[ Page principale | Nouveautés | La Bible | la Foi - l'Évangile | Plan des sujets | Études AT | Études NT | Index auteurs + ouvrages + sujets ]
Paraboles de Luc 15
Christian Briem
Traduit de l’allemand : « Il les enseignait en beaucoup de paraboles », vol. 2 p. 153-208
Les sous-titres ont été un peu modifiés par Bibliquest pour mieux correspondre au texte
Table des matières abrégée :
Table des matières détaillée :
1.2 Le ch. 15 : la joie de Dieu, le cœur de Dieu. Toute la Déité cherche les perdus
2.1 Une réponse aux pharisiens et aux scribes
2.2 Diverses sortes de brebis. Jean 10
4.2 La responsabilité de l’homme — Luc 15:11
4.2.1 L’origine de l’homme, c’est Dieu
4.2.2 Responsabilité de l’homme vis-à-vis de Dieu
4.3 Le caractère du péché — Luc 15: 12-13
4.4 Dans le pays étranger [éloigné] — Luc 15:14-16
4.5 La bonté de Dieu qui pousse à la repentance — Luc 15:17-19
4.6 Conversion, repentance et confession — Luc 15:18-19
4.7 La grâce surabondante de Dieu — Luc 15:20
4.8 La joie de Dieu — Luc 15:22-24
4.10 Le propre-juste — Luc 15:25-32
La manière dont l’évangéliste Luc, sous le contrôle et la direction complets du Saint Esprit, a, dans son évangile, regroupé des événements détachés et des enseignements du Seigneur, est déjà étonnante. La suite chronologique est couramment entièrement mise de côté, et on trouve, à la place, des connections morales. Je veux dire par-là qu’il dépeint des tableaux qui nous donnent des leçons importantes pour le cœur et la conscience, non seulement quand on les prend isolément, pour eux-mêmes, mais aussi dans leur succession et leur regroupement. De cette manière, nous apprenons à voir des relations qui autrement nous seraient restées entièrement fermées.
Le passage du ch. 14 au ch. 15 en est un exemple particulièrement instructif. Dans la parabole du « grand souper » (Luc 14:16-24), le Seigneur Jésus montrait la réponse que donnaient les gens (ici les Juifs en premier lieu) à l’invitation de Dieu de venir à Lui. Tous, sans exception, trouvaient une excuse. L’un avait acheté un champ, l’autre avait acheté cinq paires de bœufs, et l’autre avait épousé une femme ; et ainsi ils ne venaient pas. Le mal ne résidait pas dans les choses elles-mêmes qu’ils donnaient comme excuse, mais dans le fait qu’ils y trouvaient une excuse pour pouvoir ne pas donner suite à l’invitation de bonté. En bref, ils n’avaient ni le temps ni le cœur pour la grâce de Dieu. « Je te prie, tiens-moi pour excusé ». N’est-ce pas le langage de beaucoup de gens aujourd’hui ? « Pas de temps » ! pas de temps pour Dieu, et pas de temps pour réfléchir au message de Sa grâce.
La section suivante de Luc 14 (v. 25-35), brosse un tableau contraire : de grandes foules allaient à Jésus ; Il ne rencontrait plus ouvertement le rejet, mais au contraire un certain intérêt pour Lui. Les gens se sentaient extérieurement attirés par Lui, et L’accompagnaient. Il leur semblait facile de Le suivre. Mais savaient-ils seulement où Il allait, et où Il les conduisait ? Le Seigneur ne les laissa pas dans le flou ; Le suivre, cela signifiait renoncer à tout ce qui a de la valeur pour l’homme naturel ici-bas. C’est pourquoi chacun d’eux individuellement devait évaluer le coût, — le coût d’être Son disciple et le coût de ne pas l’être. Il fallait donc une décision de cœur et la conscience profonde que Dieu seul peut donner la grâce et la force de renoncer au monde et de suivre Christ de tout cœur. Nous avons considéré cela à l’occasion des deux petites paraboles de la « tour » et des « deux rois ».
Immédiatement après suit le ch. 15 avec ses trois paraboles merveilleuses, celle de la « brebis perdue », celle de « drachme perdue », et celle du « fils perdu » [fils prodigue]. Elles sont la réponse au murmure des pharisiens et des scribes contre le fait qu’Il recevait les pécheurs et mangeait avec eux.
Effectivement les publicains et les pécheurs s’approchaient de Lui pour l’entendre (15:1). Au « grand souper », les invités ne venaient pas (14:15-24), et les foules (14:25) allaient avec Lui, sans même vraiment Le connaître ni se connaître elles-mêmes. Mais ici (15:1) les pécheurs venaient en sachant leur état ; ils venaient au Sauveur des pécheurs. Leur cœur était attiré par Sa Personne, et ils voulaient entendre Sa Parole, Parole de grâce et de vérité. J’ai souvent pensé : quelle grâce il a fallu que le Seigneur montre ici-bas sur la terre pour que les gens dépravés soient attirés si puissamment par Lui, qu’ils surmontaient toute honte et s’approchaient de Lui !
Nous arrivons par-là au grand sujet de ce chapitre : la joie de Dieu — Sa joie de manifester la grâce et d’accueillir les pécheurs perdus. Les trois paraboles parlent toutes de cette joie, et nous verrons quelque chose de merveilleux : chaque Personne de la Déité est active dans la recherche de ce qui est perdu. Dans la première parabole, nous voyons Dieu le Fils ; dans la deuxième Dieu le Saint Esprit, et dans la troisième Dieu le Père. Dans toutes ces trois paraboles, c’est Dieu qui cherche, non pas l’homme ; car « il n’y a personne qui recherche Dieu » (Rom. 3:11).
Le thème de ce chapitre n’est donc pas tant de montrer comment l’homme est sauvé, mais plutôt pourquoi il est sauvé. Les pharisiens murmuraient de ce que Jésus recevait les pécheurs. Or c’est justement ce dont le Seigneur se glorifiait, et Il montrait qu’Il ferait encore bien plus, et que même toute la Déité participait à cette recherche des pécheurs qu’ils étaient. Quel domaine merveilleux se découvre ici : le cœur de Dieu, l’amour de Dieu pour les perdus !
Si nous gardons à l’esprit ce fil conducteur, nous ne serons pas étonnés que certaines vérités concernant le salut de l’âme ne figurent pas dans ces paraboles. Ainsi par exemple elles ne parlent pas de foi, ni de rédemption, ni de propitiation, ni d’un Rédempteur, ni de sang versé. C’est que, dans les paraboles, il n’y a pas à chercher tous les côtés de la vérité. Il s’agit ici de la révélation du cœur de Dieu, et cela envers des gens qui ne sont rien d’autre que des perdus.
Les pharisiens et les scribes avaient raison quand ils disaient de Jésus : Il reçoit les pécheurs et mange avec eux. Bien sûr eux-mêmes n’auraient fait ni l’un ni l’autre. Mais Lui faisait les deux. Sans le vouloir et sans en avoir l’intention, ils devenaient des propagateurs de Sa grâce illimitée.
Le Seigneur Jésus répond à leur objection par trois tableaux tirés de la vie journalière. Le premier provient de la vie d’un berger, le deuxième de la vie à la maison, et le troisième de la vie familiale.
« Et il leur dit cette parabole, disant : Quel est l’homme d’entre vous, qui, ayant cent brebis et en ayant perdu une, ne laisse les quatre-vingt-dix-neuf au désert, et ne s’en aille après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait trouvée ? et l’ayant trouvée, il la met sur ses propres épaules, bien joyeux ; et, étant de retour à la maison, il appelle les amis et les voisins, leur disant : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai trouvé ma brebis perdue. Je vous dis, qu’ainsi il y aura de la joie au ciel pour un seul pécheur qui se repent, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance » (Luc 15:3-7).
Cette parabole est empreinte d’une grande simplicité. Le Seigneur dit à ces pharisiens et scribes orgueilleux et propre justes, qui continuaient à mépriser la bonté de Dieu, qu’en définitive ils feraient la même chose que Lui faisait. À partir du plus petit, Il conclut sur le plus grand, à partir de la brebis, Il conclut au sujet de l’homme. Si même l’un d’entre eux ferait ce qui est esquissé ici pour une brebis perdue, le Seigneur ne devait-Il pas agir de manière analogue pour un homme perdu ?
Cette question à laquelle, intérieurement, ils ne pouvaient répondre que positivement, ce tableau tout simple, suffisait au Seigneur pour les désarmer et pour trancher la question en Sa faveur. Les questions sont dans Sa main des outils puissants ; Il s’en sert pour viser et atteindre directement les cœurs et les consciences de Ses auditeurs. Elles manifestent une sagesse infiniment plus qu’humaine. Le Seigneur n’a besoin pour ainsi dire que de lever le doigt, et voilà ses contradicteurs qui tombent, et qui tombent sous leur propre jugement. Quelle personne grandiose est Celui à qui nous avons affaire !
