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LA DOCTRINE DU NOUVEAU TESTAMENT SUR

 

 

LE SAINT ESPRIT

 

William Kelly

 

Seconde partie (méditations 6 à 10). La première partie forme un document séparé.

La scission de cet ouvrage en 2 documents est seulement due à sa taille.

 

Table des matières :

6     Méditation 6    Le don de l’Esprit et les dons  — Actes 2:1-4 ; 33-38 ; ch. 8 ; ch. 10 ; ch. 19

6.1      [Actes 2:1 à 4]

6.1.1             [L’Esprit Saint en forme de colombe ou de langues de feu]

6.1.2             [Des signes et des prodiges]

6.1.3             [Le don du Saint Esprit]

6.1.4             [Le Saint Esprit remplissant la maison]

6.2      [Manières variées par lesquelles le Saint Esprit est conféré]

6.2.1             [Actes 2:33-41 — Prédication de Pierre à la Pentecôte]

6.2.1.1     [Les signes extérieurs sont accessoires]

6.2.1.2     [Une vraie foi et une vraie repentance sont nécessaires]

6.2.1.3     [Le don du Saint Esprit subséquent à la foi]

6.2.1.4     [Ne pas confondre LE don et LES dons]

6.2.2             [Actes 8 — En Samarie]

6.2.2.1     [La rivalité Jérusalem – Samarie]

6.2.2.2     [Distinction entre la conversion et le don du Saint Esprit]

6.2.2.3     [Le don du Saint Esprit différé pour assurer la communion avec Jérusalem]

6.2.3             [Actes 10 — Corneille]

6.2.3.1     [Une âme régénérée]

6.2.3.2     [La Parole annoncée à Corneille personnellement]

6.2.3.3     [Le Saint Esprit tombe sans préalable]

6.2.3.4     [Des intermédiaires ne sont pas nécessaires pour le don du Saint Esprit]

6.2.3.5     [Différentes sortes de travail dans les âmes — Nécessité d’une pleine paix, l’affranchissement — Intervalle avant la réception du Saint Esprit]

6.2.3.6     [Dieu achève le travail commencé]

6.2.3.7     [Baptême par des frères sans particularité]

6.2.4             [Actes 19 — Croyants d’Éphèse]

6.2.4.1     [Le don du Saint Esprit n’était pas connu]

6.2.4.2     [La puissance est liée au Saint Esprit]

6.2.4.3     [Le don et les dons du Saint Esprit sont distingués]

6.3      [L’imposition des mains n’est pas nécessaire]

7     Méditation 7    Vous êtes dans l’Esprit et l’Esprit habite en vous    Romains 8:1 à 27

7.1      [La justice de Dieu — la justification par le sang]

7.1.1             [Importance de saisir ce qu’est cette justice]

7.1.2             [Le péché nécessite le jugement]

7.1.3             [Dieu appelle le pécheur]

7.1.4             [La loi fait sentir le péché]

7.1.5             [Christ a porté le jugement]

7.1.6             [Le chrétien fait justice de Dieu en Christ]

7.1.7             [Christ glorifié à cause de la justice de Dieu]

7.1.8             [La justice de Dieu permet à l’homme de se tenir devant Dieu]

7.1.9             [Le croyant doit être au clair quant à la justice de Dieu]

7.2      [Le péché et la délivrance]

7.2.1             [L’âme tourmentée par son péché, son état]

7.2.2             [La délivrance : la justification de vie]

7.2.3             [Vivant à Dieu en Christ ressuscité]

7.2.4             [Baptême pour la mort de Christ]

7.2.5             [La bénédiction en Christ n’est pas atteinte graduellement, ni par la loi]

7.2.6             [Encore le baptême — la mort à la chair et au monde — mort et ressuscité en Christ]

7.3      [Romains 7 — La loi de Dieu — le chrétien mort à la loi]

7.4      [Romains 8 — En Christ]

7.4.1             [La délivrance en Christ]

7.4.2             [La loi de l’Esprit de vie en Christ m’a affranchi]

7.4.3             [Les états de Romains 7 et 8 sont incompatibles]

7.5      [Est-ce encore réalisable ?]

7.6      [3 catégories d’hommes : spirituels, charnels, naturels]

7.7      [Les causes de retard spirituel]

7.7.1             [Erreurs diverses]

7.7.2             [L’attrait du monde]

7.7.3             [La loi — les bonnes résolutions qu’on ne tient pas]

7.8      [La position «dans l’Esprit» : l’Esprit habite dans le croyant]

8     Méditation 8    «Baptisés d’un seul Esprit pour être un seul Corps»    1 Corinthiens 12:13

8.1      [La préparation de Paul en vue de ses écrits]

8.2      [L’Église, corps de Christ, est la réponse glorieuse à l’abandon de Christ à la croix]

8.3      [La gloire de Christ racontée par le Saint Esprit qui forme un corps sur la terre]

8.4      [Il peut y avoir de la puissance malgré le désordre (perte de bénédictions)]

8.5      [Des choses qu’il faut reconnaître]

8.5.1             [D’abord reconnaître la seigneurerie de Christ]

8.5.2             [Reconnaître la diversité de dons, mais le même Esprit]

8.5.3             [Reconnaître la diversité de services, mais le même Seigneur]

8.5.4             [S’effacer pour que Dieu agisse selon Sa volonté]

8.5.5             [Reconnaître ce que l’Esprit a formé]

8.5.5.1     [Témoignage en un temps de ruine]

8.5.5.2     [Le nombre et l’ordre selon l’homme ne remplacent pas l’Esprit]

8.5.6             [Les dons de l’Esprit comme un signe pour le monde : reconnaître l’Esprit comme seul agent opérant]

8.6      [Juger l’état de l’Église selon la Parole de Dieu]

8.7      [Attitude devant ce qui est contraire à l’Écriture]

8.8      [1 Cor. 12:12-13 — Le baptême du Saint Esprit pour être un seul corps]

8.9      [Variété des membres du corps et des oeuvres de l’Esprit]

8.10      [Éphésiens 4 — L’Église liée avec la Tête dans le ciel]

8.11      [Les dons ne sont pas indépendants de l’Église (évangélisation)]

8.12      [Responsabilité de pratiquer ce qu’on a compris]

8.13      [Disparition de certains dons]

9     Méditation 9    «Une habitation de Dieu par l’Esprit»    Éphésiens 2:22

9.1      [Un enseignement spécifique sur l’Église]

9.2      [Apôtres et prophètes du Nouveau Testament]

9.3      [L’habitation de Dieu était connue]

9.3.1             [L’habitation de Dieu par l’Esprit était une chose nouvelle]

9.3.2             [Pas d’habitation de Dieu dans la Genèse]

9.3.3             [La Rédemption est nécessaire pour qu’il y ait une habitation de Dieu]

9.3.4             [La sainteté accompagne l’habitation de Dieu]

9.4      [Rédemption, sainteté et habitation de Dieu dans la Nouveau Testament]

9.4.1             [Éphésiens 2]

9.4.2             [1 Cor. 3 — La présence du Saint Esprit fait qu’il y a temple de Dieu]

9.4.3             [Présence de faux chrétiens]

9.5      [La maison de Dieu et la responsabilité de l’homme]

9.6      [Le chrétien face au mal dans l’Église]

9.6.1             [Se purifier]

9.6.2             [La Cène, le ministère, le culte]

9.6.3             [Pas de simples arrangements préférés]

9.6.4             [Pratiquer l’Église comme dans la Parole de Dieu]

9.6.5             [Des égards pour les faibles et ignorants ; pas d’indifférence pour le péché reconnu]

9.7      [La présence de Dieu dans l’Église]

9.7.1             [Cette présence comme encouragement et source de responsabilité]

9.7.2             [Pas d’infaillibilité]

9.7.3             [L’autorité est celle de Dieu]

9.7.4             [L’Église est à Dieu]

10     Méditation 10    L’Esprit dans l’Apocalypse et dans les Épîtres    Apocalypse 1:4, 5 ; 19:10

10.1      [Résumé sur le Saint Esprit dans les épîtres]

10.1.1             [Épître aux Romains]

10.1.2             [1° Épître aux Corinthiens]

10.1.3             [2° Épître aux Corinthiens]

10.1.4             [Épître aux Éphésiens ch. 1 v. 12-14]

10.1.5             [Épître aux Galates 3 et 4]

10.1.6             [Épître aux Romains : la mort, la chair, et moi]

10.1.7             [Épître aux Éphésiens, survol des ch. 1 à 6]

10.1.8             [Épître aux Philippiens et Colossiens]

10.1.9             [Épître aux Thessaloniciens]

10.1.10        [Épîtres à Timothée]

10.1.11        [Épître à Tite]

10.1.12        [Épître aux Hébreux]

10.1.13        [1° Épître de Pierre]

10.1.14        [2° Épître de Pierre et 1° Épître de Jean]

10.2      [Apocalypse]

10.2.1             [Apoc. 1:4 — Les 7 esprits de Dieu]

10.2.2             [L’Esprit parlant aux assemblées]

10.2.3             [À partir du ch. 4]

10.2.4             [Apoc. 22]

 

 

Note de l’éditeur du texte imprimé (2° Ed. 1969 ; Bibles et traités chrétiens, Vevey) : L’ouvrage de W. Kelly a paru en traduction intégrale dans l’Écho du Témoignage de 1868 à 1870, et elles furent réunies en 1871 en un volume. Le texte ci-joint est une forme révisée et quelque peu abrégée, sans que rien soit perdu, estime-t-on, de la pensée de l’auteur.

Notes Bibliquest :

1.                      les notes comportant l’indication (Réd) sont de l’éditeur du texte imprimé (Bibles et traités chrétiens, Vevey)

2.                      les sous-titres sont de Bibliquest

 

 

1                        Méditation 6    Le don de l’Esprit et les dons  — Actes 2:1-4 ; 33-38 ; ch. 8 ; ch. 10 ; ch. 19 

Nous sommes arrivés au moment où Dieu s’étant pleinement manifesté en Christ, Israël aurait dû reconnaître le Messie comme Emmanuel, c’est-à-dire Dieu avec nous. Et la foi aurait dû voir en Christ mort et ressuscité, comment Dieu est pour nous. Mais Dieu allait maintenant prendre un nouveau caractère, et faire un pas immense en avant : il voulait être Dieu en nous. Ceci ne pouvait avoir lieu sans l’effusion du précieux sang de Jésus. Et le Saint Esprit ne pouvait demeurer que là où avait eu lieu l’aspersion de ce sang. Selon la parole du Seigneur, les disciples s’assemblent jusqu’à ce que, comme il le leur avait annoncé, ils soient «baptisés de L’Esprit Saint, dans peu de jours» (1:5).

1.1   [Actes 2:1 à 4]

«Et comme le jour de la Pentecôte s’accomplissait, ils étaient tous ensemble dans un même lieu». Dieu introduit ce fait nouveau d’une manière appropriée à sa sagesse, par un signe extérieur. Soudain il se fit un son d’en haut, le Saint Esprit descendant du ciel, «un son, comme d’un souffle violent et impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. Et il leur apparut des langues divisées, comme de feu ; et elles se posèrent sur chacun d’eux. Et ils furent tous remplis de l’Esprit Saint, et commencèrent à parler d’autres langues, selon que l’Esprit leur donnait de s’énoncer» (Actes 2:1-4). Il est vrai que le Saint Esprit était déjà descendu auparavant, mais pour demeurer dans un seul homme — l’homme Christ Jésus. Dans le cas de Jésus, il n’était besoin d’aucune oeuvre préparatoire, mais la manière, aussi bien que la forme sous laquelle l’Esprit descendit sur le Seigneur Jésus attestaient l’immense différence qui existe entre Lui, en qui il n’y avait point de péché, et nous qui avions besoin d’être délivrés à la fois de nos péchés et du péché. Or cette oeuvre souveraine de la grâce de Dieu a été accomplie par le moyen des souffrances et de la puissance en résurrection de Celui qui, n’ayant point de péché, subit et la mort et le jugement.

1.1.1        [L’Esprit Saint en forme de colombe ou de langues de feu]

Pour Jésus, le Saint Esprit apparut sous la forme d’une colombe — belle expression de la manière dont l’Esprit s’adaptait à cet homme sur lequel il pouvait venir et demeurer sans qu’il y ait effusion de sang. Le Saint Esprit pouvait adopter cet emblème bien connu de la pureté, en descendant ainsi pour habiter dans le Fils de l’homme. Mais dans le cas de l’homme, c’est-à-dire de ces croyants assemblés à Jérusalem, il descend sous la forme de langues divisées, parce que Dieu allait maintenant se rendre à lui-même un vaste et puissant témoignage ; la bonne nouvelle allait être propagée. En outre ces langues étaient «comme de feu». Le jugement du péché avait eu lieu à la croix. L’état de l’homme avait rendu le jugement nécessaire et en fait, avait été déjà jugé par Dieu en Christ, parfait sacrifice pour le péché. La langue «comme de feu» en constituait le rappel nécessaire, quel que puisse être le déploiement de la puissance du Saint Esprit, et elle rendait témoignage à la grâce divine.

Dans ces langues diverses qui depuis Babel divisaient les hommes condamnés par le juste déplaisir de Dieu, sa miséricorde allait maintenant s’étendre jusqu’à eux. Les «choses magnifiques de Dieu» devaient ainsi être proclamées à toute nation sous le ciel. Ce fait attire l’attention générale ; toutes sortes de préjugés relatifs à ce phénomène étrange et inconnu remplissent les esprits des assistants. Mais Pierre explique comment cet événement répond à la prophétie. Il n’affirme pas que c’est l’accomplissement de la déclaration de Joël ; car cet accomplissement dans un sens plein et entier n’aura lieu que dans un jour à venir. Néanmoins ce qui se passait, loin d’être équivoque et douteux, devait être reconnu comme venant de Dieu. C’était ce qui a été dit par le prophète Joël : «Et il arrivera aux derniers jours, dit Dieu, que je répandrai de mon Esprit sur toute chair». Il ne s’agissait que du principe de la prophétie ; car, en fait, bien qu’il y ait eu diverses langues parlées, et que cette multitude soit venue de toutes les nations, il ne s’agissait pourtant que de Juifs. Toutefois le fait que des paroles étaient prononcées dans les langues des Gentils (encore que les personnes qui écoutaient aient été juives) annonçait pour tout esprit intelligent ce que Dieu allait produire en temps opportun.

Gardons-nous de limiter l’oeuvre de Dieu à tel ou tel de ses aspects. Le déploiement de la puissance de l’Esprit manifestée en ce jour-là avait une signification variée. C’était d’abord l’accomplissement de la promesse du Père, la grande et infinie vérité de la descente du ciel du Saint Esprit lui-même. C’était aussi l’accomplissement de l’assurance spéciale que le Seigneur avait donnée à ses disciples, qu’il les baptiserait du Saint Esprit, ce qui aurait pour effet la formation «d’un seul corps». Ils pouvaient ne pas connaître, et effectivement ils ne connaissaient pas encore, ce qu’impliquait cette doctrine du «seul corps», jusque-là complètement cachée. Elle attendait un autre ministère et un serviteur de Dieu approprié, Paul, qui se désignera lui-même comme «né hors de temps». De fait cette doctrine ne fut révélée, selon la sagesse de Dieu, qu’après la réjection, par les Juifs, du témoignage de sa grâce (chap. 7). Alors seulement les Gentils sont effectivement appelés (chap. 8), et le «seul corps» formé de Juifs et de Gentils, uni par le Saint Esprit descendu du ciel, peut être manifesté d’une manière conforme aux voies de Dieu. Mais déjà, ce qui était la puissance de ce corps, la Personne qui seule était à même de le former, était de fait donnée alors en ce jour de la Pentecôte.

1.1.2        [Des signes et des prodiges]

Il fallait aussi, conformément à la parole prophétique, que soient opérés des signes et des prodiges. Et enfin des dons variés allaient être communiqués de la part du Seigneur, pour son oeuvre ici-bas : «Étant monté en haut, il a... donné des dons aux hommes... les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs» (Éph. 4:8, 11). Ceci a évidemment eu lieu par le Saint Esprit ; c’était, selon 1 Corinthiens 12, «la manifestation de l’Esprit en vue de l’utilité».

1.1.3        [Le don du Saint Esprit]

Toutes ces opérations bien distinctes furent simultanément accomplies ce jour-là, en même temps que l’Esprit de Dieu était donné pour demeurer en chacun de ceux qui croyaient. Ainsi, nous avons ce qui était individuel et ce qui était collectif, ce qui était universel et ce qui était particulier, le tout accompli en ce jour de la Pentecôte, chaque manifestation toutefois devant être distinguée de l’autre. Certaines épîtres embrassent une partie, d’autres une partie différente de ce vaste sujet. Nous reviendrons plus loin sur chacune d’elles, mais ce sur quoi nous insistons particulièrement en ce moment, c’est la grande vérité du don du Saint Esprit, distincte d’une opération spéciale de sa puissance par le moyen d’hommes ayant reçu des dons particuliers.

Ces derniers dons diffèrent ; alors que l’Esprit est un seul et même don (Éph. 4:4), rien moins qu’une Personne divine, descendant ici-bas pour habiter en chaque chrétien et dans l’Église. Ce serait évidemment détruire la vérité que de voir en Lui des différences sinon des contradictions. Il peut y avoir variété dans les formes et les mesures sous lesquelles sa puissance se déploie ; il peut y avoir, et il y a en fait, différents degrés dans la jouissance de sa présence. Mais un fait demeure : il habite également en tout croyant qui se repose sur la rédemption accomplie dans le Christ Jésus. Et que peut-il y avoir de plus glorieux ?

1.1.4        [Le Saint Esprit remplissant la maison]

Ce n’est pas tout ! L’Esprit demeure non seulement en nous, mais avec nous. Tandis que les langues se posent sur chacun des disciples, simultanément un vent impétueux remplit toute la maison. La présence de l’Esprit de Dieu est attestée par un double signe : ce qui demeure sur chaque personne et ce qui, d’une manière générale, remplit la maison où ils sont assis. Cette double vérité de la présence de l’Esprit avec et dans les croyants traverse tout le livre des Actes. Par exemple, au chapitre 4, quand le lieu où ils étaient fut ébranlé (v. 31), était-ce le fait que l’Esprit de Dieu habitait dans cette personne-ci, ou dans celle-là ? Évidemment non : le Saint Esprit était là et faisait sentir sa présence au milieu d’eux. Lors de la fraude d’Ananias et de Sapphira, qui pouvait dire que ceux-ci mentaient à un croyant plutôt qu’à un autre ? Pierre déclare que ce n’est «pas aux hommes, mais à Dieu», qu’ils ont menti, à Dieu présent dans l’Église, c’est-à-dire au Saint Esprit. Lui est Dieu descendu sur la terre et peut maintenant en justice, selon la plénitude de la grâce, demeurer en ceux qui non seulement étaient pécheurs par nature mais encore avaient le sentiment profond de ce qu’était le mal hérité d’Adam.

Eh bien, malgré ce qu’ils avaient été et malgré ce qu’ils ressentaient, la grâce de Dieu dans le don de Jésus était si bénie, le caractère de son amour dans la mort et la résurrection du Seigneur était si riche, que le Saint Esprit pouvait en justice, et pour la gloire du Père et du Fils, descendre et demeurer en eux sur la terre. Et celui qui demeurait réellement dans chaque croyant était avec eux Iorsqu’ils se réunissaient ou qu’ils travaillaient à l’oeuvre. Ainsi par exemple, au chapitre 8, l’Esprit dit à Philippe : «Joins-toi à ce char». Un ange du Seigneur lui avait préalablement enseigné la direction qu’il devait prendre. Pourtant ce ne fut pas l’ange mais l’Esprit qui lui parla quand il fut question de s’adresser directement à une âme. L’ange était simplement l’expression de la providence de Dieu sur son chemin. Il en est encore ainsi aujourd’hui. Nous ne voyons pas les anges et pouvons ne pas avoir conscience de leur action, mais elle n’en est pas moins aussi réelle que jadis. Et pareillement à l’égard de l’Esprit de Dieu. Nous pouvons ne pas entendre sa voix comme Philippe l’entendit ce jour-là, mais le fait n’en est pas moins certain. L’Esprit est à l’oeuvre. Sans doute, il attend que l’état des coeurs soit approprié, bien que ce soit un état que lui seul puisse produire ; mais il est aussi actif maintenant que jamais.

Un peu plus loin encore l’Esprit ordonne : «Mettez-moi maintenant à part Barnabas et Saul, pour l’oeuvre à laquelle je les ai appelés» (Actes 13:2). Il est donc évident que l’Esprit de Dieu n’agit pas seulement au-dedans, car il ne nous est pas dit que c’est en Paul ou en Barnabas qu’il agissait ; il ressort au contraire de l’ensemble du passage que cette action était extérieure. L’Esprit parlait à leur sujet, plutôt qu’à eux et plutôt encore qu’il n’opérait en eux. Sans doute le Saint Esprit était-il déjà réellement en eux, mais il se fait entendre ici Lui-même, sans mention d’un intermédiaire humain, comme une personne divine descendue ici-bas pour y manifester la grâce et la gloire du Seigneur. Et l’on retrouverait aisément ces mêmes principes à travers tout le livre des Actes. C’est ainsi que dans une autre occasion, l’Esprit de Jésus enseigne à Paul où il doit aller (chap. 16). Il n’est pas nécessaire de multiplier les exemples.

1.2   [Manières variées par lesquelles le Saint Esprit est conféré]

Mais il est un autre point d’une immense importance, qui a souvent causé à certains une grande perplexité : c’est la différence dans la manière dont est donné le Saint Esprit. L’incrédulité se prévaut des modes variés dans lesquels l’Esprit de Dieu est conféré, pour nier que l’on puisse recevoir le Saint Esprit aujourd’hui comme autrefois, ou au contraire pour préconiser quelque panacée de charlatanerie religieuse par le moyen de laquelle on pourrait infailliblement attendre le Saint Esprit.

C’est pourquoi je passerai en revue les grandes occasions que l’Esprit de Dieu rapporte pour notre instruction, espérant montrer clairement qu’il n’y a rien d’arbitraire dans la manière dont le Saint Esprit était conféré, rien non plus qui donne à l’homme comme tel la moindre importance. Au contraire, la sagesse de Dieu s’y montre pour consoler, affermir l’âme, et augmenter en nous le sentiment de sa grâce. Combien il est évident, ici encore, que la simplicité dans les choses de Dieu est le secret réel pour les comprendre ! Car la simplicité n’est pas occupée de nos affaires propres, ni surchargée par les pensées des autres ; elle a confiance en Dieu et sait qu’il a toujours devant lui son grand objet : celui de glorifier Christ, par qui le Père a été glorifié.

1.2.1        [Actes 2:33-41 — Prédication de Pierre à la Pentecôte]

1.2.1.1                 [Les signes extérieurs sont accessoires]

Dans la première occasion, c’est-à-dire au jour de la Pentecôte, nous avons bien la plus ample et, dans un certain sens, la plus riche forme sous laquelle le Saint Esprit a été donné d’en haut. La plus haute des autorités nous déclare que Jésus «ayant été exalté par la droite de Dieu, et ayant reçu de la part du Père l’Esprit Saint promis, il a répandu ce que vous voyez et entendez». Des témoignages palpables et irrécusables de l’accomplissement de la promesse du Père étaient là. Le Saint Esprit en lui-même n’était pas perceptible par les sens. Seule était discernable la puissance extérieure qui l’accompagnait. Il est très important de faire cette distinction, sans laquelle les hommes sont en danger, en l’absence de signes extérieurs, de nier ou de mépriser cet incomparable don qui est toujours au-dessus de ses effets. Quelle que soit l’importance des signes, ils n’étaient pour l’homme que les garants accompagnant le don et la présence invisibles du Saint Esprit désormais présent sur la terre.

1.2.1.2                 [Une vraie foi et une vraie repentance sont nécessaires]

La réponse de Pierre à ses auditeurs de Jérusalem jette une lumière considérable sur ce point. Ouvertement accusés par l’apôtre d’avoir rejeté et crucifié leur propre Messie que Dieu avait exalté à sa droite, ces Juifs étaient angoissés au sujet de leur état. Pierre leur dicte ce qu’ils ont à faire : «Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus Christ, en rémission des péchés ; et vous recevrez le don du Saint Esprit». Pesons bien ces paroles. Pierre ne les invite pas positivement à croire. Inutile de dire que c’est dans sa sagesse que Dieu les appelle à se repentir plutôt qu’à croire. Nous voyons l’inverse dans une autre occasion : lorsque Paul et Silas invitèrent le geôlier de Philippes à croire plutôt qu’à se repentir.

Une telle différence a sa raison d’être, et ne doit être pour personne une cause de perplexité. Dieu a écrit ainsi, et Il mérite toujours toute confiance. Sans la foi, nous le savons, il ne peut y avoir de vraie repentance envers Dieu. Il peut y avoir contrefaçon dans la foi, comme il peut y avoir aussi contrefaçon dans la repentance ; mais où la puissance de Dieu produit la vraie repentance, il y a nécessairement la vraie foi et réciproquement.

Cependant, chacun le sait par expérience et la Parole de Dieu, qui est la clef de toute connaissance, le montre, il existe des différences dans la forme du sentiment et de l’expression de l’âme devant Dieu. En l’un prédomine une profonde oeuvre morale dans la conscience ; dans un autre c’est la joie et la paix en croyant qui sont les plus apparentes. Néanmoins il ne peut y avoir d’oeuvre réelle de quelque valeur spirituelle dans la conscience sans la foi, et il ne peut y avoir la foi selon Dieu sans une oeuvre vraie de l’Esprit dans la conscience. Pierre à Jérusalem exhorte les Juifs à se repentir et Paul de son côté déclare aux Athéniens que «Dieu... ordonne maintenant aux hommes que tous, en tous lieux, ils se repentent» (Actes 17:30). En d’autres occasions, tant Juifs que Gentils étaient invités et pressés de croire. La vérité est que les uns et les autres se repentaient et que les uns et les autres croyaient ; mais il se rattache une signification importante au fait qu’il est insisté sur l’une plutôt que sur l’autre de ces choses.

Selon la sagesse de Dieu, ce qui convenait dans l’occasion qui nous occupe, c’était l’humiliation de ces Juifs orgueilleux. Aussi est-ce la repentance, c’est-à-dire ce qui brise la chair et traite l’homme comme ne valant rien, qui est mise en avant. «Repentez-vous», enjoint l’apôtre, «et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus Christ» — au nom de Celui-là même que vous avez crucifié et rejeté. En lui est la seule source de bénédiction. Il est l’unique espérance pour vos âmes. — Ils furent effectivement brisés et amenés à recevoir la Parole. Ce n’était pas encore le jour de la puissance de Dieu selon le Psaume 110, mais c’était le jour de sa grâce. Celle-ci avait touché leurs coeurs et leur faisait accepter la sentence de Dieu contre eux-mêmes. Ils pouvaient alors croire du mal d’eux-mêmes et c’est la dernière chose que l’homme consente à croire. Ils étaient réellement amenés à ce point d’être prêts à se reconnaître méchants dans la présence de Dieu. C’est pourquoi Pierre s’applique à faire pénétrer ce sentiment dans leurs consciences.

Il ne prend pas pitié d’eux parce qu’ils étaient à juste titre saisis de componction, mais insiste au contraire sur la nécessité d’être entièrement humiliés devant Dieu. Pierre pouvait le faire d’autant plus volontiers qu’il connaissait en Jésus une grâce prête à répondre à ces dispositions. Aussi ajoute-t-il : «Que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus Christ». Plus la grâce est proclamée, plus aussi nous pouvons inviter à une vraie repentance, et plus les âmes peuvent la supporter. Ne craignons pas d’y insister et ne nous contentons pas d’employer des termes vagues, en disant : «On doit se repentir si l’on croit». Ce n’est pas ainsi que Dieu soulève la question. Il amène les âmes à sentir leur état réel devant lui. C’est toujours une grande bénédiction pour tous, et d’ailleurs si ce n’est pas de bonne heure qu’une âme est travaillée à ce sujet, elle se réserve pour plus tard des exercices humiliants et pénibles. Car si nous n’apprenons pas ce que nous sommes au début de notre carrière, si nous n’avons pas alors un profond sentiment de notre péché ainsi qu’il convient à un nouveau converti, peut-être faudra-t-il que nous l’apprenions par quelque grande chute, par un péché manifeste. Un éloignement flagrant de Dieu sera peut-être nécessaire, suivi d’un retour pénible, après avoir erré d’autant plus loin de lui que nous aurons eu trop peu le sentiment du péché au commencement de notre profession chrétienne. Qu’elles sont nombreuses les âmes qui ont passé par là ! Ajoutons que les plus exposés sont ceux qui ont grandi dans la connaissance de la grâce — enfants de parents chrétiens — lorsque devant Dieu, leur conscience n’a pas été sondée en proportion.

1.2.1.3                 [Le don du Saint Esprit subséquent à la foi]

Remarquons que, lorsque l’apôtre exhorte les Juifs à se repentir et à être baptisés au nom de Jésus Christ pour la rémission des péchés, il conclut : «et vous recevrez le don du Saint Esprit». Assurément, s’ils se repentaient, ce ne pouvait pas être sans l’opération du Saint Esprit. L’exhortation de l’apôtre aurait été sans objet pour ceux qui l’entendaient, s’ils n’avaient pas cru au nom du Seigneur Jésus ; et qui leur donnait cette foi avec la repentance, si ce n’est le Saint Esprit ? Il s’ensuit que la réception de l’Esprit telle que Pierre la présente ensuite, est une chose entièrement différente de l’acte d’amener des hommes à croire et à se repentir. C’est une opération ultérieure (*), une bénédiction distincte et corollaire, un privilège fondé sur la foi déjà agissante dans le coeur. Il est si peu vrai qu’un homme reçoit «le don du Saint Esprit» au moment même où il croit, qu’il est permis de douter qu’un cas semblable se soit jamais présenté. Non seulement nous n’en trouvons aucun exemple dans la Parole, mais il semble bien que celle-ci en exclut la possibilité. La raison en est bien simple : le don du Saint Esprit est fondé sur le fait que nous sommes fils par la foi en Christ, croyants se reposant sur la rédemption en Lui : ce don suppose donc clairement que l’Esprit de Dieu, opérant en nous, nous a déjà régénérés. Ainsi le don du Saint Esprit n’est pas fait en vue de la repentance, ni dans le but de faire recevoir Christ par la foi. Nous voyons ici l’inverse : après que les âmes se sont repenties et ont été baptisées au nom de Jésus pour la rémission des péchés, elles reçoivent le don du Saint Esprit comme privilège subséquent.

(*) L’intervalle entre ces deux opérations peut différer beaucoup selon le cas. Il peut être réduit au point que la seconde apparaisse comme quelque chose d’immédiat, quoique distinct. L’auteur revient sur ce sujet dans la méditation n° 10. Voir aussi point 6.3.3.5 (Réd.).

1.2.1.4                 [Ne pas confondre LE don et LES dons]

Un autre point ne doit jamais être perdu de vue : c’est que le don du Saint Esprit ne signifie jamais les dons. Beaucoup confondent le don avec les dons, mais la Parole de Dieu fait toujours la distinction, employant même dans l’original un mot différent pour les désigner. Les deux choses sont invariablement séparées. Quelqu’un peut recevoir par l’Esprit la puissance nécessaire pour porter l’Évangile au monde, ou pour être pasteur ou docteur dans l’ÉgIise. Cependant, le don du Saint Esprit est un privilège totalement différent, à savoir cette bénédiction commune que nous voyons ici conférée à toute âme qui se repentait et était baptisée.

L’appel de Pierre à ces Juifs est immédiatement suivi de la réception de la Parole, après quoi «ils sont baptisés» au nom du Messie qu’ils avaient autrefois méprisé. «Et en ce jour-là furent ajoutées environ trois mille âmes». Ces nouveaux croyants, la dernière partie de ce chapitre nous les montre remplis de grâce et de puissance de la part de Dieu.

1.2.2        [Actes 8 — En Samarie]

L’occasion suivante (chap. 8) présente un état de choses entièrement différent. Étienne avait rendu son témoignage, et les Juifs l’avaient absolument et définitivement rejeté. Comme leurs pères, ils résistaient au Saint Esprit, en résistant à Étienne qui en était rempli. Celui-ci scella de son sang son témoignage ; et la persécution dont il fut la première victime dispersa toute l’Assemblée qui était à Jérusalem, à l’exception des apôtres. Ceux-là mêmes que le Seigneur avait appelés pour aller dans le monde entier furent exceptés de cette dispersion. Tellement l’homme, même dans le meilleur état, est lent à entrer dans les conseils de la grâce de Dieu et à travailler à leur accomplissement !

1.2.2.1                 [La rivalité Jérusalem – Samarie]

Mais Dieu lui-même voulait les accomplir, dût-il se servir pour cela de circonstances pénibles. Si l’amour, si la puissance de la grâce, si le sentiment du besoin des âmes et de la gloire de Christ, ne réveillaient pas ceux qui avaient reçu ce commandement, Dieu aurait soin que des vases plus faibles, mais pourtant remplis des puissantes nouvelles de sa grâce, répandent en tous lieux la bonne odeur de Christ. Et ainsi ils allèrent «çà et là, annonçant la parole». Philippe, qui au chapitre 6 avait été choisi pour le service journalier, maintenant que ce service se trouve brusquement interrompu, acquiert «un bon degré» et s’en va prêchant l’Évangile. Il visite l’ancienne rivale de Jérusalem, la ville de Samarie. Les Juifs n’avaient pas de relations avec les Samaritains. Ils n’avaient pas su gagner leur confiance, ni leur faire accepter la vérité telle qu’ils la connaissaient, c’est-à-dire telle qu’elle était renfermée dans la loi commise à leur charge. Mais l’Évangile va maintenant démontrer sa puissance là où la loi a été infructueuse. Philippe annonce Jésus avec tant de force et de simplicité, et il est si béni dans sa prédication, que la ville entière est dans une grande joie. Même le plus méchant d’entre ceux qui sont là, homme depuis longtemps versé dans la connaissance des voies et des ruses du diable, est impressionné par la sainte influence de la vérité, sans que, toutefois, elle pénètre dans sa conscience ni gouverne son coeur. Néanmoins, le courant est trop fort pour qu’il puisse y résister. Simon le magicien s’incline devant la vérité de l’Évangile, intellectuellement du moins, et il est baptisé avec les autres.

1.2.2.2                 [Distinction entre la conversion et le don du Saint Esprit]

Mais là, prenons-en bien note, le don de l’Esprit Saint n’est encore fait à personne. Et voilà qui souligne la différence entre le don de l’Esprit et l’oeuvre par laquelle Il amène une âme à se repentir et à croire à l’Évangile. On ne peut douter que la masse des Samaritains convertis n’ait été composée de vrais croyants, lors même que Simon ne l’était pas. Pourtant l’Esprit Saint n’était «encore tombé sur aucun d’eux». Ce n’est pas seulement qu’ils n’avaient pas encore parlé d’autres langues, ou qu’il n’y avait pas encore eu de prodiges accomplis, sauf par l’évangéliste lui-même (versets 6, 7, 13). La descente du Saint Esprit est une chose totalement différente, bien qu’elle puisse être accompagnée de ces manifestations extérieures de sa puissance. Confondre ces deux choses, c’est porter le plus grand coup à la vérité capitale de la présence de l’Esprit Saint. Car alors l’absence de manifestations extérieures (ce qui est le cas aujourd’hui) signifierait que le Saint Esprit n’est pas présent non plus dans l’Église. Il est donc évident qu’on va loin dans l’incrédulité si l’on ne distingue pas entre les signes et témoignages fournis par l’Esprit et l’Esprit Lui-même. Je répète que ce n’est pas seulement le pouvoir de faire des miracles qu’ils n’avaient pas reçu, mais que l’Esprit Saint n’était pas encore venu sur eux. Cela, l’Écriture l’affirme, et c’est ainsi que nous lisons : «Les apôtres qui étaient à Jérusalem, ayant appris que la Samarie avait reçu la parole de Dieu, leur envoyèrent Pierre et Jean, qui, étant descendus, prièrent pour eux, pour qu’ils reçussent l’Esprit Saint : car il n’était encore tombé sur aucun d’eux, mais seulement ils avaient été baptisés pour le nom du Seigneur Jésus».

