-22. Le nôtre tient en quelques paroles : «En ces jours-là» — aux jours où Ézéchias fut aux prises avec l’Assyrien — «Ézéchias fut malade à la mort ; et il pria l’Éternel, et l’Éternel lui parla, et lui donna un signe» (v. 24). Nous nous bornerons à ce qui nous est dit ici, ayant traité ce sujet en détail autre part.
La mort par maladie, la fin habituelle de tout homme, menace ici le roi fidèle. Ce qu’il y a de plus poignant, c’est que lui, l’instrument de Dieu pour le salut du peuple, va être supprimé brusquement, au moment même où Juda a, plus que jamais, besoin de lui. La seule ressource d’Ézéchias est de s’en remettre à Dieu dans une humble dépendance de Lui : «Il pria l’Éternel» ; il eut recours à Celui qui l’avait suscité et conduit jusque-là. Alors «l’Éternel lui parla». Est-ce que cela ne valait pas mieux que toute autre chose ? Pour obtenir un pareil résultat, l’épreuve était-elle trop grande ? Quand le croyant peut dire : Dans l’épreuve, l’Éternel m’a parlé, voudrait-il, en quoi que ce soit, avoir échappé à la souffrance ? «Et Dieu lui donna un signe» ; il fit un miracle en sa faveur. Combien Ézéchias était précieux à Dieu ! Il trouva dans l’épreuve non seulement des communications divines, mais il obtint la certitude de l’intérêt immense que Dieu lui portait. Ézéchias était réduit ici au néant le plus complet ; après avoir été sans force devant l’ennemi, il se trouvait être sans aucune ressource devant la mort ; et cependant sa position était infiniment élevée, puisqu’il avait Dieu pour lui, s’identifiant avec tous ses intérêts et toute son existence ! Ainsi, dans cette seconde épreuve, Ézéchias acquit des bénédictions nouvelles.
Il restait encore pour lui une troisième épreuve. Job en avait eu le même nombre et de la même qualité : d’abord les ennemis (Job 1:13-22), ensuite la maladie (Job 2:7-10), enfin les amis (2:11-13). Telle fut aussi la troisième épreuve d’Ézéchias. Ce dernier allait-il en sortir victorieux, lorsque, devant elle, Job avait péché en paroles et était tombé ?
Nous lisons au v. 31 : «Cependant, lors de l’ambassade que les chefs de Babylone envoyèrent vers lui pour s’informer du miracle qui avait été opéré dans le pays, Dieu l’abandonna pour l’éprouver, afin qu’il connût tout ce qui était dans son coeur». Telle fut l’épreuve et aussi l’occasion de la chute d’Ézéchias. Berodac-Baladan recherche son amitié et le fait complimenter sur sa guérison. À ce moment l’Éternel abandonne Ézéchias à lui-même pour l’éprouver. Il fallait cela ; il était nécessaire que cet homme de Dieu apprît à connaître son propre coeur. Dieu aurait pu le garder de chute comme dans les deux premières occasions, mais alors il n’aurait pas fait l’expérience de la racine du mal qui était au-dedans de lui. Il s’agissait ici d’une chose bien plus importante que tels manquements partiels ou tels actes de péché, dont la carrière d’Ézéchias, considérée dans les trois récits que nous en avons, offre plus d’un exemple ; c’était une épreuve qui, comme dans le cas de Job, découvrait le mal caché dans le fond du coeur et fit dire à ce patriarche : «J’ai horreur de moi !»
Le v. 25 nous montre en quoi consistait cette épreuve à laquelle Ézéchias succomba : «Ézéchias ne rendit pas en raison du bienfait qu’il avait reçu ; car son coeur s’éleva, et il y eut de la colère contre lui et contre Juda et Jérusalem». Quand l’Éternel lui-même l’avait élevé aux yeux de toutes les nations (v. 23), le coeur d’Ézéchias s’éleva. Au lieu de rester dans l’humble attitude qui le caractérisait lors des deux premières épreuves, il se servit des bénédictions divines pour nourrir son orgueil, cet orgueil qui, depuis Adam, est le fond même du coeur de l’homme pécheur.
Nous n’insistons pas sur les détails de la chute d’Ézéchias, relatés autre part ; il nous semble même qu’en les mentionnant nous gâterions l’impression que la parole de Dieu veut nous donner ici. Notre récit s’accorde si bien avec le plan divin des Chroniques que toute autre addition y nuirait. Les Chroniques font ressortir la grâce et non la responsabilité, mais elles nous montrent ici le coeur du croyant abandonné une fois à sa responsabilité, sans intervention de la grâce et, la seule fois que cela a lieu dans l’histoire d’Ézéchias, la chute est complète et profonde, irrémédiable même, puisqu’elle a pour conséquence la destruction de Jérusalem et la transportation de Juda. Or, voici que notre livre insiste sur une chose que les deux autres récits traitent à peine d’un mot : Au moment où tout est irrémédiablement ruiné, la grâce intervient pour placer la conscience d’Ézéchias devant Dieu, dans un état que Celui-ci puisse pleinement approuver. Si le péché a abondé, la grâce surabonde ; elle triomphe et délivre Ézéchias et son peuple (momentanément sans doute, car il s’agit ici non des conseils, mais des voies de Dieu) d’un jugement qui les aurait anéantis. «Ézéchias», nous est-il dit, «s’humilia de ce que son coeur s’était élevé, lui et les habitants de Jérusalem ; et la colère de l’Éternel ne vint pas sur eux pendant les jours d’Ézéchias» (v. 26). Le roi s’humilie en proportion de l’orgueil qu’il avait nourri dans son coeur et manifesté au-dehors. Ayant appris sa leçon, il reprend devant Dieu la seule place qui lui convienne, et dit, en d’autres termes que Job : «Voici, je suis une créature de rien, que te répliquerai-je ? Je mettrai ma main sur ma bouche» (Job 39:37). Comme lui il ajoute : «J’ai horreur de moi, et je me repens dans la poussière et dans la cendre» (42:6).
