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Les Paraboles de Matthieu 15 à 22
Christian Briem
Traduit de l’allemand de : Er lehrte sie vieles in Gleichnissen — vol. 1, p. 291-378
Les sous-titres proviennent en partie de l’auteur, et en partie de Bibliquest
Table des matières abrégée :
1 Aveugles conducteurs d’aveugles — Matthieu 15:14
2 Le ciel rouge, le nuage à l’ouest et le vent du midi — Matthieu 16:1-4 — Luc 12:54-56
3 La brebis égarée [dans les montagnes] — Matthieu 18:1-14 (surtout 18:10-14)
4 Le serviteur impitoyable. Matthieu 18:23-35 et Luc 7:41, 42
5 Les ouvriers dans la vigne — Matthieu 19:30 à 20:16
6 Les deux fils — Matthieu 21:28-32
7 Les méchants cultivateurs — Matthieu 21:33-46
8 Le roi qui fit des noces pour son fils — Matthieu 22:1-14
Table des matières détaillée :
1 Aveugles conducteurs d’aveugles — Matthieu 15:14
1.1 Besoin de nouvelle naissance, pas seulement d’amélioration
1.2 Abandonnés à leurs propres voies
1.4 Origine et jugement de cet aveuglement
1.5 La grâce envers les aveugles
2 Le ciel rouge, le nuage à l’ouest et le vent du midi — Matthieu 16:1-4 — Luc 12:54-56
2.1 Ceux qui exigeaient des signes
2.2 L’avertissement du Seigneur
2.3 Les nuages de l’ouest et le vent du sud
3 La brebis égarée [dans les montagnes] — Matthieu 18:1-14 (surtout 18:10-14)
3.1 Que se passe-t-il quand des enfants meurent ?
3.2 La Parabole [de la brebis égarée dans les montagnes]
4 Le serviteur impitoyable. Matthieu 18:23-35 et Luc 7:41, 42
4.3 Un croyant peut-il perdre son salut (le pardon de ses péchés) ?
4.3.2 Deux sortes de pardon (ou : rémission) des péchés [pardon éternel, pardon gouvernemental]
4.4 Signification de la parabole
4.5 Autres applications de la parabole
5 Les ouvriers dans la vigne — Matthieu 19:30 à 20:16
5.1.1 Le salut et les richesses
5.1.2 100 fois ce qu’on a laissé pour Christ
5.2.2.1 L’œuvre de Dieu est faite en tout temps
5.2.2.2 Les différents groupes d’ouvriers
5.2.3 Les derniers deviennent les premiers
5.2.3.1 Récompenses : Dieu n’oublie rien
5.2.3.2 Récompenses égales ou inégales ?
5.2.3.5 Des derniers qui sont les premiers
5.2.3.6 Inversion entre Matthieu 19:30 et 20:16
5.2.4 Beaucoup d’appelés, peu d’élus (20:16 et 22:14)
5.2.5 Position de cette parabole dans l’évangile de Matthieu
6 Les deux fils — Matthieu 21:28-32
6.1 Le contexte qui précède et qui suit
6.2 Les trois paraboles de Matthieu 21 et 22
6.5 L’explication de la parabole
7 Les méchants cultivateurs — Matthieu 21:33-46
7.1.1 Révolte contre Dieu et contre Sa grâce
7.1.2 Deux personnes de la Déité
7.2 « Me levant de bonne heure et [les] envoyant »
7.2.2 Le Maître s’en est allé. L’envoi de prophètes
7.2.3 L’envoi du Fils bien-aimé
7.2.4 Le rejet du Fils et ses conséquences
7.2.5 Impossible de Lui ôter l’héritage
7.2.6 Un jugement terrible, passé et futur
7.2.7 Le royaume ôté. Royaume des cieux, royaume de Dieu
8 Le roi qui fit des noces pour son fils — Matthieu 22:1-14
8.1 Les pensées du roi au sujet de son fils — Matthieu 22:1, 2
8.2.2 Après la croix — Matthieu 22:4
8.4 Le jugement contre Jérusalem
8.5 Aux Juifs premièrement, et aux Grecs
8.6 L’habit [ou : robe] de noces
8.6.1 L’habit de noces nécessaire
Traduit de l’allemand de : Er lehrte sie vieles in Gleichnissen — vol. 1, p. 291-296
En Matthieu 15:14 le Seigneur emploie une image des scribes et des pharisiens que nous appellerions à peine une parabole à cause de sa brièveté. Mais dans le passage parallèle de l’évangile selon Luc, il est dit expressément :
« Et il leur disait aussi une parabole : Un aveugle peut-il conduire un aveugle ? Ne tomberont-ils pas tous deux dans la fosse ? » (Luc 6:39).
Certes, c’est une très petite parabole mais ce n’est pas pour autant qu’elle ne contient pas de précieux enseignements pour nous. Comme Matthieu nous le montre, le Seigneur Jésus prononce ces paroles à la suite du reproche des pharisiens aux disciples de Jésus qui mangeaient le pain sans s’être lavé les mains. Le Seigneur les dénonce comme hypocrites, car eux-mêmes transgressaient le commandement de Dieu à cause de leur tradition, et ainsi l’annulaient (Matthieu 15:1-6). Les doctrines qu’ils enseignaient au peuple n’étaient rien d’autre que des commandements d’hommes, comme le Seigneur le dit clairement à l’aide d’une citation d’Ésaïe (Matthieu 15:9). Ils commettaient l’erreur habituelle de croire qu’on peut plaire à Dieu par des choses extérieures, et ils oubliaient que même Satan peut se servir d’un système religieux (comme le leur) pour atteindre son but de faire du mal. Leur formalisme creux ne les menait pas seulement à l’hypocrisie, comme on l’observe de manière générale ; mais en rajoutant leurs règlements humains à la parole de Dieu, ils enlevaient la force à Sa sainte parole.
Tout à coup, le Seigneur se détourne d’eux et appelle la foule. C’est à celle-ci, et non aux pharisiens, qu’Il enseigne que ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme, mais ce qui en sort. Le problème n’était pas le fait de manger avec des mains non lavées. Il se trouvait beaucoup plus dans le cœur méchant de l’homme et dans tout ce qui découle de cette source (Matthieu 15:19-20). Entendre cela était une pierre d’achoppement pour les pharisiens de l’époque, et il en est encore ainsi de nos jours pour l’homme religieux. On ne veut pas admettre que l’homme a une nature corrompue et que, pour cette raison, ce n’est pas d’amélioration qu’il a besoin, mais de nouvelle naissance (Jean 3:3-5). Il n’y a que l’implantation d’une vie nouvelle et divine qui peut apporter remède et salut. Ceux qui possèdent cette vie, le Seigneur les compare aux « plantes » que Son Père céleste a plantées. Les pharisiens n’en faisaient pas partie. Toutes les plantes que le Père n’avait pas plantées seraient déracinées — une image sérieuse du jugement à venir (Matthieu 15:13).
Après cette déclaration assez générale du verset 13, le Seigneur recommence à parler directement des pharisiens, et dit ceci aux disciples à leur sujet :
« Laissez-les ; ce sont des aveugles, conducteurs d’aveugles : et si un aveugle conduit un aveugle, ils tomberont tous deux dans une fosse. » (Matthieu 15:14)
Cette expression « Laissez-les » est extrêmement sérieuse. Ces hommes n’avaient rien d’autre à attendre que le jugement, aussi les disciples devaient les laisser, les laisser faire. Ils ne devaient pas discuter avec eux dans l’espoir d’arriver finalement à les convaincre. De façon similaire, l’apôtre Paul met le jeune Timothée en garde contre Alexandre, l’ouvrier en cuivre, qui lui avait fait beaucoup de mal : « Garde-toi aussi de lui, car il s’est fort opposé à nos paroles » (2 Timothée 4:14-15). Qu’y a-t-il de plus sérieux que Dieu abandonnant un homme et le laissant poursuivre ses propres voies ? Certes, Il rend témoignage de Lui-même à chaque homme, et cela plusieurs fois (voir Job 33:29, 30). Mais si celui-ci ne veut définitivement pas revenir, Dieu le laisse finalement aller. Ces paroles « Laissez-les ! » s’adressent également à nous aujourd’hui à l’égard de ceux qui sont des adversaires déclarés de la vérité.
À quoi sert-il de discuter sur des questions de doctrine avec quelqu’un qui est encore spirituellement mort, et qui est peut-être un opposant déclaré à la vérité ? Ce n’est pas seulement inutile, mais c’est même dangereux. Dans le Sermon sur la montagne, le Seigneur Jésus avertit Ses disciples de ne pas donner ce qui est saint aux chiens, ni de jeter les perles aux pourceaux, « de peur qu’ils ne les foulent à leurs pieds, et que, se retournant, ils ne vous déchirent » (Matthieu 7:6). Il ne faut pas tendre la main à un mauvais usage de la grâce.
Avant de nous occuper des conducteurs religieux d’Israël, nous aimerions jeter un coup d’œil sur ceux qu’ils enseignaient. Le Seigneur jugeait que, dans l’ensemble, les Juifs étaient des « aveugles », — aveugles quant à eux-mêmes et aveugles quant aux pensées de Dieu. C’est vraiment un jugement sérieux ! Comme nous le verrons plus tard, cela n’implique rien moins, pour ces Juifs, que de partager plus tard le sort terrible de ceux qui les enseignaient. Le jugement des pharisiens sur leur propre peuple était pourtant méprisant : « cette foule qui ne connaît pas la loi est maudite » (Jean 7:49). Quel orgueil émane de ces paroles !
Outre la propre justice, cet orgueil était l’un des caractères principaux des conducteurs religieux. Dans la parabole du « pharisien et du publicain », le Seigneur place ces deux caractères l’un à côté de l’autre : ces gens mettaient leur confiance en eux-mêmes, se croyant justes ; et ils méprisaient les autres (Luc 18:9). Ils avaient pourtant pris parmi le peuple d’Israël la position de docteurs [enseignants], et selon l’expression du Seigneur, ils s’étaient « assis dans la chaire de Moïse » (Matthieu 23:2). Ils se croyaient compétents et seuls autorisés à prendre des décisions quant à toutes les questions religieuses. Cette prétention venait de ce qu’ils possédaient les rouleaux de la Loi, et qu’ensemble avec les scribes, ils prenaient soin du texte sacré et veillaient à son respect et à son maintien. Étant instruits dans la loi, ils osaient se faire conducteurs d’aveugles (Romains 2:19). Dans les synagogues, ils enseignaient le peuple, et exposaient en détails les dispositions de la loi.
Cela ne veut pas dire qu’ils les avaient comprises. Certes ils pensaient les avoir comprises, mais le Seigneur Jésus dit qu’ils étaient des aveugles conducteurs d’aveugles. Celui qui comprenait réellement les Écritures, devait reconnaître qu’elles rendent témoignage de Lui, et venir à Lui pour avoir la vie éternelle (Jean 5:39, 40). Mais ils ne venaient pas à Lui, et cela montre qu’ils n’avaient pas compris les Écritures, qu’ils étaient aveugles.
Cet aveuglement spirituel n’était pas seulement un simple hasard malheureux ; ce n’était pas non plus seulement l’aveuglement naturel de l’homme à cause de son état de péché. Non, c’est parce qu’ils croyaient voir, qu’ils étaient véritablement aveugles (Jean 9:39-41). Nous traiterons ces versets de manière plus détaillée quand nous nous occuperons de la parabole de « la porte des brebis » en Jean 10. En tout cas, les pharisiens avaient refusé de « voir », et pour cela, eux qui voyaient (c’est-à-dire qui croyaient voir), ils allaient devenir aveugles. C’était un jugement de la part du Seigneur. Ils préféraient les ténèbres à la lumière (Jean 3:19), et ainsi s’accomplissait en eux la prophétie de Sophonie 1 (1:17) : « Et je ferai venir la détresse sur les hommes, et ils marcheront comme des aveugles ; car ils ont péché contre l’Éternel ; et leur sang sera répandu comme de la poussière, et leur chair comme de la fiente ». Être condamné à l’aveuglement — quel jugement sérieux ! Il commence déjà au temps actuel, et a des conséquences éternelles.
Il est presque effrayant de constater le nombre de fois, et la manière dont le Seigneur Jésus qualifie d’aveugles ces conducteurs spirituels dans Son discours de Matthieu 23. « Malheur à vous, guides aveugles ! » (23:16) ; « fous et aveugles ! » (23:17) ; « aveugles ! » (23:19) ; « guides aveugles ! » (23:24) ; « pharisiens aveugles ! » (23:26). S’ils avaient eu des yeux oints par l’Esprit, ils auraient été gardés de tomber dans la fosse. Mais comme ils croyaient voir, ils étaient en réalité aveugles, et ce sort tomberait justement sur eux. « Si un aveugle conduit un aveugle, ils tomberont tous deux dans une fosse ». Ainsi cette petite parabole se termine par cette allusion au jugement à venir qui porterait aussi bien sur les conducteurs que sur ceux qui étaient conduits.
Ne pouvons-nous pas appliquer cette parabole au temps actuel et aux différents états dans la chrétienté ? Très certainement ! Aujourd’hui comme autrefois, le « dieu de ce siècle », Satan, aveugle « les pensées des incrédules pour que la lumière de l’évangile de la gloire du Christ ne resplendît pas pour eux » (2 Corinthiens 4:4). Mais quel jugement tombera sur ceux qu’il peut utiliser comme conducteurs spirituels pour opérer cet aveuglement ! Ceci ne place-t-il pas sur nous cette grande responsabilité de ne pas déformer la parole de Dieu, mais de présenter simplement la vérité devant les consciences des gens ?
Nous ne voulons cependant pas terminer le commentaire sur cette petite parabole sans présenter la grâce de Dieu qui peut agir malgré tout. Saul de Tarse était aussi un pharisien, et même un persécuteur de l’assemblée. Pourtant Dieu lui a ouvert les yeux, les yeux du corps comme les yeux spirituels (Actes 9:12-18). Et non seulement cela, mais le Seigneur qui lui était apparu l’envoya vers d’autres, vers les nations, « pour ouvrir leurs yeux, pour qu’ils se tournent des ténèbres à la lumière » (Actes 26:17, 18).
Tandis que dans notre parabole les aveugles sont égarés par des aveugles, et finissent ensemble dans la fosse, les esclaves de la parabole du « grand souper », sur l’ordre du maître de la maison, amènent entre autres des aveugles trouvés dans les rues et les ruelles de la ville (Luc 14:21). Eux aussi conduisent des aveugles, mais ils ne sont pas des aveugles conducteurs d’aveugles. Et où finit leur chemin commun ? Dans la salle de fêtes du Maître ou — selon la présentation correspondante de Matthieu 22 — dans la salle des noces du roi. Si le Seigneur amène à Lui de tels aveugles, ne peut-on pas penser qu’Il leur a d’abord ouvert les yeux avant qu’ils prennent place à Sa table ? Le prophète Élisée nous en donne un bel exemple. Quand il accompagna à Samarie les Syriens ennemis frappés d’aveuglement, il pria : « Éternel, ouvre les yeux à ces hommes, afin qu’ils voient. Et l’Éternel ouvrit leurs yeux, et ils virent… » Et alors un grand repas leur fut préparé (2 Rois 6:19-23).
Quel triomphe de la grâce de Dieu ! Malgré l’aveuglement moral croissant des hommes, ce triomphe de la grâce se poursuit encore de nos jours.
Traduit de l’allemand de : Er lehrte sie vieles in Gleichnissen — vol. 1, p. 297-305
Deux fois, dans Ses discours, le Seigneur Jésus se réfère aux « signes du ciel », c’est-à-dire à l’aspect du ciel, au moyen desquels les habitants de Palestine avaient l’habitude de prédire le temps qu’il fait. En Matthieu 16, Il parle du ciel rouge, le soir et le matin (11:2, 3), et en Luc 12 il met en contraste un nuage à l’ouest avec le vent du midi. La question se pose de savoir s’Il se servait de ces images seulement par comparaison, ou bien s’Il voulait leur en faire dire plus — autrement dit, comportent-elles une signification symbolique ? Nous croyons que la seconde pensée est la bonne, car en Matthieu 13 il est dit : « Jésus dit toutes ces choses aux foules en paraboles, et sans parabole il ne leur disait rien » (Matthieu 13:34). Nous ne pouvons pas non plus admettre que le Seigneur choisissait Ses illustrations superficiellement ou sans intention particulière.
Jetons d’abord un coup d’œil sur le contexte où se trouve la parabole du ‘ciel rouge’.
Le début du ch. 16 montre quelque chose d’extraordinaire : pour la première fois les pharisiens et les sadducéens s’associent pour attaquer ensemble le Seigneur Jésus (ces groupes ou sectes étaient ennemis acharnés l’un de l’autre en matière de politique et de religion). Les pharisiens étaient la plus rigoureuse de toutes les sectes religieuses du peuple juif. C’était des ritualistes, faisant rigoureusement attention à l’observation extérieure et littérale de la loi — et non pas seulement de la loi, mais aussi des traditions qu’ils y avaient eux-mêmes ajoutées. Au chapitre précédent, le Seigneur avait démasqué les pharisiens comme étant des hypocrites. Nous nous sommes occupés de ce sujet dans la parabole des ‘aveugles conducteurs d’aveugles’.
Leurs adversaires déclarés étaient les sadducéens. Ils se positionnaient comme un mouvement d’opposition ou de réforme contre le pharisaïsme, et niaient tout surnaturel — tout ce qui ne peut pas être expliqué par la raison humaine. C’était les libres-penseurs et rationalistes du peuple juif. N’est-il pas caractéristique que ces deux partis directement opposés l’un à l’autre et ennemis (dans leur principe, on les retrouve de notre temps), se trouvaient réunis pour tenter le Seigneur ? Qu’est-ce qui les unissait, sinon leur haine commune contre le Seigneur Jésus ? Ils intervenaient donc comme un groupe uni, ce que souligne, dans notre verset 1, l’article commun [dans l’original grec] aux deux noms ‘pharisiens’ et ‘sadducéens’ : les pharisiens et sadducéens. Mais le Seigneur met à nu leur ignorance et leur méchanceté. Ce qui est grave dans cette affaire, c’est que le Seigneur ne les enseigne plus ni ne les avertit plus ; et quand ils cherchent un signe, ils obtiennent un avertissement.