1.2.2.3                 [Le don du Saint Esprit différé pour assurer la communion avec Jérusalem]

Nous rencontrons tout de suite une notable différence par rapport à la Pentecôte. À Jérusalem, quand les Juifs se repentirent et furent baptisés au nom du Seigneur Jésus, l’Esprit Saint vint sur eux sans délai. À Samarie au contraire, il n’était tombé sur personne, bien qu’ils aient cru et aient été baptisés. D’où vient cela ? D’une raison bien digne de Dieu. La nature humaine est telle que si le Saint Esprit était descendu sur ces croyants de Samarie à la prédication de Philippe, l’ancienne rivalité de la Samarie aurait subsisté. La Samarie n’aurait pas manqué de lever de nouveau la tête, et la grâce même de l’Évangile aurait servi d’appui à ses prétentions religieuses. Placées d’emblée sur un pied d’égalité devant cette nouvelle et extraordinaire bénédiction de l’Évangile, Jérusalem et «cette montagne-ci» auraient continué à se faire concurrence. Et l’effet que Dieu avait l’intention de produire par la présence de l’Esprit Saint aurait été manqué, à savoir la manifestation de l’unité dans l’amour, le maintien à la fois d’une seule tête et d’une seule énergie — une tête en haut et une puissance en bas opérant dans le corps comme réponse à la gloire de Christ. Dieu rendit cette rivalité impossible et prit soin que rien ne puisse justifier l’esprit d’indépendance, qui est le plus grand principe destructeur de la vérité de l’Église de Dieu sur la terre.

C’est pourquoi, lorsque l’assemblée de Jérusalem entendit cela (ou tout au moins les apôtres, car l’assemblée était maintenant dispersée), ils envoyèrent Pierre et Jean, deux des principaux, appelés aussi des colonnes (Gal. 2:9). Ceux-ci prièrent ; mais Dieu en outre montre clairement pour quelle raison il avait différé le don de l’Esprit Saint. L’imposition des mains des apôtres devait avoir lieu pour exprimer à la fois la bénédiction que Dieu communiquait par les apôtres et l’identification de l’oeuvre en Samarie avec celle de Jérusalem. Elle attestait devant le monde entier que Dieu ne souffrirait dans son Église rien qui ressemble à une rivalité, que ceux qui étaient à la tête de l’oeuvre dans un endroit n’étaient pas moins indispensables dans l’autre.

Ainsi donc chaque différence dans la manière de communiquer la même bénédiction témoigne de la sagesse et des soins que Dieu déploie envers nos âmes. Oui, la moindre de ces différences que nous offre la Parole contribue à prouver combien Dieu nous aime, combien le Seigneur prend soin de l’Église, et comment, même dans la manière dont il communique cette suprême bénédiction de l’Esprit, il veut nous armer contre notre propre nature.

1.2.3        [Actes 10 — Corneille]

La circonstance suivante (Actes 10) se présente encore autrement. Corneille, le centurion Gentil, pendant qu’il prie et jeûne à Césarée, reçoit un visiteur angélique qui lui ordonne d’envoyer chercher Simon Pierre. Ce dernier se trouve à Joppé, où, pendant qu’approchent les serviteurs de Corneille, il lui survient une triple vision concernant cette grande affaire. Pierre, encouragé par l’Esprit, se met à la disposition des messagers de Corneille et les accompagne à Césarée. Dès qu’il ouvre la bouche, c’est pour appeler leur attention sur ce qui avait pour lui une extrême importance ; car, au commencement, c’était bien à contre-coeur qu’il était venu. N’avait-il pas osé contester avec le Seigneur qui lui commandait de tuer et de manger du contenu de la grande toile ? Il n’avait, disait-il, jamais mangé ce qui est impur ou immonde. Mais par trois fois, il entend cette parole de blâme : «ce que Dieu a purifié, toi, ne le tiens pas pour impur» ; et finalement il fait son profit de la leçon. «En vérité, je comprends que Dieu ne fait pas acception de personnes, mais qu’en toute nation celui qui le craint et qui pratique la justice, lui est agréable».

1.2.3.1                 [Une âme régénérée]

Ainsi donc, il est évident que le premier appel aux Gentils n’est pas adressé à un païen idolâtre. Pierre ne parle, dans le cas présent, que d’un homme qui déjà craignait Dieu et pratiquait la justice. Tel était le cas de Corneille. Ce n’était pas une âme inconvertie, mais une âme qui craignait Dieu. Il abondait en prières et en aumônes. Il est certain que ce ne sont pas les prières et les aumônes de la propre justice qui auraient pu le recommander à Dieu. Semblables choses, lorsqu’elles sont présentées à titre de propitiation pour l’âme devant Dieu, appartiennent, nous le savons, aux ressources sacrilèges de l’incrédulité. Mais Corneille craignait Dieu en réalité et non pas seulement par profession extérieure. Il était régénéré, et Dieu avait signalé son état et la connaissance qu’il avait de sa justice dans le message dont l’ange était chargé — message qui me paraît parfaitement impossible d’interpréter comme signifiant que Corneille n’avait que la profession extérieure de la connaissance du vrai Dieu. Son état était celui que le Seigneur avait produit et qu’Il pouvait par conséquent reconnaître comme Lui étant agréable. Et de la part du Seigneur, c’était sagesse et grâce qu’en allant vers les Gentils, il commence par une âme dont aucun Juif ne pouvait nier la piété.

C’était bien, à n’en pas douter, la même miséricorde infinie qui sauvait les perdus et, parmi eux, le premier des pécheurs. Toutefois ici, il ne s’agissait pas de réveiller pour la première fois une âme morte dans ses péchés, mais plutôt d’asseoir une âme déjà réveillée sur un terrain connu de relation avec Dieu et de parfaite liberté, de telle sorte que nul de ceux qui craignaient Dieu et sa Parole ne puisse contester son titre. En d’autres occasions nous voyons la conversion et l’affranchissement se produire à peu près simultanément ; mais il n’en est pas ainsi de Corneille, qui, au moment choisi de Dieu, reçoit avec toute sa maison la parole de Pierre.

1.2.3.2                 [La Parole annoncée à Corneille personnellement]

Ce n’était pas la première fois, remarquons-le, qu’ils entendaient cette parole : «Vous connaissez», leur dit Pierre, «la parole que Dieu a envoyée aux fils d’Israël... ce qui a été annoncé par toute la Judée». Il est donc clair que ce centurion, non seulement craignait et priait Dieu auparavant, mais qu’il avait connaissance de ce qui avait été prêché par toute la Judée. Comment se faisait-il que cela n’ait pas été appliqué à sa propre âme et accepté réellement par lui ? Simplement parce que Corneille craignait Dieu et tremblait à sa parole, sentiment qui était juste à sa place. Cette révérence envers Dieu pouvait le rendre lent à saisir ses voies. «Si Dieu a envoyé sa Parole à Israël, pouvait-il se dire, je sais qu’elle est certaine pour lui ; et heureux le peuple qui a un tel Dieu ! Mais moi, je ne possède aucun droit». Aussi attendait-il que la parole lui soit envoyée à lui-même. L’Évangile, proclamation de la parole de la grâce de Dieu à toute créature, était alors une chose nouvelle. Corneille avait connaissance, sans doute, des anciennes Écritures. Il ne mettait pas en question les promesses, non plus que leur accomplissement en faveur d’Israël par Christ et en Christ.

1.2.3.3                 [Le Saint Esprit tombe sans préalable]

Mais maintenant la parole lui était envoyée à lui, Corneille, un Gentil, par le moyen de Pierre. «Comme Pierre prononçait encore ces mots» (plus particulièrement, je suppose : «tous les prophètes lui rendent témoignage, que, par son nom, quiconque croit», etc.), cette vérité fut empreinte sur son âme. C’était un témoignage direct, et qui, selon tous les prophètes, ouvrait la porte à n’importe qui : «Quiconque croit en lui reçoit la rémission des péchés. Comme Pierre prononçait encore ces mots, l’Esprit Saint tomba sur tous ceux qui entendaient la parole». Quoi ! sans le baptême ? Sans l’imposition des mains ? Sans qu’on priât pour eux ? Oui, sans aucune condition préalable, sur-le-champ, pendant que la parole est prêchée par l’apôtre Pierre, le Saint Esprit leur est donné à tous.

Chacune de ces trois grandes expériences est donc introduite d’une manière différente, conforme au plan divin. À Jérusalem, les Juifs non seulement devaient croire à l’Évangile, mais encore être baptisés au nom de Jésus Christ, en rémission des péchés, avant de recevoir le don de l’Esprit Saint. En Samarie, il n’a pas suffi qu’ils soient baptisés d’eau ; il a fallu aussi la prière et l’imposition des mains des apôtres, à défaut de quoi le Saint Esprit ne serait descendu sur aucun d’eux. À Césarée, par contre, avant le baptême et sans imposition des mains de la part de l’apôtre, le Saint Esprit tombe sur eux tous. Le Dieu seul bon et seul sage, dans sa parfaite grâce, reconnaissait ces Gentils. Le moment était venu de révéler pleinement sa pensée, aussi la première manifestation de sa grâce envers eux eut lieu d’après ce riche et singulier procédé. Lors de la conversion des trois mille âmes, il avait fallu le brisement de coeur des Juifs qui s’étaient montrés endurcis et orgueilleux dans leur mépris pour Jésus de Nazareth. Il est nécessaire qu’ils ploient les genoux à ce nom-là ; bien plus, c’est en ce nom qu’il leur faut être baptisés ; de toute autre manière, ils n’auraient pu recevoir l’Esprit. À leur tour, les Samaritains reçoivent une leçon spéciale pour contrecarrer leur tendance à l’indépendance et pour établir le grand principe de l’Assemblée universelle (pas seulement d’assemblées), que Dieu formait sur la terre.

Mais dans la scène qui nous occupe, Dieu voulait encourager et gagner les Gentils que Pierre lui-même avait méprisés. En effet, il ne s’était pas conformé à l’ordre du Seigneur d’aller et de faire disciples toutes les nations. Les apôtres, s’il nous est permis de le remarquer, étaient tous lents à agir dans l’oeuvre du Seigneur ; ils étaient peu entrés dans sa puissante grâce qui surpassait tellement les pensées de ses propres enfants. Mais lorsque Pierre prêcha à Césarée, combien Dieu blâma — quoique dans une pleine miséricorde — la lenteur de son serviteur ! À peine les paroles tombèrent-elles de ses lèvres qu’il se manifesta une grâce telle que Jérusalem n’en avait pas vu et dont la Samarie n’avait pas été témoin. Selon la sagesse de Dieu, aucun délai ne s’écoule, aucune imposition des mains n’est exigée pour que la complète bénédiction divine soit communiquée.

Sans doute y avait-il dans les âmes de ces Gentils une oeuvre préalable de l’Esprit qui leur avait donné la repentance envers Dieu et la foi en Jésus. Cela est toujours nécessaire. Mais ils n’avaient à se soumettre à aucun acte extérieur préparatoire qui les aurait rendus dépendants des chrétiens d’origine juive. Le baptême se présentait ensuite comme un privilège (ce qu’il est réellement) qui ne pouvait pas leur être refusé. Pour le Juif, pour le Samaritain, Dieu posait certaines conditions propres à les humilier. Aux Gentils au contraire, il ne donne qu’un précieux encouragement. En les attirant, il prend soin de fermer la bouche à tous les contradicteurs. Jusque dans la manière dont il fait le don, Dieu prouve qu’il déploie une grâce d’autant plus grande que ceux qui en sont les objets sont plus éloignés. Il n’y a jamais eu de miséricorde plus riche que celle qui a cherché et trouvé les pauvres Gentils.

La présence de Pierre à Césarée, lui qui était incontestablement placé au premier rang et qui avait imposé les mains aux Samaritains, confirme que si Dieu avait voulu l’utiliser ici de la même manière, il l’aurait fait. À tous, l’apôtre annonce les étonnantes nouvelles, mais c’est là tout ce qu’il est appelé à faire. Aucune action préparatoire de l’homme telle que l’imposition des mains ou le baptême n’a lieu avant que le Saint Esprit soit donné, bien que Pierre fût là et pour baptiser et pour imposer les mains si l’intervention d’un apôtre avait été nécessaire. En vérité l’homme disparaît devant le déploiement de la grâce divine, et combien c’est heureux que nous ayons là notre bénédiction et notre place devant Dieu !

1.2.3.4                 [Des intermédiaires ne sont pas nécessaires pour le don du Saint Esprit]

Nous y trouvons de quoi répondre à ceux qui insistent sur la nécessité d’avoir aujourd’hui des apôtres. L’incrédulité méprisa les apôtres lorsqu’ils étaient ici-bas ; l’incrédulité prétend maintenant que leur présence est indispensable comme unique canal de la communication de l’Esprit, alors que ce canal n’existe plus aujourd’hui. Comment donc, nous qui ne sommes ni Juifs ni Samaritains, recevons-nous le Saint Esprit ? De la même manière que Corneille, sans aucun intermédiaire humain. On peut dire que ceux qui dans la chrétienté se prévalent de tels intermédiaires prennent en fait la position des Samaritains ou des Juifs. Au contraire, c’est à ceux qui se contentent de reconnaître qu’ils ne sont que des pécheurs d’entre les nations, que le Seigneur fait don de sa plus riche miséricorde. Puissent ceux qui s’attachent encore aux formes et aux ordonnances, à des instruments humains quels qu’ils soient, consentir à prendre leur véritable place, afin que, disposés à accepter leur néant, ils reçoivent la pleine bénédiction qui est selon le coeur de Dieu ! C’est ainsi que Dieu bénissait au commencement et c’est encore ainsi qu’il bénit aujourd’hui. D’après l’Écriture, ce sont les Gentils et non les Juifs qui reçoivent le Saint Esprit sur la simple prédication de la Parole ! Et n’est-ce pas par le même moyen, c’est-à-dire par la Parole de la grâce de Dieu, qu’il est encore aujourd’hui communiqué ?

1.2.3.5                 [Différentes sortes de travail dans les âmes — Nécessité d’une pleine paix, l’affranchissement — Intervalle avant la réception du Saint Esprit]

Dans certains cas, sans doute, il peut se passer quelque délai. Vous pouvez trouver des âmes réellement touchées par l’Esprit de Dieu — je ne veux pas dire touchées seulement d’une émotion sentimentale et passagère, mais travaillées par une oeuvre réelle de grâce dans le coeur et la conscience — tout en n’ayant pas la paix et en n’étant pas établies dans le repos et l’affranchissement dans le Sauveur. Ce cas n’est pas rare, aussi gardons-nous de mettre en doute la réalité de l’oeuvre de Dieu dans une âme sous prétexte que cette âme n’entre pas encore dans la simple et pleine conscience de tout ce que Christ a fait pour elle. Il peut nous arriver de faire du mal à un jeune converti en exigeant trop tôt la pleine expérience chrétienne et en ne reconnaissant pas suffisamment l’oeuvre de Dieu en lui.

Mais il existe un danger inverse. Ne soyons satisfaits de l’état spirituel de quelqu’un que quand il est établi dans l’affranchissement et qu’il a conscience d’une pleine délivrance devant Dieu. Se contenter d’une mesure moindre est une forme d’incrédulité et révèle un manque de connaissance de la Parole et de la grâce de Dieu. C’est sous-estimer la présence et l’opération de l’Esprit de Dieu dans l’âme. Il est bon d’appeler les choses par leur nom. On ne peut être que malheureux sous un sentiment de péché ou d’anxiété tant qu’on n’a pas saisi la grâce de Dieu qui y correspond.

Sans doute lorsque quelqu’un soupire après Jésus, quand même il ne possède pas la paix de la conscience et encore moins celle du coeur, nous devons appeler cela conversion et y reconnaître une oeuvre de la grâce de Dieu. Mais «s’installer» dans cet état, ou supposer qu’il suffise à un homme de se tourner du péché vers Dieu et de sentir son indignité en regardant à Jésus, est également une faute. C’est gravement méconnaître la plénitude de l’Évangile ; c’est pour ainsi dire s’accrocher à Jésus plutôt que de trouver en lui une paix positive. Efforçons-nous plutôt de persuader les âmes qu’elles possèdent en Jésus bien plus que ce qui touche le coeur et réveille la conscience. Une réelle conviction de péché et des désirs tournés vers Dieu ne constituent pas le véritable état chrétien. Je crois que nous manquons si nous n’insistons pas auprès de ceux qui se sont arrêtés là, pour le leur faire comprendre. Puisque la Parole nous apprend qu’une pleine paix est la portion des enfants de Dieu, devons-nous nous déclarer satisfaits tant qu’ils n’en jouissent pas ? Apprenons-leur plutôt à connaître la position glorieuse et bénie dans laquelle Dieu introduit les siens. Position dans laquelle toutes les craintes, tous les doutes s’évanouissent sous le sentiment de la grâce parfaite qui nous a rapprochés de Lui, sans qu’il reste devant Lui contre nous l’ombre d’un péché ou d’une incertitude.

Aussi longtemps qu’un croyant connaît le combat et le trouble intérieur, ses sentiments ne dépassent pas ceux des saints de l’Ancien Testament. La seule différence est que ceux-ci ne pouvaient aller au-delà. Le Libérateur n’était pas encore venu ; la délivrance n’avait pas encore été opérée. Le fondement béni sur lequel on reçoit la paix d’après le principe de la foi et par la grâce de Dieu n’avait pas encore été posé devant eux ; et les voies de Dieu ne peuvent être anticipées. Nous ne pouvons devancer Dieu, mais nous pouvons le suivre et considérer sa bonté comme par derrière (Ex. 33). Maintenant le salut est venu. Christ a passé ici-bas ; il est mort et ressuscité ; et cependant les âmes vivifiées ne saisissent pas toujours au même moment les puissants résultats qui découlent de ce grand fait. Il peut bien arriver qu’elles le fassent et je ne doute pas qu’il se présente encore des cas analogues à celui du geôlier de Philippes. À l’heure même où la conscience de cet homme fut atteinte, il se fit en lui et chez les siens une oeuvre complémentaire de Dieu, en vertu de laquelle il put se réjouir immédiatement avec toute sa maison. Quelque misérable qu’eût été cet homme l’instant d’avant, la grâce divine le rendit sur l’heure même pleinement heureux. Ainsi donc, nous sommes loin de nier que la même double opération puisse avoir lieu dans un laps de temps très court, mais le cas est plus rare qu’on ne le suppose.

Prenez par exemple l’apôtre Paul. Si jamais homme fut converti, c’est bien celui-là. Il fut sur le chemin de Damas le témoin et l’objet d’une manifestation de puissance extraordinaire. Pourtant il est évident que Dieu ne l’établit pas sur-le-champ dans une pleine liberté. Pendant trois jours et trois nuits, Saul fut aveugle et bouleversé au point de ne manger ni de boire ; image de son état spirituel. Il avait réellement contemplé Christ dans la gloire, et cela pour la délivrance de son âme. Mais avait-il été amené aussitôt à la paisible jouissance de tout ce qu’il avait vu et entendu ? Je ne doute pas qu’il se soit fait en lui une oeuvre immédiate, fruit de la vérité agissant dans l’homme intérieur. Cependant il ne connut le repos et la pleine liberté qu’après qu’Ananias soit venu à lui et qu’il ait été baptisé. Nous savons que c’est à ce moment-là qu’il fut rempli de l’Esprit Saint et que, comme c’est toujours le cas, il entra dans la conscience de la pleine bénédiction.

Cet intervalle de temps entre les deux expériences ne met pas en cause la plénitude de l’Évangile, non plus que l’affranchissement qu’il apporte. Mais il explique l’état intermédiaire dans lequel gémissent beaucoup d’âmes. Si nous avons de la sollicitude pour elles, nous saurons les reconnaître à des signes qui ne trompent pas. Bien qu’elles soient l’objet d’une action réelle de l’Esprit de Dieu, ces âmes peuvent néanmoins rester dans cette condition pendant des jours, des semaines, des mois, des années avant d’être amenées dans un complet affranchissement devant Dieu. Or, là où l’on entre dans l’affranchissement, il y a, selon moi, non pas seulement la vie, mais la réception de l’Esprit Saint.

1.2.3.6                 [Dieu achève le travail commencé]

Je voudrais dire encore un mot avant de quitter cette partie du sujet. Chaque fois que Dieu commence une oeuvre en quelqu’un, il l’achève, lors même que les deux opérations mentionnées ci-dessus ne se suivent pas immédiatement. La gloire de Dieu exige que jamais, en ceux qui meurent, l’oeuvre ne soit restée incomplète. Chaque fois que Dieu vivifie, il donne aussi le Saint Esprit. Je ne crois pas que ce soit toujours au premier moment, et, de fait, l’Écriture semble montrer le contraire ; mais celui que Dieu entreprend de bénir maintenant, sera tôt ou tard, soyons-en certains, amené à la jouissance simple et entière de la paix avec Dieu (progrès qui n’est pas à confondre avec l’intelligence spirituelle, chose, hélas, trop rare chez les croyants). Nous savons tous comment des âmes vraiment pieuses peuvent rester malheureuses pendant des années ; mais pour ma part je n’en connais pas une seule qui n’ait été rendue joyeuse avant que le Seigneur l’appelle à Lui. J’ai été personnellement témoin de cas véritablement merveilleux, où se sont complètement évanouis tous les doutes et toutes les craintes qui avaient assombri l’existence entière de personnes qui pourtant avaient la vie. Avant de quitter ce monde, elles ont pu voir la grâce de Dieu dissipant enfin tous les nuages qui avaient plané sur leur âme. En conclusion, lorsqu’une âme est vivifiée par l’Esprit de Dieu, ou convertie, ce qui au fond signifie la même chose, il se pourra qu’elle reçoive le Saint Esprit aussitôt après, mais il se pourra aussi qu’elle ait à attendre, à cause d’un manque de soumission présente à la justice de Dieu.

Il est bon de remarquer qu’à Césarée le baptême suit le don de l’Esprit. L’apôtre Pierre attire l’attention sur le fait que non seulement l’Esprit Saint tombe sur eux comme il était tombé sur les Juifs le jour de la Pentecôte, mais que ceux des nations se mettent à parler en langues. Il se produisait le même irrécusable témoignage du grand don. Ce fait avait une importance considérable en ce qu’il fermait la bouche aux fidèles de la circoncision qui accompagnaient l’apôtre. En les entendant magnifier Dieu, Pierre s’écria : «Quelqu’un pourrait-il refuser l’eau ?» Il savait parfaitement bien comment le préjugé des Juifs pourrait se montrer. C’était également une chose nouvelle que les Gentils soient baptisés d’eau. «Quelqu’un pourrait-il refuser l’eau, afin que ceux-ci ne soient pas baptisés, eux qui ont reçu l’Esprit Saint comme nous-mêmes ?»

1.2.3.7                 [Baptême par des frères sans particularité]

Encore un autre fait à observer, à l’appui duquel l’Écriture fournit d’ailleurs d’autres preuves, c’est que le baptême n’a jamais été institué pour être, dans son administration, le privilège d’un personnage officiel dans l’Église. Pierre est là, et si l’on avait rattaché à cet acte une question de dignité ou de supériorité chez les personnes, assurément c’est à un apôtre que serait revenu le droit de baptiser. Eh bien ! le texte indique clairement que ce n’est pas lui qui administre le baptême. Il a soin que Corneille et les siens soient baptisés, et même il le commande, mais il n’est dit nulle part qu’il les baptise lui-même. Pareillement lorsqu’il parle de son oeuvre à Corinthe, Paul est heureux de rendre grâces à Dieu de ce qu’il n’a baptisé aucun d’eux, à l’exception d’un nombre insignifiant (1 Cor. 1:14 à 17). Je ne doute pas qu’ici Pierre n’ait été divinement conduit à s’abstenir de baptiser. Dieu, qui opérait à sa propre louange, ôtait ainsi toute occasion de donner gloire à l’homme. Le grand apôtre Paul lui-même fut baptisé par un simple disciple ; et, assurément, si la personne de celui qui baptisait avait ajouté quelque chose à l’acte, nous pouvons penser que cette distinction aurait été particulièrement maintenue par Dieu lorsqu’il s’agissait de baptiser un apôtre. Mais Ananias, sur l’ordre de Dieu, va vers Saul qu’il appelle «frère», et le baptise sur-le-champ. On n’attend aucun personnage officiel.

N’est-ce pas une preuve étonnante de l’incrédulité des hommes, que l’on passe par-dessus un fait aussi patent ? Les anciens ou les modernes se flattent-ils de faire mieux que l’Écriture ? Connaissent-ils la volonté du Seigneur mieux que les écrivains inspirés ? L’usage qui consiste à faire de ministres officiels de l’Évangile les seules personnes compétentes pour baptiser, n’a nullement le sceau de Dieu. La Parole met le plus grand soin à montrer que le baptême pouvait être appliqué sans eux. Pour Corneille, par exemple, il n’était pas besoin de chercher quelqu’un remplissant une fonction élevée, puisqu’un apôtre était présent. Si l’ordre selon Dieu avait exigé la forme que les hommes ont imposée depuis, pourquoi aurait-elle été omise dans une occasion aussi sérieuse, occasion dont la religion n’aurait pas manqué de faire un précédent pour tous les temps à venir ? Or, de même que Saul, le centurion Gentil et sa maison sont baptisés par ceux que l’on désigne aujourd’hui sous le nom de laïques. Les apôtres et les évangélistes ont quelquefois baptisé ; mais le baptême n’était nullement considéré comme un rite officiel ; d’autres frères pouvaient baptiser et le faisaient même quand un apôtre était présent.

1.2.4        [Actes 19 — Croyants d’Éphèse]

Il ne reste plus qu’un seul cas, relaté dans les Actes, sur lequel nous avons quelques mots à dire en rapport avec notre sujet. «Or il arriva, comme Apollos était à Corinthe, que Paul, après avoir traversé les contrées supérieures, vint à Éphèse ; et ayant trouvé de certains disciples, il leur dit : Avez-vous reçu l’Esprit Saint après avoir cru ? Et ils lui dirent : Mais nous n’avons même pas ouï dire si l’Esprit Saint est. Et il dit : De quel baptême donc avez-vous été baptisés ? Et ils dirent : Du baptême de Jean. Et Paul dit : Jean a baptisé du baptême de la repentance, disant au peuple qu’ils croient en celui qui venait après lui, c’est-à-dire en Jésus. Et ayant ouï ces choses, ils furent baptisés pour le nom du Seigneur Jésus ; et, Paul leur ayant imposé les mains, l’Esprit Saint vint sur eux, et ils parlèrent en langues et prophétisèrent» (Actes 19:1 à 6). Voilà une circonstance dont le sens est bien clair, et qui n’est pas moins remarquable que celles que nous venons d’examiner. L’apôtre, sans doute, avait discerné chez ces «disciples» d’Éphèse un manque de liberté qui le porta à s’informer s’ils avaient reçu l’Esprit Saint «après avoir cru». Il est donc vrai — et cela l’était certainement dans la pensée de l’apôtre — qu’on peut recevoir le Saint Esprit après avoir cru. Il ne met pas en question la réalité de leur foi ; mais il avait un motif pour demander s’ils avaient reçu le Saint Esprit depuis qu’ils étaient dans la foi. Et leur réponse est également simple : «Nous n’avons même pas ouï dire si l’Esprit Saint est».

1.2.4.1                 [Le don du Saint Esprit n’était pas connu]

Non pas qu’ils aient prétendu ignorer l’existence de l’Esprit. La question portait sur sa réception par les croyants, promesse ancienne dont ils ne savaient pas qu’elle était réalisée. Jean avait annoncé que celui dont il était le précurseur ne baptiserait pas d’eau seulement, mais de l’Esprit Saint. En fait, tout lecteur de l’Ancien Testament connaissait non seulement l’existence de l’Esprit, mais la bonne promesse de Dieu, que dans les derniers jours l’Esprit serait répandu. Et, de tous les prophètes, Jean est celui qui a le plus insisté sur cette vérité, que le Messie serait l’instrument de cette oeuvre et de cette faveur merveilleuse parmi les hommes. Mais, pour une cause ou pour une autre, ces disciples ne savaient pas que la promesse était actuellement en voie d’accomplissement, que des croyants Juifs, Samaritains et Gentils avaient déjà reçu l’Esprit, par l’ouïe de la foi et non par des oeuvres de loi.

1.2.4.2                 [La puissance est liée au Saint Esprit]

L’apôtre leur demande ensuite de quel baptême ils ont été baptisés. À quoi ils répondent qu’ils ne connaissent que le baptême de Jean. Ceci provoque une importante explication. Jean n’avait pas été au-delà du baptême de la repentance. Il avait, en effet, insisté sur ce jugement de soi-même que l’Esprit seul produit dans les âmes quand elles s’inclinent devant la Parole de Dieu, jugement qui leur découvre leur ruine morale devant Lui. Mais la puissance qui est basée sur la rédemption n’avait pas encore été communiquée. Et cette puissance ne pouvait demeurer dans un homme pécheur tant que n’avaient pas eu lieu l’effusion et l’aspersion du sang qui était en quelque sorte le fondement de l’habitation de l’Esprit. Or, c’est cette puissance, communiquée en vertu de l’oeuvre de Christ, qui lie l’âme délivrée et rachetée avec Celui qui a remporté la victoire, et la conduit victorieusement au travers d’un monde méchant. Jean ne pouvait que dire aux hommes de croire en Celui qui venait après lui, c’est-à-dire en Christ. Tandis que Paul prêche un Sauveur déjà venu et qui a effectué la rédemption. «Et ayant ouï ces choses, ils furent baptisés pour le nom du Seigneur Jésus ; et, Paul leur ayant imposé les mains, l’Esprit Saint vint sur eux, et ils parlèrent en langues et prophétisèrent».

1.2.4.3                 [Le don et les dons du Saint Esprit sont distingués]

Ici encore les signes extérieurs ne manquent pas ; mais, pas plus que dans les autres circonstances, ils ne sont confondus avec le don du Saint Esprit. Ces disciples sont baptisés du baptême chrétien ; le baptême de la repentance était insuffisant. Ils sont baptisés au nom de Celui qui mourut et ressuscita ; et là-dessus, ils reçoivent l’Esprit, mais cette fois avec l’imposition des mains de Paul. C’est ainsi que si Dieu a honoré Pierre et Jean en Samarie, il n’honore pas moins l’apostolat de Paul. Et l’on remarquera aussi que, comme Pierre et Jean avaient rempli cet office non à Jérusalem, mais dans sa religieuse rivale, Samarie, de même Paul est appelé à imposer les mains, non pas à des Gentils convertis par sa prédication, mais à des disciples déjà baptisés du baptême de Jean.

1.3   [L’imposition des mains n’est pas nécessaire]

Il n’y a donc en cela rien qui soit de nature à susciter une difficulté, ni à affaiblir la portée des explications précédentes. Les deux cas dans lesquels des apôtres imposèrent les mains à des croyants afin que ceux-ci reçoivent l’Esprit sont des cas exceptionnels et subordonnés aux occasions principales où nous ne voyons pas que pareil acte soit accompli par les apôtres. Dans la première et la principale de ces circonstances, la visitation des Juifs à la Pentecôte, l’Écriture ne fait pas mention d’un seul cas d’imposition des mains ; et d’ailleurs, qui aurait pu imposer les mains à ceux qui, les premiers, reçurent le Saint Esprit en ce jour-là, que ce soient les apôtres ou les cent vingt disciples ? Dans la pensée de Dieu, ce don devait émaner directement de Sa main. La conclusion est évidente : si même aujourd’hui il existait des apôtres, l’imposition de leurs mains ne serait pas nécessaire pour que nous, ou tous autres croyants gentils, recevions le Saint Esprit. Croyant en Christ par leur parole, nous avons eu part à la bénédiction de la même manière que nos devanciers, savoir ces premiers chrétiens non Juifs, à Césarée.

Le Seigneur soit béni non seulement pour le don de son Esprit, mais pour sa Parole écrite, qui manifeste la folie des hommes prétentieux et réprouvés quant à la foi, lesquels cherchent à inquiéter les timides et à enhardir les superstitieux. Puissions-nous retenir, «selon la foi des élus de Dieu... la connaissance de la vérité qui est selon la piété, dans l’espérance de la vie éternelle que Dieu, qui ne peut mentir, a promise avant les temps des siècles !» (Tite 1:1, 2).

 

2                        Méditation 7    Vous êtes dans l’Esprit et l’Esprit habite en vous    Romains 8:1 à 27

Notre sujet embrasse deux points principaux qu’il importe de bien distinguer. Le premier est la vérité bénie que nous sommes dans l’Esprit. En contraste avec la nature et la chair, c’est là une condition entièrement nouvelle que les rachetés du Seigneur revêtent déjà sur la terre. Le second est celui de la demeure actuelle, personnelle, du Saint Esprit dans celui qui croit. Notre chapitre, qui insiste avec force et précision sur ces deux vérités, va nous donner l’occasion d’en expliquer la différence et de tirer la conclusion qui ressort de chacune d’elles pour la bénédiction du chrétien, à la propre gloire de Dieu. Pour bien saisir la première de ces vérités, il nous faut rappeler les grandes lignes de l’épître aux Romains.

2.1   [La justice de Dieu — la justification par le sang]

La clef de cette épître est la justice et essentiellement la justice de Dieu. Celle-ci est la qualité divine, révélée par l’Évangile et fondée sur la rédemption, qui permet à Dieu d’être parfaitement conséquent avec lui-même en justifiant le coupable qui croit en Christ.

2.1.1        [Importance de saisir ce qu’est cette justice]

Cette épître nous apprend comment il se fait que Dieu puisse ainsi nous justifier. La justice divine est par Jésus Christ, le Seigneur. Elle est fondée sur son sang, sur sa mort. Mais elle ne se limite pas à la rédemption, bien que la plupart des croyants aiment à s’arrêter là. Tout en bénissant Dieu de ce que beaucoup de pécheurs en arrivent à ce point, nous devons vivement regretter que certains de nos frères n’avancent pas au-delà. Nous le regrettons pour eux-mêmes, pour la joie qu’ils perdent par rapport à la liberté chrétienne. Nous le déplorons surtout parce que tout ce qui dérobe à l’âme sa bénédiction propre, son entière liberté devant Dieu, diminue d’autant la gloire de Christ, et entraîne, en proportion, faiblesse dans le service aussi bien que dans le culte chrétien.

Plusieurs considèrent cette perte comme de minime importance ; ils estiment que la seule chose désirable est qu’une âme soit sauvée de la colère à venir. Nous ne pouvons que les plaindre. Si le salut de l’homme était le seul but de Dieu, cette attitude se justifierait. Mais jamais Dieu ne se propose moins que sa propre gloire, et celui qui fait du simple salut la grande question, prouve qu’il est plus occupé de lui-même et de son entourage qu’exercé dans son âme à l’égard de ce que le Saint Esprit révèle de Dieu et de son Fils. Du reste, jamais on n’a vu une âme ayant appris à jouir de Dieu, à triompher du monde et à adorer dans l’énergie de l’Esprit Saint, consentir à revenir en arrière pour s’enfermer dans les pauvres limites de la théologie humaine. Cette dernière est la science qui prétend s’occuper des vérités divines. C’est un système de raisonnements qui, parce qu’ils sont le produit de l’intelligence, et non de la foi, empêchent la puissance, sacrifient la liberté, s’opposent à la gloire de Dieu, et donnent à l’homme une place qui ne lui appartient pas. Les enfants de Dieu qui s’en contentent sont arrêtés dans leurs progrès ; ils ne croissent pas, et le Saint Esprit est contristé par le déshonneur qu’on lui fait ainsi. Lui seul en effet est qualifié pour guider le racheté. Lui seul peut bénir ceux qui appartiennent à Christ pour la gloire de Dieu le Père.

2.1.2        [Le péché nécessite le jugement]

En premier lieu, j’appelle donc l’attention sur les grands principes développés dans l’épître aux Romains. On n’y trouve pas un mot sur l’amour de Dieu ni sur la victoire dont jouit le chrétien, jusqu’à ce que la question entière de la justice soit décidée. Au premier abord, il ne semble pas que ce soit le moyen le plus court de soulager le coeur, de lui donner la paix et la liberté ; pourtant c’est bien le moyen dont Dieu se sert. Dès les premiers versets apparaît ce mot toujours inflexible et accablant pour l’homme : «la justice de Dieu». Cette justice en effet, place devant l’homme l’autorité divine et ne lui permet pas d’oublier le droit solennel que Dieu a de juger.