Chose précieuse, cette humiliation d’Ézéchias produit des fruits dans son entourage ; «les habitants de Jérusalem» s’humilient avec lui. Les yeux de l’Éternel pouvaient de nouveau découvrir en Juda «de bonnes choses» ; il est intéressant de voir que Dieu cherche attentivement toute manifestation de la conscience qui puisse lui donner occasion de patienter encore envers son peuple. «Il est patient envers vous», nous dit l’apôtre Pierre. Désormais l’épreuve est terminée, la leçon apprise. Dieu peut donner à son roi bien-aimé ce qu’il donnera dans une toute autre mesure à Christ, au roi de ses conseils, parce que Lui a toujours marché, ce que ne fit pas Ézéchias, dans le chemin de l’humilité et de la débonnaireté, en même temps que dans celui de la vérité et de la justice (Ps. 45:4).
«Ézéchias eut de très grandes richesses et une très grande gloire ; et il se fit des trésoreries pour l’argent, et l’or, et les pierres précieuses, et les aromates, et les boucliers, et pour toute sorte d’objets d’agrément, et des magasins pour les produits en blé, en moût, et en huile, et des stalles pour toute espèce de bétail, et il se procura des troupeaux pour les stalles ; et il se bâtit des villes, et il eut des troupeaux de menu et de gros bétail en abondance ; car Dieu lui donna de fort grands biens» (v. 27-29).
L’amitié du monde est le plus grand danger que nous puissions courir. Dans cette épreuve Ézéchias a succombé, mais le Dieu de grâce ne l’a pas abandonné ; il l’a restauré, et, après cette restauration, lui a rendu témoignage. Jusque dans sa mort il lui donna une place d’honneur qu’aucun des fils de David n’avait occupée ! «On l’enterra à l’endroit le plus élevé des sépulcres des fils de David ; et tout Juda et les habitants de Jérusalem lui rendirent honneur à sa mort» (v. 33).
Quel Dieu que le nôtre ! C’est Lui qui donne la grâce, et la gloire, et si l’homme y était pour quelque chose, ce serait pour ne pas mériter l’une, et ne jamais atteindre l’autre !
L’histoire de Manassé, telle qu’elle est relatée ici, a une importance considérable comme exemple des relations futures de l’Éternel avec son peuple. Nous avons vu dans l’histoire d’Ézéchias que Dieu lui avait annoncé la captivité de Juda à Babylone comme conséquence du péché d’orgueil qu’il avait commis. Ézéchias et son peuple s’humilièrent devant cette sentence et Dieu remit à un temps futur l’exécution du jugement. Après la mort d’Ézéchias, l’infidélité arriva à un tel point, l’idolâtrie prit de telles proportions, qu’il ne restait plus qu’à exécuter le jugement annoncé. Manassé fut emmené captif à Babylone qui, dans ces jours-là, était au pouvoir de l’Assyrien. Le sort de ce roi était ainsi le prélude et l’image anticipée de la captivité future de Juda, mais, plus encore, l’image de l’état d’angoisse et d’humiliation qui précédera la restauration définitive de ce peuple sous le règne du Messie.
À proprement parler, l’histoire symbolique, telle que les Chroniques nous la présentent, est close avec la restauration de Manassé. Ammon lui succède, recommençant pour ainsi dire le récit de la ruine de Juda au point de vue historique. Le règne de Josias qui suit est comme le dernier effort de l’Esprit de Dieu pour ramener sur la scène le roi de ses conseils, effort sans résultat, par suite de l’imperfection du meilleur instrument humain que Dieu pût employer, et suivi du lamentable tableau de la royauté finissante en Juda.
