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NÉHÉMIE

 

par Philippe Tapernoux

 

 

Table des matières :

1     Chapitre 1 — Néhémie à la cour du roi

2     Chapitre 2    Nous nous lèverons et nous bâtirons

3     Chapitre 3 — La muraille

4     Chapitre 4 — L’Épée et la truelle

5     Chapitre 5    Le déclin et son remède

5.1      Chapitre 5 v. 1-13

5.2      Chapitre 5 v. 14-19

6     Chapitre 6 — Ennemis du dehors et ennemis du dedans

7     Chapitre 7 — L’ordre rétabli dans la maison de Dieu

7.1      Trois classes de personnes

7.1.1             Les portiers

7.1.2             Les chantres

7.1.3             Lévites

7.2      Habiter à Jérusalem

7.3      Généalogies

8     Chapitre 8:1-12 — La joie de l’Éternel est votre force

9     Chapitre 9    Confession et louange

9.1      Confession, humiliation, séparation du mal et louange

9.2      Souvenir de ce que Dieu a fait

9.3      Voies de Dieu en grâce et gouvernement

10     Chapitre 10 — Nous n’abandonnerons pas la maison de notre Dieu

11     Chapitre 11 — Ruine et relèvement

 

 

1                    Chapitre 1 — Néhémie à la cour du roi

ME 1925 p. 90, 112

 

En comparant Esdras 7:1-9 et Néhémie 1:2, nous apprenons que la mission de ces deux hommes de Dieu leur fut confiée sous le règne d’Artaxerxès, à treize ans d’intervalle. Esdras vivait encore lorsque Néhémie fut suscité et son nom est mentionné plus d’une fois dans ce livre mais Dieu donne maintenant la première place à un autre serviteur formé dans le pays de l’exil, dans l’œuvre à accomplir pour le rétablissement de son témoignage à Jérusalem.

Néhémie occupait à Suze, la capitale du royaume perse, un poste élevé et lucratif et jouissait de la confiance de son souverain, dont il était l’échanson (1:11). S’il n’avait pas été un homme de foi, il aurait facilement pu oublier son peuple et la terre de la promesse, mais, comme Moïse, il estimait «l’opprobre du Christ un plus grand trésor que les richesses de l’Égypte» (Héb. 11:26). Aussi, c’est auprès de lui que se rendent quelques hommes venus de Juda et qui, ayant à cœur les intérêts du peuple de Dieu, pouvaient s’entretenir avec lui de la misère et de la ruine dans lesquelles était tombé ce dernier. L’amour et la sollicitude pour ce pauvre Résidu, qui caractérisaient Néhémie, se montrent dans les questions qu’il adresse à ses visiteurs au sujet de ses frères remontés à Jérusalem, et par la douleur et l’humiliation profondes que lui causent les nouvelles qu’il en reçoit. Dans les temps les plus sombres, Dieu se conserve un témoignage, et ceux qui le craignent peuvent se parler «l’un à l’autre» (Mal. 3:16) et s’encourager mutuellement dans leur commune foi, ainsi que dans l’espérance de l’intervention de sa puissance pour mettre un terme à la souffrance et à la ruine de son peuple. C’est ainsi qu’aujourd’hui encore, ceux qui, dans la «grande maison», invoquent le Seigneur d’un cœur pur peuvent se retirer de l’iniquité et poursuivre ensemble «la justice, la foi, l’amour, la paix» (2 Tim. 2:19-22), dans l’attente de son prochain retour.

Comme nous l’avons dit, le fait que ces Juifs pieux viennent auprès de Néhémie pour l’entretenir des intérêts du peuple prouve qu’il était connu comme un homme de Dieu attaché à sa gloire, laquelle était liée à ce faible témoignage rendu à Jérusalem, le lieu choisi par lui pour y faire habiter son Nom, par ces quelques descendants de Juda remontés de la captivité de Babylone. Il s’intéressait du reste à tout le peuple, aussi bien à ceux qui n’avaient pas été emmenés en captivité, qu’à ceux qui en étaient revenus. Il ressemblait à l’apôtre Paul qui, des siècles plus tard, embrassait tous les saints dans sa sollicitude et ses prières (2 Cor. 11:28 ; Col. 1:24).

Néhémie apprend que les Juifs étaient «dans une grande misère et dans l’opprobre» (v. 3). Il y a deux genres d’opprobre très opposés dans la Parole : 1° l’opprobre de Christ (Héb. 11:26), c’est-à-dire le mépris des hommes pour son Nom, et qui rejaillit sur ceux qui le suivent fidèlement dans son rejet. Cet opprobre est un honneur et un privilège plus grands que les richesses de l’Égypte. C’est là ce qui fut la part du Témoin fidèle ici-bas : «Car, à cause de toi j’ai porté l’opprobre, la confusion a couvert mon visage» (Ps. 69:7, 20 ; 79:12 ; 80:50, 51 ; 1 Tim. 4:10 ; Hébr. 13:13).

2° Nous trouvons aussi, dans un tout autre sens, l’opprobre qui est le résultat de l’infidélité de ceux qui font profession d’appartenir au Seigneur et qui, par leur marche, déshonorent son Nom invoqué sur eux (Néh. 1:3 ; 2:17 ; 5:9 ; 6:13 ; Jér. 31:19 ; 1 Tim. 3:7). C’était par son alliance avec le monde que le peuple d’Israël était tombé dans le mépris. La muraille de Jérusalem, symbole et garantie de la séparation des nations, de la ville que Dieu avait choisie pour y faire habiter son Nom, avait été renversée (v. 3). Cette séparation n’ayant pas été maintenue, la sécurité que donnait la muraille avait disparu avec elle. Dieu avait permis aux nations de dévaster son héritage ; elles avaient profané son saint temple et «mis Jérusalem en monceaux de pierres» (Ps. 79:1). «Le sanglier de la forêt» avait déchiré le cep que Dieu avait transporté d’Égypte (Ps. 80:8-16). Les portes de la ville étaient aussi brûlées par le feu. Les portes étaient en Orient un lieu de rendez-vous pour le peuple, et c’est là que la justice était administrée (Ruth 3:11 ; 4:1). La séparation d’avec les nations ayant disparu, la justice n’était plus rendue en Juda, et l’entrée de la sainte ville était accessible aux ennemis du peuple de Dieu.

En contraste avec ce triste état de choses, remarquons que la nouvelle Jérusalem aura «une grande et haute muraille» (Apoc. 21:12), symbolisant sa séparation absolue pour Dieu de tout ce qui est contraire à sa sainteté, ainsi que la sécurité parfaite dont jouiront ses bienheureux habitants. De plus, elle aura «douze portes», exprimant la perfection de l’administration de la justice, dont elle sera le centre dans le règne millénaire, et qui rayonnera de ce glorieux foyer de lumière en bénédiction sur toute la terre.

Nous trouvons ensuite l’effet produit sur le cœur de Néhémie par ces tristes nouvelles. Comme un vrai homme de Dieu, il en mène deuil à cause du déshonneur qui rejaillit sur le nom de Celui auquel appartenait ce peuple et cette ville, par la ruine qui avait atteint l’un et l’autre. Il comprend que le nom de l’Éternel était identifié avec ce lieu où Il avait habité entre les chérubins du sanctuaire, et que sa désolation jetait ce Nom dans l’opprobre. Il doit en être de même pour nous lorsque nous considérons la ruine actuelle de l’Église. Les sentiments de douleur et d’humiliation dont son âme est remplie trouvent leur expression dans une ardente prière semblable à celles que nous trouvons dans les livres d’Esdras et de Daniel. L’amour de ces serviteurs de Dieu pour le peuple de son choix les poussait à intercéder pour lui, en confessant ses fautes comme étant les leurs, et en rappelant à Dieu ses promesses et le terrain sur lequel Il pouvait user de miséricorde envers cette nation misérable et déchue. C’était aussi le caractère de l’intercession de Moïse après le veau d’or, tandis qu’Élie, dans son découragement et son éloignement de l’Éternel, fait requête contre Israël (1 Rois 19:14 ; Rom. 11:2), allant ainsi à l’encontre des pensées de Dieu à l’égard de son peuple.

Aimons-nous l’Église, parce qu’elle est chère au cœur de Christ ? Prions-nous pour tous les saints ? Savons-nous nous identifier avec eux devant Dieu dans leurs fautes et leurs misères, en confessant celles-ci comme étant nôtres, parce que nous sommes unis ensemble comme membres d’un seul corps ?

Néhémie s’adresse au Dieu des cieux (v. 4). Ce nom exprime la position de distance qu’Il avait du prendre à l’égard de son peuple (et que reconnaissaient pleinement les serviteurs fidèles suscités dans ces mauvais jours), comme conséquence de son infidélité. Remarquons encore l’attitude d’humiliation, de douleur et de deuil que prend Néhémie à l’ouïe de la ruine de Jérusalem : «Je m’assis et je pleurai et je menai deuil plusieurs jours» (v. 4). Il s’assied pour méditer dans la solitude et le calme de la présence de Dieu ce sujet solennel et douloureux. Puis il élève son âme vers Celui qui a été le refuge des siens dans tous les âges et leur demeure «de génération en génération» (Ps. 90:1). «Dieu est notre refuge et notre force, un secours dans les détresses, toujours facile à trouver» (Ps. 46:1). Il s’adresse à lui selon les caractères révélés à Israël sous la loi comme «le Dieu grand et terrible», en justice et en jugement contre le mal. C’est ainsi que le faisait connaître cette loi que, dans sa folie, Israël avait promis d’accomplir, sans comprendre que les exigences de la sainteté divine qu’elle formulait étaient impossibles à satisfaire pour un peuple dans la chair rebelle et incapable d’aucun bien. Néhémie reconnaît que, du côté de Dieu, rien n’a manqué, car Il a été fidèle à son alliance avec Israël : Il garde «l’alliance et la bonté» envers ceux qui l’aiment et qui gardent ses commandements (v. 5). C’étaient là les termes de cette alliance que Dieu avait conclue avec son peuple. Hélas ! avant même que les tables de pierre sur lesquelles étaient gravés les commandements de l’Éternel eussent atteint le camp, Israël avait déjà fait un veau d’or et s’était prosterné devant lui (Ex. 32:1-6) ; ainsi, dès le commencement, la chute du peuple était complète et irrémédiable.

Néanmoins, Néhémie savait qu’il y a, dans le cœur de Dieu, des trésors de compassion et de longue patience : c’est à ces richesses de la miséricorde divine qu’il fait maintenant appel. Sa prière est une supplication instante, un modèle de requête intelligente, fondée sur les promesses de la Parole et avant pour objet la gloire de Dieu et la bénédiction du peuple qu’Il avait choisi et formé pour lui-même, et dont il avait dit : «Ils raconteront ma louange» (És. 43:21). Il fait appel à son amour immuable afin qu’Il daigne écouter sa supplication en faveur de ce peuple maintenant rebelle et déchu. C’est «jour et nuit» (v. 6) qu’il répandait ainsi son cœur devant Dieu pour ceux qui étaient les objets de sa sollicitude. En cela il se montrait un vrai serviteur du Seigneur, animé d’un ardent désir de glorifier Celui qui lui avait fait connaître ses pensées et qui aimait Israël, parce que celui-ci était cher au cœur de Dieu. Plus tard, nous voyons le grand apôtre des nations rempli des mêmes sentiments. Quoique envoyé au loin pour porter l’Évangile à ceux qui étaient sans Dieu et sans espérance dans le monde, il pouvait dire de ses frères selon la chair : «Le souhait de mon cœur et la supplication que j’adresse à Dieu, c’est qu’ils soient sauvés» (Rom. 10:1) ; et encore : «J’ai une grande tristesse et une douleur continuelle dans mon cœur ; car moi-même j’ai souhaité d’être par anathème séparé du Christ pour mes frères» (Rom. 9:1-3). Moïse avait déjà dit, en intercédant pour ce peuple coupable et menacé du jugement de Dieu : «Maintenant, si tu pardonnes leur péché..., sinon, efface-moi, je te prie, de ton livre que tu as écrit» (Ex. 32:32).

Néhémie connaissait le secret de la bénédiction, de la force et du progrès spirituel, à savoir un esprit de prière et d’intercession. Il est très rare que nos prières aient habituellement ce dernier caractère ; nous pensons plutôt à nos propres besoins qu’à ceux des autres. Imitons les grands serviteurs de Dieu dont la Parole nous raconte l’histoire, dans leur foi, leur amour pour ceux qui étaient les objets de la sollicitude divine, et avec lesquels ils s’identifiaient dans la confession de leurs fautes et dans leurs supplications pour eux. Aimons l’Assemblée qui est chère au cœur de Christ, comme l’apôtre Paul qui priait «nuit et jour» pour tous les saints (2 Cor. 11:28 ; Col. 2:1 ; 1:3, 9 ; Phil. 1:3 ; 2 Tim. 1:3) et rappelons-nous que c’est notre grand privilège d’intercéder pour eux tous et aussi «pour tous les hommes» (1 Tim. 2:1), «car cela est bon et agréable devant notre Dieu Sauveur qui veut que tous les hommes soient sauvés et viennent à la connaissance de la vérité» (v. 3, 4).

Remarquons que Néhémie ne restreignait pas ses pensées et ses affections au petit résidu de Juda auquel il appartenait, mais qu’il embrassait tout Israël dans ses requêtes. Il confesse «les péchés des fils d’Israël» et prie «jour et nuit pour les fils d’Israël» (v. 6). La foi éclairée par la Parole saisissait le propos de Dieu relativement aux douze tribus, comme l’avait fait Élie qui, dans un jour de ruine et d’apostasie, bâtissait un autel de «douze pierres, selon le nombre des tribus des «fils de Jacob, auquel vint la parole de l’Éternel, disant : Israël sera ton nom» (1 Rois 18:31). C’est aussi ce qu’avait compris le pieux roi Ézéchias qui offrait à l’Éternel des sacrifices «pour tout Israël» (2 Chron. 29:24). Il fut le premier roi de Juda qui, depuis la division du royaume, désirât voir tout le peuple purifié monter à Jérusalem pour y adorer l’Éternel. Plus tard, le résidu de Juda remonté de la captivité de Babylone offrit aussi des sacrifices «pour tout Israël, douze boucs, selon le nombre des tribus d’Israël» (Esdras 6:17). Imitons la foi de ces saints d’autrefois et n’oublions pas que la table du Seigneur embrasse tous les membres de son corps, qui doivent être les objets de notre sollicitude et de notre amour, de telle sorte que nous puissions aussi mener deuil sur la ruine de l’Église responsable, en confessant cette ruine, comme le faisait Néhémie à l’égard de son peuple, et chercher le bien et la prospérité spirituelle de tous ses saints. Il est relativement facile de se lamenter sur les misères qui abondent autour de nous, mais savons-nous prendre le fardeau de cette culpabilité devant Dieu, en disant, comme Néhémie : «Les péchés que nous avons commis contre toi ; moi aussi et la maison de mon père nous avons péché» (v. 6) ? Le péché est une offense à la majesté divine et une atteinte à sa gloire : «Contre toi, contre toi seul j’ai péché» disait David (Ps. 51:4). Souvent nous considérons le mal plutôt dans ses conséquences pour nous que dans son caractère propre en rapport avec la sainteté de Dieu. De plus, n’oublions pas que nous sommes solidaires les uns des autres, étant membres de Christ et membres les uns des autres : «Car de même que le corps est un et qu’il a plusieurs membres, mais que tous les membres du corps, quoiqu’ils soient plusieurs, sont un seul corps, ainsi aussi est le Christ» (1 Cor. 12:12). Cette union des membres du corps de Christ les uns avec les autres et avec la Tête par le Saint Esprit, est infiniment plus intime que ne l’était celle qui existait en Israël, et que réalisait, avec tant de puissance le pieux Néhémie, quoique exilé sur la terre étrangère, comme le faisaient aussi Esdras, Daniel et d’autres fidèles serviteurs de Dieu. Aussi, en considérant l’histoire de l’Église sur la terre, il nous convient de dire avec lui : «Nous avons très mal agi contre toi et nous n’avons pas gardé tes commandements» (v. 7).

Y avait-il encore quelque ressource sur laquelle la foi pût s’appuyer, quelque promesse qu’elle pût rappeler à Dieu, au milieu de ce naufrage complet de son peuple ? Oui, certes, la Parole contient de précieux encouragements pour ceux qui, se trouvant aux prises avec de telles circonstances s’adressent à Dieu avec un cœur humilié et contrit : «Car ainsi dit celui qui est haut élevé et exalté, qui habite l’éternité, et duquel le nom est le Saint : J’habite le lieu haut élevé et saint, et avec celui qui est abattu et d’un esprit contrit, pour revivifier l’esprit de ceux qui sont contrits, et pour revivifier le cœur de ceux qui sont abattus (És. 57:15). Nous voyons ici l’importance qu’il y a pour tous ceux qui s’intéressent au peuple de Dieu à être familiarisés avec la Parole, afin qu’étant formés et instruits par elle, nos demandes soient en accord avec la volonté révélée de Dieu. Ainsi nous serons assurés de l’exaucement de nos requêtes selon la promesse du Seigneur (Jean 15:7). Néhémie connaissait les avertissements et les promesses donnés par Moïse en Lév. 26, et sa requête nous paraît certainement empruntée à ce chapitre. L’Éternel avait dit : «Si alors (dans le pays de leurs ennemis) leur cœur incirconcis s’humilie et qu’alors ils acceptent la punition de leur iniquité, je me souviendrai de mon alliance avec Jacob», etc. (v. 41, 42). Le tableau que nous donne ce chapitre de l’histoire d’Israël, encore future à ce moment-là, de sa désobéissance et des châtiments qui devaient l’atteindre, puis des bénédictions que Dieu a encore en réserve pour lui, à la fin de sa carrière de rébellion et de souffrance, nous prouve que c’est sa grâce souveraine seule qui pourra accomplir ses merveilleux desseins à leur égard. C’est à cette grâce que Néhémie a recours. Il rappelle à Dieu ses promesses faites à Moïse, sans remonter à celles données à Abraham sans condition. Il convenait qu’il reconnût pleinement la responsabilité du peuple placé, à sa demande, sous la loi et qui avait complètement failli à l’obéissance due à Dieu selon les termes de l’alliance solennellement acceptée à Sinaï. En raison de l’intercession de Moïse après le veau d’or, le régime de la loi pure qui eût amené la destruction immédiate du peuple, avait été remplacé par un mélange de loi et de grâce caractérisé par la révélation du nom de l’Éternel «miséricordieux et faisant grâce, lent à la colère et grand en bonté et en vérité... qui ne tient nullement le coupable pour innocent» (Ex. 34:6, 7). La miséricorde unie à la sainteté et à la patience caractérisent dès lors les voies de Dieu envers son peuple. Ce n’est qu’à la croix que ces attributs divers qui constituent sa gloire ont trouvé leur pleine satisfaction. Dès lors le nom du Père nous a été pleinement révélé et, en vertu de la satisfaction infinie qu’a reçue la justice divine, nous entrons dans sa présence en pleine assurance de foi, sans conscience de péchés (Hébr. 10:19-22).

Néhémie demeure strictement attaché à la révélation des pensées de Dieu faite à Moïse et s’appuie sur la promesse, à laquelle nous avons déjà fait allusion, de la miséricorde que Dieu déploierait envers ceux qui, dans le pays de la captivité, se tourneraient vers lui avec un cœur repentant. Par la foi il place ce peuple devant Dieu sur le terrain de la rédemption, en vertu de laquelle ils ont été amenés dans une relation immuable avec lui-même : «Ils sont tes serviteurs et ton peuple, que tu as rachetés par ta grande puissance et ta main forte» (v. 10). Cette rédemption, ce prix payé pour leur délivrance de l’esclavage de l’Égypte, était le sang de l’agneau pascal, type d’une délivrance infiniment plus glorieuse effectuée «par le sang précieux de Christ, comme d’un Agneau sans défaut et sans tache» (1 Pierre 1:19). À cause de la valeur du sang de l’agneau pascal, Dieu avait délivré son peuple, par sa «grande puissance» et sa «main forte», de l’esclavage de l’Égypte et de la Mer Rouge, les amenant ainsi à lui-même ; c’est pourquoi nous lisons : «Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Égypte, et comment je vous ai portés sur des ailes d’aigle, et vous ai amenés à moi» (Ex. 18:4). En rappelant ainsi la merveilleuse histoire de son peuple, Néhémie arrivait dans sa prière jusqu’au cœur de Celui qui avait manifesté tant de grâce, de sagesse et de puissance envers cette nation coupable et indigne de sa bonté. C’était donc une requête intelligente, enseignée par l’Esprit et formée par la Parole. En se fondant sur les promesses de Dieu, aussi bien que sur son caractère, sur sa fidélité, sur son œuvre de rédemption et sur la relation qu’Il avait établie avec son peuple en vertu de cette œuvre, Néhémie se plaçait sur un terrain solide pour faire appel aux compassions divines. Il lui présente ensuite la requête spéciale qu’il avait à cœur de lui faire. Comme étant son serviteur, il désirait être employé au bien de son peuple et consacrer son temps, ses forces, sa vie tout entière à la reconstruction de la cité bien-aimée, sur laquelle les yeux de l’Éternel sont constamment arrêtés, et au rétablissement d’un ordre de choses qui réponde à ses pensées dans le pays promis. En cela il s’identifiait à d’autres serviteurs fidèles qui prenaient plaisir à craindre son nom et lui adressaient aussi leurs requêtes (v. 14). Dans les temps les plus sombres, il y a toujours des âmes pieuses qui se recherchent et se rencontrent dans une commune poursuite des intérêts du Seigneur. Puissions-nous faire partie de ce résidu fidèle au milieu de l’apostasie croissante de la chrétienté et poursuivre «la justice, la foi, l’amour, la paix avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur» (2 Tim. 2:49).

Néhémie implore la miséricorde de Dieu pour que le cœur du monarque soit incliné favorablement envers lui (v. 11). Il sentait profondément sa dépendance de Celui qui, dans son juste et saint gouvernement, avait placé son peuple sous la domination des nations, à cause de sa chute et de sa rébellion obstinée. Son livre commence par la mention de la vingtième année du roi perse Artaxerxès qui rappelait douloureusement au peuple juif son assujettissement à la puissance Gentile à laquelle Dieu avait donné la suprématie sur les nations après la chute de Babylone : cette puissance était représentée par la poitrine et les bras d’argent dans la grande statue que vit le roi Nébucadnetsar, et dont nous trouvons la description et l’explication en Daniel 2. Mais, quel que fût l’abaissement du peuple de Dieu, et la grandeur du roi païen qui l’avait asservi, ce dernier n’était pour la foi de Néhémie qu’un homme (v. 11), faible et misérable devant Celui dont la gloire est infinie, dont «la domination est une domination éternelle, et dont le royaume est de génération en génération» (Dan. 4:34). Il se peut que Dieu investisse un souverain terrestre d’une autorité qui s’étende jusqu’aux extrémités de la terre habitée : il n’en demeure pas moins un pauvre mortel revêtu pour quelques années d’un pouvoir éphémère, et qui devra bien vite quitter la scène de ce monde pour rendre compte à Dieu de son activité sur la terre «L’homme qui est en honneur ne dure pas : il est semblable aux bêtes qui périssent» (Psaume 49:12). «Certainement l’homme se promène parmi ce qui n’a que l’apparence ; certainement il s’agite en vain ; il amasse des biens et il ne sait qui les recueillera» (Ps. 39:6).