Pour comprendre correctement cette parabole et les deux qui suivent, il faut garder à l’esprit que le Seigneur répond par leur moyen au reproche des conducteurs religieux du peuple juif. Il les compare ici avec les 99 brebis au désert, tandis qu’Il présente les publicains et les pécheurs sous l’image de la brebis perdue. Ils étaient tous des « brebis », les uns comme les autres. Même si les pharisiens et les scribes regardaient de haut les publicains et les pécheurs, et les méprisaient, ils étaient tous des brebis du même troupeau. Car le peuple d’Israël est souvent considéré dans l’Ancien Testament comme un « troupeau » (voir Ps. 77:20 ; 78:52 ; 95:7 ; És. 40:11 ; 63:11 ; Jér. 13:17, 20).
Ni dans cette parabole ni dans les deux suivantes du même chapitre, il n’est fait référence aux différences, comme celles qui distinguaient les Juifs d’avec les nations selon les pensées de Dieu.
Au sens national, les publicains et les pécheurs étaient sur le même terrain de privilèges extérieurs que les pharisiens et les scribes. Si le Seigneur avait reçu des « païens » et avait mangé avec eux, il est vrai que les pharisiens et les scribes auraient eu en un certain sens un motif valable d’accusation contre Lui. Mais il n’en était pas ainsi.
Comme nous allons le voir, le Seigneur, en Jean 10, parle aussi de brebis, mais non pas dans un sens national, seulement dans un sens moral. Sous ce point de vue, les pharisiens n’étaient pas de Ses brebis (Jean 10:26). Seuls ceux d’Israël qui croyaient en Lui et Le suivaient, étaient en vérité Ses brebis. Il leur donnait la vie éternelle. Il est important de se rendre compte de ces différences.
Or si une brebis du troupeau d’Israël s’égarait, si des gens attirés par le Seigneur étaient effectivement des pécheurs, quelle raison pouvait-on donner pour ne pas s’en occuper ? Car quand une brebis du troupeau s’égare, le berger ne met-il pas toute son énergie à la retrouver, ne concentre-t-il pas là-dessus toutes ses pensées ? C’est ce que le Seigneur présente dans cette parabole.
Naturellement l’image de la brebis perdue est applicable à n’importe quel pécheur. Nous le savons bien : si une brebis s’égare, c’est selon sa nature de ne pas être capable de retrouver le chemin. Il faut aller à sa recherche si on ne veut pas qu’elle périsse. Par nature il en est ainsi de tout homme, si on veut bien en convenir tant soit peu. Mais le Seigneur Jésus, le bon Berger, est prêt à chercher et sauver ce qui est perdu.
Certaines particularités méritent qu’on y regarde de plus près. Dans cette parabole, il y a un pour cent de perdu, et la valeur en est vue proportionnellement. Dans la parabole suivante, il y a un sur dix de perdu, et la valeur croit proportionnellement. Et finalement le perdu représente un sur deux, et la valeur atteint son maximum. Mais même s’il n’y a qu’un pour cent des brebis qui s’égare, le berger part à sa recherche. Pour Lui, ça vaut toujours la peine.
Parce que le Seigneur répond à Ses contradicteurs religieux, et qu’Il compare Sa manière d’agir, avec ce qu’eux feraient, en définitive, en pareil cas, Il ne dit pas dans Sa sagesse : « Si J’avais cent brebis… ». Il évite même d’utiliser le mot de « berger ». C’est nous qui utilisons ce terme quand nous parlons de cette parabole, et nous avons raison de le faire ; mais Lui ne se nomme pas ainsi ici, bien qu’Il soit naturellement le bon Berger et qu’Il parle de Lui-même.
Le bon Berger va devant les brebis, et les brebis le suivent (Jean 10:4). Mais quand la brebis ne veut pas Le suivre, Il faut qu’Il aille après elle. Quelle immense différence entre les brebis de Jean 10 et celles de Luc 15 ! En Jean 10 elles sont en sécurité, et en Luc 15 il y a un grand danger. En Jean 10, le bon Berger meurt pour les brebis, en Luc 15 Il cherche la brebis. Les deux tableaux se complètent de manière admirable.
Bien sûr, les brebis appartiennent au berger, comme les drachmes à la femme. Mais le Seigneur ne fait pas ressortir ce point dans ces paraboles. Il montre avant tout le caractère de la grâce et de l’amour insurpassables de Dieu. Quand une de Ses brebis se perd par sa propre folie, le Berger va après la brebis pour la chercher. Quel qu’en soit le coût pour Lui, — honte, mépris, moquerie, opprobre, travail, peine, renoncement à soi-même et abnégation, — Il a à cœur les objets de Son amour, et Il fait tout pour les chercher et les sauver. Que cela inclue aussi la mort du Bon Berger, nous l’avons déjà dit. Cependant, ce n’était pas les brebis des pharisiens, mais c’était Ses propres brebis. Nous devons d’abord penser, comme déjà vu, que cette expression se réfère aux brebis perdues de la maison d’Israël. Mais Il a aussi « d’autres brebis », celles des nations (Matt. 10:6 ; Jean 10:16).
Oui, l’amour de Dieu cherche. C’est son caractère dans cette parabole et dans la suivante. Il reçoit aussi : c’est la troisième parabole qui le présente.
Tout parle ici de l’activité et de l’œuvre du Berger, notre Seigneur. C’est Lui qui laisse les 99 brebis au désert ; c’est Lui qui va après la perdue jusqu’à ce que Lui la trouve. Et quand Lui l’a trouvée, c’est Lui qui la met sur Ses épaules, tout joyeux, et la ramène à la maison. La brebis ne fait pas un seul pas en direction du Berger ; tout ce qui est fait n’est fait que par Lui.
Au sujet de la brebis, il nous est seulement dit qu’elle s’était égarée et s’était perdue. Il ne nous est pas dit un seul mot sur ce qu’elle a éprouvé quand elle a été trouvée. Ce n’est pas le sujet que le Seigneur veut nous présenter. L’attention est attirée seulement et uniquement sur la joie du Berger. C’est aussi une joie qui se communique et qui ne cesse jamais, du moins dans le cadre de la parabole. Car quand Il rentre à la maison, Il appelle Ses voisins et Ses amis et les invite à se réjouir avec Lui « car j’ai trouvé ma brebis perdue » (Luc 15:6).
N’est-ce pas une pensée impressionnante que le Seigneur Jésus se réjouisse du salut des perdus ? À chaque « brebis » qu’Il a pu arracher à la perdition, Il éprouve de la joie. Elle fait partie de la joie dont parle l’épître aux Hébreux (12:2) : « À cause de la joie qui était devant Lui, Il a enduré la croix, ayant méprisé la honte ». Les pharisiens murmuraient tandis que le Seigneur Jésus se réjouissait. « Il verra du fruit du travail de son âme, et sera satisfait » (Ésaïe 53:11) ; « Il se reposera dans son amour, il s’égayera en toi avec chant de triomphe » (Sophonie 3:17).
Comme on l’a déjà indiqué, le Seigneur fait participer d’autres à Sa joie, et Il la leur communique. Ce que représentent les « amis » et les « voisins » se voit clairement par les paroles finales de cette parabole et de la suivante : ce sont les saints anges qui demeurent dans la présence de Dieu. Ils respirent l’atmosphère de la présence de Dieu et entrent dans Sa joie. C’est ainsi que s’exprime ici le Seigneur : « Je vous dis, qu’ainsi il y aura de la joie au ciel pour un seul pécheur qui se repent, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance » (Luc 15:7).
Méditons cela : Si un pécheur se repent sur la terre, se juge devant Dieu, alors les anges dans le ciel s’en réjouissent ! Y avons-nous pensé ? Pourtant c’est là la manière de voir du ciel, l’état d’esprit du ciel. Le ciel prend part au fait que, sur la terre, un seul homme donne à Dieu la place qui Lui revient, et prend lui-même la place qu’il mérite. Voilà le sujet de joie du ciel. Il n’y a pas de murmures là. Nous apprenons plus loin dans le Nouveau Testament (Éph. 3:10) que l’assemblée de Dieu sur la terre est le « livre d’instruction » des anges, où ils peuvent apprendre la sagesse si diverse de Dieu. Les paroles du Seigneur ici nous préparent à l’avance pour cette grande vérité.
