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Ritualisme

 

Applicabilité au christianisme du système des rites. — Hébreux 9:24-28 (Rois et sacrificateurs)


: L’auteur montre les vrais caractères du Ritualisme, ce courant de la chrétienté qui veut introduire (ou a introduit) dans le christianisme un système de rites. En réalité le Ritualisme met l’accent sur l’incarnation en négligeant l’expiation, il ignore la proximité avec Dieu dans laquelle le chrétien est établi depuis que le voile du temple a été déchiré. Sous des apparences de piété extérieure, il y a une racine profonde d’incrédulité qui fait que le Rationalisme et le Ritualisme se rejoignent. Malgré que cet article soit un peu ancien (1870) et qu’il se réfère à la situation de l’église d’Angleterre à cette époque-là, il n’a pas perdu de son actualité pour ceux qui veulent bien comprendre la différence entre les efforts de ceux qui s’appuient sur des rites et des sacrements, en contraste avec ceux qui s’appuient sur la position « en Christ » du croyant telle que le vrai évangile la présente. Secondairement cet article fait comprendre comment le Rationalisme, ou incrédulité appliquée à la Bible et à la foi chrétienne, se rejoint avec le Ritualisme. Cela explique comment il est possible que les grandes églises officielles s’opposent tant à la foi fondamentaliste qui tient à recevoir la Parole de Dieu sans modification ni altération, tandis que ces églises font chorus avec tant de commentaires de la haute critique, ou de la critique historico-scientifique, — des commentaires imprégnés d’incrédulité au sujet de tout ce qui, dans l’Écriture, surprend l’homme naturel.


 

William Kelly

Traduit de l’anglais d’après l’édition de 2002. 1ère édition 1870

 

Table des matières:

1     Distinction entre Rationalisme et Ritualisme

2     La vérité de l’évangile préserve à la fois du Rationalisme et du Ritualisme

3     Le Christ Jésus nous donne la vérité

4     Christ prend la place des figures de Moïse

5     Christ introduit Dieu et ôte (ou : abolit) le péché

6     Approchés par la mort de Christ, non pas par l’incarnation

7     Le Ritualisme nie que le voile est déchiré

8     Remise en vigueur d’une prêtrise terrestre particulière

9     La sacrificature (ou : prêtrise) chrétienne actuelle

10     Ceux qu’on appelle les pères chrétiens

11     Les « pères de l’église » et les Écritures

12     Le Ritualisme est bâti seulement sur l’incarnation

13     La mort expiatoire de Christ négligée ou sous estimée

14     Le déchirement du voile

15     Le docteur Newman et le brigand converti

16     Tout chrétien est un homme d’église

17     La justice d’après l’épître aux Romains

18     Abandon des privilèges chrétiens

19     Ritualisme et baptême

20     Ritualisme et Cène

21     Ritualisme et Christ ressuscité

 

 

 

« Car le Christ n’est pas entré dans les lieux saints faits de main, copies des vrais, mais dans le ciel même, afin de paraître maintenant pour nous devant la face de Dieu, — ni, non plus, afin de s’offrir lui-même plusieurs fois, ainsi que le souverain sacrificateur entre dans les lieux saints chaque année avec un sang autre que le sien (puisque dans ce cas il aurait fallu qu’il souffrît plusieurs fois depuis la fondation du monde) ; mais maintenant, en la consommation des siècles, il a été manifesté une fois pour l’abolition du péché par son sacrifice. Et comme il est réservé aux hommes de mourir une fois, — et après cela le jugement, ainsi le Christ aussi, ayant été offert une fois pour porter les péchés de plusieurs, apparaîtra une seconde fois, sans péché, à salut à ceux qui l’attendent » (Héb. 9:24-28).

 

Le sujet dont je voudrais parler ce soir peut sembler être tout à fait aux antipodes du Rationalisme dont nous nous sommes entretenus la semaine dernière ; mais l’opposition n’est qu’apparente. Sans doute dans les esprits et dans l’intention de beaucoup, il y a un réel antagonisme ; et loin de moi de douter que, tandis que des hommes pieux ont été teintés de quelques éléments de Rationalisme, d’autres, et même davantage, ont pour leur part subi des atteintes de la part du Ritualisme. Pour tout esprit droit et qui connaît correctement à la fois la Parole de Dieu et les faits qui se développent dans l’état présent des idées parmi les enfants de Dieu dans le monde, il est indiscutable qu’il y a des personnes entraînées dans ces deux directions contraires, celle du Rationalisme et celle du Ritualisme, alors qu’elles ont pourtant une vraie connaissance vivante de Dieu par le Seigneur Jésus. Mais ceci ne prouve rien du tout quant au caractère de chacun de ces deux systèmes en eux-mêmes. Cela montre seulement que le seul fait d’être enfants de Dieu, ne préserve en rien des pièges de l’adversaire ; et que, même si l’on est réellement né de nouveau, on peut être entraîné à la dérive dans l’une ou l’autre de ces directions, si on se laisse aller aux pensées et aux sentiments des hommes.

 

1                        Distinction entre Rationalisme et Ritualisme

Or derrière l’opposition apparente de ces deux systèmes, il y a un lien, et par conséquent une sympathie souvent assez forte, et je ne doute pas que cela fournira en son temps à l’ennemi de nos âmes le pouvoir de les mélanger ensemble dans une union à laquelle ni l’un ni l’autre de ces mouvements ne sont prêts pour le moment. La raison de ceci réside dans le simple fait que comme le Rationalisme est une déification des pouvoirs humains, dans lequel l’homme a la prétention de juger la Parole de Dieu par ses propres pensées, — il s’agit par conséquent de l’incrédulité intellectuelle quand il est mené jusqu’au bout ou qu’il est jugé dans son principe — de la même manière, de son coté, le Ritualisme est l’incrédulité de l’imagination, très souvent avec une piété sous jacente, et un amour pour le Sauveur qui peut éventuellement préserver des pleines conséquences du système, mais le Ritualisme a en soi la saveur de l’idolâtrie et tend vers elle.

Or la puissance de délivrance, aussi bien que ce qui en manifeste le vrai caractère, voilà ce sur quoi nous pouvons nous arrêter maintenant avec profit. Il ne s’agit pas de disséquer le mal par plaisir, mais l’important est de fournir le remède de Dieu ; c’est ce que je me suis efforcé de garder à l’esprit en parlant du Rationalisme. Pareillement cette fois-ci, je m’en tiendrai surtout à ce qui, par la grâce de Dieu, peut préserver les âmes de l’incrédulité religieuse, en leur donnant des raisons divines de juger et rejeter le Ritualisme dans tous ses fruits aussi bien que dans ses racines.

 

2                        La vérité de l’évangile préserve à la fois du Rationalisme et du Ritualisme

Grâce à Dieu il ne faut pas chercher loin le remède ; il est tout près, dans notre bouche et dans notre cœur (Rom. 10:8). La vérité de l’évangile est la meilleure sauvegarde non seulement contre le Rationalisme, mais aussi contre le Ritualisme. Pour une âme qui comprend réellement l’évangile (je n’entends pas une âme simplement née de nouveau, mais une âme qui, par grâce, connaît de manière intelligente la parole de vérité et l’évangile du salut), il est impossible d’être entraînée malgré elle dans l’un ou l’autre de ces mouvements. Des personnes peuvent être entraînées dans n’importe quoi pour un temps ; mais pour quelqu’un qui comprend l’évangile simplement, et qui en place la vérité réellement devant son âme, et qui par-dessus tout a Christ Lui-même comme objet révélé à son cœur en amour par cet évangile, il est impossible qu’une telle âme reste dans le piège de l’un ou de l’autre, voire même d’y être entraînée tant soit peu. Je vais donc montrer que si les chrétiens tiennent ferme ce que Dieu leur a donné dans le Seigneur Jésus et dans l’œuvre puissante que Christ a accomplie et que Dieu révèle maintenant par le Saint Esprit envoyé du ciel, qui nous le fait connaître spécialement dans le Nouveau Testament, — il y a un moyen divin d’être préservé et auquel aucune puissance de l’ennemi ne peut faire une brèche.

Vous aurez noté dans les versets que nous venons de lire que l’Esprit de Dieu nous montre la relation entre, d’une part la vérité et les faits du christianisme, et d’autre part ce qui était réellement un système rituel, le seul système rituel que Dieu ait jamais reconnu. En Israël il y avait un système d’ombres religieuses, fourni par Dieu lui-même. C’est la raison pour laquelle, si ceci était tout ce que Dieu a révélé, nous devrions être tous des ritualistes. Car pour le croyant, il est indiscutable que Dieu a établi ce système, et l’a maintenu par Son autorité jusqu’à ce qu’il ait opéré ce qu’il avait à faire. Ce n’était pas du tout le système primitif, car Dieu a pris soin que la promesse soit avant la loi (Gal. 3:17), avant ces ombres systématisées dans la loi (ce qu’on appelle communément la dispensation lévitique).

 

3                        Le Christ Jésus nous donne la vérité

La vérité de l’évangile montre que le Seigneur Jésus est venu dans le monde pour nous donner la vérité, laquelle le Rationalisme, bien loin de l’avoir trouvée, confesse qu’il ne l’a pas, puisqu’il est seulement à sa recherche — il ne professe donc pas savoir, et il doute même qu’on puisse savoir. Non seulement Christ nous a amené en Lui-même la vérité, pour l’âme la plus simple qui Le reçoit, — non seulement Il est en Lui-même exactement le même Christ pour les plus simples comme pour les plus spirituels, — mais en outre Il a opéré une œuvre dont les conséquences sont infinies et excluent absolument le Ritualisme et la base qui est la sienne.

Dieu ne nous a pas laissés à nous-mêmes pour chercher et trouver quelles sont ces conséquences : Lui-même nous les a révélées. Il en déclare certaines dans les versets déjà lus. Il nous dit, là, que Christ n’est pas entré dans les lieux saints faits de main. Ces lieux saints appartenaient au système de rites (ritualiste) d’Israël, et ils sont déclarés divinement être des figures (copies) des vrais (Héb. 10:24).