Examinons de plus près le règne de Manassé, si différent dans les Chroniques de ce même règne dans le livre des Rois. Le commencement nous en est décrit (v. 1-9) comme le plus affreux qui se puisse imaginer au point de vue religieux, d’autant plus affreux qu’il suit les jours du fidèle Ézéchias, comblé de faveurs et de prospérité à cause de cette fidélité même. La perversité de Manassé creuse un abîme entre son règne et celui de son père : «Il fit outre mesure ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel» (v. 6). Il agit en toutes choses selon les abominations des Cananéens que le Seigneur avait dépossédés devant Israël, lorsque leur iniquité était arrivée à son comble. Il rebâtit les hauts lieux démolis par Ézéchias, élève des autels à Baal, rétablit le culte d’Astarté, le culte des astres, sacrifie ses fils à Moloch, pratique les sciences occultes, les enchantements et la magie, profane Jérusalem et la maison de Dieu en y bâtissant des autels aux faux dieux et place une idole abominable dans le temple, pareil en cela à l’Antichrist de la fin. Il défie Dieu lui-même qui avait dit : C’est dans Jérusalem et dans cette maison que «je mettrai mon nom à toujours». Et ce Dieu fidèle avait ajouté : «Je n’ôterai plus le pied d’Israël de dessus la terre que j’ai assignée à vos pères, si seulement ils prennent garde à faire tout ce que je leur ai commandé par Moïse, selon toute la loi et les statuts et les ordonnances» (v. 8). Il n’avait tenu qu’au peuple d’obéir ; partout où il s’était montré obéissant à la loi et aux commandements, Dieu avait tenu sa promesse, et maintenant... que restait-il à faire ? L’exemple de Manassé fut suivi par son peuple. Lui-même fut responsable de cette ruine, mais le peuple ne se repentit pas davantage que son roi. Quand Dieu parla à tous deux par ses serviteurs les prophètes, ils n’y firent pas attention (v. 10). Alors «l’Éternel fit venir contre eux les chefs de l’armée du roi d’Assyrie, et ils prirent Manassé dans des ceps, et le lièrent avec des chaînes d’airain et l’emmenèrent à Babylone» (v. 11). Ce que l’Éternel avait fait en figure à l’Assyrien : «Je mettrai mon anneau à ton nez et mon frein entre tes lèvres» (2 Rois 19:28), il le fait en réalité à Manassé (*).
(*) «Les ceps» semblent avoir à peu près la même signification que l’anneau de nez, un anneau ou un crochet de fer dont on perçait le nez ou les lèvres des captifs.
Et maintenant, le jugement étant consommé, on voit apparaître l’inépuisable, merveilleuse, adorable grâce de Dieu. La détresse a produit son effet dans le coeur de Manassé ; il devient un type frappant du résidu d’Israël aux derniers jours. «Quand il fut dans la détresse, il implora l’Éternel, son Dieu, et s’humilia beaucoup devant le Dieu de ses pères, et le pria ; et il se laissa fléchir par lui, et écouta sa supplication, et le ramena à Jérusalem dans son royaume ; et Manassé reconnut que c’est l’Éternel qui est Dieu» (v. 12-13).
Il cria du fond de l’abîme et s’humilia devant le Dieu de ses pères : c’est la repentance ; il pria : c’est la dépendance et le renouvellement des relations avec l’Éternel ; il fut réintégré dans son royaume et proclama la souveraineté de ce Dieu qu’il avait renié. La grâce lui fait reconnaître Dieu dans ses jugements et la grâce le restaure. Dès ce moment, Manassé est un nouvel homme.
Ce règne de 55 ans se divise en trois périodes : L’idôlatrie, la captivité, le retour, ou : l’apostasie, le jugement, la restauration. Cette dernière est complète, parce qu’elle est le fruit de la grâce.
Dès lors nous voyons Manassé à l’oeuvre pour Jérusalem et pour Dieu. Il bâtit au nord toute la muraille extérieure qui offrait un point faible aux assauts de l’Assyrien ; au sud-ouest il entoure Ophel de cette haute muraille qui fut plus tard entièrement détruite par Nebucadnetsar et ne fut pas même réédifiée du temps de Néhémie. Il place les forteresses de Juda sous la surveillance des chefs d’armée. Quant au culte il détruit entièrement celui des faux dieux qu’il avait institué partout ; il enlève de la maison de Dieu l’idole abominable qu’il y avait placée et jette toutes les impuretés hors de la ville. Mais l’oeuvre n’aurait été faite qu’à moitié si Manassé n’avait pas rétabli le culte de l’Éternel et commandé à Juda de le servir. Les hauts lieux ne furent, il est vrai, pas entièrement supprimés, mais du moins ne furent-ils destinés qu’au seul culte de l’Éternel.
Nous avons déjà fait remarquer que, jusque dans la mort, Dieu exprime son approbation ou son mécontentement sur la conduite des rois. Si un grand nombre d’entre eux, et pas toujours des meilleurs, fut enterré dans la ville de David et parmi les sépulcres des rois (même ces cas offrent, du reste, quelques nuances), d’autres furent privés de cette sépulture. Ainsi Joas fut enterré «dans la ville de David, mais on ne l’enterra pas dans les sépulcres des rois», juste conséquence du meurtre de Zacharie (24:22). Ozias le fut seulement «dans le champ de la sépulture des rois» (ce qui est différent de leurs sépultures), car il était lépreux, jugement de son acte profane (26:23) ; l’impie Achaz «fut enterré dans la ville de Jérusalem, mais on ne le mit pas dans les sépulcres des rois d’Israël» (28:27) ; Manassé fut enterré dans sa maison (v. 20) ou, comme il est dit au livre des Rois, «dans le jardin de sa maison, dans le jardin d’Uzza» (2 Rois 21:18). Seulement Manassé me semble, après sa repentance, avoir choisi lui-même le lieu de son sépulcre, se sentant indigne de la sépulture royale. S’il en est ainsi, cela ajoute un trait touchant à son humiliation.
