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Remarques sur l’APOCALYPSE
William Kelly
Ces « Remarques » ont d’abord paru en anglais dans le périodique « Bible Treasury » vol. 2, de janvier 1858 à décembre 1859. Une traduction française a été publiée en 1865 (librairies Grassart et Meyruis à Paris, Émile Béroud à Genève et Paul Recordon à Vevey). Un texte revu et complété a ensuite paru sous forme de livre en 1871, avec le titre « Lectures on Revelation », dont la traduction est donnée ci-après, sans toutefois reprendre la longue « Introduction » et diverses notes de controverses (par rapport à d’autres opinions ou sur des questions de traduction du texte biblique).
Comme d’habitude, W. Kelly a fait sa propre traduction du texte biblique de l’Apocalypse. La présente traduction a utilisé la version française J.N. Darby et dans quelques cas la traduction tirée du texte de W. Kelly.
Les subdivisions des chapitres et leurs sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest
Table des matières abrégée :
Table des matières détaillée :
1.1.1 Un ange intervient contre Satan (au lieu de Christ au ch. 19)
1.1.2 Compréhension de l’Apocalypse et du langage figuré
1.1.4 Encore à propos des prétendues difficultés de l’Apocalypse
1.2.1 Ceux qui appartiennent à Christ
1.2.2 Les saints règneront avec Christ et jugeront
1.2.3 Les âmes de ceux qui avaient été décapités
1.2.4 Ceux qui n’avaient pas rendu hommage à la bête
1.2.5 Les différentes classes de ressuscités
1.2.6 La participation des chrétiens au règne de Christ, et son effet présent
1.2.7 Présence de Christ dans le règne
1.2.8 Des saints autres que l’église : les martyrs apocalyptiques. Leurs caractères
1.2.9 Ceux qui crient pour demander vengeance. Jugement et grâce
1.2.10 Deux classes de martyrs apocalyptiques selon Apoc. 20:4 et 6:11
1.2.11 Ceux qui ne sont ressuscités qu’au début du règne
1.3 Ch. 20:5-6 — Le reste des morts, la première résurrection
1.3.1 Ch. 20:5 — Le reste des morts : des méchants
1.3.2 Tous ne ressuscitent pas en même temps : Luc 20:27-40 et Phil. 3:11
1.3.3 Ch. 20:5-6a — Première résurrection
1.3.4 Ch. 20:6b — Seconde mort
1.5 Ch. 20:7-10 — Les mille ans de règne et leur fin
1.5.2 Le règne de Christ et la place de l’église pendant ce règne
1.5.3 Le plein exercice du gouvernement pendant le règne
1.5.4 Durée du règne de Christ : un aspect temporaire, un aspect éternel
1.5.5 La connaissance de l’Éternel couvrant la terre pendant le règne
1.5.6 Quand la corruption disparaîtra
1.5.7 Suppression des conséquences du péché. Comment la mort a été introduite
1.5.8 La domination de Christ différente de celle d’Adam
1.5.9 Juifs et Gentils pendant le règne
1.5.10 Preuves scripturaires du millénium
1.5.11 Conséquences du fait que Satan sera lié
1.5.12 Des inconvertis pendant le règne
1.5.13 Prophéties d’Ésaïe 24 à 26
1.5.14 Ch. 20:7-9 — La révolte finale, Gog et Magog
1.5.15 Ch. 20:10 — La fin du diable
1.6 Ch. 20:11 — le grand trône blanc
1.6.1 Contre le post-millénarisme
1.6.2 Deux résurrections : Jean 5
1.6.3 Les deux résurrections et Apoc. 20:6
1.6.4 Résurrection de jugement
2.1 21:1-8 concerne l’état éternel et 21:9 à 22:5 le millénium
2.1.1 Pas de nations ni de guérison dans l’état éternel
2.1.2 Autres tableaux rétrospectifs dans l’Apocalypse
2.2 Ch. 21:1 — Nouveaux cieux et terre. Rapports avec Ésaïe 65
2.3 Ch. 21:2-3 — L’habitation de Dieu avec les hommes
2.4 Ch. 21:4 — Rapports avec 2 Pierre 3:10-13 et 1 Cor. 15:23-26
2.4.1 2 Pierre 3:11-13 — la terre et le ciel qui passent
2.4.2 1 Cor. 15:23-26 — Le royaume remis à Dieu et le règne aux siècles des siècles
2.5 Ch. 21:5-7 — Dieu. Noms de Dieu
2.6 Ch. 21:8 — Peines éternelles
2.7.1 Ch. 21:9-12a — Le jaspe et la gloire de Dieu
2.7.2 Ch. 21:12b-13 — Douze portes, douze anges
2.7.3 Ch. 21:14 — Le fondement des apôtres et prophètes. Éph. 2:19-20
2.7.4 Ch. 21:15-17 — La cité en carré ou cube. Sa muraille
2.7.5 Ch. 21:18 — La cité d’or pur semblable à du verre pur
2.7.6 Ch. 21:19-21 — Les pierres précieuses, les perles
2.7.7 Ch. 21:22 — Effet pratique de la description de l’église en gloire
2.7.8 Ch. 21:22 — Pas de sacrificateurs, la présence immédiate de Dieu
2.7.9 Ch. 21:22-23 — Jean 17:22-23
3.1 Parallèle et contraste avec la Genèse
3.2.1 La grâce envers les nations
3.2.2 L’Église manifeste la grâce. Éph. 5:2.
3.2.3 La Jérusalem terrestre, la justice et le jugement. La grâce régnant par la justice (de Dieu)
3.3.1 Ch. 22:3a. Pas de changement pour l’Église entre le millénium et l’état éternel
3.3.2 Ch. 22:3b — 1 Cor. 15:24
3.3.3 Service et règne éternel
3.4 Ch. 22:6-7. Négligence de l’Apocalypse : Causes et résultats
3.5 Ch. 22:8-9 — Rendre hommage à Dieu, non pas aux anges
3.6.1 Ch. 22:10. Les prophéties scellées en Daniel 12 et non scellées en Apoc. 22
3.6.2 Ch. 22:11 — Quand le temps de la grâce est passé
3.7.2 L’étoile brillante du matin
3.8.1 Ch. 22:17a — L’Esprit fortifie le désir de la venue du Seigneur
3.8.2 Ch. 22:17b — Tous les croyants ont à désirer la venue du Seigneur
3.8.3 Ch. 22:17c — La venue du Seigneur, une motivation pour évangéliser
3.8.4 Résumé sur les effets produits dans le coeur par l’attente de la venue du Seigneur
3.9.1 Ch. 22:18-19 — Valeur extrême de la prophétie
3.9.2 Ch. 22:20-21 — La réponse des cœurs à la promesse du Seigneur
Les trois premiers versets de ce chapitre sont étroitement liés au verset précédent du ch. 19. Nous avons vu là, en effet, le jugement de la bête et du faux prophète, et de leurs partisans. Ici nous trouvons ce que Dieu trouve convenable d’infliger, pour le moment, à celui qui est réellement le meneur invisible de tout ce mal — le diable. Il y a cependant cette différence que ce n’est pas Christ qui s’occupe de Satan en direct. Le brillant éclat de la venue de Christ a détruit la bête et le faux prophète, ils ont été pris et jetés tous deux vifs dans l’étang de feu. Le ch. 20:10 nous le redit, quand vient le tour de Satan d’y être aussi jeté, — dans ce même étang où sont déjà la bête et le faux prophète, et où ils seront tourmentés aux siècles des siècles. Mais pour le moment, l’heure de ce dernier et terrible jugement de Satan n’a pas encore sonné ; l’épreuve que Dieu fait du monde n’est pas entièrement terminée, et c’est là, peut-être, la raison pour laquelle Dieu n’intervient pas par Christ en personne, mais par le moyen d’un ange. Avant que Christ inflige à Satan le dernier coup qui l’écrase, un ange est employé pour restreindre sa puissance et sa liberté durant une certaine période. C’est ce que nous trouvons ici : Satan est lié pour mille ans ; et les saints ressuscités jugent le monde.
Plusieurs se sont prévalus du langage figuré de ce chapitre (comme d’ailleurs de tout le reste du livre) pour soulever des difficultés à son égard. Mais ce n’est pas du tout une objection raisonnable, car le langage figuré ou symbolique est employé d’un bout à l’autre de l’Écriture, de sorte que, si vous négligez une portion de la parole de Dieu pour cette raison, vous êtes en danger de la négliger toute entière. L’usage de symboles y est tout ce qu’il y a de plus banal. Prenez le langage dont Dieu se servit lui-même en Eden, et les paroles que le Saint Esprit a employées pour la consolation et le salut des âmes depuis le jour où l’homme a été déchu par le péché. Même là, on voit que Dieu se sert d’un langage rempli de métaphores. Mais si une âme est dans le besoin, et a le désir, par grâce, de comprendre Dieu, il y a toujours un chemin sûr. Dieu attend patiemment, et enseigne et conduit Ses enfants. Sans doute il y a place pour l’accroissement, mais il y a aussi place pour l’incrédulité, et le méchant cœur de l’homme peut découvrir aisément des difficultés contre lesquelles il heurte. Mais la foi trouve toujours le moyen de comprendre Dieu. Certes il y a des choses dures pour des êtres tels que nous ; mais la foi poursuit son sentier étroit à travers les obstacles et les dangers, parce que Dieu a dit : « ils seront tous enseignés de Dieu » (Jean 6:45). Toutefois, le langage dans lequel Dieu s’est plu à prononcer le jugement de l’ennemi, et à indiquer qu’il y aurait un Rédempteur, est d’une nature si figurée qu’un Juif incrédule tel que Josèphe a pu en dénaturer le sens, et l’appliquer simplement à la phobie naturelle des hommes pour les serpents, et à leur désir de s’en débarrasser partout où il y en a ! Bien sûr, une pareille idée provenait de l’inintelligence des pensées de Dieu, et du fait que l’historien Juif ignorait l’Écriture et la puissance de Dieu (cf Marc 12:24).
Souvenez-vous que je n’emploie pas ici le mot « ignorant » pour décrire le manque de savoir humain ; l’Écriture ne le fait pas non plus lorsqu’elle dit de certaines gens qu’ils sont « ignorants et mal affermis » (2 Pierre 3:16). Ils pouvaient être aussi sages que Platon et aussi prudents qu’Aristote, mais ils n’étaient pas instruits dans la volonté de Dieu et dans la connaissance de Ses pensées. Or, voilà la science que nous devrions apprécier et cultiver — une science qu’on ne peut pas glaner dans les écoles de ce monde. Bien au contraire, si quelqu’un met en œuvre le savoir humain comme moyen de comprendre les choses de Dieu, il est sûr de s’égarer, parce qu’en elle-même [per se] cette science ne procède jamais du Saint Esprit. Sans doute, celui qui a acquis du savoir humain peut en faire usage pour Dieu. Mais le point important, c’est que l’homme de Dieu doit se servir du savoir humain, et de tout ce qui est de l’homme, comme de choses à son service, tandis que l’esprit de l’homme, comme tel, fait du savoir son maître et en devient l’esclave. De là le danger que tout ce genre de choses ne devienne des obstacles positifs, y compris pour le chrétien, sauf dans la mesure où il est conduit par l’Esprit de Dieu. Le seul moyen possible de comprendre la parole de Dieu, c’est d’être soumis à l’Esprit Saint ; et le test, c’est Christ, parce que le but de l’Esprit est de Le glorifier. C’est pour cela que la croissance dans les choses de Dieu ne peut jamais se séparer de l’état moral de l’âme. Il est vrai qu’un homme qui a beaucoup avancé dans la connaissance de la vérité, peut tomber dans un mauvais état d’âme ; mais, en général, une saine connaissance des choses de Dieu et une sage application en grâce de la vérité découlent de la communion avec Dieu.
J’ai fait ces quelques remarques ne doutant pas que beaucoup de mes lecteurs reconnaissent par expérience qu’elles sont vraies ; mais elles apprendront peut-être à d’autres la raison de leur peu de progrès dans les choses de Dieu. Le vrai moyen de faire de grands progrès, c’est de chercher la gloire de Christ. Si un homme s’y applique, il apprendra, sans aucun doute ; mais tout est ouvert et clair devant lui, parce qu’il est dans le courant du Saint Esprit, dont le rôle est de prendre les choses de Jésus, et de nous les communiquer. « Quand il sera venu… Il me glorifiera : car il prendra de ce qui est à moi, et vous l’annoncera » (Jean 16:13-14). En effet, c’est Christ, et non pas l’homme, qui est le but et l’objectif final de l’Esprit.
Sans doute tous reconnaîtront que le tout premier livre de la Bible, la Genèse, est un parfait modèle de clarté. Parmi tous les livres, c’est le plus simple, mais il contient en même temps de profondes vérités. Que trouvons-nous donc dans ce livre où Dieu nous met comme dans Son école enfantine ? Il n’est pas rare d’y trouver du langage figuré, et avec des figures hardies. Si je dois donc mettre de côté les écritures qui emploient des figures, c’est toute la Bible que je dois mettre de côté, de la Genèse à l’Apocalypse.
La révélation de la semence de la femme qui doit briser la tête du serpent était la parole même dont dépend le salut, — la vérité bénie dont la foi s’est emparée de tout temps. La foi d’Abel, par exemple, qui s’est exprimée dans le sacrifice qu’il a offert, était fondée sur cette parole. Il a cru que le Seigneur Jésus allait venir (toutefois il n’a pas connu ce nom), Celui qui serait meurtri avant de détruire le serpent — Celui qui souffrirait, dont le talon serait brisé, quoiqu’en définitive il écraserait celui qui lui aurait causé cette souffrance.
Cela montre que la foi est tout à fait différente de la capacité d’expliquer les figures d’un passage, dont le sens général et la certitude peuvent quand même être vus clairement. C’est tellement vrai que, même aujourd’hui, si vous prenez un chrétien et que vous lui demandez l’explication de tous les détails de ce verset — ce qu’il faut entendre par la semence de la femme et celle du serpent, l’inimitié qu’il doit y avoir entre elles, la tête et le talon brisés — et même si ce chrétien est parfaitement certain qu’il y est question de Christ, et qu’il comprend le sens général de tout, il aurait pourtant beaucoup de difficulté à expliquer ce que chaque chose signifie. Mais c’est ici la bénédiction de la parole de Dieu, que les gens ne sont pas sauvés par le fait d’avoir des idées claires sur ce qui est obscur ; mais Dieu sait diriger les âmes qui sont sauvées sur le bon objet. Leur cœur repose sur un Christ qui a souffert pour elles, et qui a complètement détruit le destructeur. Elles peuvent ne pas être capables d’exposer clairement leurs pensées à d’autres ; mais la foi de celui qui est enseigné connaît la vérité peut-être aussi bien que celui qui l’enseigne, quoique ce dernier puisse seul la développer avec assez de clarté pour convaincre. Ceci montre que même quand Dieu emploie ces figures, la pensée générale est suffisamment claire. L’expliquer avec des paroles peut être d’une difficulté insurmontable pour certains, alors qu’ils n’auront point de doute quant au sens général.
Ici un ange descend du ciel. Dans la vision prophétique, cet ange a la clef de l’abîme et une grande chaîne en sa main (20:1). On le voit (20:2) saisir « le dragon, le serpent ancien qui est le diable et Satan », l’ennemi bien connu de Dieu et de l’homme ; on a ensuite l’usage fait de la clef et de la chaîne : la clef sert à l’enfermer et la chaîne à le lier solidement. Évidemment ce sont des figures, mais elles sont familières à l’esprit le plus simple. Personne, si ignorant soit-il, ne peut se méprendre sur leur sens. L’Esprit de Dieu se sert de choses tout à fait banales de la vie quotidienne, pour décrire un acte de jugement qui va bientôt s’accomplir par la providence de Dieu. Dieu a l’intention de restreindre la liberté d’action de Satan, et ne veut pas supporter de le laisser aller ça et là pour séduire le monde, comme il fait aujourd’hui ; mais ce ne sera que pour un temps (20:2, 3). Satan n’est pas jeté tout de suite dans l’étang de feu, mais il est fait prisonnier dans l’abîme. Ce terme désigne un lieu ordinairement sous le contrôle de Satan, mais qui sera alors celui de sa détention (voir ch. 9, 11 et 17).
Il est certain selon la parole de Dieu que Satan n’est pas encore lié ou enfermé, et qu’au contraire il va çà et là cherchant à tromper et à détruire les âmes. Le Nouveau Testament suppose toujours cette situation. Il est parfaitement clair que Satan est un ennemi encore en liberté, actif dans sa rébellion contre Dieu, et actif à propager le mensonge parmi les hommes, et à causer partout la ruine et la mort. Mais ceci aura un terme, lorsque la terre sera délivrée de ses tromperies pour une certaine durée limitée. C’est là tout ce que j’ai besoin de tirer du passage qui nous occupe. Je ne vais pas discuter si les mille ans sont à prendre au sens littéral ou dans un sens mystique, car ce n’est là qu’une question de détail et de degré. Mais il est incontestable que la période dont il s’agit a un commencement et une fin, et qu’elle n’a pas encore commencé, parce que Satan n’est pas encore lié. Les épîtres du Nouveau Testament supposent partout que Satan poursuit ses ruses, qu’il entrave l’œuvre de Dieu, qu’il faut lui résister et qu’il rôde un peu partout comme un lion rugissant cherchant qui il pourra dévorer (1 Pierre 5:8). Quand le temps sera venu pour qu’il perde sa liberté d’action, le changement sera donc immense. Dieu devra orienter les Siens vers d’autres parties de sa Parole, sans application dans le passé ou aujourd’hui. À bien des égards, les saints de cette période seront dans un état entièrement différent. En ce jour-là, Christ régnera sur la terre qu’Il aura sous Son contrôle direct ; assurément le changement sera immense, incalculable. Satan sera donc lié, et la discipline au moyen de la parole de Dieu dont aura alors besoin le peuple de Dieu ne sera pas du même genre que celle nécessaire maintenant aux saints objets des assauts de Satan et de ses accusations. Dieu agira avec eux selon la condition dans laquelle ils seront placés, et pour laquelle Sa Parole a pourvu.
Laissez-moi répéter que la difficulté que des personnes attribuent tellement à l’Apocalypse est surtout due à l’effet des préjugés avec lesquels elles abordent ce livre. On dit que tellement d’hommes pieux et instruits se sont trompés en l’interprétant, que les personnes simples n’ont pas moyen de l’étudier avec profit. Or une telle pensée est déshonorante pour Dieu, car Il a donné ce livre pour être compris par les Siens en général, le recommandant spécialement à Ses serviteurs (1:1 et 22:6). Prévoyant même qu’on croirait à tort de toute part qu’il s’agit d’un livre obscur, Il a fait des promesses spéciales de bénédiction à ceux qui liraient, écouteraient ou garderaient ce qui y est écrit. Pourquoi le diable a-t-il pour objectif de détourner les gens de la lecture de ce livre ? Pourquoi, dans ce qui porte le nom d’églises chrétiennes, lit-on toutes les autres parties de la Bible, mais rarement le livre de l’Apocalypse ? Certains lisent même les apocryphes, tandis qu’on ne fait usage çà et là que de quelques fragments des « véritables paroles de Dieu ! » pour les services publics. La raison en est qu’il n’y a aucun livre de la Bible que Satan redoute davantage, et à juste titre. En effet l’Apocalypse annonce d’abord son humiliation certaine par la puissance angélique, et ensuite sa destruction. Les autres portions de l’Écriture présentent ses succès partiels et temporaires, mais celle-ci s’appesantit sur sa ruine : c’est pourquoi il la redoute. Et encore, si nous avons ici le récit du renversement de Satan par Dieu, nous y voyons aussi pleinement exposé le terrible sommet de puissance qu’il atteindra avant la fin : car c’est un principe divin (de gouvernement) de ne jamais juger le mal avant qu’il ait rejeté toute la patience de Dieu, qu’il ait abusé de Sa bonté, et qu’il soit devenu tout à fait intolérable. Si les chrétiens avaient compris qu’en les amenant à négliger ce livre, Satan avait pour but de leur cacher ses ruses, sa puissance et sa ruine, ils se seraient mieux tenus sur leurs gardes. C’est là en effet la dernière chose que Satan veut que les gens suspectent, car alors ils se trouvent immédiatement sur le terrain où l’Esprit de Dieu veut les amener ; tandis que, si on regarde ce livre comme tellement obscur qu’il en est pratiquement incompréhensible, on demeure exposé à la séduction de Satan, quoique Dieu soit fidèle, qui ne permettra pas qu’on soit tenté au-delà de ce que l’on peut supporter (1 Cor. 10:13).
Le verset qui suit nous présente autre chose : la part des bienheureux. Que fera Christ, que feront ceux qui sont avec Lui, maintenant que la victoire est remportée ?
« Et je vis des trônes, et ils étaient assis dessus, et le jugement leur fut donné » (20:4).
Les deux personnages à la tête du mal dans le monde, dans les domaines civil et ecclésiastique, ont été sommairement jugés ; puis la source cachée de tout a été mise de côté « jusqu’à ce que les mille ans fussent accomplis ». Et maintenant, le Seigneur Jésus a pris le royaume du monde. Et encore, le but ici n’est pas tant de nous montrer le règne de Christ, parce que c’est une vérité avec laquelle on est bien familiarisé, qu’on trouve tout au long de l’Écriture, et qui était bien connue des saints de l’Ancien Testament. En effet, ils avaient tellement l’habitude d’attendre le Messie, et l’attente de Son royaume était si générale, même dans la masse inconvertie d’Israël, que Satan en prit avantage pour pousser les gens à refuser la grâce de Christ venant en humiliation. Bien sûr ici, le fait qu’Il règne est implicite, comme le pivot central de la bénédiction ; mais l’accent est spécialement mis, et avec beaucoup de clarté, sur ceux qui Lui appartiennent, ou au moins ceux qui ont souffert pour Lui.
C’est donc peut-être la raison pour laquelle la prééminence est donnée ici à ceux qui règnent avec Christ. Dieu s’intéresse profondément à Ses saints. Ils ont passé par une terrible épreuve et une rude tentation, et Il prend la peine de montrer que s’ils ont souffert, ils vont aussi régner avec Lui. C’est pour cela, à ce qu’il me semble, qu’il n’est pas dit ici : Je vis un grand trône, mais bien « Je vis des trônes » (*). De la même manière, le Seigneur Jésus-Christ a dit Lui-même aux disciples : « Dans la maison de mon Père, il y a plusieurs demeures ». Il ne parle pas d’une demeure particulière pour Lui, mais Il dit : « dans la maison de mon Père, il y a plusieurs demeures : s’il en était autrement, Je vous l’aurais dit ; Je vais vous préparer une place ». N’est-ce pas dans le même esprit que le prophète a eu la vision de ces trônes ? Et ils ne sont point inoccupés : « Je vis des trônes ; et ils étaient assis dessus, et le jugement leur fut donné ». Ils vont maintenant exercer le jugement.
(*) Daubuz signale une autre distinction qui mérite d’être remarquée, mais ce qu’il dit a besoin d’être corrigé. « Ces trônes », dit-il, « dont le nombre n’est pas déterminé [comme au ch. 4], doivent être soigneusement distingués des 24 trônes mentionnés là [4:4 ; 11:16] » (Perp. Comm. p. 925). — Je dis la même chose ; mais quand il continue en enseignant que les anciens sur des trônes représentent l’état de l’église chrétienne, et son institution primitive et militante, je rejette cette explication, comme la plupart des chrétiens. Toutefois, il est manifeste qu’il y a une différence notable entre cet état de choses [quant à l’église], et l’état millénaire qui nous est présenté ici. La seule solution satisfaisante, j’en suis convaincu, dépend de l’enlèvement des saints célestes (qu’il faut placer antérieurement à l’accomplissement du ch. 4), et de l’intervalle qui s’écoule avant leur apparition avec Christ en gloire (selon les ch. 19 et 20).
Évidemment, c’est un accomplissement de ce qui est dit en 1 Cor. 6. S’adressant aux saints à Corinthe, l’apôtre leur dit là : « Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde ? ». Or ici, ils sont en train de juger le monde. Mais il y a plus. Le Seigneur avait dit aux douze apôtres : « Vous serez assis sur douze trônes, jugeant les 12 tribus d’Israël » (Matt. 19:28 ; Luc 22:30). Bien des personnes pensent que cela ne sera accompli qu’au ciel. Mais un tel état de choses ne peut pas exister au ciel. Les douze tribus ne sont point en haut : elles n’existent comme telles que sur la terre. C’est ici-bas qu’elles seront un objet de gouvernement ; les prophètes le disent bien. Qu’y aura-t-il à juger au ciel par les saints ? Quand ceux qui sont glorifiés y seront, où seront les hommes pour juger au-dessus ? Tous seront bénis là. Les saints glorifiés ne feront plus partie de la scène du jugement.
Il est donc parfaitement clair que la scène décrite ici ne peut s’appliquer au ciel, et qu’elle suppose que la sphère du jugement est la terre. Ceux dont il s’agit règnent sur et au-dessus de la terre. Je dis : « au-dessus de la terre » car il n’y a pas de raison pour croire que ce monde sera le lieu d’habitation des saints de Dieu ressuscités. Ils peuvent la visiter de temps en temps, comme nous savons que le Seigneur Lui-même le fera ; mais la terre ne sera pas leur demeure propre. Déjà maintenant notre bénédiction est dans les lieux célestes en Christ ; évidemment il en sera encore bien plus ainsi, lorsque nous serons glorifiés. Notre bénédiction est céleste dans sa source, son caractère, et sa sphère. Mais tandis que nous jouirons ainsi de la bénédiction dans les lieux célestes, la terre sera la province inférieure et sujette, pleine d’intérêt et de gloire pour Dieu, mais un domaine relativement extérieur. Ce sera comme un homme ayant un grand domaine, siège principal de sa famille ; mais cela ne l’empêche point d’avoir des propriétés extérieures, et il doit quitter son habitation principale pour les voir. Ainsi en sera-t-il plus tard. La gloire d’en haut sera le repos et le centre des saints célestes ; mais à côté de cela, ils jugeront la terre. En conséquence, nous lisons ici : « Je vis des trônes, et ils étaient assis dessus, et le jugement leur fut donné ». C’était ceux que Dieu avait destinés à être les assesseurs du Seigneur dans le jugement et le gouvernement.
Mais ce n’est pas tout. « Et [je vis] les âmes de ceux qui avaient été décapités pour le témoignage de Jésus, et pour la parole de Dieu ». Notez ce mot « âmes ». Il est absolument correct. Nombreux sont ceux qui, tout en étant d’accord pour l’essentiel, à savoir que cette vision représente un jugement exercé par des saints célestes sur des hommes se trouvant sur la terre, comprennent que les « âmes » dont il est parlé ici signifient des personnes, selon l’usage ordinaire du terme dans l’Écriture. Mais je ne crois pas que ce soit la bonne explication. Pourquoi ne pas prendre ici le mot « âmes » comme désignant ceux qui sont dans l’état où l’âme est séparée du corps ? Ainsi, dans sa vision, l’apôtre Jean voit d’abord des trônes avec des personnes assises dessus ; en second lieu, il voit un certain nombre de personnes décorporées (dépourvues de leur corps), les âmes de ceux qui ont été décapités pour le témoignage de Jésus et pour la parole de Dieu ; et en troisième lieu, la classe composée de ceux « qui n’avaient pas rendu hommage à la bête, ni à son image, et qui n’avaient pas reçu la marque sur leur front et sur leur main ». Si l’apôtre avait voulu parler de personnes dans la condition ordinaire, il aurait pu dire : Je vis les âmes qui avaient été décapitées pour le témoignage de Jésus, etc., et non pas, « Je vis les âmes de ceux qui avaient été décapités ». Ainsi il est dit de Jacob : « Toutes les âmes qui vinrent en Égypte appartenant à Jacob… toutes les âmes, soixante-six » ; il n’est pas dit là : « toutes les âmes de ceux qui vinrent… » (Gen. 46:26 ; comparer Apoc. 6:9).
Ici donc, Jean voit devant lui en vision certains qui sont déjà ressuscités d’entre les morts et assis sur des trônes. « Je vis des trônes, et ils étaient assis dessus ». La désignation de cette classe semble être intentionnellement sous une forme générale, et implique « les armées » décrites précédemment (19:14). Ceux qui suivaient le Seigneur sortant du ciel pour combattre, sont maintenant Ses compagnons dans Son gouvernement de la terre. Ensuite, il voit la compagnie de ceux « qui avaient été décapités pour le témoignage de Jésus et pour la parole de Dieu ». Ceux-là ne sont pas encore ressuscités d’entre les morts, mais se trouvent encore dans la condition d’esprits séparés de leurs corps.
Mais il y a une troisième classe — les personnes qui n’avaient pas rendu hommage à la bête, et ne s’étaient pas non plus soumises à ses prétentions, sous aucune forme ni à aucun degré. Les deux dernières classes sont des classes de gens distinctes, mais connexes — des gens qui, lorsqu’on les a vus pour la première fois, étaient dans la condition d’âmes séparées du corps. « Et ils vécurent et régnèrent avec le Christ les mille ans », c’est-à-dire que les âmes furent réunies à leurs corps, car c’est bien sûr le sens de « ils vécurent ». On aurait pu penser qu’ils avaient perdu leur bénédiction, ou au moins le privilège de régner avec Christ pendant les mille ans. Il y avait des trônes, et des personnes dans leurs corps ressuscités les occupaient déjà. Qu’allait-il donc advenir, après l’enlèvement de ceux-ci au ciel, de ceux qui avaient été décapités pour la Parole de Dieu et le témoignage de Jésus et pour la Parole de Dieu, et qui n’allaient être ressuscités d’entre les morts que longtemps après ? Quelle portion allaient-ils avoir, — non seulement eux, mais aussi la dernière classe qui, encore plus tard, refusa de rendre hommage à la bête ou de recevoir sa marque ? « Ils vécurent ». Ils apparaissent maintenant, juste avant le règne, réunis à leurs corps ; et, ensemble avec ceux qui ont été ressuscités antérieurement, et qui sont déjà assis sur des trônes, ils règnent avec Christ mille ans (*).
(*) « Je ne puis consentir (dit le Doyen Alford), à détourner les paroles ou les mots de leur sens manifeste, et de la place chronologique qu’ils occupent dans la prophétie, en raison de difficultés ou de risques d’abus se rattachant à la doctrine du millénium. Ceux qui vécurent après les apôtres, et l’église tout entière pendant 300 ans, les comprirent dans leur sens simple et littéral ; et c’est un étrange spectacle aujourd’hui de voir des commentateurs parmi les plus ardents à révérer l’antiquité, se plaire à jeter de côté l’exemple le plus incontestable d’accord unanime présenté par l’antiquité primitive. Quant au texte lui-même, il est impossible d’en tirer de manière légitime l’interprétation dite spirituelle à la mode aujourd’hui. Si, dans un passage ou sont mentionnées deux résurrections, d’abord celle concernant certaines âmes de ceux qui avaient été décapités (ψυχαι εζησαν), et ensuite celle concernant le reste des morts (νεκροι) seulement à la fin d’une période déterminée suivant la première, — si pour les décapités (εζησαν) d’un tel passage, la première résurrection se comprend comme une résurrection spirituelle avec Christ, tandis que pour les autres, la résurrection signifie une résurrection littérale hors des tombeaux — alors c’est la fin de tout le sens du langage, et cela revient à balayer dans l’Écriture tout témoignage positif à quoi que ce soit. Si la première résurrection est une résurrection spirituelle, alors la seconde l’est aussi, ce que personne n’aura l’audace de maintenir, me semble-t-il ; mais si la seconde résurrection est bien une résurrection au sens littéral, alors la première l’est aussi, ce que je maintiens et reçois comme un article de foi et d’espérance, en accord avec toute l’église primitive et avec bon nombre des meilleurs commentateurs modernes » (vol. iv. partie 2). J’ajoute seulement quant à ce qui est dit sur « la place chronologique », que, comme ceux qui sont assis sur les trônes (le premier groupe de cette vision) ne sont pas représentés comme des âmes, ainsi aussi il ne faut pas les inclure dans l’expression « ils vécurent ». Le fait qu’ils sont vivants et destinés à régner avec Christ, ressort assez clairement du fait qu’ils sont assis sur des trônes. En ce qui concerne les martyrs qu’on trouve après, et les confesseurs de la crise finale, ils rejoignent les autres dans la résurrection, et participent au règne dès son tout début.