Pourtant, je ne peux m’empêcher de penser que, sous l’image des « amis » et des « voisins », nous les rachetés du Seigneur sommes aussi inclus. Il arrive souvent que dans Son explication, le Seigneur dépasse le cadre strict des termes de la parabole. Nous l’avons déjà vu à plusieurs reprises. Or Christ n’est-Il pas notre vie ? N’appartenons-nous pas déjà au ciel, même si nous sommes encore sur la terre ? La manière de voir du ciel n’est-elle pas la nôtre ? Ne nous réjouissons-nous pas quand un pécheur se repent ? Oui, nous sommes rendus dignes d’avoir communion déjà maintenant avec Sa joie. Et cette communion nous conduira nécessairement à l’adoration de Celui dont l’amour qui cherche nous est déjà connu par expérience.
Mais il y a alors un rajout particulier : « … plus que 99 justes qui n’ont pas besoin de repentance » (Luc 15:7). Eux, les pharisiens et les scribes, qui se tenaient pour justes, et estimaient donc ne pas avoir besoin de repentance, — ils n’avaient pas encore donné au ciel de sujet de se réjouir ! Si mon lecteur pensait encore qu’il peut se tenir devant Dieu avec sa propre justice, qu’il réfléchisse un moment à ceci : pas un seul ange, parmi les myriades d’anges saints qui demeurent dans le ciel, ne s’est jamais réjoui au sujet d’un pareil « juste ».
La parabole de la « drachme perdue » est un complément à la parabole précédente de la « brebis perdue », mais elle comporte des traits qui lui sont propres.
« Ou quelle est la femme, qui, ayant dix drachmes, si elle perd une drachme, n’allume la lampe et ne balaye la maison, et ne cherche diligemment jusqu’à ce qu’elle l’ait trouvée ? et l’ayant trouvée, elle assemble les amies et les voisines, disant : Réjouissez-vous avec moi, car j’ai trouvé la drachme que j’avais perdue. Ainsi, je vous dis, il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent » (Luc 15:8-10).
Cette parabole est tirée de la vie à la maison. Il ne s’agit pas ici d’un berger qui part à la recherche d’une brebis perdue, mais d’une femme qui a perdu une drachme sur les dix qu’elle avait, et qui se met alors à la chercher. Elle allume une lampe, balaye la maison et cherche diligemment jusqu’à ce qu’elle la trouve. Tout cela est tout à fait naturel.
Pourtant, quelle peine, quelle application pour trouver une pièce d’argent ! Si le berger se donne autant de peine pour la brebis perdue, si la femme se donne autant de peine pour une pièce de monnaie perdue, est-il étonnant que le Seigneur et Sauveur s’occupe de pécheurs, de créatures immortelles dont la valeur dépasse de beaucoup celle d’une brebis ou d’une drachme ?
Je pense que c’est là l’enseignement simple de ces deux paraboles, un enseignement que même les pharisiens et les scribes devaient comprendre. Par contre, il est certain que certaines subtilités que le Seigneur y a insérées devaient leur rester cachées (comparer Matt. 13:10-15). Elles ne peuvent être reconnues que dans la puissance du Saint Esprit et que par les Siens.
Les deux paraboles ont le même sujet principal : les pécheurs comme objets de la grâce de Dieu qui les cherche. Mais quand on en vient aux détails, on voit des différences qui ne sont certes pas sans importance. On trouvera plutôt que nous avons besoin des deux paraboles pour avoir une vue complète de cet objet grandiose. On pourrait même interpréter les deux tableaux des dix premiers versets comme ne formant qu’une parabole. Le premier tableau est rattaché directement au second par le simple mot « ou » du verset 8 (« Ou quelle est la femme… »), et cela parlerait en faveur de ce point de vue de ne voir qu’une parabole dans les deux tableaux. Il manque ici de façon très nette une introduction formelle du genre de celle qu’on a avec la troisième parabole au verset 11 (« Et il dit… »). Mais comme nous pouvons le voir les deux premiers tableaux ou paraboles vont bien de pair, et même de façon particulièrement étroite. Voyons maintenant quelques différences.
Dans le premier tableau, il s’agit d’une brebis vivante, qui est perdue. Maintenant dans le deuxième, ce qui est perdu est une pièce de monnaie morte. Le Seigneur ne montre-t-Il pas par là deux caractéristiques essentielles du pécheur ?
Comme la brebis s’en va de son propre mouvement loin du troupeau et de son berger, et se met dans une situation sans espoir, ainsi le pécheur s’est éloigné de Dieu par sa propre faute, et vit maintenant dans ses péchés « sans Dieu dans le monde » (Éph. 2:12). C’est la vision que nous en donne particulièrement l’épître aux Romains. Il a une certaine vie, la vie naturelle, mais cette vie est utilisée à pécher. Il ne s’enquiert pas de Dieu, ni de Sa volonté, il ne cherche pas Dieu, il ne L’honore pas, il n’a pas de crainte de Dieu. Aussi est-il tombé sous le jugement de Dieu et il n’atteint pas à la gloire de Dieu (Rom. 3). C’est en fait une situation sans espoir, pour autant que cela dépende de nous !
Mais la pièce de monnaie est morte, poussiéreuse, dans l’obscurité. C’est aussi une image de l’état du pécheur, selon la vision qu’en donne l’épître aux Éphésiens. Couvert de la poussière du péché, il est par nature mort dans ses fautes et dans ses péchés (Éph. 2:12). Non seulement il s’est égaré, mais bien que physiquement vivant, il est mort spirituellement, mort pour Dieu, et par conséquent absolument sans force pour venir à Dieu. Et comme la drachme perdue gisait cachée quelque part dans les ténèbres, ainsi le pécheur se trouve dans les ténèbres spirituelles, c’est-à-dire qu’il est dans l’ignorance de Dieu, « ayant leur entendement obscurci, étant étrangers à la vie de Dieu à cause de l’ignorance qui est en eux » (Éph. 4:18).
Ce sont aussi deux états que l’Écriture nous montre à propos des pécheurs : vivant dans le péché, et morts dans les péchés. Par le premier, l’homme se rend coupable devant Dieu, tandis que le second état est fondamentalement son état devant Dieu. Ces caractéristiques sont d’ailleurs le propre de tous les hommes selon la nature, non pas seulement de certains « spécimen » particulièrement mauvais, comme on l’admet souvent.
Dans la parabole du « fils perdu » [prodigue], les deux côtés seront joints. Le plus jeune fils vivait dans le péché (Luc 15:13) et était mort pour le père (Luc 15:24). — On ne peut pas s’empêcher de s’émerveiller devant la sagesse et la profondeur qui se trouvent dans ces paroles du Seigneur Jésus qui paraissent si simples.
Dans le premier tableau c’est l’activité de la grâce divine qui nous était présenté avec le berger. Nous avons reconnu facilement la Personne et l’œuvre de notre Seigneur, le Fils de Dieu. Maintenant c’est une femme qui déploie une vive activité pour trouver ce qui est perdu.
Or à plusieurs reprises dans l’Écriture Sainte, la femme est utilisée comme une image de l’assemblée de Dieu. Dans cette assemblée le Saint Esprit habite et agit, et Il agit par elle.
Elle est en même temps l’instrument, l’outil du Saint Esprit pour ce qu’Il veut opérer dans les hommes. Or quoi que ce soit qui soit opéré par elle, tout a proprement sa source en Dieu seul, le Saint Esprit. Et ainsi sous l’image de la « femme » dans cette parabole, le Seigneur Jésus semble ramener toute activité à cette Personne de la Déité, le Saint Esprit, et même ne s’en tenir qu’à Lui.
Si nous voyons les choses ainsi, quelle image impressionnante se déploie sous nos yeux ! L’Esprit de Dieu prend une grande peine à trouver le pécheur perdu. En premier lieu, par le moyen de la « lampe », par le moyen de la Parole de Dieu, Il apporte la lumière au milieu des ténèbres de ce monde, au milieu des ténèbres de l’âme. Il applique la Parole au cœur et à la conscience des hommes, pour faire naître une nouvelle vie. Personne ne peut être né de nouveau autrement que justement de cette manière : « d’eau et d’esprit » (Jean 3:5).
Le diable met beaucoup d’obstacles sur le chemin des hommes, pour les empêcher de saisir le salut. Sous la figure de ce « balayage de la maison », le Seigneur n’indique-t-Il pas que le Saint Esprit peut justement éliminer ces innombrables obstacles ? Ce deuxième côté de l’activité de l’Esprit de Dieu est plein de consolation.
La femme avait perdu la pièce de monnaie, et parce qu’elle lui était précieuse, elle allume la lumière, balaye la maison et cherche l’argent diligemment, aussi longtemps qu’il est nécessaire pour le trouver. Aujourd’hui aussi, l’amour de Dieu est actif par le Saint Esprit pour se donner la peine de chercher par la vérité ce qui est perdu. Quel travail cela représente, de ramener le cœur de l’homme à Dieu !