C’est pourquoi le Ritualisme ne nous donne pas davantage la vérité que le Rationalisme ; il donne des ombres, tandis que le Rationalisme laisse les hommes dans les ténèbres. Il nous donne des figures de ce qui est vrai, mais rien de plus. Il ne nous donne pas l’image même des choses (Héb. 10:1), mais au mieux des types. Le Rationalisme est un système négatif et mortel, il ne donne rien et voudrait tout détruire. Le système des rites selon Dieu présentait, d’une manière symbolique et jusqu’à un certain point, la vérité que Christ allait introduire, — non pas toute la vérité (bien loin de là), ni même aucune partie d’elle dans sa plénitude.

Rien ni personne ne peut en aucune manière être une représentation adéquate de Christ. Il nous faut avoir Christ Lui-même pour avoir la vérité. Or ce chapitre nous dit que Christ « a obtenu une rédemption éternelle » (Héb. 9:12). C’est ce qu’Il a fait en étant élevé de la terre en sacrifice. Il nous est dit ensuite qu’Il est entré « dans le ciel même » (Héb. 9:24). Ainsi si en Lui tout est réalité, dans la condition de la créature comme telle il n’y a pas de réalité, sauf dans la douloureuse réalité du péché ; mais à proprement parler, nous ne pouvons pas appeler le péché une réalité, sauf pour le jugement. Il est l’aliénation du cœur de l’homme d’avec Dieu, la propre volonté, la convoitise, la passion, l’orgueil, la vanité, — oui, c’est tout du mensonge contre la nature que Dieu a faite. Étant un éloignement d’avec Dieu Lui-même vers la manière de voir de la créature, il n’a aucun droit à être appelé une réalité, sauf dans sa culpabilité et sa misère. Il y a eu une fois une réalité quand Dieu a fait les cieux et la terre et qu’Il a placé l’homme dans le paradis de délice, quand l’homme, et tout ce que Dieu avait mis dans son environnement, était très bon ; mais cette réalité s’est effacée quand l’homme a péché ; et à partir de ce jour-là, jusqu’à ce que Dieu évince le monde de péché par Jésus Christ notre Seigneur, ce monde n’est pas selon Dieu, mais il est un vain spectacle dans la chair, bien qu’en partie avec des ombres des bonnes choses à venir.

Il n’y a donc pas de réalité selon Dieu ici-bas ; le monde est devenu un désert où il n’y a pas de chemin, sauf pour la foi. Christ est descendu vers lui. Christ est la réalité, et c’est Lui qui a fait une œuvre réelle pour Dieu et pour l’homme, comme nous l’enseigne cette épître aux Hébreux (et toutes les autres, si l’on parle d’une manière générale). C’est cela qui, reçu par la foi dans le cœur, fait sortir le pécheur de son état, — c’est ce qui fait sortir le pécheur du mensonge dans lequel la nature déchue vit, ou plutôt est morte, — c’est ce qui l’amène dans la vérité et dans la grâce de Dieu qui sont les fruits de l’amour selon Sa volonté. Dieu conduit le croyant dans la conscience d’une relation avec Lui-même, et ainsi, tandis que le croyant marche à travers ce monde, Dieu prépare l’âme à attendre une autre réalité, à attendre la gloire céleste où Christ lui-même nous a devancé pour attendre aussi (quoique pas pour Lui-même) que cette terre soit rendue digne du Dieu qui l’a créée, et digne de Celui qui a réconcilié toute chose avec Lui-même par Jésus Christ (Col. 1:20).

 

4                        Christ prend la place des figures de Moïse

Or l’apôtre a l’âme remplie de ces vérités, et il les déploie devant ceux auxquels il écrivait. Ils en avaient spécialement besoin, car ils avaient été habitués à un système de rites. Il était plus important pour eux, plus que pour tout autres, de savoir si, oui ou non, le christianisme était une prolongation de ce qui était familier aux Juifs, ou si c’était un système entièrement nouveau, et formant contraste avec le Judaïsme ritualiste — quelque chose d’entièrement nouveau en soi, même si c’était quand même avec une préparation pour lui ouvrir la voie, avec des promesses préalables et des ombres comme nous avons vu. Or c’est justement ce contraste que l’apôtre fait connaître ici : « Christ n’est pas entré dans les lieux saints faits de main, copies des vrais, mais dans le ciel même, afin de paraître maintenant pour nous devant la face de Dieu ».

En conséquence nous avons maintenant tout selon Dieu ; comme il n’y a qu’un Christ, ainsi il n’y a qu’un sacrifice ; et si l’on parle maintenant de ce qui est nécessaire pour Dieu et pour la délivrance de l’homme de son état de ruine, nous avons la rédemption, le pardon des péchés. Il est donc montré là qu’il n’était pas nécessaire qu’il s’offrît Lui-même plusieurs fois, comme les souverains sacrificateurs entraient dans le lieu saint chaque année avec un sang autre que le leur (Héb. 9:25). La répétition continuelle faisait partie du système ritualiste, et le christianisme se dresse en contraste avec lui. Il s’est offert Lui-même une fois pour toute. S’il avait été nécessaire de s’offrir Lui-même de manière répétée, Il aurait dû aussi souffrir de manière répétée. Les deux choses ne peuvent être séparées : c’est pourquoi nous lisons qu’Il aurait dû souffrir plusieurs fois depuis la fondation du monde (Héb. 9:26). L’idée d’un sacrifice renouvelé de Christ à Dieu sans qu’Il eut souffert de nouveau, n’est pas seulement une erreur, mais c’est en opposition directe à Sa Parole et au fondement du christianisme.

« Mais maintenant, une fois pour toutes » est-il dit, « à la fin du monde » (« en la consommation des siècles » selon la version JND) en parlant du monde comme la scène des opérations de Dieu, non pas le simple système physique, mais la consommation des différents siècles ou ères qui ont eu leur cours, et par lesquels l’homme a été mis à l’épreuve, tout spécialement par le système ritualiste, entre autres tests — mais « une fois pour toutes », à la fin de toutes les voies expérimentales avec l’homme, à la fin des siècles, Lui est apparu pour ôter (ou : abolir) le péché par le sacrifice de Lui-même (Héb. 9:26).

 

5                        Christ introduit Dieu et ôte (ou : abolit) le péché

Ainsi, dans le Christ Jésus et dans Sa mort, nous trouvons deux grandes vérités. (1) Il est venu pour introduire Dieu dans ce monde, (2) Il est venu pour ôter (ou : abolir) le péché du monde. Le Rationalisme est ignorant de ces deux vérités, cela est clair et certain ; si le Ritualisme reconnaît la première, il ignore assurément la seconde, et en pratique la renie, à savoir le fait que Dieu ôte le péché par la rédemption. Bien loin de contredire l’incarnation, le Ritualisme insiste beaucoup dessus, à ses fins propres ; mais il est tout à fait sûr que le principe n’est pas cohérent avec la rédemption, sauf en figure. Il est impossible pour le Ritualisme de coexister avec la vérité fondamentale de l’évangile, à savoir que Christ a souffert pour ôter le péché par le sacrifice de Lui-même. L’a-t-Il fait oui ou non ? A-t-Il manqué de le faire quand Il est venu pour le faire ? A-t-Il, en effet, ôté le péché par le sacrifice de Lui-même, ou bien l’a-t-Il fait une seule fois en figure ?

Que le sacrifice de Christ Lui-même, ait été accompli sur la croix, les Ritualistes ne le nient pas ; et personne ne croit qu’ils entendent nier que le péché ait été ôté par Sa mort. Nous ne discutons pas ici ce que les hommes diraient, mais nous jugeons ce que leur système signifie. Nous recherchons ce que le Ritualisme est réellement, en le jugeant par la Parole vivante de Dieu. J’affirme dès lors que, tant que Dieu a maintenu un système de rites dans un but spécial et vénérable, il n’y avait aucun sacrifice qui ôtât réellement le péché de devant Dieu. Il y avait des sacrifices, mais ils étaient tout à fait opposés dans leur caractère et leur résultat, selon ce que nous dit Hébreux 10:1-3. Ils remémoraient le péché. Ils gardaient le fait de la souillure de l’homme constamment devant les yeux des Juifs. C’était bien qu’il en fût ainsi, car c’était pour eux une leçon des plus salutaires. C’était de la grâce de la part de Dieu, et en soi c’était juste et bon, de faire sentir à l’homme son péché jusqu’à ce qu’il soit ôté ; car alors il n’était pas ôté, et il ne pouvait pas l’être. Si je crois la vérité de l’évangile, le péché est ôté par la mort de Christ. Il est vrai que c’est d’autant plus grave pour celui qui ne croit pas en Christ. La vérité que le péché a été ôté et la bénédiction qui découle de ce fait demeurent pour la foi ; mais assurément, la situation est tellement plus terrible pour celui qui substitue quelque chose à Christ, — tellement plus fatale, non seulement pour le Rationaliste, mais aussi pour le Ritualiste.

Ne soyons pas séduits ni trompés par des paroles ou des apparences. Nous sommes responsables de la vérité maintenant, parce que la vérité a été révélée. Et observons que maintenant, entre Dieu et l’homme, tout est déployé sans voile. Il y avait un voile auparavant, mais il est déchiré. Notez bien le moment et le fait : c’est quand Jésus est mort, que le voile du temple a été déchiré depuis le haut jusqu’en bas. Est-ce sans importance ? Tout a l’importance que Dieu révèle, mais sûrement aucun fait n’en a davantage que ce qui se rapporte à la croix. Jusqu’à ce moment-là l’homme n’était pas dans la présence divine. Mais Dieu est descendu vers l’homme, Il a été ici sur la terre dans la personne du Seigneur Jésus. Celui qui L’a vu, Lui le Fils, a aussi vu le Père.