Nous avons donc un éclairage lumineux et intéressant jeté sur et par l’Apocalypse. Il s’y trouve, en effet, des passages que ce verset aide à clarifier, tandis que, réciproquement, ces passages renvoient un éclairage sur ce verset qui reste incompréhensible si l’on ne voit pas ces distinctions.
Regardons encore un peu plus les différentes classes dont il est parlé ici. « Je vis des trônes et ils étaient assis dessus ». Évidemment, la première classe est introduite tout à fait abruptement. Il ne nous est pas dit d’où ils viennent, ni qui ils sont, probablement parce que le Saint Esprit tient pour acquis que nous en savons assez sur leur compte au moyen des indications qui précèdent dans ce livre de l’apocalypse. Juste avant, ils étaient sortis du ciel ouvert (ch. 19). Lorsque le Seigneur Jésus, monté sur le cheval blanc, est sorti en guerrier, les armées qui étaient là Le suivaient sur des chevaux blancs, vêtues de fin lin, blanc et pur. J’ai déjà essayé de montrer qu’il s’agissait là de saints déjà enlevés au ciel antérieurement, et dont la présence au ciel a continué d’être montrée à plusieurs reprises depuis le début du ch. 4, sous le symbole des vingt-quatre anciens couronnés. On ne contestera guère que ces anciens représentent les saints célestes. Je ne prétends pas décider s’il s’agit exclusivement de l’Église, ou non. Très vraisemblablement, ils comprennent à la fois l’Église et les saints de l’Ancien Testament ; mais une chose au moins est très claire, c’est qu’il s’agit de saints célestes. Ils suivent Christ lorsqu’il sort du ciel pour faire la guerre à la bête, etc ; et maintenant que Christ prend Son trône, qu’Il n’apparaît pas simplement en vainqueur et conquérant s’avançant sur un cheval blanc, mais qu’Il prend le trône pour régner triomphalement, on les voit aussi sur des trônes avec Lui (« Je vis des trônes, et ils étaient assis dessus, et le jugement leur fut donné »).
Tous les croyants savent que, dans un sens ou dans un autre, Christ doit siéger sur Son trône pour juger ; mais certains pensent que ce serait une position trop élevée pour des chrétiens que d’être assis avec Lui sur des trônes ; d’autres ont spiritualisé l’enseignement positif des passages de l’Écriture sur l’espérance des saints et l’avenir du monde jusqu’à le transformer en brouillard, et ils imaginent qu’ils seront simplement à une vague distance du ciel, jouissant d’un bonheur éternel avec Christ, mais sans rien avoir à faire avec la terre. Pour moi, je ne crois pas que le gouvernement de ce monde soit en aucune manière la partie la plus élevée de la gloire des saints ; mais ce sera un élément important de la gloire de Christ, et donc nullement indigne de l’Église. Personne ne peut méconnaître cela, ou le nier, sans faire une perte pour son âme. Lorsqu’on le saisit comme il faut, il en résulte une influence pratique non négligeable. Car si je dois juger le monde en ce temps-là, Dieu ne veut pas que je me mêle avec le monde maintenant. C’est justement l’argument dont se servait l’apôtre Paul pour blâmer les croyants de Corinthe qui avaient recours aux tribunaux des hommes. C’était en dessous de la vocation chrétienne. Bien sûr, je n’entends pas par-là amoindrir les autorités qui existent. Un chrétien doit leur montrer du respect en tout temps et en toutes choses. Il peut se permettre d’être l’homme le plus humble du monde, car il est le plus élevé. Son exaltation est de la meilleure espèce, et brillera de son plus vif éclat quand ce monde aura été réduit à rien. Quelle merveille d’avoir déjà reçu l’onction royale avant l’apparition effective de la gloire, comme David qui fut sacré roi longtemps avant d’être effectivement intronisé. L’huile sainte, l’onction royale, étaient sur lui alors même que le roi Saül le pourchassait sur les montagnes. C’est ainsi que, dans un sens plus élevé encore, nous sommes aussi oints du Saint Esprit non seulement pour être capables d’entrer dans les choses de Dieu, mais parce que nous sommes faits rois et sacrificateurs pour Dieu.
C’est pourquoi Dieu n’attend pas seulement de nous que, comme sacrificateurs, nous Lui rendions culte maintenant en esprit, mais qu’en toutes circonstances nous gardions le sens de notre dignité comme Ses rois (comp. 1 Pier. 2:5, 9). Le monde peut se moquer de nous, et nous traiter de fanatiques : il a fait pire à l’égard de Dieu Lui-même. Hélas ! les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mœurs, et les chrétiens eux-mêmes sont déchus sur ce point de la vérité qui est selon la piété. Ils ont cherché à avoir à la fois le monde et Christ.
Certains objecteront que ce n’est là, au mieux, qu’une espérance future sans effet pour le présent. Mais l’Esprit de Dieu s’adresse à nous comme possédant ce trésor maintenant, comme ayant en principe tout ce que Christ va bientôt déployer en nous dans Son royaume. C’est pourquoi nous sommes responsables vis-à-vis de Dieu de marcher maintenant dans la foi à cette vérité. Il en a été ainsi, dans le sens le plus élevé, du Seigneur Jésus Christ. Il savait qu’il était roi ; et quand Satan est venu Lui montrer tous les royaumes du monde et leur gloire, et qu’il a offert de les Lui donner s’Il voulait se prosterner et lui rendre hommage, le Seigneur lui opposa un refus absolu. Mais Satan a répété, pour ainsi dire, son offre à l’Église, et à la longue, celle-ci a accepté. En recherchant la gloire du monde, elle a cherché l’honneur là où Satan est le prince. Peut-on lire la Bible sans reconnaître la vérité de cela ? Que fit le Seigneur Jésus quand les hommes voulurent Le faire roi ? Il se retira loin d’eux (Jean 6:15). Dans Sa comparution devant Pilate, Il admit qu’Il était roi, mais Il ajouta : « Mon royaume n’est pas de ce monde… maintenant, mon royaume n’est pas d’ici » (Jean 18:36). Bientôt il le sera. « Le royaume du monde de notre Seigneur et de son Christ est venu » (Apoc. 11:15). Et quand il passera entre Ses mains, le règne des chrétiens commencera. Les Siens auront part au royaume avec Lui. La foi attend cela ; et en attendant, nous sommes mis à l’épreuve maintenant, « comme n’ayant rien, et toutefois possédant toutes choses » (2 Cor. 6:10).
Plusieurs estimeront que c’est de la présomption que de prétendre à un pareil privilège maintenant. Mais il n’en est pas ainsi. C’est de la foi, et elle a pour fruit une séparation croissante d’avec le monde. Le principe est ce qui importe. Si un homme fait tous ses efforts pour une bagatelle de ce monde qui soit un objet qui compte pour lui — en vue de se distinguer d’une manière ou d’une autre, ne serait-ce que de manière insignifiante, — voilà une marque du travail de l’ennemi. Dieu attend une sainte séparation d’avec le monde chez tous Ses saints : ils ne sont pas du monde, comme Christ n’en est pas. Seulement, que cette séparation soit selon la spiritualité et l’intelligence spirituelle de chacun. Aussi quand un chrétien commence sa marche par la foi, Dieu ne lui dit pas tout d’un coup : Il faut que tu quittes ceci, et que tu renonces à cela ; Il laisse place à l’exercice de la grâce et au progrès dans la vérité. Le jour où le salut est entré dans la maison de Zachée, le Seigneur ne lui dit pas un mot de sa position odieuse dans le monde, comme Juif collecteur d’impôts pour les Romains. Dans le cas de Corneille, il ne nous est pas dit non plus qu’il ait dû quitter immédiatement sa position de centurion de la cohorte Italique : établir et imposer des règles d’une telle façon, aurait détruit tout ce qu’il y a de béni dans les voies de Dieu. L’Église n’est point gouvernée par un code de formalités. Elle est conduite par la puissance du Saint Esprit selon Sa Parole. Il en est du chrétien comme d’un enfant : aux jours de ses tendres années, il parle comme un enfant, comprend comme un enfant, et pense comme un enfant. On ne peut pas désirer trouver chez les petits enfants les manières des adultes. Il en est de même des enfants dans le domaine spirituel. Le Seigneur n’attend pas que les petits enfants s’occupent comme les hommes et les pères en Christ. Il laisse place à la croissance dans la grâce. Si un homme est en mauvais état, il se prévaut de la grâce pour demander s’il y a du mal à ceci, s’il y a quelque commandement pour cela. Il arrive qu’une personne s’abstienne d’actes mauvais par crainte d’être perdue si elle persiste dans cette voie. Mais ce qui a du prix pour Dieu, c’est l’obéissance de celui qui est simple de cœur ; c’est faire la volonté de Dieu parce que c’est Sa volonté, parce que c’est un délice de faire Sa volonté, parce que cela Le glorifie. Il nous sauve par Sa grâce, et nous sauve de manière à ne pas voir une seule tache en nous. Et maintenant Il nous dit : Si Je t’ai sauvé et t’ai établi dans une position de bénédiction si sûre et si parfaite devant moi, ce que J’attends de toi, c’est ton cœur, la confiance de ton cœur en Mon amour et Ma sagesse, ton adoration et ton obéissance.
Dieu nous donne aussi la connaissance du royaume à venir auquel nous devons participer avec Christ notre Seigneur. Il est bon de se souvenir que le Saint Esprit n’amène pas le royaume, et que ce n’est pas Lui le roi, mais le Seigneur Jésus seul. La présence de Christ est donc essentielle au royaume, au moins pour ce qui est de sa pleine manifestation. Si Christ n’était pas là personnellement, ce serait un royaume sans roi ; c’est pourquoi il est dit : « ils vécurent et régnèrent avec Christ mille ans ». Christ est Lui-même présent, et c’est Lui le centre de toute gloire, de toute bénédiction, et de toute joie. Au ch. 19, Christ et les Siens sortent du ciel en vue du jugement, et là-dessus, au ch. 20, le royaume est établi en paix sur la terre.
Ce qui précède peut servir de réponse à la première question : qui sont ceux que Jean vit en premier, assis sur des trônes, et bien sûr dans des corps ressuscités ? Ce sont des saints célestes, comprenant l’église, si ce n’est elle seule.
La question suivante est celle-ci : Qui sont ceux dont les âmes ne sont pas vues d’emblée réunies à leurs corps ? La réponse est claire. Si Apoc. 4 et 5 nous présentent les saints glorifiés sous le symbole des 24 anciens, et correspondant à ceux du début de notre verset, le ch. 6 nous introduit dans une autre scène. Il nous apprend que, postérieurement à la scène des deux chapitres 4 et 5, il y aura des saints appelés à souffrir, et que Jean a vu leurs âmes sous l’autel. Ils avaient été égorgés pour la parole de Dieu et pour le témoignage qu’ils avaient rendu, et ils criaient à Dieu pour qu’Il juge et venge leur sang sur ceux qui habitent sur la terre. Qui sont ces saints qui font appel à la vengeance de Dieu ? On peut répondre avec certitude que ce n’est pas l’Église dans ce cas. Ce n’est pas possible car elle a déjà été enlevée au ciel. De plus, on ne voit jamais dans l’Écriture l’Église en train d’invoquer Dieu pour qu’Il juge et venge le sang des saints versé sur la terre. Ce serait fausser le dessein spécifique de Dieu à l’égard de l’église et des chrétiens individuellement. Nous sommes la lettre de Christ (2 Cor. 3:3), toujours expressément appelés, depuis la croix, à manifester la gloire de Dieu en Christ, et Sa grâce envers le monde, permanente depuis la croix. Et de même que Dieu a laissé les hommes mettre à mort Son propre Fils, et que, bien loin de juger ce crime, Il en a pris seulement occasion pour montrer encore plus de grâce, de même l’Église est appelée à souffrir, jusqu’à la mort s’il le faut, pour l’amour du nom de Christ, sans aucune pensée ou désir de faire appel à la vengeance.
Il y en a un exemple remarquable dans la personne d’Étienne. Il a été traité cruellement et ignominieusement : on l’a jeté hors de la ville pour le lapider. Mais s’étant mis à genoux, il a crié : « Seigneur, ne leur impute point ce péché ». C’est à voix forte qu’il a ainsi intercédé, car c’était quelque chose que son cœur ressentait vivement ; et le Saint Esprit a voulu que ceux qui l’entouraient sache le désir de son cœur à leur sujet, alors qu’ils étaient coupables de son sang. Était-ce là un appel à la vengeance de Dieu ? Tout le contraire, et il en a toujours été ainsi. Voyez les apôtres Pierre et Jean, battus, ils se retirent du sanhédrin en se réjouissant d’avoir été estimés dignes de souffrir des opprobres pour le nom de Jésus. Voyez aussi la première épître de Pierre ; qu’y trouve-t-on, sinon le principe : « Si, en faisant le bien, vous souffrez, et que vous l’enduriez, cela est digne de louange devant Dieu, car c’est à cela que vous avez été appelés » (1 Pierre 2:20-21).
Certes, le monde ne pourrait pas subsister un jour sur une pareille base ; il s’effondrerait si le mal devait ne pas être puni, et si ceux qui font le bien et souffrent injustement devaient se borner à remercier. Mais de telles exhortations ne sont pas données pour le monde (on le croit souvent, à tort). On oublie que l’Église a été appelée à être un témoin du ciel, à être l’expression de la pensée et de la grâce de Christ, tout en marchant sur le terre. C’est là notre « seule chose », notre grande affaire ici-bas. Bien sûr cela n’empêche pas de se proposer ce qui est honnête devant tous les hommes : il est juste que le chrétien le fasse ; mais qu’il prenne bien garde comment il le fait. Notre conduite dans les circonstances les plus ordinaires de la vie devrait être un témoignage à ce fait capital, que nous ne sommes pas du monde ; que nous ne cherchons pas l’honneur ni la considération dans le monde, mais à glorifier Christ dans le ciel ; et qu’au lieu de chercher à favoriser les plans des hommes, et à être un ornement dans le monde, notre mission est de lui faire connaître Christ, et de faire Sa volonté durant le peu de temps où nous sommes ici-bas.
Mais revenons au sujet qui nous occupe. Nous avons vu que, quoique les anciens assis sur des trônes soient dans le ciel (Apoc. 4 et 5), il se trouve ensuite des saints sur la terre, de nouveaux témoins appelés à souffrir jusqu’à la mort pour la parole de Dieu et le témoignage de Jésus — mais qui, à leur mort, crient à Dieu de venger leur sang sur leurs ennemis. Et ce n’est pas mauvais de leur part, quoiqu’une telle pensée nous soit complètement étrangère, parce que ce n’est pas la volonté de Dieu à notre égard. Mais quand Dieu, après avoir achevé de former l’Église et l’avoir prise au ciel, aura suscité de nouveaux témoins sur la terre, Il commencera à agir Lui-même en jugement avec le monde ; et en conséquence, lorsque ces saints martyrs crieront à Dieu contre leurs adversaires, ils seront en communion avec Lui. Or, c’est ce que la foi cherche toujours, la communion avec Dieu dans ce qu’Il est en train de faire ou qu’Il va faire. Aujourd’hui Dieu n’intervient pas pour juger le monde, aussi Ses saints ne doivent pas Lui demander, comme ceux-là, d’exercer le jugement et la vengeance. Aujourd’hui Dieu supporte la méchanceté du monde avec une patience parfaite, et pour cette raison un chrétien doit plutôt demander à Dieu de faire tourner Sa grande patience en salut pour les âmes. Mais une fois Apoc. 6 accompli, Dieu versera les jugements les uns après les autres ; et les témoins pour Dieu en ce jour-là lui demanderont de juger, et ils auront raison de le faire. Ils adopteront le langage des Psaumes, qu’en général on comprend et on applique si mal aujourd’hui, mais qui sera parfaitement approprié aux circonstances d’alors, Dieu le leur ayant fourni prophétiquement.
Ceci montre qu’après l’enlèvement de l’Église, il y aura un état de choses bien différent de celui d’aujourd’hui. Dieu commencera alors à agir en jugement ; et ceux dont les cœurs seront réellement convertis, qui désireront la gloire de Dieu, seront dans une grande obscurité par comparaison à l’église. Malgré tout leur témoignage pieux sera intolérable aux puissances du monde, qui verseront leur sang comme de l’eau. Les martyrs crieront à Dieu pour qu’Il intervienne en jugement, et Il les écoutera. Voyez les versets 6:9, 10, 11 : « Et lorsqu’il ouvrit le cinquième sceau, je vis sous l’autel les âmes de ceux qui avaient été égorgés pour la parole de Dieu et pour le témoignage qu’ils avaient rendu ». Remarquez combien cela concorde avec les deux classes mentionnées au ch. 20:4 : « Je vis les âmes de ceux qui avaient été décapités pour le témoignage de Jésus et pour la parole de Dieu ». Notez la réponse. Elles crient à haute voix : « Jusques à quand, ô Souverain, saint et véritable » etc. « Et il leur fut donné à chacun une longue robe blanche ; et il leur fut dit qu’ils se reposassent encore un peu de temps, jusqu’à ce que, et leurs compagnons d’esclavage et leurs frères qui devaient être mis à mort comme eux, fussent au complet » (Apoc. 6:11). Lorsqu’après l’enlèvement de l’Église, les premiers martyrs sont appelés à être mis à mort, il leur est parlé d’une autre classe de martyrs qui, ultérieurement, devra être mise à mort comme eux avant l’achèvement du jugement.
C’est exactement ce que nous trouvons au ch. 20. Il y a d’abord ceux qui sont assis sur des trônes, investis du pouvoir royal de juger ; il y a ensuite ceux qui avaient été décapités pour le témoignage de Jésus et pour la parole de Dieu ; et en troisième lieu, leurs frères qui, comme il a été dit au ch. 6, n’étaient pas encore au complet. Ces derniers refusèrent d’adorer la bête quand son idolâtrie est apparue au grand jour, etc., et que le choix fut donné d’être mis à mort ou de l’adorer : ils furent fidèles jusqu’à la mort. Ce sont eux qu’on retrouve ici. « Je vis… et ceux qui n’avaient pas rendu hommage à la bête ni à son image, et qui n’avaient pas reçu la marque sur leur front et sur leur main ». Ainsi l’Apocalypse donne la réponse complète au sujet de ces trois classes. Les 24 anciens correspondent à ceux qui sont assis sur des trônes ; la deuxième classe sont les âmes de ceux qui ont été décapités pour le témoignage de Jésus, etc. selon le ch. 6 ; et la dernière partie du livre nous présente « leurs frères qui devaient être mis à mort comme eux » (Apoc. 6:11), et en vue desquels il leur avait été dit d’attendre. En Apoc. 13:7 nous lisons qu’il fut donné à la bête de faire la guerre aux saints, et de les vaincre.
Il y a plus encore. La dernière moitié du même chapitre 13 contient une autre partie du tableau, et montre comment ces saints en sont venus à être caractérisés en Apoc. 20 comme ceux qui n’ont pas rendu hommage à la Bête ni à son image, et n’ont pas non plus reçu sa marque sur leur front, ni sur leur main. Au v. 14-15 du ch. 13, il est dit que la seconde bête « séduit ceux qui habitent sur la terre, à cause des miracles qu’il lui fut donné de faire devant la bête, disant à ceux qui habitent sur la terre de faire une image à la bête qui a la plaie de l’épée et qui a repris vie. Et il lui fut donné de donner la respiration à l’image de la bête, afin que l’image de la bête parlât même, et qu’elle fît que tous ceux qui ne rendraient pas hommage à l’image de la bête fussent mis à mort ». Ceci concerne très clairement la dernière ou troisième classe. Ceux auxquels se réfèrent le passage 14:12-13 sont probablement les mêmes.
Mais voyez encore ch. 15:2 : « Je vis comme une mer de verre, mêlée de feu, et ceux qui avaient remporté la victoire sur la bête, et sur son image, et sur le nombre de son nom, se tenant sur la mer de verre, et ayant des harpes de Dieu ». L’Apocalypse répond donc pleinement à la question : Qui sont donc ces saints ? Elle nous présente d’abord les saints ressuscités, qui ont été enlevés au ciel, et qui en sortent avec Christ. C’est la raison pour laquelle ils sont vus séparés des deux autres classes. Ils apparaissent tout d’abord assis sur des trônes, parce qu’ils ont déjà été changés à la ressemblance du corps glorieux de Christ. Mais les autres sont vus simplement, jusqu’à ce moment, comme des âmes, et naturellement non glorifiés. L’Écriture parle de corps glorifiés, mais jamais d’âmes glorifiées. L’âme du croyant va pour être avec Christ après la mort ; mais il faut qu’elle soit réunie avec le corps, avant qu’on puisse dire qu’elle est dans une condition glorifiée. Le seul état parfait est celui où nous porterons l’image du céleste (1 Cor. 15:49), lorsque nous serons ressuscités ou changés à la ressemblance de Christ.
Si nous regardons 1 Cor. 15, nous verrons cela tout à fait clairement. Il y est dit : « Le premier homme est [tiré] de la terre, — poussière ; le second homme est [venu] du ciel. Tel qu’est celui qui est poussière, tels aussi sont ceux qui sont poussière ; et tel qu’est le céleste, tels aussi sont les célestes. Et comme nous avons porté l’image de celui qui est poussière, nous porterons aussi l’image du céleste. Or je dis ceci, frères, que la chair et le sang ne peuvent pas hériter du royaume de Dieu, et que la corruption non plus n’hérite pas de l’incorruptibilité. Voici, je vous dis un mystère : Nous ne nous endormirons pas tous, mais nous serons tous changés… et les morts seront ressuscités incorruptibles, et nous, nous serons changés. Car il faut que ce corruptible [non pas simplement : « dépouille la corruption », mais] revête l’incorruptibilité, et que ce mortel [non pas simplement « laisse tomber cette enveloppe mortelle », comme on dit, mais] revête l’immortalité. Or quand ce corruptible aura revêtu l’incorruptibilité, et que ce mortel aura revêtu l’immortalité [évidemment l’état glorifié], alors s’accomplira la parole qui est écrite : La mort a été engloutie en victoire » (1 Cor. 15:47-54). Or, ce n’est point quand un chrétien meurt et déloge pour être avec Christ, que la mort est engloutie en victoire, mais c’est lorsque Christ vient, et que les morts sont ressuscités, et les vivants transmués [=changés]. Ce qui a eu lieu jadis individuellement pour Hénoc et pour Élie, aura lieu à grande échelle à la venue de Christ. Alors tous les saints vivants seront changés, et s’en iront pour être avec le Seigneur, sans passer par la mort. Ceux-ci, ressuscités ou changés, et enlevés au ciel, en reviendront avec Christ, et sont vus ici assis sur des trônes.
Mais qu’advient-il de ces saints de la terre qui sont appelés après que les saints précédents ont été enlevés pour aller à la rencontre du Seigneur ? L’Apocalypse nous montre leurs souffrances pour la justice, et leur mort. Que deviennent-ils après ? L’Église a déjà été ressuscitée et glorifiée, et ces martyrs sont mis à mort avant que le règne de Christ commence. Eux qui ont souffert, doivent-ils donc ne pas régner ? Doivent-ils perdre leurs bénédictions parce qu’ils ont résisté jusqu’au sang en combattant contre le péché ? C’est impossible. « Je vis les âmes de ceux qui avaient été décapités… et ils vécurent et régnèrent avec Christ les mille ans ». Ils sont eux aussi ressuscités d’entre les morts, et ils rejoignent les autres déjà glorifiés, et tous règnent ensemble avec Christ dans « le royaume ».
Je pense, mais je ne donne ceci que comme une opinion, que c’est à ce moment-là, ou à peu près, que leur résurrection a lieu. La bête et le faux prophète ont été renversés ; Satan a été jeté dans l’abîme, et le règne millénaire de Christ et de Ses saints ressuscités est maintenant sur le point de commencer. Le Seigneur attend, pour ainsi dire, le tout dernier moment. Il veut qu’aucune âme de Ses saints martyrs ne soit laissée de côté pour jouir de cette récompense spéciale qui est la leur. La bête avait persécuté jusqu’à la fin, et Dieu diffère jusqu’à ce moment-là, afin que tous ceux qui ont souffert avec Christ soient inclus dans le privilège d’être glorifiés avec Lui. Si le récit de la résurrection avait été donné lorsque les saints ressuscités antérieurement ont été transportés au ciel (c’est-à-dire avant Apoc. 4), il aurait pu y avoir doute et anxiété quant au sort de ceux qui devaient souffrir après l’enlèvement de l’Église. On comprend pourquoi c’est ici que nous trouvons cette mention de la résurrection. Dieu avait particulièrement pour but de consoler ceux qui auraient ultérieurement à souffrir et à mourir pour Christ, et de leur faire voir qu’Il ne les oublierait pas. Ils ressuscitent maintenant pour rejoindre les saints déjà ressuscités, « et ils vécurent et régnèrent avec le Christ les mille ans ». Dieu diffère leur résurrection jusqu’au moment où va commencer le règne de Christ, et alors ceux qui avaient entre temps souffert pour Lui ressuscitent.
« Et le reste des morts ne vécut pas jusqu’à ce que les mille ans fussent accomplis. C’est la première résurrection » (20:5).
« Le reste des morts » : de quels morts s’agit-il ? Le commencement du verset 4 comprend, à mon avis, non seulement l’Église, mais aussi les saints de l’Ancien Testament ; c’est-à-dire, tous les saints célestes enlevés pour être avec Christ, quand Il viendra en l’air pour les prendre auprès de Lui. Puis, nous avons eu la première compagnie de martyrs avant que la bête arrive au sommet de sa puissance, et enfin la dernière compagnie de martyrs qui ont refusé de rendre hommage à la bête. Ce sont là les trois classes de saints, maintenant tous en vie et régnant avec Christ. L’expression « le reste des morts » doit donc désigner des méchants morts, car la première résurrection comprenait tous les justes morts, et correspond, de fait, à ce que notre Seigneur a appelé « la résurrection des justes » (Luc 14:14), sauf qu’elle est plus détaillée, et sa portée probablement plus vaste. Il y a donc une résurrection spéciale pour les justes, sans que les passages qui en traitent disent un mot des injustes. Il y a aussi une résurrection des injustes ; lorsque l’apôtre Paul parle en Actes 24 devant Félix, il rend témoignage de sa foi en la résurrection, tant des justes que des injustes. Mais quand le Seigneur Jésus Christ cherche à élever la conscience de Ses disciples vers ce qui est bon et a du prix devant Dieu, Il ne met en avant que la résurrection des justes (Luc 14:14).
Mais ce n’est pas tout. Il y avait des gens qui cherchaient à tourner la doctrine de la résurrection en ridicule. Dans une autre occasion, des Sadducéens vinrent à Lui, soulevant une difficulté à l’égard de cette doctrine du fait d’une femme supposée avoir successivement épousé sept frères, tous morts les uns après les autres, et la femme étant morte à son tour la dernière. En la résurrection, demandaient-ils, duquel des sept serait-elle donc la femme ? Le Seigneur fait voir sur-le-champ que la difficulté soulevée provenait de l’ignorance de l’Écriture et de la puissance de Dieu. En la résurrection, on ne se marie pas, ni on n’est donné en mariage, mais on sera comme les anges : c’est-à-dire comme eux sous ce rapport, mais non pas en toutes choses car les saints ressuscités jugeront les anges ; mais semblables à eux en ceci qu’il n’y aura pas de distinction de sexe (on ne se mariera pas ni ne sera donné en mariage). « Et aussi ils ne peuvent plus mourir » (Luc 20:36). Mais Il ajoute : « Ceux qui seront estimés dignes d’avoir part à ce siècle-là [ou : dispensation] et à la résurrection d’entre les morts » (Luc 20:35), etc. Ce serait une manière de parler extraordinaire si tous ressuscitaient en même temps ! « Ceux qui seront estimés dignes d’avoir part à ce siècle-là ». Ce dernier terme « siècle » ne se réfère pas au monde matériel, mais à une dispensation ou ère particulière, à laquelle ceux qui en sont indignes n’accèdent pas. Pesez bien la force de cette proposition. La résurrection des saints a lieu dans un siècle qui leur est particulier. « Ceux qui seront estimés dignes d’avoir part à ce siècle-là [les autres morts ne ressuscitent qu’après] et à la résurrection d’entre les morts ». La résurrection de Christ ne fut pas simplement une résurrection des morts, mais d’entre les morts. Il laissa les autres morts tranquilles dans leurs tombeaux. Quelques-uns des saints qui étaient morts ressuscitèrent avec Lui, ou plutôt ils sortirent de leurs sépulcres après Sa résurrection ; mais la grande masse des morts ne fut affectée en rien par la résurrection de Christ. Il en sera de même, en principe, pour la résurrection des saints : ce doit être une résurrection d’entre les morts. Le reste des morts doit ressusciter à une autre époque : mais ceux qui en sont estimés dignes, auront part à ce siècle-là, et à la résurrection d’entre les morts. Ils ne mourront plus jamais. Dieu pouvait-il montrer d’une manière plus forte que par ce langage, qu’il y aurait une résurrection de Ses saints à part de celle des autres hommes, et antérieure à le leur ?
Comparez aussi le langage de l’apôtre Paul en Phil. 3:11 : « Si, en quelque manière que ce soit, je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts ». Certes les versions ordinaires disent « à la résurrection des morts », mais je n’hésite pas à dire que c’est une erreur complète. Le véritable et unique sens du verset, d’après les meilleures autorités, est, « Si, en quelque manière que ce soit, je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts ». Ce changement peut sembler mineur à quelques-uns, mais si nous tenons à connaître la pensée de Dieu, cela fait une lourde différence. En effet, dès l’instant où on lit « la résurrection d’entre les morts », cela implique que les autres morts restent dans leurs sépulcres, et qu’il y a une résurrection qui n’est pas commune à tous les hommes, bons et méchants, mais qui est seulement le partage des bien-aimés de Dieu. L’apôtre estimait cette résurrection si brillante et si heureuse qu’il dit en effet : « Je ne me mets pas en peine des souffrances et des troubles que je puis rencontrer, quel que soit la route — pourvu seulement que je me trouve là ; c’est ce que j’attends et ce que je désire, coûte que coûte ». Car quand il disait : « si en quelque manière que ce soit, je puis parvenir à la résurrection », il n’entendait pas exprimer l’ombre d’un doute quant au fait d’avoir part à la première résurrection, mais plutôt, il attachait au prix une valeur telle qu’il ne se souciait pas de ce que serait le chemin de souffrances du chemin qui le menait au but.