Ils lui demandent s’Il pourrait leur montrer un signe du ciel. Déjà au ch. 12:38, les scribes et les pharisiens étaient venus Lui réclamer « Maître, nous désirons voir un signe de ta part ». Nous avons déjà exprimé quelques pensées sur ce sujet en rapport avec la parabole de ‘l’esprit immonde’. Mais cette fois-ci, ils demandaient de Lui un signe du ciel. Un signe peut être un miracle, ou toute autre action extraordinaire ; il signifie toujours quelque chose, et signale une révélation particulière sur soi-même. Ici, Jésus devait prouver par un signe qu’Il était le Messie envoyé par Dieu à Son peuple. Le fait qu’ils demandaient maintenant un signe venant du ciel, démontre combien grande était la suspicion et l’incrédulité de ces conducteurs juifs contre Lui.
Il y avait effectivement eu de tels signes en Israël, par exemple quand Josué avait fait arrêter le soleil et la lune (Josué 10:12 et suiv.), ou quand Élie avait fait descendre le feu du ciel (1 Rois 18:36 et suiv.), ou quand, à la suite de la prière de Samuel, un fort tonnerre avait mis en déroute les Philistins (1 Samuel 7:9 et suiv.). Le raisonnement des pharisiens et sadducéens semble avoir été que, du fait que le Messie devrait être plus grand que tous les prophètes et que Moïse lui-même, Il se devait d’accomplir des signes dont la grandeur et la majesté laisseraient dans l’ombre tous les autres signes opérés jusqu’alors. C’est la raison pour laquelle ils voulaient maintenant voir un signe venant du ciel.
Mais on ne vient pas à bout de l’incrédulité par des signes et des miracles. On voit toujours cela se répéter dans l’Écriture. Les signes opérés par Moïse devant le pharaon avaient-ils pu atteindre le cœur endurci de ce roi ? La logique de l’incrédulité se révèle toujours comme de la folie. Même l’homme riche en hadès était d’avis que ses frères viendraient à la foi si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts : « Je te prie donc, père, de l’envoyer dans la maison de mon père, car j’ai cinq frères, en sorte qu’il les adjure ; de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de tourment. Mais Abraham lui dit : Ils ont Moïse et les prophètes ; qu’ils les écoutent. Mais il dit : Non, père Abraham ; mais si quelqu’un va des morts vers eux, ils se repentiront. Et il lui dit : s’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne seront pas persuadés non plus si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts » (Luc 16:27-31). L’incrédulité trouvera toujours un moyen d’éliminer un miracle par une explication quelconque. Voltaire avait dit une fois : « Si on faisait publiquement, sur la place du marché, un miracle devant mille témoins ayant du bon sens, je me méfierais plutôt de mes sens que de reconnaître un miracle ». C’est le point-clé : on ne veut pas croire. Il en était de même au temps du Seigneur. Supposons que le Seigneur ait accédé au désir des pharisiens et leur ait donné un miracle venant du ciel : qu’est-ce qui les aurait empêchés de prétendre sans hésiter qu’Il l’avait accompli avec l’aide de Béelzébul, le chef des démons ? C’est pourquoi Il ne leur accorde aucun signe du ciel. Par contre, Il leur donne un sérieux avertissement. Certes Il le revêt de la forme d’une parabole où Il parle de signes du ciel. Ceux-ci Lui servent à leur tour de symboles des signes des temps qu’il était si crucial, pour Ses auditeurs, de reconnaître et d’apprécier.
« Mais lui, répondant, leur dit : Quand le soir est venu, vous dites : Il fera beau temps, car le ciel est rouge ; et le matin : Il y aura aujourd’hui de l’orage, car le ciel est rouge et sombre. Vous savez discerner l’apparence du ciel ; et ne pouvez-vous pas discerner les signes des temps ? » (Matthieu 16:2-3).
En Palestine, quand le ciel est rouge le soir, c’est que le vent a chassé les nuages et la brume vers l’ouest sur la Méditerranée, et qu’alors le soleil se couche rouge, derrière eux. C’est en général un signe annonciateur de beau temps le jour suivant, car dans ce pays, la pluie vient de l’ouest, de la mer, non pas de l’est. Inversement, si le ciel est rouge le matin, c’est que le vent a entraîné les nuages et la brume pendant la nuit au-dessus du pays, en sorte que le soleil se lève rouge, derrière eux. Cela fait s’attendre à un temps pluvieux et orageux. Les pharisiens et les sadducéens comprenaient tout cela bien sûr. Pourtant, il y a un accent d’ironie triste dans les paroles du Seigneur, quand Il dit : « Vous savez discerner l’apparence du ciel ; et ne pouvez-vous pas discerner les signes des temps ? » (Matthieu 16:3). Marc nous dit qu’à cette occasion le Seigneur soupira en Son esprit (Marc 8:12). Il Lui était douloureux que ces gens ne soient pas capables de discerner les signes des temps. Mais cela montre clairement que derrière l’image qu’Il utilisait, il y avait un sens plus profond. Qu’étaient donc ces signes des temps ?
Par la miséricorde de Dieu, l’Orient d’en haut les avait visités, afin de luire sur ceux qui étaient assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort, pour conduire leurs pieds dans le chemin de la paix (Luc 1:78-79). Il vint chez les Siens, et les Siens ne L’ont pas reçu (Jean 1:11). Aussi le ‘soir’ de sa présence s’approchait rapidement. Il allait bientôt mourir à la croix de Golgotha. Par cela, la ‘lumière du monde’ allait disparaître derrière l’horizon de ce monde, mais ce ne serait cependant pas sans faire paraître un signe dans le ciel. Nous tous qui avons appris par la foi la signification du ciel rouge, c’est-à-dire de la mort du Seigneur, nous savons que le matin d’un jour nouveau va se lever, un matin sans nuages (2 Samuel 23:4). Et il n’y a pas que cela. Nous savons déjà aujourd’hui ce qu’est le « beau temps » : nous nous réjouissons de la faveur de Dieu, nous avons la paix avec Dieu et nous nous reposons dans la communion avec le Père et Son Fils Jésus Christ. Quelle part bienheureuse !
Combien pourtant sont nombreux les gens qui, alors comme aujourd’hui, n’ont pas compris, par la foi, la signification du ‘ciel rouge le soir’ ! Bien que le Seigneur ne se soit pas laissé sans témoignage, et ait en quelque sorte coloré en rouge le ciel par Sa mort, leurs yeux sont malgré tout restés fermés devant cela.
Que c’est effrayant : pour eux, il n’y a pas de ‘beau temps’, pas de bénédiction ‘au matin’ ; ils n’ont pas de promesses et ne verront jamais la vie éternelle. Au contraire ! Le même ‘soleil’ qui s’est autrefois couché rouge sur Golgotha, se lèvera rouge dans un jour à venir, et apportera la tempête du jugement sur les impies, sur toute la terre. Ne comprenons-nous pas que le Seigneur ait soupiré profondément dans Son esprit à cette pensée ? Ce n’était pas seulement parce qu’une génération méchante et adultère demandait un signe, mais Son cœur était plein de douleur au vu du ciel rouge et sombre qu’Il voyait venir en Esprit, accompagné de malheur terrible pour tous ceux qui auront laissé passer, sans l’utiliser, le jour de la grâce.
C’est ainsi que cette petite parabole parle de la mort du Seigneur et de Son retour en puissance et en gloire. Mais qu’il est effrayant que ce signe des temps n’ait pas été compris par les pharisiens du temps du Seigneur, et qu’il ne soit pas mieux compris par beaucoup de gens d’aujourd’hui !
Cependant, avant que le Seigneur abandonne Ses adversaires et s’en aille, Il leur dit encore une fois qu’il ne leur sera donné aucun autre signe que le signe de Jonas. Or ce signe ne serait que le jugement qui les atteindrait, encore aggravé. Jonas était une figure de Christ — un homme qui est sorti de la mort et a prêché aux nations. Mais cela implique la mise de côté temporaire d’Israël, jusqu’à ce que le nombre complet [la plénitude] des nations soit entré (Romains 11:25).
En outre, il y a ici un exemple évident de ce que le Seigneur a prononcé les mêmes paroles en plusieurs occasions différentes (comparer Matthieu 12:39). Il a fait cela à plusieurs reprises, et c’est ce qui fait que beaucoup de prétendues contradictions se réduisent ainsi à rien.
Avant de quitter notre sujet, nous voulons donner rapidement un coup d’œil à la parabole parallèle de Luc 12 :
« Et il dit aussi aux foules : Quand vous voyez une nuée se lever de l’occident, aussitôt vous dites : Une ondée vient ; et cela arrive ainsi. Et quand vous voyez souffler le vent du midi, vous dites : Il fera chaud ; et cela arrive. Hypocrites ! vous savez discerner les apparences de la terre et du ciel, et comment ne discernez-vous pas ce temps-ci ? » (Luc 12:54-56).
Le Seigneur utilise ici un autre « signe du ciel » : un nuage montant de l’ouest et d’autre part le vent du sud [= du midi]. Le nuage montant de l’ouest amène la pluie, comme nous l’avons déjà vu, tandis que le vent du sud suscite la sécheresse et la chaleur.
La pluie est, sans exception dans l’Écriture, une image de la bénédiction. Comparer seulement les versets bien connus d’Hébreux 6 : « Car la terre qui boit la pluie qui vient souvent sur elle, et qui produit des herbes utiles… reçoit de Dieu de la bénédiction » (Hébreux 6:7 ; comparer Lévitique 26:4 ; Deutéronome 11:11, 14, 17). Mais la ‘pluie’, dans l’Ancien Testament, renvoie aussi symboliquement et directement au Seigneur Jésus, le Messie du peuple d’Israël. C’est ainsi que le Psaume 72 parle de Lui : « Il descendra comme la pluie sur un pré fauché, comme les gouttes d’une ondée sur la terre » (Psaume 72:6). Et Salomon a ainsi parlé du plus grand que lui : « Dans la lumière de la face du roi est la vie, et sa faveur est comme un nuage de pluie dans la dernière saison » (Proverbes 16:15).
Ainsi nous ne faisons pas fausse route en admettant que le Seigneur parlait en premier lieu de Lui-même dans cette petite parabole. « Ce temps-ci » que les Juifs d’alors ne comprenaient ni ne discernaient, était le temps de Sa présence, et il était comme une ondée sur une terre sèche. C’est de ce temps que les prophètes de l’ancienne alliance avaient prophétisé. Maintenant leurs prophéties s’étaient accomplies, le roi Lui-même était venu au milieu d’eux, et déversait Ses bénédictions sur eux. Malgré cela, ils ne l’avaient pas reconnu et ne voulaient pas le reconnaître.
C’est la raison pour laquelle le Seigneur les qualifie ‘d’hypocrites’, et qu’après la ‘pluie’ il mentionne la venue du ‘vent du sud’. Venant des déserts brûlant du sud, il apporte généralement une chaleur(*) torride sur le pays. N’était-ce pas aussi un signal sérieux du jugement qui allait venir sur eux s’ils Le rejetaient, et « ne connaissaient pas le temps de leur visitation » (Luc 19:44) ?
(*) En Jacques 1:11 ce mot « chaleur » est utilisé pour l’ardeur du soleil qui dessèche tout.
Si nous appliquons tout cela à nous et à notre temps, ne devons-nous pas dire que nous vivons aujourd’hui dans un temps spécial de bénédiction, le temps de la grâce ? Dans ce temps, Dieu fait annoncer par Ses serviteurs l’évangile de Jésus Christ, comme jamais auparavant, et comme cela ne sera jamais répété. Celui qui accepte par la foi ce témoignage, Il le bénit, non pas seulement de bénédictions terrestres comme Israël en avait la promesse, mais « de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ » (Éphésiens 1:3). Mais si les efforts de l’Esprit de Dieu pour amener des pécheurs au Sauveur, restent sans fruit, si le ‘pays’ qui reçoit la ‘pluie’ porte des épines et des chardons, au lieu de fruit pour Dieu, alors la malédiction est proche pour lui, et sa fin est d’être brûlé (Hébreux 6:7-8).
Qu’est-ce que le ‘pays’ ? c’est ce domaine où Christ a été connu et pourtant rejeté : la chrétienté. Le Seigneur Jésus ne va pas seulement anéantir bientôt ‘l’homme de péché’ par le souffle de Sa bouche, mais le ‘vent du sud’ atteindra de sa chaleur torride tous ceux qui auront plutôt cru le père du mensonge, et qui n’ont pas reçu l’amour de la vérité (Comp. 2 Thessaloniciens 2:8-12).
Combien sont sérieux les contrastes que le Seigneur signale dans ces deux petites paraboles : le beau temps / le temps d’orage — la pluie / la chaleur ! Nous avons vu un petit peu ce qui est caché derrière ces mots. Alors demandons-nous : quelle sera notre part ? Avons-nous ajouté foi à l’évangile de Dieu touchant Son Fils, ou nous sommes-nous contenté d’une profession creuse de christianisme ? Avons-nous reconnu et compris les signes du temps, que le juge se tient à la porte (Jacques 5:9) ?
À l’horizon de ce monde, on voit déjà les éclairs, les signes avant-coureurs du jugement qui vient. Le merveilleux temps de la grâce va prendre fin, vraisemblablement très bientôt. En sommes-nous conscients, chers amis, ou le Seigneur doit-Il nous demander : « comment se fait-il que vous ne discernez pas ce temps-ci ? »
Traduit de l’allemand de : Er lehrte sie vieles in Gleichnissen — vol. 1, p. 307-312
La Parabole de « la brebis égarée » en Matthieu 18 ressemble beaucoup à celle de « la brebis perdue » de Luc 15, mais le contexte dans lequel le Seigneur a donné ces deux paraboles est tout autre. En Matthieu 18, Il place un petit enfant(*) « au milieu d’eux » pour montrer à Ses disciples l’état d’esprit approprié au royaume des cieux. Et même si à partir du verset 6, Il parle en général des « petits », des « insignifiants » qui croient en Lui, en pensant ainsi à ceux dont on fait peu cas parmi les Siens, Il revient aux versets 10 et 14 sur ceux qui sont littéralement des petits enfants. Même s’Il ne délaisse pas l’usage du terme « les petits » utilisé précédemment, le contexte montre clairement qu’Il a en vue ici exclusivement les petits enfants. De cette manière le petit enfant ne Lui a pas seulement servi d’image d’humilité pour les disciples, mais Il en profite pour faire deux constatations de grande portée en rapport avec les petits enfants. La première est liée à la question suivante :
(*) Le terme grec paidíon désigne aussi bien un nouveau-né, un bébé (Hébreux 11:23) qu’un petit enfant ou un jeune enfant (Matthieu 2:8, 11 ; 11:16). La frontière entre les deux n’est pas déterminée.
Beaucoup de parents se sont demandés avec inquiétude ce qui arrivait à leurs enfants qui mourraient en bas âge. Sont-ils perdus ou vont-ils au ciel ? Il semble que le Seigneur Jésus répond à cette question au verset 10 lorsqu’Il dit : « Prenez garde de ne pas mépriser un de ces petits ; car Je vous dis que, dans les cieux, leurs anges voient continuellement la face de Mon Père qui est dans les cieux. Car le Fils de l’homme est venu pour sauver ce qui était perdu ».
Les petits enfants ne sont pas innocents, comme beaucoup l’admettent, mais ils ne sont pas non plus endurcis par une vie de péché. Descendant d’une race déchue, ils sont pourtant perdus et ont besoin d’un sauveur. Le Fils de l’homme est effectivement venu pour les sauver, et ce n’est pas la volonté du Père qu’un seul de ces petits périsse.
Contrairement à Luc 19:10, il n’est pas parlé ici du fait de chercher. S’il faut chercher quelqu’un, c’est qu’il y a eu au préalable un éloignement volontaire de Dieu. Mais on ne peut pas dire cela des petits enfants. C’est la raison pour laquelle le Seigneur parle ici uniquement du fait d’être venu pour sauver ce qui était perdu. Quel contraste merveilleux en effet : perdu, parce qu’Adam a péché ; sauvé, parce que Jésus est mort !
Mais qu’est-ce que le Seigneur Jésus veut dire en disant que leurs anges voient continuellement la face de Son Père qui est dans les cieux ? Est-ce finalement vrai que les enfants ont un ange gardien ? L’Écriture n’en parle nulle part. Il est vrai que les anges sont des esprits administrateurs, envoyés pour servir en faveur de ceux qui doivent hériter du salut (Hébreux 1:14). Mais cela ne concerne pas les croyants envisagés individuellement, et encore moins les enfants, comme si les croyants ou les enfants avaient chacun un ange qui lui était affecté. Les livres prophétiques de Daniel et Zacharie nous apprennent bien qu’un ange se tenait là pour un peuple. Mais l’idée qu’un ange particulier soit là pour une personne particulière, est dénuée de tout fondement dans la Parole de Dieu.
Ici, il faut certainement comprendre les anges d’une manière générale, et non pas y voir les habitants du ciel. Mis à part le fait que « ange » signifie « messager », on trouve dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament que l’ange exprime la pensée de la représentation ou suppléance : L’ange représente quelqu’un d’autre, sans que ce dernier soit présent personnellement ou dans son ensemble. C’est ainsi que nous trouvons souvent dans l’Ancien Testament « l’Ange de l’Éternel », c’est-à-dire la représentation de l’Éternel sous une forme visible et supportable pour l’homme. Les « anges des sept assemblées » en Apocalypse 2 et 3 sont également considérés comme des représentants des rassemblements locaux dans leur responsabilité.
Il y a en Actes 12 un exemple particulièrement utile d’ange vu dans ce sens. L’assemblée à Jérusalem avait fait d’instantes prières à Dieu pour Pierre emprisonné. Quand ce dernier, libéré miraculeusement, se trouva effectivement devant la porte, il frappa et fut reconnu par Rhode, mais ils ne crurent pas que c’était réellement lui. Ils le croyaient mort et dirent alors : C’est son ange (Actes 12:15). Ils pensaient apparemment à la partie représentative de sa personne — son esprit.
C’est sans doute également la signification de l’ange dans notre passage. Les « anges » des petits enfants sont leurs esprits après la mort et ils voient continuellement la face du Père qui est dans les cieux. La forme verbale au présent « ils voient » facilite la compréhension. Ce temps exprime, comme ailleurs dans l’Écriture sainte, une vérité valable sur un plan général (usage absolu du présent). Le Seigneur parle d’un certain groupe ou d’une classe, et non pas d’individus, et la chose est vraie en principe pour cette classe : Ils voient la face du Père.