Amon (v. 21-25) retourne aux traditions du règne de Manassé à son début. Il rétablit le culte idolâtre de son père, «et il ne s’humilia point devant l’Éternel, comme Manassé, son père, s’était humilié ; car lui, Amon, multiplia son péché» (v. 23). Il fut mis à mort dans sa maison et les Chroniques ne nous renseignent pas sur le lieu de sa sépulture, mais 2 Rois 21:26 nous apprennent que ce fut, comme son père, «dans son sépulcre, dans le jardin d’Uzza». Manassé, par ce choix reconnaissait son crime ; celui d’Amon est constaté par Dieu lui-même. Plus tard, Josias, très honoré pour sa piété est enterré «dans les sépulcres de ses pères» (35:24). Enfin, des quatre derniers rois, trois, Joakhaz, Jéhoïakin et Sédécias, meurent en Égypte ou à Babylone, tandis que Jéhoïakim est atteint par le jugement prononcé en Jér. 36:30 : «Son cadavre sera jeté dehors, de jour à la chaleur, et de nuit à la gelée».
Nous arrivons enfin au règne de Josias, dernière clarté que jette un lumignon près de s’éteindre, laissant après lui une nuit profonde jusqu’à ce que le jour renaisse avec l’apparition du vrai roi des conseils de Dieu. Cependant, par un effet de la grâce, cette lampe de David brille d’un éclat suprême avant de disparaître et fait pressentir les bénédictions futures. La Parole nous dit : «Josias fit ce qui est droit aux yeux de l’Éternel, et marcha dans les voies de David, son père, et ne s’en écarta ni à droite ni à gauche» (v. 2). «Les voies de David, son père» : pareille chose avait été dite de ses deux grands prédécesseurs, Josaphat et Ézéchias (17:3 ; 28:2). La parole de Dieu n’est pas libérale de cet éloge qui fait remonter les voies des rois fidèles aux débuts glorieux de la royauté d’Israël. Mais, s’il en était ainsi du roi, le peuple ne méritait pas le même éloge. D’une manière générale, sous les rois, la nation est allée se corrompant de plus en plus, se réveillant par moments sous l’influence d’un roi énergique et fidèle, mais, après lui, retombant bien vite dans l’idolâtrie que, de fait, elle n’avait jamais abandonnée depuis sa sortie d’Égypte. Jérémie qui commença à prophétiser dans les jours de Josias dit, précisément au sujet de ce règne : «Juda, la perfide, n’est pas revenue à moi de tout son coeur, mais avec mensonge, dit l’Éternel» (Jér. 3:10). Cette citation, entre beaucoup d’autres, suffit à dévoiler l’état moral de Juda, même aux meilleurs jours du royaume.
Les v. 3 à 7 de notre chapitre décrivent l’activité de Josias pour purifier Juda et Jérusalem de l’idolâtrie, et cela, dès le début de son règne, quand il était encore un jeune garçon. Le second livre des Rois (23:4-20 et 24-27) décrit l’activité de Josias, après dix-huit ans de règne, pour purifier le temple. Ces deux récits nous offrent deux instructions également intéressantes. Celui des Rois rattache la purification du temple et de la ville (et ensuite la démolition de l’autel de Béthel) à la découverte du livre de la loi, la dix-huitième année du règne de Josias (2 Rois 22:3). La lecture du «livre de l’alliance» (23:2) poussa le roi à entreprendre cette oeuvre (Jér. 11:1-8). Le récit des Chroniques a une autre portée que celui-ci. D’accord avec le récit des Rois, le livre de la loi fut trouvé dans le temple la dix-huitième année du règne de Josias ; d’accord avec lui encore, cette découverte eut pour conséquence le renouvellement de l’alliance du roi et de tout son peuple avec Dieu. Seulement, à la suite de cette alliance, les Chroniques ne mentionnent pas l’abolition de l’idolâtrie dans le temple et à Jérusalem, mais la célébration de la Pâque. Cette dernière n’est mentionnée qu’en passant en 2 Rois 23:21-23, tandis qu’elle occupe tout le chap. 35 des Chroniques.
Donc, un fait commun, la découverte du livre de la loi, a pour conséquence, dans les Rois, le rejet complet de l’idolâtrie, à commencer par le temple et ce qui l’entoure, et dans les Chroniques la solennité de la Pâque. Cette divergence est simple, quand on considère le caractère du livre que nous étudions. Tout ce qui a trait au culte et à la sacrificature est inséparable, comme nous l’avons souvent fait remarquer, de l’institution de la royauté selon les conseils de Dieu. Pour la dernière fois Dieu en donne l’exemple en Juda et montre, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, quelles bénédictions se rattachent à la célébration de la Pâque.