Maintenant, reportons sur l’Apocalypse la lumière qui jaillit de ce passage. L’expression « le reste des morts » fait allusion aux méchants morts. On avait sous les yeux la résurrection de tous les saints délogés jusqu’à la manifestation du royaume. « Mais », ajoute le prophète, « le reste des morts ne vécut pas jusqu’à ce que les mille ans fussent accomplis » (20:5). Ce passage n’offre pas de réelle difficulté ; mais les gens ont leurs propres pensées, leurs opinions, avec lesquelles ils n’arrivent pas à faire cadrer l’Écriture, alors que tout est aussi clair que Dieu pouvait le faire. « C’est là la première résurrection. Bienheureux et saint celui qui a part à la première résurrection » (20:6). Quelle admirable harmonie entre cette parole et ce que le Seigneur avait dit aux Sadducéens, « ceux qui seront estimés dignes d’avoir part à ce siècle-là et à la résurrection d’entre les morts ! », et aussi avec l’apôtre Paul : « Si, en quelque manière que ce soit, je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts » (Phil. 3:11).
« Sur eux, la seconde mort n’a point de pouvoir ». Remarquez une fois de plus, la force des paroles du Seigneur dans l’Évangile : « Car aussi ils ne peuvent plus mourir » (Luc 20:36). Quant à ceux qui sont laissés dans les sépulcres pour ne ressusciter qu’après les mille ans, ils sont destinés à mourir d’une autre mort bien malheureuse — la seconde mort. C’est de cette mort-là que doivent mourir tous ceux qui n’auront pas eu part à la première résurrection. Leur mort sera la seconde mort — l’extinction de toute espérance de bénédiction, quand tout le reste est béni dans le ciel et sur la terre, et qu’ils resteront perpétuellement sous la colère de Dieu. Ils sont jetés dans l’étang de feu. Mais pour ceux qui ont part à la première résurrection, « ils seront sacrificateurs de Dieu et du Christ, et ils régneront avec lui mille ans » ; après quoi ils régneront en vie par Lui (Rom. 5:17) aux siècles des siècles.
Les trois derniers versets que nous venons de considérer, forment une sorte de parenthèse dans le chapitre, quelque chose d’analogue à ce que nous avons vu au ch. 12. En effet il y a là une insertion décrivant la guerre dans le ciel et ce qui en résultera : Satan chassé et précipité ; puis l’histoire à laquelle il a été fait allusion auparavant (12:6) reprend au verset 12:13. Ici il y a quelque chose de semblable, car le verset 20:7 continue l’histoire précédemment commencée, et fait suite au verset 20:3. Nous y avons trouvé Satan lié pour mille ans, et la cessation temporaire de sa puissance de séduction des nations qui les entraînait à la révolte contre Dieu. Il est ajouté, qu’après cela il faut qu’il soit délié pour un peu de temps.
Le verset 7 nous présente par anticipation le récit du relâchement de Satan de sa prison et ses effets.
« Et quand les mille ans seront accomplis, Satan sera délié de sa prison ; et il sortira pour égarer les nations qui sont aux quatre coins de la terre, Gog et Magog, pour les assembler pour le combat, eux dont le nombre est comme le sable de la mer » (20:7-8)
Les versets 4 à 6 forment évidemment une parenthèse, importante sans doute, mais une parenthèse quand même, et ils ne font point partie du fil de l’histoire qui est repris ici. Une des raisons pour lesquelles cette parenthèse est ainsi située, c’est peut-être qu’elle fait voir que durant cette période où Satan est lié, il y a le côté béni (non pas seulement le mal réprimé), mais Christ et Ses saints régnant sur et au-dessus de la terre. Il n’est jamais dit que nous régnerons dessus la terre.
À propos d’Apoc. 5:10, j’ai déjà montré que le Texte Reçu, qui comporte cette idée, est quelque peu inexact, et que le véritable objet de la pensée de l’Esprit de Dieu n’est pas le lieu où les saints de Dieu habiteront alors, mais plutôt la sphère de leur règne. « Ils régneront sur (= au-dessus de) la terre ». Ce changement a de l’importance, non pas tant comme fait isolé, mais parce que cela se rattache à tout l’ensemble de la vérité, où l’on voit que les saints célestes ne doivent jamais se trouver mêlés aux gens sur la terre. La promesse d’avoir le premier rang dans la bénédiction terrestre appartient à Israël, et ce serait donc une confusion extrême, si les saints célestes et glorifiés se trouvaient mélangés aux hommes encore dans leurs corps naturels dans ce monde. De fait, une des plus fortes objections que bien des chrétiens font au règne de Christ sur la terre, a pour base l’idée que le pré-millénarisme suppose que les saints glorifiés doivent être mêlés aux gens vivants alors ici-bas. Or ceci est une grande erreur.
L’Église aura sa gloire propre ; mais il y aura en même temps deux ordres ou sphères de bénédiction, l’un d’un caractère plus élevé que l’autre. Toutes les choses qui sont dans les cieux seront réunies sous l’autorité de Christ ; et en outre, dans le même temps, toutes les choses qui sont sur la terre seront sous le même gouvernement. Tel est le caractère spécial du millénium. Il y aura en haut la portion céleste, et en bas la portion terrestre, les deux reliées ensemble, mais non pas confondues. Éph. 1:10 l’enseigne nettement quand l’apôtre dit que le mystère de la volonté de Dieu nous a été donné à connaître selon Son bon plaisir, lequel Il s’est proposé en Lui-même pour l’administration de la plénitude des temps, pour réunir en un toutes choses dans le Christ, tant les choses qui sont dans les cieux, que celles qui sont sur la terre. Je n’ignore pas que beaucoup pensent qu’il s’agit là de la dispensation actuelle de l’évangile ; mais c’est sans fondement. L’Église n’est pas un rassemblement de toutes les nations, mais au contraire un corps élu tiré d’entre elles toutes. Elle n’a jamais été ni ne sera jamais un rassemblement en un de toutes les nations, peuples, tribus, et langues. En outre, ce verset parle d’un rassemblement de toutes choses. Il existe un rassemblement des enfants de Dieu, car Christ est mort pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés (Jean 11), mais ici il est question de choses, et non de personnes. Quand l’administration glorieuse dont l’apôtre parle sera arrivée, toutes choses seront placées sous l’autorité de Christ. En droit, Christ a bien toutes choses sous Son autorité déjà maintenant, mais non pas comme un fait réalisé et manifesté.
Daniel ne dit pas que tout doit être mis sous l’autorité du Fils de l’Homme, et le Saint Esprit ne révèle pas ce secret de la volonté de Dieu dans l’Ancien Testament : il y est parlé de la grandeur du royaume sous tous les cieux. Mais le Nouveau Testament nous en dit davantage : il nous apprend qu’au moment même où toutes les choses qui sont sur la terre seront mises sous le gouvernement de Christ, toutes les choses qui sont dans les cieux y seront mises aussi. Et ce ne sera pas simplement de manière providentielle, comme maintenant, mais personnellement et directement. Naturellement le Seigneur est au-dessus de Satan, le dieu et le prince du monde actuel. Le Seigneur agit maintenant par Sa providence, et en outre, Il a pleinement et personnellement droit à toute gloire, céleste et terrestre. Mais le temps, où Il fera valoir ce droit, et où Il prendra toutes choses en mains est encore futur. S’Il l’avait pris aujourd’hui d’une manière directe, toute méchanceté serait réprimée ; personne ne pourrait pécher sans faire l’objet du jugement ; et on ne verrait pas non plus la justice souffrir, ni l’iniquité prospérer. Tout cela prouve que, dans le sens plein et réel du mot, le Seigneur Jésus Christ ne règne pas encore, même si la foi le tient pour vrai. Voyez par exemple le Psaume 97 : « L’Éternel règne ». On cite cette parole comme si elle s’appliquait au temps où le Saint Esprit la faisait écrire, ou au temps actuel, mais ce qui suit dans le psaume réfute cette manière de voir, parce que, lorsque l’Éternel régnera au sens de ce Psaume, la terre se réjouira, etc. Tandis que nous savons parfaitement par Rom. 8, sans parler de l’expérience journalière, que la terre soupire dans la misère, et que toute la création est en travail jusqu’à maintenant, ce qui est tout le contraire de se réjouir. Mais quand les Psaumes recevront leur plein accomplissement, toute la création sera délivrée et tressaillira d’allégresse sous le règne de l’Éternel. Certes, la foi peut dire que l’Éternel règne aujourd’hui ; mais Il n’exerce pas encore Son pouvoir royal sur la terre.
Quand Christ viendra dans Son royaume, tous les adversaires devront être renversés, et par conséquent il devra y avoir le jugement. La bête et le faux prophète sont d’abord mis de côté, selon le ch. 19, et alors vient le règne. Et bien que tous ne soient pas convertis, pécher ouvertement ne sera pas toléré. L’obéissance pourra être « feinte », et c’est ce que fera une grande partie des gens sur la terre, mais ce sera quand même de l’obéissance en quelque sorte, même de la part des « fils de l’étranger » (Ps. 18:44). Tel sera le caractère du règne millénaire. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de mal à cette époque, mais que le mal sera supprimé par la présence du Seigneur ; ce sera un temps où la gloire céleste sera en relation directe avec la terre délivrée et joyeuse ; un temps où le peuple terrestre sera restauré dans son propre pays, converti, et confessant le Béni crucifié par leurs pères. Les circonstances auxquelles je fais allusion sont décrites, au moins pour ce qui concerne la terre, en Zacharie 12 à 14. Au dernier chapitre, l’Éternel est « roi sur toute la terre : en ce jour-là il n’y aura qu’un seul Éternel, et son nom sera un » (Zach. 14:9). Voilà précisément le millénium. Toutes les nations monteront pour reconnaître l’Éternel : si l’une s’y refuse, elle sera châtiée. L’Esprit de Dieu signale d’une façon particulière le châtiment dont seront frappées les nations qui ne monteront point pour célébrer la fête des tabernacles : la pluie sera retenue. En Égypte, où on ne se ressentirait pas une privation pareille (la terre ayant d’autres sources de fertilité), la punition sera d’une autre nature (*), ce sera « la plaie dont l’Éternel frappera les nations », etc. La prophétie nous montre donc clairement la gloire terrestre sous le règne de gloire du Seigneur.
(*) note Bibliquest : cette interprétation n’est pas supportée par la traduction JND.
Éphésiens 1 ne fait pas simplement ressortir la gloire céleste, mais la réunion sous Christ tant des choses qui sont dans les cieux, que de celles qui sont sur la terre. Cela ne veut pas dire qu’elles doivent être toutes ramenées au même niveau, mais que tout doit être réuni pour faire partie d’un seul et même système, ayant un seul et même chef au-dessus de tout, à savoir Christ. Mais l’Église n’est incluse dans aucune de ces choses. Nous ne sommes confondus ni avec les choses terrestres ni avec les choses célestes ; au contraire, il est dit de nous qu’en Christ nous avons reçu un héritage sur toutes choses. L’Église ne doit pas être seulement un peuple glorieux sur lequel Christ va régner. Nous sommes héritiers de Dieu, et co-héritiers de Christ — non pas simplement héritiers sous Christ, mais avec Lui — selon le type béni donné au tout commencement de l’histoire de l’homme, quand Adam avait la gloire d’être chef sur le monde d’ici-bas et que sa femme partageait la domination en vertu de son union avec lui. L’Église est l’Ève spirituelle du Seigneur Jésus, l’épouse du dernier Adam. Ceci peut expliquer un peu la force des expressions d’Éph. 1:10, 23, et nous montre l’importance du jour que nous contemplons en Apoc. 20. Car « les mille ans » correspondent à cette même période, quand l’administration sera dans les mains du Seigneur Jésus, Celui qui sera exalté et manifesté comme Chef sur toutes choses, et que l’Église partagera tout avec Lui.
Encore une autre remarque : seul le Nouveau Testament nous déclare la période du règne, et en précise la durée comme devant être de mille ans. Presque toute la prophétie s’y rapporte, mais ce n’est qu’ici que nous apprenons ses limites, et sa relation avec l’état éternel qui lui succède.
En un sens, Christ régnera pour toujours, et les saints aussi. C’est ce qui est établi doctrinalement, indépendamment du temps, par exemple en Rom. 5:17, où il est dit : « Ceux qui… régneront en vie par un seul, Jésus Christ ». Cette parole ne se rapporte pas particulièrement au règne millénaire, qui n’est qu’une partie du privilège de régner en vie par le Christ Jésus. Notre vie en Christ étant une vie éternelle, elle implique, selon moi, que, dans un certain sens aussi important que réel, il y aura une manière de régner avec Christ bénie et glorieuse, qui durera éternellement. Mais, d’un autre côté, quand nous entendons parler d’un royaume donné à Christ, que Christ remet avant la fin à Dieu le Père (1 Cor. 15:24), ce règne spécial pour un temps limité a aussi une portée sur les saints célestes. Naturellement la gloire proprement divine de Christ est distincte de ces gloires-là, et ne peut être communiquée à personne. Mais Dieu a parlé d’une récompense spéciale — la récompense des souffrances pour Christ : « Si nous souffrons, nous régnerons aussi avec Lui » (2 Tim. 2:12) ; « si du moins, nous souffrons avec Lui, afin que nous soyons aussi glorifiés avec lui » (Rom. 8:17). Tout cela a trait au règne millénaire. Christ sera alors publiquement exalté dans le monde, au lieu même où Il fut méprisé et rejeté. Les saints seront publiquement exaltés avec Christ sur la scène même de leur opprobre et de leur douleur, là où ils ont suivi Christ d’un pas faible et chancelant sans doute, mais où ils sont restés attachés au nom de Jésus malgré les dommages et l’opprobre. Mais outre ces récompenses spéciales, il y a la gloire, la bénédiction, et la joie qui ne passeront jamais.
Le millénium sera un temps où bien des âmes seront amenées à la connaissance du Seigneur. Ce sera la grande moisson de la bénédiction, le temps célébré avec tant de ravissement dans les Psaumes et les Prophètes, où la connaissance de l’Éternel couvrira la terre comme les eaux couvrent le fond de la mer (És 11:9 ; Hab. 2:14). Ceci n’implique pas nécessairement que tous ceux qui connaîtront la gloire de l’Éternel, connaîtront aussi Sa grâce, et seront convertis. Néanmoins, beaucoup seront amenés au Seigneur. Mais il sera aussi donné en ce même temps une vraie et réelle connaissance de Dieu, car le Saint Esprit sera répandu d’en haut d’une manière spéciale, dont le jour de la Pentecôte ne fut, comparativement, que comme la pluie de la première saison, tandis que ce sera alors comme la pluie de la dernière saison. La Pentecôte fut la figure anticipée de la plénitude de bénédiction future, plus grande au moins en étendue, qui sera réalisée dans le millénium.
Or, les saints de « ce jour-là » ne connaîtront jamais la souffrance comme un privilège, ils ne sauront jamais ce que c’est que suivre Christ dans l’opprobre, et qu’être rejeté avec Lui. En conséquence, ils ne régneront pas dans le royaume. Tous les saints depuis le commencement et jusqu’au millénium, auront plus ou moins souffert avec Christ. L’Église ayant connu par excellence la communion de Ses souffrances, aura une gloire toute spéciale. Les saints qui seront amenés après le commencement du millénium, n’auront jamais connu les souffrances de Christ : ils ne partageront pas le royaume. Les saints antérieurs au millénium seront introduits dans la scène de gloire, et ils seront changés parce que la corruption ne peut jamais hériter de l’incorruptibilité (1 Cor. 15:50). C’est pourquoi, quand ils sont introduits là où Dieu fait toutes choses nouvelles, ils portent sans le moindre doute la ressemblance de Christ, parce qu’ils font partie de la famille du dernier Adam ; et comme ils sont en relation avec Christ, et qu’ils ont Sa vie, cette vie aura libre cours tant pour le corps que pour l’âme : ils seront changés à Sa ressemblance. Il est vrai qu’en ce qui concerne les saints de la période millénaire, nous n’avons pas de déclaration positive sur le moment où ce changement aura lieu. Toutefois, nous pouvons, ce me semble, déduire de principes généraux, que ce sera dans l’intervalle qui s’écoule après la fin du millénium, et avant l’apparition des nouveaux cieux et de la terre nouvelle avec leurs bienheureux habitants. Mais ce silence de l’Écriture a donné occasion à ce que quelques-uns se laissent entraîner par l’idée étrange que les saints de la période millénaire resteront dans leur corps naturel, se mariant et donnant en mariage durant toute l’éternité ! Une pareille idée ne trouve aucune espèce de fondement dans la parole de Dieu. On l’a déduite de l’idée qu’il fallait toujours interpréter les expressions « aux siècles des siècles », « à toujours », « éternellement » (« pour toujours et toujours » dans la version anglaise autorisée) comme si elles devaient, nécessairement et dans tous les cas, signifier l’éternité. Or, dans certains passages, c’est bien là la signification, mais dans d’autres, non.
Si Dieu parle d’un état de choses terrestre en se servant des expressions « règne éternel », « régner à toujours » comme en Dan. 7 et Luc 1, on ne saurait les prendre dans un sens absolu. La portée des mots doit être limitée par le sujet dont Dieu parle. C’est ainsi que, dans les choses humaines, si un homme achète une maison « pour toujours », cela ne veut pas dire qu’il l’achète pour toute l’éternité, mais aussi longtemps que le monde existera sous sa forme actuelle et dans sa manière actuelle ; son droit subsiste aussi longtemps que la terre elle-même, en tant que laissée entre les mains de l’homme. C’est dans le même sens que Dieu se sert de l’expression « aux siècles des siècles » (à toujours, éternellement) en parlant des choses et des peuples de la terre. Seulement, l’expression est beaucoup plus forte que dans les transactions humaines ordinaires, car une révolution peut désavouer ou détruire tous les actes de transmissions de droits, tandis que le royaume de Christ devant Lequel toute autorité contraire doit s’incliner et disparaître, garantira assurément à Israël l’accomplissement de toutes les promesses de Dieu. L’expression « régner sur la maison de Jacob » ne peut donc qu’être modifiée par cette idée-ci : aussi longtemps que la maison de Jacob existe comme telle. Mais quand l’expression est en rapport avec les nouveaux cieux et la nouvelle terre dans le plein sens de ces termes, on ne trouve plus Israël dans son existence nationale : de telles distinctions terrestres s’effacent quand les hommes ressuscitent d’entre les morts ou sont transmués. Quand il s’agit de vie éternelle, ou de châtiment éternel, il nous faut prendre ces expressions au sens le plus large, parce que ces choses ne se rapportent pas à la terre : elles appartiennent à l’état de résurrection. Appliquées aux choses terrestres, ces expressions sont à prendre en un sens restreint, mais appliquées aux choses hors de ce monde, il faut les prendre de manière absolue dans toute leur étendue. Ainsi en Dan. 7:27, il est dit que « le royaume sous tous les cieux », qui est donné au peuple des saints du Souverain, est un royaume éternel. C’est là, je pense, la même période que celle qui est appelée ici les mille ans.
Dans le Nouveau Testament, le Saint Esprit nous donne le développement complet de toutes les voies de Dieu, et nous fait voir que ce qui peut avoir semblé aux saints de l’Ancien Testament être un état de choses absolument éternel, est limité et modifié par des révélations ultérieures qui nous y révèlent, pour ainsi dire, deux stades au lieu d’un. Ainsi, le royaume terrestre dont parle Daniel doit être « éternel » dans ce sens qu’il ne sortira jamais de la domination de Christ, ne Lui sera jamais retiré et ne sera jamais donné à un autre (comme les empires précédents ont été retirés à leurs chefs respectifs), mais il restera en Ses mains, et dans les mains des saints des lieux très-hauts aussi longtemps que Dieu aura un royaume terrestre. Lorsque l’état de choses terrestre prend fin, et que le royaume est remis, le règne de Christ se poursuit éternellement, quoique d’une autre manière, car dans l’état éternel il ne sera évidemment plus question de peuples, de nations, et de langues qui Le servent.
Ce chapitre passe rapidement sur l’état millénaire, pour ce qui concerne les hommes sur la terre. Si on désire considérer la partie terrestre des mille ans, c’est à l’Ancien Testament qu’il faut recourir. Là il en est parlé constamment comme de « ce jour » ou « ce jour-là » — le jour où les Gentils seront introduits et bénis, où le nom de Dieu sera exalté, où tout état de guerre ou de lutte aura disparu. C’est le jour où le désert se réjouira et fleurira comme le jardin d’Eden (És. 35:1), et où les rachetés de l’Éternel viendront à Sion avec chant de triomphe et une joie éternelle sera sur leur tête, et où le chagrin et le gémissement s’enfuiront (És. 35:10). Voilà des descriptions que le Saint Esprit donne sur cette période bénie du royaume. Beaucoup ont été enclins à prendre ces tableaux prophétiques du millénium au sens figuré ; mais il faut accepter que ces images soient beaucoup plus pleinement accomplies qu’on ne le suppose. Autrement dit, je vois dans les récits ardents des prophéties de l’Ancien Testament touchant le millénium, des emblèmes de bénédictions riches et abondantes qui doivent se répandre réellement sur la terre. Sans doute ces figures peuvent aussi avoir une sorte de signification spirituelle ; mais tout en l’admettant, nous n’enlevons point aux mots leur sens simple et naturel. Ainsi, par exemple, l’Écriture parle du loup et de l’agneau, et d’autres animaux qui aujourd’hui se dévorent les uns les autres, et qui vivront alors ensemble en paix. Rien n’empêche de faire une application figurée de ces termes et de s’en servir pour décrire ce qui sera moralement vrai des hommes — quoique, pour ce qui me concerne, je ne croie pas que ce soit là leur portée réelle.
Car pourquoi Dieu ne ramènerait-Il pas les créatures qu’Il a faites, et auxquelles il porte beaucoup plus d’intérêt qu’on ne pense, à une condition au moins aussi bonne que celle dans laquelle elles furent créées ? Pourquoi Dieu ne supprimerait-il pas toutes les fâcheuses conséquences amenées par le péché, physiquement aussi bien que moralement ? Car les effets du péché d’Adam se sont étendus bien au-delà de sa propre race : tout ce qui avait été placé sous sa domination est tombé dans le désordre et la ruine. Et il ne s’agit pas d’une notion imaginaire de la ruine, ni d’une présentation fantaisiste de la prophétie de l’Ancien Testament. C’est la doctrine établie clairement et positivement en Rom. 8. Il est écrit là que « la création a été assujettie à la vanité, non de sa volonté, mais à cause de celui qui l’a assujettie », ce qui est une allusion claire à la chute de celui qui avait été établi sur la création : il est tombé, et la création étant assujettie à Adam, est tombée en même temps. C’est lui qui l’a assujettie à la vanité ; la misère et la mort entrèrent par lui. Car il n’y a pas de raison pour supposer que la mort ait régné sur la création purement animale du monde adamique, pas plus que sur l’homme, si le péché ne fût pas entré. Je sais que les savants de ce monde parlent souvent de restes fossiles montrant la mort d’animaux avant la création de l’homme. Je n’entre pas dans de telles études, mais je dirai seulement que sous Adam il n’y avait pas le même état de choses. En supposant que les faits signalés par les géologues, et ce qu’ils en déduisent soient sérieux, comme l’Écriture garde un silence absolu à l’égard des créatures vivantes qui ont pu avoir été formées et détruites sur la terre avant qu’Adam fût créé, je désire faire de même dans l’explication de l’Écriture. Ce sont des questions sans importance morale, et le chrétien n’a donc pas à s’en mêler. Mais j’ajoute que ces théories, si elles sont vraies, ne contredisent pas le moins du monde l’Écriture. Car il n’existe aucune trace d’homme en rapport avec l’état de choses antérieur à Adam, et l’Écriture le passe sous silence, ayant hâte d’arriver à ce qui se rattache directement à lui. Dès que la race humaine commence sur la terre, les actions morales de Dieu se développent progressivement. Mais l’homme est bientôt tombé, et alors la création a été dégradée par la chute de son chef. La mort, pour ce qui est du monde adamique, est entrée par la désobéissance d’Adam — la mort directement quant aux hommes, et comme conséquence, ses ravages se sont étendus à toute la création vivante inférieure.
Quand le second Homme, exalté au-dessus des cieux, reviendra, Il n’aura pas simplement une domination comme celle que possédait le premier Adam. Toutes choses dans les cieux et sur la terre seront soumises à Son glorieux pouvoir : il n’y aura pas un lieu, pas une créature de tout l’univers de Dieu qui n’éprouvera les effets de cette puissance glorieuse par laquelle Il s’assujettira même toutes choses. Ainsi, si l’homme est tombé autrefois, introduisant le péché, la mort et la misère, et si tous les efforts de sa race pour remédier au mal, au-dehors et au-dedans, n’ont été que des palliatifs et non un véritable remède, le Seigneur Jésus sera le bon, le souverain, le tout-puissant Médecin qui guérira tous les maux et toutes les souffrances de la création. Et Dieu aussi aura de la joie — Sa propre joie — en soulageant toute la misère amenée par le péché, conformément à Son estimation de la valeur de Son Fils. Et si, jusques alors, tout n’a fait que remplir la coupe de malheur pour l’homme, quel temps béni ne sera-ce pas quand Dieu renversera le cours de l’histoire, et que Son propre Fils remplira le trône de Ses gloires céleste et terrestre, sans plus subir ni rejet ni mépris ! Quel temps quand la méchanceté sera déracinée, et la justice exaltée à toujours, non pas simplement par puissance et par gloire, mais par Celui qui a d’abord porté en grâce toutes les douleurs, et a souffert sur la croix les conséquences de toute la méchanceté, selon la parfaite sainteté de Dieu ! Quelle douceur aussi dans la pensée que Dieu fera voir là qu’il n’y a pas un mal, pas une dégradation, pas une angoisse, pour lesquels Il n’ait pas une réponse appropriée et glorieuse en Son Fils et par Son Fils ! Car Il déploiera alors toute Sa puissance pour glorifier Son Fils en présence de toute chair, de ceux-là mêmes qui envoyèrent après Lui ce message : « Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous ». Mais lorsque ce Fils béni reviendra après avoir reçu le royaume (Luc 19:12-15), et qu’Il régnera comme le Fils de l’Homme ressuscité et exalté, toute la création éprouvera les effets bienheureux de la suprématie et du gouvernement du Seigneur.
Le Seigneur veut exalter Israël sur la terre ; et eux qui ont été si particulièrement Ses ennemis acharnés, Il veut leur faire entonner le cantique de louange avec leur Messie qu’ils ont rejeté autrefois, mais qui est désormais au milieu de la congrégation. C’est alors qu’ils reprendront le psaume 100, le psaume d’actions de grâces, et ils inviteront tous les pays à venir célébrer l’Éternel, et même à entrer dans Ses parvis avec louange. Quel contraste avec tout ce qui s’est passé, se passe encore ! Quelle différence par rapport à la haine que les Juifs ont toujours montrée au moindre message de grâce adressé aux Gentils ! Quand Paul en effet, leur raconte comment le Seigneur lui avait dit pendant sa prière au temple à Jérusalem : « Va, car je t’enverrai au loin vers les nations » — ils l’écoutèrent jusqu’à ce mot ; mais c’était plus que leur cœur orgueilleux ne pouvait supporter, aussi élevèrent-ils leur voix, disant : « Ôte de la terre un pareil homme, car il n’aurait pas dû vivre ». Mais combien la grâce aura changé et élargi les cœurs étroits d’Israël, quand ils iront eux-mêmes porter les invitations de miséricorde aux Gentils qui les ont insultés dans toutes leurs pérégrinations fatigantes sur la terre, et qui ont foulé aux pieds Jérusalem durant tout le temps assigné par Dieu !
Les Juifs, comme Caïn, ont sur eux la marque du Seigneur, afin qu’ils ne s’éteignent pas entièrement, malgré leur culpabilité de meurtre. Mais le Seigneur leur donnera la repentance au dernier jour, et dès lors ils seront les hérauts appropriés et bénis de Sa grâce jusqu’aux bouts de la terre.
Ce temps de bénédiction sous le Messie est ce qu’on trouve si souvent et avec tant de détails dans l’Ancien Testament. Les évangiles aussi, débutent avec de telles espérances chez les saints juifs. Mais une nouvelle mesure de lumière s’est mise à rayonner à mesure que le rejet de Christ devenait plus marqué, jusqu’à ce que, la rédemption étant accomplie, le Saint Esprit fut envoyé du ciel, et manifesta pleinement les pensées de Dieu. C’est alors que la distinction entre le royaume et l’état éternel fut clairement établie (1 Cor. 15:24-28). Il fut montré que le règne terrestre de Christ qui, selon l’Ancien Testament, pouvait paraître illimité dans le temps, aura en réalité un terme quand Il aura aboli toute principauté, et toute autorité, et toute puissance.
Beaucoup de personnes croient que l’état de choses du millénium va s’installer progressivement par la prédication de l’Évangile, et par d’autres moyens d’action actuellement à l’œuvre. Sans doute, ils s’attendent à Dieu pour les bénir davantage, car probablement qu’aucun chrétien ne voudrait affirmer que les apparences actuelles justifient l’attente d’un temps tel que le millénium. Mais ils pensent que s’il y avait un nombre plus considérable de serviteurs de Dieu, et s’il plaisait à Dieu de bénir partout Sa Parole pour la conversion des multitudes, et si, parmi ceux qui aiment le nom de Christ, il y avait davantage et généralement un esprit d’amour, d’union, et de dévouement, le résultat effectif et immédiat en serait le règne de Christ sur la terre.
Alors je voudrais demander : comment sait-on qu’il doit y avoir un millénium ? Vous répondez : par la parole de Dieu. Et comment le millénium va-t-il être amené ? L’humilité devrait répondre : cela aussi, il faut l’apprendre par la parole de Dieu. Nous reconnaissons tous que la terre doit être remplie de la connaissance de l’Éternel comme les eaux couvrent le fond de la mer. Comment cela se fera-t-il ? Il est remarquable que justement dans ce passage où ces paroles se trouvent (És. 11:9), le Saint Esprit indique que le jugement doit précéder le temps de bénédiction (voir És. 11:4). Nous y apprenons que la diffusion universelle de la connaissance de l’Éternel fait suite à Son intervention par laquelle Il aura frappé la terre par la verge de sa bouche, et aura fait mourir le méchant par le souffle de ses lèvres — ce qui est justement le passage que, en 2 Thes. 2:8, l’apôtre Paul applique à la destruction de l’antichrist, l’homme de péché. Le Seigneur le consumera par le souffle de Sa bouche et l’anéantira par l’apparition de Sa venue.