Si donc des enfants meurent à un âge où ils ne sont pas encore responsables du péché, ils ne sont pas perdus, mais sont dans le ciel, et se réjouissent de la présence de Dieu. Ceci ne concerne pas seulement les enfants de parents croyants, mais tous les enfants qui quittent tôt la terre.
Cela ne nous réjouit-il pas beaucoup que tous ces innombrables milliards de petits enfants morts pendant tous les millénaires dans les pays sous-développés ou païens, souvent dans des conditions terribles, fassent également parti du fruit du travail de l’âme de notre Seigneur ? Nous allons tous les retrouver au ciel quand nous y irons. Et s’il Lui a plu d’établir Sa louange par la bouche des petits enfants et de ceux qui tètent déjà sur cette pauvre terre, combien leur louange unie Le glorifiera un jour dans le ciel ! (Matthieu 21:16).
Note Bibliquest : Nous approuvons l’enseignement donné sur le sort des enfants, mais nous ne sommes pas persuadés par le sens donné par l’auteur à l’expression « leurs anges voient continuellement la face de Mon Père».
Le Seigneur se sert d’une petite parabole pour étayer ce qu’Il vient de dire en disant :
« Que vous en semble ? Si un homme a cent brebis, et que l’une d’elles se soit égarée, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf sur les montagnes, pour s’en aller chercher celle qui s’est égarée ? Et s’il arrive qu’il la trouve, — en vérité, je vous dis qu’il a plus de joie de celle-là que des quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées. Ainsi, ce n’est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux, qu’un seul de ces petits périsse » (Matthieu 18:12-14).
Il est montré ici une nouvelle raison de ne pas mépriser ces petits ou ces insignifiants : Le berger et le Père en prennent soin. La première raison était que leurs anges voient continuellement la face du Père qui est dans les cieux. C’est-à-dire qu’au cas où ils mourraient ici-bas, ils continueraient à vivre en présence du Père céleste dans des conditions incomparablement meilleures. Mais maintenant nous apprenons un autre côté précieux : Chacun individuellement est précieux pour le bon Berger ; et aussi ce n’est pas la volonté du Père céleste qu’un seul de ces petits périsse. Quelle sécurité leur est ainsi donnée !
Il ne faut pas voir au verset 14 des croyants qui sont pauvres en esprit ou inférieurs en esprit ; en effet ceux-ci sont les plus grands dans le royaume des cieux (Matthieu 5:3). Ce serait en outre une affirmation comparativement faible et légère de dire d’eux, que ce n’est pas la volonté du Père qu’un seul d’entre eux périsse. Non, le Seigneur parle ici de petits au sens littéral, d’enfants.
Il en va autrement dans la parabole. Son application s’étend à toute brebis égarée, qu’elle soit jeune ou âgée. Cependant, si dans la parabole de la brebis perdue en Luc 15, il est question de pécheurs, la parabole de la brebis égarée fait plutôt penser à des croyants. C’est le contexte qui le montre clairement comme nous l’avons déjà vu : Les disciples du Seigneur devaient avoir des sentiments corrects vis-à-vis de ceux qui appartenaient au royaume des cieux.
Si donc une brebis s’égare dans les montagnes, le désir qu’Il a de son rétablissement est tel qu’Il laisse les quatre-vingt-dix-neuf autres sur les montagnes, pour s’en aller vers l’égarée, jusqu’à ce qu’Il la trouve. Et quand Il la trouve, Il a plus de joie du rétablissement de celle-là que des quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées. Cela ne veut certainement pas dire que, par principe, Il a plus de joie des brebis égarées que de celles qui sont restées sur le chemin. Cela mettrait tout sens dessus dessous. Le « bon Berger » veut bien plutôt souligner toute l’importance qu’a pour Lui chacune de Ses brebis individuellement. Si une brebis s’égare, Ses soins, Sa peine pour celle-là sont si grands qu’Il fera tout pour son rétablissement et qu’Il laisse les autres brebis de côté pour un moment. Son amour pour cette seule brebis ne sera cependant jamais aux dépens de tout le troupeau ; car c’est Son désir que le troupeau ne perde aucune des siennes.
Si nous comparons les images du berger et de ses brebis en Matthieu 18 et Jean 10 nous sommes frappés par des différences remarquables. Dans l’une le bon Berger va après la brebis égarée, dans l’autre Il marche devant les brebis. Si une de Ses brebis ne veut pas Le suivre dans la vie pratique journalière, Il se voit contraint d’aller après elle, de la suivre. L’un ou l’autre de ces deux cas sera toujours le nôtre. Mais combien il est beaucoup plus béni que ce soit nous qui Le suivions, plutôt que Lui nous suive ! Si nous Le suivons, nous sommes en sécurité ; si c’est Lui qui nous suit, c’est que nous sommes en danger. Ainsi ces deux images se complètent. En Matthieu le Berger cherche Sa brebis ; en Jean 10, Il meurt pour les brebis. Mais les deux fois c’est Son amour pour elles qui en est la source.
Traduit de l’allemand de : Er lehrte sie vieles in Gleichnissen — vol. 1, p. 313-321
Il y a toute une série de paraboles qu’on peut relier les unes aux autres par le fait qu’elles utilisent les mêmes symboles, soit dans le sujet principal soit dans les détails.
La parabole du « serviteur impitoyable » de Matthieu 18:23-35 en fait partie. Il lui correspond la parabole « des deux débiteurs » de Luc 7:41,42. Dans les deux paraboles des hommes sont présentés comme débiteurs, mais le point est différent dans l’une et l’autre.
Dans la parabole de Luc 7, l’accent est mis sur la grâce souveraine de Dieu. Les deux débiteurs « n’avaient pas de quoi payer », et le créancier, dans sa miséricorde, remis la dette à l’un et à l’autre. La différence entre les deux dettes remises était relativement petite : 500 deniers / 50 deniers. Quand il s’agit des dettes des hommes vis-à-vis de Dieu, les différences ne sont pas tellement grandes. En plus elles se situent beaucoup plus dans l’idée qu’on s’en fait chacun, que dans l’absolu. Mais elles suffisent pour expliquer différentes mesures d’amour — d’un amour qui se manifeste en réponse à la miséricorde. Celui, à qui (selon son avis) il a été beaucoup pardonné, aime beaucoup ; celui à qui (selon son avis) il a été peu pardonné, aime peu.
Le but visé dans la parabole du « serviteur impitoyable » de Matthieu 18 n’est pas le même. Ici aussi, il y a deux débiteurs, mais dans ce cas, c’est la dette de l’homme vis-à-vis de Dieu qui est comparée avec la dette de l’homme vis-à-vis de son prochain ; et là, les différences de dettes sont gigantesques : 10.000 talents d’un côté, 100 deniers de l’autre côté. C’est ainsi que l’accent est mis sur le résultat que la bonté de Dieu, dont on a fait l’expérience, devrait produire dans notre comportement vis-à-vis des autres. Mais nous verrons cela de plus près. Dans les deux paraboles, le créancier est une image de Dieu.
Après que le Seigneur ait donné des enseignements sur ce qui devrait se passer si un frère pèche contre un autre (18:15 et suiv.), Pierre demande combien de fois il devrait pardonner à son frère qui péchait contre lui : « Sera-ce jusqu’à sept fois ? » (18:21). C’est l’occasion pour le Seigneur de montrer l’état d’esprit qui doit dominer dans le royaume des cieux : On devrait pardonner à son frère non pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. Il insiste donc sur un pardon illimité. Pour être encore plus clair, Il ajoute la parabole du « serviteur impitoyable » :
« C’est pourquoi le royaume des cieux a été fait semblable à un roi qui voulut compter avec ses esclaves. Et quand il eut commencé à compter, on lui en amena un qui lui devait dix mille talents. Et comme il n’avait pas de quoi payer, son seigneur ordonna qu’il fût vendu, lui, et sa femme, et ses enfants, et tout ce qu’il avait ; et que le payement fût fait. L’esclave donc, se jetant à ses pieds, lui rendit hommage, disant : Seigneur, use de patience envers moi, et je te payerai tout. Et le seigneur de cet esclave-là, touché de compassion, le relâcha et lui remit la dette. Mais cet esclave, étant sorti, trouva un de ceux qui étaient esclaves avec lui, qui lui devait cent deniers ; et l’ayant saisi, il l’étranglait, disant : Paie, si tu dois quelque chose. Celui donc qui était esclave avec lui, se jetant à ses pieds, le supplia, disant : Use de patience envers moi, et je te payerai. Et il ne voulut pas ; mais il s’en alla et le jeta en prison jusqu’à ce qu’il eût payé la dette. Or ceux qui étaient esclaves avec lui, voyant ce qui était arrivé, furent extrêmement affligés, et s’en vinrent et déclarèrent à leur seigneur tout ce qui s’était passé. Alors son seigneur, l’ayant appelé auprès de lui, lui dit : Méchant esclave, je t’ai remis toute cette dette, parce que tu m’en as supplié ; n’aurais-tu pas dû aussi avoir pitié de celui qui est esclave avec toi, comme moi aussi j’ai eu pitié de toi ? Et son seigneur, étant en colère, le livra aux bourreaux, jusqu’à ce qu’il eût payé tout ce qui lui était dû. Ainsi aussi mon Père céleste vous fera, si vous ne pardonnez pas de tout votre cœur, chacun à son frère » (Matthieu 18:23-35).
L’idée des rabbins juifs était qu’on devait pardonner jusqu’à trois fois à un frère qui se repent. Pierre était prêt à aller jusqu’à sept fois. Mais le Seigneur lui répond en quelque sorte : « Combien est grande à votre égard la grâce de Dieu qui restaure ! Ne l’avez-vous pas vécu de très nombreuses fois ? Si vous vivez dans la conscience de cette grâce, alors manifestez-la aussi à l’égard des autres sans aucune limite ». « …Vous supportant l’un l’autre et vous pardonnant les uns aux autres, si l’un a un sujet de plainte contre un autre ; comme aussi le Christ vous a pardonné, vous aussi faites de même » (Colossiens 3:13).
Dans le passage parallèle de Luc 17, Il ajoute encore une condition remarquable pour ce pardon réclamé : « Si ton frère pèche, reprends-le, et s’il se repent, pardonne-lui ; et si sept fois le jour il pèche contre toi, et que sept fois il retourne à toi, disant : Je me repens, tu lui pardonneras » (17:3,4). Nous avons quelquefois tendance à négliger cette condition indispensable pour tout vrai pardon : il doit y avoir repentance au sujet du mal commis, et il faut être prêt à avouer la faute, non seulement à soi-même ou à Dieu, mais aussi à celui contre qui on a manqué. En d’autres termes, le coupable doit confesser son péché à son frère. Très souvent cela n’a pas lieu, et la conséquence en est que bien des incidents fâcheux parmi les enfants de Dieu ne sont jamais vraiment réglés. Ils continuent à couver, des racines d’amertumes se répandent, et beaucoup en sont troublés et souillés (Hébreux 12:15). Ne nous trompons pas : Dieu Lui-même ne pardonne que si le péché Lui est confessé. « Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité » (1 Jean 1:9). Mais même si le coupable n’est pas prêt à confesser sa faute, nous devrions être toujours remplis d’un esprit de pardon, et rester ainsi en accord avec Dieu.
C’est la première chose à retenir de cette parabole. Les deux derniers versets nous révèlent ce qui arrive si nous ne le faisons pas, si nous ne pardonnons pas de cœur à notre frère. Mais nous y reviendrons quand nous aurons mieux approfondi la parabole, et que nous aurons compris les autres leçons qu’elle comporte.
Certains chrétiens se fondent sur la parabole du « serviteur impitoyable » pour étayer l’idée que, dans certaines conditions, un croyant chrétien peut à nouveau perdre le pardon qu’il a reçu. Leur argument est que le roi avait remis à l’esclave la dette de dix mille talents, mais comme celui-ci a manifesté un esprit implacable, il l’a finalement livré aux bourreaux jusqu’à ce qu’il eût tout payé. Or dans beaucoup de passages, l’Écriture enseigne de manière claire et nette qu’un vrai enfant de Dieu ne peut plus périr :
· Personne ne peut nous ravir de la main du Père et du Fils (Jean 10:28-30).
· Dieu ne se souvient plus jamais de nos péchés parce qu’Il nous a pardonné et nous a rendu parfaits « à perpétuité », c’est-à-dire sans interruption (Hébreux 10:14-18).
· Dieu nous a rendus propres pour Sa lumière, et nous a délivrés du pouvoir des ténèbres, et nous a transportés dans le royaume du Fils de Son amour (Colossiens 1:12-14).
· Nous avons la rédemption par le sang de Christ, la rémission des fautes (Éphésiens 1:7). C’est une rédemption éternelle (Hébreux 9:12).
· Nous avons reçu l’Esprit saint, qui demeure avec nous et qui est en nous éternellement, comme sceau d’une rédemption accomplie (Jean 14:16,17).
· Nous avons la vie éternelle parce que nous croyons au nom du Fils de Dieu. Celui qui a le Fils a la vie (1 Jean 5:12,13).
· Cette vie éternelle n’a pas son siège en nous, mais dans le Christ glorifié. IL est notre vie (Colossiens 3:3,4), et si cette vie devait nous être ôtée, elle devrait d’abord Lui être ôtée. Mais ceci est absolument impossible, car Il est en Lui-même le Dieu véritable et la vie éternelle (1 Jean 5:20).
Beaucoup de difficultés et d’erreurs proviennent de ce qu’on ne fait pas la différence entre les deux sortes de pardon des péchés dont parle l’Écriture. En premier lieu nous avons besoin, — et Dieu le donne, — du pardon pour les pécheurs, ou pardon éternel, c’est-à-dire le pardon en vue de l’éternité. C’est de ce pardon que parlent les passages cités ci-dessus. Dieu dit : « Je vous écris, enfants, parce que vos péchés vous sont pardonnés par son (celui de Son Fils) nom » (1 Jean 2:12). La grâce l’offre, le sang l’assure, l’Esprit de Dieu le proclame, et la foi le saisit.
Mais en second lieu, l’Écriture parle en bien des passages d’un pardon en rapport avec les voies gouvernementales de Dieu à l’égard des hommes. Le gouvernement de Dieu, ou Son action à l’égard des hommes, peut s’exercer sur Ses enfants, sur le peuple juif ou sur ceux qui professent être chrétiens. C’est justement ce dont traite notre parabole. Ce n’est ni une parabole du ciel ni de l’église, mais une parabole du royaume des cieux, c’est-à-dire du domaine de la profession chrétienne sur la terre. En outre, notre parabole ne parle pas de l’expiation du péché, mais de pardonner ou de retenir les péchés en rapport avec les voies gouvernementales de Dieu. Si nous saisissons clairement cette pensée, toutes les questions douteuses disparaissent. Considérons donc maintenant cette parabole d’un peu plus près.
Comme nous l’avons déjà fait remarquer, le « roi » est une image de Dieu. L’« esclave » qui devait la somme impossible à payer de dix mille talents est une figure du peuple d’Israël. La grande dette consiste en ce qu’à la plénitude de bénédictions et de privilèges que Dieu lui a offerts pendant des siècles, le peuple d’Israël n’a répondu que par la désobéissance et la rébellion, et finalement par la crucifixion de Son Fils. Dieu était prêt à « faire les comptes », c’est-à-dire à exercer le jugement sur le peuple, et déjà la cognée [hache] était mise à la racine des arbres (Matthieu 3:10). Mais le Seigneur Jésus a prié à la croix : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font ! » (Luc 23:34). Pierre aussi, en Actes 3:17, leur concède l’ignorance, et ajoute : « Repentez-vous donc et vous convertissez, pour que vos péchés soient effacés : en sorte que viennent des temps de rafraîchissement de devant la face du Seigneur » (Actes 3:20).
Ainsi ils avaient entendu la voix du pardon sans y prêter l’oreille et sans y ajouter foi. Bien plus ils « étranglaient » celui « qui était esclave avec eux » et qui leur devait beaucoup moins. Cela nous montre l’attitude hostile des Juifs vis-à-vis des nations, que l’apôtre Paul décrit de la manière suivante : « …Qui ont mis à mort et le Seigneur Jésus et les prophètes, et qui nous ont chassés par la persécution, et qui ne plaisent pas à Dieu, et qui sont opposés à tous les hommes, nous empêchant de parler aux nations afin qu’elles soient sauvées, pour combler toujours la mesure de leurs péchés ; mais la colère est venue sur eux au dernier terme » (1 Thessaloniciens 2:15,16 ; voir aussi Actes 13:45 ; 14:2 ; 17:5 ; 21:27). À cause de cette attitude, Dieu les a livrés aux « bourreaux », les nations où ils se trouvent jusqu’à ce jour ; et la dette qu’Il leur avait remise dans Ses voies à leur égard, Il l’a à nouveau exigée d’eux, jusqu’au temps dont parle Ésaïe: « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu. Parlez au cœur de Jérusalem, et criez-lui que son temps de détresse est accompli, que son iniquité est acquittée ; qu’elle a reçu de la main de l’Éternel le double pour tous ses péchés » (Ésaïe 40:1,2).
L’Israël incrédule ne sortira jamais de la prison, à l’inverse du Résidu croyant représenté par « Jérusalem » — et cela uniquement par la grâce de Dieu et sur la base du sacrifice de Christ.
Il est évident qu’on peut aussi appliquer cette parabole à quiconque entend aujourd’hui l’évangile, mais qui n’y obéit pas. Si quelqu’un a cet esprit de ne pas pardonner, selon ce que manifeste cet « esclave » [le « serviteur impitoyable »] — un esprit totalement opposé à celui du christianisme —, il n’y a alors rien qui indique qu’il soit un vrai chrétien. Mais pour nous aussi, les enfants de Dieu, cette parabole contient un enseignement profond, et un avertissement sérieux, comme le déclare le Seigneur Jésus dans le verset final : Les voies gouvernementales de Dieu envers Ses enfants sont déterminées d’après la mesure dans laquelle nous manifestons un esprit de pardon.
Tel est donc l’enseignement du Seigneur dans cette parabole. Rien de ce qu’Il dit ne laisse entendre qu’aucune de Ses brebis pour lesquelles Lui, le bon berger, allait donner Sa vie, pourrait en définitive quand même périr ; pas un seul mot ne nous dit qu’on peut acquérir le pardon du péché en vue de l’éternité, et quand même le perdre sous certaines conditions. Dieu, qui a jeté nos péchés derrière Son dos, qui ne s’en souvient plus, pourrait-Il un jour nous les remettre à charge, peut-être juste avant de passer dans l’éternité ? Pourrait-Il méconnaître l’œuvre de Son Fils au point de laisser périr ceux qui s’appuient sur elle par la foi, à cause de leur infidélité sur tel ou tel point ?