Mais il y a davantage que cette manifestation dans la mort de Christ. En un sens, Il a rendu Dieu proche du pécheur durant Sa vie ; mais dans Sa mort Il a amené le croyant à Dieu. Le croyez-vous ? Si réellement vous recevez cela, et agissez en conséquence, vous n’êtes pas un ritualiste. Si vous croyez que vous êtes approchés de Dieu, je vous demande dans quelle mesure ? Utilisez vos propres armes, vous qui aimez Jésus et qui Le connaissez ; ayez recours à vos propres normes. N’abandonnez jamais Christ, ne Le perdez jamais de vue comme la Vérité ; ne manquez jamais de L’introduire, quelle que soit la difficulté, quelle que soit la question. Votre position avantageuse est d’avoir Christ et de Le connaître. C’est pourquoi cherchez humblement et saintement, mais avec foi, à appliquer le Christ que vous avez reçu de la part de Dieu, et que le Saint Esprit a fait connaître à votre âme par la Parole de Dieu.

 

6                        Approchés par la mort de Christ, non pas par l’incarnation

Maintenant vous avez été approchés de Dieu, non selon la mesure des Juifs, ni même des sacrificateurs juifs, ni même du souverain sacrificateur juif. Vous ne direz donc pas que ma doctrine abaisse les privilèges du chrétien. Je suis persuadé qu’il y a trop souvent une carence pénible dans la manière dont on traite ces mauvais pas à reculons vers le judaïsme. De simples protestations à leur encontre sont froides et sans effet, c’est-à-dire celles qui consistent négativement à montrer en quoi elles sont fausses sur tel et tel point. Ce genre d’opposition ne tiendra pas en face d’une mise à l’épreuve sévère ou d’une promesse séduisante. Le cœur de l’homme veut quelque chose de solide ; et Dieu veut aussi qu’il ait des certitudes ; Dieu selon Sa grâce, a révélé Sa vérité, Sa puissance, Sa sagesse en Christ le Seigneur ; et non pas simplement de cette manière, mais aussi dans la rédemption par Christ. Le témoignage constant, et le résultat de ce fait unique, c’est que le voile est déchiré.

 

7                        Le Ritualisme nie que le voile est déchiré

Il ne s’agit donc pas simplement du fait que Dieu est descendu vers moi, et qu’Il a consacré pour moi un chemin vers Lui, un chemin nouveau et vivant à travers le voile (Héb. 10:19-22). Le Ritualisme nie ceci ; il renouvelle le voile, et insiste beaucoup dessus. Qui lui a donné une telle autorité ? Ce n’est pas Dieu, puisque Dieu l’a déchiré en réponse à la croix de Christ. Qu’y a-t-il à l’appui de ce renouvellement du voile ? C’est une trahison contre Sa Parole. C’est en effet la négation claire, flagrante et inexcusable du résultat révélé de la mort de Christ. Redisons que je n’accuse personne dans leur rang d’avoir l’intention d’annuler l’évangile ; mais il est impossible pour un chrétien intelligent de ne pas mettre le système en accusation ; il ne s’agit pas ici de savoir qui soutient ce système, que ce soit quelqu’un que vous espérez être chrétien, ou que ce soit quelqu’un que vous estimez être chrétien et même que vous en êtes aussi sûr qu’il est possible de l’être. Admettons tout ceci, et je le fais de tout cœur : cependant le fait que cette erreur soit maintenue par un chrétien ne rend pas l’erreur moins grave, et cela ne saurait valider ce qui est contraire à Christ.

Je maintiens alors que le Ritualisme est un recul du christianisme vers ce qui n’en est que la figure, et que sa doctrine et sa pratique ignorent la proximité de Dieu dans laquelle l’évangile introduit le croyant par l’œuvre de Christ. Cette proximité n’est-elle pas vraie selon la Parole de Dieu tout à fait claire que vous avez devant vous en Hébreux 9 et 10 ? Vous savez que je ne tords pas cette vérité, et que votre conscience ne peut échapper à sa force. Je fais appel à vous en présence de Dieu dont vous avez la Parole devant vous. Vous pourriez avoir des doutes si on était en train de créer une chaîne de passages regroupés de manière camouflée et embrouillée, mais je m’appuie intentionnellement sur une seule portion lumineuse de l’Écriture. Il en suffit d’une, quand bien même il n’y en aurait pas d’autre.

Mais j’espère montrer brièvement qu’à travers tout le Nouveau Testament depuis l’accomplissement de la rédemption, cette même vérité est enseignée sous différentes formes. Il est impossible que la vérité de Dieu soit incohérente avec elle-même. Toutes les Écritures qui traitent du christianisme sont admirablement en harmonie les unes avec les autres, leur témoignage est uniforme, et tout démontre que le Ritualisme, bien qu’il ne rejette pas la personne de Christ, n’est rien moins que la négation nette et pratique de l’efficacité de l’œuvre de Christ, telle qu’elle est affirmée dans l’évangile de Dieu

 

8                        Remise en vigueur d’une prêtrise terrestre particulière

Ainsi l’un des piliers du Ritualisme consiste à admettre que Dieu a encore une prêtrise (ou : sacrificature) terrestre. L’affirmation de l’existence d’une caste sainte de ministres sur la terre qui serait en mesure de s’approcher de Dieu pour les chrétiens, met entièrement de côté l’évangile de Christ. Il ne s’agit pas ici du ministère chrétien. Je ne cède en rien et à personne quant à la fermeté de conviction que le ministère est une institution divine et permanente du christianisme. La vérité est que ce ministère chrétien et la prêtrise terrestre, bien loin d’être la même chose, sont au contraire antagonistes. Car le ministère chrétien est le service, provenant d’un don divin, qui consiste à apporter la vérité de Dieu pour influer sur l’âme de l’homme. C’est un service envers les inconvertis pour les amener à Dieu par l’évangile, et envers les convertis pour les instruire davantage dans la vérité de l’évangile et de tout le conseil de Dieu dans l’Écriture en général.

Mais une prêtrise (ou : sacrificature) terrestre est quelque chose de tout différent : bien loin qu’elle fasse partie des institutions de l’évangile, la tentative de la remettre en vigueur est sans aucun doute le péché de Coré, de Dathan et d’Abiram (Nombres 16). C’est en effet la présomption de l’homme, qu’il soit lévite ou conducteur du peuple, de supplanter l’autorité de Moïse, et de se tenir à la place d’Aaron, l’apôtre et le souverain sacrificateur du système juif. C’est en réalité un coup porté à la sacrificature de Christ, tout comme la rébellion de Coré était dirigée principalement contre Aaron.

Ce que je dis ici n’est pas une application farfelue du type, qui serait sans rapport avec les dangers courus par les chrétiens : l’épître de Jude au v. 11 montre le contraire. En effet ce serait une indignité que d’abuser de ceux qui sont encore mal versés dans les types de l’Écriture. Je n’ose pas me servir de ce que je crois ne pas être la vérité après un examen approfondi de l’Écriture ; mais ceci, bien que suffisant pour moi, ne va pas l’être pour vous. Je vous prie donc de comparer ce que nous dit Jude avec les Nombres et les Hébreux. Nous y apprenons au v. 11 que non seulement le chemin de Caïn et l’erreur de Balaam s’appliquent aujourd’hui, mais aussi que des hommes doivent périr dans la contradiction de Coré. Qu’est-ce que cela dans le cadre du christianisme révélé, sinon la mise en place d’hommes pour une prêtrise (ou : sacrificature) terrestre, ce qui porte atteinte à la gloire du Seigneur Jésus ? Selon les Hébreux, c’est Lui qui est le vrai et seul prêtre (ou : sacrificateur), au sens de quelqu’un qui se tient comme intermédiaire entre Dieu et nos âmes.

 

9                        La sacrificature (ou : prêtrise) chrétienne actuelle

Dans un autre sens, il est indubitable qu’il y a une sacrificature (ou : prêtrise), sous le christianisme ; mais cela ne fait que rajouter un exemple du fait que le Ritualisme est irréconciliable avec la position du chrétien, car c’est une nouvelle preuve de ce que je me suis déjà efforcé de montrer, à savoir que la puissance du christianisme est perdue là où on oublie ce qu’il a de positif, et où on le réduit à une négation de telle ou telle erreur. Il y a ceux qui désirent constamment maintenir la vérité en disant qu’il n’y a plus de prêtres (ou : sacrificateurs) maintenant. Je retournerai la question, et dirai que, ce que le Nouveau Testament déclare, c’est que tous les chrétiens sont prêtres (ou : sacrificateurs), c’est-à-dire tous ceux qui ont été approchés de Dieu. Cela ne veut pas dire que tous sont ministres de la Parole ; ceux qui le sont, sont le petit nombre au service du bien de beaucoup, et même de tous. Aucun chrétien n’est ministre de la Parole du seul fait qu’il est chrétien. Le ministère ne dépend pas du fait qu’on est chrétien, mais du fait d’avoir reçu une puissance spéciale, ce que l’Écriture appelle un don — le don de grâce du Seigneur Jésus, avec lequel on est tenu de Le servir, soit dans l’évangile, soit dans l’assemblée. En conséquence, si nous regardons aux chrétiens, ils diffèrent du point de vue des dons. Certains ne sont pas du tout appelés à servir le Seigneur de cette manière ; et même ceux qui sont appelés à servir ont des dons différents, comme l’apôtre le dit en Romains 12:6-8.