Il est donc parfaitement vrai et reconnu, qu’il doit y avoir un temps millénaire de bénédiction sur la terre ; et quant à la manière dont ce temps doit être amené, voici la réponse : le même passage de l’Écriture qui nous révèle ce changement béni, nous déclare que c’est le Seigneur qui l’amène à Sa venue en frappant le méchant ; en d’autres termes, c’est par le jugement qu’il est amené, et non point par la prédication de l’évangile. L’évangile est de toute importance pour appeler les âmes de la terre au ciel ; mais ce n’est pas le moyen d’agir sur le monde entier et de le remplir de bénédiction. L’évangile est le moyen de rassembler l’église hors du monde vers Christ. Lorsque le jugement aura eu tout son cours, le Seigneur enverra Ses serviteurs. Le Seigneur prononcera la parole, et grande sera la foule de ceux qui la publieront (Ps. 68:11). « De Sion sortira la loi, et de Jérusalem, la parole de l’Éternel » (És 2:3). La dispensation actuelle est une dispensation de rassemblement en séparation d’avec le monde. L’évangile doit être prêché à tous, mais non pas avec le vain espoir que tous finiront par le croire. Aussi le Seigneur en Marc 16, tout en commandant à Ses disciples d’aller par tout le monde, et de prêcher l’évangile à toute créature, prend-Il soin d’ajouter : « Celui qui aura cru et qui aura été baptisé sera sauvé ! et celui qui n’aura pas cru sera condamné ». Il les prépare à un accueil individuel et partiel. Ainsi ils ne devraient pas être abattus s’ils ne trouvaient que quelques personnes ici et là qui recevraient la parole de vie. Peut-être n’y aurait-il qu’un Denis, l’Aréopagite, et qu’une femme nommée Damaris, et d’autres avec eux. Et qu’étaient ces quelques personnes par rapport aux foules qui entendirent l’apôtre sur la colline de Mars ? Ce fut un sujet de joie et de reconnaissance d’apprendre que quelque âme avait cru à la vie éternelle, car c’est ainsi que Dieu préserve ses serviteurs de l’abattement. Il est bon de savoir que tous ne vont pas recevoir l’évangile, mais que Dieu poursuit l’accomplissement de Ses desseins. C’est pourquoi, quand le Seigneur bénit la parole, et réveille çà et là la conscience d’un pauvre pécheur, il y a lieu de se réjouir.
Mais nous savons que globalement le mal croîtra, et « les hommes méchants et les imposteurs iront de mal en pis, séduisant et étant séduits » (2 Tim. 2:13). Comment cela serait-il possible si la bénédiction millénaire doit être le résultat de l’œuvre d’évangélisation à laquelle travaillent aujourd’hui les chrétiens ? Mais le Seigneur doit frapper la terre de la verge de sa bouche et faire mourir le méchant par le souffle de ses lèvres, dont il est dit qu’il est comme un torrent de soufre ! (És. 30:33). Est-ce là l’évangile ? C’est justement tout le contraire — une figure d’un jugement destructeur. L’évangile délivre de Topheth, mais le jugement du Seigneur y précipite de manière irrévocable. C’est donc clairement un jugement qui procède de la main de Dieu lui-même, et non point un jugement exécuté par l’homme, et encore bien moins par l’Église. Ce n’est pas l’affaire de l’Église de précipiter dans Topheth. Aucune puissance sinon celle de Dieu, ne peut livrer à l’enfer.
Mais il y a une autre chose qui caractérise le millénium : Satan est lié dans l’abîme. L’Église peut-elle lier Satan ? Quelqu’un affirmera-t-il que des hommes sont absolument capables d’empêcher Satan de séduire le monde ? Or tant qu’il n’est pas lié, il ne saurait y avoir de bénédiction universelle pour le monde ; et tout chrétien est obligé de reconnaître que Dieu seul peut lier ou briser Satan. Il peut bien se servir d’un ange, ou S’associer les saints, selon Rom. 16:20 : « Le Dieu de paix brisera bientôt Satan sous vos pieds ». Car l’Église est unie à Christ, et elle sera alors effectivement avec Lui qui, en tant que semence de la femme, va briser la tête du serpent ; mais la puissance est en Christ, et non pas dans l’Église. Quand ce jour de jugement sera venu, Christ abattra tous les adversaires, ainsi qu’il est dit : « Il frappera les nations, et les paîtra avec une verge de fer » (Apoc. 19:15) ; et nous ferons de même en vertu de notre association avec Christ (Apoc. 2:26-27) ; et dans le règne de paix (Apoc. 20:4, 6), nous Lui serons encore associés. C’est par l’Église dans sa condition céleste, et non pas pendant que nous sommes sur la terre, que Satan sera ainsi brisé.
Mais il est parfaitement clair, d’un autre côté, que le millénium n’est pas exclusivement le règne des saints glorifiés ; la terre comme telle, avec ses habitants, sera introduite dans la délivrance et la bénédiction. C’est ce que nous voyons en Éph. 1:10, où se trouve la vraie clé du caractère de cette période merveilleuse — l’union de la gloire céleste et de la gloire terrestre sous une seule et même Tête, en qui, nous aussi, le corps, nous avons été faits héritiers. Il y aura sur la terre les Juifs et les Gentils, bénis comme tels dans leurs corps naturels, et sujets du royaume, tandis que les saints glorifiés seront les instruments de la bénédiction pour la terre.
Maintenant la terre est misérable, et les hommes ne savent guère à quel point ils sont devenus des rebelles par le péché. Mais outre cela, il y a un ennemi invisible, un adversaire sombre et infatigable de Dieu et de l’homme, qui a à ses ordres des armées de mauvais anges (Apoc. 12) dont il se sert comme instruments de sa séduction. Tout cela passera ; et ces mêmes scènes remplies maintenant de mauvais esprits, les lieux célestes (non pas, bien sûr, le lieu où Dieu habite dans la gloire inaccessible, mais les cieux inférieurs qui sont en rapport avec la terre) seront une portion de ce sur quoi l’Église dans la gloire aura la domination, et les saints célestes serviront autant de canaux de joie et de bénédiction pour le monde, que les mauvais esprits sont maintenant les principaux agents de toute sa misère (après le millénium, ces mauvais esprits pourront sortir un peu de temps de leur prison pour engager les nations jusqu’aux bouts de la terre dans une dernière conspiration contre le Seigneur, mais ils ne recouvreront jamais leur accès d’autrefois dans les lieux célestes où leur influence était d’autant plus subtile et dangereuse).
Ce sera alors l’aube du jour de la plus grande gloire pour le monde. Bien sûr je ne parle pas de la croix ; car, entre toutes les gloires qui seront jamais données à Christ, aucune ne saurait être comparée à la gloire si réelle et si profonde de Sa mort. C’est elle qui a, pour ainsi dire, rendu possible à Dieu de déployer Sa miséricorde selon Son propre cœur ; et c’est pourquoi toutes les joies du millénium, y compris les moindres, découleront de la croix de Jésus. Elle a des conséquences éternelles, et non pas pour le millénium seulement. Toutefois, quelle que soit son importance, et quoiqu’il doive être un temps de bénédiction merveilleuse, le siècle à venir, ou millénium, sera encore imparfait. La raison en est que les hommes sur la terre seront encore dans leur corps naturel, et que bon nombre d’entre eux seront inconvertis. C’est pourquoi ce chapitre nous montre qu’à la fin des mille ans « Satan sera délié de sa prison, et sortira pour égarer les nations qui sont aux quatre coins de la terre, Gog et Magog, pour les assembler pour le combat, eux dont le nombre est comme le sable de la mer » (20:7, 8). L’Ancien Testament ne parle pas de cette révolte finale, car il ne parle pas non plus d’une fin du règne, ni ne mentionne la période où Satan sera délié. Les expressions qui parlent du jugement tombant sur le mal peuvent se comprendre comme décrivant un seul coup porté, ce qui termine la question.
Nous apprenons d’Ésaïe 24 que le lieu de châtiment de l’armée d’en haut sera en haut, et que les rois de la terre seront punis sur la terre (És 24:21). Il est évident que par l’expression « l’armée d’en haut » l’Esprit de Dieu ne fait pas allusion aux grands de la terre (car cette armée est mise en contraste avec les rois de la terre), mais aux puissances de méchanceté qui sont dans les lieux célestes (comp. Éph. 6:12). C’est exactement ce que nous trouvons, quoique avec plus de détails, en Apoc. 12 et 19 et 20. Les rois de la terre reçoivent leur châtiment sur la terre, tandis que Satan et ses favoris, l’armée d’en haut, reçoivent leur châtiment en haut. Satan est précipité sur la terre, et ses anges sont précipités avec lui. Ils n’ont plus de place dans le ciel. Les détails ne sont point donnés avant l’Apocalypse. Ce jour verra le jugement de tous les ennemis en haut ou en bas. Il n’est pas besoin de prouver qu’il s’agisse du jour millénaire.
Au chapitre suivant (És. 25:6), il est dit : « Et l’Éternel des armées fera, en cette montagne, à tous les peuples un festin de choses grasses, un festin de vins vieux, de choses grasses moelleuses, de vins vieux bien épurés ». C’est un temps de bénédiction comme on n’en aura jamais connu auparavant. La bénédiction ne sera pas restreinte à un certain nombre de personnes rassemblées hors de la masse, comme maintenant ; « l’Éternel des armées fera, en cette montagne, à tous les peuples un festin » etc. « Cette montagne » signifie la Palestine, parce qu’elle sera pour toute la terre le lieu où l’Éternel sera exalté. Bien sûr c’est dans un sens moral et non dans un sens physique qu’il faut prendre ceci.
Remarquez ce que nous trouvons au verset suivant (És 25:7). « Et Il détruira en cette montagne la face du voile qui couvre tous les peuples ». Le Seigneur détruira les ténèbres qui sont aujourd’hui sur la face de toutes les nations, « et la couverture qui est étendue sur toutes les nations ». Mais cette ère sera aussi caractérisée par la résurrection (És. 25:8) : « Il engloutira la mort en victoire », paroles qui se réfèrent évidemment à la première résurrection mentionnée en Apocalypse. Alors seulement la victoire sera complète (comp. 1 Cor. 15). « Et le Seigneur, l’Éternel, essuiera les larmes de dessus tout visage, et il ôtera l’opprobre de Son peuple de dessus toute la terre ; car l’Éternel a parlé ». C’est le temps de la bénédiction pour le peuple juif. « Et il sera dit en ce jour-là : Voici, c’est ici notre Dieu ; nous L’avons attendu, et Il nous sauvera » (És 25:9). Il est incontestable qu’il s’agit ici de personnes sur la terre qui ont besoin d’être sauvées. L’Église est déjà sauvée, et nous n’attendons point la venue de « ce jour-là » pour que notre Dieu nous sauve. Ceux-là seront sauvés au jour de la gloire ; nous, nous sommes sauvés au jour de la grâce. « C’est ici l’Éternel ; nous L’avons attendu. Égayons-nous et réjouissons-nous dans sa délivrance. Car la main de l’Éternel reposera en cette montagne, mais Moab sera foulé aux pieds sous lui comme la paille est foulée au fumier » (És 25:9-10). Nous avons là l’un des ennemis voisin d’Israël foulé aux pieds, car ce doit être un jour de jugement aussi bien que de bénédiction.
Au chapitre suivant (26) il est écrit, « En ce jour là ce cantique sera chanté au pays de Juda : Nous avons une ville forte », etc. Et dans sa dernière partie à laquelle je désire me référer à cause de son importance, Israël dit (És. 26:18) : « Nous avons conçu, et nous avons été dans les douleurs… nous n’avons pas opéré le salut du pays », etc. « Tes morts vivront, mes corps morts se relèveront » (És 26:19). « Tes morts » c’est-à-dire, le peuple juif regardé en figure comme mort, exactement comme en Ézéchiel 37 où ils sont représentés non seulement comme morts, mais comme des os secs. Mais, de même que le Seigneur fait passer Son souffle sur ces ossements desséchés, de telle sorte qu’ils vivent, de même ici : « Tes morts vivront, mes corps morts se relèveront ». Il n’est pas dit simplement « tes corps morts », mais « mes corps morts ». Je les reconnais, ils m’appartiennent. L’Éternel se les approprie comme étant Siens, bien qu’ils fussent tout à fait morts. Mais ils ne resteront pas dans cet état ; ils se relèveront. « Réveillez-vous et exultez avec chant de triomphe, vous qui habitez dans la poussière ; car ta rosée est comme la rosée de l’aurore, et la terre jettera dehors les trépassés. Viens, mon peuple, entre dans tes chambres, et ferme la porte sur toi » (És 26:19-20). Ceci ne ressemble pas à l’Église. Les saints célestes n’entrent point dans leurs chambres sur la terre, mais ils sont enlevés pour être dans la maison du Père dans le ciel. Mais ici, il est question du peuple juif. Ils sont consolés, et il leur est dit de se relever de leur état dégradé, « car ta rosée est comme la rosée de l’aurore… Viens, mon peuple… cache-toi pour un petit moment, jusqu’à ce que l’indignation soit passée » (És. 26:20). L’indignation que Dieu a eue si longtemps contre Son peuple, se changera désormais en indignation contre leurs ennemis. L’Assyrien dont Dieu s’est servi jadis comme d’une verge pour châtier Israël, doit maintenant subir lui-même sa sentence finale. « Car voici, l’Éternel sort de Son lieu pour visiter l’iniquité des habitants de la terre sur eux, et la terre révélera son sang, et ne cachera plus ses tués » (És. 26:21). Il est bien évident qu’il s’agit ici du temps où Dieu introduit le millénium, et nullement du temps après le millénium. L’Éternel sort de son lieu pour punir les habitants de la terre. Cela ressemble-t-il à l’évangile, où au lieu de proclamer la rémission des péchés, l’Éternel sort pour les punir ? Certainement non. De plus, « en ce jour-là, l’Éternel visitera de Son épée, dure et grande et forte, le Léviathan, serpent fuyard, et le Léviathan, serpent tortueux ; et il tuera le monstre qui est dans la mer » (És 27:1). Sans aucun doute, il y a là une allusion générale au méchant, Satan, le serpent ancien. Seulement, il n’est pas envisagé ici comme ayant une place en haut, mais comme défait et rejeté ici-bas. Il n’en est pas parlé d’une manière aussi détaillée que dans l’Apocalypse, qui nous donne la pleine lumière de Dieu sur ce sujet et sur ses détails.
Une autre chose que nous apprenons de notre chapitre, c’est qu’à la fin du millénium, Dieu fera voir que le jour de la gloire (les mille ans qui font partie du jour du Seigneur quand Satan est lié, et que le Seigneur Jésus règne d’une manière manifeste) ne convertira pas plus les âmes par lui-même, que le jour de la grâce et la publication de l’évangile jusqu’aux bouts de la terre. Car si au jour de la grâce, le salut de l’âme individuelle requiert la puissance directe de Dieu, au jour de gloire il sera bien sûr besoin de la même puissance ici-bas. Tant que le Seigneur sera là, le mal sera retenu, et il n’y aura pas de chef pour guider l’homme dans le mal. Mais du moment qu’il sera permis à Satan de sortir de son lieu et d’exercer sa puissance, on aura la preuve manifeste que le cœur de l’homme n’est point changé. Il s’en ira aux quatre coins de la terre pour séduire les nations, et il les rassemblera pour leur ruine.
Ces nations sont appelées d’un nom symbolique, qui est une sorte d’allusion aux ennemis d’Israël mentionnés en Éz. 38 et 39. Mais ce ne sont pas les mêmes, et il faut les distinguer soigneusement, car en Ézéchiel, Gog est à la lettre un individu — le prince des vastes territoires et peuples du nord-est, connus de nos jours comme l’empire de Russie. Gog sera alors le chef de ce pays que l’Écriture appelle « le pays de Magog ». Effectivement Gog est qualifié de prince de Rosh, et non pas chef-prince selon la version autorisée du Roi Jacques. À l’époque où les Écritures furent traduites en Latin (version qui eut une grande influence sur celles qui suivirent), l’empire russe n’existait pas et ne pouvait être connu sous ce nom, le nord de l’Europe étant alors habité seulement par des hordes de barbares nomades appelés Sarmates, Scythes, etc. Quand Jérôme, qui corrigea la vieille version latine, arriva au terme hébreu « Rosh », il crut qu’il devait être pris, non comme le nom d’un peuple, mais comme un nom commun signifiant « chef » ou « prince », juste comme les Francs dont le nom, outre qu’il est devenu celui de la contrée qu’ils avaient conquise, signifiait aussi « hommes libres ». De là vient probablement que dans la version autorisée anglaise « Rosh » a été traduit par Chef, ce que l’Hébreu pourrait également bien supporter, si le contexte n’exigeait pas un nom propre (car « prince du chef de Méshec et de Tubal » n’a guère de sens). C’est pour cela, je suppose, que les traducteurs de la version autorisée anglaise, ne connaissant pas de meilleure manière de le rendre, s’arrêtèrent à la vague expression de « prince-chef de Méshec et de Tubal ». Cependant, il est bien connu que des personnes instruites qui n’avaient pas de lumière sur la prophétie, ou qui n’en avaient que partiellement (des érudits qui examinaient ce sujet au 18ème siècle), arrivèrent à la conclusion qu’il fallait entendre par là la Russie. Mais ce qui est d’une importance beaucoup plus grande, c’est que la version Grecque des Septante, environ deux siècles avant l’ère chrétienne, a laissé ce mot tel qu’il est dans l’original Ρως = Rosh. Ils ne connaissaient pas le lieu ou la race que ce nom désignait, mais voyant que Méshec et Tubal étaient donnés comme des noms propres, ils comprirent de la même manière le mot précédent. Gog doit donc être réellement « le prince de Rosh, de Méshec et de Tubal » qui sont trouvées toutes les trois dans l’empire russe. Ézéchiel fait voir alors que, à l’époque où Dieu restaure Israël et le plante dans son propre pays, la Russie doit être le dernier grand ennemi qui monte pour l’attaquer, et trouve sa propre destruction des mains de Dieu sur les montagnes d’Israël. Sa prophétie ne porte pas, je pense, sur les événements récents, sauf qu’ils y conduisent. Encore bien moins doit-on la confondre avec le rassemblement de Gog et de Magog d’Apoc. 20:8, 9. Impossible que les deux passages aient trait au même événement. En effet, le prophète Juif parle d’une vaste confédération antérieure au millénium, ou du moins en ses tous premiers jours ; tandis que dans l’Apocalypse, on est mille ans après.
Je pense qu’ici Gog et Magog sont des expressions symboliques qui ont leur fondement, il est vrai, dans le prophète de Kébar, mais qui en sont entièrement distinctes. La prophétie d’Ézéchiel reçoit son accomplissement lorsque Israël est restauré (voir ch. 36 à 37). Gog monte quand le peuple habite dans ses villes sans murailles, et il pense faire aisément sa proie d’eux. Mais l’Éternel intervient. Gog est détruit, et Israël vit et prospère paisiblement dans son pays. En Apoc. 20, ce sont des symboles tirés des circonstances de l’Ancien Testament, mais appliqués à un temps très postérieur. Le dernier ennemi auquel Israël a à faire face avant le millénium est Gog au sens littéral ; la dernière rébellion après le millénium tire son nom de cet effort bien mémorable des nations extérieures à la Palestine. D’innombrables essaims de peuples venus des quatre coins de la terre, sous la conduite de Satan, répéteront (pour la dernière fois) ce que le chef russe aura fait avant elles. Ils monteront sur la largeur de la terre, et environneront le camp des saints et la cité bien-aimée. Bien sûr il s’agit du peuple et de la ville terrestre, car Israël sera alors un corps de saints, un peuple saint, et Jérusalem sera la cité bien-aimée, non pas de nom seulement, mais, en réalité, alors, la ville du grand Roi. Ces nations montent et l’environnent, et Dieu est forcé, si l’on peut dire, de les détruire pour toujours. « Et du feu descendit du ciel de la part de Dieu et les dévora » (20:9). Le feu est constamment la figure du jugement de Dieu. C’est ainsi qu’elles périssent.
Leur chef n’est point atteint par ce jugement : un sort pire lui est réservé. « Et le diable qui les avait séduits fut jeté dans l’étang de feu et de soufre, où aussi sont la bête et le faux prophète ; et ils seront tourmentés jour et nuit aux siècles des siècles ». Ceux qui le suivaient sont détruits par un jugement divin sur la terre, mais le diable, qui les avait entraînés par ses impostures, est jeté dans l’étang de feu et de soufre.
Mais il y a encore une autre scène — la plus solennelle qui soit pour l’homme, là où, à dire vrai, tout est solennel.
« Et je vis un grand trône blanc, et celui qui est assis dessus, de devant la face duquel la terre s’enfuit et le ciel ; et il ne fut point trouvé de lieu pour eux » (20:11).
Remarquez cela. Beaucoup de personnes supposent que c’est là le temps de la venue du Seigneur, et en conséquence, elles placent le millénium avant Sa venue [post-millénarisme]. Mais cette opinion ne peut soutenir la lumière de l’Écriture. Sans recourir à des preuves en dehors de ce chapitre, je voudrais prendre une autre voie, courte et simple et qui, à mon avis, est parfaitement concluante sur cette question. Quand le Seigneur Jésus vient, Il vient vers la terre depuis le ciel ; pour autant que je le sache, c’est ce que croient tous ceux qui ont quelques pensées précises sur ce sujet. Or, ce n’est pas ce que nous trouvons ici ; car le Seigneur est assis sur un grand trône blanc, et au lieu qu’Il vienne du ciel vers la terre, la terre et le ciel ont tous disparu ici. Impossible qu’il s’agisse de la venue du Seigneur sur la terre, car il n’existe plus de terre où Il puisse venir. Tout le système de la terre et du ciel tels qu’ils sont maintenant, ont disparu de la scène. La terre n’est plus trouvée à sa place, car elle a disparu. Le grand trône blanc n’est pas du tout sur la terre ; car la terre et le ciel se sont enfuis de devant la face de Celui qui est assis sur le trône, et il n’a pas été trouvé de lieu pour eux. Et pour qu’on ne pense que leur fuite n’est qu’une simple manière figurée de parler, il est ajouté qu’il n’a pas été trouvé de lieu pour eux. En 2 Pierre 3, il est annoncé qu’ils seront dissous, et que leurs éléments embrasés se fondront. Remarquez donc qu’au moment où Christ est assis sur le grand trône blanc, la terre et le ciel se sont enfuis. Il faut donc en conclure ou bien que le Seigneur Jésus Christ doit être venu auparavant, ou bien qu’Il ne viendra jamais sur la terre — car ce n’est pas du tout la même chose que de supposer qu’Il viendra simplement sur la nouvelle terre une fois tous les jugements terminés, y compris celui des méchants morts. Or nous savons que « le Père ne juge personne, mais Il a donné tout le jugement au Fils » (Jean 5:22), lequel Fils est « établi de Dieu juge des vivants et des morts » (Actes 10:42). La foi générale des chrétiens est qu’Il reviendra sur cette terre. Un jour qui est encore futur, Ses pieds se tiendront sur la montagne des Oliviers qui est vis-à-vis de Jérusalem du côté de l’Orient, et qui, à ce moment-là, doit être non pas détruite, mais fendue par le milieu en témoignage de cet événement solennel (Zach. 14:4). Toutes ces circonstances ne sauraient s’appliquer à ce que l’apôtre Jean nomme les nouveaux cieux et la nouvelle terre, mais à ce qui est antérieur au dernier changement physique. Lorsque le grand trône blanc apparaît, la terre n’est plus là, et il faut donc que la venue de Christ sur la terre ait eu lieu antérieurement à cette dernière scène du jugement. En fait la venue du Seigneur a déjà été décrite au ch. 19, et Son règne au début du ch. 20. Ceci donne d’une manière très précise le caractère du grand trône blanc. Rien de plus simple, si vous prenez les choses dans l’ordre où Dieu les arrange. Mais l’homme est toujours entêté ; et ainsi il efface la venue de Christ du ch. 19, là où elle se trouve, et il l’imagine au ch. 20:11, là où elle ne se trouve pas, ni ne saurait être.
Remarquez encore que le jugement du grand trône blanc n’est pas un jugement général, pas plus que la résurrection mentionnée ici n’est une résurrection générale. L’idée de tout mélanger n’est que pure imagination. Toute âme d’homme (de ceux qui sont morts) doit être soit dans l’une, soit dans l’autre de ces résurrections. Mais l’Écriture nous montre que la résurrection des justes est quelque chose d’entièrement différent de la résurrection des injustes, et a lieu à un tout autre moment : elles n’ont rien de commun, sauf que dans les deux cas, l’âme et le corps sont réunis pour toujours. Il n’existe aucun passage en faveur d’une résurrection commune à tous. On en allègue pourtant quelques-uns pour fournir une apparence de preuve. Le Seigneur dit en Jean 5:28 : « L’heure vient en laquelle tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront Sa voix ; et ils sortiront, ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie ; et ceux qui auront mal fait en résurrection de jugement ». Mais ces paroles ne montrent pas qu’ils ressusciteront au même moment. L’heure vient en laquelle l’une et l’autre de ces classes ressusciteront ; mais au lieu de dire qu’ils doivent ressusciter tous dans une seule et même résurrection commune et indiscriminée, le Seigneur prend la peine d’établir que ceux qui ont fait le bien doivent sortir de leurs sépulcres pour une résurrection de vie, et que ceux qui ont fait le mal doivent en sortir pour une résurrection de jugement. Il y a donc deux résurrections, et non pas une seule commune à tous. Le passage même qu’on cite à l’appui d’une résurrection générale, enseigne en fait le contraire. L’évangile de Jean montre qu’elles sont distinctes dans leur caractère ; son Apocalypse montre qu’elles sont distinctes dans le temps.
On dira peut-être que ces paroles « l’heure vient », impliquent que tous doivent ressusciter à peu près en même temps. Mais le mot « heure » est souvent employé dans l’Écriture (et même partout ailleurs) dans un sens large. Il peut comprendre mille ans ou plus ; de sorte que, si l’une des deux résurrections a lieu au commencement du millénium, et l’autre à la fin, ce peut encore être la même « heure ». « L’heure vient, et elle est maintenant, que les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui l’auront entendue vivront » (Jean 5:25). Cela a trait à ce qui a toujours eu lieu depuis que Christ était sur la terre jusqu’à aujourd’hui. « L’heure » comprend donc environ deux mille ans ; et il n’est certainement pas excessif d’en déduire que « l’heure » du v. 28 peut aussi couvrir une période aussi longue, si nécessaire. C’est l’Écriture qui en décide. Le même Jean qui montre la résurrection de toute chair hors des sépulcres, divisée en deux résurrections très différentes l’une de l’autre, portant sur des hommes de qualités morales opposées, c’est lui qui nous montre avec non moins de clarté et de certitude l’intervalle séparant ces deux résurrections. Notre chapitre 20 tranche cette question, et prouve qu’il y aura un intervalle d’au moins mille ans entre les deux résurrections.
Mais ce n’est pas tout. Outre la distinction de temps où ces deux résurrections ont lieu, il y a entre elles une distinction profonde et fondamentale de nature. L’évangile de Jean déclare que la première est une résurrection de vie, et la seconde une résurrection de jugement. Dans la première sont les justes ; tous ceux qui sont jugés dans la seconde sont les injustes. Les traducteurs de la version autorisée anglaise ont parlé de résurrection de « damnation », mais le véritable sens est « résurrection de jugement ». C’est le même terme qui est employé dans un verset ou deux plus haut (Jean 5:21-27). « Le Père ne juge personne, mais Il a donné tout jugement au Fils… Et Il Lui a donné autorité aussi de juger parce qu’Il est Fils de l’homme ». Il faut garder à l’esprit que Christ, comme Fils de Dieu, donne la vie, mais, comme Fils de l’homme, Il vient pour exécuter le jugement dans Son royaume. Il donne la vie au croyant, et Il exécute le jugement sur le non-croyant. Ainsi, il y a deux résurrections correspondant à ces deux titres. Il y a la résurrection de vie, ou résurrection du croyant : c’est l’application à son corps de cette puissance de vie qu’il a déjà dans son âme. Mais ceux qui ont refusé Christ, que leur reste-t-il ? La résurrection de jugement. Ils ont méprisé Christ maintenant, ils ne peuvent échapper alors à la résurrection de jugement.
Revenant à Apoc. 20, n’est-ce pas ce que nous avons ici ? D’abord nous y avons vu la résurrection de vie, de « ceux qui ont pratiqué le bien » (Jean 5:29). « Bienheureux et saint celui qui a part à la première résurrection » (20:6). Qu’est-il dit d’eux ? « Ils vécurent et régnèrent avec le Christ mille ans » (20:4). C’est une résurrection de vie. Mais regardez les autres, les méchants, « ceux qui ont fait le mal » (Jean 5:29). « Le reste des morts ne vécut pas jusqu’à ce que les mille ans fussent accomplis » (20:5). Qu’avez-vous ici ? « Le reste des morts ne vécut pas, jusqu’à ce que », etc. Ils ressuscitent donc : « Et je vis les morts, les grands et les petits, se tenant devant le trône » (20:12). Il n’y a là que des morts, et quelle différence dans leur manière de paraître devant le trône ! « Et des livres furent ouverts ; et un autre livre fut ouvert, qui est celui de la vie. Et les morts furent jugés d’après les choses qui étaient écrites dans les livres, selon leurs œuvres » (20:12).
Je crois pleinement que toutes les œuvres des saints de Dieu seront examinées : ce qu’ils auront fait dans le corps sera manifesté. Nous recevrons louange ou blâme selon notre fidélité ou notre infidélité, quand le Seigneur Jésus prendra place sur le tribunal ; nous nous tiendrons là devant Lui, et nous serons manifestés. C’est l’apôtre Paul qui le dit (Rom. 14 ; 2 Cor. 5).
Mais dans l’évangile de Jean, le but du Saint Esprit est de souligner le contraste entre les deux résurrections. Il n’est donc rien dit, dans le récit de la première résurrection, de notre comparution devant Christ pour que chacun reçoive les choses accomplies dans le corps, soit bien soit mal ; mais nous sommes représentés comme jugeant les autres. Telle est la manière dont est décrite la résurrection de vie. « Je vis des trônes ; et ils étaient assis dessus, et le jugement leur fut donné » (20:4). Naturellement, ils rendent compte pour eux-mêmes au Seigneur, et reçoivent en conséquence ; mais le Saint Esprit a ses raisons parfaitement sages pour ne faire ici aucune allusion à cela. La première résurrection est une résurrection de vie dans l’Évangile, comme dans l’Apocalypse.
Mais lorsqu’on arrive au reste des morts qui n’ont pas pratiqué le bien, et qui sont ressuscités et se tiennent debout devant le trône, quel contraste avec une résurrection de vie ! Ils n’ont fait que le mal, et quand le livre de vie est ouvert, aucun nom ne s’y trouve ; car ce n’est point une résurrection de vie, mais de jugement. Ils doivent être jugés selon leurs œuvres, écrites dans les autres livres, et leurs œuvres appellent le jugement à grands cris. Leurs œuvres sont toutes et toujours mauvaises, et ils sont jugés d’après elles : quel en est le résultat ? Il pouvait y avoir des différences entre eux à quelques égards : il y a des grands et des petits ; mais ils sont tous pareils en ceci, qu’ils ne sont point écrits dans le livre de vie ; et quiconque n’y est pas trouvé écrit, est jeté dans l’étang de feu. Pas un mot n’est dit ou suggéré qu’ils y étaient écrits. C’est la résurrection de ceux qui n’ont aucune part dans ce livre, et ils sont jetés dans l’étang de feu. C’est comme si Dieu disait : les livres de leurs œuvres appellent le jugement ; n’y a-t-il rien à dire pour la défense de ces misérables ? En conséquence le livre de vie est ouvert, mais ils ne s’y trouvent point : le dernier espoir s’est évanoui, « et si quelqu’un n’était pas trouvé écrit dans le livre, il était jeté dans l’étang de feu » (20:15). C’est la résurrection de jugement, il n’y a là ni vie ni miséricorde. Ceux qui ont eu part à la résurrection de vie, ont été ressuscités longtemps auparavant, et ils ne viennent absolument jamais en jugement, car il est dit (Jean 5:24) : « Celui qui entend ma parole, et qui croit Celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne vient pas en jugement [le même mot que dans les versets 22, 27, 29], mais il est passé de la mort à la vie ».