C’est une doctrine misérable et déplorable, œuvre de Satan, qui résulte de ce qu’on n’a pas « découpé droit » la Parole de vérité (2 Timothée 2:15). Mais Dieu soit loué : Notre rédemption repose sur notre Rédempteur, et non pas sur le racheté ou sur quoi que ce soit en nous ! Elle a son origine dans le cœur même de Dieu. Et de plus, quand on ne jouit pas du pardon des péchés comme d’un fait accompli, il ne peut pas y avoir de paix ferme (Romains 5:1), l’Esprit ne peut pas conduire dans toute la vérité (Jean 16:13), et on ne peut pas être un adorateur en esprit et en vérité (Jean 4:23). C’est pour cela que Satan s’intéresse autant à détruire la vérité. Ne lui prêtons pas l’oreille, mais faisons confiance à Celui qui est la vérité !
Mais n’oublions pas non plus l’enseignement de cette parabole, et gardons-nous d’un esprit implacable ! Dieu, dans Ses voies à notre égard, ferait retomber sur nous les conséquences d’un tel état d’esprit, qui Lui est étranger. « Mais soyez bons les uns envers les autres, compatissants, vous pardonnant les uns aux autres comme Dieu aussi, en Christ, vous a pardonné » (Éphésiens 4:32).
Er lehrte sie vieles in Gleichnissen, Vol. 1 p. 323-336
La parabole des « ouvriers dans la vigne » de Matthieu 20, recrutés à différentes heures du jour et recevant en fin de compte chacun un denier, est en relation directe avec ce qui est dépeint au ch. 19. Le jeune homme riche s’en alla tout triste d’auprès du Seigneur. Il n’était pas prêt à renoncer à ses richesses pour suivre le Seigneur. Le chemin à la suite de Christ était trop étroit pour lui. Combien y en a-t-il de ce genre aujourd’hui ?
Les disciples, imprégnés de notions juives, considéraient les richesses comme une preuve certaine de la faveur de Dieu (voir Deutéronome 28:1 et suiv.). Au moins permettent-elles de faire beaucoup de bien. Mais si absolument personne n’est réellement « bon », si les richesses sont sans valeur pour acquérir la vie éternelle,et constituent plutôt pour cela un obstacle sérieux, « qui », voilà la question des disciples, « qui donc peut être sauvé » ? La réponse du Seigneur est très nette, presque accablante : Personne ! Il serait plus facile qu’un chameau passe par un trou d’aiguille, qu’un riche qui se confie dans ses richesses n’entre dans le royaume de Dieu. Mais Dieu soit loué : Pour Lui, toutes choses sont possibles ! Dans Sa grâce, Il ne tient pas compte de ce qu’est l’homme, s’il fait partie de la classe la plus noble ou la plus mauvaise. Le salut vient de Dieu et ne se trouve qu’auprès du Sauveur. Ainsi Dieu, dans Sa grâce infinie, appelle des hommes de toutes les couches de la société, à la fois de la maison de l’empereur et des publicains et des pécheurs.
Le jeune homme riche avait préféré ses richesses au Seigneur Jésus, et Pierre l’avait vu repartir visiblement triste. Il se permet donc de L’interroger : « Voici, nous avons tout quitté et nous t’avons suivi ; que nous adviendra-t-il donc » ? (Matthieu 19:27). La réponse du Seigneur est un encouragements des plus précieux pour tous ceux qui Le suivraient un jour : Il récompensera toute fidélité montrée envers Lui — dans un sens, déjà dans cette vie, mais à titre principal dans Son royaume à venir, dans la gloire. N’est-il pas réjouissant, même si c’est une pensée sérieuse, que notre vie et notre témoignage ici-bas aient une influence directe sur notre position future dans Son royaume ?
Dans la « régénération », c’est-à-dire dans le royaume messianique du Seigneur sur cette terre, les douze apôtres auront une position particulière, réservée à eux seuls. Quand le Fils de l’Homme sera assis sur Son trône de gloire, ils seront eux aussi assis sur douze trônes, jugeant les douze tribus d’Israël. Mais le Seigneur montre alors un principe plus vaste en rapport avec la récompense. Il concerne tous ceux qui, pour l’amour de Son nom, font passer au second plan les relations de famille et les biens terrestres : Ils recevront cent fois autant, et hériteront de la vie éternelle. En Marc 10 il est même dit que, déjà en ce temps-ci, ils recevront maisons et frères, et sœurs, et mères, et enfants, et champs, avec des persécutions, et dans le siècle qui vient, la vie éternelle (v. 29, 30). Combien de serviteurs du Seigneur ont déjà fait l’expérience de la première partie de cette promesse, dans leur service pour Lui ! Ils ont trouvé ici-bas en Christ bien plus d’amis que tous ceux qu’ils avaient perdus pour l’amour de Lui. Mais il est certain que la deuxième partie de la promesse s’accomplira elle aussi.
Lorsque Dieu place devant nos cœurs une vérité particulière dans Sa Parole, Il met presque toujours en face de cette première vérité, une autre vérité constituant la contrepartie de la première. Bien sûr, cette contrepartie ne contredit pas la première vérité, mais bien plutôt la complète. Pourquoi Dieu fait-Il ainsi ? Parce que nous, les hommes, sommes très portés à être unilatéraux, et que dans les choses divines, il y a plus d’un côté. Plus précisément, si nous nous fixons exclusivement sur un côté déterminé de la vérité, mais que nous oublions qu’il y a encore un autre côté à considérer, nous pouvons facilement nous engager dans une direction totalement fausse, et causer du tort à l’homme intérieur.
C’est pour cela que le dernier verset du ch. 19 contient déjà un avertissement : « Mais plusieurs [ou : beaucoup] qui sont les premiers seront les derniers, et des derniers seront les premiers ». Cela est vrai, et demeure absolument vrai, qu’un jour le Seigneur Jésus récompensera de manière merveilleuse tout ce qui Lui a été montré comme fidélité. Mais nous pourrions trop facilement oublier que tout n’est que grâce illimitée, et que nous ne pouvons absolument rien revendiquer. Pierre attribuait peut-être beaucoup d’importance à son bateau et à ses filets, et nous sommes tous en danger de faire la même chose en principe. Or les disciples avaient réellement tout laissé et L’avaient suivi Lui. C’est cela qui compte. Ce n’est pas pour une rétribution qu’ils avaient tout laissé, mais par amour pour Lui. Et rien de ce qui est fait par un amour vrai pour Lui n’est petit aux yeux du Seigneur. Il le récompensera selon une mesure appropriée.
Mais pour que nous ne prenions pas une mauvaise orientation, et que nous ne donnions pas trop d’importance à notre travail pour Lui, le Seigneur Jésus ajoute la parabole des « ouvriers dans la vigne ». C’est une explication ou un exposé du dernier verset du ch. 19 : « Mais plusieurs [ou : beaucoup] qui sont les premiers seront les derniers, et des derniers seront les premiers ». Dieu est souverain également dans Sa grâce, et Il fait exactement ce qu’il Lui plait. Il ne se laisse devenir le débiteur d’aucun de nous. Et si quelqu’un, imbu de propre justice et d’autosatisfaction pense être parmi « les premiers », le jugement divin peut bien le renvoyer un jour à la place des « derniers ». C’est ce que le Seigneur développe dans la parabole qui suit, et Il montre que la récompense dans Son royaume est en accord avec le principe de la souveraineté de Dieu et celui de la grâce de Dieu.
« Car le royaume des cieux est semblable à un maître de maison qui sortit dès le point du jour afin de louer des ouvriers pour sa vigne. Et étant tombé d’accord avec les ouvriers pour un denier par jour, il les envoya dans sa vigne » (Matthieu 20:1, 2).
Rappelons-nous encore une fois qu’il ne s’agit pas ici de l’assemblée, mais du royaume des cieux — ce domaine terrestre où l’on professe reconnaître l’autorité du Seigneur.
Le mot préliminaire « car » confirme ce qui a déjà été dit : Le dernier verset du ch. 19 fait déjà partie de la parabole, et il en constitue l’introduction ; et ce sont à peu près les mêmes paroles qui la terminent (20:16).
Un maître de maison, image de Dieu, sort au point du jour pour louer des ouvriers pour sa vigne. N’est-ce pas déjà une expression de grâce ? Certes, ici il ne s’agit pas de la grâce qui amène les pécheurs au salut (il n’est pas du tout question de cela dans notre parabole), mais c’est la grâce qui appelle des hommes à venir travailler dans Sa « vigne ». Avons-nous déjà bien pris conscience de cette grâce ? Il ne va pas du tout de soi que des personnes telles que nous sommes puissent Le servir, et qu’Il veuille nous utiliser pour faire avancer les choses de Sa « vigne » selon Sa pensée. Paul glorifiait la miséricorde du Seigneur qui s’était manifestée en établissant « dans le service celui qui auparavant était un blasphémateur, et un persécuteur, et un outrageux » (1 Timothée 1:12, 13). Ne devrons-nous pas tous pareillement glorifier la grâce de Dieu ?
Encore une brève indication sur le contrat passé pour un denier par jour. On a déjà dit et écrit bien des choses sur ce denier, et aussi de l’accord passé entre le maître de maison et les ouvriers. Du fait que finalement ils ont tous obtenu un denier, beaucoup y ont vu et y voient encore une image de la rédemption, et de la vie éternelle que tous les croyants partagent dans la même mesure. Mais cela ne peut pas être le sens, car cela voudrait quand même dire qu’on peut gagner la vie éternelle par son travail, la mériter. Or cela ne serait plus la grâce, car l’Écriture dit expressément : « Or à celui qui fait des œuvres, le salaire n’est pas compté à titre de grâce, mais à titre de chose due ; mais à celui qui ne fait pas des œuvres, mais qui croit en celui qui justifie l’impie, sa foi lui est comptée à justice » (Romains 4:4, 5). La grâce du côté de Dieu, la foi du côté de l’homme, voilà les moyens par lesquels les hommes trouvent le salut. « Car vous êtes sauvés par la grâce, par la foi, et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » (Éphésiens 2:8, 9).
Il ne faut absolument pas chercher à mettre une signification spirituelle sur chaque détail de la parabole. Nous l’avons déjà dit au tout début de notre étude sur les paraboles. Dans une parabole, le Seigneur suit une ligne principale d’enseignement, qu’on risque justement de manquer en essayant de « spiritualiser » chaque détail, et on risque même, à la place, d’arriver à des conclusions totalement fausses. L’exemple du « denier » en est un exemple tout à fait clair. On cherche une signification spirituelle pour le « denier », et en pensant l’avoir trouvée, on tire des conclusions que l’Écriture contredit totalement. Nous pouvons en toute sécurité partir du fait que le « denier » n’a aucune signification particulière. Il représente tout simplement ce qu’on reçoit. Il en va de même pour bien d’autres détails accessoires de cette parabole : Il n’y a pas lieu de leur donner une valeur spirituelle. Ce sont bien plutôt des composants de l’image utilisée ; et si des hommes agissent de telle ou telle manière, cela ne veut pas davantage dire qu’on peut y faire correspondre directement telle action de Dieu.
« Et sortant vers la troisième heure, il en vit d’autres qui étaient sur la place du marché à ne rien faire ; et il dit à ceux-ci : Allez, vous aussi, dans la vigne, et je vous donnerai ce qui sera juste ; et ils s’en allèrent. Sortant encore vers la sixième heure et vers la neuvième heure, il fit de même. Et sortant vers la onzième heure, il en trouva d’autres qui étaient là ; et il leur dit : Pourquoi vous tenez-vous ici tout le jour sans rien faire ? Ils lui disent : Parce que personne ne nous a engagés. Il leur dit : Allez, vous aussi, dans la vigne (*) » (Matthieu 20:3-7).
(*) note Bibliquest : la traduction JND ajoute ici : « et vous recevrez ce qui sera juste ». Cette phrase manque dans les meilleurs manuscrits selon l’auteur (voir ci-dessous).
Il n’y a en tout cas pas de conclusion spirituelle à tirer du fait que le maître de maison a vu sur la place du marché d’autres ouvriers en train de ne rien faire. Nous montrer que ces gens passaient leur temps à ne rien faire avant d’être appelés, n’est pas du tout dans la ligne d’enseignement que le Seigneur veut nous donner. Nous devons par contre manifestement apprendre la chose suivante : Dieu, dans Sa grâce souveraine, appelle des ouvriers dans Sa vigne tout le long de la « journée », même encore à la « onzième heure ». N’est-ce pas une grâce insondable ? Il y en a qu’Il juge dignes de porter tout le faix et la chaleur du jour, et d’autres qui peuvent encore accomplir un travail relativement petit pour Lui, peu avant la fin du temps de la grâce ou la fin de leur vie. Dieu ne se laisse pas priver du privilège d’agir justement de cette manière. Il est superflu de dire que les uns comme les autres ont autant besoin de Son appui. L’œuvre de Dieu doit être faite en tout temps, et un service tardif vaut mieux que pas de service du tout.
Le Seigneur nous montre en tout cinq groupes d’ouvriers :
Le premier groupe sort dans la vigne au point du jour, après avoir convenu avec le maître de maison d’une rémunération d’un denier pour la journée.
Le deuxième groupe sort dans la vigne à la troisième heure. Ces ouvriers s’en remettent entièrement, pour le salaire, à la promesse du maître de maison : « Je vous donnerai ce qui sera juste ».
Le troisième groupe sort dans la vigne à la sixième heure, et le quatrième groupe à la neuvième heure. Comme ceux du deuxième groupe, ces ouvriers se confient aussi entièrement à la justice et à la bonté du maître de maison.
C’est à la onzième heure que le cinquième groupe sort dans la vigne. Ces ouvriers n’ont aucune promesse de la part du maître de maison ; car le complément « je vous donnerai ce qui sera juste » du verset 8 manque dans les meilleurs manuscrits. Ils vont donc dans la vigne sans la moindre assurance d’avoir un salaire.
Si nous comparons ces cinq groupes entre eux, on est frappé de la progression croissante (ou décroissante, selon le point de vue où l’on se place) : On commence par un accord solide sur le salaire, puis de là, on passe à une promesse libre. Dans le troisième et le quatrième groupe, cette promesse n’est même plus mentionnée expressément (on trouve simplement que le maître de maison « fit de même »). Et finalement, pour le dernier groupe, il n’y a même plus aucune promesse de récompense. Les premiers ouvriers s’appuient sur le contrat passé avec le maître de maison. Les suivants, par contre, manifestent leur confiance envers le maître de maison, et plus précisément leur confiance en Sa justice (« ce qui sera juste »). Les derniers ouvriers font preuve d’une confiance encore plus profonde : Sans avoir la moindre promesse de rien, ils s’appuient uniquement sur la bonté de celui qui les a appelés.
En considérant cette image, il ne faut pas imaginer que Dieu s’entendrait à l’avance sur la récompense à attendre par certains de Ses serviteurs. Ce serait en tout cas entièrement contraire à l’Écriture, une erreur absolue. Dieu ne met pas des ouvriers à Son service en vue d’une récompense. Mais il y a une leçon profonde pour nous dans l’abandon progressif de la prétention à des droits, et dans la confiance croissante dans le Seigneur. Dieu ne veut pas que nous travaillions d’une manière légale en vue d’un salaire. « Vous servez le Seigneur Christ » (Colossiens 3:24). — C’est Lui qui est l’objet de l’amour et du service des Siens. La récompense est simplement un encouragement pour celui qui est déjà en train de servir. Elle n’est pas le réel motif pour le service. Plus nous apprenons cela, plus nous serons en harmonie avec Ses pensées.
Ainsi le premier groupe d’ouvriers nous révèle deux principes importants. D’un côté Dieu agit dans tous les cas de manière juste, et Il tient parole. De l’autre côté, un esprit légal aboutit à ce qu’un jour, on se retrouve parmi les derniers. Nous allons voir cela tout de suite.
« Et le soir étant venu, le maître de la vigne dit à son intendant : Appelle les ouvriers, et paye-leur leur salaire, en commençant depuis les derniers jusqu’aux premiers. Et lorsque ceux qui avaient été engagés vers la onzième heure furent venus, ils reçurent chacun un denier ; et quand les premiers furent venus, ils croyaient recevoir davantage, mais ils reçurent, eux aussi, chacun un denier. Et l’ayant reçu, ils murmuraient contre le maître de maison, disant : Ces derniers n’ont travaillé qu’une heure, et tu les as faits égaux à nous qui avons porté le faix du jour et la chaleur. Et lui, répondant, dit à l’un d’entre eux : Mon ami, je ne te fais pas tort : n’es-tu pas tombé d’accord avec moi pour un denier ? Prends ce qui est à toi et va-t’en. Mais je veux donner à ce dernier autant qu’à toi. Ne m’est-il pas permis de faire ce que je veux de ce qui est mien ? » (Matthieu 20:8-15).
« Et le soir étant venu » — quelles paroles consolantes ! Le moment arrivera où tout le travail et la peine sur la terre seront finis pour toujours. Comme l’esclave en Luc 17:7, nous allons « revenir des champs », et le travail journalier aura pris fin. Alors le jour éternel du repos sabbatique de Dieu commencera pour nous. Ce repos sabbatique « reste » pour nous, comme conservé, c’est Sa parole qui en donne l’assurance (Hébreux 4:9). Et Dieu ne sera pas injuste pour oublier l’œuvre et l’amour des Siens qu’ils ont prouvés pour Son nom au service des saints (Hébreux 6:10).
Ce qui a été dans notre vie et notre service pour Christ sur la terre, ainsi que ce qui ne l’a pas été, tout sera manifesté devant le tribunal du Christ (2 Corinthiens 5:10). C’est le principe qu’on trouve dans la dernière partie de notre parabole.
Les derniers y jouent un rôle plus important. C’est par eux que le maître de la vigne commence le paiement des salaires. Ils reçoivent tous un denier, le plein salaire pour une journée de travail. La même chose arrive à ceux qui ont été appelés au cours de la journée. Même si ce n’est pas directement exprimé, c’est ce qui est sous-entendu dans la parabole. Quand les premiers arrivent, ils s’attendent à recevoir plus, mais ils reçoivent chacun également un seul denier.