Néhémie demande à Dieu de faire réussir sa démarche auprès du souverain. Il sait que «le cœur du roi dans la main de l’Éternel est des ruisseaux d’eau ; il l’incline à tout ce qui lui plaît» (Prov. 21:1). Combien est digne de notre attention la requête de cet homme de Dieu ! Il ne recherche pas pour lui-même des avantages quelconques. Il désire, au contraire, sacrifier son repos, son bien-être et peut-être sa vie pour se consacrer au bien de son peuple et au rétablissement du témoignage de Dieu à Jérusalem. Néhémie comprenait que la gloire divine était liée à l’état de ce peuple et du pays qui lui avait été donné en héritage et qu’il avait perdu par sa désobéissance. Combien nous avons à rechercher cet esprit de dévouement et d’abnégation dans le service du Seigneur. Demandons-lui qu’il produise en nous cet amour ardent pour ses intérêts et sa gloire que nous voyons briller chez tant de ses serviteurs dont le Saint Esprit nous raconte l’histoire, et dont l’exemple est propre à nous encourager dans ces jours de recherche de nos aises, d’égoïsme et d’indifférence. Considérons surtout notre parfait Modèle qui pouvait dire : «Le zèle de ta maison me dévore» (Ps. 69:9 ; Jean 2:17). Puissions-nous être étreints par son amour et, comme son cher apôtre, ne plus vivre pour nous-mêmes, mais pour Celui qui est mort et a été ressuscité pour nous (2 Cor. 5:14, 15). Si l’objet de nos requêtes est le même que celui de Néhémie, nous pourrons être assurés de leur exaucement. Tel fut le cas de sa requête, bien qu’il dût attendre patiemment le moment fixé par Dieu pour répondre à son désir. Rappelons-nous aussi cette parole de l’apôtre aux Philippiens : «Ne vous inquiétez de rien, mais, en toutes choses, exposez vos requêtes à Dieu par des prières et des supplications avec des actions de grâces ; et la paix de Dieu laquelle surpasse toute intelligence, gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus» (Phil. 4:6, 7).

 

2                    Chapitre 2    Nous nous lèverons et nous bâtirons

ME 1926 p. 235, 245, 283, 319

Néhémie avait présenté à Dieu une requête empreinte d’une humiliation profonde et d’un ardent désir d’être employé de sa part à la restauration de la sainte cité, dont les murailles étaient en ruine et les portes brûlées par le feu (Néh. 1). Il devait maintenant attendre patiemment l’exaucement de son instante prière. Celle-ci était agréable à Dieu, car elle avait pour objet le maintien de sa gloire et le relèvement de son témoignage, jeté dans la poussière par l’infidélité de son peuple. La réponse divine allait lui être accordée d’une manière conforme à la grâce qui a dit : «Crie vers moi et je te répondrai» (Jérémie 33:3). Toutefois, il était nécessaire que la foi du pieux exilé fût exercée. Il est important que nous nous souvenions de cette vérité, afin que nous ne perdions pas courage, lorsque nous ne recevons pas l’exaucement immédiat de nos requêtes. «C’est ici la confiance que nous avons en lui que si nous demandons quelque chose selon sa volonté, il nous écoute» (1 Jean 5:14). Il nous donne l’assurance formelle et bénie que, «les choses que nous lui avons demandées» , étant pour sa gloire et conformes à sa Parole, Il nous les donnera au temps convenable.

C’était au mois de kislev (novembre) que Néhémie avait demandé à Dieu d’incliner le cœur du monarque en sa faveur et ce fut au mois de nisan (mars) qu’il reçut la réponse. Remarquons que lorsque Dieu entre en scène, Il le fait souvent d’une manière si cachée que la foi seule peut discerner sa main. Un incident futile, en apparence, devient pour le Dieu des merveilles l’occasion d’accomplir ses desseins de miséricorde.

Néhémie paraît devant le roi pour accomplir son service habituel d’échanson, mais son cœur était occupé d’autres objets et son esprit affaissé sous le fardeau de la ruine de son peuple. Aussi ne pouvait-il participer à la joie du festin royal, entretenue par le vin et les mets de la table du monarque. Irrité de constater le contraste entre l’atmosphère de gaîté dans laquelle il se trouvait et la tristesse qui se lisait sur le visage de son échanson, le souverain lui en fait le reproche d’un ton mécontent qui remplit le cœur de Néhémie d’appréhension. Il était défendu, sous peine de mort, de paraître affligé en la présence des souverains perses, car, à leur jugement, cette présence devait apporter une joie constante à ceux qui avaient le privilège d’y être admis.

Effrayé de la remarque du roi qui, en vrai despote oriental, eût pu l’envoyer immédiatement au supplice, Néhémie conserve néanmoins sa présence d’esprit et reçoit du Dieu qu’il sert la réponse sage et ferme à faire à son maître (v. 3). La cause de sa douleur était l’état de ruine de la cité sainte, et il confesse hardiment au roi que ses affections étaient liées à cette ville détruite et à ce peuple méprisé et persécuté.

Le roi n’ignorait pas ce qui concernait Jérusalem et le peuple juif, puisque c’était lui qui, treize ans auparavant, avait accordé à Esdras la permission de se rendre en Judée pour s’intéresser au bien de sa nation (Esdras 7). Il dit à Néhémie : «Que demandes-tu ?» (v. 4). Avant de répondre, Néhémie élève son âme vers «le Dieu des cieux» (v. 4). Il sent le besoin de sa grâce et de sa sagesse pour rendre témoignage à Celui auquel il appartient, et dont le puissant roi perse dépendait aussi sans le savoir.

L’attitude de Néhémie est pleine d’instruction pour nous qui savons si peu répondre «avec douceur et crainte», à ceux qui nous demandent raison de l’espérance qui est en nous (1 Pierre 3:15). «Je priai le Dieu des cieux», dit Néhémie. Il reconnaît la distance qu’avait dû prendre Celui dont la gloire s’était retirée de son sanctuaire souillé par l’infidélité d’Israël.

Ayant acquis de la hardiesse par sa dépendance de Dieu, Néhémie demande au roi la permission de se rendre en Juda, «à la ville des sépulcres de ses pères», pour la bâtir. Dieu rendit favorable à son serviteur le monarque sous la domination duquel Il l’avait placé. La prière de la foi est assurée de son exaucement. Le roi accorda à son serviteur tout ce qu’il lui demandait et Néhémie attribue tout à l’intervention de Celui avec lequel il marchait : «selon que la bonne main de mon Dieu était sur moi» (v. 8). L’objet de sa mission était triple : 1° Il voulait rebâtir le château fort attenant au temple (peut-être la forteresse Antonia qui existait encore au temps des Romains) ; 2° rebâtir la muraille ; 3° se construire une maison (v. 8). Il comprenait l’importance de la muraille, symbole et garantie de la séparation de la sainte cité d’avec les nations environnantes, et dont la destruction était la cause de la misère dans laquelle elle était tombée.

Sans perdre de temps, Néhémie se mit en route, accompagnée d’une escorte armée que le roi lui avait fournie et arriva sain et sauf à Jérusalem (v. 9). Sa foi n’était pas à la hauteur de celle d’Esdras qui avait honte de demander au roi «des forces et de la cavalerie», car il lui avait dit : «La main de notre Dieu est en bien sur tous ceux qui le cherchent» (Esdras 8:22). Comment, après un tel témoignage de sa confiance en Celui qu’il servait, faire appel aux ressources humaines, comme si Dieu l’avait abandonné ? Aussi, ayant cherché dans la prière et le jeûne la délivrance de son Dieu, il fit l’expérience bénie de sa fidélité et de sa puissance, selon la mesure de sa foi. Ces différences se retrouvent dans tous les âges chez les témoins du Dieu vivant et ne diminuent en rien l’appréciation qu’Il fait du service de chacun d’eux. Néanmoins, la foi vivante d’un Esdras lui est particulièrement précieuse, comme le sont aussi le dévouement et l’énergie d’un Néhémie.

Nous voyons apparaître maintenant l’opposition acharnée de l’ennemi à l’œuvre de Dieu dans ce monde, et c’est l’un des traits les plus frappants de ce livre. Mais un trait consolant de ce récit, ce sont les ressources que la foi trouve en Dieu pour faire face à tous les pièges et à toute l’hostilité ouverte ou cachée de l’ennemi. Les instruments qu’il employait n’étaient pas les mêmes qu’au temps d’Esdras ; mais ils ne manquent pas dans un monde «qui gît dans le Méchant» (1 Jean 5:19). Au moment où Néhémie parut sur la scène du témoignage, il eut à faire face à la haine implacable des adversaires de Juda qui étaient «très mécontents de ce qu’un homme fût venu pour chercher le bien des fils d’Israël» (v. 10). Sanballat le Horonite (de Horonaïm, ville de Moab), Tobija l’Ammonite et Guéshem l’Arabe, mentionné au v. 19, étaient les principaux instruments de Satan dans la lutte engagée contre Néhémie. Un fait caractéristique, c’est que les trois nations auxquelles appartenaient ces ennemis du Résidu étaient apparentés selon la chair aux fils d’Israël, les deux premiers étant des descendants de Lot et le troisième d’Ismaël. Ils sont la figure de la chair religieuse, ayant des attaches extérieures avec le témoignage de Dieu par une certaine profession de piété, incapable de servir le Dieu vivant et remplie de haine contre ceux qui lui appartiennent. Les adversaires les plus redoutables du peuple de Dieu se recrutaient parmi ces nations voisines, et Satan s’en servait, soit pour lui faire ouvertement la guerre, soit pour le corrompre, en l’amenant à marcher dans le mal avec elles. C’est ainsi qu’à Baal-Péor, le jugement tomba sur Israël, parce qu’il s’était livré à la fornication avec les filles de Moab (Nomb. 25). Les Moabites et les Ammonites étaient exclus de la congrégation du peuple de Dieu jusqu’à la dixième génération (Deut. 23:3-6) ; aussi leur haine contre ce peuple était-elle sans bornes.

Ces trois hommes pervers sont irrités de l’arrivée d’un serviteur fidèle qui cherchait la gloire de Dieu, en rappelant à son peuple affaibli qu’il devait marcher dans une séparation absolue des nations dont l’Éternel l’avait mis à part pour être son trésor particulier. Jusqu’alors la muraille de la sainte cité était demeurée abattue et le pauvre Résidu s’était corrompu par son alliance avec le monde. L’ennemi ne demandait pas mieux qu’il en fût ainsi et que le mal s’aggravât toujours davantage parmi ceux qui portaient encore, malgré leur déchéance, le nom du vrai Dieu invoqué sur eux. Aussi sa fureur est-elle grande lorsqu’apparaît soudain sur la scène ce témoin des droits méconnus du Seigneur, qui va troubler la fausse paix dans laquelle se complaisait le peuple dégénéré. Comme à Élie, il aurait volontiers dit à Néhémie par ses agents : «N’est-ce pas toi qui troubles Israël ?» (1 Rois 18:17). Chaque fois qu’un homme de Dieu est suscité pour réveiller les âmes et secouer de leur torpeur, les croyants attachés au présent siècle, il est accusé d’être un fauteur de trouble. Il en a été de même, lorsque des serviteurs fidèles envoyés à l’Église pour lui rappeler, dans ces derniers jours, son appel céleste, appelèrent les croyants à sortir du monde et à porter l’opprobre de Christ, en attendant son retour ; ils furent accusés d’être des perturbateurs de la paix et des instruments de l’ennemi. Il est impossible de servir fidèlement le Seigneur ici-bas sans rencontrer l’hostilité du monde. L’opposition des ennemis de Néhémie se borne d’abord à l’expression de leur mécontentement de son arrivée à Jérusalem ; puis vient la moquerie (v. 19), ensuite nous trouvons le récit des divers moyens de ruse et de violence mis en œuvre pour arrêter le travail de ce vaillant ouvrier du Seigneur et de ceux qui avaient été réveillés par son moyen.

Arrivé à Jérusalem, Néhémie se rend immédiatement de nuit sur les lieux désolés qui occupaient son cœur (v. 11). Au lieu de prendre du repos, il se hâte d’inspecter cet amas de décombres, sans valeur pour un cœur étranger aux pensées de Dieu, mais d’un prix inestimable pour celui qui marchait par la foi et comprenait l’importance du témoignage confié autrefois à son peuple. Ce lieu désolé était celui que Dieu avait choisi pour sa demeure et qu’Il avait dû abandonner à cause de l’infidélité d’Israël.

Néhémie n’avait informé personne de ce que son Dieu lui avait mis au cœur de faire pour Jérusalem et aucun des chefs ne savait qu’il avait examiné minutieusement les lieux qui allaient être le théâtre de son activité pour Dieu et pour son peuple. Il y a, dans cette manière d’agir, une instruction importante pour tous ceux qui désirent être employés au service du Seigneur. Il est nécessaire d’avoir à faire avec Lui seul relativement à tout ce qui touche à ses intérêts et à sa gloire. Il est vrai, d’autre part, qu’un cœur humble ne sera jamais conduit dans un chemin d’indépendance et sera heureux de marcher dans la soumission au jugement de ceux qui, par leur expérience acquise aux pieds du Seigneur, peuvent lui enseigner sa pensée et sa volonté. Toutefois, il arrive fréquemment que, pour échapper à un exercice profond de cœur et de conscience quant à la marche qu’il doit suivre, un croyant consulte des amis et des frères qui peuvent le dissuader d’accomplir ce que le Seigneur plaçait devant lui. Il faut donc, en tout premier lieu, rechercher patiemment la présence de Celui auquel nous appartenons, comme le fit Néhémie dans le jeûne, l’humiliation et la prière. Si le serviteur s’engage à la légère dans une voie où la foi seule peut le maintenir et le faire triompher des obstacles, il retournera en arrière et déshonorera le Seigneur, en abandonnant le sentier de la dépendance, trop pénible pour un cœur partagé.

Si Néhémie avait soumis à d’autres ses intentions et ses projets, il est probable que, manquant de la foi et de l’énergie morales qui l’animaient, plusieurs auraient blâmé sa témérité et cherché à abattre son courage. Il marchait avec Dieu et cela le rendait indépendant des hommes, quoique, le moment venu, il apprécie et sollicite le concours de ses frères. Nous avons donc à veiller de ne pas heurter deux écueils opposés : d’une part, celui de l’indépendance à l’égard de nos frères, de l’autre, celui de la crainte des hommes qui tend un piège (Prov. 29:25) et nous empêche de faire la volonté du Seigneur clairement révélée à nos âmes. Mais la première nécessité pour nous est d’être enseignés de Dieu et d’avoir la certitude de son approbation ; on peut alors marcher de l’avant dans le chemin qu’Il nous trace, sans crainte des conséquences. La foi s’attache à sa Parole et compte sur la puissance et la fidélité de Dieu. En suivant une telle voie, il se peut qu’on ne soit pas toujours compris et approuvé, mais le Seigneur se charge de justifier ceux qui le craignent.

La visite que fait Néhémie aux ruines de Jérusalem confirme pleinement le récit qui lui avait été fait de la désolation et de la misère dans lesquelles était tombée la sainte cité. Pour un cœur fidèle et attaché à la gloire de Dieu, rien n’est plus douloureux que la ruine du témoignage auquel Il attache tant de prix, son Nom étant identifié avec ceux qui le portent. Savons-nous mener deuil ainsi sur la chute actuelle de l’Église et la confesser au Seigneur comme étant la conséquence de notre infidélité ? Dans ce cas, nous pourrons être employés par le Seigneur pour le bien des âmes au milieu de la confusion présente.

Cette inspection nocturne faite par Néhémie prouve aussi combien il marchait avec Dieu, car la pensée du danger qu’il pouvait courir ne semble pas même aborder son esprit. Il est absorbé tout entier dans sa douloureuse méditation, et il recherche auprès de Celui qu’il sert la force nécessaire pour entreprendre la grande œuvre de restauration qui était devant lui. Il ira ensuite réveiller le zèle de ses frères et les encourager à s’associer à lui dans ce travail. Il s’était identifié avec eux devant Dieu dans la confession de la ruine du peuple, car, dans sa prière, il avait supplié le Seigneur d’être attentif à la requête de ses serviteurs qui prenaient plaisir à craindre son nom (1:11) et qui, comme lui, réalisaient la misère et l’opprobre d’Israël et en menaient deuil devant lui.

Néhémie rassemble maintenant les chefs du peuple et trace devant eux le tableau de l’état misérable dans lequel ils étaient tombés, afin de les amener à une profonde humiliation devant Dieu. Il le décrit dans les termes mêmes dans lesquels il lui avait été présenté (1:3, 4) : «Vous voyez la misère dans laquelle nous sommes, que Jérusalem est dévastée et que ses portes sont brûlées par le feu» (v. 17). Nous avons déjà remarqué l’importance des portes et de la muraille de la sainte cité. Il en est de même dans l’Église. Si le mur de séparation établi par Dieu entre elle et le monde est abattu, les principes corrupteurs, à l’œuvre au milieu d’une scène de ténèbres dont Satan est le prince, opèrent pour la destruction de son témoignage. C’est ce qui a eu lieu, et le Seigneur, marchant au milieu des sept lampes d’or, doit dire à Pergame : «Je sais où tu habites, là où est le trône de Satan» (Apoc. 2:13). Les conséquences de la mondanité de cette Assemblée n’avaient pas tardé à se manifester : les fausses doctrines et la corruption morale et religieuse la caractérisaient, et le Seigneur devait la menacer de son «épée aiguë à deux tranchants» (v. 12).

On voit combien le cœur de Néhémie saignait en présence d’une telle désolation. Puis il réveille les affections de ses frères pour la sainte cité, en leur disant : «Venez et bâtissons la muraille de Jérusalem, afin que nous ne soyons plus dans l’opprobre» (v. 17). Le mépris qui s’attache à une marche infidèle caractérisée par l’association avec le monde ne pouvait disparaître que par un retour aux «sentiers anciens» (Jér. 6:16) que le peuple de Dieu avait abandonnés. Pourquoi Jérusalem était-elle «couverte de honte et d’opprobre», si ce n’est à cause de son abandon de l’Éternel ? Comme le prophète était appelé à séparer «ce qui est précieux de ce qui est vil», ainsi le Résidu devait se lever maintenant et secouer le joug d’iniquité et d’association avec le mal qui avait trop longtemps pesé sur lui. Aujourd’hui encore, nous sommes exhortés à nous purifier des vases à déshonneur pour être des vases à honneur sanctifiés, utiles au Maître, préparés pour toute bonne œuvre (2 Tim. 2:21). «Sortez du milieu d’elle (de Babylone), soyez purs, vous qui portez les vases de l’Éternel» (És. 52:11).

Pour encourager le peuple affaibli et craintif, le serviteur de Dieu raconte à ses frères comment la bonne main de Celui qu’il avait appris à craindre dans le pays de l’exil avait été sur lui en bien et comment le cœur du puissant roi avait été incliné en sa faveur. Dieu qui avait tout préparé en vue du travail qu’Il voulait accomplir pour le rétablissement de son témoignage en Juda, accompagna ce message de sa bénédiction, en réveillant les consciences, pour que tous se remissent à l’ouvrage : «Et ils dirent : Levons-nous et bâtissons. Et ils fortifièrent leurs mains pour bien faire» (v. 18).

Comme nous l’avons déjà remarqué, tout réveil ayant pour objet la gloire de Dieu et le bien des âmes, suscite l’opposition acharnée de l’adversaire. Il se met en travers du chemin par tous les moyens que sa ruse et sa haine lui suggèrent, pour entraver l’œuvre du Seigneur ici-bas. Les ennemis essaient maintenant l’arme de la moquerie si puissante pour arrêter et décourager les faibles témoins qui essaient de répondre à l’appel divin. Ils cherchent aussi à produire chez eux de la crainte par l’accusation de rébellion contre le roi (v. 19), mais Néhémie est bien armé contre tous ces artifices. Il commence par une confession franche et hardie du nom de son Dieu, le Dieu des cieux qui a créé toutes choses et dont la puissance est infinie pour soutenir et délivrer ceux qui le craignent, lui obéissent et se confient en lui. Il déclare que Dieu a tous les droits sur ses serviteurs qui doivent lui obéir, en travaillant à son œuvre, tandis que les ennemis de Dieu et de son peuple n’ont aucune part dans la reconstruction de cette sainte cité, à laquelle ils n’ont aucun droit, n’ayant jamais joui des bénédictions dont elle était le centre : «Nous, ses serviteurs, nous nous lèverons et nous bâtirons ; mais vous, vous n’avez ni part, ni droit, ni souvenir à Jérusalem» (v. 20). C’est ainsi qu’en résistant au diable, il s’enfuit loin de nous. Nous avons besoin également, en des temps de confusion et de ruine comme les nôtres, d’affirmer clairement les droits de Dieu sur son peuple et la séparation entière entre ceux qui lui appartiennent sur le terrain de la foi et de la rédemption et le monde qui les entoure. Quelles que soient les prétentions de ce dernier à une profession de soumission extérieure à sa Parole, il ignore totalement la puissance de la piété, tout en ayant le manteau du christianisme. Proclamons nettement qu’il n’a «aucune part au travail de la maison de Dieu, aucun droit, ni souvenir» dans la cité sainte, et que la seule porte d’accès aux bénédictions spirituelles qui sont offertes gratuitement aux pécheurs perdus dont il se compose est «la repentance envers Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus-Christ» (Actes 20:21). Ce témoignage clair et sans équivoque nous mettra à l’abri de bien des pièges de l’ennemi et, en nous rejetant entièrement sur les ressources de la grâce divine, nous fera expérimenter la douceur de l’approbation du Seigneur. Néhémie en fit l’expérience dans le sentier d’obéissance dans lequel il marchait, car il eut la joie de voir le peuple presque entier se mettre avec énergie à la reconstruction de la muraille de la cité. Comme à ces fidèles des temps passés, le Seigneur nous parle avec puissance dans ces derniers jours et nous encourage à tenir ferme jusqu’à ce qu’Il vienne : «Ainsi, mes frères bien-aimés, soyez fermes, inébranlables, abondant toujours dans l’œuvre du Seigneur, sachant que votre travail n’est pas vain dans le Seigneur» (1 Cor. 15:58).

 

3                    Chapitre 3 — La muraille

ME 1926 p. 363-371

Le récit que nous donne ce chapitre nous fait penser au tribunal de Christ devant lequel se déroulera toute l’activité des croyants ici-bas : leur activité pour le Seigneur, aussi bien, hélas ! que leurs manquements y seront mis en pleine lumière. Tout ce que la grâce divine aura produit en eux, au milieu d’une scène de ténèbres, sera rappelé et récompensé, selon la sagesse de Celui à qui «est la bonté» et qui «rend à chacun selon son œuvre» (Ps. 62:12). C’est sa miséricorde qui saura trouver dans le service des siens, malgré tant d’infidélités, la manifestation de la vie qu’Il leur a donnée et dont les fruits sont à sa gloire. L’activité de la chair non-jugée, qui a entravé l’opération de l’Esprit chez les rachetés, sera vue alors dans toute sa laideur et, tout en admirant la grâce qui a surabondé là où le péché abondait, nous aurons le sentiment de la perte que nous ont causée nos nombreuses infidélités. C’est pourquoi, bien-aimés, pendant qu’il en est temps encore, appliquons-nous avec ardeur à être agréables au Seigneur dans notre marche et notre service ici-bas, sachant que nous aurons à lui rendre compte de tout ce que nous aurons fait, dans le corps, «soit bien, soit mal» (2 Cor. 5:9, 10).

Le fait que les noms des ouvriers qui participèrent à la reconstruction de la muraille de la sainte cité, ainsi que le caractère de leur travail, nous sont rapportés avec tant de soin par l’Esprit de Dieu, nous montre combien cette activité du peuple réveillé de sa torpeur, lui était agréable. Comme nous l’avons déjà remarqué, la muraille était la garantie que la ville, choisie par l’Éternel pour y faire habiter son Nom et y manifester Sa gloire, était séparée du monde. La destruction de cette barrière à l’invasion du mal favorisait les desseins de l’ennemi qui voulait, par ce moyen, corrompre le témoignage confié au peuple élu au milieu des nations idolâtres qui l’entouraient. La muraille abattue et les portes brûlées par le feu (Néh. 1:3), tel était le tableau de la ruine d’Israël sous les conséquences de son abandon de l’Éternel. Tel est encore aujourd’hui l’état de l’Église responsable dans son mélange avec le monde et sa chute irrémédiable qui attire sur elle cette sentence du Seigneur : «Je vais te vomir de ma bouche» (Apoc. 3:16). Toutefois, comme Néhémie et ses compagnons, nous pouvons travailler à la reconstruction de la muraille et résister au courant du monde qui menace d’emporter ce qui reste encore du témoignage confié aux faibles croyants des temps de la fin. Puissions-nous entendre la voix du Seigneur qui nous adresse ce message : «Tiens ferme ce que tu as, afin que personne ne prenne ta couronne» (Apoc. 3:11).