Mais le fait est que la découverte et la mise en lumière des Écritures, si longtemps ensevelies dans la poussière d’un sanctuaire abandonné, entraîne avec elle ces deux choses capitales du témoignage en Israël : le rejet de l’idolâtrie et la fête de la rédemption, comme de nos jours elle entraîne, pour le témoignage chrétien, la séparation du monde et du mal, et le rassemblement des enfants de Dieu autour de Christ, leur pâque, et autour du mémorial de son oeuvre.
Comme nous l’avons vu (v. 3-7), le dévouement pour l’Éternel avait commencé de très bonne heure, entre 16 et 20 ans, chez Josias. Il était encore très ignorant quant aux pensées de Dieu et aux conséquences de la culpabilité du peuple, mais il avait l’ardent désir de voir le pays et la ville de l’Éternel purifiés de tant de souillures. Les bénédictions accordées à la foi de ses ancêtres, la restauration de Manassé, son grand-père, devaient sans doute être pour lui de puissants motifs de marcher dans cette voie, joints à l’horreur causée par l’abominable exemple donné par son père Amon, et au sort terrible qui en avait été pour lui la conséquence.
Dieu bénit le zèle de Josias en lui faisant découvrir sa Parole. Si, comme nous le voyons ici, ayant eu à coeur de purifier Israël, il s’était borné à cela, sans éprouver le besoin de réparer les brèches de la maison de Dieu et de lui redonner son importance, la découverte du livre de la loi n’aurait pas eu lieu. De nos temps pareille chose est arrivée maintes fois à des chrétiens, pleins de zèle contre les pratiques idolâtres de l’Église romaine, et dont les efforts n’ont pas été couronnés de succès, parce qu’ils n’avaient pas à coeur l’Église, la vraie Assemblée de Christ.
La lecture de ce livre atteint puissamment la conscience de Josias : «Et il arriva, quand le roi entendit les paroles de la loi, qu’il déchira ses vêtements» (v. 19). Il sent immédiatement le besoin de consulter l’Éternel, car il reconnaît sa culpabilité et celle de «ce qui est de reste en Israël et en Juda». Il constate que le mal remonte aux «pères qui n’ont pas gardé la parole de l’Éternel». C’est la confession de la ruine complète de tous, fruit de la désobéissance commune. Reste-t-il encore quelque espoir ? Consultée, la prophétesse Hulda donne la réponse définitive : Toutes les malédictions prononcées par la loi, ne peuvent être révoquées. La fureur de l’Éternel atteindra Jérusalem comme un feu inextinguible, mais, quant au roi, il sera l’objet de la grâce, car — la prophétesse y insiste par deux fois — il s’est «humilié devant Dieu» (v. 27), a déchiré ses vêtements en signe de deuil et d’affliction, a pleuré les larmes de la repentance. À cause de cela, il sera retiré devant le mal, comme il est dit en Ésaïe : «Le juste périt, et personne ne le prend à coeur ; et les hommes de bonté sont recueillis sans que personne comprenne que le juste est recueilli de devant le mal. Il est entré dans la paix : ils se reposent sur leurs couches, ceux qui ont marché dans leur droit chemin» (És. 57:1-2).
Il pourrait sembler, devant cette déclaration catégorique de la part de Dieu, que Josias n’avait autre chose à faire que d’attendre la délivrance sans s’inquiéter de ce qui suivrait. C’est exactement l’effet contraire qui se produit chez cet homme de Dieu. La connaissance qu’il a reçue par la Parole, «combien le Seigneur doit être craint», le pousse à s’efforcer de mettre le peuple à l’abri pendant qu’il en est temps encore. Il fait alliance avec l’Éternel et «fait entrer dans l’alliance tous ceux qui se trouvaient à Jérusalem et en Benjamin» (v. 32), seul moyen de revenir à Dieu sous la loi, tant qu’une nouvelle alliance, n’engageant que Dieu seul, n’avait pas été établie. Josias oblige «même tous ceux qui se trouvaient en Israël à servir l’Éternel leur Dieu» (v. 33). C’était le zèle pour ces âmes, la crainte pour elles du jugement à venir, qui le faisaient agir ainsi. Josias accomplissait la parole dite par le maître à son esclave : «Contrains les gens d’entrer» (Luc 14:23). Ce qui le poussait à cette activité était la connaissance de la grâce pour lui-même, annoncée par la parole de la prophétesse et la révélation des jugements qui tout en épargnant le roi devaient atteindre le peuple. Pourquoi la grâce ne serait-elle pas aussi pour d’autres, pouvait-il se demander, lui qui avait reconnu, à la lecture du livre de la loi, que ce jugement aurait dû l’atteindre aussi lui-même ?