Quand nous arrivons à la prêtrise ou sacrificature chrétienne, il y a une position commune à tous les chrétiens ; pourquoi cela ? parce que nous sommes approchés de Dieu. La vérité de l’évangile suppose, non pas une institution terrestre, mais que les chrétiens sont prêtres ou sacrificateurs, et ceci est la seule prêtrise réelle que Dieu reconnaît maintenant, hormis celle de Christ en haut. Même le Seigneur Jésus n’était pas sacrificateur (ou : prêtre), sur la terre ; quand Il était ici-bas, Il n’a pas exercé de pareilles fonctions. Ceci est une déclaration directe de l’Écriture. La même épître aux Hébreux (8:4) l’affirme : il est donc entièrement faux d’appliquer le système Ritualiste au christianisme. Même Celui qui est la pierre de fondement de toute bénédiction pour l’homme, la vie et la justice et la gloire du chrétien dans l’évangile — même Lui n’a pas été sacrificateur (ou : prêtre) tant qu’Il a vécu sur la terre. Élevé de la terre, Il est devenu un sacrifice ; monté au ciel, Il est entré dans le sanctuaire que le Seigneur a dressé, et non pas l’homme (Héb. 8:2), et là, Il a été, selon l’œuvre de Dieu, le Grand Souverain Sacrificateur. Et qui sont les sacrificateurs (ou : prêtres) ? Si le Seigneur Jésus correspond au type d’Aaron, et incomparablement davantage, si Aaron n’est qu’une ombre faible de ce que Christ est comme grand sacrificateur, qui sont les fils d’Aaron ? Ce sont ceux qu’Il n’a pas honte d’appeler ses frères : « c’est pourquoi il n’a pas honte de les appeler frères, disant : … Me voici, moi, et les enfants que Dieu m’a donnés » (Héb. 2:12). Qui sont ces enfants ? Ce sont les chrétiens. « Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous d’un », comme nous le dit le même écrivain inspiré (Héb. 2 v. 11 et 13).

Nous voyons donc combien la doctrine des types s’accorde exactement avec les déclarations claires de l’évangile. Car s’Il a souffert une fois, le Juste pour les injustes, pour nous amener à Dieu, Il nous y a amenés si parfaitement qu’il ne peut y avoir, et qu’il n’y a aucun prêtre (ou : sacrificateur) entre nous et Dieu, sauf Lui-même. Et le Seigneur Jésus, bien loin de nous tenir loin de Dieu, est justement Celui par la mort duquel nous sommes amenés à Dieu, et qui est toujours vivant pour intercéder pour nous (Héb. 7:25).

Répétons-le : ceci est la position actuelle du chrétien, non pas une simple position future. Quand nous irons au ciel, nous ne cesserons pas d’être prêtres (ou : sacrificateurs). Quand le règne de notre Seigneur Jésus Christ sur la terre viendra, nous ne cesserons pas d’être prêtres (ou : sacrificateurs) ; au contraire, au lieu que ce soit comme maintenant une position dont nous avons à jouir par la foi, et que nous avons à réaliser par la foi, nous serons manifestés comme étant rois et sacrificateurs, et nous régnerons avec Christ. Mais l’évangile, la vérité de l’évangile, tels que révélés dans les épîtres, montre que tout croyant a dès maintenant la position de prêtre (ou : sacrificateur), non pas de manière simplement figurée, mais de manière tout à fait réelle, car il y a toujours du réel selon l’évangile. Le christianisme donne la réalité de la vérité et de la grâce de Dieu, par Jésus Christ notre Seigneur.

Ceci peut aider à démontrer l’importance immense du sujet qui est devant nous. De plus cela montre combien le Ritualisme est incrédule, malgré une apparence beaucoup plus respectable que celle du Rationalisme, avec moins de hardiesse peut être, mais avec davantage de révérence dans ses positions, — voire dans ses impostures. Il peut saluer avec un baiser, il peut se courber devant Jésus, il peut Lui donner beaucoup d’honneur en paroles ; mais jugé par l’Écriture, par la vivante et permanente Parole de Dieu, son cœur est loin de Lui. Oui, ce n’est pas plus la vraie adoration du Seigneur Jésus qu’au temps où Israël autrefois, animé par la puissance de Satan, osait faire une figure de l’Éternel à l’aide d’un veau d’or ; car il est indiscutable que le Ritualisme de la chrétienté ne s’attache même pas aux figures de ce qui est vrai. En aucun cas, il ne serait justifié s’il se restreignait aux anciennes ombres des « biens à venir ». J’ai déjà montré que, même s’il le faisait, ce ne serait pas chrétien. Car l’Écriture affirme que c’est de l’idolâtrie, pour les chrétiens gentils (= non juifs), de consacrer à des usages chrétiens les éléments rituels donnés aux Juifs (Gal. 4:9).

 

10                  Ceux qu’on appelle les pères chrétiens

Le Ritualisme va en fait beaucoup plus loin ; et c’est aussi un fait frappant, mais mal connu, qu’en dépit des références aux auteurs anciens dont il se vante (ceux qu’on appelle communément les pères, ou pères de l’église), le Ritualisme s’est considérablement développé depuis leur époque. Prenez, par exemple, les modes d’habillements étranges (dont les couleurs seraient plus appropriées aux arlequins ou aux saltimbanques les plus fantastiques), dans lesquels les hommes acceptent ceux qui s’appellent serviteurs de Christ — je vous demande pardon, les prêtres chrétiens : les pères les soutiennent-ils sur ce point ? pas du tout ! Ce n’est pas pour autant que les pères soient pour moi une norme de pratique ou d’orthodoxie. Je les connais trop bien pour admettre, ne serait-ce qu’un instant, une pareille rêverie : cela peut convenir à ceux qui ne les ont jamais comparés à la Parole de Dieu ; car je reconnais qu’il est possible de les étudier en profondeur et d’en être comme complètement hypnotisé. En effet, il est à peine croyable, à mon avis, de voir des hommes avec de douces affections, une capacité supérieure et une réussite supérieure, et qui pourtant semblent livrés à un esprit vide de discernement quand ils se mettent à citer « les pères ». Pourquoi peuvent-ils écrire, et écrivent-ils effectivement bien mieux eux-mêmes toutes les fois qu’ils suivent la Parole de Dieu ? Néanmoins ils s’inclinent devant les pères exactement comme les catholiques romains s’inclinent devant l’hostie qu’ils adorent comme leur Dieu, ou devant la vierge à qui ils font confiance pour intercéder pour leur âme.

Il est non moins pénible de voir des hommes de qualité dont les consciences et les esprits semblent contenus quand ils sont en présence des restes désuets de ces anciens auteurs. Et même ils ne se rendent pas compte de ce qui est arrivé de nos jours ; il est en effet bien remarquable de les voir qualifier de « bons à rien » des gens qui vont à peine jusqu’à s’accoutumer aux vêtements luxueux, alors que Clément d’Alexandrie, si je me rappelle bien, traite de tels symptômes comme entièrement déshonorants, même s’ils ne sont qu’à l’état de germe. La vérité semble être que les habits devenus depuis longtemps des habits ecclésiastiques, étaient à l’origine simplement les habits du peuple à l’époque. De vastes changements sont intervenus quand les barbares ont envahi et renversé l’empire romain ; et ce qui était utilisé comme de simples habits civils par les romains, est devenu par un changement extraordinaire, l’habit ecclésiastique des « prêtres chrétiens », comme on les nomme. Ils avaient un habit particulier pour les jours de jeûne, un autre pour les fêtes, un autre pour les jours ordinaires. Voilà assez bien, je crois, l’origine de ce qui s’est depuis longtemps métamorphosé de manière si étrange, mais qui en même temps a été si singulièrement abandonné de nos jours par quelques prétendants à l’antiquité ecclésiastique. Mais cela suffit pour cette question.

 

11                  Les « pères de l’église » et les Écritures

Je reviens à ce fait solennel déjà mentionné, à savoir la connexion entre le Rationalisme et le Ritualisme, d’autant plus que ce lien est susceptible de passer inaperçu.

Je me rappelle un incident qui peut illustrer ce point quelque peu. Un de mes amis voyageait en train vers Oxford, sans avoir reconnu le passager voisin, un ancien chef universitaire. Beaucoup d’années s’étaient écoulées depuis leur séparation, si tant est même qu’ils se soient connus auparavant. Ils n’étaient plus jeunes ni l’un ni l’autre à l’époque, et sont maintenant tous deux décédés. Mon ami posa la question suivant à son voisin : « Je vous prie, monsieur, pouvez-vous me dire comment vont les rationalistes à Oxford ? » C’était une question malencontreuse adressée à celui qui était le meneur principal des rationalistes, car il était, en tout cas en sciences physiques, le plus distingué des sept qui ont, depuis, atteint la notoriété peu enviable d’être les auteurs du périodique « Essais et revues » (publié à partir de 1860, condamné en 1864 par les évêques ; rédigé par six clercs et un laïc de l’Église d’Angleterre). Le passager interrogé resta silencieux pendant un moment, mais je suppose qu’il avait vu que le visage de l’interrogateur ne manifestait aucune intention d’insulter par une question inconvenante ; mon ami n’aurait d’ailleurs jamais posé sa question s’il avait su qui était son interlocuteur.

Après une pause le professeur répondit : « Aussi bien, monsieur, que les Tractariens (*) leleur permettront ». « Que voulez-vous dire ? » répondit à son tour mon ami. « Ceci » dit l’autre, — et il alla directement au cœur du problème, fournissant une excellente confirmation de ce sur quoi j’ai insisté — « Les Tractariens disent que les pères de l’église sont aussi bons que les Écritures. Les rationalistes répondent que les Écritures ne sont pas meilleures que les pères ».

 

(*) note Bibliquest : Tractariens : ainsi appelés à cause des tracts qu’ils avaient diffusés. Ils représentaient le mouvement ritualiste au sein de l’Église d’Angleterre.

 

La réponse clarifiait tout à fait l’affaire, et elle montre que, malgré des apparences complètement différentes (l’audace intellectuelle d’un côté qui ose parler contre la Parole de Dieu, et d’un autre côté la piété extérieure, ou en tout cas la génuflexion du Ritualisme), il y a au fond, dans ces deux mouvements, la même racine d’incrédulité. Dans les deux cas, on supplante la vérité claire de la Parole inspirée par autre chose. Tous les deux s’en débarrassent, tous les deux privent l’âme de ce qui est le seul moyen d’avoir un lien vivant entre Dieu et l’homme. Peu importe les formes ou les moyens précis, que ce soit le processus négatif du Rationalisme, ou la revendication plus positive du Ritualisme : que l’homme arrive avec ses rites ou ses raisonnements au point d’exclure la Parole de Dieu, ou qu’il mette une distance entre son autorité et l’âme de l’homme, — dans tous les cas on arrive à peu près au même résultat.