Dans cette parabole le Seigneur montre aussi que les sentiments au ciel sont la joie, des sentiments auxquels participent les rachetés. Nous l’avons déjà vu. Mais tandis que dans la première parabole notre communion est avec le Fils, dans la deuxième parabole la communion est celle du Saint Esprit. C’est la troisième parabole qui montre que nous avons aussi communion avec le Père. Quel privilège d’être apte à la communion avec les trois Personnes de la Déité, de participer aux sentiments, à la joie de Dieu !
On est aussi frappé de ce que le Seigneur s’exprime un peu différemment de la première parabole au sujet de la joie. Dans la première il est dit : « Ainsi il y aura de la joie au ciel… » ; dans la deuxième : « Ainsi, je vous dis, il y a de la joie devant les anges de Dieu… ». Dans la première parabole, nous avions compris que les anges de Dieu qui demeurent au ciel se réjouissent de ce qu’un seul pécheur vient à la repentance. Mais maintenant il est question de joie « devant les anges de Dieu » ; cela semble signifier que le Seigneur Jésus n’a pas seulement en vue en général la joie des anges, mais spécialement la joie de Dieu Lui-même, à laquelle les anges participent.
Quel contraste le Seigneur place par-là devant les pharisiens et les scribes : en présence des anges qui se tiennent devant Dieu, il y a de la joie pour chaque pécheur qui se repent ; par contre les gens religieux orgueilleux sont étrangers à de tels sentiments.
Note Bibliquest : bien que l’appellation usuelle de cette parabole en français se réfère au « fils prodigue », nous gardons ici l’appellation de « fils perdu » utilisée par l’auteur.
La troisième parabole de Luc 15 est la parabole du « fils perdu », ou des « deux fils » comme on pourrait aussi la nommer. Elle fait suite aux paraboles de la « brebis perdue » et de la « drachme perdue ». Ces trois paraboles sont toutes une réponse du Seigneur au reproche des pharisiens propres-justes, selon lequel Il recevait les pécheurs et mangeait avec eux. Dans la parabole de la « brebis perdue », le berger va après la brebis jusqu’à ce qu’il la trouve. Dans la parabole de la « drachme perdue », la femme prend la lampe et cherche jusqu’à ce qu’elle la trouve — une image de l’activité du Saint Esprit. Et dans la parabole du « fils perdu », le père attend le fils perdu jusqu’à ce qu’il revienne, et il l’accueille d’un cœur ému. Ainsi le Seigneur montre une vérité capitale dont nous ferons bien de nous rappeler encore une fois : Toute la Trinité divine — Dieu le Fils, Dieu le Saint Esprit et Dieu le Père — est occupée en grâce au salut des pécheurs. Dans les trois paraboles le résultat en est la joie : la joie au ciel au sujet d’un pécheur qui se repent.
Cette parabole part de la vie de la famille. Elle comprend deux parties comme on peut aisément s’en rendre compte en comparant les versets 24 et 32. Dans la première partie il est question du comportement du plus jeune fils (15:11-24), et dans la seconde partie il s’agit du comportement du fils aîné (15:25-32). Dans chacune de ces parties, on voit le père : dans la première partie, il reçoit le fils perdu, et dans la seconde, il supplie instamment le fils propre-juste.
« Et il dit : Un homme avait deux fils » (Luc 15:11)
Cette phrase introductive de la parabole indique l’origine de l’homme en tant que créature : c’est une créature de Dieu, et il a son origine en Dieu. Je dis « indique » parce que nous n’avons pas ici d’enseignement, mais bien une allusion à ce sujet. La doctrine elle-même sur le sujet se trouve dans l’épître aux Éphésiens (4:6) : « un seul Dieu et père de tous, qui est au-dessus de tous et partout et en nous tous ». Ce que veut nous dire ce passage, c’est que, comme Créateur, Il est Dieu et Père de tous les hommes. C’est aussi dans ce sens que Paul disait à l’Aréopage d’Athènes : « et il a fait d’un seul sang toutes les races des hommes… car en lui nous vivons et nous nous mouvons et nous sommes, comme aussi quelques-uns de vos poètes ont dit : Car aussi nous sommes sa race. Étant donc la race de Dieu… » (Actes 17:26-29). En Luc 3:38, l’origine d’Adam est rattachée directement à Dieu : « d’Adam, de Dieu ».
Le fait que nous provenions de la main de Dieu en tant que créature de Dieu, qu’Il ait jadis soufflé dans les narines de l’homme une respiration de vie (Gen. 2:7), ce n’est pas du tout une question secondaire. Si elle était si secondaire, le diable ne l’aurait pas tant combattue par la théorie de l’évolution, par laquelle il cherche à mettre Dieu de côté en tant que Créateur, aux yeux des hommes. Effectivement, notre responsabilité vis-à-vis de notre Créateur réside dans le fait que nous avons été créés à l’image de Dieu et selon Sa ressemblance (Gen. 1:26), et que nous sommes ainsi des créatures de Dieu douées d’intelligence et de raison. Nous ne sommes pas seulement responsables directement et personnellement vis-à-vis de Dieu parce que, dans Sa bonté, Il nous a confié en tant que Ses créatures, des dons et des capacités, — mais parce que, ayant été formés à Son image, nous sommes responsables de manifester Dieu dans ce monde par le moyen de ces capacités ; car l’« image » signifie la « représentation ». C’est pourquoi tout homme Lui doit l’obéissance.
L’homme peut ne pas comprendre grand-chose de la Bible, et même ne rien avoir entendu au sujet de Christ ; mais le fait reste qu’Il a un Créateur qui lui a fait connaître Sa puissance éternelle et Sa divinité par le moyen de la création visible, et ce fait rend l’homme responsable devant Dieu, et le rend inexcusable (lire Romains 1:18-25).
Encore un point pour prévenir des pensées erronées : Ces deux fils du père ne représentent pas des enfants de Dieu déjà « nés de nouveau » par la grâce de Dieu, mais des hommes naturels dans leur position et leur responsabilité devant Dieu, à qui ils doivent leur existence. L’homme né dans ce monde n’est pas du tout « né de Dieu », bien qu’il ait Dieu pour Créateur. Ni le fait d’avoir des parents chrétiens, ni le fait d’avoir été baptisé chrétiennement, ne fait de lui un enfant de Dieu, c’est-à-dire quelqu’un né de Dieu. Il faut en plus la conversion, le fait de se tourner vers Dieu en croyant, comme nous le verrons au cours de notre parabole.
« et le plus jeune d’entre eux dit à son père : Père, donne-moi la part du bien qui me revient. Et il leur partagea son bien. Et peu de jours après, le plus jeune fils, ayant tout ramassé, s’en alla dehors en un pays éloigné ; et là il dissipa son bien en vivant dans la débauche » (Luc 15:12-13).
Le principe et le secret du péché sont mis ici très fortement en relief : Le plus jeune fils voulait s’en aller loin du père pour pouvoir faire entièrement sa propre volonté. Le principe du péché n’est pas proprement une vie de débauche ; elle en est plutôt le résultat. Mais s’éloigner de Dieu pour ne faire que sa propre volonté, c’est le principe du péché ; c’est l’iniquité (une marche sans loi, sans frein) selon le langage de 1 Jean 3:4. Le premier acte du jeune homme est la source de tout son malheur ; il tourne le dos au père pour disposer de sa vie sans lui, et être heureux sans lui.
En fait, c’est le chemin, l’histoire de tout homme. Depuis que le péché est entré dans le monde par le premier homme, l’homme va son chemin, comme Caïn, loin de la face de Dieu, pour faire ce qui lui plait (Gen. 4:16). N’est-ce pas extrêmement sérieux ? Où qu’on regarde dans le monde, on voit ce principe à tout bout de champ, c’est lui qui régit le monde. Combien de jeunes gens, aujourd’hui, répudient littéralement tout lien avec le foyer paternel, et le quittent dès que possible pour avoir leur indépendance, c’est-à-dire pour faire leur propre volonté. Ce principe d’indépendance de Dieu et de propre volonté imprègne le monde tout entier, à tous les niveaux et dans tous les domaines. C’est le péché au sens propre.
Nous sommes profondément meurtris si nos enfants nous traitent comme le plus jeune fils a traité son père. Mais, l’avons-nous mérité de leur part ? Avons-nous négligé de leur apporter beaucoup d’amour et de soins ? Et voilà maintenant qu’ils nous tournent froidement le dos ! Le père de notre parabole était-il un homme dur, sans amour, dont on cherchait à s’enfuir au plus vite ? Le reste de l’histoire montre tout le contraire. Cependant le jeune homme était très pressé de partir loin. « Peu de jour après » dit l’Écriture. Le père n’a-t-il pas dû souffrir de cette situation ? Nous sommes tous allés, chers amis, sans exception, par ce triste chemin ; nous avons tous péché contre Dieu, et nous Lui avons pour ainsi dire tourné le dos, pour nous en aller notre propre chemin. « Nous nous sommes tournés chacun vers notre propre chemin » (Ésaïe 53:6). Le psalmiste David nous éclaire, pour ainsi dire, sur ce « peu-de-jours-après », en disant que « les méchants se sont égarés dès la matrice » [= dès le ventre de leur mère], qu’« ils errent dès le ventre » (Ps. 58:3). Y avons-nous déjà pensé ? Avons-nous déjà eu sur ce sujet les sentiments convenables pour Dieu ?