«Éliashib, le grand sacrificateur, et ses frères, les sacrificateurs» (v. 1) sont mentionnés les premiers dans la liste d’ouvriers qui coopérèrent à cet important travail. Ils «se levèrent et bâtirent la porte des brebis ; ils la sanctifièrent et en posèrent les battants ; et ils la sanctifièrent jusqu’à la tour de Méa, jusqu’à la tour de Hananeël» (v. 1). À première vue, leur travail paraît important et digne de louange. Mais, hélas ! un examen plus minutieux en fait ressortir les graves imperfections. Aux regards de Celui qui sonde les cœurs et les reins, cette œuvre était entachée d’un manque complet de droiture, de sincérité et de véritable attachement aux intérêts de son témoignage. En effet, il manquait à la porte, reconstruite par ces chefs du peuple, les verrous et les barres. Aussi n’était-elle qu’une apparente barrière à l’entrée de l’ennemi, plus dangereuse que ne l’eût été son absence complète. Cette omission prouvait que le cœur d’Éliashib n’était pas intègre devant Dieu et que son intention secrète était de faciliter l’entrée de l’ennemi, au lieu de le tenir dehors. Cela était d’autant plus triste qu’il était petit-fils de Jéshua, le serviteur fidèle que Dieu avait suscité lors du premier réveil sous le règne de Cyrus, pour conduire le résidu remonté de la captivité (Esdras 3:2, ; Zach. 3:1, 8 ; Néh. 12:12). Éliashib était loin de suivre les traces de son aïeul. Il était «allié de Tobija» (13:4), l’Ammonite, ennemi acharné de Néhémie et lui «avait préparé une chambre dans les parvis de la maison de Dieu» (v. 7). De plus, l’un de ses petits-fils était gendre de Sanballat le Horonite, autre adversaire du peuple de Dieu (14:28). Ce n’était donc pas par un véritable attachement aux intérêts et à la gloire de l’Éternel qu’Éliashib et ses frères s’étaient joints au travail de reconstruction de la muraille, mais parce qu’ils ne voulaient pas avoir l’air de se retirer en arrière ni risquer de perdre la considération dont ils étaient entourés. L’apparence de zèle religieux ne trompe pas Celui qui lit dans les cœurs comme dans un livre ouvert. Il en discerne les pensées et les intentions, et le manteau d’hypocrisie dont l’homme aime à se revêtir ne le cache pas à l’épée à double tranchant de sa Parole et de son jugement.

Si le cœur est au monde, la profession de séparation extérieure pour Dieu est un mensonge. Dans ce cas, les pieds ne tardent pas à suivre le cœur dans le chemin large ; veillons à ce que les verrous des portes de nos cœurs soient bien fermés, pour que l’ennemi ne puisse pas y pénétrer !

Un autre fait prouve le manque de sincérité d’Éliashib, c’est qu’il avait omis de réparer la partie de muraille qui se trouvait devant sa maison. Un autre ouvrier plus fidèle la releva (v. 21). Lui, ne se souciait pas de fermer l’accès de sa maison à l’ennemi et de la séparer ainsi de tout contact impur avec le monde idolâtre, puisque ses affections étaient engagées avec celui-ci. Le mariage de son petit-fils avec une Moabite en désobéissance flagrante à la Parole de Dieu (Deut. 23:3) vint ensuite consommer cette alliance coupable. Combien il est triste et humiliant de constater un tel état de choses au milieu du peuple de Dieu ! Le souverain sacrificateur, représentant responsable de ceux qui professaient appartenir à l’Éternel, et dont les lèvres devaient apporter de sa part la loi de vérité, marchant dans la duplicité, l’hypocrisie, le mensonge, la mondanité et la révolte contre Dieu ! Telle est, dans tous les temps, l’histoire de l’homme. Tout ce que Dieu confie à sa responsabilité se gâte et se perd entre ses mains. Combien devaient être poignants pour le cœur de Néhémie ces symptômes de déclin se manifestant au milieu du beau réveil opéré par l’Esprit de Dieu dans les cœurs de son peuple et qui devaient amener fatalement la ruine complète du témoignage qui lui était confié.

À côté de ces traits affligeants, l’Esprit de Dieu se plaît à relever les fruits réjouissants de la foi et de l’amour chez plusieurs de ceux qui s’étaient associés à son œuvre. Les fils de Senaa bâtirent la porte des poissons et eurent grand soin d’en poser les battants, les verrous et les barres (v. 3). Il en fut de même de Jehoïada et de Meshullam (v. 6), puis de Hanun avec les habitants de Zanoakh (v. 13), puis de Malkija, fils de Récab (v. 14) et de Shallun (v. 15). La mention minutieuse de tous ces noms est un encouragement pour nous à servir fidèlement et joyeusement le Seigneur dans la sphère humble dans laquelle nous sommes appelés à le faire, étant assurés que «chacun, soit esclave, soit homme libre, quelque bien qu’il fasse, le recevra du Seigneur» (Éph. 6:7, 8). Dieu manifestera les conseils de tous les cœurs et, s’ils ont eu sa gloire pour mobile, la louange leur sera donnée de sa part (1 Cor. 4:5), au grand jour de la rétribution.

Les Thekohites réparèrent aussi une portion de la muraille, mais, fait affligeant, «les principaux d’entre eux ne plièrent pas leur cou au service de leur Seigneur» (v. 5). Il arrive fréquemment que «les principaux», les riches, les puissants, les nobles refusent d’entrer dans le chemin du témoignage et du service pour Christ, à cause de l’opprobre, de la souffrance et du renoncement qui s’y rattachent. La cause de ce refus nous est indiquée ici. Pour accepter le combat en vue des intérêts du Seigneur ici-bas, il faut plier son cou sous le joug du Maître. Cette humiliation ne convenait pas à l’orgueil des principaux des Thekohites. Il est difficile à ceux qui occupent des positions élevées dans le monde de s’abaisser à suivre dans l’opprobre un Maître rejeté. À Corinthe déjà, il n’y avait «pas beaucoup de sages selon la chair, pas beaucoup de puissants, pas beaucoup de nobles» (1 Cor. 1:21) dans l’Assemblée. Quel contraste entre l’attitude des grands de ce monde qui méprisent le sentier de la foi et le renoncement de Celui qui, étant riche, s’est appauvri pour nous, afin que, «par sa pauvreté, nous fussions enrichis» (2 Cor. 8:9). La conséquence de l’égoïsme et de la mondanité de ceux qui refusèrent de plier leur cou au service de leur Seigneur fut double : 1° Ils perdirent la joie présente qui découle de l’approbation du Seigneur, et le repos du cœur qui ne se trouve qu’en marchant sous son joug. Celui dont ils refusèrent de reconnaître les droits sur eux, bien qu’Il fût leur Seigneur, ne pouvait pas les remplir de cette paix que donne sa communion dans le sentier de l’obéissance et du renoncement à nous-mêmes. Mécontents d’eux-mêmes et des autres, ils cherchèrent vainement le bonheur qu’ils auraient trouvé dans la proximité de Celui auquel ils appartenaient, et dans la communion fraternelle avec les fidèles qui travaillaient à la reconstruction de la muraille. 2° Ils perdirent aussi la récompense du service accompli dans l’obéissance au Seigneur. Au lieu que leurs noms soient enregistrés parmi ceux des ouvriers qui coopérèrent à cette oeuvre, ils sont consignés dans ce récit avec l’expression du blâme et du jugement que Dieu porte sur leur conduite. Quelle leçon pour nous dans les temps auxquels nous sommes parvenus ! Il arrive fréquemment aujourd’hui que des croyants occupant des situations en vue dans le monde, refusent, malgré la lumière que Dieu leur a donnée, de prendre le chemin de la séparation hors du camp, pour éviter l’opprobre de Christ. N’imitons pas cet exemple, mais au contraire plions joyeusement notre cou sous le joug de l’humble Maître qui nous appelle à le suivre : quand viendra le jour de sa gloire, Il n’aura pas honte de ceux qui l’ont servi dans le mépris et la souffrance, et Il confessera leurs noms devant le Père et les saints anges (Matth. 10:32 ; Luc 12:8).

Le v. 12 contient un détail touchant : «Shallum répara... lui et ses filles». Nous voyons par cette mention du service accompli par des femmes, venant s’ajouter à tant d’autres que nous trouvons dans la Parole, la place que des sœurs fidèles peuvent occuper dans le service du Seigneur, sans sortir de la sphère que Dieu leur a assignée et sans désobéir aux injonctions des Écritures. Une mère de famille pieuse qui élève ses enfants dans la crainte de Dieu et l’obéissance à sa Parole, bâtit la muraille de séparation qui doit les protéger et les éloigner du monde. Puissent toutes les sœurs coopérer à cette bonne œuvre et, par leur témoignage et leur activité dans le service qui leur est confié, glorifier le Seigneur, en demeurant humblement dans les limites tracées par les saintes lettres qui peuvent nous instruire dans la justice, afin que nous glorifiions en toutes choses notre Dieu et Père. Les saintes femmes qui servaient le Seigneur en l’assistant de leurs biens (Luc 8:3), étaient approuvées de lui et auront sa récompense en son jour (Voir aussi Rom. 16:3, 6, 12-13).

En considérant le récit que nous avons sous les yeux, nous pouvons constater que les bâtisseurs qui travaillaient sous la direction de Néhémie formaient deux classes d’ouvriers, dont le travail présentait des traits différents qui se retrouvent aujourd’hui dans la maison de Dieu : 1° Il y avait des fidèles qui bâtissaient surtout devant leurs maisons, comme Jédaïa (v. 10), comme Benjamin et Hashub (v. 23), comme Tsadok, fils d’Immer (v. 29) ; et comme «les sacrificateurs réparèrent chacun vis-à-vis de sa maison» (v. 28), de même que Meshullam (v. 30).

2° D’autres bâtisseurs s’occupaient d’autres parties de la muraille. On trouve aujourd’hui encore dans l’Église des croyants qui sont très fermes pour le maintien de la piété et de la séparation du monde dans leurs maisons, mais qui négligent ou méconnaissent leur responsabilité de membres du corps de Christ. L’état de ruine de l’Église les exerce peu et, quoique pieux dans leur marche personnelle, ils peuvent se trouver associés dans leur position ecclésiastique, au mal moral ou doctrinal et à la mondanité. Loin de nous la pensée qu’il en fût ainsi des compagnons d’œuvre de Néhémie, ou que l’Esprit de Dieu signale le fait qu’ils avaient surtout à cœur de réparer la muraille vis-à-vis de leurs maisons pour les en blâmer. Nous voudrions seulement rappeler deux dangers que nous courons dans le témoignage et le service du Seigneur : le premier consiste à penser exclusivement à la prospérité spirituelle de nos maisons, en oubliant que nous sommes liés à tous les membres du corps de Christ. Il importe que, dans notre marche ecclésiastique, nous soyons dirigés par les instructions données par l’apôtre en vue d’un jour de ruine.

Le second danger auquel nous sommes exposés est d’oublier la nécessité impérieuse d’une séparation pratique du monde dans nos familles et notre marche personnelle. Il arrive malheureusement que des frères sont de zélés défenseurs de la vérité de l’Assemblée et que, tout en étant séparés des systèmes humains et du monde religieux quant à leur marche ecclésiastique, ils négligent leur responsabilité de vivre ici-bas «sobrement, justement et pieusement, en attendant la bienheureuse espérance et l’apparition de la gloire» (Tite 2:12, 13). Veillons à éviter ces deux pièges de l’ennemi. Bâtissons la muraille devant nos maisons, mais intéressons-nous aussi à l’état de l’Église. Sachons mener deuil de la ruine de son témoignage et, en cherchant le bien des enfants de Dieu, poursuivons, dans la séparation du mal, «la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur» (2 Tim. 2:22).

 

4                    Chapitre 4 — L’Épée et la truelle

ME 1923 p. 88-99

Nous trouvons au chapitre 3 de ce livre le tableau béni de l’activité du peuple remonté de la captivité de Babylone, pour la reconstruction de la muraille de Jérusalem, symbole et garantie de sa séparation des nations idolâtres qui l’entouraient. La portion que nous avons sous les yeux nous présente l’opposition acharnée de l’ennemi contre ce travail. Satan sait que la force du peuple de Dieu se trouve dans sa séparation du monde et son rassemblement autour du centre que Dieu a établi dans sa maison. Aussi tous ses efforts tendent-ils à l’empêcher de prendre cette place, en abattant le mur de séparation qui doit exister entre les croyants et le monde. Il suscite les instruments nécessaires pour s’opposer au travail des témoins de Dieu, et ce livre nous présente les moyens variés qu’il emploie pour arriver à ses fins. Il en sera ainsi jusqu’à ce qu’il soit précipité du ciel, puis lié dans l’abîme.

Dans la guerre que faisait l’ennemi au faible résidu des temps d’Esdras et de Néhémie, les instruments qu’il employait étaient surtout des descendants d’Ismaël et de Lot (Néh. 2:10, 19 ; 4:1, 2, 7), par conséquent apparentés selon la nature au peuple de Dieu. Aujourd’hui encore, ceux qui professent être en relation avec les croyants par le manteau religieux dont ils sont revêtus, tout en reniant la puissance de la vérité, sont souvent les plus grands ennemis des fidèles qui s’appliquent à marcher dans le chemin de l’obéissance à la Parole.

En apprenant la construction de la muraille, Sanballat le Horonite (*) se mit dans une grande colère, puis il se moqua des Juifs (v. 1). Le mépris que Tobija l’Ammonite et lui expriment pour ce travail (v. 2 et 3), n’était pas sincère, car pourquoi en être si irrité s’il était si fragile et misérable ? Le fait est que l’ennemi en comprenait l’importance ; aussi faisait-il mouvoir tous les ressorts du méchant cœur de l’homme pour s’y opposer et l’arrêter. Il en est encore ainsi aujourd’hui. Si quelques croyants fidèles se réunissent dans la séparation du mal sur le terrain de l’unité du corps de Christ, ils seront méprisés à cause de la faiblesse de leur rassemblement, et cependant leur témoignage suscitera la haine particulière de Satan, parce qu’il en comprend l’importance, et il fera tout ce qui est en son pouvoir pour le détruire.

(*) Originaire de Horonaïm, ville de Moab.

Il y a ici une gradation frappante dans l’expression de la haine de l’ennemi : le mépris, la colère, puis le déploiement de la puissance pour arrêter l’œuvre de Dieu. Quelles étaient les ressources du résidu fidèle dans l’épreuve ? Le v. 4 nous le dit : Néhémie se tourna vers Dieu dans la réalisation de sa dépendance de Lui, dans le sentiment de sa faiblesse profonde et dans l’assurance que l’oreille de son Dieu était attentive à ses supplications. Telle est la part de la foi dans tous les âges. Elle fait intervenir Celui pour qui il n’y a pas de difficultés et s’attend paisiblement au déploiement de sa puissance et de son amour. Néhémie ne s’attaque pas à ses ennemis ; il les laisse entre les mains de Dieu, en lui demandant d’intervenir en jugement contre eux. Ézéchias avait fait de même, en déployant devant l’Éternel la lettre qu’il avait reçue de Sankhérib (2 Rois 19:19). Si nous laissons Dieu agir, nous verrons sa gloire et sa puissance : «Nous sommes méprisés», dit Néhémie (v. 4). Le peuple de Dieu est précieux pour son cœur. Aussi, en l’outrageant, c’est Dieu lui-même qu’on outrage. «Celui qui vous touche, touche la prunelle de son œil» (Zach. 2:8). En persécutant les saints, Saul de Tarse persécutait Christ lui-même (Actes 11:4, 5).

Le travail des bâtisseurs était l’œuvre de Dieu, et c’était lui faire la guerre que de s’y opposer. À première vue, on pourrait trouver étrange que Néhémie appelât le jugement de Dieu sur ses ennemis. Remarquons, à ce propos, la différence fondamentale entre l’économie de la loi sous laquelle il vivait et celle de la grâce. Maintenant nous sommes appelés à être les témoins de l’amour du Dieu Sauveur pour tous les hommes (1 Tim. 2:3, 4), et si nous souffrons de leur part, nous devons bénir ceux qui nous maudissent et prier pour ceux qui nous persécutent (Matt. 5:44), en demandant à Dieu leur conversion. La loi, par contre, prononçait le jugement contre les transgresseurs et les ennemis de Dieu et de son peuple. C’est pourquoi Néhémie appelle la vengeance de Dieu sur ceux qui couvraient de mépris et d’outrages le peuple de sa pâture. Quand le jour de la grâce sera terminé, les saints apocalyptiques demanderont aussi le jugement sur leurs ennemis, car ce sera le jour de la rétribution et de la colère contre les méchants. La foi est enseignée de Dieu à parler et à agir d’une manière qui soit en harmonie avec le caractère sous lequel Il se révèle aux siens. Ainsi, tandis que Néhémie demande que l’iniquité de ses ennemis ne soit pas couverte ou effacée (v. 5), nous devons leur annoncer l’Évangile par lequel la grâce et le salut leur sont offerts, en vertu de l’œuvre de la rédemption.

L’opposition de l’adversaire ne décourage pris Néhémie et ses compagnons et ne les empêche nullement de continuer leur travail. Avec la puissance de la foi qui compte sur Dieu, ils persévèrent d’un commun accord dans la construction de la muraille, car «le peuple avait le cœur au travail» (v. 6). Quand le cœur est engagé dans l’œuvre du Seigneur, les obstacles suscités par l’ennemi ne peuvent arrêter les serviteurs. Remarquons aussi l’unité pratique des ouvriers engagés dans la bâtisse sous les ordres de Néhémie, unité produite par la communion avec Dieu. L’unité extérieure peut être le résultat d’un accord humain duquel Dieu est exclu, mais si elle est le fruit de l’opération de l’Esprit dans les cœurs, elle est de Dieu : c’est cette «unité de l’Esprit» que nous avons à garder dans «le lien de la paix» (Éph. 4:3).

Les progrès de l’œuvre amènent un redoublement d’énergie de la part de l’ennemi pour s’y opposer. Ce ne sont plus seulement quelques individus, mais un rassemblement de peuples hostiles, formant une armée qui veut user de violence pour arrêter ce travail (v. 7). La persécution ouverte est un des moyens favoris et habituels de l’adversaire, mais elle manque son but, car Dieu s’en sert pour réveiller les cœurs des siens et leur faire rechercher sa présence et son secours avec plus d’ardeur, et ainsi sont répandues sur eux d’abondantes bénédictions. C’est ce qui eut lieu dans cette circonstance, car, dit Néhémie : «Nous priâmes notre Dieu et nous établîmes une garde contre eux» (v. 9).

«Veillez et priez», nous dit la Parole (Matt. 26:41 ; Éph. 6:18). La vigilance découle du sentiment d’un danger constant que nous courons sur le terrain du combat avec un Ennemi puissant et rusé, et la prière est le fruit de notre dépendance de Dieu, dont nous connaissons l’amour et les ressources. En outre, il n’y avait aucune interruption dans l’exercice de la foi des fidèles combattants : «Jour et nuit» (v. 9), ils étaient sur leurs gardes. «Priez sans cesse» nous dit Paul (1 Thess. 5:17). Dans ce sens-là, il n’y a pas de repos pour le chrétien ici-bas. S’il cherche ses aises dans l’indolence, comme le fit David quand il abandonna le théâtre de la guerre, il tombe sous le pouvoir de l’ennemi (2 Sam. 11).

Nous trouvons ensuite un nouvel effort de Satan pour compromettre l’œuvre du résidu (v. 10). Ce n’est plus l’opposition extérieure, mais un mal intérieur qui menace de ruiner tout le témoignage du peuple. Tant que celui-ci avait le cœur au travail, l’hostilité des adversaires n’avait fait que le rejeter sur Dieu, en l’amenant ainsi à la source même de la force ; mais il se décourage en face des difficultés du chemin. On vient dire à Néhémie : 1° que «les forces des porteurs de fardeaux faiblissent» ; 2° qu’«il y a beaucoup de décombres» et qu’il est, par conséquent, impossible de continuer le travail (v. 10). 1° Juda avait oublié que sa force était dans le Seigneur et qu’il devait penser sans cesse à cette source pour continuer son service. Dans l’Assemblée, il arrive fréquemment que ceux à qui le Seigneur a confié une responsabilité spéciale faiblissent sous le poids des fardeaux qui leur incombent. Qu’ils se souviennent de l’exhortation de Paul à Timothée : «Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce qui est dans le Christ Jésus» (2 Tim. 2:1). Ésaïe nous encourage aussi en nous présentant le même secret de force et de joie. «Les jeunes gens», en qui se trouve la force naturelle, «seront las et se fatigueront, mais ceux qui s’attendent à l’Éternel renouvelleront leur force... ils courront et ne se fatigueront pas» (Ésaïe 40:30, 31). 2° La foi ayant diminué chez Juda, les genoux chancelaient et les obstacles leur apparaissaient infranchissables. Les «décombres» amenés par la ruine du peuple de Dieu représentent pour nous la mondanité et le désordre qui règnent dans l’Église. Beaucoup d’âmes en viennent à dire : «Il y a trop de mal dans le corps professant pour que nous puissions y porter remède. Il est inutile de nous en retirer, en bâtissant le mur de séparation». C’est ainsi qu’on arrive à justifier le mal au lieu de s’en purifier.

L’ennemi s’efforçait en outre de lasser la persévérance de Néhémie et de ses compagnons par la crainte continuelle d’une attaque soudaine, dont les avertissaient également ceux des Juifs qui habitaient la campagne (v. 11-12). Mais, en vrai homme de Dieu revêtu de l’armure complète d’en haut, Néhémie organise la défense en mettant chaque ouvrier à sa place et en veillant à ce que chacun soit bien armé (v. 13). Pour vaincre l’ennemi, il faut deux choses : 1° être à la place que Dieu nous a assignée ; 2° être revêtu de «l’armure complète de Dieu» (Éph. 6:13).

Néhémie exhorte ensuite le peuple à persévérer dans le service et le combat. Il l’engage à se souvenir du Seigneur (v. 14), à l’avoir constamment devant les yeux dans sa puissance, ses droits et son amour. De même, Paul exhorte Timothée à se souvenir de Jésus-Christ «ressuscité d’entre les morts» (2 Tim. 2:8). Nous servons un Maître vivant, glorieux, victorieux de la mort. Mais ces fidèles devaient combattre pour leurs frères, comme nous pour la famille de Dieu, chère au Seigneur, et qui doit nous être chère aussi. Pour nous, le combat a lieu pour la défense des intérêts de Christ dans ce monde et le bien de son Église ; ces objets de notre activité spirituelle doivent occuper la première place dans nos cœurs et nous encourager à combattre joyeusement et fidèlement. «Résistez au diable et il s’enfuira de vous» (Jacques 4:8). En fixant nos regards sur le Seigneur, nous sommes fortifiés et délivrés de la crainte de l’ennemi. La foi mesure ce dernier à la puissance de Celui qui l’a vaincu et se fortifie en Lui pour résister à l’adversaire. Si la crainte s’empare de nos âmes, c’est parce que nous ne réalisons pas que le Seigneur est pour nous et avec nous. Cette crainte, résultat de l’incrédulité, est le signe avant-coureur de la défaite. Le résultat de la vigilance de Néhémie est de décourager les ennemis : ils cessent leurs attaques ouvertes contre le peuple, Dieu ayant dissipé leur conseil, de sorte que la bâtisse de la muraille peut se continuer en paix. Mais le fidèle serviteur du Seigneur ne se relâche pas dans sa vigilance (v. 15, 16). Il sait que Satan ne se tient pas pour battu et, qu’après avoir tout surmonté, il faut «tenir ferme» (Éph. 6:13), pour être prêt à faire face à de nouvelles attaques. Aussi, ceux qui bâtissaient devaient avoir chacun l’épée à son côté pour être toujours en mesure de repousser l’ennemi. Nous pouvons recueillir de ce fait deux leçons importantes :

1° Dans les jours mauvais, caractérisés par des attaques spéciales de l’Ennemi contre la vérité de Dieu, soit contre la Personne de Christ, soit contre d’autres parties du témoignage à la vérité, confié aux saints, le danger pour les ouvriers du Seigneur est de se laisser absorber par la lutte contre l’erreur et les assauts de l’adversaire et d’oublier les besoins des âmes. On ne peut nourrir ni soi-même, ni les autres, de controverses et, en se laissant absorber par la lutte contre le mal, on tombe dans la sécheresse spirituelle. Il faut continuer à bâtir la muraille, tout en veillant aux attaques de Satan. Nous avons besoin de nous édifier nous-mêmes, et les uns les autres, sur «notre très sainte foi» (Jude 20), en nous occupant de la Personne de Christ, et en nous nourrissant diligemment de sa Parole pour être enseignés et rendus «accomplis pour toute bonne œuvre» (2 Tim. 3:17). Rappelons-nous que la truelle doit toujours être dans la main de celui à qui le Seigneur l’a confiée, aussi bien que l’épée sur son côté.