Jusqu’au moment où le péché fut entré dans le monde, il n’était pas question de justice. Qu’y avait-il à juger avant que l’homme se soit ruiné lui-même en même temps que la création dont il était le chef ? Auparavant, tout était très bon. Le jugement n’était donc nullement la relation normale entre Dieu et l’homme dans l’état d’innocence. Dieu n’agissait alors envers Adam que pour le combler de toutes les bontés dont s’accompagnait la création. L’homme ne faisait alors que se réjouir, et adressait à Dieu les actions de grâces d’une créature sans péché. Mais bientôt la scène fut changée et gâtée. La conscience acquise à l’homme par la connaissance du bien et du mal (connaissance du bien qu’il avait perdu et du mal qu’il avait acquis, gain amer du péché par lequel il avait été vaincu), cette conscience porta l’homme tout d’abord à cacher sa nudité puis à se dérober à la présence de Dieu. Hélas ! bien avant que la voix de Dieu ne prononce contre lui la sentence judiciaire, la conscience de l’homme l’avait déjà condamné et banni moralement. Il sentait qu’il n’y avait plus place pour lui dans la présence de Dieu. La conséquence fatale fut manifestée dès ce jour-là, bien qu’elle ne se soit déclarée que progressivement, selon le bon plaisir de Dieu, et avec une clarté toujours croissante : le péché nécessitait le jugement.

2.1.3        [Dieu appelle le pécheur]

Il s’ensuit évidemment que si l’homme devait être sauvé, il fallait qu’il fût appelé ; et cela par la gloire et par la vertu, comme il est dit en 2 Pierre 1. C’est là le caractère de l’appel de Dieu. Il appelle l’homme à ce qu’il ne possède pas. Il ne s’agit pas seulement pour ce dernier de maintenir ce qui lui reste et d’en user sagement. Il a perdu sa possession originelle ; bien plus, il a perdu non seulement tout ce que Dieu avait placé au-dessous de lui, sous sa responsabilité, mais encore Celui qui était au-dessus de lui : Dieu lui-même. Et sa propre conscience, nouvellement acquise, en portait le témoignage pénible mais véritable. C’est pourquoi Dieu l’appelle dans sa grâce ; mais il l’appelle par la gloire. Il l’appelle à ce qui ne se voit pas, tout en agissant sur lui par des motifs moraux comme frein pour le mal qui s’était introduit dans le coeur de l’homme et l’avait soumis à sa domination.

2.1.4        [La loi fait sentir le péché]

Tout cela est, sans contredit, développé dans le christianisme avec une force incomparablement plus grande ; toutefois, le principe n’en est pas moins vrai à partir du moment où l’homme tomba. Au moment convenable, Dieu fit des promesses ; et celles-ci, est-il besoin de le dire, agirent puissamment en ceux qui avaient la foi. Plus tard la loi fut donnée et avec elle une certaine connaissance du péché. Car la loi soulevait le problème de l’état de l’homme, question que les promesses ne touchaient point. Les promesses ne faisaient que présenter une bénédiction que Dieu donnerait assurément en son propre temps. Elles ne dépendaient pas de l’état de l’homme mais de la parole et de la volonté de Dieu agissant en grâce. Toutefois l’homme étant pécheur, il est évident qu’il ne serait pas bon pour lui de ne pas sentir son état réel. C’est pourquoi, les promesses étant données mais non encore accomplies, la loi fut introduite ; elle sonda l’homme, mettant en évidence sa méchanceté et son entière culpabilité ; elle prouva en outre que, même doué de la connaissance de sa méchanceté, il ne possédait ni la volonté ni la force d’amender ses voies.

2.1.5        [Christ a porté le jugement]

Christ vint enfin. Soumis à la loi, il aurait pu s’approprier les promesses. En effet, il était l’héritier véritable aussi bien que le témoin fidèle — le seul qui ait jamais fait ressortir la beauté de la loi comme instrument moral ; le seul qui ait répondu à cette expression du droit que Dieu a sur l’homme. Seul il justifia dans toutes ses voies ici-bas Celui qui avait donné la loi. Mais s’il s’était saisi des promesses comme se rattachant à l’observance de la loi, il est bien évident que personne n’aurait pu partager avec lui l’héritage. C’est pourquoi dans la croix du Seigneur Jésus se fait voir une chose toute nouvelle : Lui qui avait accompli la loi, lui, l’héritier même des promesses, au lieu de la couronne prend sur lui la malédiction — au lieu du royaume de Dieu, il subit le jugement !

Alors s’accomplit cette oeuvre, la plus merveilleuse de toutes : tout ce que Dieu ressentait contre le péché s’exprima contre Celui qui n’a pas connu le péché ; tout ce que, dans sa sainte indignation, Dieu pouvait contre le mal, tomba sur Celui qui n’avait point commis le mal, dans la bouche duquel il ne se trouvait aucune fraude. Lui, son propre Fils, l’objet de ses parfaites délices, de sa pleine et éternelle faveur, fut abandonné au jugement impitoyable, Dieu agissant envers lui comme jamais il n’avait agi, ni ne le pourra jamais de nouveau envers aucun autre. La gloire même de la personne du Fils unique, qui lui donnait la force de soutenir ce jugement, rendait cette colère d’autant plus insupportable. Le fait même qu’il était Dieu, sa qualité de Fils en rapport avec le Père (car il possédait et la nature de Dieu et la connaissance du Père), ajoutait aux souffrances du Seigneur, à cette heure solennelle, ce qu’il y a de plus poignant et d’indicible. Mais, «c’est accompli...» ! Et, dès ce moment, la justice de Dieu n’est plus seulement promise ; elle commence à être révélée. Ce sujet-là n’est peut-être pas entièrement exposé dans les Romains ; mais cette épître en contient l’essentiel, notamment ce qui se rattache aux besoins de l’homme.

2.1.6        [Le chrétien fait justice de Dieu en Christ]

Dans la seconde épître aux Corinthiens, l’Esprit considère un autre aspect de la justice de Dieu : «ce que nous sommes faits en Christ». À cet égard, le point principal c’est que Jésus est glorifié au ciel dans la gloire de Dieu. Il n’est fait que très brièvement allusion à cette vérité dans le chapitre 8 des Romains, le but de cette épître étant de présenter les bases du salut et de la paix avec Dieu, plutôt que la hauteur céleste à laquelle nous donne droit la justice divine. Ce dernier point de vue aurait pu contrarier le courant de l’Esprit, occupé dans cette épître à faire ressortir la vie en Celui qui est ressuscité des morts plutôt qu’à révéler la gloire de Christ assis dans les cieux. Car ce qu’il y avait de plus absolument indispensable pour établir la base et la manifestation de la justice divine c’est que Dieu entre dans la scène de la mort, là où Jésus s’abaissa comme sacrifice pour le péché, s’étant en grâce parfaite rendu responsable pour nous. Ensuite il ressuscite Christ d’entre les morts, et enfin le fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes.

En tout cela s’exprimait la justice de Dieu, comme conséquence de la croix. C’était ce que Dieu devait à Jésus ; une dette dont il lui fallait s’acquitter soit comme Dieu, soit comme Père. Car Jésus était l’homme qui l’avait glorifié au plus haut degré, comme jamais auparavant il n’avait été glorifié, et cela quant à ce qu’il détestait le plus : le péché lui-même. Christ ne s’est rien épargné ; il a tout enduré ; il n’a pas cherché à montrer sa gloire, il l’a mise de côté. Il se plaça, pour ainsi dire, complètement entre les mains de Dieu, prenant sur lui tout ce qui était dû à Dieu pour le péché. La conséquence en est que Dieu, aussi bien comme Dieu que comme Père, ressuscita par sa propre gloire, celui qui était à la fois Fils et homme (Rom. 6:4).

2.1.7        [Christ glorifié à cause de la justice de Dieu]

Mais cela même n’aurait pas suffisamment exprimé la valeur de l’oeuvre et des souffrances de Christ. Aux yeux de Dieu, la croix méritait encore incomparablement davantage. Jésus y mourut, portant nos péchés en son propre corps. Par la grâce de Dieu, il goûta la mort pour tout. Voilà ce qui détruisait la puissance de Satan, effaçait le péché, rapportait à Dieu une gloire infinie, et à cet égard le rendait redevable envers l’homme, le Fils de l’homme. C’est pourquoi Jésus pouvait déclarer dans le chapitre 13 de Jean : «si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui-même, et incontinent il le glorifiera». Sans attendre «l’administration de la plénitude des temps», ce moment où lui seront données la terre et toutes les nations de la terre, Dieu glorifie Christ en lui-même immédiatement et dans le ciel. La justice de Dieu était en question, sa gloire morale et céleste était en jeu. Il relève Christ d’entre les morts et le place sur son propre trône dans le ciel. Qui, excepté Dieu, eut jamais la pensée d’un tel dessein ? Sans doute, les Psaumes et d’autres passages contenaient des paroles inspirées qui ont pu être comprises après que Dieu eut agi de la sorte, et montrer que telle était déjà, dans le passé, la pensée divine. Mais glorifier le Fils de Dieu en lui-même, c’est là un moyen d’exprimer la gloire dont il couronna Jésus qu’on chercherait en vain dans la Parole jusqu’à ce que lui-même le déclare au moment où il allait quitter la terre.

2.1.8        [La justice de Dieu permet à l’homme de se tenir devant Dieu]

Et pourtant, toute glorieuse qu’elle soit, cette portion ne suffirait pas à Dieu. Elle était personnelle à Christ et précieuse par-dessus tout ; mais son oeuvre s’appliquait à d’autres, et voilà le côté de la justice de Dieu que déploie l’épître aux Romains : savoir l’effet de sa justice par rapport aux croyants plutôt que par rapport à son Fils. Il souffrit sur la croix et fut exalté dans la gloire céleste ; mais que deviendraient ceux pour lesquels il mourut ? Dieu les laisserait-il dans leurs péchés ? Serait-il juste que Jésus fût ainsi traité ? Comment estimer à sa pleine valeur l’oeuvre accomplie par le Fils de l’homme pour ses brebis perdues qu’il était venu chercher et sauver ? Avait-il échoué ou au contraire vaincu dans cette puissante entreprise ? Il avait souffert et il était mort pour eux et pour leurs péchés : qu’en est-il résulté ? La réponse se trouve dans l’épître aux Romains, qui nous présente la conséquence de cette vérité pour l’homme dans le péché : il est mis au bénéfice de la justice de Dieu «envers (ou pour) tous, et sur tous ceux qui croient». Le 3° chapitre, auquel nous empruntons ces paroles, (v. 22), nous apprend que la justice de Dieu a satisfait entièrement aux péchés. Nous y trouvons l’expiation, ou la propitiation, pour les péchés des hommes. Mais ce chapitre prouve que la mort de Christ ne se borne pas à répondre aux besoins de l’homme : tout se rapporte maintenant à la gloire de Dieu. Les hommes n’atteignent pas à sa gloire ; mais si Dieu introduit son salut, ce doit être pour rendre l’homme capable de se tenir en sa présence dans le ciel. Si le salut s’accomplit, ce n’est pas simplement pour réinstaller l’homme où il était avant sa chute, mais bien pour lui fournir la capacité de se tenir dans la présence de la gloire de Dieu.

Eh bien ! c’est ce qu’exposent les chapitres 4 et 5, en nous montrant par quel moyen s’accomplit cette oeuvre. Non pas cette fois par la mort de Christ, mais par sa résurrection. «Il a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification». Et c’est aussi la foi qui s’empare de ce complément glorieux de l’oeuvre de Christ pour nous. «Ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu» ( 5:1).

C’est là, remarquons-le, que, pour la première fois dans cette épître, nous trouvons la paix avec Dieu, l’accès à cette faveur dans laquelle nous sommes, et notre privilège de nous glorifier dans l’espérance de la gloire de Dieu. L’épître aux Romains ne nous considère jamais, ainsi que le fait celle aux Éphésiens, comme actuellement unis à la gloire ; mais elle nous représente comme capables, ici-bas, d’abonder dans l’espérance de la gloire que nous avons en perspective.

2.1.9        [Le croyant doit être au clair quant à la justice de Dieu]

Puis, au milieu des tribulations, dont nous pouvons tirer de quoi nous glorifier, il est dit que nous avons l’amour de Dieu versé dans nos coeurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné. Ainsi la première allusion à l’amour de Dieu n’apparaît qu’après que la justice de Dieu a été expliquée aussi complètement que l’exigeait cette épître. Pour quelle raison ? Parce que Dieu voulait d’abord produire en ceux envers lesquels il agissait avec tant de grâce un sentiment profond, solennel, du péché. Je ne dis pas que c’est ainsi que nous devions agir envers une pauvre âme inquiète ; mais, en fait, l’épître aux Romains ne s’adresse pas à ceux qui sont inquiets et troublés dans leur conscience. Il ne s’agit pas là de gagner à Dieu des âmes non encore converties. Avec celles-là, rien de plus important que de démontrer l’amour : et c’est là d’abord ce que fait Jésus. Il attire l’attention, gagne la confiance, puis il éveille la conscience avant de la mettre dans la parfaite liberté telle que nous la connaissons par le Saint Esprit depuis que l’oeuvre est achevée. Mais dans nos rapports avec ceux qui croient, et surtout avec les âmes qui ont saisi la bénédiction de l’Évangile sans que la conscience ait été bien profondément labourée, il est de toute importance de présenter avec la plus grande clarté possible le côté de la justice de Dieu et de comprendre distinctement que l’Évangile est «la puissance de Dieu en salut» parce qu’il est la justice de Dieu. C’est là le raisonnement de l’apôtre dès le premier chapitre de l’épître.

2.2   [Le péché et la délivrance]

2.2.1        [L’âme tourmentée par son péché, son état]

Jusqu’au chapitre 5 (v. 11), nous voyons ainsi en présence : des pécheurs coupables, et un Dieu qui, à sa manière propre, vient au-devant d’eux tels qu’ils sont, dans leurs péchés. Mais alors, pour l’âme réveillée qui a trouvé la paix, un sujet de plus grand tourment encore apparaît : ce ne sont plus ses péchés mais son péché ; non pas ce qu’elle a fait, ce dont elle est coupable, mais son état même devant Dieu. Après sa conversion, après avoir trouvé la paix, voici cet homme qui découvre la misère de son état, qui voit dans son coeur des replis de méchanceté qu’il ne pouvait croire possibles chez un enfant de Dieu ; replis qu’aucun homme ne soupçonne avant d’en faire l’expérience personnelle. La parole de Dieu en parle bien, mais l’homme passe outre et ne s’arrête pas à ces passages. À vrai dire, du reste, personne ne comprend la chose avant d’en avoir fait l’expérience personnelle une fois que le coeur est véritablement amené à Dieu.

C’est la grande lacune du christianisme de nos jours, et depuis bien longtemps assurément. Il laisse les âmes, je puis bien le dire, à demi sauvées ; il leur présente des vérités partielles, mais il ne leur apprend pas qu’elles sont en Christ. Je ne veux pas dire que l’expression «en Christ» n’est jamais employée ; mais qu’en lisant ce passage : «il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus» — la plupart des personnes n’y comprennent rien, sinon que Christ est mort et ressuscité pour elles, et que par conséquent elles sont justifiées devant Dieu. Mais c’est loin d’être toute la signification de ce passage. Dès le milieu du chapitre 5, le Saint Esprit soulève une question nouvelle, à savoir : la culpabilité de l’homme, sa nature pécheresse, la manière dont Dieu y répond et dont une âme peut être délivrée. Tout cela a été décidé ; et c’est là la doctrine propre de l’épître aux Romains du chapitre 5 au chapitre 8. C’est une instruction de la plus haute importance pour l’âme qui a déjà trouvé Christ. Non seulement elle me révèle un Sauveur mort pour mes péchés et ressuscité pour ma justification, mais elle m’apprend que ma vieille nature a été jugée, condamnée dans la mort de Christ. «Comme par un seul homme le péché est entré dans le monde…». Il ne s’agit donc pas de ce que j’ai fait mais de ce que je suis.

2.2.2        [La délivrance : la justification de vie]

Tous mes péchés étant effacés et pardonnés, je puis me trouver encore dans un état misérable pour moi-même, et plein de déshonneur pour Dieu. D’où vient cet état ? Il a été introduit par un seul homme : Adam. Mais, de même que ce premier homme a introduit le péché et la mort, Christ, le second homme, a accompli, lui, la justice ; et la grâce règne par la justice pour la vie éternelle, par Jésus Christ notre Seigneur (5:21). Voilà la délivrance. Il ne s’agit plus de pécheurs condamnés par la loi, mais d’Adam à une extrémité et de Christ à l’autre. Aucun Juif ne pouvait nier les conséquences de la position d’Adam à l’égard de toute sa race. Le monde était ruiné avant même que la loi n’entrât ; et la loi, loin de réparer la ruine, ne fit qu’imposer à l’homme de nouvelles entraves. Elle ne pouvait que prouver plus complètement l’étendue de la ruine. Mais maintenant était venu un autre homme, Jésus, qui passa, par la mort, dans la vie de résurrection. Par conséquent, depuis le verset 12 du chapitre 5, le Saint Esprit aborde une question toute nouvelle : ce n’est plus la justification par le sang, c’est la justification de vie. Il n’est pas question de ce que le Seigneur a fait, mais d’un état nouveau, d’une condition fondée sur la rédemption et déployée dans sa résurrection.

2.2.3        [Vivant à Dieu en Christ ressuscité]

Christ a magnifié Dieu en toutes choses ; et ce qui était absolument nécessaire pour la gloire de Dieu constitue en outre une part essentielle de notre bénédiction, parce que nous possédons réellement un Christ entier. Quand il s’agit de ce qui fait face à notre état de péché comme hommes, l’Écriture ne fait pas ressortir ce que Jésus fit ici-bas, mais ce à quoi il fut élevé. C’est pourquoi, de même qu’Adam n’est devenu chef de race qu’après être devenu pécheur (on pourrait dire, quand il eut accompli l’oeuvre du péché), de même, le Seigneur Jésus ne devient Chef, le Chef reconnu et révélé — «un Esprit vivifiant» — qu’en entrant en résurrection. C’est seulement lorsqu’il eut déposé sa vie dans la mort que l’oeuvre fut achevée. C’est alors que le grain de blé, qui était tombé en terre et était mort, maintenant ressuscité, pouvait porter du fruit en abondance.

Le 6° chapitre applique ce principe au péché qui tourmentait le croyant. Le point principal de ce chapitre n’est pas que nous sommes ressuscités mais que nous vivons à Dieu en Christ ressuscité. Le raisonnement de l’apôtre ne va pas ici comme dans l’épître aux Colossiens jusqu’à contempler celui qui croit comme ressuscité avec Christ (dans les Éphésiens, il est même assis en Christ dans les lieux célestes). Car, si je suis ressuscité, je ne puis en même temps me tenir pour mort ; ce serait une contradiction dans les termes. Une telle erreur est exclue par le raisonnement même ainsi que par la portée de chacune de ces deux épîtres, et c’est un point d’une très grande importance comme on le verra dans l’Écriture. Aussi dans les Romains, le croyant n’est-il jamais considéré comme ressuscité : il est simplement «mort au péché et vivant à Dieu». Mais c’est là justement ce qui me fournit une délivrance bien merveilleuse pour la pratique ; délivrance à laquelle j’ai droit dès le premier moment de ma carrière chrétienne, dès que je reconnais le Seigneur Jésus et que je suis baptisé en son nom.

2.2.4        [Baptême pour la mort de Christ]

Le baptême est un signe de mise à part, un sceau mis sur quelqu’un dans un but déterminé. On est baptisé pour quelqu’un ou quelque chose. Pour quoi donc suis-je baptisé ? Pour la vie de Jésus ? Pour ce qu’il a fait ? Non pas ; c’est pour sa mort que je suis baptisé. Mon point de départ est cet acte infini de grâce divine qui a répondu à mon état et non seulement à mes péchés (pour ceux-ci en effet, je trouve son sang précieux). Ce n’est pourtant pas pour le sang de Christ que je suis baptisé mais pour sa mort — expression plus vaste et plus profonde. Voilà ce qui répond à ma condition comme pécheur — comme homme «vivant au péché». J’ai besoin d’être délivré de cette condition. Or la seule délivrance possible d’un état de péché, c’est la mort. C’est là précisément ce qu’il me fallait. Je ne suis pas seulement pardonné, chose nécessaire et du plus haut prix. Mais ce n’est pas là tout ce qui est appelé le salut. J’ai besoin de me voir appliquer la mort de Christ et sa vie au-delà de la mort, aussi bien que son sang précieux : et c’est là ce que je possède en Christ. Dieu soit béni, j’ai le droit de considérer la mort de Christ comme satisfaisant pleinement à ma condition quant à toute la racine du mal.

De sorte que j’ai le bonheur de savoir non seulement que je suis pardonné par son sang, mais que, ressuscité par lui, j’ai le droit de me tenir pour mort à tout péché demeurant en moi, péché qui serait autrement un fardeau insupportable. Une bénédiction du plus haut prix résulte d’un Christ mort et ressuscité. Avec la rémission des péchés, une délivrance plénière m’est accordée. Celui-là seul qui est mort est quitte du péché. Le sang de Christ suffit pour les péchés ; mais pour le péché, il me faut la mort de Christ dans sa pleine efficace. Elle seule répond à nos besoins. Car Celui qui est mort est ressuscité dans un état tout à fait nouveau où ne saurait jamais reparaître la terrible question du péché ni de son expiation.

2.2.5        [La bénédiction en Christ n’est pas atteinte graduellement, ni par la loi]

La bénédiction entière de Christ est la part du croyant et cela dès qu’il croit. Ce n’est pas quelque chose que l’homme atteint par degrés, et qui donnerait une certaine valeur à ses expériences : cela ne tendrait qu’à l’exposer tristement à être content de lui-même et, par suite de la subtilité de son coeur, à lui fournir le moyen de dépouiller Christ sous prétexte d’honorer l’oeuvre de l’Esprit de Dieu au-dedans de lui-même. C’est là précisément hélas ! malgré le soin de Dieu à nous mettre en garde dans l’Écriture et dans les faits du christianisme (lire l’épître aux Galates), c’est là que trébuchent tant de chrétiens ; et voulez-vous savoir pourquoi ? Parce qu’ils se remettent sous la loi. Lorsque Dieu était occupé de fait de son peuple Israël, il leur donna sa loi qui agissait en frein, une espèce de mors, de bride pour leur chair rebelle. D’une part il fallait réprimer celle-ci ; de l’autre, pour ainsi dire, la pousser. Mais revenir aujourd’hui à la loi dans une bonne intention en visant à la piété c’est simplement renier le christianisme. Car la loi, au lieu d’être une règle de vie, est nécessairement une règle de mort pour celui qui a le péché dans sa nature. Loin d’être une puissance libératrice, elle ne peut que le condamner ; loin d’être un moyen de sainteté, elle est de fait, et d’après l’apôtre, la force du péché.

2.2.6        [Encore le baptême — la mort à la chair et au monde — mort et ressuscité en Christ]

Ce qu’il me faut avant tout c’est la délivrance. Et comment l’obtenir ? Par la mort. Dois-je mourir moi-même ? Ce serait ma destruction, et non mon salut ; ce n’est pas là non plus l’enseignement de l’Écriture. Mais en me reposant sur la mort de Christ, je puis, avec l’apôtre, mourir chaque jour (1 Cor. 15:31), je puis, selon la mesure de ma foi, me soumettre au mépris du monde, m’exposer à ce qui m’obtiendra de sa part et la mise à l’écart et la souffrance. C’est la gloire du chrétien — tout en se séparant ainsi — d’avancer avec humilité, et pourtant avec hardiesse, dans le sentier qui est semé de toute l’amertume de l’épreuve. Mais que me faut-il comme point de départ ? Si j’avais à mourir graduellement à ma nature mauvaise, il y aurait occasion pour moi de me glorifier moi-même. Or il n’en est pas ainsi ; et de là l’importance de la vérité mise en évidence dans le baptême du chrétien. L’homme commence à professer Christ en confessant Sa mort et Sa résurrection. Que signifie le baptême ? que le Sauveur qu’on a confessé n’est pas vivant sur la terre, mais mort et ressuscité. Tous ceux qui sont baptisés pour Jésus Christ sont baptisés «pour sa mort» (Rom. 6:3).

Outre le sang, il y a sa mort ; c’est elle qui a affaire avec ma nature, et me met en liberté devant Dieu en Christ ressuscité. Plus je reçois cette vérité avec simplicité, mieux cela vaut. Dans les choses de Dieu, il n’y a rien de comparable à la simplicité ; et la vraie foi est celle qui reçoit Sa parole (même encore peu comprise) sur sa propre autorité. Si Dieu me dit à moi, chrétien, que je suis mort, dois-je le croire ou non ? Si donc il est incontestable que je suis mort, ne dois-je pas aussi croire les conséquences que sa parole en déduit pour moi ? Quelles sont ces conséquences ? Que mon jugement est tombé sur Christ, que Lui ressuscité est la puissance et le garant de ma délivrance, et que l’homme et le monde n’ont plus aucun droit sur moi, puisque j’appartiens désormais à un autre, savoir à Celui qui est ressuscité des morts ? Quel droit peut-on encore exercer sur un homme qui est mort ? Aucun ! Il ne reste qu’à l’ensevelir. La loi ne s’applique pas aux morts : non qu’elle perde sa force, mais elle n’a plus sur qui s’exercer. Son autorité se limite à des hommes vivants dans le monde. Or je suis moralement sorti de cet état-là par la mort et la résurrection de Christ ; de sorte que pour ce qui est de ma vie proprement chrétienne, je ne suis plus vivant dans le monde. Je suis mort à la chair et au monde ; et c’est bien là mon point de départ dans le baptême et dans ma confession du Seigneur Jésus. En tant qu’homme naturel, je vivais ; mais un Christ mort et ressuscité a terminé tout cela pour moi. Ce n’est pas seulement que je crois en Christ et que je connais le pardon de mes péchés par son sang précieux ; la parole de Dieu me donne encore le droit de savoir et de déclarer que, dans la mort de Christ, je suis mort moi-même.

La vertu du sang de l’Agneau pascal était expérimentée en Égypte même, mais la mer Rouge séparait manifestement le peuple du pays de la servitude afin que, racheté et délivré, il soit désormais seulement au Seigneur. Il est donc absolument nécessaire que la marche du chrétien s’effectue dans la pure lumière de la grâce de Dieu. Nous ne sommes pas «sous la loi, mais sous la grâce». Le 6° chapitre des Romains insiste sur ce point. Et c’est là une marche aussi humble que sainte, où la chair ne compte pour rien ; aussi n’y est-il pas dit un mot de la loi, si ce n’est pour déclarer expressément celui qui croit complètement affranchi de sa juridiction. Elle n’est pas faite pour un homme juste, et c’est bien sûrement ce qu’est un croyant. Sa force est contre les injustes : elle s’applique aux méchants qui vivent dans le monde, soit que les hommes lâchent la bride à la chair impure, soit qu’ils se retranchent dans les prétentions religieuses de la chair exaltée. C’est pour de telles personnes qu’est la loi (1 Tim. 1:9). Mais, quant au chrétien, il commence par la mort de sa nature, ce qui est le sens du baptême chrétien. Ce qui est si terrible pour le coeur naturel, la mort, devient pour le chrétien sa bénédiction. Mais c’est dans la mort de Christ qu’il est un homme mort devant Dieu, mort à tout ce en quoi il vivait auparavant. Et maintenant il jouit, comme faisant partie de la grâce de Dieu à son égard, du privilège de se tenir pour mort au péché et vivant à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur.

Voilà un des privilèges auxquels l’Esprit Saint applique la mort et la résurrection de Christ ; et à ce privilège se rattache une grave responsabilité. Remarquons encore qu’il ne s’agit pas de nos péchés, ni de la grâce de Dieu qui nous en purifie dans le sang de Christ. Le péché comme tel, la nature charnelle, trouve son juste sort, sa fin en condamnation, dans la mort de Christ qui, ressuscité, communique une vie nouvelle, une nature spirituelle, dans la puissance de Sa résurrection. Cet Homme est mon Sauveur et cette nouvelle nature devient ma part dans la nouvelle création ; car, «si quelqu’un est en Christ, c’est une nouvelle création : les choses vieilles sont passées ; voici, toutes choses sont faites nouvelles». La deuxième épître aux Corinthiens peut développer cette doctrine, car elle s’occupe de la gloire de Christ et non pas seulement de la justice de Dieu comme base du salut, ce qui est le sujet de l’épître aux Romains.

2.3   [Romains 7 — La loi de Dieu — le chrétien mort à la loi]

Le chapitre 7 de cette épître traite la question de la loi. Bien que ce ne soit pas à proprement parler notre sujet, remarquons que nous trouvons ici, de la part de Dieu, une aussi pleine délivrance de cette difficulté-là que de celle dont traite le chapitre 6 par rapport au péché. «C’est pourquoi, mes frères», dit l’apôtre, «vous aussi, vous avez été mis à mort à la loi par le corps du Christ». Que signifie cette expression : «le corps du Christ» ? Personne ne l’emploierait pour décrire la vie de Christ ici-bas. Mais appliquez-la à sa mort et tout devient simple. «Vous aussi, vous avez été mis à mort à la loi par le corps du Christ, pour être à un autre». Est-ce comme à Celui dont le sang a été versé pour vous ? Non pas ; mais comme à Celui «qui est ressuscité d’entre les morts, afin que nous portions du fruit pour Dieu. Car, quand nous étions dans la chair...», continue l’apôtre, preuve que nous n’y sommes plus maintenant. Et c’est là ce qu’il nous faut. Mais ceux qui insistent sur la loi comme règle de vie du chrétien, lorsqu’ils font allusion à cette expression de l’apôtre, «vous n’êtes pas dans la chair», lui prêtent un sens erroné ; ils entendent par là notre ancienne condition d’inconvertis. En réalité cette expression va plus loin. Quelle est, en effet, l’expérience que nous présente le Saint Esprit à la fin du chapitre ? Celle d’un homme misérable, mais évidemment converti. Il lui a été donné de revenir à Dieu ; il déteste le péché, pourtant il y tombe toujours. Il aime la sainteté, mais jamais il n’y atteint. Ses sentiments sont droits ; mais, pour faire le bien ou éviter le mal, aucun effort ne lui réussit. Le mal est présent ; le bien semble toujours lui échapper. Telle est l’expérience de son coeur ; je ne parle pas de sa vie extérieure ; car ce n’est pas là la question, c’est quelque chose de bien plus profond. Il peut n’y avoir aucun péché manifeste, mais le péché est tristement à l’oeuvre au-dedans de lui.

Ce que l’apôtre rapporte ici à lui-même, comme pour se l’appliquer, c’est l’amertume d’une âme qui pensait n’avoir plus que bénédiction, et qui pourtant ne s’est jamais trouvée aussi malheureuse dans sa vie. Avant d’être régénéré, cet homme aurait pu goûter les plaisirs du monde qui ne donnent pas de vraie satisfaction. Maintenant il a tourné le dos au monde et la face vers Dieu ; et pourtant jamais il n’a connu une si grande misère, au point qu’il finit par pousser ce cri de douleur : «Misérable homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ?» Dès lors l’obscurité disparaît, la lumière se fait et apporte le calme et la sérénité. C’est donc l’expérience d’une âme qui avait connu Christ comme son espérance, une âme née de Dieu, et n’ayant néanmoins aucun sentiment de délivrance. Dieu lui laisse sentir son mal propre, intérieur, jusqu’à ce qu’elle regarde tout à fait hors d’elle-même à Christ, comme son libérateur, non seulement de la condamnation et de la colère, mais «de ce corps de mort».

Ce ne sont pas tant ses péchés, c’est le péché qui tourmente cette âme et cela d’autant plus que sa conscience est devenue plus sensible à ce qui est dû à Dieu. Mais ne connaissant suffisamment ni la grâce, ni la rédemption, ni Dieu, ni son propre coeur, elle est dans le plus grand désarroi jusqu’à ce qu’elle apprenne la réalité, la nature et l’étendue de la liberté en Christ. Aussi c’est précisément à cette angoisse et à cette perplexité que le Saint Esprit fournit la réponse au chapitre 8. Il commence par m’apprendre la portée de la délivrance que Dieu dans son amour a déjà assurée à mon âme. Il m’apprend que, plus tard, une délivrance aussi entière interviendra pour mon corps mortel. Ainsi donc la parfaite délivrance déjà accomplie en grâce, devient le gage de tout ce qui suit dans la gloire. Si, en parlant de ce que Dieu donne maintenant, je me sers du mot «partiel», c’est simplement en raison de la coexistence du corps et de l’âme. Pour tout ce qui regarde l’âme, la délivrance est parfaite, mais elle ne l’est pas pour le corps ; elle est accomplie pour l’homme intérieur, non encore pour l’homme extérieur.

2.4   [Romains 8 — En Christ]

2.4.1        [La délivrance en Christ]

C’est ce que l’apôtre nous présente dans les premiers versets du chapitre 8 des Romains : «Il n’y a donc maintenant aucune condamnation», proclame-t-il, parce qu’il n’envisage que Christ ; il «est» et se repose en Lui seul. Telle est la première et bienheureuse réponse à l’âme qui confesse sa misère et réclame un libérateur. Réveillé pour sentir que ce n’est pas le pardon seul qu’il lui faut, mais bien d’être délivré de soi-même, l’homme découvre que cette délivrance est dans Un Autre. Il s’était imaginé jusque-là qu’ayant obtenu le pardon en Christ, il lui fallait se délivrer par l’opération intérieure de l’Esprit de Dieu. Mais au moment même où son secours lui était le plus nécessaire, il a appris que l’Esprit Saint, non seulement ne l’aidait pas, mais le rendait profondément misérable. La raison en est claire : en fait il s’était placé sous la loi. Et le Saint Esprit — précisément parce qu’il est l’Esprit de Dieu descendu pour glorifier Christ — ne donnera jamais la puissance à l’homme tant que celui-ci cherchera à mettre la loi à la place de Christ ; au contraire, il lui fera éprouver son impuissance totale. Le Saint Esprit est descendu du ciel sur la terre pour glorifier le Seigneur et non pas la loi.

C’est dans les gémissements que le croyant du chapitre 7 avait appris l’impossibilité de se délivrer lui-même. Réduit à se tourner vers le Libérateur, la conclusion qu’il en tire c’est qu’«il n’y a donc maintenant aucune condamnation» — non pas pour ceux pour lesquels Christ mourut — mais «pour ceux qui sont dans le Christ Jésus». Nous sommes maintenant par grâce établis dans un Autre : Christ ressuscité. Voilà ce qui détermine notre condition devant Dieu. Rien ne peut être plus béni. La comparaison suivante pourra aider à s’en faire une faible idée. Prenez un homme noble, dont les sentiments sont à la hauteur de sa situation sociale. Il fait choix d’une femme et il lui plait de la prendre dans un milieu tenu pour indigne. Qu’en résulte-t-il ? Celle qu’il a choisie et qui devient sa femme acquiert de ce fait, publiquement, l’état propre à son mari, et tous les antécédents, la misère, l’humiliation disparaissent entièrement. Aux yeux de tous la femme prend un nouveau nom, celui de son mari ; le sien propre est à jamais abandonné. Il en est de même pour ceux qui sont dans le Christ Jésus. Quelle est leur place ? Là où Lui se trouve. Ma position ne peut être celle de Jésus marchant sur la terre. En tant qu’exemple parfait nous sommes invités à le suivre, mais il «demeure seul». S’il n’y avait eu que sa vie, j’aurais été à jamais exclu. Mais Christ est mort, bien plus, il est ressuscité, il peut me donner son Esprit. Sa mort a agi de deux manières à l’égard du mal : les péchés ne sont plus, mais aussi la nature même est jugée, saintement et justement. Dès lors, Dieu peut révéler la nature nouvelle qu’il a donnée, et conférer une position correspondante.

Christ ressuscité est le seul chef de la famille de Dieu (à l’exception de l’allusion au «seul corps en Christ» que nous trouvons en 12:5), l’épître aux Romains ne va pas au-delà de la famille). Or ici je trouve la demeure et la condition de cette famille devant Dieu, comme résultat de la mort et de la résurrection de Christ. «Me voici, moi, et les enfants que Dieu m’a donnés», déclare Jésus ressuscité (Héb. 2:13). La grâce fait participer la famille tout entière à l’état même de Christ. Et quel en est le résultat pour eux ? «Aucune condamnation». Christ avait souffert pour le chrétien, et maintenant qu’Il est ressuscité, le chrétien, pour ainsi dire, fait partie de la justice de Dieu, ainsi que 2 Corinthiens 5:21 l’affirme avec plus de force encore. Comment Dieu pourrait-il, en justice, exiger une seconde fois le paiement de la même dette ? Et désormais Christ est entré dans cette position où il pouvait avoir avec Lui ses rachetés, identifiés avec sa propre bénédiction devant Dieu, bénédiction caractérisée par le fait qu’il n’y a «aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus».