Il reste encore à montrer à cet égard l’enseignement général du Nouveau Testament. Je me suis restreint à un passage particulier ; mais comme précédemment, au lieu d’exposer dans le Ritualisme ce qui est grossier, pénible et évidemment mauvais, je voudrais le prendre comme il se présente et comme il aime à se présenter lui-même, c’est-à-dire le prendre sous sa meilleure forme de la part de ses défenseurs les plus capables. C’est toujours honnête, voire nécessaire, d’agir ainsi. Plus nous avons à blâmer quelqu’un, plus nous devons le laisser se mettre sous les meilleures apparences, et avoir le meilleur crédit admissible pour notre conscience. Mettez toujours un adversaire dans la lumière la plus favorable possible ; il est inutile d’être un adversaire si votre cause ne peut pas le supporter. Pourquoi faudrait-il rabaisser l’autre ? Pourquoi tenir des pensées exagérées et non charitables ? Ce n’est pas un manque de bonté ni d’humilité, mais c’est au contraire un amour réel (l’amour pour Dieu et pour ses enfants), que d’établir en toute clarté la vérité divine ruinée par le Ritualisme dans son ignorance de la nature de Dieu et de sa propre opposition contre Dieu.

 

12                  Le Ritualisme est bâti seulement sur l’incarnation

Quant à la doctrine du Ritualisme je ne vais pas dire un mot sur ses excès dans la forme ou dans la pratique ; je refuse de m’arrêter sur ce qu’on peut appeler les abus d’adeptes peu éclairés. Je ne m’appesantirai pas sur les jeunes gens et les jeunes femmes étourdis, ni sur leurs aînés plus coupables. Tournons-nous vers les plus graves et les plus sages parmi ses meneurs. Or voici le principe essentiel du Ritualisme tel qu’affirmé par les plus compétents, et placé sous l’éclairage le plus favorable : il ne méconnaît pas que Jésus est une personne divine ; bien loin de nier que le Fils de Dieu a été un homme dans le monde, il base sa position sur la grande vérité de l’incarnation — une vérité que je considère comme étant l’une des plus précieuses et des plus essentielles au christianisme. L’incarnation ne signifie pas seulement Dieu dans le monde, mais qu’une personne divine a pris l’humanité dans Sa personne. C’est l’union de Dieu et de l’homme dans la même personne. Le Ritualisme est un système imaginatif, construit sur la vérité de l’incarnation. Il maintient que, quand Jésus le Fils de Dieu était dans ce monde, Il a fait descendre toutes les bénédictions nécessaires (puissance, bonté, amour, vérité) pour influer sur les âmes et les corps des hommes. Il soutient que le seul moyen pour l’homme de recevoir la bénédiction est d’entrer en contact avec Son humanité. Mais alors, voilà qu’Il est mort sur la croix et qu’Il est parti. Le Ritualisme passe toujours légèrement sur le tombeau de Christ, ne s’y arrêtant que rarement, sauf pour en faire une arme pour gérer les affections, ou pour montrer le déploiement de l’amour divin. C’est ce que font les plus faux des systèmes, comme le socinianisme. C’est ainsi que les Jésuites étaient toujours de fameux prédicateurs de la croix, avec de chauds appels pour craindre ou pour ressentir.

On ne peut pas dire du Ritualisme qu’il dépasse ce stade, même en tenant compte de ceux qui peuvent être de vrais croyants. Car je souhaite le mettre dans la lumière dans laquelle ils voudraient eux-mêmes qu’il soit mis. Ils soutiennent que, une fois que notre Seigneur Jésus a quitté ce monde, l’église a été le système divin dans lequel les bienfaits de l’incarnation de Christ devaient être perpétués pour l’homme sur la terre ; en conséquence, c’est ce que l’église a réalisé par ses officiels ou son clergé. Nous savons tous que le Ritualisme est une croyance commune du jour actuel, bien que ses sources soient bien sûr antérieures. Ils soutiennent que par certaines personnes, dans une ligne ininterrompue depuis les apôtres en tant que compagnons personnels du Seigneur Jésus incarné ici-bas, les bienfaits de Son incarnation sont maintenus dans un certain canal, et qu’ils sont assurés par des signes ou sceaux extérieurs, qui sont les moyens adéquats de communiquer les bienfaits de l’incarnation à ceux qui s’y soumettent. Voilà le système. Ils soutiennent en conséquence que quiconque met cela en cause, doit nécessairement être un rationaliste, et que c’est là la différence entre un orthodoxe et un non orthodoxe.

 

13                  La mort expiatoire de Christ négligée ou sous estimée

Mais en fait ce sont les ritualistes eux-mêmes qui, sans intention d’être non orthodoxes, sont en réalité tout à fait opposés à la vérité de l’évangile selon la Parole de Dieu, leur système étant incompatible avec ce que Dieu a révélé. Car on observe que, d’après ce qu’ils développent eux-mêmes, leur principe néglige le péché, met de côté son jugement et ignore la rédemption. D’après sa propre théorie, c’est une simple continuation de ce qui était avant que le Seigneur Jésus ait souffert à la croix. Le Fils était véritablement incarné autant avant Sa mort qu’après. Son sacrifice, sa mort, sa résurrection sont entièrement distincts de l’incarnation, bien qu’ils fussent impossibles sans elle. On accepte franchement et de bon cœur que l’incarnation ne nous a pas seulement donné la personne du Fils de Dieu, mais aussi la condition d’humanité dans laquelle Il a pu accomplir la rédemption. Aussi longtemps qu’Il restait simplement divin, il ne pouvait pas y avoir de lien avec l’homme ; mais quand Il est devenu homme, il n’y a pas de doute que, selon la volonté et les voies bénies de Dieu, il y avait l’état de la personne qui devait mourir en expiation. Quand Il était simplement incarné, cette mort expiatoire n’avait pas encore eu lieu.

Observez aussi la cohérence du système en rapport avec l’idée qu’il a d’une sacrificature (ou : prêtrise) terrestre, et des ordonnances de sacrement comme seuls moyens de salut — car c’est là leur doctrine. Quand notre Seigneur Jésus était ici-bas, quand Lui le Fils est devenu incarné avant Sa mort et Sa résurrection, Il a soigneusement reconnu la sacrificature (ou : prêtrise), selon la loi, — une sacrificature à la charge d’Aaron et ses fils, et qui ne Lui appartenait pas. De même qu’il respectait la sacrificature juive, ainsi Il maintenait toutes les ombres de la loi. Autrement dit, Il a appuyé de tout son poids divin le soutien du système rituel, jusqu’à ce que la croix y mette fin. Le temps n’était pas encore venu pour que la grâce de Dieu et la gloire de Dieu le remplacent. Il aurait été contraire à la pensée de Dieu de le renverser alors, et le Seigneur Jésus était l’expression de Dieu et de ses voies à la fois en paroles et en actes et dans Sa personne. En conséquence, aussi longtemps que le Seigneur était sur la terre nous avons vu qu’Il adhérait au temple, aux fêtes, aux sacrifices et à tout le reste. Et selon ce que nous trouvons en Luc 2, c’est dès le début qu’il en a été ainsi dans le cas de sa propre personne. Le Seigneur a observé les temps et les saisons, et a pleinement reconnu le système terrestre des rites que Dieu avait introduit par Moïse.

 

14                  Le déchirement du voile

Mais dès l’instant où Christ est mort sur la croix, tout le système a en principe disparu devant Dieu : il était mort. La mort de Christ a mis une sentence de mort sur le système des rites ; elle a fait infiniment plus que cela, mais cela elle l’a fait. Alors comme nous l’avons vu, le voile a été déchiré ; et cela n’a pas eu lieu par l’homme, ni par accident ; c’est Dieu qui l’a déchiré. Comment le Ritualisme peut-il subsister avec un voile déchiré ? Comment peut-il demeurer pour ceux qui ont reçu le Seigneur Jésus, et qui ont reçu par Son sang le droit d’aller directement dans la présence de Dieu ?

Quel témoignage merveilleux de cette vérité est rendu dans le brigand converti mort au côté du Seigneur : « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis ». Quelle preuve sans équivoque qu’il ne s’agissait pas d’une simple théorie, mais au contraire que c’était tout à fait pratique, ce qui est le cas de toute la vérité ! En fait, c’était à la fois pour les âmes des hommes et pour la gloire de Dieu, à la fois pour les besoins présents et la bénédiction éternelle. En conséquence donc, le brigand converti proclame la fausseté du système ritualiste.

 

15                  Le docteur Newman et le brigand converti

Le Dr. J.H.Newman était le meneur principal du mouvement ritualiste d’Oxford. Il se joignit ensuite à l’église de Rome en 1845 et devint cardinal de 1879 à 1890.

 

Je suis conscient que les ritualistes répondraient autrement, et je me rappelle comment il a été utilisé par l’un de leur chef, — un homme qui, il est vrai, n’était déjà plus dans les rangs protestants du Ritualisme, mais dans ceux de Rome, la demeure naturelle et l’aboutissement inévitable de tout ce Ritualisme. C’était dans un sermon censé agir sur ses anciens compagnons, et son commentaire a été à peu près le suivant : « C’est sans l’église et sans sacrements, sans prêtre et sans confession, que, d’un coup par la foi, le brigand mourant a reçu le Sauveur et est allé au ciel ». Beaucoup vont dire : « Quelle doctrine admirable » ! D’autres ajouteront : « Combien les extrêmes se rassemblent, pensez un peu au docteur Newman en train de prêcher la doctrine de Plymouth », c’est-à-dire la grâce pleine et gratuite de Dieu dans l’évangile ! — Mais ce n’était pas le cas, c’était mauvais de la racine jusqu’aux branches ; je vais vous expliquer pourquoi. Ce qu’il enseignait était que la force de la foi du brigand converti était si grande et si précieuse aux yeux de Dieu, qu’en conséquence de l’absence inévitable de l’église et du canal de ses sacrements, il plut à Dieu d’honorer la foi de cet homme au point de lui donner cette grande indulgence. Or j’affirme que ceci est la négation de l’évangile : personne qui comprend l’évangile ne pourrait enseigner ainsi. C’est une erreur vitale, qui laisse réellement de côté Christ et Son œuvre, et qui exalte au maximum ce qui est dans l’homme.