Il est tout à fait certain qu’il s’agit d’une résurrection à part, distincte dans son caractère, et séparée de l’autre par un long intervalle. La résurrection de vie a eu lieu longtemps auparavant, et maintenant vient la résurrection de jugement. « Et la mer rendit les morts qui étaient en elle ». Les profondeurs que l’homme ne pouvait explorer qu’imparfaitement, ne peuvent plus continuer à cacher ceux qui y étaient engloutis. Le monde invisible sur lequel l’homme n’a aucun contrôle, est aussi forcé de lâcher ses misérables habitants. « Et la mort et le hadès rendirent les morts qui étaient en eux, et ils furent jugés chacun selon ses œuvres » (20:13). Et leurs œuvres les condamnent. Le livre de vie ne renferme rien à leur sujet, et ils sont jetés dans l’étang de feu. C’est la seconde mort, l’étang de feu. Ils sont ressuscités de leur première mort pour être jetés pour toujours dans ce lieu de tourment, qui n’a pas d’issue pour échapper.
Il y a encore un passage très important de l’Écriture, qu’on cite souvent à l’appui d’une résurrection générale. Il s’agit de Daniel 12:1 : « Or en ce temps-là se lèvera Micaël, le grand chef, qui tient pour les enfants de ton peuple [c’est-à-dire le peuple de Daniel, les Juifs] ; et ce sera un temps de détresse tel qu’il n’y en a pas eu depuis qu’il existe une nation, jusqu’à ce temps-là ». Évidemment, ce n’est point là le millénium. « Et en ce temps-là, ton peuple sera délivré, [c’est-à-dire] quiconque sera trouvé écrit dans le livre ». Ce n’est pas là non plus le temps où l’Église est délivrée ; car nous avons été délivrés depuis longtemps par la croix du Seigneur Jésus Christ. Mais depuis la croix de Christ, le peuple Juif n’a eu que la misère : cette croix a été leur faute. Ils ont crié : « Que son sang soit sur nous et sur nos enfants » ? Le temps de leur plus grande souffrance doit précéder immédiatement l’heure de leur délivrance (Jér. 30:7). Notre délivrance, comme la leur, est issue des souffrances d’un Autre ; mais ce que nous souffrons est postérieur à notre délivrance. Il en va tout autrement pour les Juifs. Ils doivent encore traverser une effroyable tribulation, la pire de toutes celles qu’ils ont jamais eues ; mais immédiatement après, arrive leur délivrance finale. « En ce temps-là ton peuple sera délivré », etc. Ils ne seront pas seulement délivrés en tant que peuple, mais ils seront sauvés et convertis individuellement, selon le dessein de Dieu — « quiconque sera trouvé écrit dans le livre ». « Et plusieurs qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, et les autres pour l’opprobre, pour être un objet d’horreur éternelle » (Dan. 12:2).
Voilà le verset qui a été généralement appliqué à la résurrection ; mais je suis convaincu qu’il ne s’applique point à la résurrection du corps. Certes, c’est une figure qui en est tirée, et qui suppose cette grande vérité connue. Mais c’est le même genre d’expression, appliquée à un sujet et à un but analogues, que celle déjà mentionnée à propos d’Ésaïe 26:19, où Israël est désigné comme « mes corps morts », et est invité, en tant qu’habitant de la poussière, à se réveiller et à chanter. Il est dit de même ici : « Plusieurs qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, et les autres pour l’opprobre, pour être un objet d’horreur éternelle ». Cela ne cadre avec aucun système d’interprétation, s’il faut l’appliquer à la résurrection littérale des corps des bons et des méchants au même moment. Vous remarquerez que cela se passe avant le millénium. C’est évidemment antérieur au temps de la délivrance et de la bénédiction. Il y a un temps de détresse, et immédiatement après, le peuple de Daniel est délivré, et ceux qu’on aurait pu oublier (dormant, pour ainsi dire, parmi les Gentils), réapparaissent, mais dans un but tout autre, les uns pour l’opprobre, et les autres pour la vie éternelle (voir aussi És. 66:20, 24). Cela ne répond point à ce que se figurent ceux qui citent ce passage, car leur idée est qu’il y a d’abord le millénium, et ensuite la résurrection des bons et des méchants. Cette résurrection, littérale ou figurée, précède le millénium, et elle est suivie du temps de la plus grande détresse qu’Israël ait jamais connue.
Ma conviction est donc que Dan. 12 se rapporte aux Juifs. D’abord au verset 1, ceux qui doivent être délivrés sont mentionnés en relation avec la Palestine. Ensuite il est annoncé que plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre, sortiront de leur dégradation, se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, etc. Certains de ces Juifs qui doivent sortir des lieux où ils sont cachés par toute la terre, se révèlent avoir été rebelles, et sont traités en conséquence, tandis que les autres apprennent que l’Éternel a opéré en leur faveur à cause de Son nom. On peut rapprocher cela d’Éz. 37 où les os secs représentent la maison d’Israël. Un esprit sérieux n’a pas de doute sur ce passage, car le Seigneur lui-même l’a interprété comme une figure de la résurrection à venir d’Israël. « Mon peuple, voici j’ouvrirai vos sépulcres, et je vous ferai monter hors de vos sépulcres » (Éz. 37:12). Et si en Daniel il est dit que les uns auront la vie éternelle, Ézéchiel déclare que l’Éternel mettra Son Esprit en eux. C’est une restauration spirituelle, aussi bien que nationale. Le passage de Daniel se rapporte donc à une résurrection figurée d’Israël, où quelques-uns se réveilleront de leur mort morale.
Revenons maintenant à Apoc. 20 avec une conviction plus ferme que la doctrine d’une résurrection générale est une erreur complète, et que la parole de Dieu enseigne deux résurrections, l’une des justes et l’autre des injustes. Celle dont il est question à la fin de notre chapitre est uniquement la résurrection des méchants morts ; c’est une résurrection de jugement. J’en appelle à vous-mêmes : pouvez-vous faire reposer le salut de vos âmes sur vos œuvres ? J’admets que nos œuvres seront examinées, et que nous recevrons selon ce qu’elles auront été ; mais ce n’est pas la même chose que d’être jugés selon nos œuvres. Dans le premier cas la personne est acceptée, mais ses œuvres sont passées en revue pour être louées ou blâmées ; dans l’autre cas, la personne est jugée selon des œuvres qui ne sont pas mélangées, mais qui sont entièrement mauvaises et seulement mauvaises. En effet, l’homme naturel, l’homme inconverti, n’a pas de vie pour Dieu, il ne peut donc se trouver chez lui que des œuvres mauvaises pour lesquelles il doit être jugé. Il n’en est pas ainsi pour le croyant. Sans doute qu’il se trouve chez lui des œuvres quelquefois bien mélangées, et même pire quelquefois. Mais il a une position au-delà de tout cela. Autrement il serait impossible d’avoir un salut dans la justice et dans la paix. Le croyant possède la nouvelle nature que Dieu a donnée, et qu’Il ne retirera pas ; il a aussi la rédemption, le pardon des péchés — tout cela en Christ. Ses œuvres seront examinées, et elles auront une influence très grande sur la position que le Seigneur lui attribuera dans Son royaume. Être sauvé ou perdu n’est jamais une question de récompense, mais c’est uniquement l’effet de la grâce et de la puissance de Christ. Quand on parle de récompense, il y a un dû en rapport avec une œuvre faite ; mais l’Écriture ne parle jamais du salut comme récompense pour des œuvres. Il est l’effet de la grâce de Christ, le fruit de Son travail et de Ses souffrances, ce que Dieu nous a donné dans Son amour souverain.
Et lorsque nous nous trouverons devant le tribunal de Christ, ce ne sera point pour recevoir une sentence d’acquittement ou de condamnation : ce serait nier notre justification et la valeur de Son œuvre. Toutes nos voies seront manifestées à la lumière de Dieu, et le Seigneur nous mènera à travers elles d’une manière triomphante ; mais Il ne passera pas sur une seule action, une seule parole ni une seule pensée qui aura été contre Lui. De même qu’un chrétien peut aujourd’hui examiner ses voies devant Dieu, les juger, et rendre grâces à Dieu pour Sa discipline fidèle, il en sera de même devant le tribunal de Christ, mais d’une manière plus brillante, plus bénie, et plus parfaite. Il ne sera pas alors question d’être seulement sauvé, mais de justifier la gloire et la bonté du Seigneur. Certes cela sera solennel, mais avons-nous à le redouter ? Nous aurons à en être reconnaissant durant toute l’éternité. Car même maintenant, le jugement de soi n’est pas une petite bénédiction ; c’est peut-être la bénédiction dont la valeur vient juste après la joie de la grâce qui amène à adorer Dieu et à Le servir fidèlement en Esprit. Nous n’aurons rien à dire pour nous justifier de quoi que ce soit, mais le Seigneur aura beaucoup à dire pour nous. Il manifestera tout ce que nous aurons fait, et nous recevrons en conséquence. Pour les choses mauvaises, nous souffrirons une perte, pour les bonnes nous obtiendrons une récompense.
Mais ici, quelle différence ! Les morts se tiennent maintenant debout devant le trône : quelle fin ! Ce n’est pas l’annihilation, mais c’est incomparablement pire : la destruction. Ils n’ont pas de vie, rien sinon des œuvres mortes. Ils ont refusé Christ, ils ont rejeté tous les témoignages par lesquels Dieu les a éprouvés ; que méritent leurs œuvres ? Ils sont jetés dans l’étang de feu. La Mort et le Hadès ne sont plus nécessaires désormais ; ils sont personnifiés comme les ennemis de Dieu et de l’homme, et comme tels, dans la vision, ils sont aussi jetés dans l’étang de feu (20:14) (*).
(*) On est surpris de voir Mr. Elliott (Horae Apocalipsae) appliquer Matt. 25:31-46 à l’enlèvement des saints vivants, les morts ayant été ressuscités juste avant, et enlevés ; à la suite de cela il imagine la catastrophe d’une rupture sans précédent de la croûte terrestre en rapport avec le monde Romain, et une possible (!) participation des saints ressuscités à la venue du Seigneur et au jugement. Ailleurs cet auteur voit dans ce passage une référence principale au jugement des vivants, étant entendu qu’un jugement plus extensif des morts peut y être inclus. — À la vérité, tout n’est que confusion dans ces développements.
En fait, dans Matt. 25:31-46, les brebis sont autant distinguées des frères du Roi qu’elles sont mises en contraste avec les chèvres. Il n’y a pas un mot qui implique une résurrection ou un enlèvement au ciel. C’est une scène glorieuse sur la terre, postérieure à l’apparition de Christ, et donc postérieure à l’enlèvement des saints célestes ; et c’est une action judiciaire non pas avec des morts, mais avec des vivants ; et non pas avec tous les vivants, mais avec toutes les nations ou Gentils dont le sort est réglé sur la base de leur comportement vis-à-vis du Roi, tel que présenté par Ses frères qui ont annoncé le royaume (voir Matt. 24:14) avant que la fin soit arrivée. Il n’y a aucune trace de ressemblance avec la scène du grand trône blanc, ni avec aucun jugement des morts. Aucune question n’est soulevée en dehors de la question solennelle et finale, pour ceux qu’elle concerne, de savoir si on a honoré ou méprisé le Roi dans la personne de Ses messagers.
La difficulté insurmontable sur laquelle butent la plupart des commentateurs, est la place qu’occupe la révélation de la première résurrection : après la destruction de la bête. Si l’on ne reconnaît pas un enlèvement des saints au préalable, auxquels sont ajoutés juste avant le millénium ceux qui ont souffert pendant le temps de l’Apocalypse, cela donne lieu au genre d’erreurs de Mr. E. La source de toutes ces erreurs est probablement la négation du véritable caractère de l’Église, — le caractère qui lui est spécifique.
Il n’est question que de non-croyants ici. Seuls les non-croyants viennent en jugement, comme nous l’apprenons de Celui qui nous assure que les croyants n’y viennent pas ; et aucun de ceux avec lesquels Dieu entre en jugement, n’est ni ne peut être justifié. C’est le jugement des morts, après que tous les justes endormis en Christ ont été ressuscités pour régner avec Lui (c’est longtemps auparavant qu’ils ont été ressuscités). Les saints qui ont vécu n’entre pas dans ce jugement, quoi que sans aucun doute, ils rendront compte de tout à Dieu, comme nous-mêmes.
La division de ces chapitres aurait été plus heureuse, si le passage de 21:1-8 avait été rattaché à la série d’événements du ch. 20 pour former une suite ininterrompue. La chaîne des événements se termine de façon très nette à la fin du v. 8 de ce ch. 21. Ensuite, depuis le v. 9 du ch. 21 jusqu’au v. 5 du ch. 22, nous avons une autre portion dont les détails se lient entre eux. Les huit premiers versets du ch. 21 se rattachent à une époque tout à fait différente de ce qui suit. À partir du verset 9 du ch. 21, on revient en arrière, au millénium, tandis que les versets (21:1-8) qui précèdent sont le récit le plus complet que Dieu fournisse sur les nouveaux cieux et la nouvelle terre, au sens propre de ces expressions. Cette scène est postérieure au règne de mille ans, au grand trône blanc, et bien sûr, à la dissolution complète des cieux et de la terre de maintenant, lesquels sont encore présents quand ce trône est mis en place. Puis, lorsque cette rapide description de l’état éternel est terminée, l’Esprit de Dieu ajoute un complément, ou appendice, très important, sur l’état de choses durant le millénium. Rien sur cet état de choses n’était donné lors de la mention de cette époque millénaire dans la suite historique qui va d’Apoc. 19 jusqu’à 21:8.
On objectera peut-être à cela en disant : Sur quelle autorité vous fondez-vous pour diviser les chapitres de cette manière ? Pourquoi ne pas prendre le ch. 21 tout entier comme s’appliquant à une seule et même période, ainsi que l’ont probablement compris ceux qui ont fait la division des chapitres ? Pourquoi ne pas supposer que ce qui est dit de la nouvelle Jérusalem au v. 10, se rapporte à la même date que ce qui en est dit au v. 2 ? — La réponse est simple. Dans l’état éternel, Dieu a à faire avec les hommes ; toutes les distinctions de temps ont pris fin ; il n’y a alors ni rois, ni nations. Or c’est justement ce qu’on trouve dans les huit premiers versets. Prenez par exemple, le v. 3 : « Et j’entendis une grande voix venant du ciel, disant : Voici, l’habitation de Dieu est avec les hommes, et Il habitera avec eux, et ils seront Son peuple, et Dieu Lui-même sera avec eux, leur Dieu ». Si nous nous reportons à la dernière partie du ch. 21, nous avons de nouveau à faire à des nations et des rois terrestres. « Et les nations marcheront par sa lumière ; et les rois de la terre lui apporteront leur gloire » etc. Quand l’éternité commencera, Dieu aura fini d’agir avec les choses qui sont selon l’ordre du monde, comme les rois, les nations, ou autres arrangements de nature temporelle. Tout cela implique un gouvernement, et un gouvernement suppose qu’il y a du mal à réprimer. Ce n’est donc pas l’état éternel que nous avons dans la dernière partie du ch. 21, mais un état de choses antérieur dont les premiers versets (1 à 5) du ch. 22 terminent la description. Il y est fait mention d’un arbre : « et les feuilles de l’arbre sont pour la guérison des nations » (22:2). Autrement dit, au temps dont parle ce verset, non seulement il y aura des nations, mais ces nations auront besoin de guérison, et Dieu pourvoira à ce que leur condition réclame. Pour tout esprit dépourvu de préjugé, voilà de quoi être convaincu qu’au ch. 22, l’Esprit de Dieu ne fait pas allusion à ce qui suit le dernier jugement, quand tout ce qui est en relation avec le monde aura entièrement pris fin, mais qu’Il revient à un état préalable où Dieu gouverne encore. Il faut remarquer aussi que, dans la partie relative au millénium (c’est-à-dire à partir de 21:9), nous avons des noms en rapport avec les dispensations, comme le Seigneur Dieu Tout-Puissant, et l’Agneau ; il n’en est pas ainsi dans le ch. 21:1-8 qui est en rapport avec l’éternité, et où Dieu sera tout en tous (1 Cor. 15:28).
Une autre remarque peut encore aider à convaincre, c’est la manière habituelle dont Dieu fait les tableaux rétrospectifs dans ce livre. Je dis cela pour montrer que dans la présentation de l’arrangement des événements tel que je le comprends, je ne suis pas en train d’argumenter en faveur de quelque chose sans précédent. Prenez par exemple le ch. 14. Nous avons vu là une septuple série bien régulière d’événements, la chute de Babylone étant au 3ème rang dans l’ordre. Après cela vient le jugement des adorateurs de la bête ; ensuite, le Saint Esprit déclare bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur, puis, la venue du Seigneur en jugement est présentée de deux manières, comme la récolte de la moisson, et comme le foulage de la vendange (la moisson figurant un jugement discriminatif, et la vendange un jugement de pure vengeance). Babylone y a là très nettement sa place assignée par Dieu. Mais longtemps après, dans la prophétie, lorsque l’Esprit de Dieu nous a montré les sept coupes de la colère de Dieu, nous avons de nouveau Babylone, dont la chute figure à la 7ème coupe. Ceci est important car le Saint Esprit se met alors à décrire le caractère et la conduite qui ont rendu nécessaire une aussi terrible visitation de la main de Dieu. Dans ce cas, le Saint Esprit nous a fait parcourir au ch. 14 les événements postérieurs à la chute de Babylone, allant jusqu’à la venue du Seigneur en jugement ; puis Il revient en arrière dans les ch. 17 et 18 pour nous montrer des détails concernant Babylone et sa relation avec la bête, et les rois de la terre.
Or, il me semble que cela correspond exactement à l’ordre des événements du ch. 21. Il y a une analogie frappante dans la manière dont Babylone et la Jérusalem céleste sont introduites, et bien que, sans doute, il y ait un contraste très fort et très marqué entre les deux, il est cependant assez manifeste, me semble-t-il, que le Saint Esprit les avait les deux à la fois dans Sa pensée. Ainsi, en Apoc. 17:1, il est dit : « Et l’un des sept anges qui avaient les sept coupes, vint et me parla, disant : Viens ici ; je te montrerai la sentence de la grande prostituée qui est assise sur plusieurs eaux ». Telle est la déclaration faite quand la vision revient en arrière pour décrire Babylone et son sort. C’est exactement de la même manière qu’est introduite la vision correspondante au ch. 21, qui revient en arrière pour voir l’épouse, la femme de l’Agneau. « Et l’un des sept anges qui avaient eu les sept coupes pleines des sept dernières plaies, vint et me parla, disant : Viens ici, je te montrerai l’épouse, la femme de l’Agneau ». De même que Babylone a eu une place précise dans la séquence historique des événements, et qu’une fois cette séquence achevée, le Saint Esprit s’est arrêté pour dévoiler rétrospectivement les détails de ses voies morales qui ont, pour ainsi dire, forcé Dieu à la juger, — de la même manière exactement, la femme de l’Agneau, la nouvelle Jérusalem, est vue sous ces deux caractères dans l’esquisse finale de l’histoire qui va jusqu’à la fin. Et maintenant, le Saint Esprit revient en arrière, décrivant la même nouvelle Jérusalem en rapport avec le règne millénaire, et les rois et les nations qui seront alors sur la terre.
Au ch. 19:7 nous avons l’épouse, la femme de l’Agneau, qui se prépare. Au ch. 21:2 nous avons la nouvelle Jérusalem descendant du ciel d’auprès de Dieu, encore toute fraîche de la beauté de jeune mariée, alors que plus de mille ans ont passé. Mais maintenant, au ch. 21:9, apparaît le fait très important que l’épouse, la femme de l’Agneau, est la sainte cité Jérusalem. « Et l’un des sept anges… vint et me parla, disant : Viens ici, je te montrerai l’épouse, la femme de l’Agneau. Et il m’emporta en esprit sur une grande et haute montagne, et il me montra [non pas la grande ville, mais] la sainte cité, Jérusalem, descendant du ciel d’auprès de Dieu » (21:9-10). Jean a été appelé pour voir l’épouse, et quand il regarde, il voit la Jérusalem céleste. Ainsi, si nous avons l’épouse en relation avec l’Agneau au ch. 19, et en relation avec l’état éternel comme la sainte cité, Nouvelle Jérusalem, au ch. 21:1-8, les versets 9 et suivants de ce chapitre 21 nous montrent que dans l’intervalle entre les noces de l’Agneau et les nouveaux cieux et la nouvelle terre de l’état éternel, l’épouse occupe une place extrêmement bénie aux yeux de Dieu et des hommes. C’est la manifestation millénaire de l’Église.
Puissent ces quelques remarques préliminaires frayer la voie, et prouver que je n’avance rien qui ne puisse être démontré lorsque je prends les huit premiers versets du ch. 21 comme la suite directe des événements des ch.19 à 20, et en considérant le reste de ce chapitre 21, à partir du verset 9, comme une description rétrospective de l’état millénaire. Il est évident qu’il y a les raisons les plus fortes en faveur de cette interprétation, et il me semble véritablement que toute autre est hors de question, si l’on pèse correctement le contexte. Impossible qu’une personne instruite dans la Parole et dépourvue de préjugés, qui considère attentivement les circonstances ici décrites, puisse supposer que ce qui suit le verset 9 puisse être concomitant avec la section qui précède immédiatement. Ce sont, comme nous l’avons déjà remarqué, deux états de choses incompatibles.
Qu’est-ce que le Saint Esprit fait voir à l’apôtre, après le jugement dernier et la disparition des anciens cieux et de l’ancienne terre ? « Et je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre ; car le premier ciel et la première terre s’en étaient allés, et la mer n’est plus » (21:1). Il ne faut pas donner à ces mots une portée simplement préparatoire et morale. Le prophète Ésaïe avait déjà parlé de cette manière. Ésaïe 65 annonce de nouveaux cieux et une nouvelle terre, mais avec quelle différence ! Le langage est en effet à prendre là dans un sens restreint. « Car voici, je crée de nouveaux cieux et une nouvelle terre, et on ne se souviendra plus de ceux qui ont précédé, et ils ne monteront pas au cœur. Mais réjouissez-vous et égayez-vous à toujours de ce que je crée ; car voici, je crée Jérusalem [pour être] une jubilation, et son peuple, une joie ; et je m’égayerai sur Jérusalem, et je me réjouirai en mon peuple. Et on n’y entendra plus la voix des pleurs et la voix des cris. Il n’y aura plus, dès lors, ni petit enfant de peu de jours, ni vieillard qui n’ait pas accompli ses jours. Car le jeune homme mourra âgé de cent ans, et le pécheur âgé de cent ans sera maudit » (Ésaïe 65:17-20). Voilà, évidemment un changement très brillant, mais cela reste une condition terrestre. Il y a des enfants et des vieillards ; et bien que la description établisse intentionnellement un contraste entre ces choses nouvelles et tout ce que le monde a vu jusqu’ici, il s’agit cependant d’un état de bénédiction qui se situe dans le temps, et non pas dans l’éternité. — Par contre, le nouveau ciel et la nouvelle terre que l’apôtre Jean nous montre dans l’Apocalypse, sont à prendre dans le sens le plus absolu, non pas dans un sens relatif. Dans l’Ancien Testament, les nouveaux cieux et la nouvelle terre sont limités, car ils se rattachent encore à Israël sur la terre. C’est pourquoi il est dit du Seigneur qu’Il « régnera sur la maison de Jacob à toujours, et qu’il n’y aura pas de fin à son royaume » (Luc 1:33). Ceci est une espérance propre à l’Ancien Testament, bien qu’elle soit exprimée dans le Nouveau, et le sens en est, bien sûr, que le Seigneur régnera sur la maison de Jacob aussi longtemps qu’elle existera comme telle sur la terre. Lorsque la terre disparaîtra et qu’Israël cessera d’être une nation, ils seront bénis, sans doute, d’une manière autre et meilleure ; mais il n’y aura pas alors de règne de Christ sur eux comme peuple terrestre ici-bas ; de sorte que ce royaume, qui certes n’a pas de fin tant que la terre subsiste, doit nécessairement être limité à la durée de la terre. C’est ainsi que je comprends les nouveaux cieux et la nouvelle terre dont parle Ésaïe. Le Nouveau Testament emploie cette expression dans un sens plein et absolu, comme signifiant un état sans fin ; mais dans l’Ancien Testament, cette expression se lie aux relations terrestres dont le Saint Esprit est alors en train de parler.
Ce qui rend la chose encore plus claire, c’est que le verset suivant (Ésaïe 65:21) continue en disant : « Même ils bâtiront des maisons et les habiteront ; et ils planteront des vignes et en mangeront les fruits. Ils ne bâtiront pas pour qu’un autre habite… mes élus useront eux-mêmes l’ouvrage de leurs mains. Ils ne travailleront pas en vain, ni n’engendreront pour la frayeur ; car ils sont la semence des bénis de l’Éternel » (És. 65:21-23). Cela est très réjouissant. Et encore : « Le loup et l’agneau paîtront ensemble… On ne fera pas de tort, et on ne détruira pas sur toute ma montagne sainte, dit l’Éternel » (És. 65:25). Si beau et si brillant que soit ce tableau de ce que le Seigneur peut accomplir, il reste cependant en rapport avec la terre et un peuple terrestre. Ce n’est pas l’état éternel, mais un jour excessivement glorieux, quand la mort sera l’exception, et la vie la règle. Je dis que la mort sera ainsi rare, au moins dans la Terre Sainte, à cause de ce verset : « Car le jeune homme mourra âgé de cent ans ; et le pécheur âgé de cent ans sera maudit » (És 65:20), ce qui signifie que si quelqu’un meurt à l’âge de cent ans, il sera encore jeune, comparativement ; et si la mort survient à cet âge, ce ne sera que comme résultat d’une malédiction expresse de la part de Dieu. Voilà ce qui aura lieu durant le millénium.
Ceci semble répondre à une question souvent posée : Qu’adviendra-t-il des justes durant ce règne merveilleux ? Si la première résurrection a déjà eu lieu, et que dans la seconde, seuls des méchants morts ressuscitent, quelle peut être la destinée des justes qui vivront au temps du millénium ? La vérité est qu’il n’y a pas de preuve dans l’Écriture que des justes meurent au cours du millénium. Ce qui est dit laisse entendre le contraire. Si donc il ne meurt pas de justes au cours du millénium, il n’y en a pas à ressusciter à la fin. En conséquence, la résurrection de la fin reste bien pour les méchants morts seulement. Les justes seront ressuscités avant le millénium, les méchants après. Les justes qui vivront pendant le règne de Christ ne seront pas du tout appelés à mourir, pour autant que l’Écriture nous en informe. Nous pouvons être sûrs que ces saints du millénium seront changés en la ressemblance de Christ, et qu’ils seront transportés dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre. Nous ne sommes pas appelés à faire des suppositions sur la manière dont ces faits s’accompliront. Il suffit de savoir que, bien qu’ils ne soient pas présentés comme passant par la mort durant le millénium, et que par conséquent, ils n’auront pas besoin d’être ressuscités, cependant, lorsque la nouvelle terre apparaît, on y trouve des hommes dessus, bien distingués de la nouvelle Jérusalem (qui est le symbole des saints célestes glorifiés). Je crois que le verset 3 garantit ce que j’avance. « Voici l’habitation [ou : le tabernacle] de Dieu [ou : la cité qui descend] est avec les hommes » etc.
Une autre preuve qu’Ésaïe ne parle pas de l’état éternel décrit ici, est la suivante : quand les nouveaux cieux et la nouvelle terre sont vus par le prophète du Nouveau Testament, il est indiqué que les premiers s’en sont allés, et que la mer n’est plus. Il n’en est pas ainsi dans la prophétie d’Ésaïe, où c’est plutôt l’esprit et le gage de ce qui est nouveau qui vient dans l’ancien ; une ombre de ce qui devait arriver, et non pas l’image même ni l’accomplissement de la chose. Prophétiquement ils sont dits « nouveaux » à cause de la grande joie et de la bénédiction que Dieu accordera à Son peuple Israël dans leur pays.
Dans l’Apocalypse, « la mer n’est plus ». Dans l’Ancien Testament, au contraire, « l’abondance de la mer [est-il écrit] se tournera vers toi… Car les îles s’attendront à moi, et les navires de Tarsis viennent les premiers » (Ésaïe 60:5, 9). Il n’y a aucun doute que ce chapitre parle de la même époque que le ch. 65. « Car ta lumière est venue, et la gloire de l’Éternel s’est levée sur toi » (És 60:1). Ce passage et d’autres, prouvent qu’il y aura encore la mer au temps dont parle Ésaïe ; les îles et les navires l’impliquent nécessairement, et « les îles lointaines » sont introduites entre les deux déclarations concernant les nouveaux cieux et la nouvelle terre en Ésaïe 65 et 66 (cf. 66:19).
Ici, dans l’Apocalypse, ce n’est pas simplement la dispensation actuelle qui se termine, mais le ciel et la terre actuels s’en vont, et font place à « toutes choses faites nouvelles » (21:5). Sans doute, le nouveau ciel et la nouvelle terre seront formés à partir du premier ciel et de la première terre. Tout comme le corps de résurrection sera formé à partir du corps d’humiliation actuel par la puissance de Dieu, ainsi la terre et les cieux actuels sont destinés à une transformation de ce genre (*). Après leur dissolution, ils réapparaîtront dans la forme du nouveau ciel et de la nouvelle terre. « Plus de mer » serait impossible sans un miracle, aussi longtemps que la vie selon sa condition présente doit subsister. Mon lecteur sait que la mer est absolument nécessaire à la nature animale telle qu’elle est ; sans elle, l’homme ne pourrait pas exister, ni le règne animal et même végétal, sans parler du vaste monde des eaux. Mais lorsque le temps aura pris fin, lorsqu’aura cessé la vie naturelle qui est soutenue par Dieu — lorsque le millénium aura achevé de rendre l’éclatant témoignage à ce fruit de Sa sagesse, de Sa bonté et de Sa puissance (aussi bien qu’à tous les autres fruits) — alors suivra un état de choses entièrement nouveau, un état de choses parfait et éternel. Il y aura de nouveaux cieux et une nouvelle terre, car les premiers cieux et la première terre auront passé et la mer n’est plus. La perfection sera arrivée pour l’univers.
(*) Note Bibliquest : ce point nous parait incertain. Voir 2 Pierre 3:7, 10.
Mais ce n’est pas tout. Dans ce lieu d’habitation, cette scène d’ordre que Dieu fera (si remarquablement distincte de tout ce qui a existé auparavant et même de ce qui a accompagné le règne de Son Messie), c’est dans ce cadre que Jean voit « la sainte cité, nouvelle Jérusalem, descendant du ciel d’auprès de Dieu, préparée comme une épouse ornée pour son mari. Et j’entendis une grande voix du ciel, disant : Voici, le tabernacle [ou : habitation] de Dieu est avec les hommes, et Il habitera avec eux ; et ils seront Son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux, leur Dieu » (21:2-3). À mon sens, c’est la nouvelle Jérusalem qui est le tabernacle [ou : habitation] de Dieu. C’est là que, d’une manière toute spéciale, Dieu habite. Et ce tabernacle [ou : habitation] de Dieu descend du ciel pour être avec les hommes. Les saints célestes composent le tabernacle de Dieu, tandis que ceux qui sont sur la nouvelle terre sont simplement qualifiés d’« hommes ». Désormais ce ne sont plus des Juifs et des Gentils, comme dans le millénium ; cette différence aura passé avec « les premières choses » (21:4). Toutes les distinctions qui sont en rapport avec le temps auront disparu. Lorsqu’un saint est ressuscité ou changé, il cesse d’être un Juif ou un Grec : il est un homme, portant toutefois l’image du céleste (1 Cor. 15:49). De même ici, Dieu a à faire avec les hommes ; « et Il habitera avec eux et ils seront Son peuple, et Dieu Lui-même sera avec eux, leur Dieu ». Au lieu de la contempler à distance, Dieu ne viendra pas simplement visiter la scène que Sa main aura formée pour l’homme, comme autrefois au jardin d’Eden ; mais Il habitera éternellement au milieu d’eux.