2° Un autre danger consiste à refuser de participer au combat pour la défense de la vérité menacée par les attaques de l’ennemi. Jude aurait désiré s’occuper avec les saints de leur «commune foi» et de toutes les glorieuses vérités qui s’y rattachent, mais, vu les temps périlleux, il avait jugé nécessaire d’exhorter les saints à combattre pour la foi. Si, pour échapper à des luttes pénibles, on s’y refuse, on devient la proie de l’ennemi.

Remarquons aussi les diverses catégories d’ouvriers placés sous les ordres de Néhémie : les uns bâtissaient, d’autres veillaient sur les armes, d’autres portaient les fardeaux (v. 17). Le secret de la bénédiction et de la réussite dans le travail se trouvait dans la coopération de cœur de tous les ouvriers, tous demeurant bien unis sous la direction du chef que Dieu leur avait suscité, et n’ayant qu’un seul but : la gloire de Celui qui les avait appelés à cette œuvre bénie pour le bien de son peuple. Nous trouvons, dans l’Église, un ordre de choses identique. En 1 Cor. 12, nous sont dépeints les divers services que doivent accomplir les membres du corps, sous la dépendance du Saint-Esprit et selon les dons divers qu’Il a départis pour l’accroissement du corps, produisant ainsi la diversité dans l’unité. Chaque ouvrier étant à sa place, assignée par Néhémie, il n’y avait aucun sujet de frottement ni de jalousie, tant que chacun travaillait sous le regard de Dieu et pour sa gloire. La confusion qui règne dans l’Église est la conséquence de l’abandon de cet ordre divin, mais notre devoir est de retourner à ce qui était dès le commencement et de nous conformer à la Parole, afin que notre service puisse être béni et approuvé du Seigneur.

Quant aux divers services énumérés ici, nous retrouvons ces différences dans l’Église. Certains ouvriers sont tout spécialement qualifiés pour s’occuper des armes, pour lutter contre les attaques de l’Ennemi et défendre la vérité de Dieu. Combien fut précieuse aux jours de David l’énergie d’un Shamma, vaillant compagnon de l’oint de l’Éternel qui défendit seul, contre une troupe de Philistins, «une portion de champ pleine de lentilles», «et l’Éternel opéra une grande délivrance» (2 Sam. 23:11). Image frappante de la Parole, nourriture du peuple de Dieu, attaquée par l’ennemi, cette portion de champ avait un grand prix pour le fidèle Shamma. Puissions-nous combattre comme lui sous les yeux de notre glorieux Chef pour cette Parole qu’Il nous a confiée en son absence, afin qu’Il puisse nous dire : «Tu as gardé ma Parole, tu n’as pas renié mon nom» (Apoc. 3:8).

D’autres ouvriers sont plus qualifiés pour s’occuper de l’enseignement ou de la prédication de l’Évangile. C’est ainsi que les uns «bâtissaient la muraille», que d’autres «portaient les fardeaux», ou «les chargeaient» (v. 7). Tous, quelles que fussent leurs fonctions particulières, «faisaient le travail d’une main, et, de l’autre main, tenaient une arme» (v. 17). Ainsi l’activité était unie à la vigilance. Nous aussi, nous devons revêtir «les armes de la lumière» (Rom. 13:12), «l’armure complète de Dieu» (Éph. 6:13), pour combattre le bon combat de la foi. La responsabilité de chaque ouvrier est de demeurer dans la sphère d’activité que le Seigneur lui a assignée et de s’appliquer au travail qu’il lui a confié, en ayant toujours une main sur l’épée, «les armes de la justice de la main droite et de la main gauche» (2 Cor. 6:7).

Nous avons à considérer maintenant le service spécial de celui qui sonnait de la trompette (v. 18) : il devait se tenir près de Néhémie. Il ne devait pas sonner l’alarme de son propre chef, lorsqu’il jugeait lui-même que le peuple courait un danger quelconque qui nécessitait son rassemblement. En agissant à sa guise, il n’aurait amené que la confusion et le désordre et aurait fait l’œuvre de l’ennemi en arrêtant les ouvriers dans leur travail. Il devait dépendre absolument des ordres de Néhémie, et ne sonner l’alarme que lorsqu’il en recevait l’injonction de sa part. Pour cela, il devait se tenir dans une constante proximité de son chef. Quelle leçon importante pour ceux que le Seigneur appelle à une action publique dans l’assemblée ou ailleurs ! Notre témoignage ne peut être efficace, nos louanges acceptables et bénies, que si nous nous tenons à ses pieds et recevons de lui, par son Esprit, force, lumière et direction : «Tous ses saints sont dans ta main, et ils se tiennent à tes pieds ; ils reçoivent tes paroles» (Deut. 33:3).

Rappelons ici que les sacrificateurs seuls pouvaient sonner des trompettes d’argent (Nomb. 10:8) qui servaient à rassembler le peuple pour les fêtes solennelles et pour le combat contre l’ennemi, car, pour faire retentir les notes de la louange et du témoignage, il fallait jouir de la proximité dans laquelle se trouvait la famille sacerdotale. Il en est ainsi dans l’Assemblée. Tout témoignage rendu à Christ, toute expression publique de louange, lorsque les saints sont réunis autour de Lui doivent découler de la communion avec Lui dans la puissance du Saint-Esprit.

Néhémie donne ensuite aux ouvriers les instructions nécessaires pour le cas où ils entendraient la trompette (v. 19). C’était le signal du rassemblement autour du chef pour le combat. C’eût été une infidélité et une désobéissance positives à l’Éternel de la part d’un ouvrier de continuer à bâtir, après que la trompette avait retenti. Il s’agissait maintenant de faire face l’ennemi et, pour cela, de se réunir sous les ordres de Néhémie. Nous voyons ainsi que, dans le service du Seigneur, rien n’est laissé au choix et à la volonté propre de l’homme, et que nous avons besoin d’être exercés sans cesse pour savoir ce qu’Il attend de nous. Néhémie était l’instrument dont Dieu se servait pour diriger tous les mouvements du peuple et, quel que fût le service spécial de chaque ouvrier, tous devaient reconnaître l’autorité qui lui était confiée et s’y soumettre implicitement. C’est ainsi que, dans l’Église, tous les serviteurs du Seigneur, quelle que soit la sphère de leur activité, sont appelés à la soumission à l’autorité du Maître.

Dans l’assurance de la foi aux promesses divines, Néhémie peut ensuite encourager le peuple, en lui rappelant la fidélité immuable de Celui qui les avait mis à part pour son service. «Notre Dieu combattra pour nous», dit-il (v. 20). La foi compte sur lui et demeure tranquille. Qu’il est précieux de réaliser aujourd’hui comme alors la relation bénie dans laquelle nous sommes avec Lui ! Mieux que ces fidèles d’un autre âge, nous pouvons nous glorifier en Lui, car nous le connaissons comme le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ qui, sur le terrain de la rédemption, nous a amenés dans sa faveur et dans une relation filiale avec lui-même comme ses enfants bien-aimés.

Ainsi, tant que le jour durait, Néhémie et ses serviteurs travaillaient, donnant l’exemple de la fidélité, de l’activité et de la vigilance (v. 21-23). Pour la nuit, tous devaient se rassembler à Jérusalem pour veiller (v. 22). La nuit est le moment favorable à l’accomplissement des desseins de l’adversaire, car il est le prince des ténèbres (Éph. 6:12) ; aussi, pour lui résister, nous avons besoin des «armes de la lumière» (Rom. 13:12 ; Voir Cantique 3:7, 8) En cela encore, Néhémie et ses serviteurs étaient en exemple à tous, car, pendant que la muraille se construisait, aucun d’eux n’ôta ses vêtements : «chacun avait son arme à sa droite» (v. 23). La Parole est une épée aiguë à deux tranchants qui pénètre notre être intérieur et discerne les pensées et les intentions de nos cœurs, en nous amenant au jugement de nous-mêmes et de nos voies, en la présence de Celui aux yeux duquel «toutes choses sont nues et découvertes» (Héb. 4:12, 13). En considérant ainsi nos voies à la lumière de la Parole et en nous laissant sonder et juger par elle, notre communion avec le Seigneur est maintenue ou rétablie et nous pouvons alors nous servir de cette Parole comme étant «l’épée de l’Esprit» (Éph. 6:17), seule arme offensive de l’armure complète de Dieu. Ayons-la sans cesse à notre droite, comme les compagnons de Néhémie, pour être toujours prêts à repousser par son moyen tous les assauts de l’Ennemi et à combattre le bon combat de la foi. Ainsi nous pourrons servir fidèlement et joyeusement le Seigneur, en attendant qu’Il vienne : «Prends ta part des souffrances, comme un bon soldat de Jésus-Christ» (2 Tim. 2:3).

 

 

5                    Chapitre 5    Le déclin et son remède

ME 1927 p. 280, 294

5.1   Chapitre 5 v. 1-13

Le récit de la construction de la muraille dans les chapitres précédents, fait place maintenant au tableau affligeant de l’état moral du peuple remonté de la captivité et des misères qui s’étaient introduites au sein de ce résidu, caractérisé, au commencement du réveil, par l’énergie de la foi et le dévouement aux intérêts du Seigneur.

Ces faits contiennent de sérieuses leçons pour nous. Il nous arrive facilement, soit dans l’assemblée, soit dans notre vie individuelle, de négliger le jugement du mal et nous devenons alors incapables de lutter contre les attaques de l’ennemi, en résistant à ses artifices. Si nous ne sommes pas revêtus de l’armure complète de Dieu, il nous est impossible de prendre possession de nos privilèges célestes (Éph. 6:10-20). Vouloir engager la lutte avec l’adversaire sans posséder l’état d’âme que symbolise l’armure chrétienne, c’est aller au devant d’une défaite certaine.

En vrai homme de Dieu, Néhémie comprenait l’importance d’un témoignage fidèle rendu par ceux que Dieu avait choisis pour porter son Nom et défendre ses intérêts au milieu d’un monde plongé dans les ténèbres, car Celui dont «les yeux sont trop purs pour voir le mal» (Hab. 1:13), ne saurait identifier sa gloire avec l’injustice et la violence. Le fidèle serviteur qui avait mené deuil sur la destruction de la muraille, symbole de sa séparation des souillures du monde, ne ferme pas les yeux sur un désordre incompatible avec sa présence au milieu de son peuple, et veut amener chaque membre de la congrégation au jugement de ses voies devant Dieu. Les «portes» de la ville ayant été rebâties, il n’y avait aucune excuse pour ceux qui persévéraient dans des voies d’oppression, le lieu où la justice était rendue étant rétabli selon l’ordre divin.

Au milieu de la confusion et du désordre de la chrétienté, le Seigneur nous accorde une grâce analogue, en réunissant en son Nom ceux qui l’invoquent d’un cœur pur. Veillons donc au maintien de ses droits et de sa gloire, nous rappelant que «la sainteté sied à sa maison pour de longs jours» (Ps. 93:5). Puissions-nous faire usage des ressources qu’Il a mises à la disposition des siens pour juger le mal dans nos voies individuelles et dans l’assemblée : «Ôtez le vieux levain, afin que vous soyez une nouvelle pâte, comme vous êtes sans levain» (1 Cor. 5:7).

«Il y eut un grand cri du peuple et de leurs femmes contre les Juifs leurs frères» (v. 1). Les pauvres, opprimés par leurs frères riches, élevaient ce cri de détresse. Le Saint Esprit emploie sept fois le mot «frères» (v. 1, 5, 7, 8, 10, 14) dans ce chapitre pour faire ressortir la culpabilité de ceux qui profitaient du dénuement de certains membres de la congrégation pour s’enrichir à leurs dépens. Ils méconnaissaient ainsi la relation dans laquelle ils se trouvaient avec ces derniers, comme étant ensemble les descendants d’Abraham, que Dieu avait amenés sur un terrain commun de bénédiction et de relation avec lui-même, par la rédemption d’Égypte à travers la mer Rouge : «Vous avez vu... comment je vous ai portés sur des ailes d’aigle et amenés à moi» (Ex. 19:4). L’égoïsme du cœur naturel gouvernait ces riches et les conduisait dans une voie opposée aux pensées du Dieu de grâce et de vérité. L’ennemi cherchait ainsi à corrompre le témoignage de Dieu qu’il ne pouvait anéantir. N’eût été la vigilance de Néhémie, il aurait pu atteindre son but.

Que dire de ceux qui, dans l’Église, se laissent entraîner dans des voies analogues ? De bonne heure l’ennemi troubla l’Assemblée par la discorde amenée par des intérêts matériels. Quand l’énergie spirituelle du commencement se fut perdue, Satan réussit à corrompre et à ruiner complètement le témoignage. Mais Celui qui opère dans les cœurs pour les amener à sa connaissance n’a jamais cessé de manifester sa puissance en amenant des âmes à la jouissance de son grand salut.

Au temps de Néhémie, comme au jour actuel, une des grandes plaies du peuple de Dieu était le manque d’amour. L’amour pour Dieu et pour le prochain était remplacé par l’égoïsme, l’amour du moi et la recherche de ses propres intérêts. Aujourd’hui l’Église est sous les conséquences du fait solennel constaté par Celui qui marche au milieu des sept lampes d’or : «Tu as abandonné ton premier amour» (Apoc. 2:4). L’amour fraternel, fruit de la première fraîcheur d’affection pour Christ, s’est affaibli et les liens qui unissaient au commencement les membres de la famille de Dieu se sont relâchés. De là, la mondanité et les divisions qui ruinent le témoignage de l’Assemblée.

Prenons néanmoins courage et emparons-nous des ressources qui demeurent pour la foi. Rappelons-nous que le grand objet de «l’administration de Dieu» c’est l’amour qui repose sur trois colonnes importantes : «un cœur pur, une bonne conscience et une foi sincère» (1 Tim. 1:5).

L’homme naturel est incapable de manifester l’amour, car l’amour est de Dieu : «Quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu».

L’amour divin n’étant pas actif dans les cœurs des Juifs riches, ils avaient profité de la détresse de leurs frères pour s’emparer de leurs champs, de leurs vignes et de leurs maisons et même, pour les réduire en esclavage (v. 8). C’était une désobéissance formelle à la loi (Ex. 22:25 ; Deut. 15:7, 8). Devaient-ils imiter leurs pères qui n’avaient pas été attentifs à sa voix et ne s’étaient «pas souvenus de la multitude de ses bontés» (Ps. 106:7) ?

Aujourd’hui encore, il arrive souvent que, dans la défense de ses intérêts, le chrétien est tenté d’user des mêmes procédés que le monde, sans aucun souci de la gloire de Celui dont le Nom est invoqué sur nous. Notre règle de conduite est tracée par la Parole, comme l’était celle du peuple d’Israël, et si nous désirons que la bénédiction d’En-haut soit répandue sur nous, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus assez de place pour la retenir, considérons bien nos voies et montons à la montagne de l’Éternel pour apprendre à bâtir sa maison et Il prendra plaisir en nous pour nous bénir (Aggée 1).

C’est avec juste raison que ces opprimés disaient : «Notre chair est comme la chair de nos frères ; nos fils comme leurs fils» (v. 5). Dieu ne fait pas d’acception de personnes ; tous ses enfants lui sont précieux, étant vus par lui selon tout le bon plaisir qu’Il trouve en son Bien-aimé. C’est pourquoi nous devons nous aimer l’un l’autre «ardemment d’un cœur pur» (1 Pierre 1:22). Au lieu de faire tort à nos frères, pensons continuellement à leur bien en prenant garde l’un à l’autre, pour nous exciter à l’amour et aux bonnes œuvres.

Néhémie fut irrité en apprenant ces nouvelles (v. 1). Il ressentait le déshonneur fait au nom de l’Éternel par la dureté de cœur de son peuple. L’oubli du lien qui unissait les membres de la congrégation le remplissait de tristesse et d’humiliation. Il partageait les sentiments de douleur des pauvres, parce qu’il réalisait les pensées de l’Éternel à leur égard ; il les aimait, parce qu’ils faisaient partie du peuple de Dieu. Il aurait pu dire avec l’apôtre : «Qui est faible, que je ne sois faible aussi ?» (2 Cor. 11:29). L’amour de Paul pour l’Assemblée était comme celui de Néhémie, le reflet de l’amour de Dieu pour les siens. Il aimait l’Assemblée, parce qu’elle est chère au cœur de Christ. Il était «assiégé, tous les jours» par sa sollicitude pour toutes les assemblées.

Imitons ces hommes de foi et secouons la torpeur qui nous a envahis, afin que nous puissions revêtir le caractère de serviteurs prêts à se dépenser et à souffrir pour les intérêts du Seigneur et de son Assemblée.

Remarquons les paroles de Néhémie dans ces graves circonstances : «Mon cœur se consulta sur cela «(v. 7). Il y a dans l’attitude du serviteur de Dieu qui avait à lutter contre l’envahissement du mal en Israël une leçon importante pour nous. Comme les principaux du peuple étaient coupables du péché qui devait être jugé, Néhémie ne pouvait s’adresser à eux pour examiner avec eux les mesures à prendre pour se purifier de cette iniquité. Ils n’étaient pas à même de discerner la volonté du Seigneur et de venir en aide à son serviteur dans ces circonstances critiques, tant qu’ils ne s’étaient pas purifiés du mal. Néhémie était donc seul et entièrement rejeté sur le Seigneur et sur sa Parole. C’est pourquoi il se consulte lui-même ; il examine, seul avec Dieu, le chemin à suivre, chemin clairement tracé par la Parole qui nous enjoint de nous séparer du mal pour Dieu : «Si tu sépares ce qui est précieux de ce qui est vil, tu seras comme ma bouche» (Jér. 15:19). Il faut d’abord «cesser de mal faire» pour apprendre à «bien faire» (És. 1:16). L’homme de Dieu doit quelquefois réaliser que le chemin de la foi et de l’obéissance est tellement étroit qu’il s’y trouve entièrement isolé et n’a pas d’autre appui que Dieu seul.

Dans une circonstance analogue, Esdras devait aussi user d’énergie pour maintenir les droits compromis de l’Éternel et sa fidélité réveilla la conscience d’autres membres de la congrégation qui l’encouragèrent à agir avec énergie, en lui disant : «Lève-toi, car la chose repose sur toi et nous serons avec toi ; sois fort et agis» (Esdras 10:4). Néhémie devait aussi se lever, en rejetant tout compromis avec le mal, car le maintien des droits et de la gloire du Seigneur reposait sur lui. Dans un tel moment, il devait être fort et agir. C’était aussi le message de l’Éternel à Josué, lorsqu’il devait conduire le peuple à la conquête de Canaan : «Ne t’ai-je pas commandé : Fortifie-toi et sois ferme ? Ne te laisse point terrifier et ne sois point effrayé, car l’Éternel, ton Dieu, est avec toi partout où tu iras» (Jos. 1:9).

Quand il s’agit de se purifier du mal, il faut de l’énergie et de la décision, jointes à l’humiliation et à la douleur produites par le sentiment du déshonneur fait au Nom du Seigneur par ceux qui invoquent son nom. C’est ce que nous trouvons chez Néhémie. Il reproche aux chefs et aux nobles leur égoïsme et leur désobéissance à la Parole. Il le fait publiquement : «Je leur opposai une grande congrégation» (v. 7). Il agit à leur égard comme Paul enseigne à Timothée à le faire à l’égard d’un ancien qui tombait en faute (1 Tim. 5:20), et comme il le fait lui-même envers Pierre qui devait être repris devant tous, à cause de sa dissimulation (Gal. 2:13-14). Plus est élevée la position qu’occupe un membre du peuple de Dieu, plus ses fautes sont graves et doivent être sérieusement jugées. Il en était ainsi sous la loi ; c’est pourquoi nous lisons : «Si un chef a péché... il amènera un bouc. Si quelqu’un du peuple a péché... il amènera une chèvre» (Lév. 4:22-27). Ce principe demeure et doit engager à la vigilance ceux que le Seigneur emploie pour le bien de leurs frères dans l’assemblée (Jacq. 3:1).

Ce qui donnait un grand poids moral à la répréhension de Néhémie, c’est, qu’en contraste avec la conduite des nobles et des riches, il pouvait appeler leur attention sur sa propre manière d’agir. Selon son pouvoir, il avait racheté ceux qui étaient en esclavage. Ses frères (v. 8) lui étaient chers parce qu’ils faisaient partie du peuple de Dieu, il était devenu un imitateur de Celui qui avait délivré son peuple du pays d’Égypte et l’avait mis à l’abri de la puissance du destructeur, puis l’avait arraché à la captivité de Babylone. Par contre, ces chefs égoïstes replaçaient leurs frères dans l’esclavage.

L’apôtre est souvent conduit, comme le fait Néhémie dans cette circonstance, à rappeler sa marche fidèle et à exhorter par l’Esprit les saints à être ses imitateurs, comme il l’était lui-même du Seigneur (1 Cor. 4:16 ; Phil. 3:17).

Néhémie invoque deux motifs puissants pour convaincre les coupables de la gravité de leur faute : 1° L’amour pour leurs frères aurait dû les empêcher de les opprimer ainsi. 2° «Ne devriez-vous pas marcher dans la crainte de notre Dieu» (v. 9). Cette crainte n’est pas une peur servile de son jugement, mais le sentiment profond de ce qui est dû à la gloire de ce grand Dieu Créateur et Rédempteur. En marchant dans cette crainte «qui est le commencement de la sagesse» (Prov. 1:7 ; 2:5 ; 8:13 ; 9:10), les fidèles sont en témoignage au monde et manifestent les fruits de la grâce et de la puissance divines. La crainte de Dieu nous sépare du mal (Prov. 8:13) et nous engage dans le chemin du bien et de l’obéissance (Prov. 2:5). En elle, il y a «la sécurité de la force» (Prov. 14:26) ; elle est une «fontaine de vie» (Id. v. 27) meilleure qu’un grand trésor (Prov. 15:16). Par contre, l’absence de crainte de Dieu amène l’opprobre (Néh. 1:3 ; 5:9 ; 6:13), qui s’attache à une marche infidèle et dans lequel tombent ceux qui professent servir le Seigneur, mais renient ses droits sur eux, en oubliant les enseignements de sa Parole (1 Tim. 3:7).

Après avoir rappelé aux coupables que ni lui, ni ses frères n’avaient agi ainsi, Néhémie ajoute : «Laissons, je vous prie, cette usure» (v. 10). Il ne dit pas : «Laissez», mais s’identifie pleinement avec eux dans leur culpabilité devant Dieu. On trouve chez lui, comme chez Daniel, un sentiment profond de l’unité du peuple devant Dieu. Il avait, dans sa prière, confessé les fautes et la ruine de ce peuple comme étant siennes, en disant : «Nous avons très mal agi contre toi et nous n’avons pas gardé tes commandements» (Néh. 1:6, 7). Une telle intelligence des pensées de Dieu qualifiait Néhémie pour parler à la conscience et au cœur de ses frères et les amener à l’humiliation et à la confession de leurs fautes.