Nous arrivons maintenant à un autre point. En tant qu’hommes, nous faisons des différences entre les pécheurs, et ces différences existent effectivement. Nous n’avons pas tous vécu dans la débauche, bien que quelques-uns d’entre nous, nous étions tels (1 Cor. 6:11). D’autres ont eu une conduite extérieurement tout à fait honorable. Mais si nous regardons la racine de notre péché, et si nous considérons le cœur de l’homme, ces différences disparaissent totalement. En ce qui concerne l’état de l’âme du plus jeune fils, il n’était pas un plus grand pécheur lorsqu’il désirait manger des gousses des pourceaux que quand il tournait le dos à son père. Le mal réside dans le cœur qui voulait être heureux sans son père.
Il en est ainsi pour tout homme par nature : Son cœur, et par suite sa volonté, sont aliénés de Dieu. Répétons-le : Chacun ne s’est pas livré pareillement à la débauche, mais nous sommes tous allés dans un pays éloigné pour vivre loin de Dieu. Et le Seigneur Jésus prend justement en exemple ce jeune fils dégradé pour montrer jusqu’où la grâce de Dieu peut aller.
Le père n’avait pas défendu à son plus jeune fils de s’en aller. Au contraire nous lisons : « il leur partagea son bien » (15:12). C’est ainsi que Dieu n’empêche pas l’homme de choisir sa propre volonté. Toutefois, Il le met à l’épreuve en lui remettant son bien : on allait voir ce qu’il en ferait. L’homme est responsable de ses actes.
En un sens, Dieu permet à l’homme de faire ce qu’il veut de ce qu’Il lui a confié. Mais cela ne fera que manifester où se dirige son cœur. Combien cette pensée nous sonde ! Le sage prédicateur l’exprime de cette manière : « Seulement, voici, j’ai trouvé que Dieu a fait l’homme droit (n’est-ce pas un grand « bien » ?) ; mais eux, ils ont cherché beaucoup de raisonnements [« machinations » selon la traduction allemande] » (Ecclésiaste 7:29).
Le jeune homme se figurait être tout à fait bien dans le « pays éloigné » — éloigné de Dieu. Mais était-il heureux ? Il avait du bien, et il le dilapidait. Quand on vit au-dessus de ses moyens, on parait riche et heureux aux autres. Mais l’est-on réellement ? Cela ne tarde pas à mal tourner.
J’ai dit que les hommes ont emporté un « bien » provenant de leur Créateur, et qu’ils Lui en sont redevables et qu’ils en sont responsables vis-à-vis de Lui. Dieu les a dotés d’un esprit, d’une âme, d’un corps avec des capacités qui font clairement voir que tout cela provient de la main d’Un bien plus grand qu’eux. Et maintenant Dieu veut qu’ils utilisent ces capacités à Le glorifier « de peur que tu ne donnes ton honneur à d’autres, et tes années à l’homme cruel ; de peur que des étrangers ne se rassasient de ton bien… et que tu ne gémisses à ta fin, quand ta chair et ton corps se consumeront ; et que tu ne dises : Comment ai-je haï l’instruction, et mon cœur a-t-il méprisé la répréhension ? » (Prov. 5:9-12).
Or les hommes sans Dieu ne tiennent pas compte de ces avertissements et gaspillent leurs forces à des buts de propre volonté, à des projets vains, en bref pour le péché. Il leur arrive dans cette situation de dégager une certaine gaîté et une certaine insouciance, en sorte qu’on pourrait presque croire qu’ils sont vraiment heureux. Ils se hâtent de passer de joie en joie, d’aventure en aventure.
Mais c’est justement ce qui montre qu’ils sont dans le « pays éloigné ». Ils sont à la chasse au bonheur justement parce qu’ils ne l’ont pas encore trouvé. Pauvres gens ! Ils papillonnent de fleur en fleur. Ils ornent leurs fêtes et leurs maisons, mais quant à leur âme, ils vivent au-dessus de leurs moyens, et ils se minent eux-mêmes. Laissez-les donc seuls ne serait-ce qu’un jour, et vous verrez combien ils sont dans le creux et le vide. Il suffit que Dieu porte un peu atteinte à leur santé, et leur âme éprouve tout le néant et la vanité de leurs efforts.
Les hommes de ce monde sont très sensibles quand on leur parle de leur bonheur ; car leur bonheur n’est pas réel, leur gloire n’est pas authentique et leur joie est passagère. Tout est creux et ne supporte pas la réflexion. Les plus grands comiques et farceurs, qui font rire des milliers de gens, si l’occasion est donnée de voir derrière leur façade extérieure, ce sont les plus tristes et les plus solitaires des gens. Ils dilapident « leur bien » avec leurs fans, et quand vient la « famine » pour eux, ils se trouvent soudain seuls. C’est ce que décrivent les versets suivants :
« Et après qu’il eut tout dépensé, une grande famine survint dans ce pays-là ; et il commença d’être dans le besoin. Et il s’en alla et se joignit à l’un des citoyens de ce pays-là, et celui-ci l’envoya dans ses champs pour paître des pourceaux. Et il désirait de remplir son ventre des gousses que les pourceaux mangeaient ; et personne ne lui donnait rien » (Luc 15:14-16).
L’homme qui tourne le dos à Dieu, malgré toute sa prétendue sagesse, malgré tout son savoir et ses efforts, toute sa chasse aux plaisirs et au bonheur, le voilà qui se dégrade moralement toujours plus. Il s’appauvrit dans son âme. Tôt ou tard, comme le plus jeune fils, il commence à être dans le besoin, et il se retrouve finalement auprès des « troupeaux de pourceaux ». Le diable ne donne rien, il ne fait que prendre. C’est pourquoi il n’y a aucune satisfaction réelle dans le « pays éloigné ».
N’as-tu encore rien éprouvé de semblable ? Tu t’étais représenté une soirée très belle, et à vrai dire tout avait été gai et charmant. Mais ce qu’il en est resté, c’est l’insipide, un sentiment de vide, même si le péché ne s’y rajoutait pas pour charger la conscience. Non, ce monde n’a rien qui peut réellement satisfaire ton âme, ou la rassasier. Tout est vanité et poursuite du vent (Eccl. 2:17).
Je suis convaincu que c’est Dieu qui a suscité la famine dans le pays éloigné pour que le plus jeune fils « revienne à lui-même ». Mais celui-ci ne repense pas encore à son père, quand le besoin ne se fait encore sentir de manière trop sensible. Non, il se tourne vers l’homme pour avoir de l’aide : il se joint à l’un des citoyens de ce pays-là. Ce citoyen le connaît bien, car il a beaucoup contribué à lui faire gaspiller son bien. Certainement celui-là l’aidera, car il est lui-même tombé dans le besoin. Ah ! le diable et le monde sont de mauvais rémunérateurs, et même extrêmement mauvais ! Ils font tout payer très cher, ils ne donnent rien, et ils ne rendent jamais. Ils exigent un prix élevé pour leurs demi-mesures, pour leurs solutions de remplacement, pour leurs semblants de bonheur : c’est le prix de l’âme, et ensuite ils abandonnent l’homme nu et affamé. « Il désirait remplir son ventre des gousses que les pourceaux mangeaient ; et personne ne lui donnait rien » (15:16). C’est une expérience cruelle : « personne ne lui donnait rien ». Ne l’as-tu pas faite, toi aussi ? Il n’y en a qu’UN qui peut réellement donner, qui veut donner : c’est Dieu. Mais on ne veut pas de Lui.
On se dit heureux tant que tout va comme on veut, tant qu’on est en bonne santé et qu’on a du succès. Mais que vienne la « famine », la maladie, la détresse, les revers, et le prétendu bonheur s’écroule comme un château de cartes. Ce qui est bouleversant, c’est que même la « famine » n’amène pas les hommes à Dieu. « Tu les as frappés, mais ils n’en ont point ressenti de douleur ; tu les as consumés, ils ont refusé de recevoir la correction ; ils ont rendu leurs faces plus dures qu’un roc, ils ont refusé de revenir » (Jérémie 5:3). L’homme cherche refuge auprès de l’homme, auprès de la chair, mais non pas auprès de Dieu. Le tout dernier auquel on pense, c’est Dieu. Y a-t-il quelque chose qui montre mieux à quel point l’homme est éloigné de Dieu ? Oh, il n’y a rien de plus de misérable, rien de plus pitoyable, hormis la damnation éternelle, que d’habiter dans le « pays éloigné » !