2.4.2        [La loi de l’Esprit de vie en Christ m’a affranchi]

Et puis vient la raison : ce que l’apôtre appelle «la loi de l’Esprit de vie». Remarquons bien que le sang de Christ n’est pas tout ce dont nous avons besoin. Si efficace qu’il soit pour faire disparaître les conséquences de notre ancienne condition, ce n’est pas ce sang qui nous donne une position nouvelle devant Dieu. Certes, sans son précieux sang, je ne pourrais jamais entrer dans cette condition nouvelle. Mais ce qu’il me faut ce n’est pas seulement le sang qui nettoie les péchés de ma vie passée, mais encore l’affranchissement complet hors de l’ancienne condition et une place sainte, sûre et joyeuse dans la création nouvelle. Et qu’est-ce qui peut produire cela ? Christ mort et ressuscité. De même que c’est lui qui a été la parfaite propitiation pour les péchés ; qui, plus que cela, fut jugé pour le péché ; de même c’est lui qui est le Modèle béni et la puissance du nouvel état en résurrection. Il est le chef et la source de toute la bénédiction. Voilà pourquoi lorsqu’il fut ressuscité des morts, après avoir, au prix de son sang, acquis les bénédictions les plus chères et les plus hautes, il souffla en ses disciples : sa personne adorée en accorde le signe. Le jugement était tombé sur Christ au lieu de tomber sur nous ; le péché était aboli, la mort vaincue ; rien ne peut affecter la vie nouvelle qui est en Christ. Ce n’est pas qu’un chrétien ne puisse tomber dans le péché, comme il peut aussi mourir. Mais ce n’est pas parce qu’il possède la vie nouvelle qu’il pèche ou qu’il meurt. Il pèche, parce qu’il a cédé à la vieille nature ; il meurt, parce qu’il plaît à Dieu que Jésus ne vienne pas encore. La vie que le chrétien obtient de Jésus ne pèche, ni ne meurt. C’est une vie sainte, au sujet de laquelle Dieu peut déclarer : «Quiconque est né de Dieu ne pratique pas le péché» (1 Jean 3:9). De même, quant à la nature nouvelle, le chrétien ne meurt pas, puisqu’il n’a rien moins que la vie éternelle du Christ. Mais répétons que toute cette délivrance n’est au profit que de l’homme intérieur. Quant à l’âme, la réconciliation est complète ; mais pour ce qui regarde le reste de notre être, elle n’est que partielle. Et Dieu ne se contentera jamais de ce qui n’atteint pas à ses propres conseils. Il se propose de nous affranchir complètement, et cet affranchissement sera digne de Lui-même, du Saint Esprit, de Christ et de sa rédemption.

Plus loin, l’apôtre donne la raison pour laquelle la loi de l’Esprit de vie en Christ a affranchi le chrétien de la loi du péché et de la mort. Il dit : «Ce qui était impossible à la loi, en ce qu’elle était faible par la chair», Dieu l’a fait. Remarquez que la loi et la chair vont naturellement ensemble : la loi, dit l’apôtre, était faible par la chair. Pour répondre à cette impuissance, Dieu a envoyé son propre Fils en ressemblance de chair de péché. Né de femme, mais par puissance surnaturelle, cet Être béni n’a pas refusé de se trouver dans un monde souillé par le péché. Il n’est venu qu’«en ressemblance de chair de péché», et pourtant il est véritablement né dans le monde ; condition nécessaire pour qu’il participe à la nature humaine. Celui qui était Fils de Dieu devient homme aussi véritablement qu’il était Dieu de toute éternité, et meurt dans la nature qu’il avait prise, meurt pour l’homme, meurt pour glorifier Dieu quant aux péchés de l’homme ; plus encore, il meurt non seulement pour les péchés, mais pour le péché. Dieu a «envoyé son propre Fils en ressemblance de chair de péché, et pour le péché». Ce n’est pas seulement d’une accumulation de péchés mais de la nature même qu’il est ici question. Le pardon de mes péchés m’est indispensable et je le possède ; mais comment pourrais-je désirer que Dieu pardonne à ma mauvaise nature ? Je ne lui pardonne pas moi-même ! Non, ce qu’il me faut, c’est que cette nature soit condamnée et que moi je sois affranchi. Et c’est là exactement le caractère du nouvel état dans lequel Christ nous introduit et nous place devant Dieu. Quant à l’âme, c’est la liberté parfaite ; la délivrance, non seulement de ce que j’ai fait, mais de ce que je suis. De sorte que, comme chrétien, je n’ai plus affaire avec la responsabilité qui s’attache à l’homme mortel ; je suis déjà passé à un état nouveau, lors même que je suis encore dans le monde. Avant de quitter les choses d’ici-bas, j’ai déjà acquis par grâce une relation nouvelle envers Dieu. Et Celui qui proclame cette relation, qui l’établit, qui en est le modèle, c’est Jésus dans la présence de Dieu. Telle est, en vertu de la rédemption, la place du croyant ; et elle appartient à tous les chrétiens.

2.4.3        [Les états de Romains 7 et 8 sont incompatibles]

La question sérieuse est de savoir si nous occupons cette place réellement et d’une manière consciente. Selon l’Écriture, nul ne peut douter que Dieu n’ait véritablement destiné cette position aux siens. Mais la foi devrait y entrer dès à présent, la réaliser en regardant à Christ. C’est se tromper soi-même et se méprendre sérieusement sur la parole de Dieu, que de supposer que l’homme puisse au même instant être engagé dans la lutte entre le mal et le bien, décrite au dernier verset de Romains 7, et jouir de la liberté de Romains 8. Un homme peut-il être au même instant esclave et libre ? Ce sont deux états qui se contredisent et s’excluent mutuellement. Personne ne peut être à la fois misérable et heureux, à la fois «affranchi de la loi du péché et de la mort» et «charnel», «vendu au péché». Mais après avoir été «misérable», on peut dire : «Je rends grâces à Dieu».

On peut être accablé sous des épreuves répétées, tout en jouissant de la paix dans le Saint Esprit ; on peut avoir la paix avec Dieu et souffrir pourtant profondément à cause de l’état du monde et de celui du peuple de Dieu. Cette douleur pleine de grâce pesait sur notre bien-aimé Sauveur ici-bas, et provoquait ses soupirs. Or nous pouvons et devons connaître la communion de ses souffrances. Mais ces soupirs n’étaient pas ceux de quelqu’un à qui manquait la paix de Dieu. La communion ininterrompue est précisément ce que posséda sans cesse le Seigneur Jésus dans les jours de sa chair. Ne dit-Il pas, en effet : «Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix» ? Eh bien, cette paix est maintenant notre part. Elle a été faite par son sang, établie pour nous dans la puissance de sa résurrection ; mais nous n’en jouissons qu’après avoir laissé derrière nous les tourments décrits dans le chapitre 7. Hélas, combien d’âmes vivifiées s’attachent encore à la loi et se font un devoir de travailler comme des galériens à la rame de cet amer esclavage, alors que Dieu les appelle à la liberté du Christ ! Elles ne sont pas mortes à la loi. La mort de Christ nous place absolument en dehors de cette condition-là. Si un homme emprisonné pour ses dettes vient à mourir, la justice ne peut plus rien exiger de lui. Tant qu’il est en vie, la loi s’applique à lui ; mais que la mort survienne, et il est impossible dès lors que la justice le retienne. Pour le chrétien, il en est précisément de même.

Certains traitent tout cela de mysticisme. Sans doute est-ce dans un style figuré que l’apôtre nous parle, mais c’est pour rendre plus expressive une bienheureuse réalité. Ceux qui n’y croient pas en toute simplicité se privent de la certitude et de la puissance qui en découlent. Prendre la loi comme règle de vie, c’est éprouver aussitôt son esclavage. La loi est la force du péché et non de la sainteté. C’est la défaite qui en est la fin, non la victoire. Ce n’est jamais ainsi qu’on trouve la force ; celle-ci est le fruit de la grâce et non pas de la loi. Quand une âme est ainsi sous la loi, plus le Saint Esprit agit sur la conscience, et plus cette âme est malheureuse ; il s’ensuit que ce sont souvent les plus consciencieux qui en sont là. Osera-t-on affirmer que c’est là ce que Dieu veut ? Est-ce bien son oeuvre qu’un chrétien pieux et consciencieux demeure privé d’une joie paisible et du repos en Christ ? Qu’est-ce qui explique un état si étrange, sinon le fait que l’âme n’a jamais compris la condition de mort à la loi dans laquelle Christ voulait l’établir ?

La mort au péché par la mort de Christ est une vérité essentielle du christianisme. Celui qui borne l’évangile au pardon par le moyen du sang de Christ, qui, dans l’oeuvre de Jésus, n’admet rien de plus que sa mort pour les péchés, celui-là n’a pas saisi le côté positif du christianisme. Savoir que toutes mes oeuvres mauvaises et ma culpabilité sont entièrement effacées est une immense bénédiction de la part de Dieu ; mais cela tout seul est comparativement négatif, et explique pourquoi tant d’enfants de Dieu s’acharnent à établir un terrain positif de justice à partir de la vie de Christ prise pour modèle. Or le côté positif existe aussi bien que le côté négatif ; seulement il se trouve au-delà de la croix, dans la résurrection — et non pas sous la loi, avant la mort de Christ.

Ainsi le chrétien apprendra qu’il a besoin de tout ce que Dieu lui a donné — y compris cette précieuse vérité. Être mort à la loi est une partie essentielle de la bénédiction du chrétien. L’ignorer, c’est méconnaître tout le côté positif du christianisme révélé dans les Romains depuis le verset 12 du chapitre 5 jusqu’au chapitre 8. Je ne parle même pas des épîtres aux Colossiens et aux Éphésiens, épîtres qu’on ne doit jamais s’attendre à voir comprises par ceux qui se retranchent sur le terrain de la loi. Je limite mon sujet à ce dont le chrétien a besoin pour la liberté et l’affermissement de son âme. Remarquez que, jusqu’à ce que nous en soyons arrivés là, il n’est pas question de victoire ni d’être «plus que vainqueurs», la joie et les soupirs de l’Esprit, ce travail intime de Dieu dans l’âme, sont absents jusqu’à ce qu’on soit solidement affermi sur le terrain précieux où nous placent la mort et la résurrection du Seigneur Jésus Christ. Que Dieu garde ses enfants d’abandonner ce qu’il a fait et déclaré pour leur délivrance et pour la victoire pratique ! L’Écriture est bien claire : comme toujours l’obscurité et les difficultés viennent d’ailleurs : de ce que le coeur recule devant une condamnation de la nature sous toutes ses formes.

2.5   [Est-ce encore réalisable ?]

Les jours sont-ils mauvais ? Raison de plus pour tenir ferme ! Que trouvons-nous dans la 2° épître de Pierre et dans celle de Jude, deux portions de la parole de Dieu qui ont particulièrement en vue un jour de déclin, de méchanceté croissante, et même d’apostasie ? Que les saints sont abandonnés au déclin comme à une chose inévitable ? Point du tout ! C’est dans ces épîtres-là plus que dans toutes les autres que nous sommes exhortés à croître et à avancer dans la vérité de Dieu. Telles sont les ressources de la grâce pour un jour de ténèbres de plus en plus profondes. Considérons, chers amis, comme l’oeuvre de l’Ennemi tout ce qui contribue à affaiblir, à effacer une vérité à la fois si simple et si fondamentale se rattachant même à notre baptême.

2.6   [3 catégories d’hommes : spirituels, charnels, naturels]

Comment donc décrire cette position nouvelle où le Seigneur Jésus place le chrétien ? Selon le Nouveau Testament, il n’y a pas deux, mais bien trois conditions dans lesquelles l’homme peut se trouver. J’y insiste car c’est une question de foi aussi bien que de pratique. Il n’est pas vrai que, si l’on n’est pas un homme spirituel, on doive nécessairement être un homme naturel. Ce dernier état est évidemment celui de quelqu’un dont les péchés ne sont pas encore remis — qui est simplement enfant d’Adam, sans rien posséder d’autre que la nature déchue.

Quand une telle âme est convertie par la grâce de Dieu, elle reçoit une nouvelle nature, et, sur le pied de la rédemption, elle est amenée à Dieu. Mais tout homme ainsi réconcilié avec Dieu n’est pas nécessairement un homme spirituel. Ceux qui sont spirituels (ou parfaits selon Philippiens 3:15 et d’autres passages) sont ceux qui ne sont pas «dans la chair, mais dans l’Esprit», comme s’exprime l’apôtre Paul.

Parlant aux saints de Corinthe, malgré la gravité de leurs fautes, l’apôtre ne leur dit pas qu’ils sont des hommes naturels. Il pose ce principe : «l’homme animal (ou naturel : Jude 19 note) ne reçoit pas les choses qui sont de l’Esprit de Dieu». Ce n’est nullement ainsi qu’il désigne les saints ; mais il leur parle comme à de petits enfants non encore parvenus à la maturité spirituelle, en sorte qu’au lieu de pouvoir les entretenir des choses profondes de Dieu, il est contraint de les nourrir du lait qui convient à leur état. Et qu’étaient-ils donc ? «Des hommes charnels». Il s’ensuit que les hommes sont ou naturels ou charnels ou spirituels. C’est là une vérité bien humiliante. On comprend facilement que les hommes ne l’aiment pas ; ils craignent, si les croyants peuvent être charnels, sans être des hommes naturels, qu’on ne les estime pas, eux, comme spirituels. Faites allusion à une action du Saint Esprit qui soit distincte de la nouvelle naissance, et ces personnes-là dressent l’oreille. Elles refusent d’entendre parler de ses opérations qui sont distinctement chrétiennes, comme si l’assertion de privilèges si brillants devait les priver de ce qu’ils ne possèdent pas au lieu de leur faire sentir le manque de ce qu’ils devraient posséder. N’est-ce pas là le moyen de rectifier le mal, et d’obtenir de Dieu qu’il supplée à ce qui fait défaut ?

2.7   [Les causes de retard spirituel]

2.7.1        [Erreurs diverses]

Eh bien, il y a plusieurs causes qui retardent le progrès spirituel du croyant. La première est qu’il n’ait pas encore la conviction intime que, dans sa chair, il n’existe absolument que le mal, ni la foi que la chair a été complètement jugée dans la mort de Christ. Un tel chrétien ne peut vraiment être considéré comme spirituel, tout en ayant peut-être un sentiment bien profond de l’amour de Christ. Mais une autre difficulté peut se présenter : non plus la loi, mais la sagesse de la chair. Attribuer de la valeur aux pensées de l’homme, admirer ses capacités, se laisser influencer par la philosophie de ce monde, sous une forme ou sous une autre, c’est également être charnel. Ceux qui sont spirituels manifestent les caractères moraux du second homme ; et, quant au premier, ils désirent non le cultiver, mais le mortifier. Loin d’admirer la chair, le chrétien spirituel la traite en chose morte, en sorte qu’il reçoit de Dieu la puissance d’échapper à cette emprise de la gloire de l’homme.

2.7.2        [L’attrait du monde]

Le piège dans lequel Satan cherche toujours à entraîner les enfants de Dieu, c’est de leur faire croire qu’ils peuvent saisir d’une main les privilèges chrétiens tout en retenant fermement de l’autre ce qu’ils souhaitent des aises de ce monde. Il est clair que le coeur et la conscience du croyant doivent repousser de telles pensées et un tel comportement. Du reste, le monde lui-même le comprend : qu’un enfant de Dieu soit découvert là où il ne devrait pas être, les autres exprimeront leur étonnement qu’un chrétien puisse se trouver là. N’est-ce pas profondément humiliant pour un chrétien d’étonner le monde de cette manière-là ? — se permettant, lui, une liberté qui, d’après le sentiment des hommes en général, convient si peu au nom de son Maître ? Le monde sait apprécier une conduite conséquente. Il peut inciter le chrétien à le suivre dans ses occupations et ses plaisirs ; il peut souligner le rôle social et exemplaire que le chrétien pourrait remplir utilement en aidant à bien diriger le monde, en siégeant dans ses sénats, dans ses tribunaux, et en exerçant l’autorité dans toutes les sphères imaginables. Or, sans aucun doute, il est fort agréable à la chair de participer à la dignité et au pouvoir ! Mais n’est-ce pas précisément ce que Christ a formellement interdit aux siens aussi bien par l’esprit de son enseignement que par son exemple ? Il est mort et ressuscité afin de nous retirer de ce présent siècle mauvais. Au milieu de notre humble sort, sa grâce peut nous rendre heureux et contents des circonstances, quelles qu’elles soient, qu’il a plu à Dieu de nous départir. Dans un monde tel que celui-ci, puissions-nous estimer Christ à un tel prix, et jouir si pleinement de la place que Dieu nous a faite en Christ, que nous ne soupirions qu’après Sa volonté et Sa gloire.

2.7.3        [La loi — les bonnes résolutions qu’on ne tient pas]

En troisième lieu, nous l’avons vu, aussi longtemps qu’un homme travaille et lutte sous la loi, livré à ses propres forces, il est toujours faible à cause de la chair. Il prend des résolutions qu’il n’est pas capable de tenir ; il fait des efforts considérables, mais au bout de chaque journée, il est contraint de reconnaître que ce qu’il voulait, il ne le fait pas, et ce qu’il ne voulait pas, il le fait. Il passe ainsi son temps à se repentir et à pécher, à pécher et à se repentir. Telle est la condition invariable d’un homme sous la loi. Mais est-ce celle du chrétien ? L’état de bien des enfants de Dieu y ressemble en fait, mais c’est entièrement anormal et contraire à ce que suppose l’Écriture chez tous les rachetés du Seigneur. En faisant valoir que ce n’est pas là une condition chrétienne, je ne prétends pas qu’aucun chrétien ne puisse s’y trouver, mais seulement que cet état est tout l’opposé de ce que notre Dieu nous accorde et de ce qu’Il attend de nous. Un enfant de Dieu peut être dans un état qui ne répond pas à la grâce qui lui a été témoignée. Mais quelle intention de Dieu se discerne dans toutes les épîtres ? Il veut que, par le moyen du Saint Esprit agissant par la Parole, je m’empare de la place qu’il m’a donnée, de manière à m’établir dans une paix stable et dans la joie véritable du coeur. Pour le témoignage pratique, cela est de la plus haute importance. En tant que vase du Saint Esprit, Dieu veut que je sois toujours occupé à rendre témoignage à Christ dans ce misérable monde. Voilà la raison principale de tant de bénédictions octroyées par la grâce, grâce qui veut que nous les connaissions et que nous en jouissions pleinement.

2.8   [La position «dans l’Esprit» : l’Esprit habite dans le croyant]

Ce qui précède explique ce que c’est qu’être «dans l’Esprit», position qui est à la fois la conséquence et la preuve du fait que le Saint Esprit habite en nous. Ce n’est pas l’Esprit agissant sur l’âme pour y produire la foi ; c’est l’Esprit habitant en celui qui croit. «Vous n’êtes pas dans la chair, mais dans l’Esprit, si du moins l’Esprit de Dieu habite en vous ; mais si quelqu’un n’a pas l’Esprit de Christ, celui-là n’est pas de lui» (v. 9). C’est là ce qui caractérise celui qui est de Christ. Sans Son Esprit, on n’est pas revêtu de l’empreinte de son caractère essentiel. C’est le Saint Esprit, et non seulement la nature humaine, qui distingua Christ dès sa conception ; de même, au temps convenable, il fut scellé par l’Esprit, et jamais il n’agit que «dans l’Esprit». Il en est ainsi du chrétien. De même qu’il vit par l’Esprit, il est appelé désormais à marcher par l’Esprit. Il ne s’agit pas de ne pas être perdu, — ce n’est pas là la force de l’expression du verset 9 (fin) du chapitre 8 — mais bien d’être distinctement de Christ, même ici-bas. «Mais si Christ est en vous, le corps est bien mort à cause du péché, mais l’Esprit est vie à cause de la justice».

L’homme qui est converti mais tourmenté sous la loi n’a aucun sentiment d’une telle position, aucun pouvoir de tenir le corps pour mort. Tant qu’il est dans cet état, l’Esprit lui donne la conviction du péché, et non pas la force de glorifier Dieu en paix. Mais qu’il accepte simplement la condamnation de Dieu sur la chair, trouvant en Christ une entière délivrance, aussitôt l’Esprit le fortifie intérieurement. Non seulement il est affranchi, mais il peut encore user de sa liberté en puissance pratique. Il y a plus encore : «Et si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ d’entre les morts vivifiera vos corps mortels aussi, à cause de son Esprit qui habite en vous» (v. 11). C’est là la pleine délivrance garantie même pour le corps, et la réponse complète à la question soulevée dans la détresse du chapitre 7, verset 24.

Ainsi donc, l’Esprit Saint qui rend témoignage de la rédemption n’assure pas seulement mon état présent en Christ mort et ressuscité devant Dieu ; tandis que je regarde à Christ, il est encore le gage divin que ce corps mortel sera pénétré de cette vie dont je jouis déjà dans mon âme. Car ce n’est pas seulement comme Fils de Dieu que j’envisage Christ, mais comme ressuscité selon la justice et par la gloire du Père. En grâce, il descendit et mourut ; désormais il est ressuscité en justice et assis à la droite de Dieu. Et nous jouissons pleinement des justes et glorieuses conséquences de l’oeuvre infinie qu’il accomplit en grâce. Jadis esclaves du péché et de Satan, nous qui maintenant croyons en lui sommes affranchis par Dieu selon la liberté même de Christ — pour l’âme d’abord, puis pour le corps quand Lui-même viendra nous réveiller. L’Esprit est le sceau de l’une de ces deux parties de notre bénédiction et les arrhes de l’autre.

Christ est-il ma portion ? C’est lui-même qui détermine l’étendue de la justification. Elle est réellement aussi parfaite que Christ devant Dieu. Quelle mesure devant Dieu que Christ lui-même ! C’est pourquoi il est déclaré que «nous sommes devenus justice de Dieu en Lui».

Avec cette justice pour base, l’Esprit Saint vient dès maintenant non seulement agir mais habiter en moi ; de là, il anticipe le jour radieux de la gloire, et, en attendant, me donne la puissance dans la mesure même où je tiens pour morte la vieille nature et fais de Christ mon tout. Voilà donc la réponse complète pour celui qui crie après un Libérateur. L’âme est d’abord émancipée ; plus tard, le corps aussi sera vivifié. En attendant, l’Esprit Saint prend sa place bénie, non seulement par rapport à l’âme, mais aussi par rapport au corps. Lorsque aura lieu, bientôt, la résurrection du croyant, elle ne s’effectuera pas sans le Saint Esprit. C’est le Fils qui donne la vie, mais il le fait par l’Esprit qui a sa part dans toutes les parties de la bénédiction que reçoivent l’âme et le corps. Qu’il est doux, qu’il est glorieux de posséder ainsi l’Esprit de Dieu s’identifiant avec chaque partie de la bénédiction ! Combien il est grave d’attrister le Saint Esprit de Dieu par lequel nous avons «été scellés pour le jour de la rédemption» ! Mais ce n’est pas tout ! Assurément le Saint Esprit n’a pas encore ressuscité nos corps mortels ; néanmoins il opère en nous déjà, inspirant le cri : «Abba, Père». C’est là l’action première, l’action propre du Saint Esprit quand le croyant a bien compris la délivrance. Elle oriente l’âme vers Dieu, et elle est l’action de l’Esprit comme Esprit filial ou d’adoption. Ce n’est donc pas dans la bénédiction seule que l’âme se réjouit, mais dans la source d’où elle a découlé : aussi l’expression est-elle bien : «Abba, Père».

Et ce n’est pas seulement de cette manière qu’opère le même Esprit qui habite en nous. Il donne la certitude que nous serons bientôt délivrés ; bien plus : Il soupire en nous ; et ce sont «des soupirs inexprimables». Ce n’est pas parce que je ne suis pas affranchi que l’Esprit de Dieu pousse ces soupirs, mais justement parce que je le suis. Il est vrai que je ne suis délivré encore qu’en partie. Si l’Esprit soupire en moi, c’est parce que, affranchi dans mon âme, je sens l’état contraire de mon être extérieur et de tout ce qui m’entoure (conflit qui auparavant ne m’était pas sensible). Et mon coeur envisage le jour où la création même sera affranchie de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. La liberté de la grâce de Dieu, je la possède déjà ; la liberté de la gloire, pour le corps même, sera à moi tout à l’heure. Notre place bénie est celle que prend l’Esprit en tant que Personne, distincte de la nouvelle nature. Mais en même temps le Saint Esprit donne son nom, pour ainsi dire, à la condition dans laquelle je suis introduit comme âme affranchie, comme chrétien, en vertu de la mort et de la résurrection de Christ ; et ainsi je suis dans l’Esprit en même temps que l’Esprit habite en moi.

Il n’est pas possible dans cette courte esquisse d’envisager toutes les applications d’une aussi grande vérité. Mon propos était principalement de traiter la question, généralement peu comprise, de l’Esprit comme condition dans laquelle nous nous trouvons à présent. La vérité qui nous est la plus familière est probablement celle de l’Esprit de Dieu habitant en nous. Mais celle que nous avons considérée n’est pas de moindre importance et elle a pour la pratique de notre vie chrétienne d’incalculables conséquences.

 

3                        Méditation 8    «Baptisés d’un seul Esprit pour être un seul Corps»    1 Corinthiens 12:13

Je me propose maintenant de parler de quelques-uns des puissants effets de la présence du Saint Esprit. L’un de ces effets est ici désigné comme son baptême, par lequel il forme un corps nouveau et uni : le corps de Christ sur la terre. Non seulement cette vérité appartient exclusivement au Nouveau Testament, mais, même dans le Nouveau Testament, sa révélation pour nous en est confiée à un seul apôtre. On ne la trouve que dans les écrits de Paul. Je ne prétends pas que l’Église, le corps de Christ, n’existait pas avant que Dieu ait suscité cet apôtre pour faire connaître cette grande vérité. Mais tandis que le mystère de Christ et de l’Église fut révélé par l’Esprit aux saints apôtres et prophètes, il ne fut annoncé que par un seul d’entre eux.

3.1   [La préparation de Paul en vue de ses écrits]

Or l’histoire de Paul, telle que l’Écriture nous la présente, montre combien il était propre pour l’oeuvre que Dieu lui confiait. Il avait été ennemi tant que le témoignage de Christ glorifié en haut était limité au peuple juif. Il fut un témoin consentant du martyre d’Étienne, l’émissaire actif des Juifs dans la persécution des croyants non seulement à Jérusalem mais de ville en ville. Et dans l’ardeur de la haine qu’il portait au nom de Jésus, il avait reçu des lettres des plus hautes autorités religieuses, afin de poursuivre implacablement les chrétiens sous le couvert de la religion. C’était un moment où les voies de Dieu envers la terre prenaient un autre cours. La bénédiction ne descend plus vers Jérusalem, mais en découle. Tout ce qui constituait alors la vraie gloire est foulé aux pieds ou dispersé. L’Esprit de Dieu regarde, pour ainsi dire, en dehors ; il bénit les anciens ennemis de Jérusalem. Non seulement il opère parmi les Samaritains (et nous savons leur jalousie à l’égard de Jérusalem), mais même envers un étranger venu d’un pays lointain. L’eunuque éthiopien est recherché par le Seigneur qui le rencontre en grâce en dépit de sa complète ignorance, et le renvoie son chemin tout joyeux, non pas montant à Jérusalem, mais s’en éloignant vers sa demeure lointaine.

C’est à ce moment critique qu’il plaît à Dieu d’appeler Saul de Tarse sur son chemin vers Damas. Lui aussi s’éloignait de Jérusalem, plein de fureur persécutrice contre ceux qui confessaient le nom de Jésus. Plongé dans les ténèbres quant à la véritable grâce de Dieu et pourtant avec bonne conscience, il poursuit la mission de douleur, de honte et de mort dont l’avaient chargé les chefs religieux poussés par Satan. Le voici soudainement renversé par une lumière plus brillante que le soleil en plein midi ; aveuglé et en même temps rendu capable de voir surnaturellement le Seigneur de gloire et d’entendre sa voix. Il est appelé non seulement comme saint, mais aussi comme apôtre : invité non pas simplement à goûter la grâce dont il devait être un témoin si remarquable, mais à servir dans le ministère, avec l’autorité du Seigneur. Il devient son ambassadeur non seulement pour cette seule journée, mais en tout temps, non seulement pour un peuple, mais pour tous les pays sous le ciel. À cet homme béni fut donnée, dans les paroles mêmes qui convertirent son âme, la substance de la grande vérité qui est l’objet de notre présente méditation. Il apprit, à son grand effroi, de Celui qu’il ne pouvait pas douter être le Seigneur, non seulement qu’il était Jésus — vérité merveilleuse qui confondit son coeur — mais que ce Seigneur glorifié, Jésus de Nazareth, qui avait été crucifié, s’identifiait avec les objets de son implacable persécution : «Je suis Jésus que tu persécutes». L’union de Christ avec ses rachetés, autrement dit l’Église, était ainsi révélée pour la première fois. Et celui à qui était faite cette révélation se trouvait par là qualifié pour la développer dans ses écrits et l’appliquer d’une manière pratique. Son ministère consisterait à poser les fondements de l’Église de Dieu, à insister sur son caractère céleste comme corps de Christ, et à combattre pour la gloire de Dieu en elle. Cela devenait sa vie ; c’est à cela désormais que Dieu l’appelait par Jésus Christ notre Seigneur.

C’est Paul qui, aussitôt après sa conversion, commence à prêcher le Seigneur Jésus, non seulement comme le Christ, mais comme le Fils de Dieu (Actes 9) — autre grand point de ses écrits. Je ne dis pas que cette doctrine soit aussi caractéristique de Paul, ou tout au moins lui appartienne aussi exclusivement que celle du Corps de Christ ; mais je la fais remarquer pour montrer la largeur des voies de Dieu développées par le bienheureux apôtre. Quoique l’Église de Dieu se rattache directement davantage à Christ comme l’Homme exalté, n’oublions pas que Celui qui est l’Homme exalté dans le ciel est le Fils ; et Dieu ne manque pas d’insister sur cette relation de Christ avec lui-même, aussi bien que sur celle dans laquelle le Seigneur se tient pour nous comme homme à sa propre droite. Bref, l’apôtre n’est pas conduit par l’Esprit à insister uniquement sur ce que d’autres ont dit avant lui. Il n’attire pas simplement, comme Pierre, l’attention sur le fait que Jésus a été fait Seigneur et Christ ; il ne parle pas de Lui comme le saint serviteur de Dieu (Actes 3 et 4). Non, Paul prêche immédiatement dans la synagogue que Jésus est le Fils de Dieu. Le Saint Esprit l’a rendu capable de saisir ce qui ne nous est pas déclaré lui avoir été dit sur la route de Damas. Dans ce qui se passa entre Christ et Saul, Dieu ne dirige pas particulièrement notre attention sur le caractère de Fils. Pourtant, les deux grandes vérités de la gloire de Christ, comme Fils et comme Tête céleste, deviennent dès lors son témoignage. Le temps de Le proclamer comme Messie sur la terre était passé, le Seigneur lui-même ayant mis fin à cette prédication avant de quitter ce monde (lire Matt. 16:20 et Luc 9:20 à 22).

Jésus monté au ciel fut fait et Seigneur et Christ. Qu’il soit Seigneur est la confession la plus élémentaire qui puisse être faite parce que c’est simplement reconnaître son autorité, et il est clair que l’autorité, quoique très réelle, est après tout le côté le moins élevé de la vérité en Christ. Elle ne fait pas ressortir sa grâce, elle ne manifeste pas sa gloire infinie. Elle représente ce qu’il fut fait, non ce qu’il était et ce qu’il est en lui-même. Elle n’est donc pas ce qui lui est intrinsèque, mais une place qui lui fut donnée, qu’il revêtit, dans laquelle il a été exalté. L’apôtre Pierre et les autres prêchent cela. Ensuite Étienne le voit d’une autre manière, découvrant tragiquement combien est totalement rejetée (en sa propre personne) la vérité divine quant au Seigneur et Christ exalté. Il rend son témoignage que Jésus n’est plus seulement le Christ exalté dans la position de Seigneur mais le Fils de l’homme dans la gloire debout à la droite de Dieu. Finalement, Paul non seulement entre d’emblée dans la vérité déjà connue, mais il apprend là, au moins en substance, le grand mystère que Christ et les saints qu’il persécutait étaient un ; et il prêche aussitôt Jésus comme le Fils de Dieu.

Ce caractère de Fils de Dieu, bien que ne nous concernant pas aussi directement que les autres, est plus élevé qu’aucune autre de ses gloires, y compris son exaltation à la droite de Dieu. Non pas que nous prétendions comparer et apprécier ce qui touche à une telle personne ou opposer une vérité à l’autre ; mais nous avons à maintenir la vérité entière de la gloire de Christ. Et je suis persuadé que c’est de la manière dont nous sentons et reconnaissons dans nos âmes la vérité de sa gloire personnelle que découle toute puissance pour saisir le reste de la vérité, en jouir et y marcher. À mesure que la vérité de Christ exalté nous sera plus précieuse, la Parole tout entière prendra plus de réalité dans nos coeurs. Inversement tout ce qui peut atténuer, affaiblir, corrompre, détruire la vérité de Dieu, prend naissance dans les vues étroites de l’homme au sujet du Seigneur Jésus. Nous pourrons le vérifier dans ce que nous allons considérer présentement.

3.2   [L’Église, corps de Christ, est la réponse glorieuse à l’abandon de Christ à la croix]

Qu’est-ce en effet que l’Église, sinon le corps même de Christ ? Elle est la réponse, produite sur la terre par le Saint Esprit, à la gloire de cet Homme exalté dans le ciel. Comme corps elle est inséparable de la Tête glorieuse. La plupart des enfants de Dieu n’ayant jamais été exercés quant à cette gloire, la place dans laquelle Christ est entré ne peut que leur être inconnue. La gloire et la bénédiction de l’homme exalté dans le ciel sont aussi faiblement senties que la misère de l’homme maintenant, fût-il le plus grand sur la terre. Même les enfants de Dieu envisagent souvent les choses présentes comme capables de les satisfaire. Ils se croient autorisés à en jouir et en tirer le meilleur parti. N’est-ce pas là faire contribuer autant que possible la vérité et la miséricorde de Dieu aux aises et aux joies terrestres ? Ce qui n’est pour le monde qu’une vaine recherche de plaisir n’a pas, sans doute, ce même caractère pour le chrétien : des pensées spirituelles sont en lui. Mais combien sont peu nombreux cependant les chrétiens qui considèrent ce monde comme une scène jugée et condamnée ! Jusqu’à sa mise à l’épreuve finale, le monde avait été l’objet de témoignages continuels de la part de Dieu. Alors vint le Fils, l’Homme Christ Jésus. Et ce fut la rencontre décisive, si l’on peut parler ainsi, entre Dieu le Père, qui avait donné son Fils, et le monde conduit par la puissance de Satan. Mais Dieu ne voulut pas reculer devant ce qui — nous pouvons bien le dire — était pour Lui l’épreuve infinie, celle de l’abandon de Jésus. Il permit que toute injustice soit faite à celui qu’il aimait par-dessus tout ; et le Fils de Dieu lui-même ne s’épargna aucune douleur, aucune honte dont l’homme pouvait l’accabler. En vérité, c’est pour cela qu’il était venu. Il fallait, selon les voies de Dieu, que le monde manifeste son état de péché comme il ne l’avait jamais fait auparavant ; et c’est ce qu’il fit. Ainsi tout le mal fut mis en évidence afin que Dieu puisse agir d’une manière unique et définitive, afin qu’il puisse en finir par un coup suprême de son jugement, non pas sur le monde, mais sur son Fils ; oui, afin qu’il puisse agir en grâce absolue envers ce pauvre monde. Dès lors tout est changé. Au lieu d’un homme chassé hors d’un jardin, en pleine déchéance au milieu d’un monde sans Dieu, l’homme dans la personne de Jésus entre maintenant dans le ciel même et s’assied sur le trône de Dieu dans la gloire.

C’est seulement lorsque Dieu eut accompli cela qu’un corps a pu être formé sur la terre ; car il fallait qu’il y ait d’abord une Tête suffisante, et une seule personne était digne d’être cette Tête, ce Chef. Or Jésus, cet Être béni, ne pouvait être Tête avant d’être homme aussi bien que Dieu, et plus encore, avant que le péché ait été jugé et que la grâce, en conséquence, puisse avoir son libre cours. Admirons de quelle façon merveilleuse toute la vérité se concentre en Christ, dans sa croix et dans son exaltation à la droite de Dieu. En outre une puissance compétente et suffisante était nécessaire ici-bas. Ce serait le Saint Esprit, Agent divin habituel des voies de Dieu sur la terre, mais agissant d’une manière nouvelle, conforme à celle dans laquelle Dieu s’était manifesté. Il s’était montré dans le Fils de Dieu, et il ne voulait pas en sortir.