Comme nous l’avons déjà remarqué, nous avons ici l’un des grands résultats de la Parole retrouvée : la célébration de la Pâque unie au Culte, la plus haute expression de la vie divine dans le croyant. La Pâque était le fondement du Culte, aussi la description de cette fête est bien plus détaillée ici que lors de la Pâque d’Ézéchias (30:15-27), car elle est accompagnée de tout l’appareil du culte. De fait, au temps d’Ézéchias, comme nous l’avons déjà remarqué, la fête des pains sans levain, symbole d’une vie sainte, entièrement consacrée à l’Éternel, faisant suite au sacrifice de l’agneau pascal est mise beaucoup plus en évidence que le culte lui-même.
Examinons en détail le contenu de cet intéressant chapitre. On y remarque tout d’abord que le culte est basé sur la révélation que la parole de Dieu en a faite au peuple. Aucun détail quelconque n’est laissé à la décision ou au bon plaisir de l’homme. Les livres de Moïse avaient été retrouvés dans le temple ; ils règlent l’institution de la Pâque, mais aussi de tous les sacrifices qui étaient offerts à l’occasion de cette solennité. Les lévites, n’ayant plus à porter l’arche sur leurs épaules, devaient la placer de nouveau dans le lieu très saint, d’où probablement Amon l’avait fait sortir. Cela modifiait leur service : Ils avaient maintenant à servir l’Éternel, leur Dieu, et son peuple Israël (v. 3). Prenant désormais leur place dans le lieu saint, ils devaient égorger la Pâque et la préparer pour leurs frères. De plus, ils étaient au service des sacrificateurs. Ils mettaient à part les holocaustes, faisaient rôtir la Pâque au feu et cuire dans les chaudières les sacrifices de prospérité pour le peuple ; préparaient leurs portions et celles des fils d’Aaron. Leur service fut réglé selon le commandement du roi (v. 10, 16), mais ce commandement lui-même le fut «conformément à la parole de l’Éternel par Moïse», «selon qu’il est écrit dans le livre de Moïse», «selon l’ordonnance» (v. 6, 12, 13). On voit aussi que la parole de Dieu contenait tous les écrits inspirés donnés jusqu’au temps de Josias. Tout devait être préparé et ordonné «suivant l’écrit de David, roi d’Israël, et suivant l’écrit de Salomon, son fils» (v. 4), et enfin «selon le commandement de David, et d’Asaph, et d’Héman, et de Jeduthun, le voyant du roi». Ainsi aucune partie de la Parole n’était négligée quand il s’agissait du culte et de l’ordre qui convenait à la maison de Dieu.
Combien aussi cela est nécessaire de nos jours ! C’est précisément dans ces choses que les chrétiens, souvent les plus pieux, manquent complètement. Ignorant ce qu’est le Culte — l’adoration en commun des enfants de Dieu, réunis autour de la table du Seigneur — ils ignorent aussi en quoi consiste le service des lévites (correspondant aux ministères actuels) et qu’ils confondent avec celui des sacrificateurs ; ils ignorent tout aussi complètement que la Parole a seule le droit de régler l’ordre et l’organisation de la maison de Dieu, lorsqu’il s’agit du service de l’Assemblée, aussi bien que jadis quand il s’agissait du service du temple. Pour nous, chrétiens, la première épître aux Corinthiens détermine cet ordre, comme la première à Timothée règle la manière de se conduire dans la maison de Dieu. Lors de la célébration de la Pâque de Josias, nous voyons ordre et conduite rétablis selon la Parole. Ce ne sont pas seulement les sacrificateurs et les lévites qui occupent les places qui leur sont assignées ; ce sont aussi les chantres, selon le commandement de David, d’Asaph, d’Héman, de Jeduthun ; ce sont les portiers qui n’eurent pas à abandonner leur service, car leurs frères, les lévites, préparaient ce qui était pour eux. Ainsi chaque partie de cet organisme était bien à sa place, chacun s’acquittant fidèlement de ses fonctions. Ce qui reliait le tout dans une activité commune était le service lévitique, descendant de ses hautes fonctions primitives, désormais inutiles (porter l’arche), aux plus humbles fonctions en faveur de leurs frères.
Le fonctionnement de l’Assemblée, de l’Église, corps de Christ, présente ces mêmes caractères, lorsque la parole de Dieu le dirige. Lisez, par exemple, Rom. 12:4-8 ; 1 Cor. 12 tout entier, ainsi que le chap. 14, vous y trouverez les mêmes principes et les mêmes vérités qui sont présentés dans notre chapitre.
La Pâque de Josias fut célébrée le quatorzième jour du premier mois, non pas au deuxième mois, comme celle d’Ézéchias, parce que sacrificateurs et lévites s’étaient sanctifiés et consacrés à l’Éternel. Cette date correspond à l’année de la restauration du temple, c’est-à-dire à la dix-huitième année du règne de Josias. Tant que l’habitation de Dieu au milieu de son peuple n’était pas un fait reconnu et établi de nouveau, il était impossible que cette fête fût célébrée. Il ne peut y avoir de culte lorsque la promesse du Seigneur d’être au milieu des siens n’est pas réalisée. On peut trouver partout un mémorial de Sa mort, mais combien le mémorial de la Pâque aurait été incomplet sous Josias, sans l’ensemble des bénédictions attachées à la sacrificature et au culte de l’Éternel. Point n’était besoin, pour célébrer la Pâque, comme simple mémorial, de tout l’ensemble du culte dont Josias l’entourait. Chaque famille des Israélites aurait pu la prendre dans sa maison. Mais si ce mémorial était à la base du culte, il n’était pas le culte lui-même. Quand la Pâque fut célébrée la nuit de la sortie d’Égypte, ou bien quand le mémorial de la mort du Sauveur fut confié par lui à ses disciples, la nuit où il fut livré, ce n’était pas le culte proprement dit. Il ne fut compris et réalisé qu’après la délivrance, et il gardera éternellement ce caractère quand il sera célébré autour de l’Agneau immolé, son oeuvre expiatoire en étant la base et le centre.