Que personne ne s’en aille avec la pensée que je suis en train de me prononcer sur l’auteur lui- même de ce discours : je cherche seulement à comparer sa doctrine avec la vérité de l’évangile ; je rejette ce qui s’oppose à l’évangile, mais je ne dis rien sur la condition personnelle de celui qui a tenu ces propos et au sujet duquel je ne sais rien. Il est mieux de ne pas parler de ce que nous ne connaissons pas ; mais en tant que serviteur du Seigneur Jésus, je parle de ce que Lui a enseigné et prêché, et je sais qu’il est faux de dire que Dieu a vu une valeur si méritoire (car telle est la doctrine dont il s’agit) dans la foi du brigand, vu les circonstances, que cela a contrebalancé le manque d’église, de prêtre et de sacrements. Toutes ces pensées sont simplement l’imagination religieuse sans le moindre support venant de la Parole de Dieu. Elles ne sont ni la pensée ni le langage de la foi.

Non, ce que le brigand converti montre en réalité, c’est la valeur de Christ et de Son sang, et l’efficacité présente, immédiate et éternelle pour l’âme la plus coupable (mais qui se repent maintenant) de ce que Jésus a opéré pour les pécheurs sur la croix. Là le péché a été jugé, là la grâce de Dieu a été montrée au plus haut degré. Voilà une âme qui a reçu cette grâce en toute simplicité malgré tous les obstacles possibles ; mais il n’y a pas la moindre pensée de quoi que ce soit chez elle qui puisse être une offrande à Dieu, — il n’y a pas la moindre idée de présenter, pour ainsi dire, sa foi à Dieu, ni de Dieu qui l’accepterait comme ayant une valeur tellement remarquable à ses yeux au point qu’Il pouvait et voulait dispenser cette âme de ce qui, sur un plan strict, était nécessaire à son salut. Il n’y a rien de cela. Le brigand avait ce qu’il fallait ; il avait ce qui seul peut suffire pour un pécheur vis-à-vis de Dieu. Je ne nie pas un instant la place de l’église, car je dois vous dire que je suis un homme d’église, un homme de la Haute église si vous voulez, — et que, considérant l’église soit comme le corps de Christ, soit comme la maison de Dieu, j’ai les convictions les plus fortes de ce qui est vrai et obligatoire pour le chrétien à son égard.

 

16                  Tout chrétien est un homme d’église

Ne supposez pas que je joue sur le mot église ; car je la tiens pour être la place où tout chrétien doit être, dans le sens le plus vrai et le plus complet, un homme d’église. Il ne faut pas se contenter d’être chrétien et de ne pas être homme d’église ; d’ailleurs ce n’est pas la même chose. Je n’admire pas le subterfuge de Saint Augustin d’une église invisible. Je ne désire pas offenser mes amis dissidents [des églises nationales] qui sont présents, mais je suis entièrement convaincu qu’ils ont tort, et que la plupart des évangéliques ne sont guère meilleurs, voire pas du tout meilleurs. C’est-à-dire que je suis convaincu depuis de nombreuses années que ces sociétés, ou compagnies volontaires, sont une négation pratique de l’église de Dieu. C’est pourquoi, sur le plan du principe, mais pas du tout dans l’application, je rejoins tout à fait le docteur Newman, ou le docteur Pusey, bien que je déteste le fait d’embrasser Babylone, qui a séduit le premier et probablement le second. Je ne considère pas la femme qui siège sur les sept collines comme étant l’église de Dieu, mais au contraire comme une contrefaçon manifeste, comme la source principale et centrale de tous les courants ténébreux et troubles du Ritualisme, car elle est aussi assise sur « plusieurs eaux ».

Avant d’en venir à la question de l’église, je maintiens qu’un homme est entièrement testé par la vérité en Christ ; et ceci est d’une importance vitale de toutes les manières possibles. Ce n’est pas l’église en premier, puis Christ ; mais Christ en premier, l’église étant simplement le complément, même si elle est de toute importance. Et je suis sûr que si un homme tient simplement, mais intelligemment, à Christ, il ne sera guère disposé ni vis-à-vis du romanisme catholique ni vis-à-vis des dissidents [des églises nationales]. Il sera content avec l’église de Dieu, comme Dieu la présente dans sa Parole, et comme Dieu la fait prospérer, en dépit de toute la ruine extérieure ; voilà ce que j’entends par être un homme d’église. Je répète que je ne l’entends pas simplement d’une manière invisible, ce qui est totalement contraire à l’Écriture. Avant que l’église commence, il y avait une invisibilité des saints, sauf individuellement ; mais l’objet même de l’église ici-bas est d’être un témoin visible, même si elle ne sera parfaite que dans la gloire, et qu’elle aura failli comme tout le reste. En même temps je maintiens qu’il y a la réalité de l’église de Dieu sur la terre, comme « l’homme ruiné » suppose qu’il y ait un homme, malgré un état misérable à tous égards.

Or ce qui fait ressortir l’importance de ceci, c’est que la vérité de l’évangile a à faire avec l’âme, avec l’homme en tant que pécheur entièrement coupable ; mais elle montre aussi comment Dieu agit dans sa grâce envers le mal qui est en lui, ôtant ce péché de manière juste, c’est-à-dire en maintenant Son propre caractère. C’est sur ce point que le Ritualisme est tellement offensant, et est radicalement hostile à la vérité de Dieu. Si vous substituez l’incarnation à l’expiation ou à la rédemption, vous mettez de côté le jugement du péché ; vous faites que l’expiation n’est qu’un simple accident, au mieux un moyen de parfaire le poids de l’incarnation ; vous ignorez ainsi la seule place qui lui revient. Tandis que la vérité de l’évangile est fondée sur un Christ non seulement incarné, mais sur un Christ qui est mort à la fois pour dépouiller le « vieil homme » avec tout le mal qui le caractérise et pour commencer une nouvelle création — un Christ qui est entré dans une nouvelle position tout à fait réelle, non pas la scène de ruine du péché et de l’homme déchu. Car Celui qui était Dieu aussi bien qu’homme, Celui qui n’était pas dans une condition déchue, mais qui, en tant qu’homme était « la sainte chose » (Luc 1:35), Lui s’est abaissé à la croix sous toutes les conséquences de la chute, et Il a achevé là la victoire parfaite. Maintenant le Saint Esprit est envoyé et descendu du ciel pour proclamer les résultats immédiats et présents de cette victoire à toute âme qui croit. Voilà l’évangile.

 

17                  La justice d’après l’épître aux Romains

Dans les déclarations précédentes, je me suis référé aux faits des évangiles ; mais si nous prenons l’épître aux Romains, c’est la même chose. On n’y trouve pas l’incarnation seulement, mais Christ qui est mort, et Christ qui est ressuscité, et le chrétien qui acquiert une place correspondante. Ce n’est donc pas plus le vague du Ritualisme que les ténèbres du Rationalisme, — tous les deux froids et sans consolation ; mais ce qui est réellement présenté, c’est que Dieu a justement et pleinement fait ressortir tout le mal, afin de l’ôter. Christ a ôté le péché par le sacrifice de Lui-même (Héb. 9:26). En conséquence maintenant, il n’y a pas seulement la grâce. Je suis d’accord que la venue de Christ sur la terre a été une grâce extrêmement riche ! mais il y a plus encore que la grâce maintenant : la mort de Christ a posé le fondement de la justice. Ce n’est pas seulement que Christ a été Le Juste ; Il était juste en toute chose ici-bas ; mais maintenant la chose merveilleuse est, comme l’évangile le montre, qu’il y a la justice pour justifier celui qui croit, c’est-à-dire l’impie (Rom. 4:5). Il montre que Dieu est maintenant juste en faveur de celui qui a reçu Jésus, quand Il le considère comme étant sans faute et sans tache à Ses yeux. En ce jour-là le brigand converti a été rendu propre pour le ciel, et c’est pareillement le cas de toute âme qui croit l’évangile. Par un Christ souffrant (1 Pierre 3:18) nous sommes amenés à Dieu, amenés en grâce et en puissance par la foi. Nous Le connaissons ainsi, ayant, dans l’évangile, appris Son amour lorsque nous étions dans le plus grand besoin.

Mais il y a encore davantage. Nous avons aussi été amenés dans une nouvelle relation. Beaucoup croient en Christ, sans être du tout sûrs que Dieu leur a pardonné les péchés. Je voudrais pour Dieu que tout chrétien, qu’il soit dissident, anglican ou autre, — je voudrais pour Dieu que toute personne qui a reçu le nom de Jésus se tienne « pleine de rémission de péchés » selon l’expression de Luther. Il disait que l’église était pleine de rémission de péchés. Je voudrais pour Dieu que tout individu soit réellement tel, qu’il ait un sentiment simple, complet, heureux et constant d’être pardonné.

Je ne veux pas dire, par ceci, qu’un homme ne doit avoir ni tristesse ni honte s’il s’est laissé allé à déshonorer le Seigneur. Par un tel pardon plénier, je n’entends pas que, si un homme tombe dans un mal, il doit passer légèrement dessus parce qu’il est entièrement pardonné. Qui enseigne une pareille doctrine ? Mais je maintiens que ce que Dieu lui a donné par l’évangile n’est pas perdu par sa folie ; et ce n’est pas perdu parce qu’il est pardonné aux yeux de Dieu. Il est appelé à s’humilier et à confesser au Seigneur ; il peut aller à Dieu à ce sujet, parce qu’il a un grand souverain sacrificateur (ou : prêtre). C’est ici que la souveraine sacrificature (ou : prêtrise) de Christ intervient. Il ne s’agit pas d’aller à Christ, et encore moins à un homme sur la terre, mais d’aller à Dieu par Christ ; et la raison en est que Dieu dans l’évangile a maintenant démontré Sa parfaite grâce et Son parfait salut en donnant tout gratuitement à mon âme. En conséquence, comme c’est contre Dieu que j’ai péché, je me sers de ce Sauveur, et j’ai le droit de m’en servir comme mon souverain sacrificateur (ou : prêtre), pour aller à Dieu et reconnaître mon péché, pour le dévoiler franchement et pleinement devant Dieu, avec la certitude que Sa grâce restaurera mon âme, et elle le fait.