Une seule personne, même dans la divinité, pouvait manifester Dieu : c’était le Fils, resplendissement de sa gloire et empreinte de sa substance. Dès l’Ancien Testament, il pouvait venir sous la forme d’un ange visitant Abraham ou Manoah, pourtant c’était toujours le Fils. Mais s’il y eut jamais une puissance à l’oeuvre, soit dans l’homme juste, soit dans l’inconverti, accomplissant quelque chose de divin par l’homme ou en lui sur la terre, c’était invariablement celle de l’Esprit de Dieu. Aussi prend-il maintenant sa place dans cette nouvelle oeuvre de Dieu. Le Fils était entré comme homme dans la gloire qu’il avait eue auparavant comme Dieu. Il avait en quelque sorte porté l’humanité dans sa personne jusqu’au trône de Dieu. Chose merveilleuse, désormais tout dans le ciel était assujetti à un homme. Et Dieu manifestait ainsi publiquement, en haut, les conseils jusque-là cachés de son coeur.

3.3   [La gloire de Christ racontée par le Saint Esprit qui forme un corps sur la terre]

Mais qui pouvait raconter cela dignement ici-bas, être un témoin véritable de cette gloire céleste ? Celui qui la connaissait parfaitement ; celui qui seul était capable de glorifier Christ et était prêt à le faire, celui qui était habitué à enseigner à l’homme les pensées de Dieu et à l’en faire jouir. C’était le Saint Esprit qui descendit, céleste Témoin de la gloire de Christ, pour nous la révéler. Et voici le fruit de sa venue : il forme sur la terre un corps et un seul. Dieu peut-il reconnaître plusieurs corps de chrétiens sur la terre ? Une telle pensée non seulement est choquante pour le coeur du croyant, mais elle est une offense à Jésus, un tort fait à cette manière bénie par laquelle Dieu glorifie son Fils, par le Saint Esprit envoyé du ciel.

3.4   [Il peut y avoir de la puissance malgré le désordre (perte de bénédictions)]

Il existe désormais ici-bas ce que Dieu appelle son Église, le corps de Christ, identifié avec Jésus lui-même. Cela est si vrai que l’Esprit va jusqu’à appeler le tout (c’est-à-dire Christ et l’Église) le Christ (1 Cor. 12:12), tant les saints constituent une partie de sa gloire. Et, chose intéressante (bien qu’humiliante pour nous), ce furent les tristes désordres qui s’étaient introduits au milieu des saints de Corinthe qui donnèrent à l’Esprit l’occasion de nous instruire largement sur l’Église, le corps de Christ. Remarquons que ces désordres n’excluaient pas la puissance. Bien des personnes supposent que la faiblesse est la grande raison des désordres qui peuvent exister dans l’Église de Dieu. Il n’en est rien. De fait, quelques-uns de ceux qui ont causé les plus grands désordres dans l’Église ont trahi moins de faiblesse que de forte volonté charnelle. La cause du désordre à Corinthe et ailleurs a toujours été l’insoumission à Christ, la vanité avec l’abus du pouvoir, le désir plein d’ostentation de montrer ce qu’ils possédaient, en un mot la séparation de la puissance de l’Esprit d’avec la glorification de Christ. Quelles que soient la puissance ou les qualités que l’on possède, les posséder indépendamment de Christ est quelque chose de fatal — fatal à sa gloire — fatal à la bénédiction des saints et des autres âmes — par-dessus tout, fatal à celui qui est ainsi abusé par Satan. C’est ce qui précisément se manifestait parmi les Corinthiens à cette époque. Combien nous devrions bénir Dieu pour l’instruction qu’il nous donne à ce propos.

3.5   [Des choses qu’il faut reconnaître]

3.5.1        [D’abord reconnaître la seigneurerie de Christ]

Deux puissances sont à l’oeuvre ici-bas : l’esprit du mal qui agit dans les fils de la désobéissance, et l’Esprit Saint qui travaille dans les enfants de Dieu. La première s’emploie à élever l’homme contre Jésus, la seconde, à soumettre les croyants au Seigneur (car c’est le grand point présenté ici : Jésus comme Seigneur). Les Corinthiens faisaient de la cène du Seigneur leur propre repas, et de l’assemblée le théâtre où ils se donnaient en spectacle, comme si la Parole émanait d’eux, au lieu d’être venue à eux en réclamant leur obéissance à Dieu. De fait, ce n’est que lorsque les âmes sont rendues indépendantes par l’orgueil ou la négligence, qu’il est nécessaire d’insister sur cette vérité de la seigneurie de Jésus. Le racheté qui jouit de Christ n’a nullement besoin d’une telle pression ; il ne voudrait pas avoir d’autre Seigneur et il fait ses délices de Sa grâce. Il va sans dire que cela devrait être réalisé par tout croyant, mais il est nécessaire de rappeler cette vérité chaque fois que l’insubordination prédomine, et que la chair se fait valoir comme c’était le cas à Corinthe. C’est pourquoi l’apôtre commence par établir un fait sérieux et de toute importance : l’Église de Dieu se trouve là où le Saint Esprit maintient Jésus comme Seigneur. C’est le principe préliminaire atteignant les Corinthiens en fonction de leur état et c’est toujours ainsi que l’Esprit de Dieu opère. Dieu agit moralement ; cela seul peut être digne de lui, et bon pour nous. Son but est de ramener nos âmes à la jouissance de lui-même ; nous n’avons alors même plus besoin de penser à notre marche, car en fait il n’y a rien qui agisse aussi puissamment sur notre marche pour la conformer à sa nature.

3.5.2        [Reconnaître la diversité de dons, mais le même Esprit]

L’apôtre poursuit en déclarant qu’il y a «diversité de dons de grâce, mais le même Esprit», et encore : «il y a diversité de services, et le même Seigneur ; il y a diversité d’opérations, mais le même Dieu qui opère tout en tous». Ces trois versets sont essentiels pour l’intelligence pratique de ce que le Seigneur place devant nous. Les plus simples éléments sont ici : pourtant dans la pratique l’Église les a oubliés. Ce sont les plus petites conditions requises qu’il puisse accepter, le seul caractère qu’il puisse reconnaître de l’assemblée de Dieu, envisagée dans son oeuvre journalière.

La première des conditions requises est donc «la diversité des dons». Partout où un groupe chrétien prétend répondre à l’idée de l’Église de Dieu sur la terre, il faut que soit reconnu le principe du libre exercice des dons. Quand ceux-ci sont méconnus et que la congrégation se contente de s’attendre à un ou à plusieurs individus (doués ou non) la preuve est faite que ce terrain n’est pas celui de la Parole de Dieu. Il y a diversité de dons, mais le même Esprit (pas le même ministre).

Tout ce qui nie cette vérité en principe ou en pratique n’est pas l’Église de Dieu et n’a par conséquent aucun droit à ma soumission ni à la vôtre. Puis-je sanctionner ou paraître approuver ce qui est contraire à la volonté du Seigneur dans ces graves sujets concernant le Saint Esprit ? Ne dois-je pas traiter comme une association humaine même une congrégation de vrais chrétiens s’ils jettent par-dessus bord ce qu’enseigne l’Écriture par exemple au sujet de la liberté de l’exercice de tous les dons ? Si des règles sont substituées à l’autorité de la Parole de Dieu, n’avons-nous pas affaire à l’Église de l’homme ? De quel droit un chrétien réglemente-t-il l’assemblée de Dieu ? Qui a permis à l’homme d’intervenir ? La formation de l’Église était une grande oeuvre, même pour Dieu. Elle nécessitait, une fois la rédemption achevée, que le Fils monte au ciel et que le Saint Esprit descende sur la terre. Dieu fit le monde par sa parole pour le premier Adam, quoique, sans doute, son but final ait été Christ manifesté comme Roi dans sa gloire. Mais quant à l’Église, Dieu ne la constitua pas et, en toute révérence, nous pouvons dire, ne pouvait la constituer avant d’avoir reçu le second Homme, comme Tête glorifiée en haut, et envoyé le Saint Esprit pour former le corps en bas. Seules la mort et la résurrection de Christ pouvaient en être la base ; seul le Seigneur Jésus ressuscité et glorifié pouvait en être la Tête. Ainsi, l’Église de Dieu sur la terre n’est pas une société organisée pour répondre aux besoins religieux des hommes : elle est le corps que le Saint Esprit a formé ici-bas pour Christ en revendiquant d’emblée ses droits de Seigneur.

3.5.3        [Reconnaître la diversité de services, mais le même Seigneur]

Nous apprenons en effet ensuite qu’«il y a diversité de services, et le même Seigneur». Les activités chrétiennes sont multiples, mais c’est le Chef, Christ, qui les ordonne et les dirige. Le Saint Esprit ne prend pas ici la place du Seigneur. Et je suis sûr que ce n’est pas là une manière juste d’envisager l’Esprit de Dieu. J’admets entièrement la puissance, l’oeuvre et la souveraineté de l’Esprit, et je suppose que c’est cette souveraineté qu’entendent certains quand ils parlent de son gouvernement. Pourtant il y a danger à s’écarter du langage de la Parole de Dieu. Les paroles de l’Écriture sont les plus propres à exprimer les vérités de l’Écriture ; aussi, lorsque nous nous écartons des paroles, sommes-nous en danger d’affaiblir la vérité elle-même. Dans certaines sectes de la chrétienté, il existe une tendance à donner au Saint Esprit la place qui appartient au Seigneur. Or, puisque le Saint Esprit agit en l’homme et par lui, cela revient plus ou moins à mettre l’homme à la place de Christ. Tandis que, si nous nous tenons à ce qu’enseigne l’Écriture, il est clair que le Saint Esprit lui-même, dans l’oeuvre de l’Église, ne prend pas la place de tête et de Seigneur mais celle de serviteur, prenant soin de tout et glorifiant Christ. De même que le Fils ici-bas prit la place de serviteur du Père pour l’accomplissement des conseils divins, de même le Saint Esprit, quoiqu’il soit Dieu dans sa personne et par suite souverain, daigne, pour la poursuite des conseils de Dieu, s’assujettir actuellement au Seigneur Jésus. C’est ainsi qu’il imprime le caractère de serviteur sur le saint réellement animé et conduit par lui, pour la gloire de Christ. Autrement dit, même si sa fonction est de gouverner l’Église de Dieu, le Saint Esprit se constitue serviteur dans sa relation avec le Seigneur Jésus et il donne à chaque croyant ce caractère. Au contraire, lorsque c’est l’homme qui commande, quelle valeur, quelle autorité ou quelle puissance peut-il y avoir ? Et si un homme est appelé à une quelconque administration, que sa sphère soit grande ou petite, il n’en reste pas moins serviteur, et il ne l’est réellement que s’il poursuit l’accomplissement de ce que le Seigneur lui a donné à faire. En le servant ainsi, quel que soit son don ou sa place, ce n’est pas le moi qui est glorifié, c’est Christ lui-même. Il y a diversité de services mais le même Seigneur, comme il y a diversité de dons mais le même Esprit.

3.5.4        [S’effacer pour que Dieu agisse selon Sa volonté]

«Il y a diversité d’opérations» ; ajoute l’apôtre, mais c’est «le même Dieu qui opère tout en tous». Dans l’Église l’homme n’a pas le moindre droit et il ne s’y trouve pas la plus petite place pour sa volonté. Si Dieu y travaille, le devoir de l’homme est de s’effacer pour que Dieu puisse réellement agir d’après Sa volonté. Sont-ce là, chers frères et soeurs, des vérités qui remplissent nos coeurs ? Quand nous nous réunissons pour l’édification ou l’adoration, est-ce comme l’assemblée de Dieu regardant au Saint Esprit, au Seigneur Dieu lui-même ? Plusieurs peuvent trouver fort présomptueux qu’on s’appelle l’assemblée de Dieu. Mais si ce n’est pas l’assemblée de Dieu qu’est-ce, sinon l’assemblée de l’homme, autrement dit pas une assemblée du tout ? Ce qui reviendrait à détruire toute responsabilité des saints de Dieu sur la terre.

Accepteriez-vous que Jésus n’ait aucune gloire par vous, si pauvrement qu’elle puisse être réfléchie ? Qu’il ne reçoive de votre part aucune réponse à sa grâce ? que le Saint Esprit soit contrarié, entravé, supplanté, maintenant qu’il a daigné descendre pour glorifier Christ dans les saints ? Eh bien, s’il en est ainsi, ne devons-nous pas être prêts à faire sa volonté ? Et comment mieux la faire qu’en prenant à coeur ce qui lui est cher ? Or un objet lui est incomparablement plus cher que tout ce que poursuivent les hommes. Que représentent pour Christ tous les mondes, comparés à l’amour qu’il éprouve pour son Épouse, l’Église qui est son corps ici-bas ? Dans ces conditions, est-ce que nous Lui obéirions moins volontiers sous prétexte que c’est pour nous une obligation ?

Le respect mêlé de tendresse, sentiment qu’une épouse doit normalement témoigner à son mari, illustre ce que devraient être les dispositions du coeur de l’Église pour Christ son Seigneur. Faible comparaison, suffisante toutefois pour montrer que l’intimité des relations n’affaiblit pas l’amour et le respect pour quelqu’un qui en est digne de toute manière.

C’est un mensonge de Satan, de dire que connaître Dieu comme notre Père en Christ affaiblit notre obéissance ; c’en est un autre de refuser à des enfants de Dieu le titre de membres de Christ. Les reconnaître comme Siens donne essor à l’amour mutuel, inspire de la confiance et encourage la persévérance à chercher à les servir. Si vous ne tenez pas compte de leur relation avec le Seigneur, avec quelle différence de sentiments vous agirez envers eux ! En vertu de quel principe leur demanderez-vous d’abandonner les voies et les systèmes de l’homme ? À quel titre leur parlerez-vous de la bénédiction qu’il y a à se réunir au seul nom de Christ sur la terre, avant de le rencontrer dans la gloire ? Il devrait être affreux et choquant pour le chrétien de voir le monde, souillé de la sanglante culpabilité de la croix de Christ, oser se mêler du corps et de l’Épouse de Christ ! Quelle désastreuse inconséquence pour un croyant que de s’associer à une «religion» gouvernée suivant des règles d’invention humaine ! Dans une telle conjoncture la responsabilité de chaque enfant de Dieu est simple : qu’il s’attache uniquement à ce que Dieu a fait et révélé, ne doutant nullement de la puissance et du vouloir de l’Esprit pour le rendre fidèle.

3.5.5        [Reconnaître ce que l’Esprit a formé]

Mais une autre vérité se rattache à cela. L’Esprit de Dieu étant présent sur la terre, il ne s’agit nullement d’y former une nouvelle Église, encore moins de procéder à une espèce de raccommodage. Il nous appartient de reconnaître ce que l’Esprit a formé et n’abandonne jamais, de nous conformer aux injonctions de la Parole de Dieu en nous purifiant de ce qu’elle condamne et en cherchant à être fidèle à ce que Dieu lui-même a donné ! Il se peut que, dans un endroit, deux ou trois seulement aient la foi nécessaire pour sentir et agir de la sorte. Mais n’y en aurait-il, même dans une grande ville, que deux ou trois assemblés au nom du Seigneur Jésus, ils ne devraient rien tolérer d’incompatible avec les enseignements de la Parole touchant «la diversité de dons», «la diversité de services», et «la diversité d’opérations» de l’Esprit. La vérité et la volonté de Dieu ne peuvent jamais perdre leur autorité sur le peuple de Dieu par suite du changement des circonstances. Le cléricalisme et le libéralisme religieux sont également et entièrement opposés à l’Écriture et à l’action du Saint Esprit. Ce sont des formes différentes et opposées de la volonté de l’homme. Or quel autre que Dieu possède un droit réel au gouvernement de son Église ? Si c’était «notre Église» nous pourrions légitimement l’organiser, la modifier ou l’élargir comme bon nous semble. Mais l’Église est une institution divine où l’ordre de Dieu doit régner et où le Saint Esprit seul peut tout mener à bien selon la Parole écrite.

3.5.5.1                 [Témoignage en un temps de ruine]

Mais, même s’il n’y a que deux ou trois saints seulement qui, à cause des droits méconnus du Seigneur Jésus, sont sortis de cette religion organisée par l’homme, je suis tenu de les reconnaître comme étant sur le vrai terrain de l’Église de Dieu. Les sentiments qui leur conviennent sont : l’humilité, la reconnaissance envers Dieu, l’humiliation à l’égard de la ruine de la chrétienté responsable, le désir de la bénédiction pour tous les croyants, et une sainte crainte que leur propre faiblesse ou leur négligence n’attire du déshonneur sur le témoignage. Je me garde de dire que ces deux ou trois seuls sont l’Église de Dieu, mais je les appelle, marchant ainsi ensemble, son Église. N’y aurait-il, dans le monde entier, que ces deux ou trois ainsi rassemblés selon la Parole, ils seraient la seule chose de cette nature ici-bas. Ainsi ce qui constitue l’Église de Dieu sur la terre, ce n’est pas seulement que les saints qui la composent sont membres de Christ — cela, sans doute, est essentiel — mais qu’ils soient assemblés et marchent ensemble selon la Parole de Dieu, laissant au Saint Esprit sa place en action souveraine pour la gloire du Seigneur Jésus.

3.5.5.2                 [Le nombre et l’ordre selon l’homme ne remplacent pas l’Esprit]

Inversement, beaucoup de saints peuvent s’être réunis ; mais s’ils se sont arrangés comme ils l’ont trouvé convenable, en dehors des Écritures, s’ils ont reçu quelqu’un selon leur sagesse, appliqué leur discipline, reconnu cette doctrine-ci et non celle-là, que représentent-ils ? Rien d’autre qu’une association de chrétiens plus ou moins pieuse, plus ou moins prudente ou active. Il suffit d’un seul de ces principes humains, contraire à la Parole de Dieu, et substitué au Saint Esprit opérant dans l’Église, pour ôter à un tel rassemblement le caractère d’Église de Dieu. Quoique individuellement nous ayons à aimer ces chrétiens, ils n’ont dans ce cas aucun droit à être reconnus comme corps. L’Église, envisagée comme étant sur la terre, est l’assemblée des saints où Dieu agit par le Saint Esprit envoyé du ciel : c’est son assemblée, et non pas simplement une assemblée de saints. Une assemblée de saints est une bonne chose ; mais s’ils ne sont que cela, ils ne peuvent prétendre avec vérité à la place d’Église de Dieu. Ce n’est pas leur présence mais celle du Saint Esprit qui les constitue son Église. Qu’il est précieux qu’il y ait sur la terre des saints édifiés ensemble pour être l’habitation de Dieu par l’Esprit !

Mais de même que pour le Fils de Dieu quand il était ici-bas, ainsi de nos jours la place du Saint Esprit lui est contestée. L’état actuel de la chrétienté oblige, hélas, à en convenir. Chose vraiment remarquable, de la même manière que Dieu permit à l’homme de faire ce qu’il voulut à Christ, il lui permet maintenant d’outrager l’Esprit de grâce en méconnaissant sa présence et sa gloire dans l’Église. L’homme a failli successivement à cette double responsabilité. Mais nous savons que le temps approche où l’Église quittera le monde pour rejoindre son Chef et occuper avec lui la position de gloire qui lui est destinée. Devant le monde aussi elle brillera au temps convenable. Combien il serait désirable que chaque enfant de Dieu examine jusqu’à quel point il a reçu dans son âme et jusqu’à quel point il réalise dans sa marche la vérité de Dieu concernant son Église ! Si vous dites que vous ne vous en préoccupez pas particulièrement et que vous vous contentez du salut, je vous demande : Où est votre amour pour Christ ? Où sont vos affections pour ceux qui appartiennent à Christ et pour sa gloire en eux ? Quelle condition égoïste et inférieure pour un chrétien ! Au reste ceux qui s’en contentent se condamnent généralement à une incertitude continuelle quant à leur acceptation personnelle devant Dieu et trouvent dans la mondanité un soulagement à leur manque de paix réelle.

Quelle différence avec la voie de Dieu ! Il sauve d’un parfait salut ; il nous rend parfaitement libres afin d’accomplir en nous toutes ses pensées, pour sa gloire en Christ et tout particulièrement dans l’Église. Chrétien, Dieu vous a-t-il sauvé pour vous laisser en dehors de ses propres desseins et sans un souci pour la gloire de Christ ? Si Dieu vous a montré une telle miséricorde, est-ce que votre coeur éclairé par sa Parole et sous l’action de l’Esprit ne vous pousse pas à servir Christ ? Le servir comment ? Tout spécialement en apprenant et en accomplissant la volonté de Dieu dans un domaine aussi précieux à Christ que celui de son Église. Que Dieu donne à chacun de nous de considérer sérieusement la chose.

3.5.6        [Les dons de l’Esprit comme un signe pour le monde : reconnaître l’Esprit comme seul agent opérant]

Mais ce chapitre 12 des Corinthiens nous enseigne encore bien davantage. L’apôtre parle de la manifestation de l’Esprit sous des formes diverses. Elle est donnée à chaque saint, non seulement pour lui-même, mais pour l’utilité de tous. «À l’un est donnée, par l’Esprit, la parole de sagesse ; et à un autre la parole de connaissance, selon le même Esprit ; et à un autre la foi, par le même Esprit ; et à un autre des dons de grâce de guérisons, par le même Esprit ; et à un autre des opérations de miracles ; et à un autre la prophétie ; et à un autre des discernements d’esprits ; et à un autre diverses sortes de langues ; et à un autre l’interprétation des langues». Ce chapitre envisage les dons comme un signe pour le monde. Ils étaient dans l’Église, dans les différents membres du corps de Christ ; mais pas exclusivement pour le profit de l’Église puisque certains constituaient une marque extérieure en faveur de tous les hommes. Prenez par exemple le don des langues. Quel témoignage de la grâce parfaite de Dieu qui ne se limite plus à la nation élue, mais qui rencontre maintenant tous les hommes en grâce, là où son jugement les avait placés après le déluge ! Les choses magnifiques de Dieu dans la rédemption sont proclamées par l’Esprit à chaque nation dans sa propre langue.

«Le seul et même Esprit opère toutes ces choses — ajoute l’apôtre — distribuant à chacun en particulier comme il lui plaît». Quelle que soit la place de dépendance qu’il plaît à l’Esprit Saint de revêtir maintenant, il n’en est pas moins souverain, agissant comme il veut ; il est divin ; il est Dieu. «Car de même que le corps est un et qu’il a plusieurs membres, mais que tous les membres du corps, quoiqu’ils soient plusieurs, sont un seul corps, ainsi aussi est le Christ». Avez-vous été amenés à Dieu ? Avez-vous cru de coeur et confessé de votre bouche que Dieu a ressuscité Jésus d’entre les morts ? Alors vous êtes à lui pour magnifier celui qui est votre Sauveur et Seigneur. Reconnaissez-le comme seul Seigneur. Reconnaissez le Saint Esprit comme le seul agent opérant dans les saints, en tant qu’assemblée de Dieu ici-bas. J’admets que l’Esprit de Dieu, agissant librement en grâce, ne se confine pas à l’assemblée comme telle. Il peut agir dans les membres de Christ, parfois même quand ils ne sont pas dans la place où Dieu les voudrait. Aussi n’ai-je pas la pensée de nier un instant que le Saint Esprit travaille dans quelque système ou dénomination chrétienne que ce soit. Mais celui qui apprécie et comprend l’Écriture peut voir que toute cette concurrence de sociétés chrétiennes prouve un total éloignement de la Parole de Dieu quant à son Église.

L’Église est-elle libre de choisir certaines doctrines particulières ? Voyons-nous dans la Parole qu’elle désigne ses propres ministres ? Quand l’Église prend une telle place, elle abandonne en principe la sujétion au Seigneur. C’est la femme s’efforçant de prendre la place du mari. Rien ne peut être plus simple si nous tenons ferme ce que Dieu lui-même a établi. L’Église ne confère point de mission, elle n’enseigne pas ; en revanche elle est tenue de juger, et non seulement quand il s’agit de mal moral, mais aussi de la doctrine, ne tolérant rien de ce qui peut nuire à la vérité ou à la sainteté de Dieu. Elle doit être vigilante sur tout ce qui touche la gloire de Christ. Mais entre cette fonction et le fait d’établir un clergé ou de définir des articles de foi, la différence est grande. En considérant l’Église dans l’Écriture, je la vois chargée de l’obligation de maintenir la vérité dont elle est la colonne et le soutien ici-bas. Je ne cherche pas au loin dans le monde pour trouver la vérité. Je sais qu’elle ne se trouve que dans l’Église. Et son état de désordre n’a pas mis fin à sa responsabilité.

3.6   [Juger l’état de l’Église selon la Parole de Dieu]

L’état de choses actuel contraste fâcheusement avec ce qui est présenté dans la Parole de Dieu. En présence de toutes les dénominations qui chacune s’intitule Église, que doit faire un enfant de Dieu qui désire être fidèle ? Juger sa position d’après la Parole de Dieu ; s’assurer si ce qu’il approuve ou sanctionne par sa présence est bien selon l’Écriture. Prétendre que l’on n’a rien à faire avec les autres, que le seul devoir consiste à bien marcher soi-même est une piètre excuse, et revient à abandonner entièrement le terrain de l’Église de Dieu. Par contre, chers enfants de Dieu, si vous vous trouvez — peut-être à deux ou trois seulement — sur le terrain où la Parole seule a toute autorité, quelle heureuse part est la vôtre ! Car Dieu honorera en son temps ceux qui l’auront honoré. En attendant, la lumière divine brille sur votre sentier chaque fois que vous vous réunissez. Elle peut vous montrer votre faiblesse et vos manquements ; n’importe, vous êtes à la place où Dieu vous veut, où Il prend soin de vous, satisfait aux besoins de votre âme en utilisant tantôt tel serviteur, tantôt tel autre, car «toutes choses sont à vous». Sous l’effet de la vérité votre âme fera des progrès dans les voies de Dieu. S’il existe du mal ici ou là, il est manifesté et jugé, le Saint Esprit agissant à cet effet par la Parole. Surtout, qu’il est doux de savoir qu’en fait et en vérité, nous faisons la volonté de Dieu ! Celui qui la fait subsistera à toujours. Heureux le croyant qui a ainsi la certitude d’être soumis à Jésus tout le long de l’aride chemin !

3.7   [Attitude devant ce qui est contraire à l’Écriture]

C’est là ce que l’apôtre désirait pour les Corinthiens. Pratiquement, ils avaient introduit chez eux le plus complet désordre, mais il ne leur refuse pas pour autant le caractère d’assemblée. Dois-je me détourner de l’assemblée à cause des fautes qui peuvent se trouver chez l’un ou chez l’autre ? Ce n’est sûrement pas le chemin du Seigneur. Il enseigne comment le mal doit être jugé et corrigé. Ce que nous avons à faire, c’est d’appliquer la Parole d’une manière intelligente et d’agir contre chaque source de mal à mesure qu’il se manifeste.

Sans doute, l’indifférence au sujet de la volonté du Seigneur n’est pas moins mauvaise que tel mal que je discerne chez les autres. Mais il est aussi contraire aux Écritures de sortir sur-le-champ à cause du péché des autres que de fermer les yeux à son sujet ou de l’encourager. L’assemblée confessant que Dieu est là n’est jamais excusable de tolérer le mal, mais je dois chercher à éveiller la conscience et à agir en obéissance même quant à cela. C’est dans l’Église (et non pas en sortant précipitamment) que je puis compter sur Dieu pour qu’Il opère dans ses saints et par eux. Et ainsi, quel que soit le mal qu’introduit Satan, fausse doctrine, ou immoralité la plus flagrante, nous ne devons ni être trop surpris, ni refuser notre aide à l’Église dont le devoir est de faire la volonté du Seigneur en tout. Je dois en appeler à lui et compter sur lui, ensemble avec mes frères, afin que toutes nos consciences soient en activité et que nous puissions avoir la grâce de mettre dehors tout ce qui offense la gloire de Dieu, si aucun soin, aucune discipline n’a pu remédier au mal.

Ainsi ce n’est pas la faiblesse, ni même l’entrée d’un mal positif qui doit nous conduire à la séparation, quelque grands et pénibles que soient le chagrin et la honte pour nos coeurs. Ce qui est funeste c’est le refus d’agir contre le mal, c’est le rejet pratique de l’Esprit de Dieu s’élevant par la Parole pour le réprimer. C’est quand la volonté propre de l’homme prévaut et est sanctionnée, qu’on préfère les facilités d’une paix extérieure en conservant l’apparence de l’unité, quoique tout ce qui rend l’unité précieuse soit parti. Car quel est le sens d’une unité qui n’est plus fondée et maintenue selon la volonté de Dieu ? Si le Saint Esprit ne peut y mettre son sceau, si la gloire du Seigneur Jésus n’y est pas maintenue, c’est une iniquité. Et une telle assemblée n’a aucun droit à mon obéissance.

Il se trouve des difficultés dans le sentier de Christ, mais la foi surmonte tout. L’Église se compose d’hommes qui, quoique dans l’Esprit, ont néanmoins la chair en eux. Si celle-ci n’est pas tenue pour morte, Satan s’efforcera de lui faire produire des fruits et d’en étendre les effets tout à l’entour d’une manière aussi funeste et aussi contraire que possible à la gloire du Seigneur. Ceignons nos reins et regardons vers Celui à qui appartient l’Église et qui demeure au milieu des siens. De lui proviennent toute force et toute puissance ! Il manifestera son précieux pouvoir en notre faveur, et agira contre ce qu’il hait.

Mais que faire si un mal subtil, spécialement contre Christ (car tel est le but de Satan), prend le dessus dans l’assemblée, et si celle-ci rejette tout avertissement, toute tentative pour appeler l’attention sur la sentence que la Parole de Dieu prononce contre ce qui est certainement opposé à sa gloire et détruit la vérité et la sainteté ? Évidemment, s’il en est ainsi, si le mal flagrant est tenu caché et non jugé, et si l’assemblée s’obstine dans le rejet des appels du Saint Esprit à juger ce qui est contraire à Christ, alors nous devons sortir, au nom du Seigneur, avec douleur, peut-être bien avec une honte profonde, un coeur déchiré, mais sans hésitation d’esprit. La preuve a été faite qu’ayant eu la lumière de Dieu, on a refusé de propos délibéré d’agir selon cette lumière ; qu’ayant été au bénéfice de la grâce de Dieu, on est demeuré sourd à sa Parole et on a tourné contre lui sa grâce en dissolution.

Que le Seigneur nous délivre d’un tel état de choses et nous rende toujours sensibles à sa gloire et à sa volonté révélée. Mais commençons par être lents à croire au mal. N’agissons jamais dans un cas individuel, encore moins vis-à-vis d’une assemblée, avant d’être forcés de reconnaître la certitude triste et humiliante que le saint ou l’assemblée est entièrement infidèle à Christ. La précipitation à mettre dehors des individus ou à juger ce qui a été reconnu comme l’assemblée de Dieu, est la dernière chose qui devrait caractériser l’enfant de Dieu. Lente et pénible devrait être pour nous une telle découverte, patients nos exercices et nos efforts en vue d’une restauration, jusqu’à ce qu’il ne soit plus possible de supporter le mal sans nous identifier avec lui, et qu’il faille agir. Lorsque Dieu place cette responsabilité sur nos consciences, nous n’avons pas le droit de fermer les yeux ni de nous dérober. Ces quelques remarques peuvent nous aider à comprendre non seulement le principe des opérations du Saint Esprit telles que la Parole nous les révèle, mais aussi les conséquences pratiques pour notre marche au milieu des difficultés et des devoirs actuels.

3.8   [1 Cor. 12:12-13 — Le baptême du Saint Esprit pour être un seul corps]

Et maintenant quelques mots pour attirer notre attention sur la grande vérité contenue dans le verset 12, savoir que quoiqu’ils soient plusieurs, tous les membres sont «un seul corps». Le verset 13 complète : «nous avons tous été baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps, soit Juifs, soit Grecs, soit esclaves, soit hommes libres». Pas un enfant de Dieu n’est laissé dehors. Tout chrétien a cette qualité de membre du corps de Christ à partir du moment où il est baptisé du Saint Esprit, c’est-à-dire tôt ou tard. Et, dans quel but sommes-nous baptisés du Saint Esprit ? Non pas pour rester indépendants les uns des autres, ce qui était anciennement l’état des saints en Israël ; mais c’est justement pour nous retirer de cet état de choses que le Saint Esprit est descendu. Certes, sous le christianisme, je ne perds pas ma bénédiction individuelle — bien au contraire — mais à côté d’elle existe un terrain que Dieu nous a imparti collectivement ici-bas. J’appartiens au seul et unique corps, à l’Église. Je suis baptisé en un corps par le Saint Esprit descendu du ciel. C’est une vérité que je saisis par la foi au même titre que mon privilège d’être enfant de Dieu. Est-ce que je crois à la réalité de ce seul corps résultant de la présence infaillible du Saint Esprit ? Si oui ne suis-je pas tenu de marcher en conséquence ? Et mon chemin sera clair si j’y avance avec cet oeil simple qui ne cherche pas ses intérêts propres mais ceux de Jésus Christ.

Comment concevoir en effet qu’il puisse y avoir autre chose qu’une seule et même direction pour tous les enfants de Dieu qui se laissent guider par Sa Parole et Son Esprit ? Ce serait affirmer l’insuffisance de la révélation et de la conduite présente du Saint Esprit. Si nous étions simples et soumis aux Écritures, le Saint Esprit pourrait et ne voudrait produire qu’une seule et même conviction. La seule raison pour laquelle les chrétiens diffèrent tellement, c’est parce que la chair, non jugée, prévaut contre le Saint Esprit. Mais que Dieu nous accorde de n’abandonner ni l’assurance de la présence de l’Esprit, ni la suffisance de la Parole de Dieu maniée par le Saint Esprit. Le Saint Esprit n’est-il pas ici pour se servir puissamment de cette Parole en vue de la gloire de Christ dans le chrétien et dans l’Église, en proportion de la foi ? Par conséquent la responsabilité de chaque enfant de Dieu est de mettre de côté toute tradition et le poids mort de l’incrédulité qu’il reconnaît ; de quitter ce qu’il pratique ou tolère en contradiction avec l’Écriture ou qui s’en éloigne d’une manière ou de l’autre, afin de suivre complètement et en toutes choses la Parole de Dieu par l’Esprit.

3.9   [Variété des membres du corps et des oeuvres de l’Esprit]

Le reste du chapitre, qu’en rapport avec notre sujet, il n’est pas nécessaire de développer, nous enseigne d’abord que le corps n’est pas un seul membre. La variété des membres indique combien ils sont tous nécessaires — l’oeil aussi bien que le pied ou la main — principe des plus importants. Ils n’ont pas tous la même fonction, ni la même place ; néanmoins ils sont tous utiles, petits et grands. Dans la faiblesse présente et la dispersion de l’Église de Dieu, l’oeil peut être ici et la main là-bas, dispersés au lieu d’être rassemblés : hélas, qu’en est-il aujourd’hui de la manifestation extérieure du corps de Christ sur la terre ? D’où la confusion et la perplexité qui règnent ! Mais Dieu est toujours fidèle et opère encore par le Saint Esprit descendu du ciel, lequel est suffisant pour toutes les circonstances. L’Église peut être faible, et le ministère aussi ; mais l’Esprit de Dieu est-il faible ? Ainsi ce n’est plus qu’une question de foi dans la réalité de la présence et de l’opération du Saint Esprit. Celui-ci rend forts et emploie des individus comme il veut pour la gloire de Christ, chacun en tant que membre de son corps. Eh bien, il est de toute importance d’user de hardiesse et de tenir ferme cette vérité, sans toutefois forcer les autres croyants au-delà de leur foi. Mais qu’y a-t-il de plus heureux sur la terre que d’entrer ainsi de coeur dans les oeuvres variées de l’Esprit de Dieu ? Il distribue à celui-ci un don qui diffère essentiellement de celui d’un autre. On peut affirmer qu’il n’y a jamais eu deux dons exactement semblables dans l’Église de Dieu. D’une manière générale, nous le savons, il n’existe pas dans le monde deux individus absolument identiques. En dépit de ressemblances qui peuvent être grandes, il y a tel cachet qui caractérise un homme, que nul autre ne possède ni ne posséda jamais. Il en est exactement de même dans l’Église. Dieu a besoin de toute cette diversité pour l’oeuvre qu’il nous a donnée à faire. Le discernement spirituel, fruit de la foi, saura reconnaître ces variétés dans l’oeuvre du Seigneur. La chair au contraire, envieuse et jalouse, tendra toujours à effacer ces traits divins, assimilera lourdement fonctions et serviteurs et gâtera par là les beaux traits et les diverses opérations de l’Esprit de Dieu.