Il y a une leçon importante pour nous dans ces faits. Le lien qui nous unit les uns aux autres comme membres du corps de Christ, participant à la vie du Chef, auquel nous sommes unis par le Saint-Esprit est infiniment plus intime et puissant que celui qui formait du peuple d’Israël un seul tout devant Dieu. Aussi, combien devrait être douloureuse pour nos cœurs la ruine de l’Église si chère à Celui qui l’a aimée et s’est livré lui-même pour elle ! Il est triste de constater que souvent nos frères, qui possèdent peu de lumières quant à l’appel céleste de l’Assemblée, et à la relation qui existe entre les membres du corps et la Tête et les uns avec les autres, manifestent pratiquement plus d’amour et de désintéressement que ceux qui proclament hautement ces vérités. Puissions-nous prendre à cœur l’exhortation de la Parole : «Sentez vos misères et menez deuil et pleurez» (Jacq. 4:9).

Néhémie exhorte les délinquants à revenir de leurs extorsions et la bénédiction d’En-haut accompagne ses fidèles efforts. Le mal est jugé et les coupables s’engagent solennellement à restituer ce qu’ils avaient extorqué (v. 11, 12). Les sacrificateurs eux-mêmes avaient participé à ce péché (v. 12). Ce fut aussi  dans cette classe du peuple que se trouvèrent les plus grands ennemis du Seigneur Jésus.

Néhémie accompagna cette transaction d’une exécration solennelle sur ceux qui violeraient leur serment. Hélas ! il n’avait pas encore appris à connaître la méchanceté incurable du cœur de l’homme, quoique, personnellement, il sentît  le besoin pressant de la miséricorde de Dieu (5:1 9 ; 6:9 ; 13:14, 22, 31). Quelques années plus tard, comme nous le voyons à la fin de ce livre, le mal avait éclaté de nouveau avec violence ; toutefois Dieu appréciait et bénissait le zèle et la fidélité de Néhémie et tout le peuple en reçut une grande bénédiction : «Et ils louèrent l’Éternel» (v. 13).

 

5.2   Chapitre 5 v. 14-19

 

Nous trouvons ensuite le tableau de la vie journalière de Néhémie. L’Esprit de Dieu entre dans des détails minutieux sur la manière d’agir de ce fidèle serviteur dans l’intérieur de sa maison. Il a voulu nous donner tous ces détails, non pour exalter l’homme, mais pour nous montrer l’importance d’une marche pieuse et fidèle dans toute notre vie, dans nos relations de famille, et dans la sphère plus ou moins cachée de nos maisons, où, si souvent, nous manifestons tant de faiblesses et d’inconséquences.

Ce récit nous enseigne donc «à marcher soigneusement, non comme étant dépourvus de sagesse, mais comme étant sages» (Éph. 5:15). Il nous fait connaître l’intérêt profond que Dieu porte à ses serviteurs et la bénédiction qui accompagne la consécration à ses intérêts et au bien de son peuple. Néhémie n’avait pas usé des prérogatives de ses fonctions de gouverneur, afin de ne pas écraser le peuple (v. 16). Il aurait pu dire avec l’apôtre Paul : «Je ne cherche pas vos biens, mais vous-mêmes» (2 Cor. 12:14).

Le but de ces serviteurs de Dieu n’était pas d’acquérir des avantages matériels, ni de dominer «sur des héritages» (1 Pierre 5:3), mais de conduire les âmes dans le chemin de l’obéissance à la Parole. Ces principes sont d’une haute importance dans un jour de ruine tel que le nôtre qui ressemble au temps de Néhémie. Puissions-nous, comme lui, nous dépenser entièrement au service du Maître, n’attendant de rémunération que de Lui seul. Il est solennel de penser que toute notre vie sera déroulée devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive les choses accomplies dans le corps, soit bien, soit mal» (2 Cor. 5:10). Veillons et prions comme Néhémie, afin que notre activité ici-bas soit agréable au Maître.

La piété de Néhémie avait eu d’heureux effets dans le cercle intime de sa maison, puisque tous ceux qui étaient placés sous son autorité directe et subissaient le plus son influence marchaient sur ses traces. C’est un encouragement précieux à une marche pieuse et fidèle dans nos familles, car le Seigneur lie une bénédiction spéciale à la foi et à l’attachement à sa Parole.

Au lieu d’être à charge, Néhémie subvenait aux nécessités du peuple de Dieu (Néh. 5:17). Sa maison était ouverte à tous ; il exerçait l’hospitalité «sans murmures» (1 Pierre 4:9), aussi bien à l’égard de ceux des Juifs qui étaient encore dispersés parmi les nations qu’envers ceux qui étaient revenus de la captivité. Il avait appris qu’il est «plus heureux de donner que de recevoir» (Act. 20:35). Il ne recherchait pas une récompense de la part des hommes, mais désirait ardemment que la bénédiction divine reposât sur lui (v. 19). Son cœur se tournait tout naturellement vers le Dieu qu’il connaissait, auquel il pouvait dire : «Mon Dieu», dans la conscience d’une relation intime et bénie avec lui. De celle-ci découlaient la lumière, la force, la joie, la protection et les rafraîchissements dont son âme avait besoin pour persévérer jusqu’au bout dans le chemin de luttes et de souffrances dans lequel il était appelé à servir. Puissions-nous aussi nous attacher de tout notre cœur à ce Dieu d’amour qui s’est révélé à nous «dans le Christ Jésus», en qui Il «nous a bénis de toute bénédiction spirituelle» et le servir humblement chaque jour, en attendant la bienheureuse espérance et l’apparition de sa gloire (Tite 2:13).

 

6                    Chapitre 6 — Ennemis du dehors et ennemis du dedans

ME 1924 p. 36-48

 

En considérant le chapitre 4 de ce livre, nous avons vu combien de luttes avait à soutenir le fidèle serviteur Néhémie, contre les ennemis du dehors, dans son travail de reconstruction de la muraille de Jérusalem, symbole de la séparation du monde que devait réaliser la sainte cité.

Au chapitre 5, nous trouvons la vie intérieure du peuple de Dieu, l’énergie de Néhémie pour le jugement du mal qui avait éclaté dans son sein, ainsi que sa fidélité personnelle dans la vie domestique. Sa piété, manifestée dans la sphère intérieure de sa responsabilité, le qualifiait pour la lutte avec l’ennemi extérieur : il avait la cuirasse de la justice pratique, qui le garantissait contre les attaques de l’adversaire venant du dehors. C’est là un principe très important pour nous. Au chap. 4 l’ennemi se présente comme un lion rugissant, cherchant par la guerre ouverte la destruction du témoignage de Dieu. Dans le chapitre que nous désirons considérer, nous le verrons comme un serpent, cherchant par sa ruse à enlacer Néhémie et à ruiner son témoignage et son service. Dans tous les temps l’opposition de Satan a revêtu ce double caractère, mais elle n’est jamais plus dangereuse que lorsqu’elle se masque derrière l’apparence de la piété : «Satan lui-même prend la forme d’un ange de lumière» (2 Cor. 11:14). C’est par sa ruse qu’il séduisit Ève et cherche encore à nous prendre dans ses piéges, «afin que nos pensées soient corrompues et détournées de la simplicité quant au Christ» (v. 3). Le fidèle Josué lui-même tomba dans le piège des Gabaonites, pour avoir manqué, lui et le peuple, de cette simplicité en ne pas consultant l’Éternel (Jug. 9:14).

La muraille était achevée et les portes gardées, quoique point encore munies de leurs battants (v. 1) ; aussi l’ennemi se rendait-il compte qu’il n’y avait plus de place pour lui dans la cité. Toutefois, sans se tenir pour battu, il cherche par la ruse à pénétrer dans l’enceinte du peuple de Dieu pour y semer la confusion et amener la ruine du témoignage. Les mêmes adversaires que nous avons vus à l’œuvre au chap. 4 sont de nouveau en scène et proposent à Néhémie de se rencontrer avec lui «dans les villages de la vallée d’Ono» (v. 2), pour conférer ensemble amicalement au sujet de leurs intérêts communs. Cette proposition paraissait généreuse, mais l’homme de Dieu revêtu des «armes de la lumière» (Rom. 13:12), discerne les œuvres des ténèbres, quelque apparence qu’elles prennent. Il sait que Satan ne peut que haïr et chercher à détruire le témoignage de Dieu, et il découvre immédiatement le vrai but de ses ennemis : «mais ils pensaient à me faire du mal» (v. 2). Néhémie savait que l’adversaire ne peut supporter le flambeau de la vérité allumé dans un monde de ténèbres, et que le but d’une rencontre comme celle que lui proposaient ses agents ne pouvait avoir en vue le progrès de l’œuvre à laquelle l’Éternel l’avait appelé. Comme plus tard l’apôtre Paul, il n’ignorait pas «ses desseins» (2 Cor. 2:11). Aussi répond-il selon la sagesse qui lui était donnée de Dieu : «Je fais un grand travail et je ne puis descendre» (v. 3). Le service du Seigneur a une si grande importance qu’il ne doit pas être interrompu ; celui qui y a été appelé doit s’y consacrer tout entier et ne se laisser détourner ni à droite ni à gauche du but que Dieu a placé devant lui. Une conférence fraternelle avec d’autres ouvriers du Seigneur n’aurait pas été un empêchement au développement de cette bonne œuvre, bien au contraire ; mais celle que lui proposaient les ennemis de Juda était dangereuse et inopportune : «car quelle participation y a-t-il entre la justice et l’iniquité ? ou quelle communion entre la lumière et les ténèbres ? et quel accord de Christ avec Bélial ? ou quelle part a le croyant avec l’incrédule ? et quelle convenance y a-t-il entre le temple de Dieu et les idoles ?» (2 Cor. 6:14-18).

Nous trouvons la même vigilance chez Paul et Silas, lorsque Satan veut s’associer à leur œuvre pour la ruiner, en la faisant louer par la servante de Philippes (Actes 16:17). Aucun compromis, aucune alliance quelconque avec l’ennemi ne pouvaient être acceptés par eux. Aussi le refus absolu d’accepter ce témoignage, joint à la délivrance de cette esclave de Satan, amenèrent-ils une persécution violente contre les apôtres.

Néhémie avait un sentiment profond de la grandeur de l’œuvre qui lui était confiée. Indépendamment du danger qu’il aurait couru en s’associant aux ennemis du peuple de Dieu, il n’avait pas de temps à perdre en vaines causeries avec le monde. Plût à Dieu que, comme Néhémie, nous ayons davantage conscience du caractère et de l’étendue des droits du Seigneur sur nous, afin que nous ne négligions pas son témoignage et son service, pour nous complaire à nous-mêmes, en entretenant des relations avec le monde. Lorsque le Seigneur envoya ses disciples, Il leur dit : «Ne saluez personne en chemin» (Luc 10:4). En Orient, les salutations sont longues et cérémonieuses : le message des disciples était si pressant et si solennel qu’ils ne devaient pas perdre de temps en chemin, principe important à retenir pour nous dans ces temps qui se hâtent vers la fin.

L’ennemi ne se tient pas pour battu. Les rusés adversaires de Néhémie lui envoient quatre fois le même message (v. 4). Satan sait que si nous ne sommes pas sur nos gardes, une tentation repoussée une première fois pourra nous faire tomber à la deuxième ou troisième fois. C’est ainsi qu’il réussit à amener la chute de Samson. Celui-ci refusa d’abord de livrer son secret à Delila, mais devant son importunité, il finit par céder, n’ayant pas la force de Dieu avec lui dans le chemin de péché dans lequel il était entré. La force intérieure de son nazaréat qui découlait d’une vraie séparation du mal pour Dieu ayant disparu, Samson livre à Delila le secret de cette mise à part, dont sa longue chevelure était le symbole. Lorsque celle-ci lui eut été enlevée, tout discernement spirituel lui fut ôté : Or il ne savait pas que l’Éternel s’était retiré de lui» (Juges 16:20). Il n’en fut pas ainsi de Néhémie. La fidélité avait caractérisé son premier refus, et la sagesse divine est manifestée dans ses réponses subséquentes. Les circonstances n’avant pas changé, il n’y avait pas lieu de modifier, en quoi que ce fût, l’attitude que Dieu avait enseignée à son serviteur, aussi leur répond-il «de la même manière» (v. 4).

Il ne s’agit pas de raisonner avec l’ennemi, mais de demeurer étroitement attaché à la Parole, comme le fit le Seigneur lors de la tentation. Sa seule réponse aux suggestions de l’adversaire fut «Il est écrit» (Matth. 4:4, 7, 10). Lorsque, sortant de la dépendance de Dieu, Ève entra en conversation avec le serpent elle devint une proie facile pour lui. Le chemin de l’obéissance est toujours le même, quels que soient les arguments de Satan, et notre seule sauvegarde est de ne nous en écarter ni à droite ni à gauche. Ces vérités méritent notre sérieuse considération dans les jours auxquels nous sommes parvenus. L’ennemi voit que nous retenons avec des mains affaiblies le précieux dépôt que nous a confié le Seigneur, et il multiplie ses artifices pour nous le ravir. Notre seule sécurité est de demeurer étroitement attachés à, la Parole et au sentier de séparation du mal qu’elle nous trace, quelque subtils que soient les arguments par lesquels le diable cherche à nous en éloigner : «Tiens ferme ce que tu as, afin que personne ne prenne ta couronne».

L’ennemi, battu quatre fois, invente un nouveau stratagème. Sanballat envoie à Néhémie une cinquième lettre, contenant trois accusations graves au sujet desquelles il affecte de l’intérêt pour lui, et le désir de l’aider à se justifier. Il appuie ses allégations du témoignage de Gashum ou Guéshem l’Arabe (v. 1) : 1° Néhémie a bâti la muraille pour se révolter contre le roi (v. 6). 2° Il veut se faire proclamer roi. 3° Il a envoyé des prophètes pour dire : «Il y a un roi en Juda !» (v. 7). Il pouvait y avoir une apparence de vérité dans cette dernière affirmation, car il n’est pas improbable que Néhémie eût rappelé au peuple harassé par les attaques de ses adversaires, les glorieuses promesses de Dieu relatives à l’établissement futur du royaume de son Messie, pour l’encourager dans son travail. En face de l’opposition qui se déchaîne contre lui, il n’est en rien «épouvanté par les adversaires» (Phil. 1:28), mais, vrai homme de Dieu, il discerne et met en lumière la source de toutes ces calomnies, dont le but était de l’effrayer et de le décourager. La réponse est simple, à savoir un démenti formel de ces accusations mensongères, qui provenaient du méchant cœur de Sanballat, instrument de celui qui est le menteur et le meurtrier (Jean 8:44) : «Tu les inventes dans ton propre cœur».

Devant les attaques insidieuses de l’ennemi, il ne faut pas entrer en pourparlers avec lui, mais lui résister en face, dans la puissance de l’Esprit : «Résistez au diable, et il s’enfuira de vous» (Jacq. 4:7), et encore : «Résistez-lui, étant fermes dans la foi» (1 Pierre 5:9). Néhémie s’identifie avec le peuple dans sa faiblesse, en disant : «Ils voulaient tous nous effrayer» (v. 9). Personnellement, sa confiance en Dieu était absolue, mais il sentait le danger de ces attaques répétées, car il ne pouvait communiquer au peuple l’énergie spirituelle qui le caractérisait. Aussi, dans le sentiment de sa dépendance entière de Dieu, il se tourne vers lui et s’écrie : «Puisque l’ennemi veut lasser nos mains et nous arrêter dans notre travail, maintenant fortifie nos mains» (v. 9). La force n’est pas en nous, elle est dans le Seigneur pour nous ; c’est «la puissance de sa force» (Éph. 6:10) qui a été manifestée dans sa victoire sur la mort et son prince. Dans notre lutte contre les malices spirituelles, nous avons besoin de cette force du Seigneur ; elle nous est communiquée par la réalisation de notre dépendance de lui, dans un jugement constant de nous-mêmes.

Comme Paul, Néhémie sentait sa faiblesse et s’attendait uniquement à Dieu. Il nous apparaît ici comme un homme fort et énergique, seulement le secret de cette force n’était pas dans l’énergie de sa nature, mais dans la réalisation de sa faiblesse qui le poussait vers le Seigneur. Il en est ainsi dans tous les temps, «car quand je suis faible, alors je suis fort», dit l’apôtre (2 Cor. 12:10). Quel spectacle admirable que celui de cet homme, pressé de tous côtés, mais qui s’empare par la foi de la puissance et des ressources de Dieu par lesquelles il résiste victorieusement à toutes les attaques de l’ennemi !

Les adversaires de Néhémie tentent une nouvelle ruse plus dangereuse encore que les précédentes. Il doit faire l’expérience douloureuse qu’a faite le Seigneur ici-bas, à savoir que son cruel ennemi n’était pas seulement un homme du dehors, mais son conseiller, son ami, celui avec lequel il avait «de douces communications» et avec lequel il allait «dans la maison de Dieu» (Ps. 55:13, 14).

Shemahia, probablement un des prophètes mentionnés au v. 14, s’était enfermé dans sa maison, en simulant des craintes pour sa sécurité (v. 10). Néhémie vient lui rendre visite comme à un ami et à un confident. Shemahia lui exprime hypocritement sa sympathie et son intérêt relativement au danger qu’il court, par suite des projets d’attaque de l’ennemi du dehors. Puis il lui propose de s’enfermer avec lui dans la maison de Dieu et d’en clore les portes. Encore une fois, l’état moral de Néhémie est soumis à une rude épreuve. Va-t-il céder aux sollicitations d’un «ami», d’un «conseiller», qui ne peut avoir les mêmes motifs qu’un Sanballat, et qui est animé d’une sincère affection pour lui ? S’il avait cédé à la peur, son caractère, sa réputation, son service, tout eût été compromis, et Dieu aurait dû le mettre de côté et confier son mandat à un autre. Il eût été «couvert d’opprobre» (v. 13), non l’opprobre qui s’attache à la confession fidèle du nom et des droits du Seigneur (Héb. 11:26 ; 13:13), mais celui qui est jeté sur ce Nom précieux par l’infidélité de ses témoins (Néh. 1:3 ; 5:9 ; 2:17 ; 1 Tim. 3:7).

Une fois de plus, le fidèle Néhémie sort victorieux de la lutte. «Un homme comme moi fuirait-il ?» (v. 11). Le soldat qui a conscience de sa responsabilité envers celui qui l’a enrôlé pour la guerre ne fuit pas devant l’ennemi. Pour lui la vie n’est pas précieuse ; elle n’est que l’occasion qui lui est fournie de servir son maître et de mourir au besoin au poste du devoir.

Dès l’instant où Néhémie refuse la tentation, il en discerne la source et le vrai caractère. Ce n’était pas Dieu, mais Satan qui en était l’auteur, et Shemahia était le misérable instrument de Sanballat payé par lui, un vrai Balaam à la solde de l’Ennemi pour corrompre le serviteur fidèle que Dieu avait placé à la tête du peuple (v. 12, 13).

Il y a, dans la conduite de Néhémie, une importante leçon pour nous. Nous avons à rejeter tout ce qui est en désaccord avec la Parole, quels que soient les dehors de piété que peuvent revêtir ceux qui cherchent à nous entraîner dans leurs voies détournées. C’est souvent lorsque nous avons obéi que nous discernons le piège que l’ennemi cachait pour nous enlacer. Le prophète de Juda qui fut envoyé à Béthel (1 Rois 13) n’agit pas comme Néhémie et se laissa prendre dans les filets de l’adversaire ; il tomba sous le jugement à cause de sa désobéissance.

Le fait solennel que l’Esprit de Dieu place devant nous dans ce récit est la ruine morale qui caractérisait le résidu remonté de la captivité de Babylone, si peu d’années après le réveil puissant que Dieu avait opéré au milieu de son peuple, pour le ramener du pays de l’exil dans la terre de Canaan. Combien rapide et profonde fut sa déchéance depuis le temps d’Esdras, où les prophètes aidaient ceux qui bâtissaient le temple, en leur communiquant les pensées de Dieu (Esdras 5), tandis que maintenant «Noadia la prophétesse et le reste des prophètes» (v. 14) conspiraient contre Néhémie, étant corrompus par l’or de l’ennemi ! On ne peut guère concevoir une plus grande iniquité au sein du peuple de Dieu. Néhémie est comme anéanti devant cette manifestation de la malice de l’adversaire et de la perversité de ses instruments, revêtus d’un caractère et d’une profession qui les rendaient beaucoup plus redoutables que les ennemis du dehors, mais il s’en remet à Celui qui juge justement. Il ne cherche pas à combattre ces hommes pervers, mais prend Dieu à témoin de leur iniquité et en appelle à son jugement d’un tel mal, ainsi que de l’opposition acharnée de Tobija et Sanballat.

L’apôtre Paul agit de la même manière à l’égard d’Alexandre, l’ouvrier en cuivre qui avait montré envers lui «beaucoup de méchanceté», et s’était fort opposé à ses paroles. Il le laisse entre les mains du Seigneur qui «lui rendra selon ses œuvres» (2 Tim. 4:14). Il y a certains instruments de l’ennemi et certaines formes de mal dans l’Église, auxquels on ne peut toucher sans causer du dommage à la cause de la vérité, et qu’il faut, par conséquent, laisser à la juste appréciation du Seigneur, tout en se tenant fermement attaché à la Parole et au chemin de séparation absolue du mal qu’elle nous trace : «Si quelqu’un se purifie de ceux-ci (des vases à déshonneur), il sera un vase à honneur, sanctifié, utile au Maître, préparé pour toute bonne œuvre» (2 Tim. 2:21).

Le caractère des prophètes corrompus qui s’attaquaient insidieusement à Néhémie et faisaient ainsi la guerre au témoignage du Seigneur, ressemblait de manière frappante à celui de Balaam qui aima le salaire d’iniquité» (2 Pierre 2:15). Celui-ci, ne pouvant maudire le peuple, enseigna à Balak le moyen de le faire tomber sous le jugement de Dieu, en l’entraînant à la fornication, et il le fit afin d’obtenir du roi de Moab la récompense qu’il convoitait (Nombres 25 ; 1 Cor. 10:8 ; 2 Pierre 2:15 ; Jude 11 ; Apoc. 2:14). Il en était exactement de même des prophètes de Juda payés par l’ennemi pour chercher à ruiner le témoignage de Néhémie. Combien de serviteurs actifs Satan n’a-t-il pas également dans l’Église, même parmi ceux qui professent conduire le peuple de Dieu, et qui, pour des avantages matériels, honneurs, richesses, etc., corrompent les âmes et luttent contre le témoignage du Seigneur. Ceux qui sont surtout les objets de leur haine et de leur opposition sont les serviteurs fidèles qui cherchent à relever et à maintenir le mur de séparation que Dieu a établi au commencement entre les croyants et le monde. Ce sont des hommes qu’il faut laisser entre les mains du Seigneur, comme Jannès et Jambrès qui résistèrent à Moïse et furent atteints eux-mêmes par le jugement (2 Tim. 3:8, 9), «ils n’iront pas plus avant, car leur folie sera manifeste pour tous, comme a été celle de ceux-là aussi» (Id. v. 9).

En dépit de toutes ces attaques de l’adversaire, l’œuvre se poursuivit sans défaillance. La muraille fut achevée en cinquante-deux jours. Nous avons besoin de persévérer dans les bonnes œuvres, dans la prière, dans le service du Seigneur (1 Tim. 4:16 ; Col. 4:2 ; Act. 14:22 ; 2:46), malgré tous les obstacles dressés sur notre route. Caleb persévéra à suivre l’Éternel pendant les quarante années de la traversée du désert et durant toute la conquête du pays, et, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, sa force étant demeurée en son entier, il était prêt à combattre les Anakim et à prendre possession de Hébron (Jos. 14).