On en a tiré la conclusion qu’un jour il y aura une récompense uniforme pour tous. Mais cette idée n’est pas du tout soutenue par l’Écriture sainte. « Aie autorité sur dix villes » - « Et toi, sois établi sur cinq villes », dit le Seigneur ailleurs (Luc 19:11 et suiv.).
En réalité, notre parabole ne parle même pas de ce que tous recevraient la même récompense. Elle montre plutôt que tous reçoivent une récompense. C’est ce dont il s’agit. Il y a une grande différence entre un denier pour un jour, et un denier pour une heure.
Ensuite nous entendons parler des murmures. Seuls les ouvriers du premier groupe murmurent. En effet, ceux des autres groupes n’ont aucune raison de le faire : Ils ont tous été « surpayés ». Mais les premiers n’ont pas non plus raison de se plaindre. Ils ont été traités en parfaite justice. Ils ont reçu exactement ce qui avait été convenu. Qu’avaient-ils à se mêler de l’appréciation du service des autres ? C’était uniquement l’affaire du maître de maison, et ce n’était pas seulement une question de Sa justice, mais aussi de Sa bonté.
Si chaque récompense n’est qu’une grâce (ce qui est incontestable), la mesure ne peut en être calculée que d’après la grâce souveraine de Dieu. S’il Lui plait de faire les derniers égaux aux premiers, qui peut mettre en cause ce qu’Il fait ? Qui pourrait Lui interdire d’être bon ? N’a-t-Il pas le droit de faire ce qu’il Lui plait avec ce qui Lui appartient ? Jamais il n’y aura d’injustice dans Ses actes. « Le juge de toute la terre ne fera-t-il pas ce qui est juste » (Genèse 18:25) ? Mais personne ne Lui ôtera le privilège d’agir aussi selon la bonté de Son cœur.
« Ton œil est-il méchant, parce que moi, je suis bon ? Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers les derniers » (Matthieu 20:15, 16).
Évidemment, au jour de gloire, il ne pourra pas y avoir de murmures, et il n’y en aura pas. Gardons à l’esprit que les paraboles présentent d’une manière générale la vérité du royaume sur le terrain large de la profession. Sur ce terrain, il y en a qui n’ont pas de cœur pour le Maître, et qui ne font pas confiance à Sa grâce. Ils ne connaissent pas la vraie source du service, et ne travaillent que pour un salaire. Ils se révèlent être tels que ceux que le Seigneur appelle en Jean 10 des « hommes à gages ». Cet esprit peut également s’emparer des croyants, sans qu’ils puissent jamais être effectivement des « hommes à gages ». Néanmoins c’est une question qui nous sonde tous : « Ton œil est-il méchant, parce que moi, je suis bon » ? Un œil méchant peut révéler un cœur méchant.
Beaucoup de ceux qui pensent être pour eux-mêmes les premiers, seront un jour considérés comme des derniers ; et beaucoup qui ne se sont joints qu’assez tard au service, vont recevoir une première place. Le brigand mourant n’est sûrement venu qu’à la « onzième heure », mais cette seule heure de témoignage pour Christ est tombée justement au moment où tous les autres disciples L’avaient abandonné (Luc 23:39-43). Oserait-on regarder d’« un œil méchant » que le Seigneur l’ait pris, le jour même au paradis ? Par rapport aux douze apôtres, l’apôtre Paul a été un « dernier ». Il a été appelé relativement tard, au point de dire : « Après tous, comme d’un avorton, il a été vu aussi de moi » (1 Corinthiens 15:8). Mais combien le Seigneur a utilisé ce vase choisi pour porter Son nom autant auprès des nations qu’auprès des rois et des fils d’Israël ! C’est le seul des tous les apôtres qui ait vu le Seigneur Jésus dans Sa gloire céleste, et c’est ce qui a été le motif de son service incomparable pour son Seigneur. Cette homme pouvait dire : « Car l’amour du Christ nous étreint, en ce que nous avons jugé ceci, que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu’il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité » (2 Corinthiens 5:14, 15).
On aura remarqué que les paroles « ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers les derniers » sont dans l’ordre inverse de celles du début de la parabole. Là il était écrit : « Mais plusieurs qui sont les premiers seront les derniers, et des derniers seront les premiers » (Matthieu 19:30). La raison de cette inversion semble résider dans ce que les paroles du début parlent de l’échec de l’homme, et il n’y a donc rien d’étonnant à ce que des premiers deviennent des derniers. Mais les paroles à la fin de la parabole dévoilent l’infini de la grâce de Dieu, qui peut faire que des derniers deviennent des premiers. Quelle paix profonde de s’appuyer sans réserve sur cette grâce !
« Car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus » (Matthieu 20:16).
Ce que le Seigneur dit en conclusion (20:16) ressemblent tout à fait à ce par quoi se termine la parabole du « roi qui fit des noces pour son fils » (22:14). Contrairement à cette dernière parabole, la phrase de 20:16 ne concerne pas l’élection en vue du salut, mais l’appel au service, et la récompense.
Le Seigneur circonscrit par là le caractère du service, selon qu’il a Son approbation ou non. Beaucoup sont appelés à servir, mais peu sont des vases élus comme Paul l’était. Aux jours de David, il y en avait beaucoup qui suivaient le roi, mais seuls quelques hommes bien précis ont été des héros élus, du fait de leur courage, de leur force et de leur vaillance, et parce qu’ils tenaient ferme à David (1 Chroniques 11:10 selon une traduction allemande). Aujourd’hui encore beaucoup prétendent être des serviteurs de Dieu. Ils attachent beaucoup d’importance à leur travail pour le royaume de Dieu. Mais en vérité ils ne connaissent pas le Seigneur Jésus, et leur service est sans valeur pour Lui. C’est pourquoi Il n’accepte pas leur service. Il n’y trouve aucun plaisir. Ce ne sont donc pas des serviteurs élus. Ils étaient nombreux à tomber sous ce jugement au temps du Seigneur. Peut-être que même parmi Son auditoire, il y en avait de tels.
Combien c’était entièrement différent pour Paul. Il pouvait dire de lui-même, et de ses compagnons : « C’est pourquoi aussi, nous nous appliquons avec ardeur à lui être agréables » (2 Corinthiens 5:9) ; Il était toujours attentif à ce que, après avoir prêché à d’autres, il ne soit lui-même réprouvé (1 Corinthiens 9:27). Ce n’est pas qu’il doutait de son salut ; mais il s’appliquait d’abord à lui-même cette mesure qui concerne tous les serviteurs.
Enfin encore quelque chose de remarquable en ce qui concerne la position de cette parabole dans l’évangile de Matthieu. Comme nous venons de le voir, le Seigneur traite dans cette parabole la question du service et de la souveraineté de Dieu dans la récompense du service. Mais cette parabole forme en même temps la conclusion des paroles du Seigneur Jésus, avant qu’Il entreprenne Son dernier voyage vers Jérusalem. Pour autant que notre évangéliste le rapporte, c’est par ces paroles que le grand Serviteur achève une étape importante de Sa vie et de Son service, et qu’Il se dispose dès lors à monter à Jérusalem — là où Il ne rencontrera non seulement qu’opprobre et mépris, mais aussi la mort de la croix. Combien notre Sauveur est adorable ! Ne mérite-t-Il pas tout notre dévouement ?
Er lehrte sie vieles in Gleichnissen, Vol. 1 p. 337-341
À la suite de la parabole des ouvriers dans la vigne (Matthieu 20:1-16), nous avons vu le Seigneur Jésus se mettre en chemin vers Jérusalem (Matthieu 20:17). Au chapitre 21 nous Le voyons dans Jérusalem, en train de commencer par purifier le temple de Dieu. Les souverains sacrificateurs et les anciens Lui demandent par quelle autorité Il fait ces choses. En retour Il leur pose une question qui touche leurs consciences, et met à nu leur méchanceté et leur aveuglement.
À cet endroit de l’évangile de Matthieu commencent ce que nous pouvons appeler Ses derniers discours publics, ou Ses discours du temple. Par contre, c’est ailleurs qu’il faut chercher Ses dernières paroles par lesquelles Il console les Siens, et les prépare à Son départ (voir Jean 14-16). Mais l’évangéliste Matthieu rapporte une multitude de détails qui ont rempli les derniers jours de Son ministère public.
Le Seigneur donne une nouvelle fois au peuple d’Israël l’occasion d’écouter Sa voix pleine de grâce. Bientôt elle allait se taire, pour ne se faire réentendre que plus tard, mais alors en jugement. Pour l’instant, Il révèle à l’aide d’un langage symbolique, l’état moral dans lequel se trouvaient les conducteurs spirituels, et dans lequel leur aveuglement avait aussi plus au moins entraîné la nation. Pour l’illustrer Il se sert de trois paraboles, qui sont dans l’ordre : la parabole des « deux fils », celle des « méchants cultivateurs » et la parabole du « roi qui fit des noces pour son fils ». Dans la première parabole, Il leur montre leur comportement vis-à-vis de Dieu. Les deux paraboles suivantes présentent comment Dieu agit à leur égard, et ceci sous deux aspects. Dans la parabole des « méchants cultivateurs », c’est le point de vue de la responsabilité de l’homme sous la loi qui domine, et dans celle du « roi qui fit des noces pour son fils », c’est plutôt la grâce de Dieu au temps du royaume des cieux qui est mise en avant.
Mais entrons un peu plus dans les détails qui ont amené à la première parabole ! Les souverains sacrificateurs et les anciens Lui avaient demandé par quelle autorité Il agissait. Quelle question arrogante ! N’avait-Il pas fait sous leurs yeux des signes et des miracles puissants qui prouvaient clairement leur origine céleste ? Mais allaient-ils répondre à la question qu’Il leur renvoie : « Le baptême de Jean, d’où était-il ? du ciel, ou des hommes ? » Jean avait été une lampe ardente et brillante, et ils avaient voulu se réjouir pour un temps à sa lumière (Jean 5:35). Dans leur orgueil national, ils s’étaient glorifiés de ce qu’un prophète avait été suscité au milieu d’eux. Leurs pères avaient fait pareil. Mais leur propre justice les avait empêchés de recevoir son témoignage au sujet du Messie. Une fois Jean mis à mort, ils avaient eux-mêmes rejeté son Maître. La question du Seigneur les mettait donc dans l’embarras. Mais au lieu de confesser leur péché, ils refusent de répondre. Le Seigneur s’adresse alors encore une fois à leurs consciences, et leur révèle leur vrai état moral à travers la parabole des deux fils.
« Mais que vous en semble ? Un homme avait deux enfants ; et venant au premier, il dit : Mon enfant, va aujourd’hui travailler dans ma vigne. Et lui, répondant, dit : Je ne veux pas ; mais après, ayant du remords, il y alla. Et venant au second, il dit la même chose ; et lui, répondant, dit : Moi j’y vais, seigneur ; et il n’y alla pas. Lequel des deux fit la volonté du père ? Ils lui disent : Le premier. Jésus leur dit : En vérité, je vous dis que les publicains et les prostituées vous devancent dans le royaume de Dieu. Car Jean est venu à vous dans la voie de la justice, et vous ne l’avez pas cru ; mais les publicains et les prostituées l’ont cru ; et vous, l’ayant vu, vous n’en avez pas eu de remords ensuite pour le croire » (Matthieu 21:28-32).
Cette parabole est un autre exemple de ce qu’il y a deux manières d’entendre. Nous l’avons déjà vu dans des paraboles précédentes. Les deux fils entendent le commandement du Père. L’un refuse d’obéir, mais le regrette plus tard, et fait finalement la volonté de son père. L’autre promet d’obéir, mais ne tient pas sa promesse. Il est autant désobéissant que s’il avait refusé d’obéir dès le début. Mais par sa promesse de faire la volonté du père, il trompe les autres : ils le prennent pour un fils obéissant. Le père peut-il être content d’une attitude si entièrement opposée à la promesse faite, et qui, finalement, n’est rien d’autre que de l’hypocrisie ?
Si nous regardons le contexte, l’explication de la parabole n’est pas difficile. En fait, le Seigneur la donne lui-même. Dans l’image du fils qui regrette sa désobéissance initiale, et qui finit par aller, Il parle des « publicains et des prostituées ». Ce sont de tels pécheurs notoires que la prédication du précurseur du Seigneur avait amenés à la conviction de leurs péchés, et elle les avait introduits dans le royaume de Dieu.
Mais les conducteurs du peuple ressemblaient au deuxième fils, l’honorant de leurs bouches, mais n’y allant pas. Comme le peuple d’Israël disait autrefois à Moïse : « Tout ce que l’Éternel a dit, nous le ferons », — eux aussi prétendaient obéir à Dieu. Ils se donnaient une apparence de piété, mais au fond de leurs cœurs, ils ne s’intéressaient pas à la volonté du « père », qu’ils n’ont d’ailleurs jamais faite.
C’est une leçon sérieuse que nous avons à apprendre ici. Non seulement la propre justice rend les hommes hypocrites, mais en outre elle les aveugle sur le besoin de se repentir. C’est ce qui est tragique, c’est le piège insidieux auquel se font prendre, non pas tellement les « publicains et les prostituées », mais surtout les hommes « religieux ». Ils n’ont jamais manqué ni ne manquent jamais de bonnes résolutions. Beaucoup ont déjà dit : « J’y vais, Seigneur », mais ils n’ont jamais mis un pied sur le chemin de l’obéissance qui commence par la repentance envers Dieu. Et c’est ainsi que les « publicains et les prostituées » en arrivent à précéder les hommes religieux dans le royaume de Dieu.
Ce que le Seigneur dit des conducteurs spirituels en Israël en particulier, et des hommes religieux en général, nous parle aussi à nous, enfants de Dieu. Mettons-nous bien dans la tête que Dieu voudrait que nos paroles et nos actes soient en accord les uns avec les autres, de même que ce que nous promettons avec ce que nous faisons effectivement. C’est là l’enseignement de notre parabole. D’autres paraboles montrent la nécessité qu’il y ait accord à d’autres égards. Dans la parabole du « serviteur impitoyable », nous avons dû apprendre qu’il faut un accord entre le pardon dont nous avons fait l’expérience, et celui que nous devons accorder à notre frère. Qu’il doive y avoir également accord entre ce que nous entendons et ce que nous faisons, c’est ce que nous enseigne la parabole des « deux maisons ». La nécessité de l’accord entre notre racine et notre fruit était le sujet de la parabole du « semeur ». Car c’est seulement dans la mesure où nous « poussons des racines en bas » que nous pouvons « porter du fruit en haut » (voir 2 Rois 19:30).
Notre parabole nous montre donc deux sortes d’hommes. Une rébellion franche contre le père, mais ensuite la repentance, c’est ce qui caractérise les premiers. Une profession fausse, et jamais de regrets, voilà ce qui caractérise l’autre. Dans la peau duquel des deux « fils » te ranges-tu ?
Également appelée « les méchants vignerons ».
Er lehrte sie vieles in Gleichnissen, Vol. 1 p. 343-358
La parabole des « méchants vignerons » que le Seigneur place directement après celle des « deux fils » touche un principe encore plus profond que cette dernière. Le peuple d’Israël ne se trouvait pas seulement dans un état de neutralité malveillante — « dire » et « ne pas faire » —, mais en révolte directe contre Dieu et contre Ses voies de grâce. C’est ce que le Seigneur montre dans cette nouvelle parabole, avec les graves conséquences qui en résulteraient pour eux. Il est remarquable qu’elle soit rapportée dans trois évangiles, ceux de Matthieu (21:33-46), Marc (12:1-12) et Luc (20:9-18).
Cette parabole importante est un exemple de ce que les hommes incrédules, ici les conducteurs du peuple, pouvaient tout à fait comprendre la signification superficielle de l’image, car il est dit : « Les principaux sacrificateurs et les pharisiens, ayant entendu ses paraboles, connurent qu’Il parlait d’eux » (Matthieu 21:45).
Mais ils ne comprirent pas le sens profond de ce qui était exprimé. Autrement ils auraient réalisé le jugement terrible qu’ils étaient en train de faire venir sur eux. Ainsi ils ne se repentirent pas parce qu’ils ne reconnaissaient pas la personne du Fils, dont l’envoi est un des sujets de la parabole. Il fallait de la foi pour cela, et ils n’en avaient pas.
De plus, la parabole fait partie du groupe des paraboles dans lesquelles deux personnes de la Déité, la personne du Père et la personne du Fils, sont liées ensemble. Ce genre de présentation est d’autant plus significatif qu’il exalte la divinité de la personne de Christ. Les deux autres paraboles de ce groupe sont celle du « figuier stérile » (Luc 13:6-9) et celle du « vrai cep » (Jean 15). Ces trois images ont ceci en commun que le Père cherche du fruit. Quant à leurs différences par rapport à la position du Seigneur, nous y reviendrons brièvement plus tard.
La parabole qui nous occupe maintenant est un exemple majeur de ce qu’une parabole dont le sujet est nettement Israël, contient également une signification constituant un exemple pour nous de nos jours. Le Seigneur décrit l’histoire d’Israël depuis les jours des prophètes jusqu’au temps de sa mise de côté en tant que nation. Au moment où le Seigneur Jésus prononçait la parabole, celle-ci renfermait à la fois la prophétie et l’histoire de son accomplissement. Ce qu’Il exprimait visait à la fois le passé, le présent et le futur de ce peuple. Mais ne contient-elle rien pour nous ? Le Seigneur ne veut-Il pas aussi nous donner des leçons à travers la défaillance d’Israël ? Nous verrons que c’est justement le cas.
« Écoutez une autre parabole : Il y avait un maître de maison, qui planta une vigne, et l’environna d’une clôture, et y creusa un pressoir, et y bâtit une tour ; et il la loua à des cultivateurs et s’en alla hors du pays. Et lorsque la saison des fruits approcha, il envoya ses esclaves aux cultivateurs pour recevoir ses fruits. Et les cultivateurs, ayant pris ses esclaves, battirent l’un, tuèrent l’autre, et en lapidèrent un autre. Il envoya encore d’autres esclaves en plus grand nombre que les premiers, et ils leur firent de même » (Matthieu 21:33-36).