3.10                      [Éphésiens 4 — L’Église liée avec la Tête dans le ciel]

En rapport avec notre sujet, un dernier passage mérite notre attention, c’est Éphésiens 4. Le corps de Christ y est aussi mentionné, mais d’une manière bien différente et bien frappante. L’apôtre envisage ici l’Église non pas comme la scène des opérations du Saint Esprit sur la terre (1 Cor. 12) mais comme liée à sa Tête dans le ciel. Au lieu d’unir Christ à l’Église envisagée sur la terre comme le champ où le Saint Esprit manifeste la volonté de Dieu, ici un autre aspect nous est découvert. Christ lui-même est présenté comme monté en haut, et le corps de Christ comme un avec Christ en haut. En sorte que si je regarde à Christ, je suis aussitôt lié avec le ciel (Éph. 4) ; si je regarde au Saint Esprit, je suis lié à la terre, comme la place où il est lui-même à l’oeuvre pour la gloire de Dieu dans l’Église (1 Cor. 12). Telle est la différence dans tout le cours de ces épîtres. Les deux points de vue sont vrais et importants et aucun ne doit être négligé. Sans doute n’agissent-ils pas également sur les affections, mais ils sont tous deux utiles, tous deux divins, tous deux révélés pour notre profit et notre bénédiction.

Ainsi, ce que nous trouvons comme le sujet principal en Éphésiens 4, c’est Christ la source infaillible de nourriture pour son corps. Il lui dispense ses dons — des apôtres, des prophètes, des évangélistes, des pasteurs, et des docteurs ; mais pas un mot des langues et des guérisons — signes dont nous avons une si grande variété dans 1 Corinthiens 12 et 14. Dans Éphésiens, tout est moyen direct de nourriture pour le corps et envisagé comme découlant de Christ pour les siens, plutôt qu’un témoignage de puissance dans l’Église de Dieu pour le monde. En 1 Corinthiens, l’Esprit agit puissamment dans ce qui est appelé le Christ au verset 12 du chapitre 12 (la Tête et le corps ensemble) ; en Éphésiens, Christ, comme Tête, nourrit et chérit personnellement son corps. Christ est aussi prééminent dans un cas, que le Saint Esprit est la grande énergie dans l’autre, agissant comme il lui plaît dans ces manifestations variées qui sont données à chacun dans l’Église. Alors que, répétons-le, en Éphésiens, le grand objet c’est : «en vue du perfectionnement des saints, pour l’oeuvre du service, pour l’édification du corps de Christ».

3.11                      [Les dons ne sont pas indépendants de l’Église (évangélisation)]

La vraie et exacte manière dont Dieu voulait que ses dons fussent déployés, c’est au titre de membres du corps de Christ. Ainsi en 1 Corinthiens 12, les dons ne s’exercent pas indépendamment de l’Église de Dieu, mais comme membres du seul corps. Cela est vrai, même pour l’évangélisation. Quand Paul et Barnabas partent, ils sont recommandés par l’Église à la grâce de Dieu. De même à leur retour, ils racontent à l’Assemblée ce que Dieu a opéré. Ce n’est nullement comme ayant reçu leur mission de l’Église, car celle-ci n’a aucune compétence pour choisir et envoyer un serviteur du Seigneur. Ce point est à souligner car il est totalement méconnu dans les systèmes de la chrétienté. Sans doute y a-t-il de vrais et sincères serviteurs du Seigneur parmi les ministres officiels des religions chrétiennes. Mais alors, de nos jours, pour exercer un ministère ou un don dans la chrétienté, vous devez avoir l’approbation et le soutien de quelque soi-disant Église, autrement dit vous devez faire partie de ce qui déshonore le Seigneur, et honorer l’Église dans sa place d’usurpation, afin d’obtenir une mission ou un service. Ce principe n’est pas particulier au système romain, tous s’accordent dans cette substitution coupable de l’Église à la place du Seigneur.

3.12                      [Responsabilité de pratiquer ce qu’on a compris]

Si Dieu nous a fait la grâce de nous éclairer au sujet de ces grandes vérités liées au don du Saint Esprit, qu’il nous préserve de nous en glorifier et de nous complaire à nous-mêmes ! Au contraire, c’est pour nous une grande responsabilité. Plus encore : nous devrions réellement être honteux à la pensée que nous ne présentons pas ces vérités au coeur et à la conscience des autres avec une puissance telle qu’ils soient saisis par la crainte d’être en dehors des voies de Dieu. Reconnaissons que notre manque de spiritualité et de dévouement, notre mondanité et toutes les misères qui nous ont atteints individuellement ou collectivement, ont été les plus grands obstacles au témoignage ; car toute la puissance de Satan unie à celle de l’homme ne pourrait nous surmonter un instant s’il n’y avait pas en nous manque de foi ou infidélité non jugée. Voilà pour nous le vrai danger et notre sujet de honte devant notre Dieu ! Tenons ferme la vérité que lui-même nous a donnée pour en être les témoins aussi bien que pour la croire. Les calomnies du dehors n’ont de puissance que sur ceux qui aiment le mal. Laissons les hommes dire ce qu’ils veulent ; mais pour nous nous n’avons pas à craindre tant que notre oeil est simple, notre coeur vrai à l’égard de Christ, et le Saint Esprit l’objet de notre humble confiance selon la Parole.

3.13                      [Disparition de certains dons]

Au sujet d’Éphésiens 4, un autre point peut encore être signalé. Ces dons sont tous accordés jusqu’à ce que nous soyons parvenus à la mesure de la stature de la plénitude de Christ. Ceci contraste encore avec 1 Corinthiens 12 où la même assurance n’est pas donnée au sujet des dons qui sont des signes pour le monde. Ainsi s’explique que ces signes n’existent plus. Le Seigneur ne s’est jamais engagé à faire continuer les guérisons ou les langues qui furent données à l’Église primitive. Par contre, quand il s’agit de ce qui est nécessaire à l’édification, aux dons ministériels de sa grâce nécessaires pour l’appel de nouvelles âmes, ou pour le soin et la surveillance de celles déjà appelées, l’Écriture affirme qu’ils sont donnés «jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l’état d’homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ». Tout ce qui contribue au bien réel dans les circonstances présentes, demeure pour l’Église de Dieu jusqu’à la fin.

Celui qui nourrit et chérit son assemblée, qui la nourrit parce qu’il la chérit, le fera fidèlement jusqu’à Son retour.

 

4                        Méditation 9    «Une habitation de Dieu par l’Esprit»    Éphésiens 2:22

Le Saint Esprit, dans cette épître, envisage l’Église non seulement comme le corps de Christ (Éph. 1:23) mais comme l’habitation de Dieu (Éph. 2:22). Le corps de Christ implique notre communion avec Lui-même comme Tête dans le ciel. L’habitation de Dieu se lie à la position actuelle de l’Église sur la terre. L’Église n’a pu être formée, sous ce double caractère, que sur la base de la rédemption, donc après la croix, et par le Saint Esprit envoyé du ciel.

Hélas ! beaucoup d’enfants de Dieu n’acceptent pas ces vérités et n’en jouissent pas. C’est une grande perte pour eux, mais ils n’en participent pas moins à la bénédiction, car notre ignorance n’affecte pas notre relation mais seulement la jouissance de cette relation. Et c’est une grande miséricorde de la part de Dieu ! Il en est de ce privilège comme de tous les autres que confère sa grâce. Bien des personnes regardent simplement à Christ et par cela ont la vie éternelle ; mais si vous leur demandez : «Avez-vous la vie éternelle ?», peut-être hésiteront-elles à répondre. Ce n’est pas qu’elles mettent en doute les paroles de l’Écriture, mais elles connaissent fort peu le caractère, la nature ainsi que les conséquences (actuelles et futures) de la vie éternelle. Il en est de même pour la vérité de l’Église de Dieu sous ses deux aspects — son union avec Christ en haut, ou l’habitation de Dieu par l’Esprit ici-bas. Dans notre dernière méditation, nous avons traité rapidement la première de ces vérités ; aujourd’hui nous nous occuperons de la deuxième, en engageant les lecteurs à méditer les portions de la Parole qui développent l’une ou l’autre de ces grandes vérités. Je mentionnerai en passant quelques-unes de leurs conséquences pratiques, car une vérité quelconque n’est vraiment bénie pour nos âmes que si nous la traduisons dans notre expérience, dans nos voies, dans notre culte, par les fruits de ce que Dieu nous a fait connaître.

4.1   [Un enseignement spécifique sur l’Église]

Dans ce chapitre 2 de l’épître aux Éphésiens, il est clair que le Saint Esprit a mis de côté le système juif et introduit un état de choses entièrement nouveau. Dieu agit d’une manière sans précédent : il introduit des Gentils, appelés l’incirconcision dans la chair, gens qui, avant de recevoir l’Évangile, étaient éloignés et étrangers, sans espérance et sans Dieu dans le monde. Et il les place, avec les croyants d’Israël, ensemble dans une position nouvelle devant lui. Comment est-ce possible ? Parce que la rédemption est maintenant accomplie.

Toute notre épître, du commencement à la fin, a donc en vue des chrétiens, et des chrétiens seulement, indépendamment de leur origine juive ou gentile. Certains ont cru pouvoir appliquer aussi cette portion de l’Écriture aux saints de l’Ancien Testament, mais ceux-ci ne pouvaient être appelés «saints et fidèles» en Christ. C’est méconnaître tout à fait la portée de l’épître et atténuer la profondeur et la nature spéciale des privilèges présents, aussi bien que leur force et leur caractère céleste. Dieu a révélé ces vérités distinctement et uniquement à des âmes amenées à la connaissance de sa grâce, depuis qu’il s’est manifesté en Christ et que l’oeuvre de la rédemption a été opérée. Répétons par conséquent que notre épître, dans chacune des pensées qu’elle exprime, envisage exclusivement les saints qui ont été appelés entre l’apparition de Christ dans le monde pour mourir comme victime de propitiation et son retour pour les prendre à lui.

Il est utile à cette occasion de remarquer que, d’une manière générale, toute tentative d’atténuer les diversités dans la Parole et dans les voies de Dieu a pour effet d’affaiblir notre appréciation des privilèges accordés par Dieu à ses enfants et d’effacer la précision de la révélation de Dieu. On croit par exemple que c’est l’Église qui a été de tout temps l’objet des voies de Dieu dans ce monde ; que de nos jours elle a un peu plus de lumière, un peu plus de bénédiction (car on ne peut pas nier les différences). Mais c’est là une profonde erreur. Que chaque lecteur soumette ses propres pensées et les suggestions des autres sur cette grande question à la seule pierre de touche que Dieu reconnaisse, à la seule source de lumière et de vérité possible, sa divine Parole. Il apprendra d’abord que l’oeuvre de la rédemption est appliquée aux âmes d’une manière complète et sans distinction. C’est-à-dire que maintenant il ne s’agit pas de savoir si un homme est Juif ou Gentil.

Que l’Église soit envisagée sous son aspect de corps de Christ ou d’habitation de Dieu, dans les deux cas il est supposé cette chose nouvelle, le renversement complet de ce que Dieu avait institué et sanctionné dans les premiers temps : «Mais maintenant, dans le Christ Jésus, vous qui étiez autrefois loin, vous avez été approchés par le sang du Christ. Car c’est lui qui est notre paix, qui des deux en a fait un et a détruit le mur mitoyen de clôture, ayant aboli dans sa chair l’inimitié». Ainsi s’évanouit la clôture qui par ordre de Dieu subsistait dans les temps de l’Ancien Testament, savoir «la loi des commandements qui consiste en ordonnances, afin qu’il créât les deux en lui-même pour être un seul homme nouveau». Autrement dit, non seulement nos péchés sont effacés, et le ciel assuré pour nous plus tard ; mais une création entièrement nouvelle est formée ici-bas. C’est la communication de privilèges inconnus et impossibles tant que Dieu avait des relations avec son ancien peuple, agissait au milieu d’eux et les gouvernait par une loi. Il fallait que Christ «les réconciliât tous les deux en un seul corps à Dieu par la croix, ayant tué par elle l’inimitié. Et il est venu, et a annoncé la bonne nouvelle de la paix à vous qui étiez loin, et la bonne nouvelle de la paix à ceux qui étaient près ; car par lui nous avons, les uns et les autres, accès auprès du Père par un seul Esprit» (2:17, 18).

4.2   [Apôtres et prophètes du Nouveau Testament]

Nous arrivons ici au point qui constitue plus particulièrement notre sujet. «Ainsi donc», est-il déclaré, «vous n’êtes plus étrangers ni forains, mais vous êtes concitoyens des saints et gens de la maison de Dieu, ayant été édifiés sur le fondement des apôtres et prophètes, Jésus Christ lui-même étant la maîtresse pierre du coin». Remarquez qu’il n’est pas question ici des prophètes de l’Ancien Testament. L’ordre même dans lequel le Saint Esprit fait son énumération exclut une telle pensée : «les apôtres» sont placés avant «les prophètes». Plus encore, la construction de la phrase implique une classe commune de personnes qui établissent un fondement pour cet édifice que Dieu allait construire. Et à quelle époque ce fondement fut-il posé ? Ce ne fut pas aussitôt après le péché de l’homme, ni aux temps des patriarches que Dieu commença à exécuter cette grande oeuvre sur la terre. C’est seulement quatre mille ans plus tard, après la venue et la mort de Christ, que le fondement fut posé par les apôtres et les prophètes. La classe commune déterminée par l’article grec nous empêche de songer aux prophètes de l’Ancien Testament. Les prophètes dont il s’agit étaient présents alors et associés avec les apôtres dans cette oeuvre. Et les apôtres et les prophètes, savoir ceux du Nouveau Testament, sont ceux qui posèrent ce nouveau fondement (*) «en qui tout l’édifice, bien ajusté ensemble, croît pour être un temple saint dans le Seigneur». Tel est le résultat final. Ce saint temple sera vu plus tard ; mais remarquez la fin du chapitre : «en qui vous aussi, vous êtes édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu par l’Esprit». La conclusion est évidente : dès maintenant, avant que le saint temple ait atteint ses pleines proportions, cette oeuvre existe sur la terre, mettant de côté le système d’Israël, une toute nouvelle construction qui est véritablement l’habitation de Dieu en vertu de la présence de l’Esprit.

(*) Comparez Éph. 3:5 «révélé maintenant» aux deux (c’est-à-dire à ses apôtres et prophètes).

4.3   [L’habitation de Dieu était connue]

4.3.1        [L’habitation de Dieu par l’Esprit était une chose nouvelle]

Ainsi aujourd’hui les croyants, ceux des nations comme les croyants juifs, constituent cette habitation de Dieu, «en qui, vous aussi» — déclare Paul aux Éphésiens — «vous êtes édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu». De quelle manière ? «Par» ou «dans l’Esprit» (cf. v. 22, note). Autrement dit, l’Esprit est aussi nécessaire pour l’habitation de Dieu que pour le corps de Christ dont nous nous sommes occupés dans notre méditation précédente. Toutefois, l’habitation de Dieu, à un certain point de vue, n’est pas une pensée aussi exclusivement nouvelle que le corps de Christ. Nous trouvons dans l’Ancien Testament des types distincts de la grande vérité de l’habitation de Dieu au milieu des hommes sur la terre, alors que rien n’était révélé de la réunion du Juif et du Gentil en un seul corps — et encore moins qu’ensemble ils composeraient le corps de Christ. Nous en avons bien un type dans l’union d’Adam avec Ève, mais qui ne révèle évidemment rien du Juif et du Gentil réunis en un. On ne peut faire valoir que le fait, et nous savons que l’Esprit de Dieu s’en est servi lorsque l’Église vint à la lumière, mais rien de plus.

4.3.2        [Pas d’habitation de Dieu dans la Genèse]

Quant à l’habitation de Dieu, nous n’en avons, comme chacun le sait, aucune mention dans la Genèse, pas même sous forme de promesse. Constatation d’autant plus frappante que, s’il y a dans l’Ancien Testament un livre qui contienne plus qu’aucun autre les éléments ou types de la vérité divine, c’est bien le livre de la Genèse ! Tous les autres livres ensemble ne présentent peut-être pas autant de vues variées des voies à venir de Dieu. Cette exception n’en est que plus remarquable : nous n’y trouvons pas la moindre allusion au dessein de Dieu d’avoir une demeure sur la terre. La raison en est claire. Quoique la Genèse mentionne de nombreux sacrifices et holocaustes, quoique des relations d’alliance soient souvent placées devant nous, il n’y est pourtant pas encore question de rédemption, et cette omission est aussi remarquable que l’absence de toute allusion à la demeure de Dieu dans ce livre merveilleux.

4.3.3        [La Rédemption est nécessaire pour qu’il y ait une habitation de Dieu]

Puis vient le second livre de Moïse, qui ne présente pas comme le premier un ensemble des révélations des voies de Dieu et de ses conseils qui devaient plus tard s’accomplir en Christ. Par contre ce livre de l’Exode nous présente en types les vérités que nous cherchons : la rédemption d’abord, la demeure de Dieu avec les hommes ensuite. Nous pouvons ajouter en passant que, quoique la loi s’y trouve aussi, celle-ci contient l’assurance renouvelée de ces mêmes vérités (Ex. 20:2, 24). Ces pensées de Dieu, présentées en figure dans le livre de l’Exode, font partie des choses révélées en Éphésiens 2 et sont exposées dans le même ordre.

La première partie de l’Exode dépeint la condition misérable et désespérée du peuple de Dieu. Du fond de sa détresse, celui-ci crie à l’Éternel qui l’entend et s’occupe de sa délivrance. Il ne se contente pas de lui adresser des messages de miséricorde : au temps convenable, il se met à l’oeuvre non pas d’abord pour juger, quoiqu’il le fasse, mais pour réclamer son peuple pour lui-même. Il envoie Moïse et Aaron, et, comme signes accompagnant leur mission, des plaies par lesquelles il châtie l’orgueil du monde qui tenait Son peuple en esclavage. Et c’est pour en arriver au type le plus remarquable de la rédemption dans l’Ancien Testament, en ses deux parties : la Pâque et la mer Rouge. Un seul de ces types aurait été insuffisant pour présenter la rédemption, qui ne peut être bien comprise que lorsque ses deux côtés sont considérés ensemble. À la Pâque, en effet, Dieu juge encore ; et il faut qu’il en soit ainsi : Dieu est armé de puissance, il agit en vengeance contre le péché. Mais, en même temps, dans son admirable sagesse, il procure à son peuple un juste et parfait refuge.

Ainsi la vérité la plus marquante dans la Pâque, c’est Dieu en jugement, quoique pourvoyant au salut des siens. Ceci constitue, ne l’oublions pas, un des aspects de l’évangile. Une des pensées centrales de ce dernier, c’est la parfaite justice de Dieu (Rom. 1:17). Nous pensons plus volontiers à sa miséricorde. Toute précieuse qu’elle est, celle-ci est très différente de la justice divine, bien que sans la miséricorde la justice ait manqué et de base et d’occasion de se déployer. Mais la gloire de l’évangile, c’est que Dieu s’y montre juste en justifiant. Lorsque le pécheur est reconnu juste, ce n’est pas simplement que Dieu pardonne et montre de la miséricorde, mais qu’il est juste en justifiant. Il en est ainsi à la Pâque. Dieu, cette nuit-là, descendit en jugement à la fois sur l’homme et sur les dieux de l’Égypte. Il manifesta sa haine pour le péché comme il ne l’avait jamais fait précédemment et cela d’une manière tout aussi évidente dans ses rapports avec Israël que dans ses rapports avec les Égyptiens. La mort passa ; elle est le salaire du péché. Cette nuit-là, dans toutes les maisons d’Égypte, le premier-né était étendu sans vie, et les lamentations annonçaient à tout le pays ce que c’était que mépriser les avertissements du Seigneur. Au même moment, à la porte de chaque maison israélite, les poteaux aspergés de sang déclaraient non moins clairement que Dieu est juste et en même temps celui qui justifie ; ils parlaient d’un substitut, du sang d’un autre : images de l’Agneau de Dieu et de l’effusion de son sang.

Toutefois ce n’était pas là toute la bénédiction. L’agneau pascal tenait simplement Dieu dehors, empêchait seulement son jugement de tomber sur les Israélites. Est-ce là toute la rédemption ? C’est l’opinion de beaucoup, mais combien elle méconnaît la rédemption selon Dieu ! Pour nous faire comprendre celle-ci, Dieu ajoute un autre type comme complément du premier, savoir la mer Rouge. L’élite de l’Égypte y trouva son tombeau, alors que Dieu faisait passer Israël à travers ce qui semblait devoir être une mort certaine, mais qui en réalité devint un type de la vie éternelle et leur pleine sécurité. C’est l’aspect que prennent pour le chrétien la mort et la résurrection de Christ. Maintenant pour la première fois Dieu daigne parler de salut en rapport avec son peuple (Exode 14:13, 30 ; 15:2), alors que rien de ce qui avait été opéré antérieurement n’a pu être appelé le salut.

Remarquons à cette occasion combien il est inexact et dangereux pour les âmes de parler d’une connaissance non mûrie et incomplète de Dieu comme étant le salut. On entend par exemple dire quelquefois : «Il est vrai, cet homme n’est pas encore heureux, il n’a aucune liberté d’âme ; mais en tout cas, il est sauvé». L’Écriture ne sanctionne jamais un pareil langage. Ce qu’elle désigne comme le salut n’est pas simplement la vie nouvelle, l’état d’une âme ayant reçu de Christ ce qui lui permet de se juger et de crier vers Dieu. L’Écriture réserve généralement le nom de «salut» au fait d’être amené par l’Évangile dans une liberté dont on a conscience, en réalisant la délivrance actuelle de tous les ennemis, par la puissance de Dieu en Christ.

Aussi n’entendons-nous parler de salut que lorsque Israël parvient à la mer Rouge, au moment où s’opère la pleine et entière délivrance du pays d’Égypte et la destruction totale de ses fiers ennemis. «Tenez-vous là, dit Moïse, et voyez la délivrance de l’Éternel, qu’il opérera pour vous aujourd’hui» (v. 13). Ce n’était pas la nuit de la fête pascale ; c’était le jour où ils purent regarder derrière eux la mer Rouge traversée pour toujours. D’où l’importance de nous en tenir strictement au langage des Écritures et de ne reconnaître rien de moins comme étant le salut. Sinon comment aider les enfants de Dieu à s’emparer par la foi de la puissante victoire de Christ, à défaut de quoi ils demeurent dans l’anxiété et le trouble, au lieu de jouir de la paix. Il est capital, en effet, pour une âme d’être travaillée profondément par l’Esprit et de découvrir ce qu’elle est devant Dieu ; mais jusqu’à ce qu’elle puisse se reposer avec simplicité et confiance sur l’oeuvre achevée de Christ, elle ne possède pas ce que Dieu appelle le salut dans son sens complet.

Après que cette oeuvre puissante est opérée — pour autant qu’il s’agit du type — alors, pour la première fois, nous entendons chanter Israël. Le cantique est entonné sur l’autre bord de la mer Rouge. «Je chanterai à l’Éternel, car il s’est hautement élevé ; il a précipité dans la mer le cheval et celui qui le montait. Jah est ma force et mon cantique, et il a été mon salut. Il est mon Dieu, et je lui préparerai une habitation». La vérité ressort ici d’une manière remarquable ! Le type tout entier de la résurrection aussi bien que de la mort est placé devant nous ; et alors pour la première fois, nous entendons parler du salut, et immédiatement le coeur désire que Dieu ait une habitation. Devons-nous supposer que ceux qui chantèrent ainsi dans le désert aient été plus agréables à Dieu que leurs pères ou que les patriarches du livre de la Genèse ? Au contraire ! Parmi ces derniers, il s’en trouvait plusieurs que Dieu avait honorés de façon exceptionnelle et choisis pour être les dépositaires de ses secrets : un Noé exempté du jugement infligé au monde entier, un Hénoc élevé au ciel sans passer par la mort, un Abraham, ami de Dieu qui lui avait fait l’honneur de souper avec lui. Est-il nécessaire de rappeler comment ce dernier fut fait l’objet des promesses divines — promesses qui poursuivront leur cours en bénédiction jusqu’à ce que tous les âges soient achevés dans l’éternel repos de Dieu ?

Il est donc impossible de supposer que Dieu ait révélé la rédemption aux fils d’Israël plutôt qu’aux patriarches par préférence pour les premiers. Mais c’est justement ce qui met en relief les merveilles de la rédemption. Elle ne doit rien à l’homme. Et seule la mort de Christ et la rédemption elle-même pourront l’expliquer. Pensons, en effet, à ce que mérite la rédemption, par qui et comment elle a été acquise. Elle réclamait l’intervention personnelle du Fils de Dieu, sa venue dans ce monde comme un homme, comportant non seulement l’abandon pour un temps de la jouissance de sa gloire propre, mais aussi l’entrée en grâce dans les circonstances de sa créature avec leur lot de honte et de souffrances. Puis, au lieu d’entrer dans une place de bénédiction et de gloire, il est descendu au contraire dans un abîme plus profond, après que l’homme eut fait contre lui tout ce qu’il pouvait, après que Satan eut épuisé ses efforts ; oui, c’est alors seulement que fut résolue la question suprême qui devait se régler entre Dieu et ce Bien-aimé. Question qui devait entre toutes être la plus terrible, la plus éprouvante et pour Dieu et pour Christ. Car que peut-on comparer à cette heure extraordinaire où le péché dut être jugé par Dieu, et puni de la plus étrange manière que l’homme puisse concevoir — imputé à celui qui y était le plus étranger : le Saint Fils de Dieu, et cela par Dieu lui-même ?

Dès lors peut-on s’étonner que Dieu voie dans la rédemption une valeur aussi infinie ? Il peut trouver là son repos, en sorte que les cieux des cieux cessent, pour ainsi dire, de le contenir. C’est comme s’il disait : «Mon Esprit ne peut davantage demeurer en haut. Il faut qu’il descende et habite où se trouve ce sang précieux». Ce lieu a beau avoir été le plus souillé de toute la création, le témoin de la rébellion la plus insensée ; ni l’état de la terre, ni la révolte de la créature contre Dieu et contre son Oint, ne pouvait retenir Dieu dans le ciel plus longtemps. Son estimation des souffrances de Christ le contraignait en quelque sorte à venir demeurer sur cette même terre et parmi les membres de cette même race qui l’ont toujours traité d’une manière outrageuse. Cela seulement explique pourquoi Dieu peut avoir sa demeure parmi nous sur la terre. La rédemption explique le fait et le Saint Esprit l’effectue dès que la rédemption est accomplie. Aussi est-ce lorsque le type de la rédemption est accompli que l’habitation typique de Dieu devient immédiatement l’objet du désir des siens sur la terre. Et quand la vraie rédemption, la rédemption éternelle, fut un fait accompli, Dieu descendit réellement pour habiter ici-bas, demeurant pour toujours dans les rachetés par le Saint Esprit. En vérité rien ne peut être plus harmonieux que les faits typiques d’un côté, ou leur accomplissement réel de l’autre, dans la rédemption éternelle que Christ a acquise pour le chrétien.

4.3.4        [La sainteté accompagne l’habitation de Dieu]

Mais un autre point encore mérite d’être souligné. Ce chapitre 15 de l’Exode, qui exprime le désir du peuple de préparer une habitation pour Dieu, est aussi le premier chapitre de la Bible dans lequel la sainteté de Dieu soit présentée. Comment comprendre que Dieu ait attendu tant de temps avant de donner une révélation de lui-même, dans son caractère de sainteté et dans ses voies avec les hommes ici-bas ? Sans doute trouvons-nous une allusion à la sainteté quand Dieu sépara et sanctifia le septième jour (Gen. 2:3), seul passage qui puisse paraître faire une exception. Ainsi, avant qu’il soit question de péché, Dieu trouva bon de donner en instituant le sabbat un gage de «ce repos qui reste pour le peuple de Dieu». Mais lorsqu’il s’agit des rapports de Dieu avec l’homme, pas un mot n’est prononcé sur la sainteté divine dont, avant la rédemption, l’homme ne pouvait avoir aucune vraie notion et qu’il n’aurait pu supporter.

Un peu plus bas, verset 11, nous lisons : «Qui est comme toi parmi les dieux, ô Éternel ? Qui est comme toi, magnifique en sainteté, terrible en louanges, opérant des merveilles ?» Cette louange, nous le verrons, se lie avec l’habitation de Dieu selon le Nouveau Testament. Ici les deux faits sont pour la première fois présentés ensemble comme conséquence de l’accomplissement de la rédemption typique. Car ce n’est que lorsque la rédemption est accomplie que l’homme peut supporter la pleine révélation de la sainteté de Dieu. Mais, dès l’instant où l’Éternel accomplit la délivrance, type de la rédemption, les Israélites peuvent parler sans anxiété et, dans leur mesure, se réjouir et louer son nom. Il ne s’agit encore que d’une délivrance terrestre, néanmoins ils chantent la sainteté de Dieu.

4.4   [Rédemption, sainteté et habitation de Dieu dans la Nouveau Testament]

4.4.1        [Éphésiens 2]

À présent, si nous nous tournons vers le Nouveau Testament, nous y voyons la réalité qui répond à ces figures (Éph. 2). La pleine rédemption est opérée. Le Fils de l’homme a donné sa vie en rançon pour plusieurs. L’effet en est d’amener les âmes près de Dieu, même les plus éloignées et cela dans une parfaite paix dont Christ lui-même est l’expression. «C’est lui qui est notre paix» (v. 14), bénédiction à laquelle rien ne peut être comparé et dont rien n’approche. Mais c’est alors que nous commençons à entendre parler de l’habitation de Dieu.

4.4.2        [1 Cor. 3 — La présence du Saint Esprit fait qu’il y a temple de Dieu]

Et cette vérité n’est pas confinée à une seule épître. Prenez par exemple, 1 Corinthiens 3. «Nous sommes collaborateurs de Dieu, proclame l’apôtre ; vous êtes le labourage de Dieu, l’édifice de Dieu». L’apôtre parle de sa propre responsabilité : «Selon la grâce de Dieu qui m’a été donnée, comme un sage architecte, j’ai posé le fondement», déclare-t-il. Celui-ci est bâti sur le fondement des apôtres et des prophètes. À ce titre, Paul en appelle à eux : «Ne savez-vous pas, dit-il, que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous ?» Et c’est le point de départ d’un ardent appel à la sainteté : «Si quelqu’un corrompt le temple de Dieu, Dieu le détruira, car le temple de Dieu est saint, et tels vous êtes». Ce verset n’est pas une simple révélation de ce que doit être l’Église dans la suite, mais il parle de faits actuels. Il est de la plus grande importance que les chrétiens sachent et comprennent que le christianisme ne se compose pas seulement de doctrines, mais de faits, lesquels sont le fondement de la doctrine. Ces faits concernent une personne, un homme réellement vivant, qui est né dans ce monde ; qui a vécu, est mort puis a été ressuscité ici-bas, quoiqu’il soit maintenant allé au ciel. Et cette personne, Christ, n’est pas seulement l’intermédiaire par lequel nous apprenons à connaître la vérité, il est lui-même la substance de la vérité qu’il fait connaître. Ôtez Christ du christianisme et que reste-t-il ? Et maintenant qu’il est parti, Dieu réalise le christianisme par une autre personne, savoir le Saint Esprit descendu sur la terre, qui, au lieu de supplanter Christ, est aujourd’hui la puissance pour nous le faire connaître. Je ne puis réellement connaître Celui qui est parti, sinon par Celui qui est venu. C’est sa présence qui constitue le temple de Dieu. Le Saint Esprit habite dans les saints sur la terre, selon qu’il est déclaré : «Vous êtes édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu par l’Esprit».

Mesurons-nous, chers frères et soeurs, l’immense importance d’un fait tel que celui-là ? Est-ce la pensée qui remplit nos coeurs lorsque nous nous rassemblons, soit pour adorer, soit pour nous édifier mutuellement ? La foi en la présence du Saint Esprit nous console-t-elle ? Comptons-nous sur le Seigneur comme étant vraiment au milieu de nous ? Ou bien ne sommes-nous occupés que de ceux qui composent cette assemblée ou qui ouvrent la bouche pour l’adoration, ou pour l’édification des saints ? Que penserait-on de l’invité d’un roi qui ne s’intéresserait qu’à de menus détails de l’organisation du palais ? Il est évident que le but même de la visite serait perdu pour lui. À plus forte raison si nous réfléchissons qu’il se trouve une personne vivante et divine, présente dans l’assemblée ici-bas, et dont seule la présence fait que l’assemblée est celle de Dieu. La foi de ceux qui sont réunis ne suffit pas à leur donner collectivement ce caractère d’assemblée de Dieu, pas plus que leur foi ne donnait aux saints de l’Ancien Testament le droit de faire partie de l’Église. Ce n’est pas davantage la vie nouvelle qui donne ce droit. Tous les saints depuis le commencement étaient nés de nouveau, et pourtant l’assemblée de Dieu n’a existé qu’à partir de la Pentecôte. Le seul fait qui pouvait donner à un rassemblement de croyants le titre d’assemblée de Dieu, c’est la présence de Dieu lui-même ; et il est là par le Saint Esprit.

4.4.3        [Présence de faux chrétiens]

Je dirai plus : cela est si capital que le fait que quelques personnes non nées de Dieu ont pu se glisser furtivement parmi les saints ne détruit pas son assemblée. Une telle situation est pénible et humiliante ; mais je n’ai pas à m’en alarmer, ni à en être trop abattu. Nous devons être affligés d’avoir eu assez peu de discernement pour permettre à des âmes non nées de Dieu de pénétrer dans l’assemblée de Dieu. Mais ne nous étonnons pas que Satan mette tout en oeuvre pour souiller et détruire celle-ci. Elle est ce qui est le plus près du coeur de Dieu sur la terre, la plus grande gloire présente de Christ. C’est à elle que Dieu a confié sa vérité, d’elle qu’Il attend une réponse à sa gloire morale et à son caractère ici-bas. Il a envoyé son Esprit pour demeurer dans l’Église, celle-ci devenant sa propre habitation par l’Esprit. Cette présence du Saint Esprit est la raison même (et la seule) de nos riches et multiples bénédictions.

Il est donc possible, si triste que ce soit, que quelques personnes, après avoir été amenées sans posséder la vie dans leur âme, sortent ensuite de l’Église. On constate alors que ces faux chrétiens sont capables de devenir les plus ardents adversaires, non seulement de l’Assemblée, mais de Christ lui-même, haïssant son nom, et reniant sa gloire. Le chapitre 6 des Hébreux parle de personnes de ce genre. Elles avaient eu part à d’étonnants pouvoirs, jusqu’à être devenues participantes du Saint Esprit, chose que certains ont peine à comprendre mais qui s’accorde parfaitement avec la vérité et nous donne la clef des faits qui, hélas, peuvent arriver en tout temps. Il s’est trouvé dès le commencement des hommes qui se sont glissés parmi les saints. Et ces hommes, quand ils se détournent ensuite, sont d’autant plus mauvais — deux fois morts, comme les qualifie l’apôtre Jude — parce qu’ayant assumé la place de témoins du Seigneur Jésus, ils se sont éloignés de Lui, ont abandonné la vérité, l’ont traitée avec le plus grand mépris, et sont devenus des fanatiques infiniment plus violents contre la vérité de Dieu qu’ils n’ont été jadis zélés pour la défendre. Ces hommes peuvent avoir possédé un grand nombre de privilèges extérieurs, car il en existe et non de médiocre valeur, mais ils y ont eu part entièrement en dehors de la vie éternelle. Aucun de tels professants n’a jamais été vivifié de Dieu.

La vie éternelle n’est nullement un privilège extérieur, et il n’est jamais question dans la Parole d’un homme qui, ayant été rendu une fois participant de la vie éternelle, ait ensuite perdu cette vie. Ceux qui ont reçu la vie divine ne peuvent pas la perdre. Par contre il est très possible qu’un homme, touché seulement dans ses sentiments et persuadé dans son intelligence, renie le Christ qu’il professait, et cesse de marcher avec lui. Tel fut le cas de certains disciples scandalisés par l’enseignement du Sauveur, si impitoyable pour la chair et le monde. Le chrétien de pure profession, mort par nature, était désormais deux fois mort, comme dit Jude, ayant renoncé à ce qu’il semblait avoir, et étant retourné aux ordonnances terrestres, ou même au péché flagrant avec plus de plaisir qu’auparavant et une haine accrue contre ce qu’il abandonnait ainsi ouvertement. Telles sont les personnes décrites en Hébreux 6 et 10, et de telles désertions, annoncées par l’Écriture, se présentent de temps en temps devant les yeux des chrétiens attristés.