Nous trouvons donc dans ce chapitre trois choses inséparables. Elles constituent la grandeur de cette cérémonie, dont il est dit : «On n’avait point célébré en Israël de Pâque semblable depuis les jours de Samuel, le prophète ; et aucun des rois d’Israël n’avait célébré une Pâque comme celle que firent Josias, et les sacrificateurs, et les lévites, et tout Juda et Israël, qui s’y trouvèrent, et les habitants de Jérusalem» (v. 18). L’année de la restauration du temple et du placement de l’arche en son lieu — l’année de la découverte du livre de la loi — cette année, la Pâque fut célébrée et le Culte retrouvé. Il en est de même de nos jours. Lorsque l’Assemblée du Dieu vivant, l’habitation de Dieu par l’Esprit, est connue, lorsque la parole de Dieu, toute la Parole et rien qu’elle, est découverte et mise en lumière, comme seule et unique règle du chrétien, le Culte peut avoir lieu d’une manière intelligente autour du mémorial de la mort, et à la gloire de notre Seigneur Jésus Christ.
La réalisation de ces choses est nécessairement accompagnée d’une grande liberté et d’une grande joie. Jamais encore, sous l’économie des prophètes, on n’avait vu Pâque pareille. Comparez les dons volontaires du roi, des princes, des sacrificateurs et des lévites (v. 7-9) avec ceux qui furent offerts sous le règne d’Ézéchias (30:24), et vous constaterez aisément la différence entre ces deux Pâques.
Cette scène de joie est suivie, hélas ! d’un désastre. Josias montre qu’il n’est pas le roi des conseils de Dieu. Comme cela arrive si souvent, il manque précisément du côté où, étant le plus fort, il avait en apparence le moins besoin de se mettre en garde. Il ne reconnaît pas la parole de Dieu quand elle lui est adressée, lui, dont les oreilles avaient été jusque-là si promptes à l’écouter. «Il n’écouta pas les paroles de Neco, qui venaient de la bouche de Dieu» (v. 22). Qu’avait-il donc à entrer dans le conflit des nations, quand le peuple de Dieu n’était pas en cause ? Ne devait-il pas considérer ces événements comme dirigés par l’Éternel et ne pas intervenir ? S’engager dans les luttes des hommes, chercher à prévoir leurs desseins pour les contrecarrer, prendre part à leur politique, c’est courir au-devant d’une défaite certaine. N’oublions jamais que Dieu a la haute main sur tout ce qui arrive dans le monde. L’homme s’attribue la direction de ces événements, mais il n’est, comme le Pharaon Neco, qu’un instrument dont Dieu se sert pour arriver au but que Lui — non pas l’homme — s’est proposé.
C’est ainsi que, blessé à mort dans le combat, Josias termine sa carrière. Le deuil est général ; le prophète Jérémie écrit ses Lamentations au sujet de sa mort. Il comprend, comme prophète, que le dernier espoir d’un règne selon Dieu disparaît avec ce roi pieux ; c’est pourquoi ces Lamentations sont établies «comme ordonnance pour Israël». Mais, devant ce deuil, les yeux de Jérémie se portent sur un autre que Josias, sur Celui qui put dire : «Je suis l’homme qui ai vu l’affliction par la verge de sa fureur» (Lam. 3:1) — sur Celui «qui est assis solitaire, et se tait, parce qu’il l’a pris sur lui ; il met sa bouche dans la poussière : peut-être y aura-t-il quelque espoir. Il présente la joue à celui qui le frappe, il est rassasié d’opprobres» (3:28-30) — sur Celui qui dit : «Les eaux ont coulé par-dessus ma tête ; j’ai dit : Je suis retranché !» (3:54) — mais qui, par ses souffrances même, mettra fin au jugement d’Israël : «La peine de ton iniquité a pris fin, fille de Sion ; il ne te mènera plus captive» (4:22) — sur Celui enfin qui établira son trône à jamais, là où même le trône du fidèle Josias s’est affaissé et a disparu : «Toi, ô Éternel ! tu demeures à toujours, et ton trône est de génération en génération» (5:19).