Le peuple d’Israël était déjà comparé à une vigne dans les prophètes de l’Ancien Testament et dans les psaumes, — une vigne pour laquelle Dieu se donnait toute la peine pour lui faire produire du fruit. Au Psaume 80:8, il est dit : « Tu as transporté d’Égypte un cep ; tu as chassé les nations, et tu l’as planté ». Dieu parle de la même manière par Jérémie, et montre le triste résultat de Ses efforts pour eux : « Et moi je t’avais plantée, un cep exquis, une toute vraie semence ; comment t’es-tu changée pour moi en sarments dégénérés d’une vigne étrangère » (Jérémie 2:21) ? Le cantique du bien-aimé sur Sa vigne en Ésaïe 5 est particulièrement saisissant : « Mon bien-aimé avait une vigne sur un coteau fertile. Et il la fossoya et en ôta les pierres, et la planta de ceps exquis ; et il bâtit une tour au milieu d’elle, et y tailla aussi un pressoir ; et il s’attendait à ce qu’elle produirait de bons raisins, et elle produisit des raisins sauvages. — Et maintenant, habitants de Jérusalem et hommes de Juda, jugez, je vous prie, entre moi et ma vigne. Qu’y avait-il encore à faire pour ma vigne, que je n’aie pas fait pour elle ? Pourquoi, quand j’espérais qu’elle produirait de bons raisins, a-t-elle produit des raisins sauvages ? » (Ésaïe 5:1-4).
Cette image dont le Seigneur se servait maintenant était bien connue, et Ses auditeurs comprenaient très bien ce dont Il parlait. Dieu avait délivré d’Égypte leurs prédécesseurs et les avait amenés dans un bon pays, et Il en avait chassé les habitants devant eux. Il avait pris toutes les précautions pour eux, Il leur avait accordé toutes les protections nécessaires, et les avait abrité des abominations des nations au moyen d’une loi bonne. Qu’aurait-Il pu faire de plus ? Il avait confié Sa vigne à leurs pères, les hommes de Juda, pour qu’ils la cultivent. Lui-même s’en était allé « hors du pays pour longtemps » (Luc 20:9).
Cette dernière circonstance mérite qu’on s’y arrête. Car il nous montre justement la raison pour laquelle le maître de maison a dû plus tard envoyer ses esclaves auprès des vignerons.
Pourquoi le maître de maison n’habitait-il plus dans Sa propriété, pourquoi ne venait-il plus dans Son jardin pour en savourer le fruit délicieux ? Il n’y a qu’une réponse à cela : c’est parce que le peuple et ses conducteurs avaient abandonné l’Éternel. Dieu avait prévu cette évolution, et avait dit à Moïse : « Ce peuple se lèvera et se prostituera après les dieux étrangers du pays au milieu duquel il va entrer ; et il m’abandonnera, et rompra mon alliance que j’ai faite avec lui » (Deutéronome 31:16).
Mais quand le peuple se leva pour l’abandonner, Lui aussi, dans Sa grâce se leva pour aller les visiter. « Se levant de bonne heure et parlant », Il leur envoya Ses prophètes : « Depuis le jour que vos pères sortirent du pays d’Égypte, jusqu’à ce jour, je vous ai envoyé tous mes serviteurs les prophètes, chaque jour me levant de bonne heure, et les envoyant » (Jérémie 7:13, 25). Dieu cherchait du fruit de Sa vigne, et Ses prophètes étaient Ses messagers qui présentaient Ses droits et Ses revendications aux fils d’Israël. Après tout le bien qu’Il leur avait fait, n’avait-Il pas droit à leurs affections, à leur obéissance, à leur confiance ?
Il y a encore autre chose qui ressort clairement de ce qui vient d’être dit : L’entrée en scène des prophètes de l’Éternel en Israël n’était pas bon signe en soi, même si c’était une grande grâce d’en donner et d’en envoyer. Un prophète est un intermédiaire, et la nécessité que quelqu’un intervienne entre deux parties qui ne peuvent plus se parler face à face, est le signe qu’une distance s’est créée entre eux. Les deux premières occurrences du mot « prophète » dans la bible montrent déjà clairement qu’un prophète est un médiateur. Ce fut Abraham que Dieu appela en premier lieu prophète, et Il dit à Abimélec : « il priera pour toi » (Genèse 20:7). Et quand Moïse s’estimait incapable de parler au Pharaon, Dieu lui accorda qu’Aaron devienne « son prophète » (Exode 7:1). Il n’aurait pas eu besoin d’un tel intermédiaire, s’il avait été lui-même prêt à transmettre le message de Dieu. Lorsque les Israélites eurent peur d’entendre directement la voix de Dieu, ils demandèrent un intermédiaire et dirent à Moïse : « Toi, parle avec nous, et nous écouterons ; mais que Dieu ne parle point avec nous, de peur que nous ne mourions » (Exode 20:19).
La présence de prophètes montrait un état de choses tombé dans le désordre. Israël n’aurait pas eu besoin de prophètes s’ils étaient restés auprès de Dieu. Mais maintenant Dieu se voyait contraint de se retirer. Pourtant dans Sa grâce, Il ne cessa pas d’envoyer à Son peuple « tous ses serviteurs, les prophètes ». C’est une démarche qui, si nous y réfléchissons, ne fera que nous conduire à nous émerveiller de la patience et de la bonté de Dieu.
Mais les conducteurs spirituels du peuple, « les vignerons », qu’ont-ils fait des messagers de Dieu ? Pendant des siècles, Il a toujours recommencé à leur en envoyer — un, puis un autre, puis beaucoup d’autres (Marc 12:2-5). Se sont-ils réjoui de ce que Dieu pensait encore à eux ? Non, au contraire ! Ils battirent les uns, ils lapidèrent les autres et les tuèrent. Alors s’accomplit ce qui était déjà annoncé en 2 Chroniques 36 : « Et l’Éternel, le Dieu de leurs pères, envoya vers eux par ses messagers, se levant de bonne heure et envoyant, car il avait compassion de son peuple et de sa demeure. Mais ils se moquaient des messagers de Dieu, et méprisaient ses paroles, et se raillaient de ses prophètes, jusqu’à ce que la fureur de l’Éternel monta contre son peuple et qu’il n’y eut plus de remède » (2 Chroniques 36:15,16). Des siècles plus tard, Étienne, le premier martyr chrétien, dut reprocher à ses frères juifs : « Lequel des prophètes vos pères n’ont-ils pas persécuté ? Et ils ont tué ceux qui ont prédit la venue du Juste » (Actes 7:52).
C’est de ce grand évènement, la « venue du Juste », que le Sauveur se met maintenant à parler dans Sa parabole. Et notons bien que c’est Lui, le sujet dont Il parle maintenant :
« Et enfin, il envoya auprès d’eux son fils, disant : Ils auront du respect pour mon fils » (Matthieu 21:37).
« Et enfin, il envoya auprès d’eux son fils » — grâce insondable ! Et quelle gloire rayonne ici autour de la personne de Christ ! Il n’est personne d’autre que « Son Fils », le Fils de Dieu : « Ils auront du respect pour mon Fils ». Dans le passage parallèle de Marc 12, Il ajoute encore quelques mots très touchant : « Ayant donc encore un unique fils bien-aimé, il le leur envoya, lui aussi, le dernier » (Marc 12:6). En Luc 20 il est également dit : « son fils bien-aimé » (Luc 20:13). Dieu, le Père, L’a envoyé. Celui qu’Il envoyait, n’était pas seulement l’un des « prophètes », mais « son fils bien-aimé » (voir aussi Matthieu 3:17).
Que ce Fils bien-aimé ne fut personne d’autre que l’Éternel Lui-même, cela ressort aussi clairement de ce qu’Il fit Lui-même ce que Dieu seul peut faire : Il envoya des prophètes. Nous l’entendons dire un peu plus tard dans notre évangile « C’est pourquoi voici, moi, je vous envoie des prophètes, et des sages, et des scribes » (Matthieu 23:34).
Des prophètes divinement inspirés étaient apparus en Israël, et avaient témoigné contre le peuple, et annoncé le jugement. Maintenant c’est le Seigneur Jésus qui fait cela également, comme le montre notre paragraphe. Dans ce sens, Il était Lui aussi un prophète (Actes 7:37). Mais Il était beaucoup plus : Il était le Fils : « Dieu ayant autrefois, à plusieurs reprises et en plusieurs manières, parlé aux pères par les prophètes, à la fin de ces jours-là, nous a parlé dans [le] Fils » (Hébreux 1:1,2).
Le fait que le maître de maison « envoya son fils bien-aimé » nous décrit rien moins que l’incarnation du Fils de Dieu. Le Fils quitta la maison de Son Père pour faire, en tant qu’homme parfait sur cette terre, la volonté de Celui qui L’avait envoyé. Pour cela, Il était nécessaire qu’Il s’anéantisse, et prenne la forme d’esclave.
L’incarnation de Christ est considérée dans l’Écriture sous de nombreux points de vue, et beaucoup de pensées de Dieu s’y rattachent, un nombre immense même. Mais dans notre parabole l’incarnation est vue entièrement en relation avec Son envoi à Israël : Le Fils vient dans Sa « vigne » avec un message de la part de Son Père, en vue de recevoir du fruit de celle-ci. C’est ainsi que le Seigneur se décrit Lui-même dans cette parabole — un détail qui touche notre cœur.
Ce fut sûrement un instant bien particulier pour Lui lorsqu’en tant que Fils envoyé par le Père, Il se tint au milieu des « cultivateurs », et se mit à leur parler. Autrefois Son Père avait envoyé des prophètes, mais maintenant c’est le Fils même qui était venu à eux. Et si c’était l’amour qui L’envoyait, c’était aussi l’amour qui Le faisait venir. Et maintenant Il se trouvait auprès d’eux pour parler à leurs cœurs et à leurs consciences. Ce qu’Il leur disait en détail, ce en quoi consistait le message de Son Père, se trouve d’ailleurs davantage dans l’évangile selon Jean. C’est justement cet évangile qui Le montre comme « l’envoyé » du Père. Cette expression se trouve environ 40 fois dans cet évangile. Mais allaient-ils L’écouter et recevoir le message de Son Père ?
On trouve des doutes mêlés aux paroles du maître de maison : « Que ferai-je ? J’enverrai mon fils bien-aimé ; peut-être que, quand ils verront celui-ci, ils le respecteront » (Luc 20:13) : nous reconnaissons alors une nouvelle fois qu’il s’agit là du langage de la parabole, et non pas de celui de Dieu. Dieu est omniscient, et si Son Fils fut « livré » aux hommes pour être crucifié, cela eut lieu « par le conseil défini et par la préconnaissance de Dieu » (Actes 2:23).
Je mentionne cela simplement pour montrer encore une fois qu’on ne peut pas attribuer un sens figuré à tous les détails d’une parabole. Mais l’expression « ils auront du respect pour mon fils » peut bien nous faire penser à une autre image, celle de Jacob et de son fils Joseph. C’est ce fils bien-aimé que le père envoya à ses frères en disant : « Tes frères ne paissent-ils pas le troupeau à Sichem ? Viens, et je t’enverrai vers eux » (Genèse 37:13).
« Mais les cultivateurs, voyant le fils, dirent entre eux : Celui-ci est l’héritier ; venez, tuons-le, et possédons son héritage. Et l’ayant pris, ils le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent » (Matthieu 21:38,39).
C’est de cette manière que le Seigneur décrit Son rejet par le peuple et ses conducteurs. Le père fit une dernière tentative : « Peut être que, quand ils verront celui-ci, ils le respecteront », mais au lieu de cela, la prophétie d’Ésaïe s’accomplit mot à mot. Quand ils Le virent, il n’y avait point d’apparence en Lui pour Le leur faire désirer. Il fut méprisé et délaissé des hommes, homme de douleurs, et sachant ce que c’est que la langueur, et comme quelqu’un de qui on cache sa face. Et même s’ils reconnurent en lui le véritable héritier de la « vigne », il monta dans leur cœur ce plan diabolique de Le tuer et de s’emparer de Son héritage.
Là aussi il y a un parallèle frappant avec l’histoire de Joseph. Quand ses frères le « virent de loin », ils complotèrent contre lui, avant qu’il fût proche d’eux, pour le faire mourir (Genèse 37:18). Oui, rien que de « voir » le Fils de Dieu, les conducteurs d’Israël en conçurent une haine meurtrière contre l’envoyé de Dieu. On peut bien se poser la question : Que sont ces gens-là pour en vouloir à mort au Fils à peine qu’ils L’ont vu ? La réponse est à la fois simple et bouleversante : L’homme naturel déteste la bonté de Dieu manifestée parfaitement dans le Fils, aussi bien que Sa lumière. « Si je n’étais pas venu, et que je ne leur eusse pas parlé, ils n’auraient pas eu de péché ; mais maintenant ils n’ont pas de prétexte pour leur péché. Celui qui me hait, hait aussi mon Père. Si je n’avais pas fait parmi eux les œuvres qu’aucun autre n’a faites, ils n’auraient pas eu de péché ; mais maintenant ils ont, et vu, et haï et moi et mon Père » (Jean 15:22-24). Ce n’est pas une question d’ignorance. Mais Le voir et Le haïr — que c’est terrible !
Rien ne montre plus la corruption totale de l’homme que le fait que la simple vue du « Fils bien-aimé » ne suscite qu’un sentiment contre Lui — la haine. La réponse de l’homme à toute la bonté dont Dieu fait preuve, c’est la croix de Son Fils. Cela ne nous fait-il pas comprendre pourquoi, depuis la croix de Christ, Dieu a cessé de faire l’épreuve de l’homme, et a cessé de chercher du fruit chez lui ? Ce fruit Lui reste dû, et Il n’abandonne pas Ses droits à cet égard. Si en présence de l’amour parfait et de la bonté parfaite, l’homme en général et le Juif en particulier, n’ont plus que de la haine à rendre au Père et au Fils, pourquoi continuer à l’éprouver pour voir s’il y avait, ou non, du bien à attendre de sa part ? Il s’est montré comme quelqu’un d’entièrement corrompu.
Les « méchants vignerons » ne dirent pas seulement : « Celui-ci est l’héritier ; venez, tuons-le, et possédons son héritage », mais ils exécutèrent leur projet : « Et l’ayant pris, ils le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent ». C’est ainsi que le Seigneur Jésus décrit prophétiquement la mort qui L’attendait. C’est la seule parabole où Il le fait directement. Beaucoup de paraboles parlent de Son retour, mais il n’y a que celle-ci qui parle clairement de Sa mort. Quelle prédiction solennelle des évènements à venir ! Le Messie devait être retranché et ne rien avoir (Daniel 9:26). Lui, qui prononçait les paroles de cette parabole, savait et ressentait parfaitement ce qu’elles impliquaient, ce que cela signifiait d’être jeté dehors et tué ! Et si, parmi les frères de Joseph, il y eut au moins une voix qui s’éleva contre leur projet sanglant, il n’y en a aucune dans notre parabole. On n’a pas eu compassion de Lui !
L’impie Jézabel fit jadis passer l’héritage de Naboth dans le domaine royal en faisant tuer Naboth. Mais cet acte ne lui profita pas : Les chiens mangèrent la chair de Jézabel dans le champ de Jizreël, selon la parole de l’Éternel (1 Rois 21 ; 2 Rois 9). Maintenant ces « vignerons » étaient sur le point de faire la même chose. Or ils tombèrent aussi dans une erreur fatale, de bien des manières. Ils pensaient pouvoir s’approprier l’héritage en mettant l’héritier de côté par la force. Mais ils ne savaient pas qu’on ne devient co-héritier de Christ que par la foi au Seigneur Jésus Christ et en Son œuvre expiatoire. Combien peu ils comprenaient qu’en tuant l’héritier, ils ne pouvaient pas L’empêcher de prendre possession de l’héritage ! Ils pensaient le Lui arracher. Mais la vérité était que justement Sa mort comme sacrifice Lui permettait de prendre possession de Son héritage dans les saints (voir Éphésiens 1:18). Et finalement, ce péché terrible ne leur apportait pas l’héritage, mais le jugement. Le sort de Jézabel allait être le leur.
C’est sur ce point que le Seigneur attire maintenant l’attention. Il place une question devant Ses auditeurs et les force à répondre. Sans le vouloir et sans le savoir, ils prononcent un jugement impitoyable sur eux-mêmes :
« Quand donc le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces cultivateurs-là ? Ils lui disent : Il fera périr misérablement ces méchants, et louera sa vigne à d’autres cultivateurs qui lui remettront les fruits en leur saison » (Matthieu 21:40, 41).
Combien ces hommes avaient raison ! C’est justement ainsi qu’allait agir le maître de la vigne. Dieu ferait périr ces malfaiteurs de manière terrible. Il était impossible de laisser impunis la mort de Son Fils et les sévices infligés à Ses esclaves. Celui qui pense autrement, ne se rend pas compte du caractère intangible des droits de Dieu.
« Jésus leur dit : N’avez-vous jamais lu dans les écritures : «La pierre que ceux qui bâtissaient ont rejetée, celle-là est devenue la maîtresse pierre du coin ; celle-ci est de par le Seigneur, et est merveilleuse devant nos yeux» ? C’est pourquoi je vous dis que le royaume de Dieu vous sera ôté, et sera donné à une nation qui en rapportera les fruits. Et celui qui tombera sur cette pierre sera brisé ; mais celui sur qui elle tombera, elle le broiera » (Matthieu 21:42-44).
Celui qui prononçait ces paroles était Lui-même la « pierre d’Israël » (Genèse 49:24), la « pierre éprouvée, la précieuse pierre de coin, le sûr fondement » (Ésaïe 28:16). Celui qui croit en elle ne sera point confus (1 Pierre 2:6). Mais pour Israël incrédule, Il est devenu une pierre d’achoppement et un rocher de chute, et ils « heurtent contre la parole, étant désobéissants, à quoi aussi ils ont été destinés » (1 Pierre 2:8). Ils n’ont pas été destinés à être désobéissants, mais s’ils sont désobéissants, ils sont destinés à heurter contre elle. Le Seigneur était venu vers eux en grâce et dans l’abaissement ; Il était cette « pierre » du Psaume 118 à laquelle il fait ici allusion. Mais si, malgré toute la grâce et la bonté dont Il avait fait preuve, Il était rejeté de « ceux qui bâtissent », alors eux, les conducteurs responsables et la masse du peuple, tomberaient sur cette pierre et seraient brisés. Nous savons que c’est précisément ce qui est arrivé. En l’an 70 après J-C, Jérusalem et son temple ont été détruits. Le peuple juif est encore aujourd’hui dans cet état de brisement.