L’achèvement de ce grand travail dans un laps de temps aussi court (v. 15) parle hautement du zèle des ouvriers et de leur chef, et montre surtout combien Dieu honore et bénit la foi qui s’appuie sur lui et travaille sous sa dépendance. Lorsqu’il en est ainsi, l’ennemi est réduit au silence. C’est ce qui arriva alors, car les adversaires de Juda furent forcés de reconnaître leur défaite devant le déploiement de la grâce et de la puissance de Dieu qui avait opéré pour son peuple et avec lui (v. 16). Ils reconnurent le doigt de Dieu et firent remplis de crainte. Il en sera ainsi au jour de Christ, quand Dieu sera connu en Sion pour une haute retraite (Ps. 126:1, 2 ; 48:2-6).

Le chapitre se termine par le triste tableau des efforts de l’ennemi pour corrompre le beau témoignage que Dieu avait rétabli en Juda. Ne pouvant pénétrer du dehors, il cherche à s’insinuer dans la place, et trouve, hélas ! chez le peuple même que Dieu avait rassemblé dans le lieu de la bénédiction des instruments pour son œuvre de ruine.

Il en est de même aujourd’hui du faible témoignage que le Seigneur conserve pour son Nom et sa vérité au milieu de la ruine de l’Église. Satan se servait des nobles de Juda, que leur position et leur influence rendaient plus accessibles à ses suggestions, en vue d’amener des alliances avec les ennemis du dehors. Tobija l’Ammonite, auquel «plusieurs en Juda avait prêté serment» (v. 18), avait réussi à créer des liens très forts avec le peuple, «car il était gendre de Shecania, et Jokhanan, son fils, avait pris la fille de Meshullam, fils de Bérékia» (v. 18), deux membres influents de la congrégation d’Israël. Les mariages avec des Ammonites qui ne devaient pas entrer dans la congrégation de l’Éternel, même dans leur dixième génération (Deut. 23:3), étaient donc une désobéissance flagrante à la Parole.

Cette rébellion contre Dieu de la part de son peuple était un signe grave du déclin et lui enlevait tout discernement moral. Aussi, reniant leurs privilèges et leur position de mise à part du monde, les nobles de Juda entretenaient une correspondance suivie avec Tobija et rapportaient «ses bonnes actions» à Néhémie (v. 19), comme si du bien pouvait provenir de cette source corrompue qu’est l’homme déchu et éloigné de Dieu.

C’est ainsi que l’ennemi a toujours cherché à effacer toute distinction entre le monde et le peuple de Dieu, et à faire croire qu’il y a autant de bien chez les uns que chez les autres. Cette erreur profonde nie d’un côté le jugement de Dieu sur l’homme ruiné par le péché, et de l’autre l’opération de sa grâce, seule source du bien dans le pécheur en qui elle déploie son efficace. Toute la conduite de ceux que Tobija avait trouvés comme alliés en Juda prouvait qu’ils étaient sur le même terrain moral que lui, et n’avaient aucune idée de ce qui convenait à la sainteté de Dieu, selon qu’il est écrit : «La sainteté sied à ta maison, ô Éternel ! pour de longs jours» (Ps. 93:5). Aussi, n’est-il pas étonnant qu’avec de pareils associés, Tobija se permît d’envoyer des lettres à Néhémie pour l’effrayer (v. 19). Tel est le grand but de l’adversaire dans tous les temps, à l’égard de ceux qu’il ne peut corrompre.

Il n’y avait donc aucun repos pour cet homme de Dieu. Comme Paul plus tard, il rencontrait «au dehors des combats, au dedans des craintes» (2 Cor. 7:5) ; mais, comme lui, soutenu par le bras puissant du Seigneur, il demeura ferme «comme voyant celui qui est invisible» (Hébr. 11:27).

Puissions-nous, à notre tour, être «fermes, inébranlables, abondant toujours dans l’œuvre du Seigneur, sachant que notre travail n’est pas vain dans le Seigneur» (1 Cor. 15:58).

 

 

7                    Chapitre 7 — L’ordre rétabli dans la maison de Dieu

ME 1928

La muraille de la sainte cité ayant été complètement relevée et les portes solidement reconstruites, Jérusalem était de nouveau séparée des nations idolâtres qui l’entouraient. Désormais, cette mise à part du peuple de Dieu devait être maintenue par les mesures vigilantes prises pour tenir l’ennemi à distance. Il faut aussi que chaque habitant de la ville qui est appelée du nom de l’Éternel et sur laquelle ses yeux reposent continuellement, puisse revendiquer son droit à y demeurer. C’est ainsi qu’un ordre selon Dieu y devait être rétabli et que le peuple restauré dans ses privilèges devait être rendu attentif à sa responsabilité.

Ces faits parlent hautement à nos cœurs et à nos consciences dans le temps présent qui, à tant d’égards ressemble à celui de Néhémie. Dans le désordre actuel de l’Église, il importe que ceux qui ont à cœur le maintien de l’ordre et de la discipline parmi les deux ou trois réunis au nom du Seigneur, s’attachent fermement aux prescriptions de la Parole pour le jugement du mal dans l’Assemblée, car «la sainteté sied à la maison de l’Éternel pour de longs jours» (Ps. 93:5).

 

7.1   Trois classes de personnes

 

Il y avait trois classes de personnes dont les fonctions furent soigneusement établies par Néhémie : 1° les portiers, 2° les chantres, 3° les lévites (v .1). Les premiers étaient ceux qui avaient la surveillance des portes de la ville. Ils devaient exercer une vigilance constante, pour ne laisser pénétrer dans la cité aucun élément ennemi, contagieux ou criminel. Ils étaient chargés «de fermer les portes pendant la nuit et de ne pas les ouvrir avant que le soleil ne fût chaud» (v. 3), c’est-à-dire, que les ténèbres ne fussent complètement dissipées. Satan aime les ténèbres à la faveur desquelles il accomplit son travail destructeur. C’est pourquoi nous devons veiller et prier sans cesse dans la nuit qui nous entoure. Nous ne sommes pas dans les ténèbres, mais, au contraire, «des fils de la lumière et des fils du jour». Nous appartenons au jour glorieux qui va se lever quand le soleil de justice répandra ses rayons sur ce monde. Alors la nuit sera dissipée et fera place à la manifestation glorieuse de Celui que nous attendons du ciel. «Ainsi donc, ne dormons pas comme les autres, mais veillons et soyons sobres». Ressemblons aux soixante hommes forts qui entouraient le lit de Salomon : tous tenaient l’épée et étaient «exercés pour la guerre, ayant chacun son épée sur sa cuisse, à cause des frayeurs de la nuit». En attendant que le Roi paraisse dans sa gloire et sa puissance, nous sommes appelés à défendre ses droits et sa vérité attaqués pendant la nuit de son absence. Pour cela, nous avons besoin de rejeter «les œuvres des ténèbres et d’être revêtus des armes de la lumière».

Les portes devaient être fermées et barrées pour résister aux assauts de l’ennemi. Une porte insuffisamment verrouillée et non munie de barres n’est pas un obstacle à l’irruption des voleurs. Ceux-ci viennent «pour voler, et tuer, et détruire». Aussi devons-nous prendre garde aux diverses portes par lesquelles l’adversaire et le monde peuvent pénétrer dans nos cœurs et dans l’Assemblée. Il se peut que nous ayons jugé le monde dans son ensemble, lorsque nous avons été amenés à la connaissance du Seigneur et que, petit à petit, il reprenne son ascendant sur nous par les mille vanités qu’il présente à nos cœurs et qui, souvent, nous paraissent innocentes et sans danger pour nous. C’est pourquoi l’apôtre Jean nous dit : «N’aimez pas le monde, ni les choses qui sont dans le monde» (1 Jean 2:15).

 

7.1.1       Les portiers

 

L’office des portiers est très important aujourd’hui comme au temps de Néhémie. Il faut que ceux que Dieu a qualifiés pour être surveillants dans l’Assemblée conduisent soigneusement le troupeau et prennent garde, en particulier, à ce que les principes du monde ne s’introduisent pas au milieu des saints, soit par la réception anticipée à la table du Seigneur de personnes qui n’y appartiennent pas, soit par l’invasion du mal moral ou doctrinal (Actes 9:26, 27 ; 20:28, 29).

Chaque sentinelle devait être «à son poste» et chacun «devant sa maison» (Néh. 7:3). Tous les habitants de la ville, quel que fût le service particulier auquel ils étaient appelés, devaient veiller devant leurs maisons. Il est très important que tous les croyants comprennent aujourd’hui leur responsabilité à cet égard. Non seulement nous sommes appelés à ne pas oublier nos devoirs à l’égard de l’Assemblée, objet de la sollicitude constante du Seigneur, mais nous devons exercer une surveillance spéciale sur nos maisons, pour que le mal et la mondanité ne les envahissent pas. Il ne suffisait pas que Jérusalem fût entourée d’une muraille : il fallait encore une vigilance incessante de la part de chacun de ses habitants pour ne pas être surpris par l’ennemi. Quelque importante que soit la position de séparation de tout ce qui est en désaccord avec la gloire du Seigneur qui nous est enjointe par la Parole, ce n’est pas tout ce qui est nécessaire pour une marche fidèle au milieu de la ruine. Une mise à part intérieure de tout mal est requise de tous ceux qui invoquent son Nom : «Ne craignez pas leurs craintes et ne soyez pas troublés, mais sanctifiez le Seigneur, le Christ, dans vos cœurs». Pour cela, nous devons juger tout le mal qui s’y trouve, car le Seigneur ne peut s’y associer et, pour nous en délivrer, «Il a souffert une fois pour les péchés, le Juste pour les injustes, afin qu’il nous amenât à Dieu».

En contraste avec les mesures de vigilance ordonnées par le fidèle Néhémie pour la garde de la ville, nous pouvons remarquer que les portes de la sainte cité ne seront fermées ni jour ni nuit (Apoc. 21:25), car la sécurité de la céleste demeure des bienheureux rachetés sera parfaite et ne pourra plus être troublée par aucun ennemi, ni compromise par aucune souillure.

À la tête de ceux qui veillaient aux portes de la ville se trouvaient deux hommes de Dieu choisis par Néhémie pour ce poste important. Avec l’autorité dont il était investi par la confiance du roi et la sagesse qui était le fruit de sa marche pieuse et fidèle avec Dieu, il donne cette haute charge à des serviteurs qualifiés pour l’accomplir. C’est ainsi que nous voyons Paul s’adjoindre deux compagnons d’œuvre, Timothée et Tite, auxquels, en vertu de son autorité apostolique, il confère le droit de nommer des anciens dans les assemblées des nations.

Hanani, frère de Néhémie, avait montré son intérêt et sa sollicitude pour le peuple, en lui apportant à Suze des nouvelles des réchappés qui étaient tombés dans une grande misère et dans l’opprobre (Néh. 1:2). Un tel attachement à ce pauvre résidu cher au cœur de Dieu malgré sa ruine, qualifiait Hanani pour le service élevé qui lui était maintenant départi. Ayant été fidèle dans la sphère de son administration, il avait acquis un bon degré. Tel est encore le cas aujourd’hui de ceux qui accomplissent avec dévouement la tâche qui leur est confiée dans la maison de Dieu.

Le second de ces hommes établis à la tête de l’administration de la ville était Hanania, chef du château fort. Combien précieux est le témoignage qui lui est rendu par l’Esprit de Dieu ! C’était «un homme fidèle, et il craignait Dieu plus que beaucoup d’autres» (Néh. 7:2). Il avait eu, dans une sphère restreinte, l’occasion de manifester son attachement à Celui qu’il désirait servir fidèlement. Aussi un poste plus important peut-il lui être attribué comme à Hanani. Quel honneur pour ce fidèle témoin d’avoir marché dans un tel sentier, avec l’approbation de son Maître !

 

7.1.2       Les chantres

 

Outre les portiers, Néhémie avait établi des chantres. Si les portes sont bien gardées et le mal tenu à distance, ceux-ci peuvent accomplir leur service qui consiste à louer le Seigneur. Il est évident qu’aujourd’hui toute l’Assemblée est appelée à réaliser ce caractère. Nous sommes une sainte sacrificature, mise à part «pour offrir des sacrifices spirituels agréables à Dieu par Jésus-Christ» (1 Pierre 2:5). Si nous sommes séparés et purifiés du mal, nous pouvons, avec des cœurs heureux et remplis de reconnaissance, offrir sans cesse, par Christ, à Dieu notre Père, «un sacrifice de louanges», fruit de nos lèvres qui bénissent son Nom.

Dans un temps de réveil et de retour à l’ordre du peuple de Dieu. Néhémie rétablit dans leurs fonctions les chantres mis à part sous la royauté de David pour louer l’Éternel dans sa maison (1 Chron. 25). Après la longue nuit d’éloignement et de dispersion, durant laquelle les harpes du peuple captif avaient été suspendues aux saules de Babylone, il convenait à ceux que l’Éternel avait «rachetés de la main de l’oppresseur» et rassemblés autour de son sanctuaire, de célébrer sa bonté qui demeure à toujours.

Il en est de même pour nous aujourd’hui. Retirés des ténèbres et de la confusion d’une profession sans vie, ne devons-nous pas bénir sans cesse Celui qui nous a amenés dans sa merveilleuse lumière ? Les chantres, pris d’entre les Lévites, étaient «exempts d’autres fonctions, parce que, jour et nuit, ils étaient à l’œuvre» (1 Chron. 9:33). Au jour de la gloire du royaume millénaire, la création tout entière partagera la joie du peuple racheté.

Pourquoi y a-t-il si peu d’actions de grâces dans nos rassemblements aujourd’hui ? Pourquoi n’entend-on pas retentir des cantiques, à la gloire de Celui qui nous aime, dans les demeures des rachetés ? Cela ne provient-il pas, en grande partie, de notre manque de vigilance pour tenir les portes de nos maisons et de l’Assemblée fermées à l’ennemi ?

Lorsque, sous le règne d’Ézéchias, la Parole de Dieu avait retrouvé son autorité en Israël et que le peuple réveillé de sa torpeur s’était rassemblé à Jérusalem pour célébrer la Pâque et la fête des pains sans levain, nous lisons trois fois qu’il y eut de la joie pour ceux qui répondirent à l’appel de Dieu (2 Chron. 30:21, 23, 26).

 

7.1.3       Lévites

 

Le troisième service rétabli par Néhémie était celui des Lévites qui avaient été mis à part pour le tabernacle, «jusqu’à ce que Salomon eût bâti la maison de l’Éternel à Jérusalem». Ils avaient été appelés selon l’ordre de David, à l’œuvre depuis l’âge de vingt ans (1 Chron. 23:27). Ils n’avaient plus à porter le tabernacle, comme ils l’avaient fait dans le désert, puisque l’Éternel avait «donné du repos à son peuple» (1 Chron. 23:25). Leur service était essentiellement celui de la louange, comme le sera celui de tous les saints quand nous aurons atteint la perfection, le voyage de l’Église à travers le désert étant terminé : «Bienheureux ceux qui habitent dans ta maison ; ils te loueront sans cesse». En attendant, comme les lévites, nous avons le privilège de servir le Seigneur ici-bas. «Si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé ; et il entrera, et il sortira, et il trouvera de la pâture» (Jean 10:9). Ayant obtenu le salut, en entendant la voix du bon Berger, nous avons la liberté d’entrer dans la présence de Dieu pour l’adorer et de sortir dans le monde pour le service auquel Il nous appelle. L’Esprit de Dieu est la puissance de notre culte, il est en nous comme «une fontaine d’eau jaillissant en vie éternelle».

Qu’il s’agisse des chantres ou des lévites, leur activité ne pouvait être bénie que si celle des portiers était accomplie avec vigilance. Répétons encore que le service de la louange et toute autre forme d’activité pour le Seigneur ici-bas ne peuvent être réalisées d’une manière qui soit à sa gloire que si les portes de nos cœurs et celles de l’Assemblée sont bien fermées à l’ennemi. Alors la puissance de l’Esprit de Dieu agira sans entrave pour la gloire du Seigneur et la bénédiction des âmes : «Celui qui sacrifie la louange me glorifie ; et à celui qui règle sa voie, je ferai voir le salut de Dieu».

 

7.2   Habiter à Jérusalem

 

La ville était spacieuse, mais les maisons bâties et habitées peu nombreuses (Néh. 7:4). Il y avait, à cet état de choses pénible et humiliant, deux raisons qui étaient propres à exercer la foi des chefs du peuple. Beaucoup d’Israélites préféraient leurs aises au milieu des nations au chemin de renoncement dans lequel les conduisait l’appel de Dieu, qui aurait dû les pousser à quitter le pays de l’exil pour rentrer dans la terre de Canaan. Puis, parmi ceux qui avaient répondu à la proclamation de Cyrus et étaient rentrés en Juda, il y en avait peu qui eussent assez d’affection pour la cité sainte pour abandonner leurs champs et leurs vignes et venir y habiter, afin de grossir le nombre de ses défenseurs. Il fallait pour cela une intelligence des pensées de Dieu et un attachement à ses intérêts et à son témoignage qui n’étaient pas la part de tous. Nous verrons plus tard que, par une grâce spéciale, un certain nombre se levèrent et consentirent à sacrifier leurs aises pour prendre place parmi les gardiens de la ville chère au cœur de Dieu (Néh. 11:1-2).

Il y a aussi aujourd’hui de la bénédiction dans le témoignage du Seigneur, mais un grand nombre de croyants préfèrent demeurer associés au monde religieux ; pour échapper à l’opprobre de Christ, ils refusent de sortir hors du camp et se privent ainsi de la joie de son approbation intime. À la veille du jour où nous verrons face à face notre Seigneur glorieux, puissions-nous discerner sa volonté et nous ranger sous sa bannière avec des cœurs non partagés. À l’heure où David allait monter sur le trône, les vaillants hommes d’Issacar comprenaient «ce que devait faire Israël». Qu’est-ce qui convenait à ceux qui entraient dans les pensées de Dieu, sinon de se placer du côté de son oint méprisé et de défendre sa cause ?

 

7.3   Généalogies

 

Maintenant l’attention de Néhémie est portée sur un autre objet. Il éprouve le besoin de faire rechercher la généalogie de chaque membre de la congrégation. Il dit : «Mon Dieu me mit au cœur de rassembler les nobles et les chefs» (Néh. 7:5). Il réalisait sa relation avec Dieu, dans une communion intime avec lui. Le Dieu auquel il appartenait, avec lequel il marchait et dont il entendait la voix lui trace le chemin à suivre. Plus tard Paul en prison pouvait dire : «Mon Dieu suppléera à tous vos besoins selon ses richesses en gloire par le Christ Jésus» (Phil. 4:19).

Il est frappant de voir combien tous les hommes de Dieu ont été caractérisés par une étroite dépendance de lui, dans le chemin de la foi. Nous apprenons ainsi à connaître la piété de Néhémie et le secret de son énergie. Il voulait s’assurer que tous ceux qui habitaient Jérusalem étaient bien des descendants d’Abraham et avaient, par conséquent, droit de cité dans la ville sur laquelle le nom de l’Éternel était invoqué et où son témoignage avait été restauré.

Le réveil opéré par l’Esprit de Dieu au siècle passé produisit des effets semblables à ceux que nous remarquons ici et dans le livre d’Esdras. Les fidèles que Dieu avait séparés du monde pour aller à la rencontre de l’Époux éprouvaient le besoin de s’assurer que tous ceux qui désiraient se joindre à eux pour participer aux privilèges de l’Assemblée pouvaient prouver leur descendance, c’est-à-dire leur qualité d’enfants de Dieu, par la confession du nom du Seigneur Jésus.

L’action puissante de l’Esprit de Dieu eut pour effet de rappeler aux saints leur appel céleste et de les séparer du présent siècle. Ils comprirent que ceux qui possédaient leur commune foi pouvaient seuls être reconnus comme faisant partie de l’Assemblée de Dieu ici-bas et être reçus à la table du Seigneur. Comme au temps d’Esdras, il y en eut alors qui ne purent pas prouver leur généalogie et ne purent avoir part aux fonctions de la sacrificature (Esdras 2:62). Le Seigneur connaît ceux qui sont siens et, à sa venue, aucun membre du corps dont Il est la Tête glorifiée ne sera laissé en arrière. Tous seront introduits dans la joie de sa présence. Toutefois, pour son témoignage ici-bas, il est indispensable que les fruits de la vie divine soient clairement manifestés chez ceux qui en font partie et qu’ainsi leur «généalogie», c’est-à-dire leur qualité d’enfants de Dieu, ne puisse être mise en doute : «Si vous savez qu’il est juste, sachez que quiconque pratique la justice est né de lui». «Nous, nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons les frères» (1 Jean 2:29 ; 3:14). Ajoutons encore que si nous sommes souvent incapables de discerner les croyants d’avec le monde, le Seigneur ne se trompe pas à l’égard de tous ceux qui lui appartiennent. Il prend soin d’eux tous et saura les dégager des liens qui les retiennent et les amener à une parfaite conformité avec lui en gloire.

La nomenclature détaillée de tous ceux qui étaient remontés de la captivité de Babylone, que nous donne l’Esprit de Dieu dans ce chapitre, pourrait paraître fastidieuse et inutile. Elle nous enseigne, au contraire, de précieuses leçons. Les annales de ce monde nous présentent les noms de ceux qui ont accompli des actions d’éclat et ont brillé parmi leurs semblables. Pour avoir une place dans le registre divin, il faut d’autres qualifications que celles-là. Ceux qui avaient été réveillés par l’appel du Tout-Puissant et avaient eu à cœur de retourner au pays de la promesse, méritaient seuls de figurer dans cette liste généalogique, qui montrait l’intérêt et la sollicitude dont ils étaient les objets de sa part. Il y a ici sept classes de personnes : 1° les hommes du peuple d’Israël (v. 7) ; 2° les sacrificateurs (v. 39) ; 3° les lévites (v. 43) ; 4° les chantres (v. 44) ; 5° les portiers (v. 45) ; 6° les Néthiniens (v. 46) ; 7° les fils des serviteurs de Salomon (v. 57). Les Néthiniens, dont le nom signifie donné ou consacré, étaient des serviteurs des Lévites, occupant une place subalterne. Les Gabaonites en faisaient partie, étant «coupeurs de bois et puiseurs d’eau pour la maison de Dieu» (Jos. 9:23), ainsi qu’une partie des Madianites qui avaient été épargnés du jugement (Nomb. 31:47). Les serviteurs de Salomon étaient les descendants des nations cananéennes qu’il «assujettit aux levées pour servir jusqu’à ce jour» (1 Rois 9:21). Il est touchant de remarquer que ces deux classes de personnes que nous trouvons associées au peuple de Dieu dans un jour de réveil et de puissance étaient étrangères à la race d’Abraham. Objets de la souveraine grâce de Dieu, nous les trouvons avec d’autres monuments de ses compassions, dont l’Ancien Testament nous donne l’histoire, dans l’enceinte de la bénédiction dont la loi leur fermait l’accès. C’est ainsi que dès le commencement de ses voies envers l’homme coupable et perdu, Dieu montre que sa «miséricorde se glorifie vis-à-vis du jugement» (Jacq. 2:13).

Si, d’une part, Néhémie devait veiller à ce que la séparation du peuple de Dieu d’avec les nations fût rigoureusement maintenue, il reconnaissait les droits de la grâce qui pouvait appeler des étrangers à faire partie de ceux que Dieu avait mis à part pour les bénir. Tel fut le cas de Rahab la prostituée de Jéricho, de Ruth la Moabite et de tant d’autres tisons arrachés du feu qui exalteront un jour Celui qui les a lavés dans son sang.