« Et Dieu essuiera toutes larmes de leurs yeux ; et la mort ne sera plus ; et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni peine, car les premières choses sont passées » (21:4).
Les figures employées pour décrire cet état de choses sont incontestablement tirées d’Ésaïe — figures que l’Esprit de Dieu appliquaient premièrement à la bénédiction millénaire. Ésaïe prédisait une condition glorieuse mais terrestre, que Dieu réalisera pour les justes durant le millénium. La bénédiction sera alors la règle, la douleur l’exception. Le Saint Esprit reprend maintenant des termes semblables, mais avec des différences frappantes, et les applique dans un sens beaucoup plus profond et réellement absolu.
Considérons un peu un passage de 2 Pierre 3 qui aidera à faire un lien entre Ésaïe et l’Apocalypse. Il est écrit en 2 Pierre 3:10, 12 : « Or, le jour du Seigneur viendra comme un voleur ; et en ce jour-là, les cieux passeront avec un bruit sifflant, et les éléments embrasés seront dissous, et la terre et les œuvres qui sont en elle seront brûlées entièrement… Les cieux étant en feu seront dissous, et les éléments embrasés se fondront ». Il me paraît clair que c’est ce qui se passera à l’époque du grand trône blanc. Car dès l’instant où le Seigneur prend place sur ce trône, la terre et le ciel, s’enfuient de devant Sa face, et il n’est pas trouvé de lieu pour eux. Cela fait partie du « jour du Seigneur », qui comprend tout l’intervalle de temps depuis le moment où le Seigneur intervient pour juger le monde, où Il prend Sa grande puissance et entre dans Son règne (11:17), jusqu’au moment où Il remettra le royaume (1 Cor. 15:24), après que le millénium et les jugements qui suivent seront achevés (*). « Toutes ces choses devant donc se dissoudre, quelles gens devriez-vous être en sainte conduite et en piété, attendant et hâtant la venue du jour de Dieu, à cause duquel les cieux en feu seront dissous, et les éléments embrasés se fondront. Mais, selon Sa promesse, nous attendons de nouveaux cieux et une nouvelle terre dans lesquels la justice habite » (2 Pierre 3:11-13).
(*) Je ne crois pas que le jour du Seigneur, dans le sens où Pierre emploie l’expression, soit simplement l’époque de la venue du Seigneur ; mais c’est plutôt la période entière couvrant Son règne et Ses jugements. Il s’ensuit que le millénium, aussi bien que la dissolution finale du ciel et de la terre actuels, sont inclus dans le cadre de Son jour, tandis que Sa venue précède l’un et l’autre. Il ne faut pas identifier le jour du Seigneur avec la venue du Seigneur.
Or c’est là l’état de choses décrit, avec plus de détails quant au temps et au caractère, par l’apôtre Jean. Le nouveau ciel et la nouvelle terre sont ce que nous trouvons au début du ch. 21. Ce sont les nouveaux cieux et la nouvelle terre « dans lesquels la justice habite ». La justice y a sa demeure parce que Dieu y habite, et cela ne peut avoir lieu que parce que la justice domine partout. Il est clair que le Saint Esprit, dans Pierre, fait allusion au passage d’Ésaïe, car il est dit : « selon Sa promesse, nous attendons » ; mais Il lui donne une signification plus vaste et plus profonde. Et Jean, le dernier des écrivains du Nouveau Testament, reprend la même pensée, et met chaque élément de la vérité à sa place. Il nous montre que si le millénium peut en être un accomplissement partiel, ce n’est qu’après le millénium que la pleine force de cette expression « selon Sa promesse » s’appliquera ; alors, toutes choses étant conformes à la pensée et au conseil divins, Dieu se reposera, et les hommes (non pas seulement Israël, mais des hommes rachetés et glorifiés) seront Son peuple et Lui sera leur Dieu.
Il me faut citer un autre passage pour relier entre eux les différents passages qui traitent de l’état éternel. En 1 Cor. 15:23, nous lisons que chacun doit ressusciter en son propre rang : « les prémices [ou : premiers fruits], Christ [qui est déjà ressuscité] ; puis ceux qui sont du Christ, à sa venue ; ensuite la fin, quand il aura remis le royaume à Dieu le Père, quand il aura aboli toute principauté, et toute autorité, et toute puissance » (1 Cor. 15:23-24). Ce sera la tâche de Christ pendant le millénium : Il abolira toute domination contraire, s’assujettira tous les adversaires, et assujettira toutes choses à la gloire de Dieu le Père, car c’est là le but ultime de Son exaltation selon Phil. 2. « Car il faut qu’il règne jusqu’à ce qu’il ait mis tous les ennemis sous ses pieds : le dernier ennemi qui sera aboli, c’est la mort » (1 Cor. 15:25-26). Ceci est en parfaite harmonie avec Apoc. 20 et 21, ou nous trouvons d’abord le règne de Christ, puis la mort détruite, et ensuite le nouveau ciel et la nouvelle terre, ce qui correspond au temps où, selon 1 Cor. 15:24, Christ remettra le royaume à Dieu le Père. Non pas que Christ cessera de régner comme Dieu ; mais le règne spécial, humain, de Christ finira — c’est-à-dire Son acte de régner pendant une période donnée sur un peuple terrestre, et sur le monde en général, ce à quoi les saints célestes dans la gloire participeront avec Lui. Cela prendra fin. Tous les justes seront enfin dans un état de résurrection ou de changement, tous les méchants morts seront jetés dans l’étang de feu, et alors le royaume finira. Sa remise à Dieu le Père ne porte aucune atteinte à la gloire personnelle du Seigneur Jésus. Le royaume que Christ possèdera pendant le millénium, n’est pas ce qu’Il a comme Dieu, mais comme homme ressuscité — comme Celui qui a été humilié, mais ensuite exalté. Ce royaume, Il le remet à Dieu le Père (Lui-même comme homme prenant la place de sujétion en gloire, comme Il le fit autrefois en grâce sur la terre), afin que Dieu (Père, Fils et Saint Esprit) soit tout en tous, — Dieu comme tel ayant la place de suprématie durant toute l’éternité. Mais, bien que le règne humain et médiatorial de Christ doive avoir une fin, il n’en est pas ainsi du règne divin ; c’est pourquoi il est dit de nous, qui sommes participants de la nature divine, que nous régnerons aux siècles des siècles (Apoc. 22), et en Rom. 5:17 il est écrit que « nous régnerons en vie par un seul, Jésus Christ ». Il est évident que la participation à la nature divine ne touche en rien la gloire incommunicable de la Déité. Mais il demeure vrai que nous avons une vie éternelle, et que son caractère infini découle du fait qu’elle nous est donnée par Celui qui, bien que véritablement homme, est une personne divine, — par Celui qui est le vivant, et qui a été mort, et voici, il est vivant aux siècles des siècles (1:17-18). L’expression « nous régnerons en vie par un seul, Jésus Christ », indique un règne qui n’est limité ni par rapport au temps, ni par rapport à sa sphère.
Vous remarquerez que, dans cette partie de l’Apocalypse, c’est Dieu qui est prééminent, et cela est en harmonie avec 1 Cor. 15:28. « Et celui qui était assis sur le trône dit : Voici, je fais toutes choses nouvelles. Et il me dit : Écris, car ces paroles sont certaines et véritables » (21:5). Celui qui parle est Celui qui est assis sur le trône. L’Agneau n’est pas mentionné. C’est la gloire de Dieu dans le sens le plus complet possible, que nous avons ici. « Et il me dit : C’est fait : Moi, je suis l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin ». Sans doute, Christ est aussi l’Alpha et l’Oméga, comme on le voit au ch. 22:13 ; mais ici ce n’est pas le Seigneur comme tel qui agit et qui parle, c’est Dieu. « À celui qui a soif, je donnerai, moi, gratuitement, de la fontaine de l’eau de la vie. Celui qui vaincra héritera de ces choses, et je lui serai Dieu, et lui me sera fils » (21:6, 7). Il est tout à fait clair que c’est Dieu comme tel qui parle d’un bout à l’autre du passage.
« Mais quant aux timides, et aux incrédules, et à ceux qui se sont souillés avec des abominations, et aux meurtriers, et aux fornicateurs, et aux magiciens, et aux idolâtres, et à tous les menteurs, leur part sera dans l’étang brûlant de feu et de soufre, qui est la seconde mort » (21:8).
C’est une parole d’avertissement terrible au plus haut degré, surtout de la manière dont elle est utilisée ici. Considérez-en bien la force. C’est alors que Dieu sera tout en tous — Dieu qui est amour. Mais il n’est pas simplement amour : cela est une pensée fausse et infidèle ; Il est lumière aussi bien qu’amour. Il appartient à Dieu autant d’être saint, que d’être plein de grâce ; et ces deux vérités sont enseignées dans la même portion de la Parole. Ici nous en avons la preuve finale. En amour Il descend pour habiter avec Son peuple. Son peuple, ce sont des hommes, mais des hommes qui ne connaissent plus la faiblesse ni la peine, car Dieu lui-même a essuyé toutes larmes de leurs yeux. Mais Il est lumière ; et c’est pourquoi, en présence de toutes choses faites nouvelles, là où la justice habite en paix, là où il n’y a ni mal ni péché, mais la séparation d’avec eux pour toujours par la puissance de Dieu — même alors la part des méchants est dans l’étang brûlant de feu et de soufre. Remarquez bien que ceci est l’état éternel. Souvenez-vous que dans l’état éternel il y a la condamnation, la condamnation sans fin de ceux qui ont rejeté Christ, et se sont fondés sur leur misérable moi. Voilà la rétribution de la part de Dieu Lui-même. Leur part est dans la seconde mort, où leur ver ne meurt point et où le feu ne s’éteint point, comme le Seigneur Jésus l’a exprimé de manière si impressionnante. Il n’est pas de déclaration plus solennelle que celle d’Apoc. 21:8, non seulement à cause de son caractère, mais à cause de la place qu’elle occupe. Quand Dieu se reposera dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre — quand Dieu descendra pour habiter avec les hommes, parce qu’il n’y aura plus de mal pour empêcher qu’Il demeure avec eux — c’est alors que se présente l’effroyable scène du tourment sans espoir et sans fin qui attend le mal. Voilà ce que Dieu nous enseigne dans le tableau qu’Il trace de l’état éternel. Il y a le côté brillant, mais l’étang de feu n’en a pas moins son cours, et rien ne laisse entendre que ses horreurs prendront jamais fin.
Maintenant, après nous avoir conduits jusqu’à « la fin » au sens le plus absolu du terme, le Saint Esprit nous ramène en arrière. Nous avons vu, au moment où commence cet état éternel, la nouvelle Jérusalem descendant du ciel d’auprès de Dieu, préparée comme une épouse ornée pour son mari. Mais quelle est sa relation avec la terre millénaire ? Si nous n’avions que les révélations antérieures, nous ne pourrions pas répondre à cette question d’une manière claire. L’épouse, la femme de l’Agneau, a eu sa joie accomplie dans le ciel ; comme nouvelle Jérusalem après le millénium, elle prend sa place dans le cadre des nouveaux cieux et de la nouvelle terre ; mais quelle est sa relation en rapport avec ceux qui seront ici-bas pendant le millénium ? Cette question est maintenant clarifiée. « Et un des sept anges qui avaient etc. … vint et me parla, disant : Viens, je te montrerai l’épouse, la femme de l’Agneau. Et il m’emporta en esprit sur une grande et haute montagne, et il me montra la sainte cité, Jérusalem, descendant du ciel d’auprès de Dieu, ayant la gloire de Dieu. Son luminaire était semblable à une pierre très précieuse, comme à une pierre de jaspe cristallin » (21:9-11). Il me semble que cette comparaison du brillant luminaire de la cité avec une pierre de jaspe, a un lien très étroit avec ce qui vient d’être dit d’elle comme ayant « la gloire de Dieu ». Car quand Dieu Lui-même a été vu sur le trône au ch. 4 (4:3), Son apparence était comme le jaspe et le sardius. Ici, la nouvelle Jérusalem a la gloire de Dieu, et son luminaire est semblable à une pierre de jaspe. Mais ce n’est pas tout. « Elle avait une grande et haute muraille », et après cela il nous est dit, au verset 18, que « sa muraille était bâtie de jaspe ». Il ressort clairement de tout cela que cette pierre de jaspe est spécialement celle qui sert à décrire la gloire de Dieu, pour autant qu’elle peut être vue par une créature — non pas la gloire de Dieu que la créature ne peut pas voir. Car Dieu possède une gloire inaccessible à l’homme, mais il s’est plu à déployer une gloire à Lui, appropriée à la capacité de la créature ; et la pierre précieuse employée dans le livre de l’Apocalypse pour faire ressortir cette gloire, c’est le jaspe.
Il nous est rapporté ensuite que la cité a « douze portes, et aux portes douze anges, et des noms écrits sur elles, qui sont ceux des douze tribus des fils d’Israël ». On retrouve souvent ce nombre « douze » dans toute la description de la nouvelle Jérusalem. Il venait juste d’être dit que la cité a la gloire de Dieu, — cette gloire dans l’espérance de laquelle nous nous glorifions (Rom. 5:2). Ici, nous voyons la jouissance de cette espérance que nous attendons et dans laquelle nous nous glorifions. Mais il plait à Dieu de rappeler qu’Il s’occupe de gens sur la terre, et que la nouvelle Jérusalem a une relation spéciale avec les hommes durant le millénium. C’est pourquoi il y a douze portes, avec les noms des douze tribus d’Israël écrits sur elles. Aux portes se tiennent douze anges, montrant leur subordination. Dans ce jour de gloire, les anges sont heureux d’être portiers aux portes de la cité céleste ; même s’il ne leur est pas donné d’entrer, ils sont heureux d’avoir une fonction et une mission en dehors. « Car ce n’est point aux anges qu’il a assujetti le monde habité à venir duquel nous parlons » (Héb. 2:5). « Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde ?… Ne savez-vous pas que nous jugerons les anges ? » (1 Cor. 6:2, 3).
« Et la muraille de la ville avait douze fondements, et sur eux, les douze noms des douze apôtres de l’Agneau » (21:14).
Éph. 2:20 nous donne, je crois, la force de ce symbole : « ainsi donc, vous n’êtes plus étrangers, ni forains, mais concitoyens des saints… ayant été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus Christ Lui-même étant la maîtresse pierre du coin » (Éph. 2:19-20). Sans doute, tout l’édifice croît pour être un temple saint dans le Seigneur (Éph. 2:21), mais nous sommes édifiés sur « le fondement des apôtres et des prophètes » (ceux du Nouveau Testament, tous les deux). Si l’allusion avait trait aux prophètes de l’Ancien Testament, ils auraient été naturellement nommés avant les apôtres, pour éviter la confusion ; mais l’expression, telle qu’elle est, semble formulée à dessein pour prévenir une pareille erreur. Les prophètes de l’Ancien Testament complétaient la loi, outre leur témoignage sur les choses à venir, les jugements, la nouvelle alliance, etc. La loi et les prophètes ont été jusqu’à Jean, est-il dit (Matt. 5:17). Leur autorité ne saurait jamais être détruite. Mais quand le Messie a été rejeté par Israël, et que la rédemption a été accomplie à la croix, un fondement nouveau a été posé pour une nouvelle œuvre de Dieu, entièrement distincte de ce que la loi ou les prophètes, ou même Jean-Baptiste, avaient envisagé. C’est le fondement des apôtres et prophètes du Nouveau Testament, et c’est sur ce fondement que la nouvelle Jérusalem est bâtie. Maintenant, Dieu a manifesté toutes Ses pensées comme fondement de la vérité.
Au temps de l’Ancien Testament, il y avait certaines choses mises en réserve. Voyez Deut. 29:29, où Moïse dit que « les choses cachées sont à l’Éternel, notre Dieu ; et les choses révélées sont à nous et à nos fils, à toujours, afin que nous pratiquions toutes les paroles de cette loi ». Les choses révélées étaient celles rattachées à la loi et à ses conséquences, en vue d’en faire observer l’obéissance. Mais les choses secrètes qui appartenaient alors à Dieu, sont maintenant elles-mêmes révélées — ce sont les ressources de la grâce quand tout était ruiné sous la loi. Et c’est ce sur quoi l’apôtre Paul insiste tant, quand il déclare comment, par révélation, Dieu lui a fait connaître le mystère, ou secret, « d’après quoi, en le lisant, vous pouvez comprendre quelle est mon intelligence dans le mystère du Christ, lequel, en d’autres générations, n’a pas été donné à connaître aux fils des hommes, comme il a été révélé maintenant à ses saints apôtres et prophètes par l’Esprit » (Éph 3:3-5). Il en est de même en Col. 1:26. Le Saint Esprit a manifesté ce qui était tenu secret dans les temps anciens. Le mystère est révélé. C’est cette pleine révélation de la vérité qui parait être appelée le fondement des apôtres et prophètes, sur lequel l’Église est bâtie. C’est pourquoi il est dit en 1 Tim. 3:15, que l’Église est « la colonne et le soutien de la vérité ». La vérité est venue, et Dieu n’a en quelque sorte plus aucun secret maintenant. Tout ce qu’Il a trouvé bon de révéler, tout ce qui devait être utile à la créature et à la gloire de Son Fils, Dieu l’a manifesté, de sorte qu’en ce sens, comme en tout autre sens, il peut être dit que « les ténèbres s’en vont et la vraie lumière luit maintenant » (1 Jean 2:8). Ainsi donc, c’est sur ce fondement vaste et profond que l’Église est bâtie, — ce fondement où sont manifestées non seulement les voies de Dieu envers des individus, ou envers un peuple en relation avec Ses promesses et Son gouvernement, mais sur lequel tout ce qui se peut connaître de Dieu par la créature, a été révélé dans Son Fils. Et tout cela est maintenant manifesté à Ses saints ; c’était caché, mais c’est maintenant révélé. « La muraille de la cité avait douze fondements, et sur eux, les douze noms des douze apôtres de l’Agneau » (21:14). Ce sont eux qui ont été les instruments de cette révélation.
« Et celui qui me parlait avait pour mesure un roseau d’or, pour mesurer la cité et ses portes et sa muraille. Et la cité est bâtie en carré, et sa longueur est aussi grande que sa largeur… sa longueur et sa largeur et sa hauteur étaient égales » (21:15, 16).
Ces images illustrent la perfection de la cité « dont Dieu est l’architecte et le créateur » (Héb. 11:10). Je ne veux pas dire que l’on doit prendre cette description comme celle d’une cité au sens littéral. Je pense que ce tableau est purement symbolique quant à certaines relations de l’épouse, la femme de l’Agneau. L’Écriture elle-même déclare positivement que la nouvelle Jérusalem est (non pas la demeure des rachetés, mais) l’épouse elle-même, décrite sous la figure d’une cité. Tout comme l’église apostate, le vaste système ecclésiastique idolâtre dont il est tant parlé dans ce livre, était présenté sous le symbole de la grande cité, Babylone, de même ici l’Église glorifiée est présentée sous le caractère d’épouse, la femme de l’Agneau, en contraste avec la grande prostituée, — et sous l’aspect de la sainte cité descendant du ciel d’auprès de Dieu, en contraste avec la grande ville qui a la royauté sur les rois de la terre (17:18). Quand nous lisons que la cité est bâtie en carré, de longueur, largeur et hauteur égales, il faut simplement le comprendre comme expression figurative de sa perfection.
En même temps, il ne faut pas faire entrer ces symboles en collision l’un avec l’autre. Car immédiatement après, il est dit qu’« il mesura sa muraille, 144 coudées, mesure d’homme, c’est-à-dire d’ange » (21:17). Or il a été indiqué précédemment que la hauteur de la cité était égale à sa longueur et à sa largeur, soit 12000 stades. Évidemment cette mesure est énormément plus grande que celle des 144 coudées de la hauteur de la muraille. Nous avons d’abord l’idée générale d’une cité qui forme un carré dans toutes les directions, un cube en fait ; puis, quand nous arrivons aux détails de la muraille, une hauteur est donnée, qui montre que nous ne devons pas rechercher simplement une cohérence quant à la lettre, comme s’il s’agissait d’un portrait. Le nombre douze contient l’idée de la perfection par rapport à l’homme.
« Et sa muraille était bâtie de jaspe ; et la cité était d’or pur, semblable à du verre pur » (21:18).
Dans une précédente partie du livre, nous avons déjà vu la signification de ces deux figures, l’or et le verre. Le Seigneur conseillait à l’église de Laodicée dans son état déchu d’acheter de Lui « de l’or passé au feu ». L’or est invariablement la figure de la justice divine, de cette justice qui peut subsister devant le feu pénétrant du jugement de Dieu. La justice humaine ne pourrait pas le supporter, aussi elle n’est jamais représentée par l’or, mais plutôt par le fin lin. Dieu peut nettoyer le fin lin, et n’y laisser ni tache ni souillure ; mais le feu le détruirait, tandis que sur l’or, il n’a pas d’autre effet que d’en faire ressortir la perfection. En accord avec cela, la cité est d’or pur, « semblable à du verre pur ». Une sainteté désormais immuable et sans défaut marque la cité. Quand il s’agit de notre besoin de sainteté, le moyen de l’obtenir est figuré par l’eau, parce qu’il s’agit d’être nettoyé de la souillure d’une manière pratique. Dans l’Apocalypse, ce n’est pas ce dont il s’agit ; car à partir du ch. 4, les saints qu’ont voit associés avec la sainteté, sont des saints ressuscités, qui n’ont donc plus besoin d’être nettoyés. C’est pourquoi ils sont représentés, notamment dans le cas de cette compagnie de saints mentionnée au ch. 15, comme étant sur une mer de verre, parce que c’est la pureté, et la pureté dans une condition fixe et inaltérable. Leur état n’est plus tel qu’il ait besoin de purification. C’est la sainteté qui repousse tout ce qui souille. De même ici, la cité est d’or pur, semblable à du verre pur. En Apoc. 15:2, il est remarquable que la mer de verre soit mêlée de feu, ce qui n’était pas le cas en Apoc. 4 (4:6) ; la raison en est que les saints dont il est parlé en Apoc. 15 ont déjà non seulement passé par cette purification complète, et sont maintenant dans un état de pureté inaltérable, mais ils ont aussi traversé la dernière et terrible tribulation, dont le feu est une figure connue. Les saints ravis d’Apoc. 4 n’ont pas passé par cette tribulation. Ainsi donc la cité est d’or pur, comme du verre pur ; c’est-à-dire qu’il y a maintenant une justice divine qui a tout son cours, et une sainteté surnaturelle et à laquelle rien ne saurait porter atteinte.
« Les fondements de la muraille de la cité étaient ornés de toute pierre précieuse : Le premier fondement était de jaspe, etc… Et les douze portes étaient douze perles ; chacune des portes était d’une seule perle ; et la rue de la cité était d’or pur, comme du verre transparent » (21:19-21).
Sans prétendre donner une signification spirituelle aux diverses pierres précieuses, elles nous apprennent qu’en ce jour de gloire Dieu parera Ses saints de toutes sortes de beauté. Différents rayons de Sa gloire seront réfléchis à travers eux, au départ de ces différentes pierres précieuses.
Pour ce qui regarde Dieu Lui-même, il n’en est pas ainsi. Sa gloire essentielle n’est pas décrite de cette manière. C’est une pleine lumière, une lumière concentrée. Elle n’est pas fractionnée en de multiples nuances, si l’on peut dire, comme dans le cas de la gloire qu’Il confère à l’Église. Dieu est lumière, et Il habite la lumière inaccessible (1 Tim. 6:16). L’arc-en-ciel avec toutes ses couleurs est le signe par lequel Dieu a montré Son alliance avec la création, et Ses voies diverses envers l’homme misérable. Mais quand il s’agit du luminaire des saints dans la gloire céleste, et de la manière dont Dieu veut déployer la beauté de Son peuple, (car Il voit de la beauté en eux), ces pierres précieuses sont les symboles employés.
« Et les douze portes étaient douze perles ; chacune des portes était d’une seule perle ». C’est ce qui apparaît aux gens à l’extérieur : quelque chose de tout à fait surnaturel. Cette description fait allusion à la Jérusalem terrestre ; mais cette dernière cité sera ornée par ce qui existe réellement dans la nature. Ici, la beauté de l’Église ressort de figures surnaturelles : chaque porte est faite d’une seule perle. Ce sont des symboles qui mettent en relief la beauté parfaite et divine dont Dieu revêtira son peuple. C’est déjà vrai d’eux en Christ ; mais en ce jour-là, ils brilleront ainsi effectivement et personnellement. Le fait que chaque porte soit une seule perle montre, me semble-t-il, la ressemblance spéciale à Christ et la communion avec Christ que Dieu accordera à Son peuple — l’Église. En Matt. 13, nous avons, je pense, le Seigneur Jésus présenté comme un marchand à la recherche de belles perles, et qui, quand il en a trouvé une de très grand prix, il va et vend tout ce qu’il a et l’achète. C’est la beauté de l’Église, telle qu’elle est vue dans les pensées de Dieu ; elle fascine, si l’on peut dire, le Seigneur Jésus, de sorte qu’Il s’est dépouillé de toute Sa gloire terrestre pour acquérir cette perle : l’expression est forte en effet, mais pas trop forte pour exprimer à quel point Il a apprécié l’Église. Mais nous savons que si le Seigneur a pu voir quelque beauté en l’Église, cette beauté émanait toute de Lui. Il voyait l’Église telle qu’elle était dans les pensées et le dessein de Dieu, et Il a vendu tout ce qu’Il avait afin d’acheter cette perle de grand prix, qui n’est, après tout, que la réflexion de Sa propre beauté. De même ici, la perle sans défaut (la perfection de beauté morale qui a été si précieuse aux yeux de Christ) est la figure de ce qui, juste à l’entrée, apparaîtra aux yeux des hommes et des anges.
« Et je ne vis point de temple en elle ; car le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant, et l’Agneau en sont le temple » (21:22).
Ceci est très important. Car quelqu’un dira peut-être : Qu’est-ce que tout cela a à faire avec les saints maintenant ? Je réponds : Il faut que le monde attende le jour de la gloire pour voir la beauté de l’Église. Et nous-mêmes, comme le monde, nous sommes si souvent incrédules, que nous somme enclins à ne voir que les circonstances sombres et douloureuses de l’Église, à défaut d’échapper au rêve trompeur d’améliorer la chrétienté. Qui d’entre nous porte habituellement et constamment dans son cœur le sentiment de délices qu’éprouve le Seigneur Jésus en dévoilant ce que l’Église va être — oui, ce qu’elle est déjà à Ses yeux et pour Son cœur ? Notre incrédulité à cet égard est l’une des principales sources secrètes de notre esprit de murmure et de rébellion. Je ne dis pas qu’il faille rester insensible à la faillite de l’Église de Dieu quant aux choses sur la terre : Dieu veuille nous préserver d’une telle pensée ! Mais notre sentiment de sa chute sera d’autant plus aigu et accompagné de d’autant plus d’amour, que nous aurons un sens plus profond de la proximité de l’Église avec Christ, et de la gloire dont elle resplendira bientôt. Une bonne partie de ce que nous ressentons, en présence de mal chez les enfants de Dieu, vient de ce qu’il nous touche personnellement. Nous sommes tous enclins à traiter assez durement, chez les autres, la vanité, l’orgueil et autres choses semblables. Pourquoi ? N’est-ce pas trop souvent parce que cela nous blesse ? On ne nous a peut-être pas porté le respect, ou reconnu l’importance à la mesure que nous imaginions avoir droit ? et cela nous rend facilement amer. Mais ce n’est pas selon Christ. Non pas que nous devions être insensibles aux voies de la chair et du monde, mais il faut tout ressentir avec Christ, et non pas pour nous-mêmes. Qu’est-ce qui nous en rend capables ? Rien, sinon un cœur rempli de Christ, et de la position excessivement bénie où Il nous a mis. Nous sommes appelés à manifester le Seigneur Jésus déjà maintenant. Ce n’est pas seulement que nous sommes destinés à devenir membres de Son corps, chair de Sa chair et os de Ses os, car nous le sommes déjà ; dès lors, l’amour et le désir de la gloire de Dieu devraient nous amener à chercher à marcher d’une manière qui corresponde à cette position, dans l’église et devant les hommes. Ce que Dieu va bientôt montrer à tout l’univers, Il voudrait que nous le recherchions dès maintenant chez les Siens.
Quand ce jour-là sera venu, il n’y aura plus d’entraves ; mais le Saint-Esprit agit de manière à réaliser en nous ce qui sera alors manifesté en perfection, et qui en principe est vrai déjà maintenant. S’il y a une tache chez quelqu’un qui doit reluire avec Christ dans ce jour-là, cela stimule nos affections pour que le mal soit ôté selon Dieu et pour Sa gloire. C’est là ce qui accroît tellement chez nous le sentiment de la honte, qu’il puisse y avoir de pareilles taches sur nous. Il est évident pour moi, que le Saint Esprit révèle la description de la gloire divine à venir dans l’Église, dans le but d’agir avec une grande puissance pratique sur nos âmes maintenant, la parole étant mêlée avec de la foi chez ceux qui l’entendent (Héb. 4:2). La véritable raison pour laquelle elle nous est si peu à profit, c’est que nous sommes des croyants si incrédules ! Nous sommes croyants, mais n’est-il pas humiliant que nous puissions passer sur de pareils fruits précieux de l’amour de Christ, sur de pareilles visions brillantes de gloire assurée, comme si nous n’en avions pas besoin maintenant, ou comme s’il ne s’agissait pas des paroles certaines et véritables de Dieu ? Bientôt nous serons dans la gloire, et nous connaîtrons comme nous avons été connus ; mais la gloire est révélée à ceux qui n’y sont pas encore, afin que leurs âmes soient remplies de joie dès maintenant à cause de cette gloire, et afin que ses effets en soient manifestes même pour le monde qui les méprise. Le Saint Esprit est les arrhes de l’héritage, aussi bien que le sceau de la rédemption.
Mais cela n’est pas seulement vrai de la beauté dans laquelle l’Église brillera alors ; il y a autre chose qui devrait exercer sur nous une puissante influence maintenant. Il y a une relation immédiate avec Dieu dans la manière de rendre culte : qu’en sera-t-il dans cette gloire du millénium ? Le symbole employé ici est celui d’une cité, et c’est pourquoi nous ne sommes pas décrits comme des sacrificateurs. S’il était parlé de nous comme étant des personnes, nous devrions être décrits comme approchés de Dieu, c’est-à-dire comme des sacrificateurs, et c’est ce que nous trouvons au ch. 20:6. Mais ici, nous avons une cité — et une cité dans laquelle il n’y a point de temple, non pas que la présence de Dieu n’y eût aucune place spéciale, mais parce que la présence de Dieu la remplit toute partout également. L’accès à Dieu est immédiat. Mais ceci est aussi une vérité déjà applicable maintenant (Héb. 10). Ici-bas, maintenant, il n’y a point de temple ni de sacrificateurs intermédiaires entre nous et Dieu. Sans doute, nous avons en haut le grand et fidèle Souverain Sacrificateur — ministre des lieux saints et du vrai tabernacle que le Seigneur a dressé, et non pas l’homme (Héb. 8:2). Mais c’est ici-bas sur la terre que, pendant le royaume futur, il y aura temple et sacrificateurs, pour ceux qui, sur la terre, auront besoin de Lui, alors qu’Il « s’assiéra, et… Il sera sacrificateur sur Son trône » (Zach. 6:13). Ainsi, pour le chrétien, il n’y a maintenant sur la terre ni temple ni sacrificateurs. Nous nous tenons, par la foi, dans la présence immédiate de Dieu, dont la parfaite faveur brille sur nous. Si l’on ne sent pas cela, c’est parce qu’on ne le croit pas. Nous devons toujours croire une chose sur l’autorité de la parole de Dieu d’abord ; et plus nous croyons en toute simplicité, plus nous jouissons de la consolation, de la force et des fruits de la vérité.