Mais ce n’est pas tout. Il y aura aussi un jour de jugement où la « pierre » tombera sur tous les incrédules, et les « broiera », eux et toute puissance qui s’oppose à Lui (voir Daniel 2:35). Ce sera la fin inéluctable de tous ceux qui sont opposés à Dieu. Nous pouvons ainsi dire que la première partie du verset 44 de Matthieu 21 est déjà devenue une réalité. La deuxième partie s’accomplira au moment de l’apparition du Seigneur en puissance et en gloire. Comme le Seigneur a brisé les Juifs qui sont « tombés » sur Lui, ainsi Il broiera toute puissance et toute domination des hommes jusqu’à les réduire en poussière. Qu’il s’agisse de Juifs ou de nations, Il mettra fin à leur puissance, et mettra de côté tous Ses ennemis par le jugement.
Ensuite le Seigneur leur dit encore que le royaume de Dieu leur serait ôté. Il ne dit pas le « royaume des cieux », mais le « royaume de Dieu ». C’est ici la dernière fois que l’expression « royaume de Dieu » apparaît dans l’évangile de Matthieu. Cela est d’autant plus significatif que Matthieu est le seul à utiliser principalement l’expression « royaume des cieux », et presque seulement cette expression. Cela nous donne l’occasion de revenir encore une fois sur la différence entre les deux formes du royaume. Dans un certain sens les Juifs possédaient la révélation de Dieu, et comme ils reconnaissaient l’Éternel comme leur roi, ils étaient dans Son royaume. Par contre, le royaume des cieux est la forme qu’a prise le royaume de Dieu après la mort et la résurrection du Sauveur et Son ascension au ciel, pour user de Son influence sur la terre depuis là-haut. Les Juifs d’alors ne pouvaient pas posséder ce royaume, car il n’existait pas encore. Mais le royaume de Dieu dans le sens précédent était bien leur part. Or comme ils rejetaient maintenant Dieu dans la personne de Son Fils, ce royaume leur serait ôté et donné à une nation qui en porterait les fruits.
En parlant de « cette nation », Il ne pense pas à l’assemblée de Dieu au temps de la grâce, mais à Israël restauré dans le règne millénaire. Sans doute on peut aussi appliquer cette prophétie du Seigneur à nous, les chrétiens d’aujourd’hui. Elle a effectivement reçu un pré-accomplissement ou un accomplissement partiel dans la chrétienté. C’est ce que Pierre montre dans sa première épître. Comme nous le savons, il l’a écrite à des Juifs croyants. Ils étaient devenus de vrais chrétiens par la foi au Seigneur Jésus, et c’est à eux que Pierre écrit : « Mais vous, vous êtes une race élue, une sacrificature royale, une nation sainte, un peuple acquis, pour que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière » (1 Pierre 2:9).
Cependant il sera dit à Israël en un jour futur : « Lève-toi, resplendis, car ta lumière est venue, et la gloire de l’Éternel s’est levée sur toi. … Et ton peuple, eux tous, seront justes ; ils posséderont le pays pour toujours » (Ésaïe 60:1-21). Le Psaume 22 se termine par ces paroles précieuses : « Une semence le servira ; elle sera comptée au Seigneur comme une génération. Ils viendront et raconteront sa justice à un peuple qui naîtra,... qu’il a fait ces choses ». Oui, « cela sera écrit pour la génération à venir ; et le peuple qui sera créé louera Jah » (Psaume 102:18). Quelle grâce merveilleuse celle qui sera la part d’Israël dans la « régénération » !
Mais entre temps il a été clairement prouvé que l’homme, testé sous le judaïsme, ne peut porter aucun fruit pour Dieu, même dans les meilleures conditions. Mais ceci ne suffit pas : il n’a pas seulement maltraité les esclaves de Dieu, mais il a aussi tué Son Fils. Il ne pouvait pas aller plus loin dans l’inimitié contre Dieu, il ne pouvait pas montrer plus clairement à quel point il est foncièrement méchant, et absolument perdu. Que va faire Dieu dorénavant ? La grâce peut-elle remédier à un état aussi désespéré ? C’est la prochaine parabole qui va nous donner la réponse.
Cependant, rappelons-nous d’abord, encore une fois, que tout ceci s’adresse solennellement à nous et à notre temps. La parabole des « méchants vignerons » est un avertissement pour tous ceux de qui Dieu est en droit d’attendre du fruit. Car même si Dieu ne fait plus l’épreuve de l’homme depuis la croix de Son Fils, Il n’en a pas pour autant renoncé à Ses droits sur l’homme.
Les hommes qui relèvent de l’époque et du domaine de la chrétienté, sont aussi responsables de porter du fruit pour Dieu. L’apôtre Paul avertit les branches de l’olivier sauvage qui ont été entées/greffées sur l’olivier naturel de persévérer dans la bonté de Dieu, sinon elle seront aussi coupées de l’olivier (Romains 11:16-22). Et si l’assemblée d’Éphèse a aussi abandonné son premier amour pour le Seigneur, Il doit lui dire : « Souviens-toi donc d’où tu es déchu, et repens-toi, et fais les premières œuvres ; autrement, je viens à toi et j’ôterai ta lampe de son lieu, à moins que tu ne te repentes » (Apocalypse 2:5). Quand Dieu nous place dans une relation particulière, Il attend que notre vie pratique y corresponde.
Er lehrte sie vieles in Gleichnissen, Vol. 1 p. 359-378
Dans la parabole des « méchants vignerons », nous avons vu le rejet de Christ par Son peuple terrestre. Mettre à mort le Fils de Dieu était le sommet de l’hostilité humaine contre Dieu.
Satan était-il arrivé à contrecarrer définitivement les plans de Dieu ? Non, mille fois, non ! Dans une nouvelle parabole qui se rattache directement à celles de ces « méchants vignerons », le Seigneur Jésus révèle la grâce sans limite de Dieu.
Dans la parabole du « roi qui fit des noces pour son fils », Il ne parle plus désormais de ce que l’homme a fait, mais de ce que Dieu fait.
Mais on y voit cependant un développement du mal supplémentaire : non seulement l’homme se refuse à apporter quoi que ce soit à Dieu, mais il refuse aussi de recevoir quelque chose de Lui. C’est une vraie image du cœur de l’homme et une vérité très humiliante.
S’il n’y avait pas la grâce de Dieu, aucun descendant d’Adam n’arriverait jamais dans la gloire de Dieu. Mais regardons maintenant les détails de cette parabole.
« Et Jésus, répondant, leur parla encore en paraboles, disant : Le royaume des cieux a été fait semblable à un roi qui fit des noces pour son fils » (Matthieu 22:1, 2).
La plupart des gens n’ont pas des pensées élevées au sujet de Jésus Christ. Mais Dieu a une haute pensée de Son Fils. Quand les gens rabaissent Son Fils, Lui L’élève. Quand les gens rejettent Son Fils, Lui L’accueille et Le fait asseoir à Sa droite. Quand les gens n’honorent pas Son Fils, Lui L’honore et Lui Le glorifie.
Telle est la motivation profonde qui fait agir Dieu. C’est la vraie raison du changement dans Ses manières d’agir avec les hommes, et de la grâce débordante qu’Il apporte maintenant aux hommes. Ce ne sont pas en premier lieu les besoins de l’homme pécheur qui font ainsi agir Dieu. Naturellement ces besoins existent, et il faut y répondre. Mais la première pensée de Dieu est la suivante : glorifier Son Fils. « Le Père aime le Fils, et a mis toutes choses entre Ses mains » (Jean 3:35).
Notre parabole le montre clairement dès le début. Le « roi fait des noces pour son fils » (c’est ce que dit le texte littéralement). Le « Roi des siècles, l’incorruptible, invisible, seul Dieu » (1 Timothée 1:17) agit pour l’honneur de Son Fils. Il veut que Son Fils soit entouré de gens à table aux noces, et que ces gens soient à Son honneur. Et si ceux-ci ne sont pas dans un état convenable pour Sa présence, alors Il veut les rendre convenables, pour que Son Fils soit honoré, « afin qu’Il soit Premier-né entre plusieurs frères » (Romains 8:29). C’est la grande pensée de Dieu qu’Il a déposée dans Son évangile au sujet de Son Fils. Loué soit Son Nom glorieux !
« et Il envoya ses esclaves pour convier ceux qui étaient invités aux noces ; et ils ne voulurent pas venir » (Matthieu 22:3).
Pour mettre Son propos à exécution, le roi envoie maintenant ses esclaves « pour convier ceux qui étaient invités aux noces ». Qui repousserait une invitation aussi distinguée ? Mais quelle tristesse ! — les invités ne voulurent pas venir. Et voilà un nouveau fait bouleversant, que j’ai déjà signalé au début : Non seulement l’homme refuse de donner à Dieu ce qui Lui est dû, mais Il refuse de recevoir ce que Dieu lui offre dans Sa bonté. Quelle corruption dans le cœur de l’homme ! Les « invités », c’était les Juifs du temps où le Seigneur vivait sur la terre. C’est à eux que Dieu fit entendre cet appel : « Venez aux noces ! »
Ce premier envoi d’esclaves correspond par exemple à la mission de Matthieu 10 où le Seigneur a envoyé les douze apôtres dans les villes d’Israël. Cette mission a eu lieu avant la croix. Avec quelle grâce Dieu agissait-Il pourtant à leur égard ! C’était justement elles qui s’étaient toujours élevées contre Lui dans les siècles précédents, jusqu’à ce qu’Il doive finalement les envoyer en captivité en Assyrie et à Babylone, — c’était justement elles qui étaient spécialement les « invités », c’était spécialement à elles que s’adressaient l’invitation de grâce du Seigneur durant le séjour de Son Fils sur la terre.
Dans ce contexte, un verset de 2 Corinthiens (5:19) est spécialement important : « Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec Lui-même, ne leur imputant pas leurs fautes ». Christ était sur cette terre, et en Lui, Dieu était ici-bas. Mais Dieu n’était pas venu pour juger le monde (Il le fera plus tard), mais pour réconcilier les hommes avec Lui-même. Christ était en grâce ici-bas, et faisait justement annoncer au peuple juif apostat le message suivant : « Repentez-vous car le royaume des cieux s’est approché » (Matthieu 3:2 ; 10:7). Mais les invités ne voulurent pas venir. Ils firent mourir le Christ de Dieu. « Mais vous, vous avez renié le saint et le juste, et vous avez demandé qu’on vous accordât un meurtrier ; et vous avez mis à mort le prince de la vie, lequel Dieu a ressuscité d’entre les morts ; ce dont nous, nous sommes témoins » (Actes 3:14-15).
Mais même cette infamie de l’homme ne peut pas empêcher Dieu d’accomplir Son propos. Il veut « faire des noces » à Son Fils. Même la méchanceté de l’homme ne peut L’en détourner. Et c’est ainsi que, selon le v. 4 de notre parabole, Il envoie de nouveaux esclaves :
« Il envoya encore d’autres esclaves, disant : Dites aux conviés : Voici, j’ai apprêté mon dîner ; mes taureaux et mes bêtes grasses sont tués et tout est prêt : venez aux noces » (Matthieu 22:4).
Entre les versets 3 et 4, nous devons nous figurer la crucifixion et la résurrection de Christ. Certes la parabole ne les représente pas, mais elles se situent entre ces deux versets comme nous allons le voir tout de suite.
Cette deuxième mission de Ses esclaves s’adresse de nouveau aux « conviés », de nouveau au peuple juif — ô quelle grâce ! Le méritaient-ils ? Ne venaient-ils pas de tuer Son Fils ? Dans Sa grâce inconcevable, Dieu fait parvenir encore une fois un message à ce peuple rebelle après la crucifixion, la résurrection et l’ascension au ciel du Seigneur Jésus, et ce message est : « Venez aux noces ! »
Historiquement parlant, c’est dans les premiers chapitres des Actes qu’on voit cette seconde invitation à Israël. La première invitation, c’est-à-dire la prédication du royaume par les douze prend fin avec le chapitre 12 de l’évangile de Mathieu comme cela ressort d’une étude plus approfondie de ce livre. Mais après la croix, la prédication du royaume a repris pour une courte période. Dieu y joignit la promesse d’accorder le pardon des péchés et des temps de rafraîchissement : « Repentez-vous donc et vous convertissez, pour que vos péchés soient effacés : en sorte que viennent des temps de rafraîchissement de devant la face du Seigneur » (Actes 3:19, 20).
Aucun païen n’entendit la prédication de Pierre. Elle n’était pas destinée aux nations. C’est aux « conviés » que s’adressait cette seconde invitation après la croix, aux Juifs de Jérusalem, comme le contexte le montre clairement. J’insiste spécialement là-dessus, car beaucoup de faux enseignements proviennent de ce qu’on n’a pas compris ce fait. Corneille, le centurion romain, était pieux selon le témoignage de l’Écriture, et il craignait Dieu avec toute sa maison (Actes 10:2), et il connaissait « la parole qu’Il a envoyée aux fils d’Israël, annonçant la bonne nouvelle de la paix par Jésus Christ » (Actes 10:36, 37). Il était donc tout à fait familier avec le message de Dieu à Israël, mais il n’osait pas se l’approprier (et il avait raison selon l’état de choses à ce moment-là !). Ce message était jusque-là adressé seulement aux « fils d’Israël ».
Jusqu’ici, nous n’avons pas encore mentionné une expression très importante de la deuxième invitation ; je voudrais m’arrêter brièvement sur sa signification : « Voici, j’ai apprêté mon dîner… tout est prêt : venez aux noces ». Ce « tout est prêt » manquait lors de la première invitation. Cela nous force à tirer la conclusion déjà mentionnée, que la croix se situe entre le premier et le second envoi des esclaves : le Seigneur Jésus a accompli entre temps l’œuvre de la rédemption.
Avant que cette œuvre soit accomplie, Dieu ne pouvait pas dire « tout est prêt ». Il fallait d’abord que Christ subisse à notre place la mort expiatoire, le châtiment de nos péchés, et il fallait encore qu’Il ressuscite d’entre les morts, et monte au ciel d’abord, avant que Dieu puisse mettre en place le royaume des cieux dans le caractère décrit précédemment, et puisse dire que « tout est prêt ».
Mais maintenant, chers amis, tout est prêt ; nous ne pouvons pas allonger davantage ici sur ce que cela signifie, pour nous spécialement. Pour le moment quand même, souvenons-nous simplement de la précieuse parole de 1 Corinthiens, où l’apôtre Paul cite le prophète Ésaïe : « Ce que l’œil n’a pas vu, et que l’oreille n’a pas entendu, et qui n’est pas monté au cœur de l’homme, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment » (1 Corinthiens 2:9).
Quelle réponse les « conviés » ont-ils donc donné à la seconde invitation du roi ?
« Mais eux, n’en ayant pas tenu compte, s’en allèrent, l’un à son champ, et un autre à son trafic ; et les autres, s’étant saisis de ses esclaves, les outragèrent et les tuèrent » (Matthieu 22:5-6).
Nous avons ici la réponse bouleversante qu’ont donnée les Juifs peu après la croix ; ils n’ont pas voulu de la grâce de Dieu. Ils envoyèrent encore, en quelque sorte, une ambassade à la suite du crucifié (désormais monté au ciel) et Lui firent savoir, pour ainsi dire : « nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous » (Luc 19:14). Ils ne « tinrent pas compte » des plans du roi qui voulait faire des noces pour Son Fils. Quelle valeur avait-Il pour eux, ce Fils ? Ils le haïssaient. Ils L’avaient haï quand Il était parmi eux, et ils Le haïssaient maintenant qu’Il était au ciel. Rien ne montre davantage ce qu’est le cœur humain en pratique : L’homme a de la haine non seulement pour la sainteté de Dieu, mais aussi pour Sa bonté.
Il ressort des versets 5 et 6 deux caractères qui ne sont pas spécifiques des Juifs, mais qu’on rencontre chez les hommes en général. Certes les deux rejettent la grâce de Dieu. Mais le v. 5 montre le groupe de ceux qui ont leurs intérêts dans le monde, de ceux qui ne tiennent aucun compte du Seigneur Jésus. C’est le groupe des indifférents qui ont ici-bas leur champ et leur trafic. Ils ne s’intéressent à rien d’autre. Reçoivent-ils une invitation à une évangélisation… par principe ils n’ont pas le temps. Ils n’ont jamais le temps. Ils ont quelque chose de plus important à faire que d’aller écouter des sermons.
Luc nous montre avec beaucoup plus de détails toutes les sortes d’excuses que les gens avancent pour au moins ne pas avoir à donner suite à l’invitation de Dieu (Luc 14:18 et suiv.). « Ils commencèrent tous unanimement à s’excuser ». Peut-être que l’un de mes chers lecteurs appartient encore à ce groupe ? Permets que je t’avertisse. Il t’arrivera d’avoir assez de temps pour réfléchir à ta folie. Et prends bien garde à ceci : même si c’est par simple indifférence que tu rejettes la grâce de Dieu, tu la rejettes quand même. Et cela ne restera jamais impuni, comme nous allons encore le voir.
Au v. 6 de Matthieu 22, nous avons le groupe de ceux qui agissent par la force, et qui persécutent les messagers de Dieu. Ce sont la plupart du temps, si étrange que cela paraisse, des gens religieux, des conducteurs religieux qui sentent que Christ et le message de la grâce mettent en danger leur vocation et leur position religieuses. Ils combattent activement les serviteurs de Dieu.
On le voit expressément dans le livre des Actes où le Saint Esprit Lui-même a rédigé l’histoire des débuts de l’église chrétienne. Si nous pensons à la persécution de Pierre, à celle d’Étienne ou plus tard à celle de Paul et de ses collaborateurs, la haine des chefs religieux d’Israël s’est toujours dirigée contre le message de la grâce, dont le point de départ et le contenu sont un Christ glorifié.
Nous avons donc ici le grand fait historique que Jérusalem et les Juifs comme tels ont refusé l’offre de grâce de Dieu qui a pris fin par la lapidation d’Étienne commise par eux. Depuis lors, Dieu ne se tourne plus vers le peuple juif comme tel, en dépit de tous les zélateurs fanatiques d’Israël.
Le rejet de la grâce de Dieu a entraîné un jugement inéluctable, un jugement dans le temps et un jugement éternel. Si la violation de la loi divine entraînait déjà une sanction grave, combien plus le mépris de Sa grâce !
« Et le roi, [l’ayant entendu, en] fut irrité ; et ayant envoyé ses troupes, il fit périr ces meurtriers-là et brûla leur ville » (Matthieu 22:7).
L’esquisse du sort de la nation juive et de la destruction de leur ville, faite par le Seigneur Jésus, n’est-elle pas étonnante par son exactitude et sa brièveté ! Il connaît la fin avant le commencement. Il parle comme Celui devant qui l’avenir est comme un livre ouvert.