Mais ceci suppose que le croyant est dans une relation établie. Il est dans la relation d’enfant de Dieu ; et plus que cela, il est membre du corps de Christ. Il faut peut-être que je vous mette en garde contre la grande erreur consistant à supposer que cette appartenance au corps de Christ est simplement une question de foi. Il faut autre chose en plus de la foi ; et la somme de cela, c’est que sur la base de votre foi, vous recevez le Saint Esprit, qui vous baptise dans le seul corps (Actes 1:5, 11 et 1 Cor. 12:13).

Ainsi on peut voir que la position du chrétien est une relation vivante à la fois individuellement et comme corps. Vous comprendrez par conséquent pourquoi j’ai parlé de la difficulté de concevoir qu’un chrétien intelligent ne soit pas un solide homme d’église dans le vrai sens du terme. En bref, il n’est pas simplement un individu. Voici ce qu’il est : il est avant tout un individu amené à Dieu ; mais alors il partage la bénédiction infinie d’être membre du corps de Christ, et ceci déjà maintenant sur la terre. Voilà ce que j’entends par être un homme d’église. Voilà l’église comme elle a été connue aux premiers jours ; pourquoi en serait-il autrement maintenant ? Pourquoi se contenter d’autre chose maintenant ? À quoi attribuons-nous de la valeur ? Est-ce à ce qui vient de Dieu, ou à ce qui vient de l’homme ? C’est là la question.

 

18                  Abandon des privilèges chrétiens

Tout au long de toutes les épîtres, en commençant par les Romains, nous trouvons la grande vérité que la position du chrétien est par la mort et la résurrection de Christ, non pas simplement par Son incarnation. Ainsi deux principes sont maintenus : le premier est que Dieu est glorifié par le Seigneur Jésus quant à tout ce qui pourrait nous nuire ; le second est que le croyant est justifié du péché, aussi bien que de ses péchés. Quand on met l’incarnation à la place de l’évangile, elle vous ramène en arrière, là où l’œuvre avait besoin d’être faite ; vous attendez ce que vous n’avez pas. Voilà l’état dans lequel le Ritualisme vous laisse ; en conséquence, vous avez besoin d’aller tirer parti des ordonnances religieuses. Que sont-elles ? Des promesses. Ce serait présomptueux selon le Ritualisme qu’un homme sache que ses péchés sont pardonnés ; ce serait présomptueux pour quelqu’un de dire qu’il est un enfant de Dieu ; ce serait présomptueux de prendre avec certitude la place de membre du corps de Christ, sauf dans le sens vague de tout homme de ce monde qui se comporte décemment et va à l’église. Maintenant dans l’Écriture tout est réel, et non seulement réel, mais donné à connaître ; les choses sont communiquées en puissance à nos âmes, parce que toute notre action doit être fondée sur une relation connue. C’est pourquoi vous devez connaître ces choses par vous-mêmes.

Le doute systématique a un effet ruineux. Il n’est pas étonnant que, là où l’incarnation prend la place de la rédemption de Christ, il y a des doutes qui ne sont pas ôtés. Le Ritualisme enlève tout ce que le christianisme a révélé comme étant venu, et il établit un voile qui laisse l’homme en dehors de la présence de Dieu. Tant qu’il y avait un voile, Dieu demeurait dans d’épaisses ténèbres et l’homme était de l’autre côté, du mauvais côté ; tandis que l’essence du christianisme, c’est que Dieu, à la fois est descendu vers moi, et m’a amené jusqu’à Lui tandis que je suis dans ce monde. Sans doute c’est une question de foi, mais ceci n’en amoindrit pas la réalité. En effet, les faits de la foi ont une substance en eux-mêmes qui va bien au-delà des faits connus par les sens. Les deux sont réels, mais les faits des sens disparaissent, tandis que les faits de la foi ne disparaîtront jamais. Vous êtes introduits dans une réalité éternelle quand vous êtes mis en contact avec le monde de la foi ; or vous y êtes introduits déjà maintenant.

Voilà le christianisme. Vous n’attendez pas d’arriver au ciel pour être céleste. Cela fait partie de la nouvelle relation. Encore une fois vous êtes morts avec Christ, non pas simplement en train de mourir. Le Ritualiste essaye de mourir. Il s’efforce (pauvre homme !) de mettre à mort ce vieil homme qui ne veut pas mourir. Il est toujours en train de mettre à mort, mais le vieil homme n’est jamais tué ; ce n’est pas étonnant. Le fait est qu’il n’y a pas de puissance, si ce n’est celle de Dieu, qui puisse terminer cette affaire ; et c’est Dieu qui l’a opéré à la croix de Christ. Le croyant, le chrétien qui comprend l’évangile, débute avec cette précieuse vérité.

 

19                  Ritualisme et baptême

Ceci montre la place où sont mises les institutions du christianisme. J’espère que personne ne prend à la légère le baptême ni la cène du Seigneur ; mais j’ose dire que beaucoup de gens ici ne comprennent guère leur importance réelle. Je ne cherche pas à entrer dans des questions discutables, mais je veux établir la certitude de la vérité de Dieu. Il est notoire que le baptême est utilisé par les ritualistes comme un moyen pour obtenir la vie. C’est ce qu’ils entendent quand ils parlent de la « régénération baptismale » : ils entendent qu’une personne est amenée à la vie par cet acte dûment administré par quelqu’un faisant partie de la succession apostolique. Je ne déforme pas les choses malicieusement, ni n’exagère en aucune manière. Ils le diraient eux-mêmes en des termes encore plus forts, si c’était possible. Cependant notez comment tout le système périt quand il est placé devant la Parole divine.

En premier lieu, selon l’Écriture, le baptême n’est jamais le signe de donner la vie, mais le signe de donner la mort. C’est le signe d’avoir part avec Christ dans Sa mort. Il n’est jamais présenté comme un moyen de vivification. Ceux qui disent cela ont entièrement tort dans les principes mêmes du christianisme. La mort est ce qui nous manque, et non pas simplement la vie. Il y a toujours eu auparavant le don de la vie dans le sens de vivification. Supposez-vous qu’avant la venue du Seigneur Jésus dans ce monde, personne n’avait été vivifié ? Soyons certains que non ; qui peut en douter ? Or cela avait lieu avant qu’on n’ait jamais entendu parler du baptême. Supposez-vous qu’Abraham, Isaac et Jacob n’ont pas reçu la vivification de la part du Fils de Dieu autant que vous et moi ? Mais ils n’étaient pas baptisés pour autant ; et je ne vais pas abandonner mon baptême, ni ce que dit l’Écriture sur la signification du baptême. Je ne vais pas écouter des gens qui me disent que c’est le moyen de la nouvelle naissance, ou qu’il en est seulement le signe. Je maintiens que c’est un signe extérieur d’une vérité extrêmement bénie, spécifique au christianisme ; et cette vérité est non pas une vivification (qui n’est pas particulière au christianisme, mais commune à tous les saints depuis le commencement), mais que je suis mort avec Christ, ce qui n’avait jamais pu être dit tant que Christ n’était pas mort. En conséquence le chrétien débute avec ceci comme la grande vérité sur la base de laquelle il est appelé à agir, — non pas en essayant de mourir comme un moine ou une nonne qui s’efforcent de tuer le « vieil homme », mais en croyant et agissant sur la base de la foi que Dieu a mis à mort ce vieil homme, et que nous sommes crucifiés avec Christ et que néanmoins nous vivons, et que Dieu en a fini avec ce vieil homme par le jugement divin sur la croix de Christ, et qu’en recevant Christ j’ai toute cette bénédiction dès maintenant.

Assurément notre précieux Seigneur n’est pas mort pour Lui-même. L’Écriture n’évoque pas cette pensée, mais la pensée contraire. Il n’y avait pas de « vieil homme » en Christ : il faut être hérétique pour dire cela. La vérité de l’évangile est que Celui qui n’avait pas de péché, est mort pour nous qui n’avions rien d’autre, et qu’en conséquence de Son œuvre puissante, non seulement nous sommes vivifiés, mais nous sommes délivrés du péché par le fait que Lui en a porté le jugement. Il n’a pas laissé le « vieil homme » comme auparavant. C’était la condition des saints de l’Ancien Testament. Le vieil homme n’était pas disparu pour eux, tandis qu’il l’est pour nous. Je n’entends pas par ceci que nous sommes parfaits dans le sens qu’il n’y aurait plus rien de la chair en nous ; mais ce que l’Écriture montre, c’est que j’ai le droit, par la mort de Christ, de traiter mon « vieil homme » comme déjà jugé. J’ai le droit de tirer toute consolation, aussi complètement que si le vieil homme était effectivement disparu pour toujours. Il est disparu aux yeux de Dieu aussi véritablement qu’il le sera quand Christ viendra. À sa venue, nous aurons tous les résultats manifestés ; mais je les ai déjà maintenant pour ma foi, et je suis appelé à agir selon une telle position aux yeux de Dieu.

Il est instructif de voir que le Ritualisme, comme tous les autres systèmes humains, nie cela, tandis qu’après tout c’est l’un de ses grands sujets de vanterie que de donner au baptême une valeur plus complète qu’ordinairement. Vous trouverez invariablement que les gens qui se vantent de leur justesse ou de leur solidité au sujet du baptême sont, je crois, ceux qui se trompent à son sujet. Le mieux est de ne jamais se vanter de rien sauf de Christ. Vous serez toujours justes sur ce point ; mais dès l’instant où vous commencez à vous vanter de telle ou telle doctrine, je ne donne pas cher de votre doctrine. Si vous êtes contents de n’avoir que Christ pour vous vanter, Il sera avec vous et Il fera que votre doctrine soit bonne et correcte, non pas par le fait de vous exalter de ce que vous en avez la possession, mais par le fait de tenir simplement à Christ. Vous avez toute la vérité en Lui : veuille le Saint Esprit nous faire être de plus en plus vrais à Son égard !