« Et étant revenu à lui-même, il dit : Combien de mercenaires de mon père ont du pain en abondance, et moi je péris ici de faim ! Je me lèverai et je m’en irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et devant toi ; je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme l’un de tes mercenaires » (Luc 15:17-19).
Nous arrivons ici à un tournant significatif dans la vie du jeune homme : il revient à lui-même. C’est sans aucun doute l’œuvre de Dieu dans Sa bonté. C’est la bonté de Dieu qui pousse à la repentance, non pas la peur de Dieu (Rom. 2:4). C’est Dieu Lui-même qui fait naître chez lui la conscience de son véritable état. Maintenant il ne voit pas seulement qu’il est dans le besoin (cela ne suffit guère pour conduire à Dieu), mais qu’il périt. C’est là qu’il faut en arriver dans le pays éloigné : se rendre compte qu’on périt de faim.
Mais la bonté de Dieu fait encore autre chose, quelque chose de très précieux : elle réveille dans l’âme la conscience qu’heureusement il y a du pain, assez de pain, dans la maison du père à laquelle il a autrefois tourné le dos avec tant d’ingratitude, et même il y en a plus qu’assez pour les ouvriers [mercenaires]. La bonté de Dieu attire le cœur de celui qui sait qu’« il périt ici ». Et ainsi la grâce produit dans le cœur le désir d’aller à Dieu. « Je me lèverai et je m’en irai vers mon père ».
Le fils perdu ne prend pas la bonne résolution de s’améliorer avant de pouvoir se présenter devant son père. Nombreux, malheureusement, sont ceux qui font l’inverse. Ils ne commencent pas par reconnaître leur état misérable, et quand ils le reconnaissent, ils veulent d’abord se sauver eux-mêmes, pour pouvoir se présenter devant Dieu avec leurs propres forces. Ils devront tous apprendre un jour la vérité du proverbe selon lequel « le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions ».
Non, le fils perdu est venu à bout de lui-même, sa conscience est réveillée et son cœur attiré. La bonté de Dieu a éveillé la confiance en son père dans son for intérieur, et il est tout à fait prêt à s’en aller vers son père, comme il dit. Il exprime pour ainsi dire les mêmes paroles qu’Éphraïm : « Car, après que j’ai été converti, je me suis repenti ; et, après que je me suis connu, j’ai frappé sur ma cuisse ; j’ai été honteux, et j’ai aussi été confus, car je porte l’opprobre de ma jeunesse » (Jér. 31:19). C’est le point auquel il faut tous que nous en arrivions un jour, si nous ne voulons pas rester éternellement loin de Dieu ; et c’est ce que le Seigneur Jésus veut nous enseigner ici.
Se lever et s’en aller vers son père, c’est ce que l’Écriture appelle en bien des passages, la conversion. « Repentez-vous donc et vous convertissez, pour que vos péchés soient effacés » (Actes 3:19) dit Pierre à ses compatriotes juifs. L’apôtre Paul annonce aussi aux hommes « de se repentir et de se tourner vers Dieu, en faisant des œuvres convenables à la repentance » (Actes 26:20). On se convertit de quelque chose vers ou à quelque chose :
« pour qu’ils se tournent des ténèbres à la lumière, et du pouvoir de Satan à Dieu ; pour qu’ils reçoivent la rémission des péchés » (Actes 26:18),
« comment vous vous êtes tournés des idoles vers Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai » (1 Thes. 1:9).
Nous voyons ce principe présenté dans l’histoire du fils perdu d’une manière qui se grave facilement dans nos mémoires. Jusqu’à présent il avait tourné le dos à son père, et son visage s’était tourné de son père vers les choses du monde. Mais maintenant il se détourne du monde, et son visage se dirige vers son père. Il n’a pas encore le père, il ne sait pas encore comment il le recevra ; autrement dit, il n’a encore aucune paix, mais il veut aller à lui. « Et se levant, il vint vers son père » (15:20). C’est la conversion.
La conversion, si elle est authentique, est toujours accompagnée de la repentance. La repentance ne veut pas dire des exercices de repentance. La repentance est un changement de sentiments, et elle est toujours accompagnée d’une tristesse d’âme selon Dieu en rapport avec son propre état et ses propres voies. Aussi lisons-nous : « Car la tristesse selon Dieu opère une repentance à salut dont on n’a pas de regret » (2 Cor. 7:10). Il ne s’agit pas non plus d’un changement purement logique de ses sentiments, comme on change de chemise, mais on a honte de soi-même, on a honte d’avoir déshonoré Dieu si profondément.
Cette tristesse d’âme conduit tout à fait naturellement à une confession du péché devant Dieu : « et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et devant toi ; je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme l’un de tes ouvriers [mercenaires] » (15:18-19). Qu’il est difficile pour l’homme de faire une confession pareille ! Combien il faut souvent de temps, combien d’expériences amères il faut d’abord traverser, avant d’en arriver finalement à se condamner soi-même et à avouer sa culpabilité !
Mais le chemin du salut passe par la confession de la culpabilité ; cette confession est le fruit qui convient à la repentance.
« Quand je me suis tu » a dû confesser David, « mes os ont dépéri, quand je rugissais tout le jour… Je t’ai fait connaître mon péché, et je n’ai pas couvert mon iniquité ; j’ai dit : Je confesserai mes transgressions à l’Éternel ; et toi, tu as pardonné l’iniquité de mon péché » (Ps. 32:3, 5). Le fils de David, le sage Salomon exprime cette vérité par le Saint Esprit de la manière suivante : « Celui qui cache ses transgressions ne prospérera point, mais celui qui les confesse et les abandonne obtiendra miséricorde » (Prov. 28:13).
« De la bouche on fait confession à salut » (Rom. 10:10) dit l’Esprit de Dieu par le moyen d’un autre homme de Dieu, l’apôtre Paul. Et combien est précieuse et assurée la promesse de Dieu que nous trouvons dans la première épître de Jean : « Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité » (1 Jean 1:9) !
Même si nous n’avons pas encore épuisé toute la plénitude de ces versets, retenons-en déjà ceci : Ce qui suit la confession des péchés, c’est la rémission [le pardon] des péchés, de tous les péchés. Dieu est fidèle et juste quand Il nous pardonne les péchés.
Il y a un point que je dois souligner ici, même s’il dépasse le cadre de notre parabole : le chemin vers Dieu passe par Golgotha.
Le Père pardonne [remet] les péchés à cause du nom de Son Fils (« par son nom » — 1 Jean 2:12), qui a accompli l’œuvre d’expiation de notre culpabilité à la croix. Et Il ne pardonne qu’à celui qui croit en Son Fils, Jésus Christ : « crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé, toi et ta maison » - « Tous les prophètes lui rendent témoignage, que, par son nom, quiconque croit en lui reçoit la rémission des péchés » (Actes 16:31 ; 10:43). Christ est le chemin vers Dieu, et personne ne vient au Père que par Lui (Jean 14:6). La rédemption ne se trouve que dans le Christ Jésus (Col. 1:14). « Et il n’y a de salut en aucun autre ; car aussi il n’y a point d’autre nom sous le ciel, qui soit donné parmi les hommes, par lequel il nous faille être sauvés » (Actes 4:12). « Ce n’est rien moins et rien d’autre que le sang de Jésus Christ qui nous purifie de tout péché » (1 Jean 1:7).
Revenons maintenant à la confession du plus jeune fils ; elle comprend plusieurs points auxquels il n’y a rien à redire ; c’était une confession authentique, une preuve de la foi et de la vie nouvelle, et le père la reçoit. Cela devrait encourager tous ceux qui sont repentants. Les sentiments du fils ne vont pas encore très en profondeur, car non seulement il n’était effectivement plus digne d’être appelé son fils, mais il avait mérité de rester éloigné pour toujours de la maison du père, et d’être jeté dans les ténèbres de dehors. Il n’était plus « digne » de rien d’autre.
Le plus jeune fils ajoute encore : « Traite-moi comme l’un de tes ouvriers [mercenaires] » ; ceci montre que dans une mesure il était encore rempli d’un esprit légal, car en vérité il ne se connaissait pas lui-même, ni ne connaissait son père et son amour. Il n’en avait pas entièrement fini avec lui-même, et il n’était pas encore arrivé à reconnaître que seule la grâce, et rien d’autre que la grâce ne devait et ne pouvait remédier à sa situation. Mais au fond de son cœur, il y avait une véritable conscience de son péché et de sa culpabilité, même si cette conscience était encore bien faible ; et comme il se confiait en la bonté du père, il se mit en route pour venir devant son père avec la confession de sa culpabilité.