« Et je ne vis point de temple en elle ; car le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant, et l’Agneau en sont le temple. Et la cité n’a pas besoin du soleil, ni de la lune, pour l’éclairer ».
Il n’est besoin là d’aucune lumière terrestre ni céleste provenant de l’ancienne création ; « car la gloire de Dieu l’a illuminée, et l’Agneau est sa lampe » (21:23). Combien cette description concorde admirablement avec quelques paroles de Jean 17 dont je voudrais parler avant d’aller plus loin.
Dans son étonnante prière (si nous pouvons appeler prière ce qui est plutôt l’épanchement du Fils auprès du Père), le Seigneur dit : « La gloire que tu m’as donnée, je la leur ai donnée » (Jean 17:22). Il s’agissait d’une gloire divine, mais non pas de la gloire de Sa Déité, car celle-ci ne peut jamais être donnée, attendu qu’elle n’appartient qu’à Dieu, et à personne d’autre. Le Seigneur Jésus possédait la gloire de la Déité, mais non pas comme Lui ayant été donnée : Il la possédait d’une manière essentielle ; il la possédait de droit, comme étant Dieu, de toute éternité. Mais la gloire que le Père Lui a donnée comme homme, Il l’a donnée à Ses disciples : « afin qu’ils soient un, comme nous nous sommes un, moi en eux et toi en moi, afin qu’ils soient rendus parfaits [consommés] en un, et que le monde connaisse que toi tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé » (Jean 17:22-23). Or ceci correspond exactement à ce que nous avons dans l’Apocalypse, car on voit la sainte cité, descendant du ciel d’auprès de Dieu ; et l’Agneau est en elle, et le Seigneur Dieu se fait connaître spécialement en Lui, si l’on peut dire ; car l’Agneau n’est pas seulement la lumière, mais Il est le vase de la lumière, le luminaire. Nous pouvons voir la lumière diffusée, ainsi qu’il est écrit : « la gloire de Dieu l’a illuminée » ; mais si nous en voulons voir la lumière concentrée, où faut-il regarder ? L’Agneau est cette lumière. C’est ainsi que Dieu Lui-même fait resplendir Son éclat dans toute cette glorieuse cité : l’Agneau est le grand objet concentrant et diffusant la lumière sur toute la scène. Or voici quel en est l’ordre : « Moi en eux, et toi en moi, afin qu’ils soient rendus parfaits [consommés] en un, et que le monde connaisse », etc. (Apoc. 21:23a) (*). L’Agneau leur fait connaître Dieu, comme eux font connaître l’Agneau à tous les autres. C’est ce qui apparaît dans l’Apocalypse. « Les nations marcheront à sa lumière », non pas dans la lumière de l’Agneau directement, mais au moyen de la lumière de la cité céleste : c’est précisément ce que nous trouvons en Jean 17 (« afin qu’ils soient rendus parfaits [consommés] en un, et que le monde connaisse que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé »). Voilà, me semble-t-il, ce qui correspond aux nations marchant à la lumière de la cité. L’Église a passé à travers ces nations aux jours de son pèlerinage, et elle y a été méprisée à cause de sa communion avec Christ (1 Jean 3:1). Car, comme Lui-même y a été, et y a été méconnu, ainsi « le monde ne nous connaît pas ». Mais maintenant, quand brille le jour éclatant où Jésus revient en gloire, Lui qui a été longtemps absent et rejeté, Lui l’homme béni et exalté, le Seigneur du ciel, et Il revient comme étant Lui-même le fidèle témoin et l’accomplissement de la gloire de Dieu, et son resplendissement, — alors Il ne sera pas vu séparé de Son épouse.
(*) Les versets 22 et 23 de ce chapitre s’appliquent au temps de la glorification, le seul temps d’unité à la fois parfaite et manifestée ; mais il ne faut pas confondre cette unité avec celle objet de la prière des v. 20 et 21, qui manifestement est autant une question de grâce et de témoignage au monde, que celle des v. 22 et 23 sera une question de gloire et de connaissance par le monde. Ce qu’il y a de vrai, c’est que l’unité est demandée sous trois formes. Il y a premièrement, au verset 11, celle qui est absolue et qui concerne les douze apôtres : « afin qu’ils soient un, comme nous ». Il y a, deuxièmement, l’unité qui embrasse ceux qui croiraient par la parole des apôtres : « afin que tous » (Juifs ou Gentils, esclaves ou hommes libres) « soient un », (non pas en vertu de la loi de l’Éternel, ni de rites et ordonnances du système Lévitique qui sont imposés, mais par la révélation du Père et du Fils), « comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi ; afin qu’eux aussi soient un en nous, afin que le monde croie » (ce n’est pas encore : connaisse, mais croie) « que c’est toi qui m’as envoyé ». C’est le témoignage rendu par Ies saints rassemblés en marchant ici bas dans une unité céleste. Puis vient la troisième forme d’unité — le couronnement — celle qu’il sera impossible au monde de nier, quand il verra les saints apparaissant dans la même gloire avec Christ. C’est pourquoi il est ajouté : « (afin) que le monde connaisse que toi tu m’as envoyé » : mais ce n’est pas tout : « et que tu les as aimés comme tu m’as aimé ». Comment contredire, lorsque Christ et l’Église apparaîtront dans une communauté de gloire à leurs yeux étonnés ? Mais cela ne change en rien la vérité précédente, qui ne doit pas être affaiblie, à savoir que le Seigneur désirait l’unité présente de tous Ses disciples, comme un moyen de témoigner puissamment au monde pour qu’il croie en Sa mission de la part du Père. De fait, cette unité comme témoignage demeure une partie importante de notre responsabilité pratique, et il n’est pas sage de s’en détourner sous prétexte qu’elle est grossièrement pervertie par l’église-monde sous toutes ses formes variées en vue d’exercer une puissance terrestre et orgueilleuse. Les Actes des apôtres exposent les faits, tandis que les épîtres démontrent l’importance de la doctrine.
Nous apparaîtrons avec Lui en gloire, et les nations marcheront à la lumière de cette église glorifiée qu’elles auront si longtemps rejetée. Même les rois de la terre lui (*) apportent leur gloire. Il est nécessaire d’affirmer cela, afin que personne ne s’imagine qu’il y aura communication directe entre les habitants de la terre et la cité céleste. Car si la cité est vue descendant du ciel, il n’est pas dit qu’elle descende sur terre de manière à être avec les hommes, comme ce sera quand il y aura le nouveau ciel et la nouvelle terre. Ici, sa gloire est au-dessus de la terre ; en conséquence, les rois et les nations lui apportent leur gloire et leur honneur, à titre d’hommage à Celui qui y habite, je présume.
(*) Dans le sens de « lui rapporteront leur gloire, la lui attribueront, lui en feront hommage », et par dessus tout, à Dieu en elle, comme il est dit plus bas.
« Et ses portes ne seront point fermées de jour : car il n’y a point là de nuit ». Aucun danger ne menace la cité ; au contraire : « on lui apportera la gloire et l’honneur des nations ». Cette expression a bien sûr le même sens qu’au verset 24. « Et il n’y entrera aucune chose souillée, ni ce qui fait une abomination et un mensonge : mais seulement ceux qui sont écrits dans le livre de vie de l’Agneau ». Toute sa portée est donnée à la sainteté de Dieu, et les choses impures, abominables et fausses sont exclues de Sa présence, étant moralement absolument impropres à y paraître ; mais en outre, Sa souveraineté est maintenue intacte. Nul n’y entre, excepté ceux inscrits au livre de vie de l’Agneau.
Nous avons remarqué que les cinq premiers versets du ch. 22 sont nécessaires pour compléter la vision, mais, je ferai mieux, je crois, de les réserver pour la prochaine méditation, et nous verrons aussi la conclusion du livre à la place qui lui revient.
L’un des traits intéressants de ce livre est qu’on ne peut le comprendre correctement sans faire la liaison avec tout le reste de la Parole de Dieu. Et il est singulier de voir que Dieu a relié ce dernier livre de l’Écriture avec le tout premier, et d’une manière très remarquable. Par exemple, d’où sont tirées les figures dont le Saint Esprit se sert pour dépeindre la bénédiction de la cité céleste dans ses relations avec la terre durant le millénium ? Il faut aller au commencement du livre de Dieu, à la Genèse, et même au tout commencement de la Genèse ; c’est là qu’on trouve l’arbre de vie, les fleuves, etc., auxquels le Saint Esprit fait évidemment allusion dans le chapitre 22 de l’Apocalypse.
En voyant cette manière dont Dieu a raccordé les diverses parties de Sa Parole les unes avec les autres, c’est pour moi une indication frappante du but de Dieu que, pour avoir une connaissance complète d’une portion quelconque, je dois la prendre en relation avec l’ensemble. Ceci est d’autant plus important que cette même parole de Dieu nous montre différents états ou dispensations en contraste total les uns avec les autres. Il y eut d’abord le temps de l’innocence ; puis le temps durant lequel il n’y a eu que du péché du côté de l’homme, — le mal sans frein, jusqu’à ce que vienne le jugement de Dieu par le moyen du déluge, et que tout soit détruit, sauf les quelques-uns dans l’arche. Après cela parut la loi, puis l’évangile, ayant chacun son but particulier entièrement différent de l’autre. Et maintenant nous attendons la grande scène finale de l’ère présente, où tout ce que Dieu a opéré sur la terre, tout ce que la révélation a fait connaître de Ses pensées, mais qui a été corrompu par l’homme, sera manifesté dans ses résultats. Pour bien comprendre ce que le Saint Esprit dit touchant ces résultats, il faut commencer par le tout début. Or, si nous ouvrons la Genèse au temps de l’innocence, où Dieu s’occupait de Sa créature bien sûr responsable de se maintenir dans sa position d’innocence, — nous trouvons, il est vrai, une certaine analogie avec le temps futur selon notre passage, mais surtout un contraste tellement béni, en ce que ce temps futur manifeste bien plus visiblement les profondeurs de grâce que Dieu déploiera dans la sainte cité.
Examinons donc un peu les différences. La Genèse nous fait voir quatre fleuves ; nous ne savons pas grand-chose ou rien des deux premiers, mais en tout cas il est clair que les deux derniers, l’Euphrate et le Hiddekel, ou Tigre, ont été liés plus tard à quelques-uns des épisodes les plus douloureux de l’histoire terrestre du peuple de Dieu. Sur ces fleuves furent bâties les deux villes les plus renommées de l’antiquité : Ninive sur le Tigre, et Babylone sur l’Euphrate. Il est évident que je fais ici allusion à une époque très postérieure à Adam, et même au déluge. Et quoique ce cataclysme ait sans doute fait disparaître bien des aspects de la terre antédiluvienne, ces deux fleuves ont quand même subsisté. Le Paradis a disparu, nous le savons ; mais ces deux fleuves ont joué un rôle important dans l’histoire de l’homme, et surtout dans l’histoire des choses qui ont eu plus d’importance qu’elles n’en avaient par elles-mêmes, par le fait que ces fleuves se sont trouvés mêlés aux vicissitudes et aux châtiments du peuple de Dieu Israël. Ces deux fleuves furent identifiés avec les puissances qui devaient causer la ruine de Juda et d’Israël respectivement. Ninive fut la capitale de l’Assyrie qui transporta en captivité la grande masse des dix tribus d’Israël ; Babylone fut la puissance dont Dieu s’est ensuite servi pour tenir captifs ceux qui avaient semblé tenir ferme pour Dieu, non moins que la maison de David, mais qui ne tardèrent pas à s’égarer dans une infidélité pire que celle d’Israël dans ses rechutes. C’est ainsi que ces deux fleuves, qui avaient été en relation avec le paradis à l’origine, devinrent les représentants des puissances employées de Dieu pour le châtiment de Son peuple coupable.
Ensuite, il y avait deux arbres dans le jardin d’Eden ; le premier est celui de la connaissance du bien et du mal, et le second celui de la vie. Or quelles qu’aient pu être les bénédictions accordées à l’homme dans l’arbre de vie, celui-ci lui était totalement inutile car l’autre arbre lui faisait subir un test qu’il ne pouvait subir victorieusement. Bientôt, en effet, il faillit ; il prêta l’oreille à la voix de sa femme qui elle-même avait écouté le serpent, et il devint rebelle. La conséquence fut que l’arbre de vie cessa d’être à sa disposition ; s’il en avait été autrement, cela n’aurait fait que perpétuer une vie de péché et de misère, — de sorte que le jugement par lequel Dieu a placé le chérubin armé de l’épée flamboyante pour chasser l’homme loin de l’arbre de vie, était un jugement mêlé de miséricorde. Dieu réservait pour l’homme quelque chose de meilleur, savoir l’arbre de grâce, si je puis m’exprimer ainsi.
Arrivés maintenant au dernier récit de la Parole de Dieu, nous ne trouvons ni les diverses rivières d’Eden, ni un arbre mettant l’homme à l’épreuve de la part de Dieu. Il n’y a plus qu’un fleuve et qu’un arbre. Tout ce qui était lié à la faiblesse de l’homme, et au péché, et au châtiment du peuple de Dieu a disparu. Les souvenirs pénibles de la honte et de la discipline de la douleur ne sont plus nécessaires. Le paradis de l’homme a failli, Israël a failli, l’Église a failli. Maintenant, le paradis, le peuple, et la cité sont tous de Dieu, qui s’y fait connaître et y montre Sa gloire, de sorte que tout ce qui ne servait qu’à tester l’homme ou à le discipliner, disparaît complètement, et désormais resplendissent l’amour de Dieu, Sa grâce céleste, Sa fidélité envers Israël, Sa miséricorde souveraine envers les Gentils, Son gouvernement juste et bienfaisant. Le Seigneur Jésus Christ est intervenu ; Il a porté par Lui-même ce que méritait le peuple de Dieu, de sorte qu’il est devenu possible pour Dieu d’être juste tout en ne leur montrant que de l’amour, — en leur donnant la vie et la propitiation et la purification par Son Fils.
« Et il me montra un fleuve d’eau vive, éclatant comme du cristal sortant du trône de Dieu et de l’Agneau. Au milieu de sa rue, et du fleuve, de ça et de là, était l’arbre de vie, portant douze [sorte de] fruits, rendant son fruit chaque mois ; et les feuilles de l’arbre sont pour la guérison des nations » (22:1, 2).
Il est évident que voilà la grâce pure régnant par la justice, du moins en ce qui concerne l’arbre et le fleuve. Rien n’y est susceptible d’être corrompu par la puissance de Satan. Il n’y a rien non plus qui ressemble au chérubin tenant jalousement l’homme à l’écart, — l’homme pécheur, hélas ! C’est tout le contraire. Cet arbre de vie porte du fruit chaque mois. Bien sûr, c’est une figure. Il n’y aura pas simplement un arbre et un fleuve au sens littéral ; mais comme le fleuve de l’eau de la vie symbolise la vie et la bénédiction abondantes qui couleront à travers la cité (c’est-à-dire l’Épouse, la femme de l’Agneau), ainsi ici on trouve les ressources bienfaisantes pour la guérison des nations. Il n’est rien dit d’explicite concernant les douze fruits, qui peuvent exprimer une bénédiction beaucoup plus élevée et plus riche pour le rafraîchissement continuel des saints célestes ; mais les feuilles sont expressément désignées comme devant servir à la guérison des nations.
Cela est d’autant plus remarquable, que nous sommes habitués à voir dans les prophètes un tout autre tableau de la Jérusalem terrestre, même dans le jour glorieux à venir, et même si plusieurs des figures utilisées dans notre passage lui soit empruntées. Prenez par exemple la description d’Ésaïe 60. Selon le ch. 59 (v. 20), le Rédempteur viendra à Sion, et le ch. 60 donne la description de la cité : « Tes portes seront continuellement ouvertes ; elles ne seront fermées ni nuit ni jour » (És. 60:11), etc. Mais quelle est, en principe, la relation entre la Jérusalem terrestre et les nations ? « Car la nation et le royaume qui ne te serviront pas, périront, et ces nations seront entièrement désolées » (És 60:12). Le gouvernement sera celui d’une justice et d’un jugement impitoyables. Dieu exige que l’honneur soit rendu à Son peuple qui a été si longtemps méprisé et foulé aux pieds par les nations. Car chacun sait comment les Juifs ont été traités avec le dernier mépris, même dans la chrétienté ; et si par leur prospérité ou d’autres raisons, ils obtiennent la faveur du monde, on le regarde comme un exemple merveilleux de libéralité ; les gens s’en vantent fort, et agissent ainsi en général sur un principe faux, soit de scepticisme soit de pseudo-christianisme. On a été tellement habitué à mépriser les Juifs, que les concessions qui leur sont faites sont arrachées, souvent en vertu de principes aussi faux que celui des droits de l’homme, etc. Bien sûr, je ne fais ici allusion qu’à des faits bien connus de l’histoire du monde. Comme chrétiens, nous n’avons rien à faire avec de semblables questions, mais nous pouvons nous en rendre compte et les juger. Car la mission du chrétien ici-bas n’a qu’un but : rendre témoignage à Christ, rejeté par le monde, mais exalté dans le ciel ; et agir selon la grâce et la gloire de Christ qui est maintenant à la droite de Dieu. Lorsqu’on perd cela de vue, le chrétien est comme du sel sans saveur. On peut être philanthropique, et chercher à faire beaucoup de bien dans le monde, mais Dieu a pour nous un but plus élevé que tous les plans que nous pouvons élaborer.
Cette brève digression découle de notre sujet. Car, qu’il s’agisse de l’Église avant la gloire, ou dans la gloire comme ici, la seule chose qui nous convient, c’est manifester la grâce. C’est le caractère de grâce qui donne toujours la vérité de Dieu au sujet de l’Église ; c’est la manifestation de Lui-même tel qu’Il s’est révélé et se révèle encore en Christ. C’est ce que l’apôtre fait ressortir en Éph. 5, quand il dit : « Soyez donc imitateurs de Dieu ». Et comment cela ? « comme de bien-aimés enfants, et marchez dans l’amour ». De quelle manière ? Le chapitre précédent a parlé de Christ comme le sacrifice à cause duquel Dieu peut pardonner le péché (Éph. 4:32), et c’est la raison pour laquelle nous devons nous pardonner les uns aux autres « comme Dieu vous a pardonné en Christ ». Mais au ch. 5, l’apôtre va beaucoup plus loin : « Marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés, et s’est livré Lui-même pour nous comme offrande et sacrifice à Dieu en parfum de bonne odeur » (Éph 5:2). Ces quelques mots décrivent le plein caractère de la grâce, qui fournit à ceux qui la connaissent et y marchent, la puissance de Christ dans le chemin parmi les hommes. Si je découvre ici ou là, chez l’un de mes frères, l’esprit rempli de pensées erronées ou de fausses espérances ; ou bien si je le vois agir sans conscience ou peu scrupuleusement, contrairement au Seigneur, de quelle manière Dieu va-t-il réveiller mes affections à son égard ? Je dois toujours agir par des motifs de grâce, cette grâce avec laquelle Dieu Lui-même agit envers Ses saints, et je dois, si possible, élever l’âme de mon frère jusqu’à la connaissance des sentiments de Dieu à son égard, et de Sa volonté à son sujet. S’il perçoit la grâce dans laquelle Dieu a agi, il sera prêt à apprendre ce dont il est redevable à Dieu. C’est toujours la manière de parler de l’apôtre. Regardez encore le cas des Éphésiens. Que fait Paul depuis le début de l’épître jusqu’au ch. 5 ? Il montre l’amour parfait de Dieu envers eux, et leur position d’unité avec Christ dans laquelle Il les a placés ; et maintenant c’est comme s’il leur disait : Marchez, vous, dans l’amour que Christ vous a montré.
Nous trouvons la même chose dans notre chapitre. Il n’est pas question de tonnerres, d’éclairs ni de voix sortant de la présence de Dieu. Tout cela a complètement disparu. Le ch. 4 nous a fait voir et entendre tout cela qui émanait du trône, et cela convenait alors, et était même nécessaire pour maintenir et manifester la sainteté de Celui qui y est assis. C’était le témoignage de Ses sentiments quand, une fois l’Église enlevée au ciel, l’homme est laissé à l’exaltation de lui-même, et n’est réprimé que par des jugements providentiels. Mais au ch. 22, il n’y a plus rien de ce genre. On voit le trône de Dieu et de l’Agneau, mais qu’en sort-il ? Un fleuve d’eau vive, éclatant comme du cristal. Et pourquoi cela ? Parce que le trône est ici en rapport avec la cité céleste, et que cette cité est le symbole de l’Église glorifiée dont le caractère habituel, même dans la gloire, est la grâce. Non seulement le fleuve est un fleuve de vie, et non de mort, mais les feuilles de l’arbre sont pour la guérison (et non la destruction) des nations.
La Jérusalem d’ici-bas est la cité de la justice terrestre — le lieu où Dieu amènera les Juifs au travers de troubles extrêmes. Ils seront obligés de passer premièrement par une terrible tribulation, — le temps de la détresse de Jacob (Jér. 30:7), mais il en sera délivré. Ce sera un châtiment mesuré avec justice à cause de leurs nombreux péchés. Ils traverseront toute cette affliction que Dieu Lui-même va leur infliger judiciairement, mais l’indignation cessera, et cela par la destruction de ceux qui en auront été les instruments. « Car encore très peu de temps, et l’indignation sera accomplie, et ma colère dans leur destruction » (És 10:25). Dieu prendra en mains la cause de Son peuple, et la vocation d’Israël durant le millénium sera encore empreinte de cette justice qui a caractérisé les voies publiques de Dieu à leur égard, quelles qu’aient pu être les sources cachées de la grâce. Toutes les nations monteront à Jérusalem, lorsque la montagne de la maison de l’Éternel sera établie sur le sommet des montagnes (És 2:2 ; Mich. 4:1). Et « la loi sortira de Sion, et la parole de l’Éternel de Jérusalem » (És 2:3). La loi est la règle de justice ; la grâce est tout autre chose. Elle n’est pas une règle de justice dont le châtiment inévitable est la mort. Il est vrai que la grâce règne par la justice (Rom. 5:21), mais il s’agit alors de la justice de Dieu, non pas celle de l’homme ; et par l’effet de Sa culture en grâce, cette justice de Dieu remplit le saint du fruit de la justice qui est par Jésus Christ à la gloire et à la louange de Dieu (Phil. 1:11).
Nous avons donc ici une scène de grâce parfaite. Rien ne peut surpasser cette bénédiction à l’égard de l’homme. Le nombre douze est toujours employé en rapport avec les voies de Dieu envers l’homme au moyen de l’administration humaine. Sept est le nombre de la perfection en rapport avec les choses de Dieu, ou plutôt avec le côté spirituel, soit bien soit mal — douze avec le côté humain. C’est pour cela que lorsque Dieu choisit les patriarches, il y en eut douze : cela se rapportait, je suppose, non seulement aux douze tribus qui naquirent d’eux, mais à tout le reste de l’humanité en général. Plus tard encore, quand les apôtres furent appelés, il y en eut douze, correspondant aux douze tribus d’Israël. Dès l’instant où apparaît l’apôtre à qui fut spécialement confiée la grande mission d’établir l’Église sur son fondement céleste et inébranlable, le nombre douze disparaît, et il apparaît des apôtres indépendants des douze (Actes 14:4, 14 ; Éph. 4). Ceci peut servir à expliquer un peu mieux la pensée que j’ai exprimée au sujet des douze portes, des douze fondements, etc. que nous avons vus au ch. 21, à savoir qu’ils dépeignent l’aspect de la cité envers l’homme. Elle est envisagée dans son caractère gouvernemental public. Il en est de même de l’arbre. Le fait qu’il porte douze sortes de fruits, et qu’il rende son fruit chaque mois, fait voir l’aspect de l’arbre en faveur de l’homme. C’est pour la même raison qu’il est ajouté après cela, que « les feuilles de l’arbre sont pour la guérison des nations ».
Un autre point est aussi parfaitement clair, c’est que cette scène ne se rapporte pas à l’état éternel, mais bien au millénium, car dans l’éternité les nations n’existeront plus comme telles, et elles n’auront évidemment aucun besoin de guérison. Mais rappelons-nous bien cependant que s’il s’agit de la cité céleste elle-même, elle est éternelle. Que la cité soit vue dans le millénium ou dans l’état éternel qui lui succède, cela ne fait guère de différence. Le ch. 21 nous fait voir deux descentes de la cité, l’une au début du millénium, et l’autre au début de l’état éternel : au verset 21:2, c’est sa descente quand l’état éternel commence, et au verset 21:10, c’est sa descente en vue du millénium. Je pense que la raison de ces deux descentes est qu’à la fin du millénium les cieux et la terre de maintenant disparaissent, et naturellement la cité disparaît de cette scène de bouleversement. Puis, quand la nouvelle terre apparaît, la cité céleste redescend et prend sa place permanente dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre où la justice habite.
Cette remarque est nécessaire, parce qu’à la fin des mille ans, la cité céleste demeure pour toujours, malgré que tout soit changé. « À Lui soit la gloire dans l’assemblée dans le Christ Jésus, pour toutes les générations du siècle des siècles. Amen » (Éph 3:21). Une fois le millénium achevé, l’Église glorifiée cessera d’exercer certaines fonctions envers la terre, mais la bénédiction qui lui est propre demeure éternellement la même. C’est pourquoi il est dit ici (22:3) : « Et il n’y aura plus de malédiction ». Ceci sera éternellement vrai pour la cité céleste dès ce temps du millénium, et ce sera aussi vrai plus tard pour les nouveaux cieux et la nouvelle terre.
« Et le trône de Dieu et de l’Agneau sera en elle, et ses esclaves le serviront ; et ils verront sa face, et son nom sera sur leurs fronts. Et il n’y aura plus de nuit, ni besoin d’une lampe et de la lumière du soleil ». L’un de ces luminaires représente la lumière produite par l’homme, et l’autre celle qui vient de Dieu ; mais tout ce qui était approprié à ce monde appartient au passé pour la cité. « Car le Seigneur Dieu fera briller sa lumière sur eux ; et ils régneront aux siècles des siècles » (22:3-5). Cette expression « aux siècles des siècles » doit, je n’en doute pas, être prise ici au sens le plus fort. Elle ne s’applique pas uniquement à ce qui est appelé « le royaume », quoique ce soit bien par lui que commence le règne. En 1 Cor. 15:24, il est question d’un royaume que Christ remet à un moment déterminé appelé « la fin ». « La fin » implique que les mille ans et le jugement des morts ont déjà eu lieu, car ce jugement fait partie du « royaume » de Christ — c’est son grand acte de clôture, peut-on dire. Toutes ces choses font partie du royaume ; et c’est seulement quand ce royaume est terminé, et que la mort, le dernier ennemi, a été détruit, que le Seigneur Jésus remet le royaume à Dieu.
Le but du royaume est d’assujettir effectivement tous les ennemis ; une fois ceci accompli, ce royaume spécial et humain prend fin. Mais s’il se produira alors un grand changement pour les saints terrestres quant à leur corps naturel ici-bas, il n’en sera pas de même de ceux qui sont dans les lieux célestes, déjà glorifiés. Ils régneront aux siècles des siècles : ce sera vrai dans toute l’éternité. Ces mots semblent utilisés ici sans aucune restriction. Tout le récit contenu depuis le verset 21:9 jusqu’au verset 22:5 présente la relation de la cité céleste avec la terre durant le millénium. Mais certains traits qui la caractérisent, sont vrais éternellement. L’un d’eux, outre sa gloire intrinsèque immuable, est que le service des saints sera éternel ; il en est de même du fait de régner. Il pourra y avoir du changement dans la manière de régner et de servir après que le royaume terrestre aura pris fin, mais quant aux choses mêmes, elles subsistent, je pense, éternellement.
Nous arrivons maintenant aux considérations finales du prophète et à son entretien avec l’ange au sujet de la prophétie, ainsi qu’au message final du Seigneur Jésus Lui-même. Au sens strict, on peut dire que le verset 5 termine la prophétie. Mais de même que le livre commence par une sorte de préface, il se termine aussi par une conclusion solennelle.
Vous remarquerez que, dans ces paroles d’adieu du Seigneur, il est trois fois question de la venue du Seigneur, chaque fois dans un contexte différent. La première fois, c’est au v. 7, évidemment en rapport avec le verset 6. « Et Il me dit : Ces paroles sont certaines et véritables ; et le Seigneur Dieu des esprits des prophètes, a envoyé son ange pour montrer à ses esclaves les choses qui doivent arriver bientôt. Et voici je viens bientôt ; bienheureux celui qui garde les paroles de la prophétie de ce livre (22:6, 7). Le Seigneur Jésus relie ici Sa venue avec la bénédiction réservée à l’homme qui est attentif aux paroles de la prophétie. En relation étroite avec cela, le Saint Esprit recommande alors solennellement cette prophétie qui va s’achever. Évidemment le Seigneur Jésus prévoyait le mépris qui serait jeté sur ce livre, et les efforts des hommes pour le mettre de côté.
Je n’aime pas faire allusion à aucune association religieuse en particulier, mais permettez-moi pourtant de dire un mot d’un corps réformé bien connu (*). Il est extraordinaire de voir le livre dont le but exprès est de procurer aux gens la Parole de Dieu en entier sous forme de portions journalières : quelle place y a-t-on donné au livre de l’Apocalypse ? À peine en trouve-t-on quelque court fragment en une ou deux occasions spéciales, et ailleurs rien du tout, tandis que même une partie des livres apocryphes y est insérée. C’est, me semble-t-il, contre le mépris plus au moins avoué pour ce livre de l’Apocalypse que le Seigneur cherche ici à mettre les Siens en garde.
(*) note Bibliquest : l’église d’Angleterre
Mais ce n’est pas seulement dans ce livre de textes choisis que l’Apocalypse est négligée ; beaucoup de personnes dans des circonstances toutes différentes ne sont pas moins fautive à cet égard. Parmi ceux qui n’ont pas formellement de portion journalière de l’Écriture, ce livre est-il honoré comme le Seigneur le demande ? On se rend compte qu’en général, même si les enfants de Dieu ne se sont pas concertés pour déshonorer ce livre, en pratique ils le mettent de côté, sauf pour faire de la controverse, des récits historiques, ou des textes d’imagination. Il n’y a guère eu d’essai d’en faire un exposé simple et pratique. Peu de serviteurs en font la diffusion pour servir de nourriture dans les foyers de la famille de Dieu. Et si on s’aventure parfois à en fournir des interprétations, elles sont souvent tout à fait grossières, — faites à base de notions archéologiques tirées par les cheveux, ou de comparaisons dégradantes avec tel ou tel historien ou journaliste incrédule.