Quant à ceux qui ne trouvèrent pas leur inscription généalogique, ils furent exclus de la sacrificature (v. 64). Le gouverneur leur dit «qu’ils ne devaient pas manger des choses saintes, jusqu’à ce que fût suscité le sacrificateur avec les urim et les thummim» (v. 65). Néhémie comprenait que, quelque profond que fût l’intérêt que Dieu prenait à cette restauration de son peuple, Il ne pouvait pas s’identifier publiquement avec lui en rétablissant la gloire et l’ordre du royaume. C’était une œuvre incomplète, entachée d’imperfection ; aussi le conducteur du peuple ne voulait pas trancher la difficulté relative à ceux dont la descendance était incertaine. Il en laissait le règlement pour le jour où sera suscité le glorieux sacrificateur, ayant la lumière (urim) et les perfections (thummim) divines. Dans ce jour qui approche rapidement, la royauté et la sacrificature seront réunis dans une seule Personne, l’Homme autrefois abaissé. Il placera sous son sceptre l’univers entier et aura la domination sur toutes choses, comme le vrai Melchisédec, sacrificateur du Dieu Très-haut, Roi de justice et Roi de paix.

En attendant ce matin sans nuages, soyons comme ce résidu pauvre et affligé qui n’avait pas la prétention de rétablir un ordre de choses ruiné, mais s’attachait à la Parole de Dieu, seul guide de la foi dans tous les âges, et réalisait une séparation absolue des nations plongées dans les ténèbres. Ressemblons à ces humbles serviteurs du sanctuaire qui, quoique indignes d’un tel privilège, s’étaient attachés de cœur aux intérêts de Celui qui les avait associés à sa demeure et étaient heureux de prendre le chemin du combat et de la souffrance avec les fils d’Israël remontés de la captivité de Babylone : «Si quelqu’un me sert, qu’il me suive ; et où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur : si quelqu’un me sert, le Père l’honorera» (Jean 12:26).

 

8                    Chapitre 8:1-12 — La joie de l’Éternel est votre force

ME 1925 p. 17-28

Ce livre nous présente le tableau du rétablissement de l’ordre selon Dieu parmi ceux qui étaient remontés de la captivité de Babylone à Jérusalem. Non seulement le temple de l’Éternel avait été rebâti, mais les divers services assignés aux membres de la congrégation d’Israël selon les ordonnances lévitiques avaient repris leur cours et l’état civil du peuple était remis en ordre (chap. 7). Nous trouvons ensuite une œuvre plus profonde opérée dans les âmes, à savoir le retour à l’obéissance à la Parole et le rétablissement de son autorité sur les consciences et les cœurs. L’effet puissant de cette Parole nous est présenté dans notre chapitre. Sous son action bénie, le peuple est rassemblé «comme un seul homme» à Jérusalem, «le premier jour du septième mois» (v. 1-2).

Selon l’ordonnance de l’Éternel, ce jour était mis à part pour être une fête solennelle, un jour de repos, «un mémorial de jubilation, une sainte convocation» (Lév. 23:23-24). Les trompettes d’argent, symbole de la rédemption sur laquelle étaient fondées les relations du peuple avec Dieu, devaient retentir (Nomb. 10:10) pour rappeler à Israël qu’il appartenait à Celui qui l’avait délivré du jugement et de l’esclavage de l’Égypte. Dans l’ordre des voies prophétiques de Dieu avec son peuple terrestre, cette fête typifie la reprise de ses relations avec le Résidu, après l’enlèvement des saints célestes. La fête de la Pentecôte qui précédait celle des trompettes (Lév. 23:15-22) nous présente en type la dispensation actuelle qui va se terminer par la venue du Seigneur et notre rassemblement auprès de Lui ; puis Dieu s’occupera de nouveau de la terre et préparera un peuple de franche volonté pour le jour prochain de la manifestation glorieuse de son Roi (Ps. 110:3).

«Sonnez de la trompette à la nouvelle lune, au temps fixé, au jour de notre fête» (Psaume 81:3). La lune, recommençant à donner sa faible lumière, symbolise Israël comme témoin de Dieu ici-bas, que la grâce rappellera après ces longs siècles de ténèbres et de sommeil ; Israël qui, dans le Résidu fidèle que Dieu suscitera, reprendra sa place comme centre et objet de ses voies gouvernementales et témoin de sa gloire sur la terre. En ce premier jour du septième mois, le peuple devait donc se rassembler et pousser «des cris de joie vers le Dieu de Jacob» (Id. v. 1). Il en sera ainsi «à la fin des jours», lorsque «les fils d’Israël se tourneront avec crainte vers l’Éternel et vers sa bonté» (Osée 3:5). Les trompettes d’argent symbolisent cet appel puissant de l’Esprit de Dieu qui les réveillera de leur sommeil et les amènera à pousser un cri vers Celui qu’ils ont méconnu si longtemps en lui rappelant ses promesses : «Dans leur détresse, ils me chercheront dès le matin» (Osée 5:15).

Dans ce rassemblement du Résidu au temps de Néhémie, nous avons donc une image du retour du peuple à Dieu à la fin de son histoire de rébellion et de jugement. Dans sa vieillesse toute blanche, il reprendra comme Naomi et Ruth, le chemin de Bethléhem pour y rencontrer son puissant Rédempteur, le vrai Boaz, en qui se trouve la force pour restaurer et bénir cette maison ruinée.

Nous ne savons pas si dans la circonstance qui nous occupe, les trompettes furent sonnées selon l’ordonnance ; dans un jour de ruine la grande question pour le peuple de Dieu n’est pas tant le rétablissement d’un ordre extérieur, mais le jugement du mal et l’obéissance à la Parole. Nous ne voudrions pas diminuer l’importance d’un attachement strict aux Écritures dans tous les détails du culte et du service du peuple de Dieu, mais rappeler que si, par notre faute, nous avons perdu certaines bénédictions du commencement, la présence du Seigneur et l’action du Saint Esprit ne feront pas défaut à ceux qui s’attachent étroitement à la Parole : «La parole et mon Esprit demeurent avec vous ; ne craignez pas» (Aggée. 2:5).

Ce qui nous frappe dans la circonstance qui nous occupe, c’est l’unité du peuple, réalisée pratiquement par l’opération puissante de la grâce qui amenait tous les membres de la congrégation d’Israël à la même pensée et au même but, tous n’étant qu’un cœur et qu’une âme pour rechercher la pensée de Dieu et s’humilier ensemble devant Lui. La Parole avait retrouvé son autorité sur les consciences, et c’était pour lui obéir que tous se réunirent «comme un seul homme», au lieu qu’Il avait choisi pour y faire demeurer son Nom, selon l’ordonnance établie pour ce jour-là. Un tel rassemblement nous présente une illustration frappante de ce qu’est pour nous «l’unité de l’Esprit» (Éph. 4:3) dans sa réalisation pratique, unité que nous sommes appelés à garder dans un jour de ruine, aussi bien qu’aux temps les plus prospères de l’histoire de l’Église. Il n’est pas nécessaire pour cela que tous les membres du corps de Christ vivant au même moment sur la terre soient rassemblés sur le terrain de l’unité du corps dans l’obéissance à la Parole, quelque désirable que soit un tel rassemblement. Ce n’étaient pas tous les descendants d’Israël qui se trouvaient réunis à Jérusalem au temps de Néhémie, mais seulement un petit Résidu formant une infime minorité de ce peuple. Toutefois ces quelques-uns que Dieu avait réveillés et ramenés sur le terrain de l’obéissance à la Parole, exprimaient, par leur rassemblement dans la présence de l’Éternel, en un jour fixé par lui comme un «jour solennel» et une «sainte convocation», l’unité de tout le peuple. Il en est ainsi aujourd’hui de «ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur» et poursuivent ensemble «la justice, la foi, l’amour, la paix» (2 Tim. 2:22). Ils réalisent la présence du Seigneur avec eux, en étant rassemblés en son Nom et expriment à sa table la vérité bénie de l’unité du corps (1 Cor. 10:17). Ce n’est pas un lien extérieur, une entente humaine, une association charnelle qui les unissent, mais le travail de l’Esprit de Dieu dans tous les cœurs, par lequel ils ont été ramenés sur le terrain de la bénédiction et du témoignage.

Fait remarquable, lorsque le peuple a faim et soif de la Parole, c’est au ministère d’Esdras qu’il a recours (v. 1). Jusque-là, celui-ci n’avait pas reparu sur la scène, et il semble que son ministère fidèle avait été oublié, mais, lorsque Dieu réveille des besoins dans les cœurs, c’est à ce serviteur attaché à la Parole et nourri de ses enseignements qu’incombe le privilège de conduire le peuple dans la voie de l’obéissance, en replaçant devant lui les enseignements méconnus du saint Livre. Dans tous les temps, avec le réveil produit dans les cœurs, Dieu suscite les instruments nécessaires pour enseigner les âmes en mettant en évidence les vérités de sa Parole qui avaient été oubliées ou perdues depuis longtemps. Il en fut ainsi lors du réveil puissant de la Réforme et, dans le siècle passé, de celui par lequel l’Esprit Saint rappela à l’Église son appel, sa position et son espérance célestes.

«Esdras apporta la loi devant la congrégation des hommes et des femmes, et devant tous ceux qui avaient de l’intelligence» (v. 2). Les enfants depuis l’âge de raison sont associés à leurs parents en ce jour solennel de rassemblement dans la présence de Dieu. Il est touchant de voir la place qu’ils occupent dans toute l’histoire d’Israël. Ils devaient être instruits soigneusement à l’égard de toutes les ordonnances de l’Éternel et ils participaient à toutes les bénédictions de ce peuple qu’Il avait sorti à main forte et à bras étendu de l’esclavage d’Égypte (Ex. 10:8-11 ; 13:14 ; Deut. 1:39 ; 4:9 ; 11:18, 19 ; 32:46, etc.). C’est ainsi qu’aujourd’hui encore, nous avons le privilège d’amener nos enfants au Seigneur, en les introduisant dans la maison où son autorité est reconnue, et en les élevant sous sa discipline et ses avertissements (Éph. 6:1-3).

Tous les membres de la congrégation étaient réunis autour d’Esdras avec une même soif d’entendre la Parole de Dieu. C’est ainsi qu’après de longues périodes de sécheresse spirituelle, celle-ci apporte aux âmes altérées le rafraîchissement et la nourriture dont elles ont besoin. Pendant six heures consécutives, Esdras lut dans le livre de la loi. Si grand était le besoin d’entendre cette bonne Parole que cette longue réunion ne paraissait pas fatigante à ce nombreux auditoire. Esdras était entouré d’autres serviteurs fidèles, suscités par Dieu pour lui venir en aide dans sa tâche (v. 4-5). «Quand il ouvrit le livre, tout le peuple se tint debout» (v. 5). Cette attitude indique le profond respect pour Dieu et sa parole produit par l’Esprit dans les cœurs, et le fait que ce détail nous a été rapporté prouve combien cette attitude lui était agréable et doit nous servir d’exemple. Il bénit le grand Dieu des cieux et tout le peuple répondit : Amen ! en se prosternant. La louange retrouvée est un des fruits du réveil et caractérise le témoignage du Résidu fidèle de Philadelphie à la fin de l’histoire de l’Église. Si Esdras bénit ou loue «l’Éternel, le grand Dieu», il n’est pas seul dans cette adoration. Tout le peuple s’incline et se prosterne devant l’Éternel, le visage contre terre (v. 6). Tous les cœurs sont pénétrés du sentiment de la grandeur et de la gloire de ce Dieu tout-puissant qui avait racheté et rassemblé les descendants d’Abraham et qui, malgré la rébellion et la chute qui les avaient caractérisés, s’était souvenu de ses promesses faites aux pères et leur avait accordé la joie de se retrouver dans sa présence à Jérusalem. L’attitude d’humiliation profonde qu’ils prennent en se prosternant le visage contre terre devant lui les préparait à recevoir la Parole qu’il leur adressait par la bouche de ses messagers. Autant cette Parole est méprisée dans les jours de relâchement, autant elle devient précieuse à ceux qui sont réveillés par l’action puissante de son Esprit.

Les lévites qui étaient les serviteurs du sanctuaire, en communion avec les pensées de Dieu, «faisaient comprendre la loi au peuple» (v. 7). Cela était d’autant plus nécessaire que beaucoup de Juifs ayant longtemps vécu sur la terre étrangère avaient adopté la langue de Babylone et oublié celle de leurs pères. C’est ainsi que, par le mélange avec le monde, bien des enfants de Dieu ont perdu l’intelligence de la Parole qui est pour eux un livre presque fermé. Heureux sont ceux qui, comme ce pauvre Résidu juif, ont soif de l’entendre et, profitant des ressources que Dieu a mises à la portée de tous dans ces derniers jours, apprécient le ministère oral et écrit donné par l’Esprit, et se laissent juger et enseigner par les vérités placées devant eux ! Nous ne saurions apprécier trop hautement l’importance du service de la Parole dans l’assemblée. «L’onction nous enseigne» (1 Jean 2:37) la Vérité, mais un des principaux moyens employés par l’Esprit dans ce but est le ministère, c’est-à-dire que, par les instruments qu’il a donnés pour cela, il place devant nous les vérités de la Parole et nous en donne le sens, comme le faisaient les lévites qui assistaient Esdras (v. 8), faisant ainsi ressortir les beautés et les profondeurs de la révélation divine.

Nous trouvons ensuite l’effet puissant produit par la Parole sur les cœurs et les consciences du peuple de Dieu. Tout cet auditoire était «devant Dieu» (Actes 10:33), pour entendre ce qu’il avait à lui dire par le moyen de ses serviteurs. Il arrive souvent qu’on est beaucoup plus occupé de l’instrument que de Celui qui s’en sert. On pourra alors dire qu’on a entendu une bonne prédication ou un beau sermon, mais si, par le moyen de la Parole, l’âme a été amenée dans la présence de Dieu, cette Parole agit comme une épée qui transperce la conscience et la rend capable de juger son état dans la lumière où toutes choses sont nues et découvertes. C’est ainsi qu’est produite la conviction de péché et que le jugement de soi-même s’opère sous l’action de l’Esprit. C’est ce qui avait eu lieu à Corinthe par le moyen du message de l’Évangile apporté par l’apôtre Paul. Aussi peut-il leur dire : «Vous avez été lavés, sanctifiés, justifiés» (1 Cor. 6:11). Dans l’ordre des opérations divines, il y a d’abord ce lavage, effectué dans l’âme par le moyen de la Parole, qui l’amène au jugement du mal, la sépare de toute iniquité, lui communique par l’Esprit une nouvelle vie, produisant ainsi la repentance à salut et la réception du témoignage quant à l’œuvre de Christ, par laquelle le pécheur croyant est justifié devant Dieu.

Tout le peuple pleurait en entendant les paroles de la loi. Les larmes qu’il versait dans la présence de Dieu étaient le fruit de l’action de l’Esprit dans les cœurs qui les amenait à un jugement profond de leurs voies d’infidélité et de la ruine du témoignage confié à leur responsabilité. Ces larmes étaient précieuses pour le cœur de Celui qui a dit : «C’est à celui-ci que je regarderai : à l’affligé et à celui qui a l’esprit contrit et qui tremble à ma parole» (És. 66:2), et encore : «J’habite le lieu haut élevé et saint, et avec celui qui est abattu et d’un esprit contrit» (És. 57:15). «Les sacrifices de Dieu sont un esprit brisé. Ô Dieu ! tu ne mépriseras pas un cœur brisé et humilié» (Ps. 51:17). Toutefois le caractère de la fête solennelle que l’Éternel avait instituée en ce premier jour du septième mois ne devait pas être perdu de vue par ceux qui avaient été rassemblés par sa miséricorde à Jérusalem ce jour-là. C’était un jour d’allégresse et de louange auquel s’appliquait cette parole du psalmiste : «Chantez joyeusement à Dieu, notre force ; poussez des cris de joie vers le Dieu de Jacob» (Ps. 81:1-3). Le moment allait venir où le peuple pourrait s’humilier devant lui en confessant ses péchés, mais il ne fallait pas dénaturer l’ordonnance divine relativement à ce premier jour. Aussi, les chefs en communion avec les pensées de Dieu à ce sujet, font-ils taire les assistants, en leur disant : «Ce jour est saint à l’Éternel votre Dieu ; ne menez pas deuil et ne pleurez pas» (v. 9). Il convenait que, dans un jour qui rappelait d’une manière bénie la fidélité de l’Éternel à ses promesses et la relation immuable de son peuple avec lui-même, ce dernier entrât par la foi dans les pensées de grâce de l’Éternel à son égard et se fortifiât par la jouissance de son amour envers lui : «Ne vous affligez pas, car la joie de l’Éternel est votre force» (v. 10). La joie de l’Éternel est celle que trouve en Lui son peuple racheté et rassemblé en sa présence. Telle est pour nous aussi, la source et le secret de la force pour le témoignage et le service auxquels il nous appelle. L’âme qui entre dans ses pensées peut manger les mets délicieux de sa table et se désaltérer à la source des eaux vives. Lorsqu’elle a été abondamment assurée des biens de la maison de Dieu et abreuvée «au fleuve de ses délices» (Ps. 36:8), elle peut envoyer «des portions à ceux qui n’ont rien de préparé» (v. 10). C’est aussi ce que nous dit le Seigneur : «Celui qui croit en moi, selon ce qu’a dit l’Écriture, des fleuves d’eau vive couleront de son ventre» (Jean 7:38). Un service dans la puissance du Saint-Esprit (v. 39), et découlant de la jouissance de la communion du Seigneur, sera heureux, béni et prospère. Ces fleuves d’eau vive apportent le rafraîchissement aux âmes altérées dans un désert aride : «L’amour du Christ nous étreint» (2 Cor. 5:14). Le cœur qui jouit de cet amour éprouve le besoin de le faire connaître et de faire part à d’autres de la joie qu’il a trouvée dans cette révélation du cœur de Dieu pour lui. Jésus seul peut satisfaire les besoins d’une âme immortelle et étancher la soif de bonheur qui la dévore. Ce n’est pas encore la gloire du royaume que le Seigneur donne à ceux qui le reçoivent par la foi, mais une paix, une joie qui remplissent et satisfont toutes les aspirations de leurs cœurs et les rendent capables d’être des canaux de bénédiction pour d’autres. C’est ainsi qu’après avoir offert à Dieu notre Père «des sacrifices spirituels» qui lui sont agréables par Jésus Christ (1 Pierre 2:5), nous pouvons, comme «une sacrificature royale» (v. 9), communiquer aux âmes altérées ces richesses de grâce et d’amour qui ont rafraîchi nos propres entrailles. Le Seigneur ne dit pas que les fleuves d’eau vive découleront de notre tête, siège de l’intelligence, car la connaissance de sa Personne n’est pas du domaine de l’intelligence, mais de nos entrailles qui expriment ce qu’il y a de plus intime et de plus sensible dans les affections de notre être renouvelé.

Le caractère de la fête des trompettes nous rappelle celui du rassemblement du premier jour de la semaine. De même que la tristesse et les larmes ne convenaient pas à ce saint jour, consacré à la joie et à la louange, ainsi le culte que nous rendons à notre Dieu et Père dans le jour du Seigneur ne doit pas être transformé en réunion de prières et d’humiliation. Si nous sommes occupés de la glorieuse Personne de notre Seigneur et de sa victoire sur la mort et son prince, nous pourrons entrer, à travers le voile déchiré, dans le sanctuaire pour lui offrir la louange qui le glorifie, «c’est-à-dire le fruit de nos lèvres qui bénissent son nom» (Hébr. 13:15).

Instruit par ses conducteurs, le peuple fut amené à une plus juste appréciation du caractère de ce jour de bénédiction. Étant entré davantage dans les pensées du cœur de Dieu à son sujet, il put se réjouir en sa présence, envoyer des portions à ceux qui n’avaient pas participé à la fête et «faire de grandes réjouissances» (v. 12). Cette joie et cette communion avec Dieu, et les uns avec les autres, découlaient de l’intelligence qu’ils avaient reçue des «paroles qu’on leur avait fait connaître». Il en est encore ainsi aujourd’hui. Lorsque nous recevons par la foi la Parole de Dieu qui nous révèle la Personne et l’œuvre de Christ, sa mort, sa victoire, la place qu’Il occupe à la droite de Dieu, notre union avec lui dans la gloire, notre appel et notre espérance célestes, tout autre objet disparaît, et nous pouvons nous réjouir dans le Seigneur. La joie est notre force pour le témoignage que nous avons à lui rendre ici-bas. Puissions-nous le réaliser dans une plus grande mesure, en attendant de le voir face à face. Qu’Il nous donne d’être «fortifiés en toute force selon la puissance de sa gloire, pour toute patience et constance avec joie» (Col. 1:11).

 

 

9                    Chapitre 9    Confession et louange

ME 1932 p. 222, 249, 268

9.1   Confession, humiliation, séparation du mal et louange

La fête des tabernacles, dont le chapitre précédent nous donne le récit étant achevée, les enfants d’Israël se rassemblent de nouveau, mais leur but en se réunissant avait un caractère tout autre que celui des jours précédents. L’étude de la Parole à laquelle ils s’étaient appliqués avait eu ses effets salutaires et bénis. Par son moyen, ils avaient été amenés en la présence de Celui aux yeux duquel toutes choses sont nues et découvertes. Dans sa lumière, ils jugent maintenant leurs voies passées ; ils ont horreur d’eux-mêmes et passent condamnation sur toute leur histoire de péché et de rebellion et en mènent deuil, en la présence de Celui qui sonde les cœurs et les reins. Cette œuvre bénie de repentance et de confession de leurs péchés nous présente un tableau anticipé de celle que l’Esprit de Dieu accomplira, au temps de la fin, dans le cœur et la conscience du résidu pieux afin que «tout Israël» soit sauvé (Rom. 11:26). Ce travail de grâce, plus profond et merveilleux que celui dont nous trouvons ici l’histoire, amènera ceux qui en seront les objets à juger le péché culminant de leur histoire, le rejet et la crucifixion de leur Messie, et le mépris dont sa grâce et son pardon furent l’objet de leur part pendant les longs siècles de la patience de Dieu. Ils diront alors, dans une profonde repentance : «Nous l’avons estimé battu, frappé de Dieu et affligé ; mais il a été blessé pour nos transgressions, il a été meurtri pour nos iniquités ; le châtiment de notre paix a été sur lui et par ses meurtrissures nous sommes guéris» (Zach. 12:10-14 ; És. 53:4, 5).

«Les fils d’Israël s’assemblèrent avec jeûne» (v. 1). Ils éprouvent le besoin de chercher, dans l’humiliation et le deuil la présence du Dieu qu’ils ont offensé. Le jeûne est l’indice du renoncement de soi-même et de l’oubli des besoins du corps pour être entièrement occupé des intérêts et de la gloire de Dieu. Celui qui le réalise en vérité exprime ainsi son désir d’être dans un état spirituel qui réponde aux pensées de Dieu afin qu’Il puisse répandre ses bénédictions sur ceux qui s’humilient devant lui. La douleur et la honte qui remplissaient les cœurs de ces fidèles les poussent à se trouver ensemble «vêtus de sacs et avec de la terre sur eux» (v. 1). Tels sont les fruits puissants de l’opération du Saint Esprit dans les cœurs pour produire «la vérité dans l’homme intérieur» et cet état d’un cœur «brisé et humilié» que Dieu ne méprisera pas (Ps. 51:6, 17). Si une joie et une bénédiction communes les avaient poussés à se rassembler «comme un seul homme» (Néh. 8:1) précédemment, c’est maintenant sous l’empire d’une douleur et d’une humiliation générales qu’ils le font avec le même empressement. Dans les deux circonstances, ils étaient sous la direction de l’Esprit. Aussi, quelque différents de caractère que fussent ces deux rassemblements, ils étaient l’un et l’autre agréables au cœur de Dieu, étant également la manifestation de l’unité de l’Esprit.

N’avons-nous pas d’importantes leçons à recueillir de ces faits de l’histoire de l’ancien peuple de Dieu, que nous a conservés la Parole ? Ne devons-nous pas, «nous que les fins des siècles ont atteints», dans un jour de ruine profonde, prendre l’attitude de ces témoins d’autrefois ? Sous la direction du Saint Esprit qui habite dans l’Assemblée et dans chacun de ceux qui la composent, nous pouvons en effet réaliser, quoique dans une extrême faiblesse, le rassemblement de nous mêmes, soit pour mener deuil d’un même cœur au sujet de nos infidélités et de notre ruine, devant Celui que nous avons si gravement déshonoré, soit pour nous réjouir en sa présence, et le célébrer pour la manifestation merveilleuse qu’Il nous a donnée de lui-même et les bénédictions qui découlent pour nous de son œuvre de rédemption accomplie à la croix.