Cher lecteur, dis-moi si tu as déjà parcouru ce chemin ? Le diable veut à tout prix te retenir de t’y engager. Il veut exciter ton orgueil ; il te dit qu’il n’est pas nécessaire de t’incliner : si seulement les gens étaient tous aussi bons que toi ! Ou bien il cherchera à insuffler le doute en toi pour que tu ne sois pas sûr si Dieu veut vraiment t’avoir et te recevoir. Pourtant, regarde combien le père rend facile au fils de venir à lui. Regardons cela d’un peu plus près.
« Et se levant, il vint vers son père. Et comme il était encore loin, son père le vit et fut ému de compassion, et, courant à lui, se jeta à son cou et le couvrit de baisers » (Luc 15:20).
Il n’est pas dit du fils qu’il « courut ». Son pas était peut-être plutôt hésitant maintenant qu’il était en chemin vers son père. L’incertitude et la honte devaient se mêler à l’espérance, et son pas se ralentir. Mais le père « courut », courut en avant vers son fils, qui venait à lui en haillons. Il l’avait déjà vu quand il était encore loin. Manifestement, il l’attendait depuis longtemps. L’état misérable de son fils dégradé n’était qu’une raison pour lui d’être ému à son sujet. Ni rancune, ni colère ni le moindre reproche !
« Il ne reproche rien » — à l’occasion de maintes défaillances plus tard sur son chemin, combien l’auteur de ces lignes a souvent expérimenté et goûté la grâce « que le Seigneur est bon » (1 Pierre 2:3). Non, le père ne fait pas le moindre reproche au fils, mais il se jette à son cou, alors qu’il est revêtu de haillons, et le couvre de baisers. Il l’accueille tel qu’il est, et l’aime malgré tout.
Merveilleuse grâce, amour merveilleux de Dieu dont nous avons ici l’esquisse ! « Dieu est riche en miséricorde à cause de son grand amour dont il nous a aimés » (Éph. 2:4). Cet amour de Dieu envers nous, a été démontré en ce que « Christ, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous » (Rom. 5:8). Nous nous souvenons instinctivement des paroles précieuses du même chapitre (Rom. 5:20) : « Là où le péché abondait, la grâce a surabondé ». C’est une vérité infinie que nous ne pouvons jamais saisir en entier, mais que nous pouvons croire : DIEU EST POUR NOUS (Rom. 8:31). Que Dieu, dans toute Sa grâce, soit aussi juste, beaucoup de passages de l’Écriture en rendent témoignage (par exemple Rom. 3:21-26 ; 1 Jean 1:9).
Notons bien : avant que le fils ait pu tant soit peu commencer la confession qu’il avait prévue, son père se jette à son cou, et le couvre de baisers. C’est un amour vraiment immérité, la grâce ! Alors le fils dégage sa conscience : « père, j’ai péché contre le ciel et devant toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ». Ne sommes-nous pas frappés de ce qu’il ne dit pas « traite-moi comme l’un de tes mercenaires » ? L’aurait-il pu en face d’un tel amour ? Impossible ! Cela aurait été une sous-estimation de l’amour de son père.
Apprenons cependant ceci dans notre cœur : Dieu nous traite selon l’amour de Son cœur, parce qu’Il est amour, non pas parce que nous sommes aimables ! Nous pensons souvent que Dieu devrait agir selon ce que nous comprenons de Lui, selon ce que nous ressentons de Lui. Et si nous pensons à notre misère, nous disons volontiers : « traite-moi comme l’un de tes mercenaires ». Cela a bien une apparence d’humilité, mais cela restreint la grandeur de Dieu dans Son amour d’une manière insupportable.
Les gens, et même les vrais enfants de Dieu ont souvent de la difficulté à propos de la grâce de Dieu, parce qu’ils se mettent sur un terrain légal, et qu’ils jugent ainsi de Dieu et de Ses actes d’après eux-mêmes. Ainsi par exemple, beaucoup de vrais chrétiens se contenteraient tout à fait d’un « petit coin au ciel », de n’importe quelle petite place modeste, là. Or celui qui a de telles pensées méconnaît Dieu, et il ne sait pas encore ce qu’est réellement Son amour. Dieu agit d’après ce que Lui ressent et pense, oui, d’après ce que Lui est.
Un « petit coin au ciel » correspond-il à la merveilleuse grandeur de Sa grâce et de Son amour ? Une place modeste, pour ne pas dire médiocre, ne témoignerait-elle pas continuellement à l’encontre de Son amour, comme cela aurait été le cas si le père avait donné à son fils à son retour la place d’un ouvrier [mercenaire] ?
« Mais le père dit à ses esclaves : Apportez dehors (*) la plus belle robe, et l’en revêtez ; et mettez un anneau à sa main et des sandales à ses pieds ; et amenez le veau gras et tuez-le ; et mangeons et faisons bonne chère ; car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. Et ils se mirent à faire bonne chère (*) » (Luc 15:22-24).
(*) note Bibliquest : Il y a ici et ailleurs deux variantes de traduction entre l’allemand et la traduction JND française: « vite » au lieu de « dehors » — et « être gai » au lieu de « faire bonne chère ».
C’est la joie de Dieu de ramener le pécheur et de le recevoir. C’est Sa joie de pardonner tous ses péchés. Certes le pécheur a besoin du pardon des péchés, il l’obtient par la foi en Christ et en Son œuvre, et il a toute raison de s’en réjouir. Or ici, comme dans les deux paraboles précédentes, il ne s’agit pas tant de la joie du pécheur, mais de la joie de Dieu Lui-même. « Il fallait faire bonne chère et se réjouir » lisons-nous un peu plus loin. C’est le père lui-même qui se réjouit, et il se réjouit avec ses serviteurs. Le retour du fils perdu ne produit pas seulement de la joie au ciel, mais aussi sur la terre, dans la maison du père. Car nous ne devons pas déplacer cette scène au ciel. Elle n’est pas une image de ce que nous vivrons au ciel ; mais c’est plutôt l’esprit du ciel, si l’on peut dire, que nous pouvons déjà respirer ici-bas sur la terre, et qui aboutit à l’adoration. C’est la joie de Dieu de nous avoir dans Sa présence.
Nous chrétiens, combien nous sommes peu souvent en état de nous élever à ces pensées ! Nous sommes beaucoup occupés de ce que nous étions, et de ce que nous sommes maintenant par grâce. C’est correct en soi ; la confession du fils, aussi, était correcte ; mais l’amour du père l’empêche de parler davantage, et c’est Lui, le père, qui parait au premier plan, c’est Lui qui parle et qui agit. Il ne parle pas au fils, mais aux serviteurs : « Apportez la plus belle robe, et l’en revêtez ». C’est la joie du père de donner, et de donner sans mesure. Maintenant rien n’est trop bon pour le fils de retour. La plus belle robe, l’anneau, les sandales, tout est apporté (nous allons le voir bientôt) à celui qui est encore dehors, à l’extérieur de la maison, là où son père l’a rencontré.
C’est incontestablement très significatif. Le père ne fait pas apporter la plus belle robe, pour ne se jeter à son cou et le couvrir de baisers qu’après l’en avoir revêtu. Non, il court à sa rencontre et l’embrasse alors qu’il est encore dans ses haillons. La grâce et le cœur de Dieu sont donc parfaitement ouverts au pécheur repentant, sans qu’il y ait à attendre aucune prestation préalable. Ah ! que tout lecteur de ces lignes puisse se réfugier dans les bras grand ouverts du « Père », sur Son cœur ! Et qu’il le fasse maintenant, immédiatement ! Lui aussi sera alors reçu sans condition, et il pourra vivre dorénavant ce qu’on va maintenant voir en image avec le fils perdu, mais retrouvé.
Cet amour qui a reçu le fils perdu dans son état de misère, l’amène maintenant dans la maison du père. Mais quelque chose d’autre doit se passer. « Apportez vite la plus belle robe, et l’en revêtez, et mettez un anneau à sa main, et des sandales à ses pieds ». Maintenant qu’il ne s’agit plus seulement de l’accueil et du pardon des péchés ; maintenant que le fils doit être amené dans la maison du père, c’est-à-dire dans la communion intime avec lui et avec son foyer, il faut le revêtir de la plus belle robe que le père a pour lui. Le plus jeune fils n’avait jamais porté auparavant cette plus belle robe ; comme l’anneau et les sandales, ce que seuls les enfants de la maison portaient, cette plus belle robe est un témoignage de la relation de grâce dans laquelle il est maintenant introduit. Il ne doit pas se trouver dans la maison du père comme un serviteur : ce serait un rappel continuel de son péché. Non, c’est comme fils qu’il doit y être. Il doit être, dans la maison du père, un témoignage continuel à ce que sont l’amour et la grâce du père, à ce que celui-ci pense de son fils retrouvé, et à la joie qu’il a de l’honorer ainsi.