Ainsi la chair peut aller fort loin dans la profession de la vérité et la possession de tous les privilèges et pouvoirs extérieurs dont il soit permis de jouir, et cela plus encore sous l’économie chrétienne que dans les temps anciens. Nous savons par exemple que, dans l’Ancien Testament, Saül s’insinua parmi les prophètes ; d’autres furent doués de grands pouvoirs par le Saint Esprit, qui, alors comme à présent, était le seul agent d’énergie divine pouvant opérer par qui il voulait pour la gloire de Dieu. Maintenant la grâce divine, lorsque l’homme ose s’en prévaloir, fournit occasion à plus d’abus encore. Il est tout à fait possible aux inconvertis de tromper à la fois eux-mêmes et l’Église de Dieu, et de s’introduire dans celle-ci, faisant profession du nom de Jésus d’autant plus facilement qu’ils ont moins de conscience.

Dieu scelle maintenant du Saint Esprit celui qui a la véritable foi et la vie éternelle. Mais le fait que l’Esprit soit donné comme sceau ne doit pas nous faire oublier les pouvoirs extérieurs qu’il confère. Hébreux 6 ne parle pas plus de son sceau que de la vivification des âmes, ni du gage que le chrétien possède en Lui de l’héritage prochain de la gloire. Les termes employés dans ce passage sont parfaitement pesés et ne laissent place à aucune équivoque. Il s’agit là de faux chrétiens qui ont pu participer au pouvoir du Saint Esprit mais dont on ne peut s’étonner qu’ils abandonnent ensuite le nom du Seigneur, en vertu duquel de tels pouvoirs leur avaient été conférés.

Cela explique aussi l’état présent de la chrétienté — l’extension de l’habitation de Dieu aux incrédules et aux profanes, qui extérieurement portent le nom du Seigneur Jésus, et s’aventurent indûment là où la présence de Dieu est réalisée par le Saint Esprit. Par négligence, on en est venu à disposer légèrement des privilèges extérieurs, comme, par exemple, du baptême au nom du Seigneur Jésus, et à permettre par l’appropriation irrégulière de ces avantages que des multitudes de professants inconvertis envahissent l’Église. Ainsi la maison de Dieu, quoique l’Esprit y habite, a été progressivement corrompue de toutes manières ; et, à mesure qu’une ambition profane rechercha un accroissement d’influence en dehors des intentions de Dieu, l’homme, comme toujours, perdit de vue sa responsabilité solennelle et tourna la grâce de Dieu en dissolution.

4.5   [La maison de Dieu et la responsabilité de l’homme]

Une remarque importante s’impose ici. Nous avons dans l’Écriture, non seulement la maison de Dieu selon la pensée divine, décrite à la fin d’Éphésiens 2, mais aussi sa connexion avec le travail de l’homme et sous sa responsabilité, dans 1 Corinthiens 3. Enfin 2 Timothée 2 nous fournit une esquisse, à la fois morale et prophétique, de ce qui était déjà à l’oeuvre au temps de l’apôtre. Celui-ci exhorte Timothée à se montrer approuvé de Dieu et à éviter les vains babils. Il parle de personnes qui s’étaient égarées de la vérité, mais en même temps il réconforte son fidèle compagnon de service, accablé par les difficultés et les dangers du moment, en lui adressant ces consolantes paroles : «Toutefois le solide fondement de Dieu demeure, ayant ce sceau : Le Seigneur connaît ceux qui sont siens, et : Qu’il se retire de l’iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur. Or, dans une grande maison, il n’y a pas seulement des vases d’or et d’argent, mais aussi de bois et de terre ; et les uns à honneur, les autres à déshonneur. Si donc quelqu’un se purifie de ceux-ci, il sera un vase à honneur, sanctifié, utile au maître, préparé pour toute bonne oeuvre». Nous avons évidemment ici une description très exacte d’un état de choses en voie de progrès rapides. Cette condition de «grande maison» est pleinement réalisée de nos jours où la chrétienté a atteint sa pleine croissance. Elle se présente comme un vaste édifice, où se trouvent des vases à honneur aussi bien que des vases à déshonneur.

4.6   [Le chrétien face au mal dans l’Église]

4.6.1        [Se purifier]

Que doit donc faire le chrétien qui veut être fidèle ? Abandonner la grande maison ? Certainement non. En sortir serait cesser d’être chrétien. Ce que nous avons à faire, c’est de nous séparer de tout ce qui est contraire à la volonté du Seigneur, sans jamais abandonner la profession de son nom. Cette profession de Christ est en elle-même la seule position révélée qui soit bonne et complète ici-bas. Les rachetés la Lui doivent et c’est une bénédiction pour eux au même titre que leur salut. Car qui peut être sauvé, sinon celui qui invoque le nom du Seigneur ? De sorte que pour le croyant sur la terre, depuis qu’il est arrivé à la connaissance du Seigneur, confesser son nom est évidemment une joie autant qu’un devoir. Il n’est jamais autorisé à abandonner la maison caractérisée par la profession du nom du Sauveur. Mais, dans cette grande maison, il existe des vases à honneur et des vases à déshonneur. Que doit faire l’enfant de Dieu ? Il lui est enjoint de se purifier des vases à déshonneur. Telle est la signification du texte, telle est l’intention manifeste du Saint Esprit. «Si donc quelqu’un se purifie de ceux-ci...», est-il écrit en parlant des vases à déshonneur. En pratique, c’est cesser d’avoir communion avec ce que l’on sait être condamné par la Parole de Dieu, abandonner tout ce que l’Écriture démontre opposé à sa volonté.

4.6.2        [La Cène, le ministère, le culte]

Si donc un homme se trouve rattaché et soumis à un ministère établi contrairement à la Parole ou bien encore qui falsifie une institution du Seigneur (la cène, par exemple), qu’il l’abandonne aussitôt ! Le Seigneur ne veut pas que son serviteur sanctionne ce qui est contraire à la vérité et à la sainteté. Comment par ma présence, m’associerais-je à la profanation de la cène du Seigneur transformée en un sacrement, devenue moyen de grâce pour n’importe qui ? Celui qui possède tant soit peu de connaissance de la Parole de Dieu sait parfaitement que la volonté du Seigneur est méconnue dans ces graves questions. Dois-je donc abandonner la cène du Seigneur, ou me passer du ministère de la Parole ? Certainement non. Ce qu’il me faut abandonner, c’est l’abus qu’en ont fait les hommes. Je dois en avoir fini avec ce qui, n’étant pas selon les Écritures, est manifestement au déshonneur de Dieu. Je ne renonce donc ni au ministère chrétien, ni à la cène du Seigneur ; mais je juge, selon la Parole de Dieu, autant que j’en suis rendu capable par sa grâce, quelle est sa volonté à cet égard. Le même principe s’applique à tous les autres points. Prenez le culte, par exemple ; je dois sonder les Écritures pour juger ce qu’est aujourd’hui le culte chrétien selon la Parole de Dieu. Ne suis-je pas tenu d’agir ainsi, de suivre la volonté de Dieu ?

4.6.3        [Pas de simples arrangements préférés]

Ce n’est donc pas assez pour moi et ce ne devrait satisfaire aucun chrétien de savoir que ceux qui composent la congrégation à laquelle je me rattache sont tous des enfants de Dieu. Encore moins s’agit-il d’organiser des chrétiens en diverses classes de doctrines en fonction de leurs préférences. Quelle présomption ! Qui vous a chargé de régler l’ordre de la maison de Dieu ? Qui vous a donné le droit d’établir ceux-là ici et ceux-ci là ? Le caractère et le témoignage de l’Église de Dieu sont détruits par tout arrangement pareil. À supposer que tous ceux qui sont en communion professent exactement mes vues ou les vôtres sur tous les points, je regarderais cela comme une grande calamité pour l’Église de Dieu. Ce serait donner de l’état des saints une appréciation tout à fait fausse que de les voir ainsi ligués ensemble avec des vues identiques ; tous absolument remplis des mêmes pensées ; satisfaits les uns des autres, et méprisant ceux du dehors qui n’ont pas les mêmes sentiments. Même en admettant que toutes les vues professées soient justes et que les choses faites soient conformes à la pensée de Dieu, à mon avis, un pareil tableau ne répond ni à l’Écriture ni à l’amour de Christ.

4.6.4        [Pratiquer l’Église comme dans la Parole de Dieu]

Disons-le sans détour : l’Église de Dieu n’est pas une citadelle pour les forts, les sages et les intelligents seulement. Ce n’est pas une belle résidence pour ceux qui sont arrivés à un certain degré de sainteté, encore moins de connaissance. Le Seigneur veut que je considère toujours tous les saints (excepté ceux qui sont dans le péché ou la fausse doctrine). L’Assemblée constitue le corps de Christ, dans lequel les divers membres occupent chacun leur place : l’oeil, la main, le pied. Le faible a sa fonction aussi bien que le fort, selon qu’il plaît à Dieu de distribuer et d’ordonner. Comme l’enseigne l’apôtre au coeur large, les membres les moins honorables, loin d’être laissés en dehors, sont traités avec plus d’honneur parce qu’ils sont en danger d’être méprisés. Serions-nous plus sages que l’Écriture ? Les forts sont appelés à porter les infirmités des faibles au lieu de se plaire à eux-mêmes. Les rationalistes religieux ne prennent guère en considération que les forts, c’est-à-dire ceux qui ont la même pensée, ou qui ont atteint un certain degré de connaissance. Mais est-ce là Christ ? L’Église de Dieu devrait être devant nos coeurs telle qu’elle est dans sa Parole. Souhaiter établir autre chose que ce qu’il nous a donné est une preuve d’insoumission et engendrera la confusion partout où on aura cherché à appliquer ces théories.

4.6.5        [Des égards pour les faibles et ignorants ; pas d’indifférence pour le péché reconnu]

Soyons convaincus que c’est la volonté de Dieu à notre égard, particulièrement dans l’état actuel de ruine de l’Église, que celui qui est le plus affermi dans la sagesse divine veille affectueusement sur les ignorants et les faibles ; qu’il cherche à marcher envers tous les saints selon l’amour de Christ pour l’Église. Assurément Christ chérit, non seulement les membres de son corps les plus dignes et les plus honorables, mais l’Église comme un tout. Et s’il peut exister des différences, ce sont précisément ceux qui ont le plus besoin de son amour qu’il chérit le plus. Ne devons-nous pas avoir communion avec lui et lui ressembler en cela ? De la même manière Dieu considère son Église tout entière comme étant son habitation par l’Esprit. Il reconnaît tous ceux qui invoquent le nom du Seigneur. Ici naturellement, en Éphésiens 2, seuls ceux qui portent vraiment son nom y ont part, mais en est-il de même pour ceux qui le font indûment ? Pas le moins du monde assurément, si ce n’est pour le jugement. Dans l’état présent de la chrétienté, nombreux sont les vases à déshonneur. Dois-je m’unir à eux ? L’Esprit Saint ne me le permet pas et m’invite au contraire à m’en purifier. La communion avec des vases à déshonneur est un mal. Je suis appelé à m’en séparer si eux refusent de se séparer de ce qui porte le nom du Seigneur. Sans quoi je fais partie du mystère d’iniquité, car si un chrétien continue à être en communion avec un mal reconnu, c’est reconnaître implicitement qu’il y a accord de Christ avec Bélial, et il en est ainsi soit dans le support d’une fausse doctrine ou d’un péché moral, soit dans l’indifférence qui ignore la présence du Saint Esprit neutralisé par des interventions humaines.

Mais quelles que soient les formes particulières du mal toléré, lorsqu’il n’est pas possible de le juger, le devoir clair et positif consiste à s’en purifier. Agir ainsi n’est pas de la présomption, c’est la simple obéissance à Dieu. Il est formellement requis de tout homme qui invoque le nom du Seigneur de se retirer de l’iniquité ; il doit se purifier des vases à déshonneur quels qu’ils soient et où qu’ils soient. Si des personnes portant le nom du Seigneur s’adonnent au péché, ce sont des vases à déshonneur, et le chrétien est tenu de s’en éloigner et de se maintenir pur. C’est la ligne de conduite invariable, prescrite en un état de corruption de la chrétienté, aussi sûrement que d’autres passages traitent de cas individuels dans lesquels l’assemblée doit agir en discipline. Jamais le désir de paix ou d’unité n’autorise la moindre atteinte au caractère de Christ qui ne doit être compromis à aucun égard. Le premier devoir chrétien est de rendre au nom de Christ ce que nous lui devons. Nous n’avons jamais à sanctionner le mal ou à fermer les yeux à son sujet.

Soulignons qu’il ne s’agit pas seulement de mal grossier ou de torts flagrants. L’Église, étant l’habitation de Dieu, doit être intolérante pour tout ce qui ne convient pas à Sa présence, quoique nous ayons aussi besoin de patience ; et qui est aussi patient que Dieu ? Mais il veut être sanctifié dans tous ceux qui l’approchent, et au milieu desquels il habite. Tout ce qui est contraire à sa Parole doit être jugé. À supposer qu’il n’y ait, comme disent les hommes, qu’un peu de mal, dois-je lier le nom et la présence du Seigneur, pour ne pas parler de moi-même, même avec un «petit» mal ? Loin de nous une telle pensée ! Non que nous soyons appelés à nous séparer pour toute faute, mais nous ne devons jamais participer à ce qui est contraire à la Parole et, par la grâce de Dieu, nous en tenir toujours purs. En même temps, la manière dont cela doit être fait doit être déterminée par la Parole de Dieu. Par exemple il peut être nécessaire de blâmer un frère sans pour cela l’éloigner de l’assemblée, ce qui, par contre, doit être fait pour «le méchant» (1 Cor. 5). En aucun cas, un chrétien n’est tenu de cheminer avec ce qu’il sait être offensant pour Dieu. De plus, nous avons à nous juger, de peur d’être trop prompts à imputer le mal. Dieu veut que ses enfants soient lents à soupçonner, à parler, à agir en de telles circonstances. Hélas ! combien nous sommes prompts à imputer aux autres le mal que nos consciences nous reprochent à nous-mêmes !

4.7   [La présence de Dieu dans l’Église]

4.7.1        [Cette présence comme encouragement et source de responsabilité]

D’un autre côté, notre encouragement et notre consolation, aussi bien que la source de notre responsabilité, c’est que Dieu habite dans l’Assemblée. Nous pouvons et devons compter sur ce fait béni, assurés qu’Il nous aidera, nous entendra, se montrera pour nous. Oui, quels que soient la difficulté, le chagrin, la honte, ayons cette confiance : Dieu habite dans l’Assemblée qui est son temple. Elle peut n’avoir qu’une humble apparence, elle peut n’être représentée dans tel ou tel endroit que par deux ou trois individus seulement. Il peut arriver qu’un enfant de Dieu soit obligé de se tenir tout seul à l’écart ; il peut même ne pas y avoir de sentiment suffisant de la vérité pour produire ce résultat ; quoi qu’il en soit, il n’existe pas de circonstance possible où un membre de Christ soit obligé d’avoir communion avec ce qui est contraire à la volonté de Dieu. Il peut avoir à faire de sages et fermes remontrances, à attendre patiemment, mais tolérer le mal connu, jamais ! Ce n’est pas le mal en lui-même ni son importance qui détruisent la qualité de temple de Dieu, mais l’acceptation d’un mal connu, le fait de le supporter consciemment, même par simple indifférence. Lorsque ce qui porte le nom de maison de Dieu se rend coupable d’associer ce nom avec un mal toléré, Dieu se doit à lui-même de renier toute relation avec elle. La question est alors simple, quoique douloureuse : il faut abandonner ce qui a cessé d’être un témoignage au Dieu de vérité. Quel droit un tel groupement pourrait-il avoir encore sur la foi du croyant pour le retenir ? En même temps son départ constituera un puissant appel à la conscience de ceux qui restent.

En fait le caractère d’Église selon la Parole est déterminé par la présence de Dieu et nullement par la profession, le préjugé, la tradition ou la volonté humaine. N’est-ce pas alors chose extrêmement sérieuse de reconnaître ou de méconnaître un rassemblement comme assemblée de Dieu ? Celui qui le fait à tort ou à la légère fait bon marché du nom de Dieu et le méprise. Il ne s’agit donc pas de simples divergences de vues fondées sur l’opinion et les sentiments des hommes, mais de savoir si oui ou non Dieu est là. Sa Parole est la pierre de touche et son Esprit la puissance ! Et chaque fois qu’Il rencontre une foi simple, Dieu se manifeste, entend le cri et vient en aide. Rien ne peut être plus simple et en même temps plus certain : l’Esprit rendra évident le sentier d’un croyant qui est exercé et qui s’attend au Seigneur.

4.7.2        [Pas d’infaillibilité]

Ce n’est pas, observons-le, à son infaillibilité que se reconnaît l’Église. Elle peut hélas, cela va sans dire, commettre bien des erreurs. Les mesures prises dans la discipline sont parfois trop promptes, trop lentes, parfois même arbitraires ou erronées. De fait, il en est de l’Assemblée comme du chrétien individuellement. Et nous le comprenons. Si les saints collectivement sont le temple de Dieu, chacun l’est aussi individuellement. Or, qui oserait soutenir qu’un chrétien est exempt de mal ou d’erreurs parce que le Saint Esprit habite en lui ? Le principe est le même pour l’Assemblée de Dieu, elle aussi est toujours faillible. Elle peut être gardée dans la pratique, compte tenu des hommes de Dieu qui s’y trouvent. Un individu peut facilement se tromper, mais il est difficile de supposer qu’au milieu d’une assemblée fidèle, il ne s’en trouve pas un seul qui regarde au Seigneur de manière à comprendre sa pensée. Cela pourtant peut hélas arriver ; et particulièrement lorsque l’influence dominatrice d’un ou de plusieurs frères affaiblit le sentiment que doit avoir l’assemblée de sa dépendance de Dieu. Il est évident qu’un faux principe, une fausse position ou même une simple précipitation peut exposer une assemblée de Dieu à mal agir. Aussi est-il capital, quels que soient les serviteurs de Dieu à l’oeuvre, de se rappeler que la seule sauvegarde est celle-ci : Dieu est là. Il peut trouver bon de corriger le plus sage de ses serviteurs sur la terre par un faible enfant dans la foi.

4.7.3        [L’autorité est celle de Dieu]

Répétons-le avec force : l’Église n’est pas l’assemblée d’un homme, même d’un Paul ; c’est l’Assemblée de Dieu. Ce qui signifie par exemple que dans un cas de discipline, ce serait la destruction de cette assemblée si les mesures prises devaient l’être pour elle par un ou plusieurs frères agissant indépendamment du reste de l’assemblée. Certes l’Église doit savoir apprécier les dons et les charges que le Seigneur a donnés pour la guider. L’Église abandonnerait ses propres grâces si elle méprisait le secours de l’un ou de l’autre. Incontestablement certains frères ont de la sagesse, du discernement, l’expérience des âmes, et sont plus que d’autres capables de juger justement sur ces sujets pratiques. Mais l’autorité appartient à Dieu, et il entend l’exercer lui-même dans sa propre assemblée jusqu’au dernier moment. C’est pourquoi lorsque dans un rassemblement il n’est pas laissé de place pour réviser ce que des individus ont pu juger, lorsque l’Esprit n’a plus la liberté de récuser par le plus faible membre présent du corps de Christ, le jugement du plus sage des conducteurs, un tel rassemblement n’a pas plus le caractère d’assemblée de Dieu qu’aucune autre société de croyants sous le soleil.

4.7.4        [L’Église est à Dieu]

Ainsi, l’Assemblée ne résulte pas simplement d’une doctrine pure, de grands dons, ou de précieuse communion fraternelle. Toutes ces choses y ont leur place, mais la vérité fondamentale à saisir et à maintenir toujours c’est que l’Église, même aujourd’hui, est la propre Église de Dieu. Et Dieu, parce qu’il y habite, exercera son action souveraine, répandra de nouvelles lumières, corrigera par qui il lui plaira les frères les plus expérimentés et sur lesquels on s’appuie trop. Cette possibilité doit toujours exister, car Dieu ne permettra pas que nous nous glorifiions dans la chair, à plus forte raison par le moyen des dons qu’il a accordés. Soyons reconnaissants pour tous les fruits de sa bonté, bénissons-le pour tout ce qu’il nous a donné, mais souvenons-nous que l’Église est à Dieu, qu’il aime à y être reconnu, et qu’il fera sentir sa présence dans l’Assemblée qui a foi en lui.

La foi aime à savoir et à voir Christ au milieu des siens ; et cela dans les temps les plus sombres quand même deux ou trois seulement seraient réunis en son nom. Et si nous regardons ainsi à lui, l’Esprit ne manquera pas de nous guider. Mais la trop grande confiance dans un conducteur, la présomption de celui-ci, la hâte de l’incrédulité, le relâchement, la propre justice ou tout autre triste fruit de la chair peut pratiquement séparer l’assemblée de la pensée de Christ dans un cas particulier. Ainsi l’assemblée, aussi bien que l’individu, doit toujours être accessible à la correction de l’Esprit par les Écritures. Et s’il y a manquement de sa part, l’humiliation lui convient devant le Seigneur qu’elle a déshonoré.

Veuille le Seigneur nous pénétrer de cette vérité que nous sommes l’habitation de Dieu, par l’Esprit. Qu’il nous donne d’en déduire les conséquences pratiques : à la fois la bénédiction et la responsabilité qu’elle entraîne pour nous.

 

5                        Méditation 10    L’Esprit dans l’Apocalypse et dans les Épîtres    Apocalypse 1:4, 5 ; 19:10

5.1   [Résumé sur le Saint Esprit dans les épîtres]

L’aspect sous lequel la vérité nous est présentée par le Saint Esprit dans le dernier livre du Nouveau Testament contraste avec le témoignage des épîtres. Aussi, avant de commenter ces versets de l’Apocalypse, nous examinerons brièvement la manière dont le Saint Esprit est présenté dans les épîtres, manière qui est toujours et entièrement déterminée par le but de celles-ci.

5.1.1        [Épître aux Romains]

Dans l’épître aux Romains, après avoir proclamé la ruine de l’homme et la justice de Dieu, l’apôtre en vient à la justice pratique qui y répond dans les enfants de Dieu, et le Saint Esprit prend sa place en rapport avec l’une et l’autre. Quand cette question de la justice est entièrement éclaircie, il peut être fait librement mention de l’amour de Dieu répandu dans nos coeurs par le Saint Esprit qui nous a été donné (5:5). Le Saint Esprit est ensuite manifesté comme une puissance qui non seulement remplace celle du péché mais se substitue à la loi, laquelle ne donne à des êtres tels que nous aucune capacité pour accomplir la justice (chap. 8). Ainsi d’une part la question entière de nos péchés et du jugement de Dieu contre eux, d’autre part celle du péché et de la délivrance du péché, ont été complètement résolues avant que l’Esprit de Dieu soit lui-même introduit. Il n’était pas convenable de présenter l’oeuvre qui doit se poursuivre dans le croyant, avant que Dieu ait été montré pleinement satisfait dans la rédemption et la résurrection de Christ. Mais c’est dans le chapitre 8 (c’est-à-dire quand non seulement le sujet de nos péchés, mais celui du péché ont été épuisés) que l’apôtre s’engage dans une ample exposition doctrinale : la doctrine de l’Esprit envisagé à la fois comme condition, comme état du chrétien, et aussi comme personne qui demeure dans le croyant.

5.1.2        [1° Épître aux Corinthiens]

Dans la première épître aux Corinthiens, le Saint Esprit nous est présenté sous un aspect tout à fait différent, et avec une plénitude remarquable. Ce qui avait donné lieu à l’apôtre de l’écrire, c’est la manière dont la chair était à l’oeuvre dans l’église de Corinthe, où elle opérait sous toutes les formes possibles, excepté le légalisme. On y était trop relâché pour aimer la loi, mais l’état charnel de ces chrétiens était tel qu’il n’y avait aucune puissance dans la loi pour y remédier : la loi ne peut que condamner celui qui est charnel. Christ seul peut remédier à un mal pareil, comme à tout autre mal, l’efficacité de son oeuvre étant appliquée à la conscience par la puissance du Saint Esprit. De là vient que nous trouvons dans cette épître la sagesse de l’homme jugée d’abord par la croix (chap. 1) et ensuite supplantée par les communications de l’Esprit de Dieu (chap. 2). Celui-ci donne la vérité, les paroles qui l’expriment, enfin la capacité de les recevoir et de les comprendre. Il est donc évident que les Corinthiens, qui, dans l’espoir de rendre l’Évangile plus agréable à la chair, voulaient introduire quelque sagesse humaine, étaient complètement en défaut, et, de fait, en opposition avec la pensée de Dieu.

Le chapitre 3 montre comment le Saint Esprit a constitué les croyants en un temple de Dieu et la sérieuse responsabilité qui en découle pour eux de n’y rien faire entrer qui soit incompatible avec cette présence. «Si quelqu’un corrompt le temple de Dieu, Dieu le détruira». Mais à supposer même qu’un homme ne corrompe pas le temple de Dieu — dans toute la force du mot — s’il y introduit des matériaux sans valeur, tout son travail sera perdu et brûlé ; quant à lui personnellement il sera sauvé, mais comme à travers le feu. Figure bien instructive, impliquant le jugement de Dieu sur l’oeuvre de chacun, quoique l’homme lui-même puisse échapper.

L’application suivante — et bien solennelle — de ce don du Saint Esprit concerne le corps du croyant (chap. 6). Ce n’est plus seulement le fait que les chrétiens constituent ensemble le temple de Dieu, mais que le corps de chaque chrétien est son temple. Les Corinthiens étaient tombés dans une erreur grossière qui s’est perpétuée de nos jours, à savoir que, pourvu que nous soyons intérieurement dans un bon état, ce qui affecte le corps est sans conséquence. Ne soyons pas trop difficiles, disent ces personnes, le corps n’est qu’une enveloppe charnelle dont nous n’avons pas à nous préoccuper ; ce qui compte, c’est l’homme intérieur, la santé morale de l’âme. Pas du tout, répond l’apôtre, le Saint Esprit se plaît à habiter dans le croyant et fait son temple, non pas de l’âme, mais du corps. Si le corps est consacré au Seigneur, s’il est mis dans un état de séparation par la puissance du Saint Esprit, tout ira bien pour l’âme. Au reste les raisonnements de ceux qui disent mépriser le corps servent souvent d’excuse pour s’adonner librement à la sensualité, en faisant taire la conscience et en cultivant même des pensées d’orgueil. Il est évident que Dieu ne peut qu’avoir en horreur de tels sentiments et le comportement qui en est la conséquence. «Vous avez été achetés à prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps» (1 Cor. 6).

À partir du chapitre 12, le Saint Esprit est considéré dans l’Église. D’abord comme opérant par le moyen des dons qui ont été départis aux divers membres du corps. Puis, au chapitre 14, en rapport avec l’exercice de ces dons dans l’assemblée. Nous y trouvons l’ordre selon Dieu, c’est-à-dire les conditions dans lesquelles un don est appelé à s’exercer, autrement dit encore le principe important que la possession de la puissance du Saint Esprit n’exempte aucun chrétien de l’autorité du Seigneur par sa Parole. Mieux encore, c’est le Saint Esprit qui, employant cette Parole, agit sur la conscience du chrétien pour lui dicter l’usage qui doit être fait de Sa puissance. Quelqu’un aura beau alléguer qu’il a reçu une parole de Dieu et qu’elle doit être prononcée : il doit se taire si elle n’est pas à sa place. Telle parole peut véritablement provenir du Seigneur ; mais Dieu tient à l’ordre dans sa propre maison et la puissance reçue ne dispense nullement de la responsabilité personnelle dans l’exercice des dons. La Parole seule, non pas l’Esprit, est la pierre de touche (comparez 2 Tim. 3). C’est là une vérité inestimable, car la tendance des hommes qui croient réellement à l’action de l’Esprit de Dieu est de soumettre plus ou moins la Parole à l’Esprit, au lieu de reconnaître ce qui est si clair dans l’Écriture, à savoir que le Saint Esprit soumet toujours ses propres manifestations à l’autorité de la Parole du Seigneur, Parole qu’il a lui-même inspirée.

5.1.3        [2° Épître aux Corinthiens]

La seconde épître aux Corinthiens nous montre le cher apôtre consolant les saints qui avaient été abaissés. Lui-même avait subi une terrible persécution, mais en était sorti. Il affirme que toutes les promesses de Dieu en Christ sont oui et amen en Lui, à la gloire de Dieu par nous. Quelques-uns lui avaient apparemment reproché de ne pas avoir mis son projet de visite à exécution. Ces tergiversations convenaient-elles à un apôtre ? On s’en était servi pour mettre en cause son autorité. Si je n’ai pas tenu ma promesse, répond-il, Dieu tient les siennes dans l’Évangile : «Car autant il y a de promesses de Dieu, en lui est le oui et en lui l’amen, à la gloire de Dieu par nous. Or celui qui nous lie fermement avec vous à Christ et qui nous a oints, c’est Dieu, qui aussi nous a scellés, et nous a donné les arrhes de l’Esprit dans nos coeurs». C’est précisément ce qui a lieu dans les voies de Dieu avec l’âme et tout est ici présenté d’une manière et dans un ordre admirablement complets. Le croyant est établi par Dieu en Christ. Ceci naturellement suppose qu’il est d’abord vivifié de la vie de Christ. De ce premier privilège découlent les autres, car Christ donne force et plénitude à cette vie que possède le croyant et qui est la sienne. Puis le racheté est déclaré oint, car le Saint Esprit est la puissance pour lui faire connaître toutes choses selon Dieu. «Vous avez l’onction de la part du Saint» est-il dit même des petits enfants en 1 Jean 2. Ainsi, immédiatement après que le racheté est établi en Christ, l’onction est mentionnée — cette bénédiction par laquelle l’Esprit ouvre les yeux du croyant et lui donne puissance pour voir et comprendre avec une capacité nouvelle et divine. Enfin, l’Esprit scelle le croyant sur la base d’une rédemption accomplie et devient pour lui les arrhes d’un héritage futur : «Dieu... nous a scellés, et nous a donné les arrhes de l’Esprit dans nos coeurs».

5.1.4        [Épître aux Éphésiens ch. 1 v. 12-14]

Arrivons maintenant à un autre passage, celui d’Éphésiens 1:12 à 14, où se trouve la même double pensée : «... le Christ : en qui vous aussi vous avez espéré, ayant entendu la parole de la vérité, l’évangile de votre salut ; auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit de la promesse, qui est les arrhes de notre héritage». Vous observerez que l’apôtre parle de l’Esprit Saint sous deux points de vue, et en rapport avec les deux principaux sujets qu’il a présentés dans ce chapitre. L’un est l’appel du Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, l’autre l’héritage. Le Saint Esprit agit avec nous en rapport avec les deux. Relativement à l’appel de Dieu, il scelle le croyant, et relativement à l’héritage, il est les arrhes dans nos coeurs. Dans le premier cas, il est la puissance d’une séparation consciente pour Dieu sur le terrain de ce qui est maintenant achevé. Et ainsi, vous remarquerez que dans ce même verset il est dit : «Ayant entendu la parole de la vérité, l’évangile de votre salut». C’est seulement sur cette base que le Saint Esprit prend une telle place dans le croyant. Il scelle la personne de celui qui se repose sur la rédemption et devient les arrhes de l’héritage de la gloire que nous partagerons avec Christ.

Ce sujet présente souvent des difficultés pour l’esprit des enfants de Dieu. Sous une forme ou sous une autre, c’est le légalisme qui est ordinairement le grand obstacle à une saine intelligence de la doctrine du Saint Esprit. L’Esprit est la puissance de sainteté dans le croyant, comme la loi était la force du péché pour l’homme placé sous elle. La loi avait affaire avec la chair, le Saint Esprit habite maintenant où est la nouvelle nature.

En commençant son oeuvre, il trouve une âme qui est absolument sans vie aucune à l’égard de Dieu. Elle ne possède rien d’autre que la nature déchue, jusqu’à ce que, par la foi en Christ, la nouvelle nature lui soit communiquée. La foi en la Parole rattache l’âme à Christ ; une vie nouvelle qu’elle ne possédait pas lui est conférée. «Ce qui est né de l’Esprit est Esprit», de même que la chair vient de la chair. Mais le sceau de l’Esprit suppose une chose sainte déjà existante : à savoir les saints comme ils sont en Christ. Il est évident qu’il ne peut y avoir de sceau sur la vieille nature. Le Saint Esprit scelle cette nouvelle nature ou plutôt la personne vivifiée. Il serait inconvenant et choquant de penser que le Saint Esprit puisse apposer son sceau sur la chair ou la vieille nature. Vivifier suppose une absence de vie ; mais sceller implique de plus qu’il existe quelque chose à sceller qui est selon Dieu. Le sceau de l’Esprit n’est pas imprimé simplement sur la vie, quoiqu’il la suppose toujours, mais il suit la réception de l’évangile du salut : «auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés...». Ceci montre que les saints avaient déjà cru et que le sceau était une action subséquente du Saint Esprit sur leurs âmes. En somme, les hommes ne sont pas scellés comme incrédules, ce qui serait, si elle était possible, la chose la plus misérable. Ils sont scellés comme croyants, de même qu’ils ont d’abord été vivifiés comme morts dans leurs péchés.

La question du temps qui s’écoule entre croire et être scellé est d’une importance secondaire, mais la distinction des deux actes est au contraire de toute importance. N’y aurait-il qu’une minute d’intervalle, ils sont cependant distincts et le sceau suit la foi. L’incrédule a besoin d’être vivifié, le croyant d’être scellé. Ne pas reconnaître que ces actions sont distinctes et successives, c’est aussi s’exposer à confondre la condition des saints de l’Ancien Testament avec le christianisme. Sans aucun doute, le Saint Esprit s’occupait des âmes anciennement, elles étaient vivifiées et croyantes, mais elles n’étaient pas scellées et ne possédaient pas les arrhes de l’Esprit.

Pourquoi cette différence ? Parce que sous l’ancienne alliance l’évangile du salut n’était pas encore la base connue et publique pour la bénédiction de l’âme. Celle-ci se trouvait en quelque sorte dans une condition d’attente, ne jouissant pas d’une pleine communion avec Dieu dans la paix et la délivrance. Le christianisme a amené cela et davantage encore. Christ est venu ; il a accompli la rédemption, et le Saint Esprit, envoyé maintenant du ciel, nous apporte non seulement des promesses (car à elles seules les promesses ne sont pas le christianisme) — mais les promesses pleinement vérifiées en Christ. Quelques-unes sont futures, et sans doute, dans ce sens, elles ne sont pas encore accomplies, par exemple la résurrection du corps et le déploiement de la gloire. Néanmoins l’Écriture nous révèle maintenant un salut actuel, non plus promis, mais prêché dans l’Évangile comme une chose accomplie. N’avoir qu’une simple espérance de Christ correspond à la condition de ceux qui se trouvent toujours sous la loi. Ils soupirent constamment après le salut, la paix ou une part en Christ. Cet état était normal dans l’Ancien Testament, et personne ne possédait de titre pour aller au-delà. Le Messie n’était pas venu, ni l’oeuvre accomplie, aussi croire plus que la révélation d’alors aurait été du mysticisme et non la vérité de Dieu ; de l’imagination, et non la réalité. Mais maintenant l’oeuvre est accomplie. Le pardon n’est plus une promesse mais un fait actuel et la vie éternelle, tout en étant à venir, est une possession présente. Le salut est déjà la portion du croyant (Éphésiens 2), si complet que celui-ci est déclaré ressuscité avec Christ et assis en Lui dans les lieux célestes. À un autre point de vue, nos corps doivent être changés plus tard à la ressemblance de son corps et, dans ce sens-là, le salut n’est pas encore venu.

En conséquence, nous l’avons vu, l’Esprit de Dieu prend une relation nouvelle ou un nouveau mode d’action conforme à ce développement des voies de Dieu et de la révélation de la pleine bénédiction. Dans ce qui intéresse l’âme, le salut est déjà parfait : le Saint Esprit dans ses relations avec elle maintenant en est le messager et scelle la personne de celui qui croit à l’Évangile. Le sceau suppose, non plus seulement une nouvelle naissance, mais une rédemption complète, et suppose que l’oeuvre de Christ est connue. Nous-mêmes ne scellons pas une chose avant qu’elle ne soit achevée. Personne ne penserait à sceller une lettre avant qu’elle ne soit écrite. De même l’acte du sceau, appliqué par le Saint Esprit, indique clairement que celui qui est scellé repose sur une base complète et certaine.