Mais il y a plus que ceci. Je dis tout d’abord que le Ritualisme est faux dans sa théorie du baptême — dans le vrai sens de celui-ci ; mais, en outre, même comme système, il est tout à fait incohérent, parce que le principe est que ces bénédictions de l’incarnation sont reçues seulement par le canal désigné, ou par des ordonnances bien connues ; mais tout ritualiste accompli reconnaîtra tout de suite que le baptême chrétien est valide même s’il est administré par une femme, et bien sûr par un homme ordinaire. Ainsi ils soutiennent que tout chrétien est compétent pour baptiser en urgence, c’est-à-dire que le baptême est alors valide. Sans doute ils ne pensent pas que ce soit en ordre, mais néanmoins ils reconnaissent que le baptême est réel. Les catholiques romains tiennent cela. C’est la doctrine du catholicisme, quelle qu’en soit la forme. Les dissidents et la plupart des évangéliques n’acceptent pas cela, aussi étrange que cela paraisse ; mais tous ceux qui se disent catholiques, que ce soit de l’Est, de l’Ouest, du Nord ou du Sud, tous sont d’accord là-dessus. Or si c’était vrai, si le baptême était le moyen d’obtenir la vie, ce serait là la bénédiction la plus fondamentale du christianisme reçue, selon le Ritualisme, entièrement en dehors de la succession apostolique dûment administrée de la manière désignée. Ainsi même dans son fondement, cela ne tient pas ; car, comme d’habitude, Dieu prend soin qu’une chose qui est fausse soit incohérente. C’est une marque établie comme un panneau indicateur pour avertir les gens qu’il y a ici un danger et que la vérité est ailleurs. C’est comme un conte dont les éléments ne concordent pas. Les témoins ne s’accordent pas.

 

20                  Ritualisme et Cène

Prenez l’autre ordonnance, la Cène du Seigneur et le même résultat apparaît. Qu’est-ce que la Cène du Seigneur manifeste ? L’incarnation ? Pas du tout. La Cène du Seigneur montre que Celui qui a été incarné est mort. Mais cette institution du christianisme qui se répète toujours n’est pas individuelle, contrairement au baptême qui est strictement individuel, et qui à proprement parler est en dehors de l’église. À proprement parler, le baptême m’appartient en tant que chrétien. S’il n’y avait pas de système collectif comme l’église, je devrais quand même être baptisé comme chrétien ; mais la Cène du Seigneur n’a pas de place sinon dans l’église. Personne par conséquent n’a la liberté de prendre la Cène du Seigneur pour lui tout seul.

Selon l’intention de Christ ou selon son propre sens, la Cène du Seigneur ne peut être que sur le terrain(ou : base) de l’église de Dieu ; et on ne doit pas prendre part à ce pain ou à cette coupe sinon sur les fondements divins de l’église de Dieu selon sa Parole. Nous n’avons pas la liberté de renoncer ou d’altérer ; nous n’avons pas le droit d’introduire nos propres pensées ou des modifications sous quelque prétexte que ce soit. Ceci n’a rien à faire avec la question de savoir si l’église est dans un état de confusion. Je suis d’accord qu’elle l’est, mais c’est d’autant plus une raison pour nous en tenir à la vérité de Dieu, si nous la connaissons, — à cette Parole immuable que Dieu a donnée. Soyez pleins de grâce comme vous voulez vis-à-vis de ceux qui ne la comprennent pas ; mais soyez soigneux pour la gloire du Seigneur en tenant ferme la vérité. Acceptez des permissions pour d’autres, la grâce le ferait ; mais quant à vous, tenez ferme en toutes circonstances à ce que vous savez être la volonté du Seigneur Jésus.

Maintenant supposons que la masse des enfants de Dieu en un endroit donné se soit dispersée, les uns ici et les autres là, et qu’il ne reste que deux ou trois pour se rejoindre et prendre part à la Cène du Seigneur selon l’institution de Christ — quelle est la signification de la Cène ? N’est-ce pas là dans une mesure un témoignage au seul corps de Christ ? Ce serait très présomptueux pour les deux ou trois personnes de dire : « Nous sommes le corps de Christ ». Mais ce serait non moins présomptueux pour eux de prendre la Cène sur une autre base (ou : terrain) que celle du corps de Christ. S’ils ne sont pas sur ce terrain, la Cène devient un acte humain illégitime ; d’un autre côté, ils doivent tenir ferme à Son nom en tant que membres de Son corps, et simplement partager ce pain en Son nom. Telle est sa signification. C’est le souvenir de Lui, mais c’est l’annonce de Sa mort, non pas de Son incarnation.

Vous voyez à nouveau ici combien le système ritualiste est entièrement faux. En bref, c’est un retour volontaire, délibéré et systématique à ce qui existait avant la mort de Christ. C’est l’annulation de ce que Dieu a introduit depuis, et à quoi l’Esprit tient. L’incarnation est une étape vers la grande fin finale ; la fin c’est le jugement du péché, et l’établissement de la justice par la mort de Christ, mais manifestée en Celui qui est ressuscité d’entre les morts.

 

21                  Ritualisme et Christ ressuscité

Ceci m’amène à un autre point. Ma relation est avec Jésus ressuscité. Sans doute Il est descendu, et a pris part à la chair et au sang, mais pourquoi ? « Afin que par la mort Il rendit impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort » (Héb. 2:14). Ce n’était pas là simplement continuer les bienfaits de ce qu’Il faisait quand Il était vivant. Il a en effet attiré quand Il était vivant ; mais dans le fond, les disciples qui suivaient le Seigneur durant Sa vie étaient sur le même terrain que les saints de l’Ancien Testament, — seulement ils voyaient et entendaient davantage, mais c’était simplement que leurs yeux virent et que leurs oreilles entendirent Celui que les saints de l’Ancien Testament attendaient ; mais quand Sa mort et Sa résurrection eurent lieu et que le Saint Esprit eut été donné, tout changea, et le christianisme fut introduit ; alors revenir à ce qui était avant la mort et la résurrection de Christ et le don du Saint Esprit, c’est tendre à l’apostasie du christianisme, même si ce sont de vrais chrétiens qui sont pris dans ce piège.

Ceci est sûrement grave si c’est vrai. Permettez-moi de vous diriger brièvement vers quelques passages de l’Écriture. Prenez 1 Cor. 6:17 : « Celui qui est uni au Seigneur est un seul esprit [avec Lui] ». Il n’est pas question de se joindre au Seigneur dans la chair quand Il était ici-bas. Sans doute Il a pris la chair et le sang, mais ce n’est pas là le lien d’union. « Celui qui est uni au Seigneur est un seul esprit avec Lui ». Et encore, qui peut nier la doctrine formulée en 2 Cor. 5:15 : « Il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité » ? Et Paul ajoute : « Même si nous avons connu Christ selon la chair (c’est-à-dire lorsqu’Il était incarné, et que le système ritualiste était encore en vigueur), « toutefois maintenant nous ne le connaissons plus ainsi » (2 Cor. 5:16). Maintenant que Christ est mort et est ressuscité, et que le chrétien est amené en association avec Lui à la droite de Dieu, la gloire de notre nouvelle position, une gloire qui surpasse tout, éclipse complètement toute relation formée au temps où Il était ici-bas. Aussi longtemps que Christ était ici-bas, il ne pouvait pas y avoir d’union. On pouvait regarder à l’avance vers ce privilège excellent, mais il ne pouvait pas encore être donné en justice. Or maintenant ce privilège existe, et nous y sommes introduits dedans, d’où la connexion du Saint Esprit qui s’y rattache. Ce n’est pas simplement par la foi, mais par le Saint Esprit, ce qui est une vérité très importante en effet pour influer sur nos pensées. Notre lien avec Christ ici-bas, je le répète, n’est en rien moins que la présence du Saint Esprit envoyé du ciel, et agissant en nous individuellement et aussi comme corps de Christ.

J’ai fait référence à Galates 2:20 : « Je suis crucifié avec Christ » (non pas simplement incarné), et néanmoins je vis. Prenez encore Éphésiens 1:20-22, vous trouverez que Christ n’est devenu la tête de l’église qu’après être mort et être ressuscité et être monté au ciel. La doctrine des Éphésiens commence par présenter Christ mort, puis Il est vu ressuscité, puis assis à la droite de Dieu, et ce n’est qu’ainsi qu’Il devient la tête du corps.

Maintenant, ou bien nous appartenons à ce corps, ou bien nous ne sommes rien. Si nous sommes maintenant en association vivante avec Christ par le Saint Esprit, nous sommes du corps de Christ exalté à la droite de Dieu, et ce corps n’a pas d’existence tant qu’il n’y a pas de tête. C’est ainsi qu’en Colossiens 1:18, il est dit : « Lui qui est le commencement, le premier-né d’entre les morts ». Christ est alors le commencement. Quand Il était ici-bas, Il n’était pas le commencement ; Il allait l’être en tant que ressuscité. Lui seul devait être la tête de l’église, mais ceci exigeait que le péché soit ôté. Comment le Seigneur aurait-Il pu être uni à nous, tandis que nos péchés n’étaient pas effacés ? Et comment le Saint Esprit aurait-Il pu habiter en nous, quand le péché n’était pas jugé ? Nous voyons ainsi combien toute la vérité forme un tout qui se tient. Le péché est ôté, la justice est établie, l’union est formée par le Saint Esprit avec Christ ressuscité et glorifié à la droite de Dieu.

Voilà ce que je crois être la vérité du christianisme. L’évangile touche le mystère qui était caché dès les siècles et dès les générations (Col. 1:26). Est-il nécessaire de dire que c’est ce à quoi nous sommes appelés à témoigner ? Non pas l’église seulement ou principalement, mais par-dessus tout Christ que Dieu a donné comme tête sur toute chose à l’église (Éph 1:22). Voilà le corps auquel nous appartenons ; le Christ dont nous sommes membres.

Que le Seigneur nous accorde de tenir ferme cette vérité, afin de pouvoir y rendre témoignage ! C’est la meilleure des réponses au Ritualisme !