Qu’il est solennel de s’écarter de la Parole de Dieu ! Le Seigneur Jésus met ce livre devant les Siens comme une lumière resplendissante dans un lieu obscur (2 Pierre 1:19), et non pas du tout pour servir d’exercice à des érudits en veine de spéculer. Cette Parole de Dieu est destinée à servir à tous les enfants de Dieu, pour le profit de leurs âmes, et pour aider à développer leur communion avec Dieu. Dieu voulait que non seulement ils connaissent Sa grâce, mais aussi les jugements qui vont fondre sur le monde. Il désirait qu’ils comprennent que ce livre qui montre où va le monde et quel sort l’attend, leur indique aussi leur délivrance hors de ce jugement. Car l’Apocalypse révèle clairement que l’Église est vue dans la présence de Dieu avant qu’il y ait la moindre parole de jugement : dès le début du ch. 4, nous la voyons au ciel. Combien il est évident que les paroles de la prophétie ont toutes la plus haute importance pour le peuple de Dieu ! Dieu désire que les Siens soient heureux dans la communion qu’Il leur donne avec Lui-même, avant qu’arrivent ces événements : « Bienheureux est celui qui garde les paroles de la prophétie de ce livre ». Pourquoi ce livre a-t-il eu si peu d’effet quant à sa portée pratique ? Tout simplement parce que la prophétie a été séparée de la promesse. Cette déclaration pleine de grâce : « Voici je viens bientôt », n’a pas été distinguée des « paroles de la prophétie de ce livre », à la suite de quoi on a confondu la portion de l’Église avec les jugements qui doivent fondre sur le monde. L’Apocalypse suppose les enfants de Dieu en train d’attendre la venue de Christ, qui devrait effectivement être leur glorieuse espérance journalière. Si ce n’est pas le cas, je crois qu’il est moralement impossible d’entrer dans ces « paroles de la prophétie », et d’en jouir. « Bienheureux est celui qui garde les paroles de la prophétie de ce livre ». Le Seigneur vient bientôt. Mais si nous ne L’attendons pas avec des cœurs en repos par Sa grâce, nous ne manquerons pas de tordre ces paroles de la prophétie, au lieu de les tourner à notre profit.
Quand Jean eut entendu et vu ces choses, il se jeta à terre pour rendre hommage devant les pieds de l’ange qui les lui montrait. Il en avait déjà fait autant précédemment (19:10) (*). Il se peut que la grandeur imposante de la vision lui ait fait supposer qu’il s’agissait de Christ Lui-même sous la forme d’un ange. Mais il est immédiatement corrigé de son erreur. L’ange lui dit « je suis ton co-esclave », ou plutôt « le co-esclave de toi, et de tes frères les prophètes ». Certaines traductions sont ambiguës sur cette déclaration, et laissent entendre que l’ange était l’un de ses frères, les prophètes. Bien sûr, ce n’est pas le sens. L’ange n’était pas du tout le Seigneur, ni un objet d’adoration, mais il était le compagnon d’esclavage de Jean, et des frères de Jean, les prophètes. « Garde-toi de le faire ; je suis ton compagnon d’esclavage et [celui] de tes frères les prophètes et de ceux qui gardent les paroles de ce livre : rends hommage à Dieu » (22:9).
(*) Il peut être bon d’observer ici que, dans la proposition réciproque dont on a si souvent fait une application vague ou fausse, « l’esprit de prophétie est le témoignage de Jésus », il faut comprendre qu’il s’agit non pas d’un témoignage rendu à Jésus, mais du témoignage que Lui a rendu, et en général de Son témoignage prophétique tout le long de l’Apocalypse, qu’Il l’ait confié à un ange ou à Ses serviteurs. Il est donc faux de dire que cette proposition signifie un témoignage rendu à Jésus, ce qui est régulièrement exprimé par le datif, ou par περι et le génitif. L’ange qui était l’intermédiaire de la communication n’était qu’un compagnon d’esclavage des compagnons d’esclavage de Jean : c’est à Dieu qu’il faut rendre hommage.
Puis il ajoute une pensée de grande importance pratique pour les enfants de Dieu. Vous pouvez vous souvenir que, dans le dernier chapitre de Daniel (12:4), il est écrit : « Et toi, Daniel, cache les paroles et scelle le livre jusqu’au temps de la fin. Plusieurs courront çà et là ; et la connaissance sera augmentée ». Remarquez maintenant, en comparant avec Apoc. 22, la position merveilleuse dans laquelle Dieu a mis Son Église.
Il venait d’adresser Sa parole à l’homme le plus privilégié entre tous les prophètes privilégiés de l’Ancien Testament, —celui qui avait été appelé « homme bien-aimé » de Dieu (Dan. 9:23 ; 10:11, 19). Et quoiqu’une prophétie lui ait annoncé si clairement et si nettement la venue et la mort de Christ, une nouvelle communication lui fut faite au sujet de ce qui venait de lui être dit : « Et toi, Daniel, cache les paroles et scelle le livre jusqu’au temps de la fin ». Ici le même Esprit s’adresse à Jean, et lui dit : « Ne scelle point les paroles de la prophétie de ce livre ; le temps est proche » (22:10). Comment cela se fait-il ? C’est que toute la vocation de l’Église fait partie du temps de la fin. Dès le jour où l’Église commença son existence effective ici-bas, ce fut le temps de la fin ; et tout le long de son histoire, c’est encore le temps de la fin. Bien sûr, je ne veux pas dire que c’est positivement le temps de la fin pour les Juifs, qui doivent attendre le développement de tout sur la base d’un accomplissement littéral des faits : mais c’est là que réside le caractère particulier de l’appel de l’Église. Elle est au-dessus des temps et des saisons, quoiqu’elle les connaisse ; elle n’a rien à faire avec des dates, des signes, ou des événements extérieurs, pas plus qu’avec le monde dont ces choses sont l’accompagnement naturel et nécessaire. L’Église est élevée au-dessus d’une telle scène ; elle est céleste. Le ciel, voilà le lieu où la grâce de Dieu nous place, complètement en dehors des calculs qui se rapportent au gouvernement de ce monde.
Quant au Juif dont Daniel était le type, il lui faut attendre jusqu’à ce que le temps de la fin soit venu historiquement, jusqu’à ce que la connaissance soit donnée par Dieu à ceux qui comprendront alors. Jusqu’à ce moment-là tout est scellé pour Israël. Tel n’est pas le cas de l’Église représentée par Jean. À lui il est dit : « Ne scelle point les paroles de la prophétie de ce livre ».
Or c’est ici qu’est l’erreur commise par beaucoup d’excellents esprits. Sir Isaac Newton, homme de la plus grande réputation dans les sciences humaines, appliquait à l’Église cet ordre donné à Daniel de fermer et sceller le livre. En conséquence, il l’abandonna comme une chose qui ne pouvait être comprise jusqu’au temps de la fin. S’il avait comparé le passage de Daniel avec les dernières paroles de l’Apocalypse de Jean, il aurait appris que les paroles mêmes qui étaient cachées au prophète Juif sont expressément ouvertes au chrétien. Si Daniel devait sceller, Jean reçoit expressément l’ordre de ne pas sceller. Pourquoi ? Parce que Christ est venu, et qu’Il est monté au ciel, et qu’Il est à la droite de Dieu, prêt à juger les vivants et les morts ; Il a été rejeté, et dès ce moment-là c’est moralement le temps de la fin. Les autres écrivains du Nouveau Testament parlent de la même manière. L’apôtre Jean (1 Jean 2:18) dit : « Petits enfants, c’est la dernière heure ». « La fin de toutes choses s’est approchée » écrit Pierre (1 Pierre 4:7) ; et Jacques (5:9) : « Le juge se tient devant la porte ». L’apôtre Paul écrivait aussi : « Or toutes ces choses leur arrivèrent comme types, et elles ont été écrites pour nous servir d’avertissement à nous que les fins des siècles ont atteints » (1 Cor. 10:11). Voyez aussi Héb. 9:26. On trouve ainsi substantiellement la même grande vérité depuis les épîtres de Paul, de Pierre, et de Jacques, jusqu’à l’Apocalypse.
À mon avis, c’est là ce qui est supposé, lorsque Jean reçoit l’ordre de ne pas sceller les paroles de la prophétie de ce livre. Il faut maintenant en faire usage, et les comprendre en vertu de la connaissance de Christ, et avec le Saint Esprit donné par Christ comme onction par laquelle nous connaissons toutes choses. Pour nous le temps est toujours proche, et les paroles de ce livre ne nous sont pas scellées, de sorte que c’est pure incrédulité, si au lieu de porter le livre, pour ainsi dire, à Christ qui est la lumière pour révéler cela comme tout le reste, nous le soumettons au monde et à sa sagesse, qui ne peuvent qu’enténébrer. C’est là, je n’en doute pas, la source et la raison des erreurs et des difficultés qui prévalent tant relativement à l’interprétation du livre. Pour bien comprendre ce livre, comme toute autre portion de l’Écriture, il faut que je voie ce que Dieu est en train de faire pour la gloire de Son Fils. Comme chrétien je suis encouragé à lire la prophétie : ses paroles ne sont point scellées pour ceux qui ont la pensée de Christ. Si j’étais Juif, je devrais attendre jusqu’à ce qu’arrive le temps de la fin dans la pleine acception prophétique du terme, c’est-à-dire jusqu’à la fin de cette ère. Alors les sages parmi les Juifs comprendront ; il s’agit du résidu pieux et intelligent. C’est par un tel résidu, du moins en principe (il est vrai qu’il était appelé à de meilleures espérances), que l’Église a commencé.
Mais certains diront peut-être : il y avait dans la prophétie de Daniel certaines choses qui devaient être scellées, et d’autres pas : pourquoi ces dernières (et non pas les premières) ne seraient pas celles à propos desquelles il fut dit à Jean de ne pas les sceller ? Je réponds que l’Apocalypse suppose connue toute la vérité qu’on trouve en Daniel, et beaucoup plus encore. On ne pourrait pas la comprendre si Daniel n’est pas compris, tandis qu’il y a beaucoup de vérités ajoutées dans l’Apocalypse et qui n’ont pas été données à Daniel. L’argument n’est donc pas valable. Le fait est que Daniel parle en termes très généraux, et qu’il lui est dit de cacher les paroles et de sceller le livre — non pas seulement certaines parties du livre. L’Apocalypse s’occupe des mêmes affaires que Daniel en rapport avec le dernier empire, donnant beaucoup d’éléments d’une portée bien plus vaste et bien plus profonde — des choses qui surgissent de l’apostasie chrétienne, outre la ruine précédente d’Israël et la méchanceté future à la fois d’Israël et des Gentils. C’est pourquoi s’il y a un livre quelconque du Nouveau Testament qu’on se serait naturellement attendu à voir scellé, c’est bien l’Apocalypse. Comme elle est le dernier livre, elle est aussi le plus difficile, le plus compliqué et le plus vaste des livres de la Bible. C’est pourquoi, quand le Saint Esprit dit de ne pas sceller les paroles de la prophétie de ce livre, je comprends que cela implique une indication claire des privilèges particuliers du chrétien. L’Apocalypse suppose le chrétien se tenant dans la pleine lumière de Dieu, de sorte que ce qui peut avoir été caché auparavant, est aujourd’hui pleinement révélé, du fait que Christ est venu et nous a fait membres de Son corps, et qu’Il nous a donné le Saint Esprit qui sonde toutes choses, et même les choses profondes de Dieu. Telle est, à mon avis, la raison pour laquelle il est dit : « Ne scelle point les paroles de la prophétie de ce livre ». C’est une conséquence de la rédemption.
Cela est important sous un autre rapport qu’on ne voit pas toujours. Les événements visés par les visions prophétiques de l’Apocalypse ne rendent jamais capable de comprendre le livre lui-même. Si ces événements devaient s’accomplir aujourd’hui, cela ne donnerait pas pour autant l’intelligence sur l’Apocalypse. La seule clef de la prophétie, c’est le Saint Esprit qui peut seul nous faire connaître sa relation avec Christ ; et tant que cette relation n’est pas vue, on ne saurait comprendre la prophétie. Prenez, par exemple, l’une des prophéties les plus claires et les plus précises, celle des 70 semaines de Daniel. On admet généralement qu’elle a été accomplie ; mais demandez qu’on vous en donne le sens réel, et vous verrez combien elle est peu comprise. On a une idée vague qu’elle est accomplie, et guère plus. Ce ne sont donc pas les événements eux-mêmes qui expliquent la Parole : il nous faut l’enseignement de l’Esprit, qui est aussi nécessaire pour interpréter la prophétie, que pour toute autre partie des Écritures. Les événements peuvent être l’accomplissement d’une prophétie particulière, et un témoignage de sa vérité pour ceux qui doutent ; mais ils n’apportent jamais par eux-mêmes la juste interprétation de la prophétie. Ils la corroborent, sans doute, quand elle est accomplie, et ils peuvent servir à fermer la bouche aux contredisants. Mais il faut comprendre la prophétie elle-même avant de pouvoir l’appliquer aux événements (il y a longtemps que cela a été remarqué par un autre commentateur) ; et lorsque vous la comprenez, vous avez ce que Dieu voulait donner à votre foi, indépendamment des événements. De fait, pour réfuter une idée pareille, il suffit de peser ce qui est dit ici, comme partout ailleurs dans la prophétie : « Ne scelle point les paroles de la prophétie de ce livre ; car le temps est proche ». Le prix, l’utilité, que la prophétie a pour nous, pour l’Église, est avant les événements, quelque puisse être son utilité pour ceux qui se trouveront sur la scène quand les événements auront lieu.
Mais écoutez maintenant une vérité bien solennelle. Lorsque le temps dont traite la prophétie sera effectivement arrivé, quelle sera la condition des hommes ? Elle se trouvera fixée, fixée pour toujours pour tous — sans espérance pour certains. « Que celui qui est injuste, commette encore l’injustice ; et que celui qui est souillé, se souille encore ; et que celui qui est juste, pratique encore la justice ; et que celui qui est saint, soit sanctifié encore » (22:11). C’est-à-dire que ce n’est pas le temps où il peut y avoir un changement moral ; ce n’est pas un temps où il peut y avoir la conversion des pécheurs, — un temps où un homme qui est sous la puissance de Satan, peut en être délivré et être transporté dans le royaume du Fils de l’amour de Dieu. Tout cela a pris fin. Alors que celui qui est injuste reste injuste, et que celui qui est souillé reste encore souillé. Les hommes sont solennellement fixés dans la condition dans laquelle ils sont trouvés. Le jour de la grâce est passé, le jour du jugement sera venu, et la porte sera fermée.
« Voici, je viens bientôt, et ma récompense est avec moi pour rendre à chacun selon ce que sera son œuvre » (22:12).
Ceci confirme évidemment ce qui a été remarqué. Lorsque ce jour arrive, c’est le jugement des vivants. La venue du Seigneur n’est pas mentionnée ici comme un encouragement pour celui qui entend et qui garde les paroles de la prophétie de ce livre, mais plutôt sous la forme d’un jugement faisant un tri.
« Je suis l’Alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin » (22:13).
Le Seigneur Jésus, outre ce qui Lui est particulier, prend ici le même titre que Dieu lui-même a pris au ch. 21:6. Comme Dieu était au ch. 21 la somme et la substance de toute révélation, de tout être, de toute action, ainsi Christ l’est pareillement. « Personne ne vit jamais Dieu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, Lui, l’a fait connaître » (Jean 1:18).
« Bienheureux sont ceux qui font ses commandements [ou : lavent leurs robes], afin qu’ils aient droit à l’arbre de vie, et qu’ils entrent par les portes de la cité. Dehors sont les chiens, et les magiciens, et les fornicateurs, et les meurtriers, et les idolâtres, et quiconque aime et fait le mensonge » (22:14-15).
Mais nous avons ensuite autre chose. Il ne s’agit plus de la venue du Seigneur en encouragement à ceux qui garderaient les paroles de la prophétie de ce livre ; ni non plus Sa venue pour s’occuper de tous les hommes, c’est-à-dire Son apparition en jugement, ayant Sa récompense avec Lui pour rendre à chacun selon ses œuvres. Nous avons vu les saints et les justes ayant leur portion, et les souillés et les injustes leur jugement. Mais le Seigneur a aussi sa relation propre et parfaite avec l’Église. En conséquence Sa voix se fait maintenant entendre, avec une solennité toute particulière : « Moi, Jésus, j’ai envoyé mon ange pour vous rendre témoignage de ces choses dans les assemblées. Moi, je suis la racine et la postérité de David » (22:16). C’est-à-dire qu’Il fait allusion à Sa divinité et à Son humanité. Mais à côté de cela, Il a une relation spéciale avec nous : « l’étoile brillante du matin ».
Quand le Seigneur vient dans Sa gloire pour le monde, c’est comme le Soleil de justice avec la guérison dans ses ailes (Mal. 4:2), pour ceux qui ont été brisés, dispersés, et dépouillés — pour le peuple terrible depuis le commencement jusqu’à maintenant (*). Mais Il apparaît alors sous un aspect terrifiant, pour fouler sous Ses pieds ceux qui L’ont méprisé. Ce n’est point ainsi qu’Il se présente à nous. Ce n’est pas pour nous l’image du soleil quand l’homme ne devrait plus dormir (Ps. 104:22, 23). Lorsque le Soleil de justice adresse son appel à l’homme, ce n’est pas pour l’inviter à travailler comme il travaille à présent, mais pour le sommer de se courber devant Lui dont il n’a longtemps pas tenu compte, et d’entendre en son temps sa condamnation prononcée par le Seigneur de gloire qu’il ne peut plus continuer à mépriser. Voilà de quelle manière Il apparaîtra au monde, et « tous les orgueilleux, et tous ceux qui pratiquent la méchanceté seront du chaume, et le jour qui vient les brûlera, dit l’Éternel des armées, de manière à ne leur laissera ni racine ni branche » (Mal. 4:1).
(*) note Bibliquest : ces expressions sont celles d’Ésaïe 18:2,7 selon la version anglaise autorisée du Roi Jacques. JND traduit en français : « une nation répandue loin et ravagée, un peuple merveilleux dès ce temps-là et au-delà »
Mais pour ceux qui veillent durant la nuit du jour de l’homme, avant l’apparition du Seigneur en gloire, pour ceux qui veillent avec des affections d’épouse, ne dormant pas comme les autres (1 Thes. 5:6) — dans quels termes le Seigneur s’adresse-t-Il à eux ? Comment se fait-Il connaître à eux ? « Je suis l’étoile brillante du matin ». Étoile bénie du matin avant que le jour naisse ! Ce n’est point en vue du jour que nous veillons, mais durant la nuit nous veillons en vue de Christ, et Il nous donnera l’Étoile du matin (2:28), le précurseur de l’aube. C’est une position bénie — celle de notre amour et de notre espérance : elle ne sera jamais frustrée de sa joie, et le Seigneur Jésus viendra sûrement à nous comme l’étoile brillante du matin. Il nous encourage tandis que nous L’attendons, et Il veut venir bientôt Lui-même pour nous. Il se peut que nous ayons à attendre un peu ; au moins le temps peut nous sembler long. Hélas ! il sera trop court pour ceux qui perdent leur temps à sommeiller ; mais pour ceux qui L’attendent et qui soupirent avec ardeur après le moment où ils Le verront, l’espérance peut sembler différée longtemps. Puissent nos cœurs, au lieu d’être de plus en plus fatigués et languissants, être au contraire remplis de la joie et de l’assurance ferme que le Seigneur vient bientôt ? Il est l’Étoile brillante du matin.
Mais il y a plus encore : « Et l’Esprit et l’épouse disent : Viens » (22:17).
Quelle pensée précieuse pour nous que le Saint Esprit Lui-même soit Celui qui prend la parole et qui dit : « Viens ! ». Il soupire avec nous, entrant dans nos douleurs depuis qu’Il est descendu ici-bas. Je n’ai pas besoin de dire qu’Il n’en est pas moins divin, mais Il a daigné en outre s’identifier, pour ainsi dire, avec nos cœurs, et partager nos sentiments. Mais ce ne sont pas des soupirs que nous avons ici ; telle n’est pas la pensée de l’Esprit quand Il pense à la venue du Seigneur pour nous. C’est la calme et paisible ardeur du désir. « L’Esprit et l’Épouse disent : Viens ». Combien il est fortifiant de savoir que c’est la voix du Saint Esprit Lui-même qui dit au Seigneur Jésus : « Viens ! » Ce n’aurait pas été une chose aussi bénie, si l’Église avait été seule à dire : « Viens ». Mais c’est « l’Esprit et l’Épouse ». Elle a fait bien des choses mauvaises, elle a commis bien des fautes dans ses pensées, dans ses sentiments, et dans ses voies. Mais maintenant c’est l’Esprit, le Saint Esprit Lui même, qui dit : « Viens ». C’est Lui qui conduit le cœur à désirer la venue de Jésus ; c’est Lui qui est l’énergie de l’Église en invitant Jésus à venir. « L’Esprit et l’Épouse disent Viens ». C’est en regardant en haut à Jésus que l’Église ou le chrétien, dit : Viens ; ce n’est pas en regardant en bas au pauvre pécheur et en lui disant de venir. Le Saint Esprit conduit et inspire le cœur de l’Épouse pour crier ainsi, non seulement par sympathie pour ses douleurs, mais en communion avec la joie avec laquelle elle regarde en haut dans l’espérance du retour de l’Époux.
Mais il y a encore autre chose : « Que celui qui entend, dise, Viens ».
Si j’ai seulement entendu la voix de Jésus, je suis autorisé à dire : Viens. Peut-être y a-t-il des personnes prêtes à s’écrier : « Oh, que je serais heureux si seulement je pouvais demander au Seigneur de venir ! Mais comment puis-je le demander, moi qui suis si indigne ? » Chères âmes, le Seigneur Lui-même vous autorise à dire : Viens. Celle qui dit « viens !» n’est pas seulement l’Épouse remplie du Saint Esprit, et entrant dans la plénitude de ses privilèges ; mais écoutez cette parole : « que celui qui entend dise : Viens ». Avez-vous entendu la voix de Jésus et goûté qu’Il est plein de grâce ? Ne savez-vous pas qu’Il est le bon Berger ? Je pourrais être le plus chétif et le plus faible, et par ignorance reculer à la pensée de la venue immédiate du Seigneur ; et néanmoins je vois ici le Saint Esprit m’invitant moi-même à me saisir de la même parole que l’Esprit et l’épouse font entendre : « Que celui qui entend, dise : Viens ».
Il est bien évident aussi que cette effusion des premières affections du cœur pour Christ et Sa venue, n’endurcit point le cœur à l’égard de ce pauvre monde, ni ne rend indifférent à la conversion de ceux qui sont perdus. Bien plutôt, elle produit un effet tout contraire. Quelque bonne opinion que les hommes aient de leurs efforts, j’ai la conviction que ceux qui désirent le plus la conversion des pécheurs, — toutes choses étant égales par ailleurs, — ce sont ceux qui désirent le plus la venue du Seigneur Jésus. Je ne crois pas que ceux qui désirent remettre à plus tard Sa venue, soient ceux qui prient et travaillent le plus pour la conversion des âmes. Qu’est-ce qui porte les premiers [ceux qui désirent le plus la venue du Seigneur] à ce désir ? Ils travaillent dans ce but parce qu’ils voient les âmes périr éternellement, et qu’ils sentent avec raison que tous ceux qui sont sans Christ sont misérables. Mais ces sentiments-là leur sont communs avec tous leurs frères. Nous nous croyons que si les hommes ne reçoivent pas l’Évangile, ils seront précipités en enfer, et cela nous afflige de les voir rejeter le Sauveur. Nous éprouvons ces sentiments aussi bien qu’eux [les seconds, ceux qui remettent à plus tard la venue du Seigneur]. Mais nous avons une autre motivation qu’eux [les seconds] n’ont pas. C’est en effet que tel est le chemin du Seigneur, et qu’il vaut mieux que le leur. Il sait, Lui, incomparablement mieux que Ses serviteurs, ce qui est bon pour les pauvres pécheurs et pour les pauvres saints. Or Lui nous fait voir dans ce passage que c’est le même Esprit qui regarde à Jésus, qui dit aussi : Viens — et qui peut aussi nous faire tourner nos regards vers les pécheurs perdus, pour les inviter : « Que celui qui a soif, vienne ». Voilà l’autre côté. Ce n’est pas l’Esprit dirigeant l’Église à regarder en haut vers le Seigneur, en disant : Viens ; mais c’est le cœur qui est maintenant dirigé vers le monde pour dire : « Que celui qui a soif vienne ; que celui qui veut, prenne gratuitement de l’eau de la vie » (22:17).
Le pécheur n’est pas invité à dire : Viens. Observez la grande différence, bien nette, dans la dernière partie du verset (22:17c). Dans les deux premières phrases, ceux qui parlent disent : Viens ; mais dans la dernière phrase, ou partie du verset, ceux dont il est question n’appellent pas Jésus à venir, mais ils sont invités à venir eux-mêmes : « Que celui qui a soif vienne », etc.
Dieu fait voir ainsi que la première pensée de mon cœur doit être pour le Seigneur Jésus. Si je Lui suis fidèle, je désirerai Sa venue. L’Esprit inspire et approuve ce désir. Quel en est l’effet sur mes sentiments à l’égard du monde ? Il me donne un motif céleste pour désirer la conversion des pécheurs. J’aurai les mêmes motifs moraux, et les mêmes affections qui agissent sur que mes frères qui remettent à plus tard la venue du Seigneur, mais j’aurai de plus, toute l’impulsion que peuvent me donner l’espérance de la prompte arrivée de Christ, et le sentiment du danger couru par ceux pour lesquels Sa venue ne peut être qu’un jugement certain, même dans ce monde. Plus un chrétien attend la venue de Christ à chaque instant, et plus il doit avoir l’ardent désir que les âmes viennent et prennent de l’eau de la vie, et plus il doit déployer dans ce but une sollicitude active et pleine de zèle.
Dans ce verset 17, Dieu fait donc voir notre double relation. Il me montre ma relation avec Christ, qui doit être la première pensée de mon cœur — non pas seulement que mon âme soit en paix s’Il vient, mais qu’elle soit remplie de l’ardente affection qui désire qu’Il vienne. Il me fait voir ensuite que si je suis en bon état à cet égard, je regarderai autour de moi avec un zèle plein d’ardeur dans le sentiment de la grâce de Christ, et je dirai à quiconque a soif : Viens. Plus que cela : Si j’aperçois une âme qui peut-être n’a pas beaucoup soif, mais qui veut venir, je ne lui dirai pas d’attendre qu’elle ait très soif. Je l’engagerai à venir sur le champ, et lui ferai bon accueil ; car voici la teneur de la parole : « que celui qui veut prenne gratuitement de l’eau de la vie ». Si seulement il y a le désir du cœur, ce désir vient de Dieu, et personne n’a droit de dire : il te faut attendre d’avoir fait telle ou telle expérience. Si un homme n’est pas encore arrivé à réaliser son état, je ne dois pas le tenir à l’écart. L’eau de la vie est pour quiconque veut : cet homme est engagé à venir et à en boire gratuitement. Quelle plénitude de grâce remplit la scène quand le Seigneur nous présente notre position !
« Moi, je rends témoignage à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre, que si quelqu’un ajoute à ces choses, lui ajoutera les plaies écrites dans ce livre ; et si quelqu’un ôte quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu ôtera sa part de l’arbre de vie et de la sainte cité, qui sont écrits dans ce livre » (22:18, 19). Vous remarquerez que l’arbre et la cité mentionnés ici, correspondent à ce que nous avons vu au verset 14. Ceux qui font Ses commandements (ou plutôt, selon le texte critique : « ceux qui lavent leurs robes ») sont bienheureux, et ont droit de manger de l’arbre de vie et d’entrer par les portes dans la cité (22:14). Mais (22:19) quant à ceux qui ôtent quelque chose des paroles de ce livre, Dieu ôtera leur part tant de l’arbre que de la cité qui sont écrits dans ce livre. Ils n’y auront pas accès.
Le Seigneur vient de dire que si qui que ce soit ajoute ou retranche aux paroles de la prophétie de ce livre (ce qui la déshonore dans les deux cas), Lui le saurait certainement, le ressentirait et en tiendrait rigueur. Mais Il ne peut achever par de telles paroles. Il a gardé, pour ainsi dire, le meilleur vin pour la fin. Il a déjà parlé de Sa venue en jugement, et de Sa venue pour l’Église en parfaite grâce ; et maintenant Il ne pourrait pas nous laisser sur une note douloureuse. Il faut qu’Il ramène nos cœurs à l’allégresse et à la joie liées à la pensée de Son retour ; c’est pourquoi Il ajoute : « Celui qui rend témoignage de ces choses, dit : Oui, je viens bientôt. Amen ». Jean, comme représentant l’Église, répond immédiatement : « Viens, Seigneur Jésus ». C’est la prompte réponse de son cœur au Seigneur.
Et si c’est notre privilège de regarder à Christ et d’entendre Sa voix, si nous avons connu un peu la joie d’être, même dès à présent, en union avec Lui, étant faits membres de Son corps, de Sa chair et de Ses os, si nous attendons dans la conscience de notre relation d’Épouse avec Christ et sûrs que nous aurons la portion de l’Épouse, en présence de l’Agneau pour toujours, — que le Seigneur nous accorde que ce soit là la réponse de nos cœurs et de nos bouches : « Amen, viens Seigneur Jésus ». Puissions-nous ne pas caresser de hautes idées pour nous-mêmes, pour l’église et encore moins pour le monde ! C’est une tromperie aveuglante que d’attendre des jours meilleurs tandis que Jésus est absent. Sans doute il y a en réserve d’heureux jours, même pour ce pauvre monde — les jours du ciel sur la terre ; mais il faut que le Seigneur vienne avant, et il faut qu’avant tout, Il nous ait pour Lui. Tant que le Seigneur n’aura pas l’Église avec Lui, Il ne laissera pas le monde, dans son ensemble, avoir un temps de joie réelle et permanente. Car comme on le voit en Rom. 8, « la vive attente de la création attend la révélation [ou : manifestation] des fils de Dieu ». La manifestation dont il est parlé ici, sera une manifestation en gloire. L’apôtre Paul avait parlé un peu avant (Rom. 8:18) de la gloire qui nous serait révélée, quand nos corps seront changés et rendus semblables au corps glorieux de Christ. Nous ne sommes pas semblables au Fils de Dieu maintenant, en ce qui concerne nos corps : nous savons trop bien que nous portons encore l’image de celui qui est poussière ; mais un jour nous porterons l’image du Céleste. Et alors quand Dieu nous verra briller à la ressemblance de son propre Fils, Il n’aura pas de motif d’avoir honte de nous. Il ne veut pas nous produire devant l’univers, tant que nos corps ne sont pas autant dignes de Lui que l’est la vie nouvelle qu’Il a donnée à nos âmes. Quand les fils de Dieu seront manifestés, la création cessera de soupirer, et la terre et les cieux, remplis de bénédictions, publieront à la fois la gloire et la bonté de Dieu : Les fleuves battront des mains, et les montagnes chanteront de joie, devant l’Éternel (Ps. 98:8-9). On verra alors la bienheureuse espérance et l’apparition de la gloire, que le Seigneur a mises devant nous, se traduire en chants de louange, de joie et d’allégresse, qui retentiront jusqu’aux bouts de la terre, et jusqu’aux limites extrêmes de la création.
Que le Seigneur nous accorde de pouvoir dire : « Amen, viens, Seigneur Jésus ! » Puissions-nous le dire pour nous-mêmes, comme pour toute l’Église, et en un sens aussi pour toute la création dont la bénédiction dépend de notre manifestation avec Christ ! En attendant, que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ, soit avec tous les saints.