Ce chapitre n’est qu’un résumé, très bref à dessein, du récit contenu dans les derniers chapitres du livre des Rois (2 Rois 23:31-25). Avec les rois qui succèdent à Josias, l’effondrement de la royauté est complet et définitif. À peine semble-t-il nécessaire à l’auteur inspiré d’enregistrer ses dernières convulsions. Elles n’ont plus d’importance réelle dans le livre des Chroniques, sinon pour compter, aussi loin que l’histoire les poursuit, les anneaux de la chaîne qui aboutira à l’Oint de l’Éternel. C’est pourquoi aussi l’Esprit de Dieu relie, d’une manière si remarquable, la fin des Chroniques au livre d’Esdras, répétant mot pour mot, aux v. 22 à 23 de notre chapitre, les paroles par lesquelles le livre suivant commence. En effet, Zorobabel, dans le livre d’Esdras, est encore un rejeton affaibli de la royauté de Juda — puis viennent des réveils en Esdras et Néhémie, réveils produits au milieu du résidu remonté de Babylone pour attendre le Messie promis ; mais ces réveils aussi sont sans résultat durable, et quand apparaît enfin le vrai roi d’Israël, son peuple le crucifie. Cependant les conseils de Dieu s’accomplissent : ce sont les souffrances de Christ qui ouvrent la porte à l’établissement de son trône glorieux sur la terre.
Tous les derniers rois «firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel». Joakhaz (v. 1-4) est lié de chaînes par le Pharaon Neco que Josias avait eu la témérité de combattre. Ainsi la seule faute de ce roi pieux eut pour effet de hâter la décadence du royaume. Transporté en Égypte, Joakhaz y meurt après trois mois de règne à Jérusalem.
Jéhoïakim (v. 5-7) commet des abominations ; lié avec des chaînes d’airain, il est conduit par Nebucadnetsar à Babylone où il meurt de la mort des malfaiteurs (Jér. 36:30). Le nom de sa mère manque dans les Chroniques, comme il en est du reste de tous les mauvais rois depuis Ézéchias.
Jéhoïakin, son fils, est transporté à Babylone. Sa restauration à la cour d’Évil-Merodac, après 37 ans de captivité, n’est pas mentionnée (voyez 2 Rois 25:27-30), car il ne s’agit ici que d’accentuer la ruine complète et définitive de la royauté en Juda.
L’énumération prend fin avec Sédécias. Nous avons parlé autre part (2 Rois) de son règne en rapport avec ce qui nous en est dit dans les prophètes Jérémie et Ézéchiel. Les v. 12 à 13 résument toute sa triste carrière : Il fit ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, son Dieu. Quand la parole de l’Éternel lui est adressée par le prophète Jérémie, il ne s’humilie pas. Il se révolte contre le pouvoir établi sur lui, comme châtiment de la part de Dieu ; bien plus encore, il viole un serment fait au nom de l’Éternel. Que pouvait-il y avoir de plus odieux que cet acte vis-à-vis des nations idolâtres, et aux yeux de Dieu dont le saint nom était déshonoré par un parjure et jeté dans la boue ? Enfin il roidit son cou et endurcit son coeur pour ne pas retourner à l’Éternel. Une décision irrévocable est prise contre lui, car Sédécias ne voulait pas de Dieu.
Ainsi finit l’histoire de la royauté. Celle des sacrificateurs et du peuple ne fut pas plus édifiante (v. 14-21). «Ils rendirent impure la maison de l’Éternel». Et pourtant, jusqu’au bout, Dieu leur montrait sa grâce, caractère si remarquable des Chroniques : «L’Éternel, le Dieu de leurs pères, envoya vers eux par ses messagers, se levant de bonne heure et envoyant, car il avait compassion de son peuple et de sa demeure» (v. 15). Ils lui répondirent par la moquerie, le mépris, la raillerie au sujet des prophètes. Enfin la colère arriva sur eux à son dernier terme : Le roi des Chaldéens monta contre Jérusalem. Nous savons d’après le récit des Rois et le prophète Jérémie quel fut le sort de Sédécias. Ici, sans autre détail, il est comme englouti dans le jugement général. Dieu avait eu «compassion de son peuple et de sa demeure» jusqu’au dernier moment, mais l’heure vient où il «n’a pas compassion du jeune homme, ni de la vierge, ni de l’ancien, ni du vieillard : il les livra tous» entre les mains du roi des Chaldéens (v. 17). Ceux-ci «brûlèrent la maison de Dieu, et abattirent la muraille de Jérusalem, et brûlèrent par le feu tous ses palais ; et tous ses objets désirables furent livrés à la destruction. Et il transporta à Babylone le reste échappé à l’épée ; et ils furent ses serviteurs, à lui et à ses fils, jusqu’au règne du royaume des Perses ; afin que fût accomplie la parole de l’Éternel, dite par la bouche de Jérémie, jusqu’à ce que le pays eût joui de ses sabbats. Tous les jours de sa désolation il se reposa, jusqu’à ce que soixante-dix ans fussent accomplis» (v. 19-21).
Le premier Adam avait mis à néant, par sa chute, les conseils de Dieu à son égard ; Dieu y a répondu par le second Adam. La royauté en Israël avait fait de même ; Dieu y répondra en oignant son Roi sur Sion, la montagne de sa sainteté ! (Ps. 2:6).