C’est une folie de penser qu’on puisse impunément refuser la grâce de Dieu et y répondre par l’indifférence ou l’hostilité. « Le roi en fut irrité ». Dieu s’est servi des armées romaines comme de « Ses troupes » et a fait périr ceux qu’Il qualifie maintenant de « meurtriers » de Son Fils. Son fidèle témoin Étienne disait lui aussi devant le sanhédrin juif à la fin de son discours si touchant : « que vous, vous avez livré et mis à mort » (Actes 7:52).
« Il brûla leur ville ». Cette prophétie du Seigneur s’est accomplie en entier et littéralement, quand les Romains détruisirent Jérusalem en l’an 70. Ce fut aussi la fin des interventions de Dieu en rapport avec Israël en tant que nation, jusqu’à aujourd’hui. Il renouera plus tard avec ce peuple, quand la vraie église aura été enlevée au ciel. Mais dans le temps présent, le temps de la grâce, Israël est mis de côté, et pour Dieu il est « Lo-Ammi », c’est-à-dire « pas mon peuple » (Osée 1:9).
Bien sûr, cela ne veut pas du tout dire que Dieu ne veut pas aujourd’hui sauver des Juifs individuellement. Il veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité (1 Timothée 2:4). Le Juif aussi peut et doit recevoir aujourd’hui le message de la grâce, mais les Juifs n’ont aujourd’hui aucun privilège particulier et aucune priorité par rapport aux autres. Le jugement de Dieu est venu sur eux et sur leur ville, et il pèse encore sur ce peuple.
« Jérusalem, Jérusalem » avait dit une fois le Seigneur Jésus, « la ville qui tue les prophètes et qui lapide ceux qui lui sont envoyés, que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! Voici, votre maison vous est laissée déserte » (Matthieu 23:37-38). Le Sauveur qui prévoyait la misère sans nom de ses habitants, pleura sur cette ville alors qu’Il la voyait encore une fois dans Son dernier voyage vers elle : « Si tu eusses connu, — au moins en cette tienne journée, — les choses qui appartiennent à ta paix ! » (Luc 19:42).
Les choses qui appartiennent à ta paix ! Les as-tu seulement déjà reconnues pour toi, cher lecteur ? Ou bien veux-tu aussi entendre une fois de Sa bouche la parole : « tu ne l’as pas voulu ! » (Luc 13:34 ; 19:27), et subir éternellement les conséquences de ton rejet de la grâce ?
« Alors il dit à ses esclaves : Les noces sont prêtes, mais les conviés n’en étaient pas dignes ; allez donc dans les carrefours des chemins, et autant de gens que vous trouverez, conviez-les aux noces. Et ces esclaves-là, étant sortis, [s’en allèrent] par les chemins, et assemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, tant mauvais que bons ; et la [salle] des noces fut remplie de gens qui étaient à table » (Matthieu 22:8-10).
Dieu a d’abord offert l’évangile de la grâce aux Juifs, et à eux tout seuls. Mais du fait qu’ils l’ont refusé, Sa grâce était-elle dès lors épuisée ? Mille fois non ! et mille fois merci à Dieu ! Quand les « conviés » n’ont pas voulu venir, alors Il a envoyé Ses esclaves, encore une fois, pour la troisième fois. Mais maintenant ils ne devaient plus aller vers un groupe déterminé de personnes, ni vers un peuple particulier, mais ils devaient aller aux carrefours des chemins, et inviter aux noces autant de gens qu’ils trouveraient. Désormais l’appel de la grâce devait être lancé à tous sans faire de différences, et il devait aussi atteindre « les Grecs », c’est-à-dire ceux des nations. L’Évangile devait devenir la puissance de Dieu en salut à quiconque croit, « au Juif premièrement, et au Grec » (Romains 1:16).
Merveilleux propos de Dieu, qui nous inclut également ! Grâce qui est parvenue jusqu’à nous, et qui est un sujet d’adoration ! Dieu veut avoir Sa maison pleine de gens à table en l’honneur de Son Fils, et si ceux qui sont spécialement favorisés ne veulent pas venir, alors Il fait porter Son évangile sur les chemins, à ceux qui sont étrangers aux promesses de Dieu, sans Christ, sans espérance et sans Dieu dans le monde (Éphésiens 2:12). Il ne s’agit plus de ce que l’homme est, mais de ce que Dieu est.
L’évangile s’adresse à l’homme tel qu’il est. Tous sont bienvenus, tant mauvais que bons. Une Lydie qui priait, avait autant besoin du salut qu’un gardien de prison enfoncé dans ses péchés, qu’un Corneille pieux ou qu’un brigand mourant. Ils avaient tous besoin de l’évangile pour le salut, et c’est par la foi que tous le recevaient.
« Et la salle de noces fut remplie de gens qui étaient à table ». Au début de notre parabole, nous avons entendu que le roi voulait faire des noces pour Son Fils, et maintenant nous entendons que la salle de noces est remplie de gens à table. Quelle pensée réjouissante ! Dieu parvient à Ses fins, et même l’obstination de l’homme ne peut pas contrecarrer Son propos. Malgré tout ce qui peut intervenir entre temps, malgré tous les abîmes de méchanceté qui peuvent s’interposer, « la salle de noces fut remplie de gens qui étaient à table ». Mais il fallait encore autre chose. C’est ce dont le Seigneur Jésus va parler maintenant.
« Et le roi, étant entré pour voir ceux qui étaient à table, aperçut là un homme qui n’était pas vêtu d’une robe de noces. Et il lui dit : Ami, comment es-tu entré ici, sans avoir une robe de noces ? Et il eut la bouche fermée. Alors le roi dit aux serviteurs : Liez-le pieds et mains, emportez-le, et jetez-le dans les ténèbres de dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents » (Matthieu 22:11-13).
La gloire du roi, et l’honneur du fils du roi exigeaient qu’on ne se borne pas à accepter l’invitation du roi, mais qu’on soit dans un état convenable pour la présence du roi. C’est la raison pour laquelle un habit de noces était nécessaire. Ceux qui étaient à table en avaient besoin, et le roi le procurait. Le roi qui a fait cette invitation, ne se borne pas à faciliter admirablement le trajet de ceux qui étaient à table, mais dans sa libéralité royale, il prend soin de mettre à leur disposition le vêtement de noces qui leur permettra de paraître devant lui dans un état approprié à sa gloire. Tels étaient les mœurs d’orient. Toute personne à table était tenue de porter ce vêtement. Qui voudrait ne pas l’endosser, s’il veut honorer le roi et son fils ? Le roi n’a pas envoyé chercher sur les chemins pour choisir les gens ayant un habit de noces approprié, et pour n’inviter ensuite que ceux-là. Mais il n’était pas question qu’un seul invité paraisse dans l’habit que lui-même estimait convenable. Non, tout devait dépendre de la générosité du roi qui voulait faire des noces à son fils, et tout préparer pour que cela convienne à sa gloire.
Quand on en vient à l’application de ce verset à nous-mêmes, il faut d’abord remarquer qu’il ne faut pas situer cette scène au ciel. Cela a malheureusement eu lieu trop souvent, et de terribles fausses doctrines en ont été la conséquence. Remarquons qu’il ne s’agit pas d’une parabole du ciel, mais du royaume des cieux, qui est donc le domaine de la chrétienté professante sur la terre. Quand Dieu vient pour voir ceux qui sont à table, cela signifie que Dieu contrôle dans quelle mesure la profession de l’individu d’appartenir à la chrétienté correspond à la vérité. Tu professes être chrétien ? c’est bien, mais Dieu mettra à l’épreuve ta profession, Il déterminera si tu es réellement un chrétien. Il ne s’agit pas dans notre parabole de savoir quand Dieu fera cela, mais seulement du fait qu’Il le fera.
Or à quelle caractéristique reconnaît-on un vrai chrétien ? au fait qu’il a revêtu Christ (Galates 3:27). C’est cela l’habit de noces — Christ. C’est aussi la plus belle robe dont le père revêt le fils perdu (= prodigue) en Luc 15.
Quand Christ était sur la terre, Il a parfaitement glorifié Son Dieu et Père jusqu’à la mort de la croix, qu’Il a soufferte pour la propitiation pour nos péchés. En réponse à cela, et en l’honneur de Son Fils, Dieu fait maintenant quelque chose de merveilleux avec les enfants des hommes qui croient en Son Fils : Il ne cherche pas quelque chose de bien chez eux ; non, Il leur donne quelque chose de bon, quelque chose de très bon, le meilleur qu’Il puisse donner : Il leur donne Christ. Il les revêt de Christ. Il les justifie sur la base d’une rédemption accomplie. Il voit les croyants « en Christ », dans tout le caractère agréable qui est le Sien. C’est ce que l’apôtre Paul veut dire quand il dit : « Or vous êtes de lui [c’est-à-dire de Dieu] dans le christ Jésus », puis il continue la description de ce que nous acquérons en Lui : « qui nous a été fait sagesse de la part de Dieu, et justice, et sainteté, et rédemption » (1 Corinthiens 1:30).
Parce que Son Fils L’a si merveilleusement glorifié dans Sa vie et dans Sa mort, Il couvre désormais Lui-même le plus petit et le plus faible de ceux qui croient au Nom de Son Fils, des plus hautes bénédictions qu’Il puisse jamais donner. C’est à cause de Son Fils qu’Il fait tout cela. Certes nous avions besoin de la rédemption, un besoin pressant, sinon nous allions à la perdition éternelle. Mais ce n’est pas la question ici. Dieu agit en l’honneur de Son Fils, et Il aime honorer le nom de Son Fils. Il nous pardonne nos péchés à cause de Son nom (c’est-à-dire le nom de Christ) (1 Jean 2:12). Si quelqu’un s’appuie sur le nom et l’œuvre de Son Fils, c’est (nous le disons en toute révérence) la justice de Dieu qui exige qu’il soit justifié par pure grâce, sur la base de la rédemption qui est dans le Christ Jésus.
Dieu restera toujours fidèle à Son caractère, Il n’agira jamais en contradiction avec Sa justice et Sa grâce. Et s’Il est allé nous chercher aux carrefours des chemins, alors que nous n’étions pas aimables, pour nous amener aux noces de Son Fils, alors nous y resterons, quoi qu’il arrive, et y resterons pour l’éternité.
Dans ce contexte je voudrais encore souligner deux particularités assez importantes de la parabole de notre Seigneur.
Il n’est pas parlé de ce que ceux qui étaient à table aux noces ait jamais quitté la noce ni la présence du roi, hormis une exception que nous allons voir tout de suite. C’est ce que nous voyons aussi dans la parabole du fils perdu (= prodigue) : il entre bien dans la maison du père, mais il ne la quitte plus. D’autres passages de l’Écriture montrent ce qu’on ne trouve ici que par allusion : une fois amenés à Lui, nous restons auprès de Lui pour toujours.
La deuxième choses à remarquer, est que le déroulement de la parabole passe imperceptiblement du temps à l’éternité. Les conséquences éternelles deviennent visibles. On va tout de suite encore mieux le comprendre en nous occupant de la part de celui qui n’avait pas d’habit de noces.
Les paroles qui suivent sont remarquables : « Et le roi, étant entré pour voir ceux qui étaient à table ». J’aime toujours beaucoup m’arrêter sur cette pensée que le roi est entré pour voir ceux qui étaient à table. Qu’est-ce qui a attiré l’attention du roi ? Le mobilier somptueux, les draperies et colonnes artistement ouvragées, comme le roi Assuérus en avait disposé au temps Esther pour sa fête (Esther 1:4-9) ? Non, son attention fut attirée par ceux qui étaient à table et par leur habillement. Tous ceux qui étaient à table, qui participaient à cette scène et portaient l’habit de noces qu’on leur avait attribué, — chacun d’eux parlaient au cœur du roi de l’excellence de Son Fils. C’est aussi ce qui arrive quand Dieu nous « regarde » : Il se réjouit de voir en nous Christ, Son Fils bien-aimé. Si nous entrons dans les pensées et les désirs du « roi », et que nous honorons le Fils comme le Père L’honore, cela suscite Son bon plaisir (Jean 5:23).
Mais il y en avait un homme entré sans avoir d’habit de noces. Le Seigneur Jésus se sert de ce cas pour présenter un principe crucial : pour les noces, il faut avoir un habit de noces. On doit avoir revêtu Christ, pour pouvoir avoir part à Sa joie. On doit avoir revêtu Christ sur cette terre, par la foi, car dans l’Au-delà on ne peut plus chercher à l’être.
Mais cet homme ne se soucie ni des pensées ni des idées du roi. Il est venu avec son propre habit. Quel intérêt avait-il au vêtement que le roi avait fait préparer pour chaque convié ? Son propre habit, qu’il fût bon ou mauvais, lui paraissait suffire. Peut-être même cet homme était-il le mieux vêtu de tous ceux qui étaient venus à table. Peut-être que son vêtement était fait à partir d’étoffes les plus raffinées parmi les hommes, qu’une haute moralité et une profonde religiosité l’avaient caractérisé. Tout cela ne suffisait-il pas pour la présence du roi ?
Or cet homme ne se connaissait pas lui-même, et il ne connaissait pas non plus la grâce ni la majesté du roi ! Il était venu sans Christ devant le roi, il n’avait pas revêtu Christ. Il préférait venir devant le roi avec sa propre justice, et c’était là sa ruine éternelle.
Ah ! il y a beaucoup de gens chrétiens, valeureux, et qui pensent avoir tout à fait raison d’être satisfaits d’eux-mêmes. Extérieurement, ils mènent une vie honorable, et ont les estime beaucoup. Ils sont au service de la société humaine, ou de leur église. Ils ont assez de réputation et de religiosité — et c’est justement ce qui leur est fatal — pour se tromper et tromper les autres. Car ils ne comprennent pas qu’ils n’ont pas Christ comme leur justice. Du fait que ce groupe de gens est si grand (bien plus grand, me semble-t-il, que celui des pécheurs déclarés) et de ce que ces gens sont si difficiles à convaincre de la nécessité où ils se trouvent de se convertir, je voudrais leur adresser une parole d’avertissement particulière.
Veux-tu vraiment te confier dans ton honnêteté et ta sincérité, dans ton amour du prochain et ton amabilité ? Je ne dis pas que tu n’as pas ces qualités, ni qu’elles sont sans valeur. Mais penses-tu qu’avec toutes ces qualités tu pourras « faire le poids » en face de tous tes péchés ? Regarde, le « Roi » t’offre Sa merveilleuse grâce, Il t’offre Son Fils unique qu’Il a livré à la mort pour toi. Si cela avait été inutile, Il ne l’aurait pas fait. C’est de Lui qu’Il veut te revêtir. Il veut te voir heureux dans la joie de Son Fils. Veux-tu refuser tout cela ? Veux-tu, à la place, paraître devant Lui dans le mince vêtement de ton honorabilité ? « Je te conseille d’acheter de moi de l’or… et des vêtements blancs, afin que tu sois vêtu et que la honte de ta nudité ne paraisse pas » (Apocalypse 3:18). Ou bien veux-tu entendre une fois de Sa bouche la parole solennelle : « Ami, comment es-tu entré ici, sans avoir une robe de noces ? » Toi aussi, tu auras la bouche fermée, cette bouche qui savait si bien parler, et tu « ne lui répondras pas sur un point entre mille » (Job 9:3). Ce sera pour toi éternellement trop tard.
Le refus d’honorer le Fils du Roi et d’accepter la bonté du Roi entraîne un jugement inéluctable. Il n’y a pas d’excuse pour celui qui préfère ce qui vient de lui-même à ce que le Roi accorde dans Sa bonté. Le roi fait donc lier l’homme pieds et mains, et le fait jeter dans les ténèbres du dehors, « là où sont les pleurs et les grincements de dents ». Que c’est solennel ! Le jugement jette cet homme hors de cette scène qui n’avait aucune place dans son cœur.
Par la forme de cette parabole et les termes utilisés, le Seigneur se sert de l’homme sans habit de noces pour exprimer clairement un autre principe : Le jugement dont il s’agit ici est un jugement personnel, et c’est un jugement éternel. Dans la première partie de la parabole, Il parle d’un jugement temporel, qui devait être exercé ou qui a été exercé dans Son gouvernement à l’égard du peuple juif. De la même manière, il arrivera aussi un moment où la chrétienté, à cause de la même infidélité, sera « coupée » [ou : retranchée ; Romains 11] tout comme le judaïsme. Dans la seconde partie de la parabole que nous considérons maintenant, il ne s’agit plus d’une destruction extérieure de villes, de mise à mort de meurtriers ou de terminaison d’une dispensation, mais d’un jugement éternel sur des personnes individuelles.
Dieu jugera chaque individu, et établira s’il correspond à ce qu’il professe, et s’il est personnellement en état de participer à la fête en l’honneur de Son Fils. Si ce n’est pas le cas, il sera jeté dans les ténèbres du dehors, où sont les pleurs et les grincements de dents, tandis que, de leur côté, les noces suivront leur cours. Il y a un jugement définitif, absolu, éternel : être séparé pour toujours de Celui qui est lumière et amour, et dont on a rejeté la grâce si parfaite.
Le chemin vers Dieu sort l’homme des ténèbres pour le mettre dans la lumière de Sa présence. Mais le chemin loin de Dieu, le chemin Sans Dieu et sans Son Christ, conduit dans les ténèbres de dehors, dans la nuit éternelle. Quel chemin suis-tu ?
La dernière parole du Seigneur Jésus qui achève la parabole, résume toute la parabole et son enseignement.
« Car il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus » (Matthieu 22:14).
Beaucoup se sont servi de cette parole pour se persuader qu’ils ne pouvaient pas être sauvés parce qu’ils n’étaient pas élus. Mais c’est un enseignement trompeur, trouvé par Satan pour précipiter les gens dans le malheur. Non, « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et viennent à la connaissance de la vérité » (1 Timothée 1:4). Et justement dans notre parabole, le Seigneur montre clairement que l’appel de la grâce de Dieu s’adressait, et s’adresse encore, à tous indistinctement : « autant de gens que vous trouverez, conviez-les aux noces » (Matthieu 22:9). « Autant de gens que vous trouverez », ce sont les « beaucoup d’appelés ».
Malheureusement l’offre de grâce de Dieu n’est acceptée que par peu. Par le refus de Christ, ils manifestent seulement qu’ils n’appartiennent pas aux élus. Ils sont donc effectivement un troupeau relativement petit, auquel le Père donne le royaume (Luc 12:32). Bienheureux ceux qui en font partie !