Par rapport au présent, le Saint Esprit scelle donc pour le chrétien le salut qu’annonce l’évangile. Par rapport à l’avenir, nous l’avons vu, Il est un gage de l’héritage. Le chrétien, objet de l’amour de Dieu, jouit d’un salut tel que Dieu lui-même ne peut pas le rendre plus parfait ; mais il ne possède pas encore l’héritage, et le Saint Esprit, au lieu de lui en présenter simplement une promesse, lui en donne un avant-goût. Il permet à l’enfant de Dieu d’anticiper la joie et la bénédiction de son héritage bien qu’il séjourne encore dans le monde. C’est à ce titre qu’il en est appelé les arrhes.

5.1.5        [Épître aux Galates 3 et 4]

Aux Galates, l’apôtre avait posé la question : «Avez-vous reçu l’Esprit sur le principe des oeuvres de loi, ou de l’ouïe de la foi ?» Ces croyants, quoique séduits par les judaïsants, savaient bien que les oeuvres de la loi n’étaient pour rien dans le don du Saint Esprit ni non plus dans l’opération de miracles parmi eux (chap. 3). Une expression du chapitre 4 est plus explicite encore, quant à la distinction qui nous occupe. Alors que son peuple était sous la loi, «Dieu a envoyé son Fils,... afin qu’il rachetât ceux qui étaient sous la loi, afin que nous reçussions l’adoption. Et, parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos coeurs, criant : Abba, Père» (Gal. 4:4 à 6).

Ainsi c’est le Saint Esprit qui nous donne conscience de la relation avec Dieu qui nous appartient déjà par la foi en Christ. Déjà ils étaient fils — «parce que vous êtes fils», affirme Paul ; ils pouvaient cependant ne pas connaître la jouissance de cette relation ; c’est pourquoi «Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos coeurs, criant : Abba, Père». La signification et la force de ce passage sont aussi claires que possible. Sous la loi, le croyant, quoique enfant, n’a jamais eu conscience de son adoption. Sa condition était celle de serviteur, quoique seigneur de tout, comme l’apôtre l’explique. Pourquoi ? Parce que dans la première période, il était sous la loi. Il ressemblait à un mineur «sous des tuteurs et des curateurs jusqu’à l’époque fixée par le père». Il était tenu en esclavage sous les principes du monde. La loi le châtiait, lui faisant sentir la méchanceté et la rébellion de sa nature. Tout cela a continué sous le système légal ; mais maintenant est venu un état de choses entièrement différent comme l’apôtre le montre ici.

5.1.6        [Épître aux Romains : la mort, la chair, et moi]

Ainsi l’épître aux Romains nous a appris cette grande vérité du christianisme : que, quant à la chair, j’ai le droit, je suis même tenu de la considérer comme morte. Je ne suis jamais appelé à mourir à la chair. Une pareille idée, courante chez les mystiques, n’est nullement la vérité révélée en Christ. Sans doute sommes-nous invités à mourir d’une manière pratique à nous-mêmes et au monde — à mourir tous les jours. Mais c’est une tout autre pensée qui signifie s’exposer continuellement pour Christ à l’épreuve et à la mort. Par contre, quant à la chair, j’ai le droit, par la grâce de Dieu, d’affirmer que je suis déjà mort, et je suis appelé à me considérer désormais, et pour toujours, comme mort. Le mysticisme est un effort pour devenir mort en soi-même, et cela sonne bien, mais la grâce divine me donne le droit — qui est celui de Christ lui-même — de croire à la puissance de sa mort pour moi, et de ma mort avec lui. En sorte que je puis sans présomption me tenir pour mort au péché, mais vivant à Dieu par Jésus Christ.

L’épître aux Romains nous a donné cet enseignement en rapport avec la justice. Mais l’exemple choisi ici par l’apôtre est en contraste avec le système légal de contrainte qui réglait sous la loi romaine la situation des mineurs. La rédemption nous a amenés, par la foi en Christ, à la position de fils et nous avons l’Esprit du Fils de Dieu, donné comme puissance, par lequel nous crions : Abba, Père. Telle est la connexion du Saint Esprit avec la doctrine de cette épître. L’objet de l’ennemi était de détourner les croyants de la liberté dans laquelle ils avaient été placés par l’affranchissement, et de la relation bénie de fils devant leur Dieu et Père, pour les ramener sous les ordonnances de la loi sous une forme ou sous une autre. Le Saint Esprit est la puissance libératrice qui nous est donnée, fondée sur la rédemption par Christ et en lui.

5.1.7        [Épître aux Éphésiens, survol des ch. 1 à 6]

En revenant à l’épître aux Éphésiens nous constatons qu’il n’y a pas un seul chapitre qui ne fasse une ou plusieurs allusions au Saint Esprit. Dans le témoignage du chapitre 1 et du chapitre 2, le Saint Esprit est envisagé comme la puissance d’accès auprès du Père tant pour le Juif que pour le Gentil. À la fin du chapitre 2, il nous est présenté comme la puissance constitutive de l’habitation de Dieu. Cette habitation de Dieu dans l’Église n’est pas extérieure comme en Israël, et sa présence n’est pas signalée comme autrefois par une nuée visible, mais elle est bien plus réelle, par le Saint Esprit qui habite là.

Au chapitre 3, l’Esprit n’est pas seulement une puissance révélatrice pour éclairer l’intelligence, comme au chapitre 1, mais aussi une source intérieure pour rendre plus profonde la communion spirituelle du chrétien et fortifier son homme intérieur selon toutes ces richesses qui sont en Christ.

Dans le chapitre 4, la doctrine de l’Esprit de Dieu est largement développée, en relation avec le corps, aussi bien qu’avec les dons individuels. Par-dessus tout, dans la dernière partie du chapitre, il est fait allusion à lui comme à la puissance active et la mesure personnelle de sainteté dans la marche. Ce qui est convenable au nouvel homme, ce n’est pas simplement de faire ceci ou cela, mais de ne pas attrister cette personne divine par laquelle nous avons été scellés pour le jour de la rédemption. Ce n’est pas assez de savoir comme vérité le vieil homme jugé et le nouvel homme donné, mais l’Esprit de Dieu est en nous et nous devons veiller à ne l’attrister d’aucune manière.

Le chapitre 5 nous fournit une autre et très intéressante allusion au Saint Esprit. Nous n’y sommes pas seulement appelés à résister aux excitations charnelles, mais à être remplis de l’Esprit et en connexion avec cela à nous entretenir par des psaumes et des hymnes et des cantiques spirituels, chantant et psalmodiant de notre coeur au Seigneur (v. 19). Remarquons à ce propos l’absence dans le Nouveau Testament de louanges ou de cantiques de circonstance tout préparés à l’usage des enfants de Dieu. À la différence du Juif, le chrétien ne dispose pas d’un recueil de psaumes, d’hymnes ou de chants spirituels écrits par inspiration. Le Juif avait besoin que de telles louanges fussent préparées pour lui ; le chrétien non, car ayant le Saint Esprit comme le Juif ne l’avait pas, l’enfant de Dieu possède intérieurement une abondante source propre à le faire chanter dans son coeur. À l’Église, qui a le Saint Esprit toujours présent et habitant en elle, appartient la source de l’eau vive ; plus encore, chaque chrétien possède individuellement cette source qui d’une manière naturelle jaillit en psaumes, en hymnes et en cantiques spirituels.

Ainsi cette absence d’un recueil de cantiques inspirés et de prières préparées, qui sert de prétexte à certains pour mettre à la place des liturgies ou pour retourner aux psaumes de David, constitue en réalité la preuve la plus éclatante de la bénédiction actuelle de l’Église de Dieu. Ce qui manque hélas, aux chrétiens, c’est la foi pour se servir de leur bel héritage. Ceux qui sont sous la douloureuse expérience de la loi n’ont aucune source de joie en eux-mêmes ; ils ont donc besoin d’une provision extérieure. Mais, du moment que nous avons Christ et, de plus, le Saint Esprit comme puissance divine pour jouir de notre Sauveur avec notre Dieu et Père, ç’aurait été abaisser la place de l’Église si la Parole avait fait pour nous une provision de psaumes, d’hymnes et de cantiques spirituels. La sainte Écriture considère le chrétien comme étant arrivé à l’état d’homme fait, et suppose l’Église — à moins qu’elle ne soit égarée par des séducteurs — dans une position de pleine liberté devant Dieu, dans l’intelligence de sa pensée et la confiance de son amour, entrant dans les richesses de sa grâce et de sa gloire en Christ ; et cela, parce que le Saint Esprit habite et dans le chrétien et dans l’Église. En sorte que la conscience d’une telle bénédiction s’exprime non seulement dans la louange mais dans l’édification mutuelle par des psaumes, des hymnes et des cantiques spirituels, chantant et psalmodiant du coeur au Seigneur.

La seule allusion à l’Esprit de Dieu qui reste encore à examiner dans les Éphésiens se trouve dans le dernier chapitre, où nous sommes exhortés à prier par l’Esprit. «Priant par toutes sortes de prières et de supplications, en tout temps, par l’Esprit». Le Nouveau Testament ne parle jamais de la prière à l’Esprit, mais par l’Esprit. Ce n’est pas que l’Esprit ne soit pas digne de louanges et de prières ; qu’il ne soit pas Dieu également avec le Père et le Fils. En fait la prière à Dieu s’adresse au Saint Esprit en même temps qu’au Père et au Fils. Mais il a plu à l’Esprit, depuis la rédemption, de prendre une place qui empêche que des prières lui soient spécialement adressées. Il habite en nous et s’adresser à l’Esprit serait, sans en avoir la conscience, ne pas croire à son habitation dans l’Église et dans le croyant.

5.1.8        [Épître aux Philippiens et Colossiens]

Sans nous arrêter aux passages de moindre importance qui, dans les Philippiens, parlent de l’Esprit par rapport à son caractère plutôt que comme personne habitant en nous (c’est-à-dire comme la source de la communion et du caractère du culte : 3:3), observons l’omission remarquable de toute mention de l’Esprit de Dieu dans l’épître aux Colossiens. Celle-ci met l’accent sur la nouvelle vie alors que l’épître aux Éphésiens — qui présente beaucoup d’analogie avec celle aux Colossiens — le place sur le Saint Esprit, source de cette vie. Il va sans dire que chacun de ces points de vue est en rapport avec le caractère respectif des deux épîtres.

5.1.9        [Épître aux Thessaloniciens]

Dans les Thessaloniciens le Saint Esprit est présenté avec une simplicité et une force extraordinaires, et cela depuis la conversion de ces croyants jusqu’au bout de leur carrière (l, 5 ; 4, 8 ; 5:19). Les textes ne demandent guère de remarques, excepté peut-être le dernier qui est souvent mal compris : «N’éteignez pas l’Esprit». Cette exhortation n’est pas à confondre avec celle d’Éphésiens 4:30 de ne pas attrister le Saint Esprit de Dieu. L’attrister est évidemment personnel ; tandis que l’éteindre est en rapport avec d’autres, et principalement, je suppose, dans l’usage de leurs dons. Je ne dois pas être une entrave pour un autre, ni élever des difficultés quant à la manifestation du Saint Esprit dans aucun frère. Telle oeuvre peut être grande ou au contraire très petite, la seule question est : est-elle de l’Esprit ? Avoir du respect pour la présence et l’opération du Saint Esprit selon toutes les variétés de son action dans l’Église garderait le frère le plus en vue d’éteindre l’Esprit dans celui qui l’est le moins. Certainement Dieu ne méprise pas le jour des petites choses.

5.1.10       [Épîtres à Timothée]

Dans les deux épîtres à Timothée, il est constamment question de l’Esprit. Arrêtons-nous à 2 Timothée 1:7 : «Car Dieu», dit l’apôtre, «ne nous a pas donné un esprit de crainte, mais de puissance, et d’amour, et de conseil» (voyez aussi verset 14). Il n’est pas difficile de voir pourquoi le Saint Esprit est ainsi mentionné à cette place. Timothée tremblait devant les difficultés de la lutte chrétienne — devant cette tristesse et cette épreuve dans lesquelles le service de Christ, plus particulièrement au milieu des assemblées, conduit le serviteur fidèle. C’est pourquoi l’apôtre lui rappelle le don qui lui avait été accordé par l’imposition de ses propres mains, et ajoute que l’Esprit qui nous est donné, à nous autres chrétiens, n’est pas un esprit de crainte, mais de puissance, d’amour et de conseil. Notons la distinction entre le don communiqué à Timothée par l’imposition des mains de l’apôtre, et le caractère général de l’Esprit donné aux saints. Il est clair que le but de ce rappel était de fortifier l’homme de Dieu craintif. Pourquoi aurait-il été surchargé de tristesse par les difficultés, les dangers, les désappointements, ou même la défection de ceux qui avaient autrefois travaillé avec l’apôtre lui-même et qui maintenant s’étaient tournés contre lui ?

5.1.11       [Épître à Tite]

Dans l’épître à Tite, nous avons un riche passage exposant la bénédiction dans laquelle le christianisme introduit une âme (3:4-7). «Mais, quand la bonté de notre Dieu Sauveur et son amour envers les hommes sont apparus, il nous sauva, non sur le principe d’oeuvres accomplies en justice, que nous, nous eussions faites, mais selon sa propre miséricorde, par le lavage de la régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint, qu’il a répandu richement sur nous par Jésus Christ, notre Sauveur, afin que, ayant été justifiés par sa grâce, nous devinssions héritiers selon l’espérance de la vie éternelle». Ici nous avons non seulement le lavage de la régénération, privilège commun à tous les saints de toutes les époques ; mais elle nous est donnée sous la forme et la plénitude qui maintenant sont la part distincte du chrétien. La régénération est universelle et propre à tous les saints ; mais la riche effusion du Saint Esprit résulte de la rédemption ; il a été répandu abondamment sur nous par Jésus Christ notre Sauveur. Ainsi le passage montre d’une manière bien frappante à la fois ce qui est et doit toujours être vrai, et ce qui ne devint possible, selon les voies sages de Dieu, que lorsque l’obstacle eut été ôté, la chair jugée, et que le Saint Esprit put être répandu richement, par Jésus Christ notre Sauveur.

5.1.12       [Épître aux Hébreux]

L’épître aux Hébreux contient plusieurs allusions à l’Esprit. Nous retiendrons deux expressions : «l’Esprit de grâce» et «l’Esprit éternel» qui toutes les deux désignent le Saint Esprit en contraste avec le système juif. «L’Esprit de grâce» (10:29) est en contraste avec la loi, et «l’Esprit éternel» (9:14) avec les voies temporaires des temps anciens.

5.1.13       [1° Épître de Pierre]

Nous arrivons ensuite en 1 Pierre 1 à un passage de grande importance pour le croyant. L’apôtre y parle du salut dont les prophètes «se sont... enquis avec soin, recherchant quel temps ou quelle sorte de temps l’Esprit de Christ qui était en eux indiquait, rendant par avance témoignage des souffrances qui devaient être la part de Christ et des gloires qui suivraient» (v. 10, 11). Nous avons là un énoncé clair de l’oeuvre de l’Esprit de Christ dans l’âme des anciens prophètes. Il était en eux sous le caractère d’esprit de prophétie pour rendre témoignage de ce qui allait arriver, à savoir les souffrances qui seraient la part de Christ et les gloires qui suivraient. Nous ne savons pas dans quelle mesure ils comprirent ces vérités, et purent en jouir, mais l’une et l’autre furent placées devant eux. Les Psaumes en parlent, puis les prophètes, tout particulièrement Ésaïe, Michée, Daniel et Zacharie. Mais de plus, «il leur fut révélé que ce n’était pas pour eux-mêmes, mais pour vous, qu’ils administraient ces choses, qui vous sont maintenant annoncées par ceux qui vous ont annoncé la bonne nouvelle par l’Esprit Saint envoyé du ciel» (v. 12). Christ étant venu et la rédemption étant accomplie, l’évangile est maintenant annoncé. De ce fait, le Saint Esprit prend une place toute nouvelle. Il est «envoyé du ciel», expression qui n’est pas employée pour désigner son action dans les temps précédents. La mission du Saint Esprit envoyé du ciel est évidemment distincte des opérations de l’Esprit de Christ dans l’Ancien Testament, quelque bénies qu’elles fussent. C’est le Saint Esprit descendu du ciel qui constitue la puissance du croyant pour entrer dans ce qui est maintenant annoncé par l’Évangile. Reste encore, pour une époque future, l’accomplissement de la prophétie, quand le royaume sera établi en puissance et en gloire ici-bas.

En résumé ce passage contient trois pensées principales : premièrement, le Saint Esprit prophétisant ; secondement, la jouissance présente d’un salut d’âmes proclamé par l’Évangile dans la puissance du Saint Esprit envoyé du ciel ; en troisième lieu, la révélation de la grâce à l’apparition du Christ qui sera l’accomplissement des prophéties. Une oeuvre puissante a été faite et, sans aucun doute, la prophétie s’applique à cette oeuvre, quoique cette dernière aille bien au-delà de ce que la prophétie a révélé. Finalement le plein accomplissement de la prophétie est réservé pour l’apparition du Seigneur en gloire. Entre les deux époques — après la venue de Christ pour souffrir, mais avant son apparition en gloire — le Saint Esprit est envoyé du ciel ; et nous jouissons, dans la foi, par sa puissance, de ce que l’Évangile annonce au sujet de Christ.

5.1.14       [2° Épître de Pierre et 1° Épître de Jean]

Il n’est pas nécessaire de nous arrêter à 2 Pierre où la seule allusion au Saint Esprit concerne les saints hommes de Dieu de l’Ancien Testament qui parlèrent sous son influence (1:21).

1 Jean développe le sujet du Saint Esprit en nous, par lequel Dieu demeure en nous et nous mêmes demeurons en Dieu.

5.2   [Apocalypse]

Nous arrivons ainsi à l’Apocalypse. Dès le premier chapitre l’Esprit de Dieu nous y est présenté sous un aspect entièrement nouveau, au point que plusieurs commentateurs anciens ou modernes ont nié que la mention des «sept esprits de Dieu» puisse désigner le Saint Esprit et ont appliqué la phrase aux sept anges qui se tiennent devant Dieu (Apocalypse 8:2). Or on ne peut douter qu’il ne s’agisse ici de la même Puissance spirituelle septuple que celle dont parle Ésaïe 11:2, 3.

L’Apocalypse ne s’occupe nullement dans ses visions prophétiques des sujets ordinaires du Nouveau Testament, et c’est ce qui explique le style propre à ce livre. Allant traiter non pas du déploiement de la grâce mais du gouvernement de Dieu, l’Apocalypse est remplie d’allusions à l’Ancien Testament. Personne ne comprendra ce livre s’il n’a pas les voies anciennes de Dieu présentes à son esprit. Inversement, chacun pourra suivre ses communications d’une manière plus intelligente s’il ne perd pas de vue les continuelles références à la loi et aux prophètes, que ce livre lie avec les éléments du Nouveau Testament.

5.2.1        [Apoc. 1:4 — Les 7 esprits de Dieu]

Malgré la salutation propre aux apôtres : «Grâce et paix à vous», Dieu nous est présenté dans ce livre tout autrement que dans les épîtres : celui «qui est, et qui était, et qui vient». C’est une traduction, si on peut parler ainsi, du Jéhovah hébreu dans le langage du Nouveau Testament. Il en est de même de son Esprit présenté ici sous forme des «sept Esprits qui sont devant son trône». Quiconque est familier avec le Nouveau Testament doit être d’autant plus frappé d’une telle expression qu’ailleurs il est sans cesse question de l’Esprit — «d’un seul Esprit». N’est-ce pas là l’enseignement invariable de Paul ? Le corps de Christ est un parce qu’un seul et même Esprit habite dans chaque disciple de Christ, unissant étroitement et constituant en un tous les membres divers. Partout il est «le Saint Esprit envoyé du ciel» ; habitant dans le croyant ; distribuant et opérant dans l’Église. Pourtant ici, c’est des sept Esprits qui sont devant le trône de Dieu qu’il nous est parlé. D’où cela vient-il ? De ce que nous entrons dans une scène de gouvernement et d’actes judiciaires. La céleste parenthèse de grâce est désormais fermée. Elle correspondait au merveilleux déploiement du mystère caché aux générations antérieures, révélant la gloire de Christ en haut et l’union avec Lui du chrétien et de l’Église. Même dans la préface (chap. 2 et 3) où il est question des sept églises et de Christ en relation avec elles, le jugement est le point capital, et le Saint Esprit est envisagé selon le caractère de gouvernement que l’Apocalypse dans son ensemble nous révèle. C’est le livre final où tous les systèmes, et l’homme comme tel, doivent être jugés. Les églises sont jugées en premier lieu ; le monde l’est ensuite ; puis les vivants lors de l’apparition de Christ et avant la fin de son règne terrestre ; en dernier lieu, les morts sont jugés devant le grand trône blanc. Tout le long du livre ce n’est que jugement.

Le Saint Esprit nous est donc présenté en harmonie avec un état de choses terrestre et judiciaire, repris du point de vue de l’Ancien Testament, mais avec une profondeur caractéristique de la révélation finale et complète de Dieu. Jean parle «de sept Esprits», expression de la perfection pleine mais variée du Saint Esprit agissant selon les voies de Dieu développées en gouvernement. Et pour cette raison ils sont désignés comme étant devant son trône.

5.2.2        [L’Esprit parlant aux assemblées]

La manière de parler dans les épîtres aux assemblées est remarquablement conforme à ce caractère : «ce que l’Esprit dit aux assemblées». Ce n’est pas l’oeuvre de l’Esprit de Dieu dans le saint ou dans l’Église. Ce n’est pas l’habitation de Dieu par l’Esprit. C’est plutôt comme quelqu’un qui est dehors, qu’il s’adresse ici à elles pour avertir et faire des remontrances. Christ lui-même agit de cette manière. Il n’est pas vu ici comme la Tête de l’Église, communiquant la nourriture et chérissant son corps. Bien qu’il soit plus qu’un sacrificateur, il est revêtu des vêtements sacerdotaux, non pas certes en vue d’intercéder pour le croyant et de le restaurer, mais, au contraire, pour le sonder de ses yeux qui sont comme une flamme de feu et pour s’occuper de ce qui est contraire à la pensée de Dieu. Il est révélé ici solennellement sous son nom de Fils de l’homme — désignation qui est inhabituelle en rapport avec l’Église. Il va en effet prendre le royaume et, en attendant, le jugement lui est donné parce qu’il est le Fils de l’homme (Jean 5). Ainsi le Seigneur a pris la place de juge, quoique le sujet soit les églises. Toute forme de jugement est entre ses mains. «Malheur ! Qui vivra, quand Dieu fera ces choses ?» (Nomb. 24:23). Aussi constatons-nous que la première et à certains égards la meilleure de ces églises est menacée d’avoir sa lampe ôtée, si elle ne se repent (et s’est-elle repentie ?) ; tandis que la dernière, quoique appelée à se repentir, est positivement menacée d’être vomie de la bouche du Seigneur. Pour ce qui est des églises responsables, la réjection est donc entière et sans espoir.

5.2.3        [À partir du ch. 4]

À partir du chapitre 4, un vaste changement s’est effectué. Les rachetés mis à l’abri des jugements terrestres sont glorifiés dans le ciel, et le Seigneur est vu en haut comme un agneau immolé, un Christ rejeté, dans la présence de Dieu et sur Son trône. Là aussi l’Esprit est présent mais de nouveau comme sept Esprits, symbolisés par sept lampes ou torches de feu, autrement dit encore sous un aspect judiciaire. Le chapitre 5 signale la puissance et l’activité des sept Esprits de Dieu envoyés sur toute la terre. Il ne s’agit plus de la prédication de l’Évangile par le Saint Esprit envoyé du ciel, et de l’Église pas davantage. Cette mission de l’Esprit sur toute la terre s’accomplit non plus en grâce mais en gouvernement. Il n’est plus question des églises après le chapitre 3, excepté dans les exhortations de la fin, et ce n’est plus comme aujourd’hui par leur moyen que le Saint Esprit rend témoignage. À partir de ce moment, Dieu est occupé d’autres plans, de plans terrestres, les cohéritiers célestes étant en haut avec Christ. L’Esprit de Dieu agit donc en vue de toute la terre.

Cela indique suffisamment le caractère si particulier de l’action du Saint Esprit dans cette période apocalyptique. La plus grande portion du livre traite de l’intervalle qui prend place entre le moment où les églises ont disparu de la scène, et celui où le Seigneur Jésus viendra du ciel avec ses saints glorifiés, en vue du jugement de la terre. La période de la longue patience prend fin, et les jugements divins commencent leur cours. Sans doute y a-t-il des saints appelés et rendant témoignage ; et il va sans dire qu’il ne pourrait pas y avoir des saints vivifiés sans la puissance du Saint Esprit agissant par la Parole comme précédemment. Mais quel est le caractère de l’action du Saint Esprit dans et par ces saints qui succèdent à l’Église sur la terre ? Quelle est la nature de ses communications à leurs âmes ? Quelle est l’expérience qu’il forme au-dedans et quelle est la marche qu’il leur confère ? La réponse, dans les termes même de l’Apocalypse, c’est que «l’esprit de prophétie est le témoignage de Jésus» (19:10).

Cela nous permet de comprendre la différence des relations de l’Esprit de Dieu envers ces saints, comparées avec son aspect envers l’Église et le chrétien. Le Saint Esprit, comme fait actuel et caractéristique, habite dans le croyant comme esprit de communion. Ce que j’apprends en Christ devient ma portion et mon bonheur ; j’en jouis comme étant mien. Dieu ne fait pas une seule révélation concernant son Fils, que je n’aie le droit de m’approprier comme consolation de mon coeur. Le chrétien a un intérêt direct dans toute Sa gloire. Né de Dieu, ayant le Saint Esprit qui met le coeur au large, le croyant trouve sa joie à avoir quelqu’un au-dessus de lui devant qui il peut se prosterner et adorer. Hélas ! Jean trahit là sa propre faiblesse. Impressionné par la gloire de l’ange qui lui montre ces choses, il s’apprête à l’adorer. Mais le croyant est un adorateur empressé du Père et aussi du Fils parce qu’il connaît le Fils de Dieu, goûte sa grâce et se réjouit dans sa gloire selon que le Saint Esprit lui montre Jésus. Dans tous les autres domaines où Christ n’est pas ainsi simplement le Fils, la personne éternelle et divine, l’objet du culte et de l’adoration, il est celui qui, tout en étant au-dessus de nous, se plaît dans son profond amour à partager avec nous sa propre part, tout ce que le Père lui a donné. Ce qu’il a acquis, il le fait contribuer à notre bénédiction infinie par le moyen de l’Esprit de Dieu qui prend ce qui est à Christ et nous le communique. Il glorifie Christ mais en nous annonçant ce qui est à lui. Il fait déborder nos coeurs de la joie de Christ qui est notre éternelle portion.

Dans l’Apocalypse tel n’est pas le cas. Voyez les saints terrestres du chapitre 6. Ils demandent au Seigneur de juger leurs adversaires. Ils soupirent ardemment après ce qu’ils ne possèdent pas encore. C’est le thème du cantique de Salomon où il n’est aucunement question de l’Église ni de la relation du chrétien. La position des saints sur la terre après que l’Église a disparu est telle que le Saint Esprit n’est que l’Esprit de prophétie. Le seul témoignage qu’il rende à Jésus, c’est comme un esprit prophétique, ce qui rejette les fidèles sur l’avenir — sur ce qu’ils doivent recevoir de la main de Jésus lorsqu’il apparaîtra. Il n’en est pas ainsi du chrétien ; et cela nous aide à comprendre la diversité qu’il y a dans les manifestations de Dieu et la bénédiction des saints. Deux choses sont nécessaires pour me placer dans une véritable bénédiction actuelle. Il me faut un objet qui satisfasse mes affections et dont j’aie la possession. Mais il me faut aussi un stimulant pour mon attente, étant encore dans le corps et entouré d’objets dont Satan se sert pour m’éloigner de Dieu. Il est donc pour moi essentiel que, de même que j’ai Christ comme objet pour mon coeur, je le possède aussi comme mon espérance.

5.2.4        [Apoc. 22]

Il nous faut ces deux choses qui semblent contradictoires mais qui, en réalité, sont les éléments essentiels de la pleine bénédiction des saints et de l’Église. Si je n’ai pas devant mon coeur un objet qui puisse le satisfaire, quel exercice ou quel repos peut-il y avoir pour mes affections ? Mais le chrétien possède Christ. Et c’est pour cela que le Saint Esprit le scelle, lui donne cette onction, lui donne de connaître sa part, de même qu’Il est sa puissance pour jouir de Christ et de ce que Christ lui a donné. Comme conséquence, le même Saint Esprit me conduit à attendre Christ. Nous trouverons cela aussi dans l’Apocalypse — pour nous, non pas pour ceux qui viendront après l’Église ; ce n’est qu’avec l’Épouse que l’Esprit dit : «Viens». Agissant sur les affections de l’Église, il inspire son cri et s’y joint. Il dit : «Viens», parce que Celui qui nous aime et qui est vraiment aimé de nos coeurs nous a dit : «Je viens bientôt». L’Esprit, qui honore Sa parole, inspire ce désir et nous fait soupirer après Lui. Or celui que j’attends, c’est Celui qui aime comme personne jamais n’a aimé, qui s’est entièrement donné lui-même dans son amour. Ainsi j’ai et en même temps je n’ai pas. Ma foi possède dès à présent une pleine bénédiction. Néanmoins j’ai tout le stimulant que constitue l’espérance qui me fait regarder hors de la scène présente à une pleine satisfaction encore à venir, lorsque Christ m’aura, et que je l’aurai, dans la gloire céleste où il est allé.

C’est là précisément ce que le coeur trouve dans le christianisme. Christ est descendu sur la terre et m’aime là où je suis. Il m’a aimé au milieu de ma folie et en dépit de mes péchés. En même temps il est mon espérance. Je serai semblable à lui, et avec lui là où il est lui-même. Telle est la part caractéristique et exclusive du christianisme. Cela ne pouvait pas être avant la venue de Christ, précisément parce qu’il n’était ni venu, ni pleinement révélé. Cela ne peut plus être après sa deuxième venue. Avant, il ne pouvait être l’objet connu du coeur. Après, il ne pourra plus être l’espérance des saints. À son apparition une bénédiction pleine et éternelle sera la part des siens et toute tristesse, toute difficulté s’évanouira. Alors le sentier du croyant sur la terre deviendra un sentier facile, tandis que maintenant l’Esprit de Dieu s’oppose à la puissance de Satan dans ce monde où tout se coalise pour entraver et éprouver l’enfant de Dieu. Mais il possède la foi et l’espérance. Le Saint Esprit est la source de toute sa puissance. Depuis la rédemption, il habite dans le croyant et dans l’Assemblée. Que la portion de l’Église de Dieu est belle !

Mais évidemment quand l’Église s’en sera allée en haut, une telle condition aura cessé. L’Esprit de Dieu vivifiera les âmes comme il le faisait avant d’être envoyé du ciel pour former l’Église : aussi longtemps qu’il y aura des âmes ici-bas et un Dieu à connaître par une relation vitale, cette oeuvre du Saint Esprit se fera en elles. De plus l’Esprit, opérant d’une manière appropriée à la dispensation, rejettera les saints sur l’avenir. Ainsi le contraste est manifeste. Les saints célestes auront été, juste auparavant, ôtés du monde, alors que les âmes que nous voyons ici sont préparées pour la terre milléniale. Il s’agit d’une période de transition où la forme d’action et de témoignage de l’Esprit consiste à diriger les coeurs sur l’avenir qui va être révélé. L’Esprit de prophétie est le témoignage de Jésus (19:10), non le déploiement de la plénitude de la rédemption. Ce n’est pas comme aujourd’hui la puissance qui donne l’assurance à l’âme pour pénétrer «au-dedans du voile» et y trouver «une ancre sûre et ferme». Rien dans ces pages ne ressemble à la paix et à la joie que les saints possèdent maintenant en Jésus. Le Saint Esprit dirigera ces croyants à regarder à Christ pour l’avenir. Ils auront à attendre, car d’autres doivent aussi souffrir comme eux (Apoc. 6:11). Leur soupir monte devant Dieu : «Jusques à quand, Seigneur ?» Ils attendent Celui qui doit venir, et il ne faut pas moins que la toute-puissance de Dieu pour leur donner de croire cela, tant sera grande la séduction d’injustice.

Ce n’est pas à l’homme de disputer avec Dieu, ni davantage au croyant de mettre en question Sa Parole. Toute notre sagesse consiste à avoir une foi simple dans les Écritures, ce qui a pour effet de mettre du calme dans l’âme, en présence de toutes les questions, de toutes les difficultés, et de tous les doutes qui peuvent s’élever dans nos esprits. Si Dieu a révélé l’avenir, n’est-ce pas pour que nous le connaissions ? Il est si peu vrai que le chrétien a assez à faire de s’occuper exclusivement de ses propres bénédictions qu’au contraire vous le dépouillez d’une portion de son héritage particulier si vous l’induisez à abandonner cette connaissance des choses à venir. Non seulement le chrétien possède maintenant la foi et l’anticipation de l’espérance, mais il est ici placé sur une éminence d’où il embrasse l’avenir, plongeant ses regards jusque dans l’éternité même. Quelle position peut être plus large, plus bénie que celle d’un chrétien ? Oh ! comme nous entrons peu dans notre propre bénédiction en Christ ! Combien peu nous la connaissons ! Comme nous en jouissons peu ! Les saints apocalyptiques n’auront pas cela, mais un témoignage prophétique leur sera donné de la part de l’Esprit de Jésus.

Et ce qui confirme la distinction que nous venons de faire, c’est que le Saint Esprit, dès que la prophétie est terminée, nous est présenté s’unissant à l’espérance de l’Épouse qui est l’Église. «L’Esprit et l’Épouse disent : Viens. Et que celui qui entend dise : Viens». L’Esprit guide l’Église et stimule ses affections. La place même où cette action de l’Esprit se trouve rapportée, tout à la fin du saint Livre, la rend plus frappante encore. En effet, après avoir traversé le cours entier des voies de Dieu envers l’homme jusqu’à leur dernier terme, après le jugement final devant le grand trône blanc, après avoir évoqué les nouveaux cieux et la nouvelle terre, la joie propre du chrétien aurait pu être tant soit peu diminuée pour avoir été tellement occupé de prophétie. En vérité, une étude pareille serait bien faite pour abattre l’esprit et le coeur s’il n’y avait pas pour contrepoids une espérance céleste. La prophétie toute seule tend à produire un effet terrestre sur l’âme du chrétien, et elle peut nous conduire à gaspiller l’énergie spirituelle destinée à Christ, à l’Église et aux âmes, si nous lâchons la bride à notre esprit et donnons essor à notre imagination en nous occupant avec curiosité de minutieux détails au sujet du jugement terrestre.

Dans la mesure où, de ce fait, Christ et l’Église sont exclus de nos pensées, une telle manière d’étudier la Parole est positivement nuisible à l’enfant de Dieu. Mais remarquez comment le Saint Esprit a pourvu ici à ce danger relativement à l’Église. Nous pouvons parcourir toutes ces visions prophétiques que Jean a écrites pour nous et y voir un tableau complet de l’avenir, concentrant les lumières éparses dans le reste des Écritures. Ceci fait, l’Esprit prend soin de changer le courant de nos pensées. Il détourne nos regards des scènes terrestres et les fixe sur notre propre objet à nous — Christ. Avec lui nous quittons la région inférieure de la prophétie et nous retournons à ce qui convient mieux au coeur renouvelé dans ses affections les plus vraies pour son propre et céleste objet — Christ en haut, et qui va revenir.

 

 

Que le Seigneur nous accorde de jouir, avec une paix toujours plus profonde, de cette merveilleuse lumière que nous donne la Parole de Dieu au sujet du Saint Esprit. Il daigne être en nous, pour l’amour de Christ, et cela à cause de son estimation tant de Christ lui-même que de cette rédemption qui est notre fondement immuable devant Dieu ! Puissions-nous ne pas seulement apprendre davantage au sujet de l’Esprit, mais, guidés par lui, avoir nos coeurs fortifiés, pour jouir par lui, en Christ, notre Seigneur, de tout ce qu’il a plu à Dieu de nous révéler dans sa précieuse Parole !