Merveilleuse grâce de Dieu ! Elle nous revêt de Christ. Non seulement elle nous libère de nos haillons, mais elle nous revêt de Christ. La plus belle robe que Dieu a pour nous, c’est Son propre Fils (Gal. 3:27), c’est Christ qu’Il a livré à la mort pour les pécheurs. Dieu ne nous a pas seulement pardonné par le (à cause du) nom de Son Fils (1 Jean 2:12), mais nous sommes devenus « justice de Dieu » en Lui (2 Cor. 5:21). Ce sont en fait des vérités infinies, et, faisons-y attention, elles ont finalement pour but la glorification de Son Fils.
Mais ce n’est pas tout, et ce n’est pas suffisant. « Amenez le veau gras, et tuez-le, et mangeons et faisons bonne chère ». Le veau gras est aussi une image de Christ, comme nourriture de Son peuple. Dieu a Sa joie profonde dans la Personne et dans le sacrifice de Son Fils, notre Seigneur ; et nous sommes rendus dignes de participer déjà maintenant à cette joie. C’est ce dont nous avons une image ici dans ces paroles « mangeons et faisons bonne chère ».
Naturellement, la joie du Père en Son Fils Jésus Christ est parfaite. La notre, du point de vue de la jouissance pratique, est très déficiente. Mais quant au principe, c’est la même joie : la joie du Père au sujet de Son Fils. En fait, c’est la communion dont nous pouvons nous réjouir dans la maison du Père, ce domaine de bénédictions où la grâce de Dieu nous a introduits. « Or notre communion et avec le Père, et avec Son Fils Jésus Christ » dit l’apôtre Jean, à quoi il ajoute « nous vous écrivons ces choses afin que votre joie soit accomplie » (1 Jean 1:3, 4). Dans notre parabole aussi, la joie est le résultat de la communion avec le Père et avec Son Fils : « et ils se mirent à faire bonne chère ». C’est une joie commune, c’est la joie de la communion.
Il est parlé du commencement de cette joie, mais nous n’entendons pas dire qu’elle ait une fin. Nous apprenons la raison de cette joie et son point de départ, mais c’est tout ce qu’il en est dit. C’est comme si le Seigneur voulait laisser à notre foi et à notre intelligence spirituelle le soin de conclure qu’elle n’aura jamais de fin. Effectivement, elle ne finira jamais. Elle trouvera son plein accomplissement au ciel quand nous verrons et adorerons l’« Agneau comme immolé » (Apoc. 5).
« Car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. Et ils se mirent à faire bonne chère. » (Luc 15:24)
Notez l’expression du Seigneur : le fils était « mort ». J’insiste spécialement là-dessus parce que nous l’avons déjà vu avec la « drachme perdue ». Bien que vivant, le fils était mort — mort pour le père. Ainsi l’homme loin de Dieu est mort pour Dieu. Mais par la grâce de Dieu le fils est éveillé à une vie nouvelle, il est « passé de la mort à la vie » (Jean 5:24).
La joie et la gaîté remplissaient la maison du père. Mais aux v. 25-32 de notre parabole, le Seigneur Jésus montre une autre scène où l’on voit au dehors des nuages noirs s’amonceler à l’horizon.
Le frère aîné revient des champs à la maison et entend la musique et les danses. Il s’informe de la raison, et on lui dit : « Ton frère est venu, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il l’a recouvré sain et sauf » (15:27). « Ton frère », « ton père », ces expressions auraient éveillé des sentiments heureux, mais voilà le contraire qui arrive : colère et opposition surgissent chez lui. Il se fâche et ne veut pas entrer. Pourquoi donc ?
C’était un propre-juste. Le Seigneur Jésus s’en sert comme image de tous ceux qui n’ont pas de relation vivante avec Dieu, mais qui pensent qu’ils peuvent se présenter devant Dieu avec leur propre justice.
Ce fils aîné murmurait contre la grâce dont le père avait usé en faveur du plus jeune fils. Les pharisiens et les scribes étaient le même genre de gens. Eux aussi s’étaient scandalisés de ce que le Seigneur recevait les pécheurs et mangeait avec eux. Eux-mêmes n’entraient pas dans le royaume des cieux, et ils ne laissaient pas entrer ceux qui le voulaient (Matt. 23:13). « Et il se mit en colère et ne voulait pas entrer » (15:28) : cela a toujours été l’attitude des Juifs propres-justes. Quand plus tard, l’apôtre Paul annoncera la parole de la grâce de Dieu, ce seront les Juifs qui seront ses opposants continuels. En voici un exemple tiré des Actes (13:45) : « mais les Juifs, voyant les foules, furent remplis de jalousie et contredirent à ce que Paul disait, contredisant et blasphémant ».
Le propre-juste n’a aucun cœur pour la bonté de Dieu envers les perdus. Il a de la haine pour la grâce parce qu’il ne la veut pas et ne la connaît pas, et parce qu’il pense ne pas en avoir besoin. C’est pourquoi il n’aucune part à la joie de la grâce ; elle lui est insupportable.
Par le fait que le fils aîné était « aux champs », le Seigneur Jésus indique que l’homme religieux, propre-juste, n’est pas seulement loin de la maison du Père, mais qu’il est aussi actif, et qu’il veut mériter le ciel quelle qu’en soit la manière. La parole du fils aîné le souligne encore plus : « Voici tant d’années que je te sers, et jamais je n’ai transgressé ton commandement » (15:29). Toutes les nombreuses personnes qui se vantent d’une profession chrétienne, et qui cherchent à satisfaire Dieu par toute la peine qu’elles se donnent, sont sur ce terrain de l’autosatisfaction et de la propre justice.
Les Juifs sous la loi se mettaient aussi sur ce terrain-là. Comme nation, ils avaient été mis au bénéfice d’une rédemption extérieure et d’une relation extérieure avec Dieu, et c’était la seule nation sur la terre à avoir une telle position. C’est aussi la raison pour laquelle le père dit au fils aîné qui personnifie cette nation : « Mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi » (15:31). Ce fils aîné représente aussi tous ces gens qui, de manière déplorable, pensent ne pas avoir besoin de la grâce de Dieu, et pouvoir se tenir devant Dieu sur la base de leurs propres œuvres.
Malgré la bonté du Père et son insistance, il n’a pas été possible de le décider à changer d’attitude. Enflé de sa bonne opinion de lui-même, il est en colère et reproche au père de ne jamais lui avoir donné un chevreau pour faire bonne chère avec ses amis. « Avec ses amis », non pas avec son père ! Combien cela est caractéristique ! L’amitié du monde n’est-elle pas inimitié contre Dieu (Jacq. 4:4) ? Ainsi le propre-juste a l’audace de prendre la parole contre Dieu, de condamner ce qu’Il fait, et de L’accuser d’injustice. Il se considère lui-même comme quelqu’un qui L’a servi depuis déjà de nombreuses années, et qui n’a jamais transgressé aucun commandement de Dieu.
Un de mes lecteurs se trouverait-il encore sur ce terrain ? Serais-tu d’avis que Dieu peut se satisfaire de toi parce que tu fais tant de bonnes œuvres « sur le champ » de l’amour chrétien du prochain, parce que tu t’efforces tant d’être « noble, secourable et bon » ?
Oh ! alors tu n’as pas besoin d’un Sauveur. Pas TOI ! Car le Seigneur Jésus n’est pas venu appeler des justes, mais des pécheurs (Luc 5:32). Réfléchis bien à ce que le fils aîné, propre-juste, selon le tableau dressé par notre parabole, n’est jamais entré dans la maison du père. Préfères-tu rester dehors, dehors pour toujours ? « Dehors sont les chiens, et les magiciens, et les fornicateurs, et les meurtriers, et les idolâtres, et quiconque aime et fait le mensonge » (Apoc. 22:15).
Certes, le Seigneur Jésus ne parle pas ici de jugement, parce que dans cette parabole, Il décrit le jour de la grâce. Mais soyons assurés que quiconque refuse la grâce, sera condamné au jour du jugement. Il faut que tu en viennes à voir tes prétendues justices comme Dieu les voit, comme un « vêtement souillé » (Ésaïe 64:6) !
Nous préférons détourner les regards du fils aîné, et les porter encore une fois sur le plus jeune fils, autrefois perdu, et maintenant retrouvé. Revêtu de la plus belle robe, il est entré dans la maison du Père, pour ne plus la quitter jamais.
Un bonheur sans fin en partage : être amené du pays éloigné jusque dans la maison du Père où il y a une plénitude de joie, et cela pour l’éternité !