Nous trouvons ensuite un fait d’une grande portée pratique : «Et la race (ou semence) d’Israël se sépara de tous les fils de l’étranger» (v. 2). L’expression «semence» est importante à considérer ici. Elle est employée par l’Esprit en différents passages de la Parole pour désigner la famille de Dieu (1 Jean 3:9), en contraste avec le monde incrédule qui est sans relation avec lui et qui est appelé la semence du méchant. La descendance morale du serpent est appelée par Dieu sa semence. Son caractère de haine et d’opposition contre la semence de la femme, c’est-à-dire contre Celui qui devait naître d’elle et briser la tête du serpent, est annoncé en ces termes : «Je mettrai inimitié entre toi et la femme et entre ta semence et sa semence» (Gen. 3:15). Les «enfants du diable» participent à son caractère et font ses œuvres. Il est menteur et meurtrier ; sa famille a manifesté qu’elle tirait de lui son origine, en mettant à mort le Fils de Dieu venu en grâce ici-bas, et en persécutant tous ceux qui lui appartiennent et possèdent sa vie (Jean 8:40-44). La «semence d’Israël» était la famille d’Abraham que Dieu avait mise à part, délivrée de l’esclavage du Pharaon et, par le sang de l’agneau pascal, rachetée du jugement, puis amenée, à travers la Mer Rouge et le Jourdain, dans le pays de Canaan, pour être ainsi un peuple sanctifié pour le servir et proclamer sa gloire.

Comprenant son appel de la part de Dieu, le résidu fidèle éprouvait, sous l’action de l’Esprit, le besoin de se séparer de toutes les nations d’alentour, pour rendre témoignage à Celui qui avait dit : «Voici, c’est un peuple qui habitera seul et il ne sera pas compté parmi les nations» (Nomb. 23:9). La marche qu’il avait suivie jusqu’alors avait été la négation de son appel, mais l’effet puissant produit par la Parole que ces fidèles avaient méditée, fut de les amener à juger tout ce qui, dans leurs voies, était en désaccord avec la position de bénédiction et de témoignage dans laquelle Dieu les avait placés. C’est là aussi ce que produisit, il y a un siècle, le réveil remarquable que Dieu accorda à son Église. Un grand nombre de croyants qui, en divers pays, avaient été jusqu’alors liés au monde de plusieurs manières, furent délivrés des chaînes qui les tenaient captifs et rendirent témoignage au Seigneur qu’ils attendaient du ciel, par une séparation entière de ce présent siècle. Le relâchement et la mondanité se sont, hélas ! manifestés dès lors parmi ceux qui étaient sortis «hors du camp» pour porter l’opprobre de Christ ; néanmoins le devoir de tout cœur fidèle demeure le même et l’appel du Seigneur à son Assemblée est plus pressant que jamais : «À celui qui vaincra...» (Apoc. 2 et 3).

Remarquons que la séparation du mal fut le premier fruit de l’action de l’Esprit dans le cœur de Néhémie et ses compagnons, et qu’elle précéda la confession de leurs fautes que nous trouvons dans les versets suivants. C’est là un principe important. Il y a des âmes qui mènent deuil toute leur vie sur le mal auquel elles sont associées, ou dans lequel elles marchent, sans jamais avoir la force de s’en séparer. Nous en avons un exemple chez Abdias, serviteur du méchant roi Achab qui, tout en craignant l’Éternel, n’avait pas appris que cette crainte amène le fidèle à «haïr le mal» (Prov. 8:13) et à s’en détourner. Un vrai jugement de celui-ci conduit l’âme à s’en purifier dans la puissance de l’Esprit par une séparation entière de tout ce que condamne la Parole. Il n’est rien de plus triste que de voir un juste comme Lot affliger son âme à Sodome, sans jamais fuir ce lieu maudit et finir sa carrière par un naufrage complet.

La lecture de la Parole, la prière, la confession de leurs fautes et la louange remplirent cette journée bénie (v. 3). Les lévites, porteurs de la loi de l’Éternel invitèrent le peuple à se lever et à donner gloire au grand Dieu du ciel, Créateur de toutes choses, dont le nom est au-dessus de toute bénédiction et de toute louange. Il est le Dieu immuable qui n’a ni commencement ni fin, et que son peuple devait bénir pour sa bonté, sa fidélité et sa longue patience. Il est l’Éternel, le Dieu de l’alliance et des promesses, le grand «Je suis», qui s’est révélé à Moïse sous ce caractère, «le Même» dans ses desseins d’amour et ses voies et qui, lorsqu’Il châtie les siens à cause de leurs infidélités, demeure immuable dans son propos de les bénir. Or, Il s’est approché de nous dans la Personne du Fils, Dieu manifesté en chair, «Emmanuel, Dieu avec nous» qui pouvait dire : «Avant qu’Abraham fût, je suis» (Jean. 8:58). La foi le confesse comme Celui qui a créé toutes choses et qui les soutient par la parole de sa puissance, tandis que l’incrédulité achoppe sur son abaissement et refuse de lui rendre l’hommage et la gloire qui lui sont dus. Israël était le témoin du seul vrai Dieu (És. 43:12), en opposition aux idoles, comme nous le sommes de la manifestation de sa gloire dans la Personne du Fils de l’homme rejeté.

Les paroles de louanges, par lesquelles commencent la prière et la confession du résidu, expriment, en termes enseignés par l’Esprit, la grandeur et la gloire infinies du Dieu qui a bien voulu se révéler à l’homme. Ses perfections sont au-dessus de toute notre compréhension. Son Nom, qui renferme la révélation de toutes ses gloires, dépasse infiniment notre intelligence bornée (verset 5). Il est le Même, hier, aujourd’hui et éternellement (Hébr. 13:8). Remarquons avec quel soin jaloux l’Esprit attribue à l’Homme de douleurs tous les caractères du Dieu infini qui se révèle dans les pages de l’Ancien Testament. S’Il s’est abaissé jusqu’à nous pour pouvoir souffrir et mourir, et s’Il a pu dire : «Mon Dieu ne m’enlève pas à la moitié de mes jours», la réponse divine proclame sa gloire : «Tu as jadis fondé la terre... Mais toi tu es le Même et tes années ne finiront pas» (Ps. 102:24-27).

Après avoir proclamé la gloire essentielle de l’Éternel et sa puissance manifestée dans la création des cieux et de la terre, les fidèles rappellent son propos d’amour envers Abraham et sa semence (v. 8). Dans sa souveraine grâce, Dieu l’avait choisi, puis sorti du milieu ténébreux dans lequel il vivait, dans l’idolâtrie (Jos. 24:2, 3). Ce fut l’appel du Dieu de gloire, accompagné de la puissante opération de son Esprit dans son âme, qui le délivra de l’esclavage de Satan et du péché et le fit obéir à la voix divine (Hébr. 11:8). Dieu fit alliance avec lui et promit de lui donner en héritage le pays de Canaan. De son côté, il n’y eut que grâce, fidélité, sagesse et puissance. Il accomplit ses promesses envers la semence de son ami, car Il est juste.

Remarquons encore la mention de la puissance du Dieu Créateur et Conservateur de toutes choses : «C’est toi qui fais vivre toutes ces choses et l’armée des cieux t’adore» (v. 6). Il soutient les saints anges et les garde dans sa dépendance, de sorte qu’ils peuvent proclamer sa gloire et accomplir sa volonté. C’est là le secret du bonheur et de la paix pour ces créatures célestes, tandis que la misère qui règne ici-bas est le résultat de la révolte de l’homme contre son Créateur. Ainsi, les voies divines envers Israël furent caractérisées par l’amour, la sagesse et la puissance, ainsi que la fidélité et la longue patience, tandis que, du côté d’Israël, il n’y eut que désobéissance, ingratitude et mépris de sa Parole. Hélas ! telle est aujourd’hui encore l’histoire de l’homme, couronné de privilèges plus grands que ceux de la descendance de Jacob. Néanmoins, béni soit son nom, parce qu’il est le Même, invariable dans la manifestation de ses perfections et immuable dans ses promesses, son peuple terrestre n’est pas consumé, malgré son irrémédiable méchanceté (Mal. 3:6).

Ce tableau des perfections divines, dicté par l’Esprit à ces fidèles repentants, était agréable à Celui qui veut être servi, honoré et célébré par ceux qui lui appartiennent. Rappelons-nous que, comme Abraham, nous avons été choisis selon le conseil de la grâce souveraine de Dieu. Comme lui, nous avons entendu sa voix puissante qui nous a arrachés à l’esclavage du péché et à la mort, pour nous conduire dans sa sainte demeure. Nous avons aussi reçu cette foi de grand prix qui nous donne une confiance implicite en sa Parole et nous rend capables de marcher dans l’obéissance et la séparation de ce présent siècle et dans l’attente de la gloire. Dieu avait changé le nom d’Abram en celui d’Abraham (v. 7). Ce nouveau nom (père d’une multitude) correspondait à la nouvelle position dans laquelle Dieu l’avait amené, comme un homme justifié, héritier des promesses, père des croyants. Dieu l’avait comblé de bénédictions et lui avait donné une semence, en laquelle seraient bénies toutes les familles de la terre. Le principe de la foi, selon lequel Abraham fut mis en relation avec le Dieu vivant, est celui qui s’applique à sa postérité spirituelle tout entière (Gal. 3:7). Le cœur d’Abraham fut trouvé fidèle. Il s’attacha fermement aux promesses divines et marcha avec Dieu, en comptant sur lui pour l’accomplissement de sa Parole.

Dieu avait fait, avec Abraham, une alliance inconditionnelle de grâce, s’engageant à donner la terre de Canaan à sa semence. Dans sa fidélité à ses promesses, Il avait accompli sa Parole (v. 8). C’est sa justice qui est le refuge de la foi dans tous les âges. Pierre se place sur ce terrain, en attribuant à «la justice de notre Dieu» (2 Pierre 1:1), c’est-à-dire à sa fidélité immuable aux promesses faites aux pères, les bénédictions de l’Évangile qu’Il avait accordées au résidu juif croyant amené dans l’Assemblée. La justice de Dieu, si redoutable à l’homme pécheur, est ainsi l’abri assuré de la foi, car la satisfaction que Dieu a trouvée dans l’œuvre de la croix lui permet d’être juste en justifiant celui qui est de la foi de Jésus.

Avant d’aller plus loin, cherchons à recueillir les leçons que nous donnent ces croyants d’un autre âge. La misère et la ruine qui les avaient atteints sont la fidèle image de celles qui caractérisent l’Église aujourd’hui. Si, dans la lecture et la méditation de la Parole, dans la confession de leurs fautes, ainsi que dans celle de la grandeur et de la gloire du Dieu qu’ils avaient offensé, ils trouvèrent le secret de la bénédiction et de la restauration, n’avons-nous pas là un exemple à suivre au milieu de la confusion actuelle ? Comme eux, nous aurons l’approbation du Seigneur dans ce chemin d’humiliation et de retour à l’obéissance à sa Parole. Qu’Il veuille nous accorder la joie de voir, en divers lieux, ses saints rassemblés, dans le même but et le même esprit que ceux dont l’histoire nous est donnée ici, avec l’expression évidente du bon plaisir que Dieu trouvait en eux.

 

9.2   Souvenir de ce que Dieu a fait

Dans leur prière, les fidèles rappellent maintenant l’intervention divine, en rédemption en leur faveur. Dieu vit l’affliction de leurs pères et le dur esclavage auquel ils étaient asservis par les Égyptiens, et il eut compassion d’eux (v. 9). C’est exactement ce que dit l’Éternel à Moïse (Ex. 3:7). Son amour fut donc le seul motif de cette intervention toute puissante, soit pour les délivrer de l’oppression du Pharaon, soit pour les mettre à l’abri du jugement, par le moyen du sang de l’agneau pascal et enfin pour les arracher à la mort, à travers les eaux de la mer Rouge. Non seulement, Il fut touché de compassion à cause de leur détresse sous le fouet des exacteurs, mais il entendit leur cri quand l’ennemi les poursuivait et les acculait à une mort inévitable dans les eaux profondes. Nous avons là une image de la rédemption qui découle pour nous de l’œuvre de la croix, sous deux aspects différents : 1° Dans la nuit de la pâque, Dieu juge tous ceux qui ne sont pas abrités par le sang de l’agneau. Les premiers-nés d’Israël sont délivrés des coups de sa justice, parce que celle-ci a frappé la victime à leur place. 2° À la mer Rouge, nous voyons un Dieu Sauveur qui est pour son peuple et le délivre de tous ses ennemis, à cause de l’aspersion du sang faite dans la nuit du jugement. Toutes les voies subséquentes de Dieu envers Israël eurent donc pour point de départ la satisfaction de sa justice par le sang de l’agneau, image d’une Victime infiniment plus excellente, dont le sacrifice nous a ouvert l’accès de sa présence et procure à quiconque croit une rédemption éternelle. Ainsi la traversée de la Mer Rouge et la délivrance qui en fut la conséquence pour Israël sont l’image de notre parfaite libération de la mort, de la puissance de Satan et du monde, par la mort et la résurrection de Christ. Par celles-ci, nous en avons fini avec notre ancienne condition de péché et avec le jugement de Dieu qui en était la conséquence, et nous avons été amenés à lui : «Vous voyez comment je vous ai portés sur des ailes d’aigle et vous ai amenés à moi» (Ex. 19:4).

La puissance de Satan fut entièrement brisée à la croix, comme le fut celle de Pharaon à la mer Rouge (v. 11). Nous ne jouissons d’une pleine paix que lorsque nous saisissons, par la foi, que l’œuvre de Christ a mis fin à tout ce qui était contre nous et nous a amenés à Dieu selon sa justice et ses pensées d’amour. L’Éternel, ayant racheté son peuple à travers la mer Rouge, le conduisit dans le désert, où il devait être mis à l’épreuve et apprendre à se connaître, et à connaître aussi les ressources divines. La nuée, symbole de sa présence avec les objets de son amour, ouvrait le chemin devant eux, les éclairant et les protégeant de nuit et de jour (v. 12). Toutes ses voies de grâce, de puissance, de sagesse et de patience avaient pour fondement la rédemption accomplie en Égypte par le sang de l’agneau pascal. Le résidu pieux se plaît à rappeler toutes les dispensations merveilleuses de Dieu envers Israël, sa fidélité, sa miséricorde et sa puissance qui le firent passer comme à cheval à travers le désert aride pour l’amener en Canaan.

Toute cette histoire nous rappelle celle de l’Église. Comme pour le peuple, le sentier que nous avons à parcourir devait être tracé par la main toute puissante de Dieu. Pour fouler le sentier de la foi, il nous faut sa présence avec nous chaque jour ; sans elle, comme Israël sous la nuée, nous serions plongés dans les ténèbres et nous n’arriverions pas dans l’héritage promis. Puis, Dieu descendit des cieux pour lui donner, sur le mont Sinaï, sa loi de vérité, «des ordonnances droites, de bons statuts et de bons commandements» (v. 14). Par cette loi «bonne, juste et sainte», l’homme allait être mis à l’épreuve, puisque la bénédiction qu’elle lui promettait dépendait de son obéissance. S’il avait obéi, Israël eût été «un royaume de sacrificateurs et une nation sainte» (Ex. 19:6). Mais s’il avait compris sa faiblesse et s’était souvenu de ses nombreux manquements entre la mer Rouge et Sinaï, il aurait dit à l’Éternel : «Continue à user de grâce envers nous, et ne nous place pas sous une loi que nous sommes incapables de garder». Ne connaissant pas leur cœur rebelle, ils se déclarent prêts à faire tout ce que l’Éternel leur dira (Ex. 19:8). Aussi Dieu fit alliance avec eux sur ce terrain-là, afin que la ruine et l’impuissance de l’homme fussent pleinement manifestées, et elles le furent en effet, par toute leur histoire subséquente jusqu’à la croix.

Les ressources de la grâce divine ne s’épuisèrent pas durant toute la traversée du désert. Dieu fit jaillir pour eux de l’eau du rocher et leur donna du pain du ciel (v. 15). Le pain et l’eau nous présentent, en type, la nourriture et le rafraîchissement que la vie divine trouve en Christ. La manne est l’image du Fils de l’homme, vrai pain descendu du ciel, afin que quiconque en mange ait la vie éternelle. Pour qu’il devienne la nourriture de nos âmes, il fallait sa mort expiatoire. C’est ainsi que, par la foi, nous mangeons sa chair et buvons son sang et recevons la vie éternelle (Jean 6:56). En recevant Christ comme notre Substitut, qui a pris notre place sous la colère de Dieu, nous acceptons le jugement qui l’a atteint, comme étant le nôtre ; nous nous approprions sa mort qui est notre mort, la fin de notre existence devant Dieu et le jugement de tout ce qui attirait sur nous sa colère. C’est ainsi que nous recevons la vie éternelle en Christ ressuscité, qui devient l’aliment journalier de nos âmes, de sorte qu’en nous nourrissant de lui, nous demeurons en lui (Jean 6:53). L’eau sortie du rocher frappé nous présente également en type la vie divine et le Saint Esprit, puissance de cette vie que nous avons en Christ, frappé par le jugement de Dieu à la croix. De même qu’Israël dans le désert, nous sommes ainsi désaltérés, réjouis et encouragés en demeurant près du Rocher. Le pain et l’eau sont les deux éléments essentiels de la vie de l’homme et, pour nos âmes, nous les avons en Christ. Après que le rocher eut été frappé, il suffisait de lui parler pour qu’il donnât son eau (Nomb. 20:8). C’est ainsi qu’en nous approchant du Seigneur, nous recevons de jour en jour la force, le rafraîchissement et la joie. En frappant le rocher, au lieu de lui parler (Nomb. 20:11), Moïse détruisait la beauté du type et il tomba sous la discipline de Dieu (v. 12).

Le résidu considère ensuite l’histoire des voies du peuple lui-même et les confesse, en la présence de Dieu. Si du côté de Celui auquel il appartenait, il n’y eut que fidélité, amour, sagesse, puissance, de la part d’Israël, il n’y a pas une seule bonne œuvre, pas un rayon de lumière. Les pères agirent avec fierté, c’est-à-dire dans une rebellion ouverte contre la volonté révélée de l’Éternel (v. 16). Ils roidirent leur cou pour ne pas se soumettre à son joug. Ils s’établirent un chef pour retourner en Égypte. Aaron fit le veau d’or et les entraîna ainsi dans l’idolâtrie (v. 18). On aurait pu penser que, devant une telle révolte, leur Dieu les eût consumés en un instant : au contraire, ce mal affreux servit à manifester tous les trésors de sa patience et de sa miséricorde, (v. 7). Le péché entraîne, sans doute, toujours son châtiment et toute la génération sortie d’Égypte tomba dans le désert ; mais, par suite de l’intercession de Moïse, Dieu se révéla comme Celui qui fait grâce et pardonne, quoique, dans son gouvernement, Il ne tienne pas le coupable pour innocent. Les secondes tables de la loi furent placées dans l’arche, montrant que Christ seul pouvait en satisfaire les exigences. Dieu avait devant les yeux sa Personne et son œuvre, de sorte qu’en anticipant les fruits bénis de son obéissance et de son sacrifice, Il pouvait supporter son peuple et le conduire en Canaan. Cette révélation du nom de l’Éternel (Ex. 34:6, 7) devint le fondement de ses relations avec lui durant toute l’ancienne économie. Tous les hommes de foi s’appuyèrent sur cette révélation et nous en trouvons la mention constante dans les livres des prophètes et dans les psaumes. Tout en proclamant la justice de ses voies en discipline et la sainteté de son gouvernement, elle contient le secret de l’exercice constant de sa miséricorde et de son pardon envers cette nation coupable. C’est dans le sacrifice de la croix que nous trouvons la réponse à toutes les exigences de la sainteté divine et le fondement du pardon que Dieu accordait dans le passé. Sa justice dans le «support des péchés précédents» (Rom. 3:25) est ainsi manifestée, car le sang de Christ les a effacés, de même que les nôtres, en sorte qu’il est «juste en justifiant celui qui est de la foi de Jésus». Dieu avait toujours devant les yeux ce fondement béni de l’accomplissement de ses conseils de grâce (Ps. 85:10).

À ce point culminant de l’apostasie des pères, lorsqu’ils lui «firent de grands outrages» (v. 18), l’Éternel ne les abandonna pas. Il ne retira ni la colonne de nuée, ni la manne, ni l’eau ; Il leur donna son «bon Esprit» (*) pour les conduire et les entretint pendant quarante ans dans le désert ; «leurs vêtements ne s’usèrent point et leurs pieds n’enflèrent point» (v. 19-21). Remarquons ici les deux principes constamment rappelés dans la Parole, la grâce et le gouvernement dont l’histoire d’Israël et celle de l’Église nous donnent des exemples. Si Dieu pardonne, il châtie aussi et d’autant plus sévèrement ceux qu’Il a amenés en relation avec lui-même (Amos 3:2). Les fidèles repassent leur histoire avec un sentiment profond de la grandeur des compassions divines et rappellent comment ils furent amenés dans la terre promise et mis en possession des royaumes des nations.

 

(*) La mention de l’Esprit de Dieu nous prouve que, bien que le mystère de la Trinité divine n’ait été pleinement révélé que par la manifestation du Fils unique du Père ici-bas, il est fréquemment sous-entendu dans l’Ancien Testament qui, dans de nombreux passages, nous parle des souffrances et des gloires de Christ et aussi des opérations de l’Esprit.

La puissance de l’Éternel, manifestée dans la conservation miraculeuse de son peuple dans le désert, le fut encore dans son établissement et sa multiplication dans le pays (v. 23). Il dit : «J’ai formé ce peuple pour moi-même ; ils raconteront ma louange» (És. 43:21). Aussi, dans toute son histoire passée et future, éclatent les témoignages de la bonté, de la sagesse et de la puissance de son Dieu. Le pays était un don de sa part (v. 22). C’était sa grâce souveraine qui avait choisi, appelé, béni Abraham et lui avait promis l’héritage de Canaan. Toutes ses voies envers la descendance de celui-ci ont pour fondement le propos de son amour et manifestent, en même temps, les principes immuables de son gouvernement. Les réchappés qui parlent ici se plaisent à exalter les richesses de sa bonté qui les mit en possession de «villes fortifiées, de maisons pleines de tout bien, de puits creusés, de vignes et d’oliviers et d’arbres fruitiers en abondance» (v. 25). L’Éternel combattant avec son peuple, l’ennemi avait été complètement vaincu et son pays conquis.

On raisonne quelquefois sur la justice de cette prise de possession de Canaan par les Israélites, en oubliant que la sainteté de Dieu ne pouvait supporter plus longtemps les abominations qui s’y commettaient. Il fallait que cette terre qu’Il destinait à son peuple fût purifiée de tout le mal qui la souillait et ses habitants exterminés par le jugement. C’est ainsi que le Très-Haut revendiquera bientôt ses droits à la possession de la terre qu’Il a créée pour y manifester sa gloire et que le Livre de l’héritage sera remis à l’Agneau, qui en ouvrira les sceaux par le jugement et fera de la terre le marchepied de ses pieds (Apoc. 5). Les méchants seront alors comme la balle que le vent chasse, et ils ne subsisteront point dans le jugement, ni les pécheurs dans l’assemblée des justes (Ps. 1:5). Dieu se doit à lui-même d’en finir avec le mal, lorsqu’il arrive à son comble ; Il avertit les hommes, longtemps à l’avance, du jugement qui les menace et exécute sa Parole, lorsque sa patience est arrivée à son terme.

Considérons donc, dans ce récit, la bonté et la justice parfaites des voies de Dieu. Si grande était la bénédiction terrestre répandue sur les fils d’Israël qu’ils n’eurent qu’à prendre possession de tous les biens richement préparés pour eux et à en jouir avec des cœurs remplis de gratitude envers l’Auteur de tant de bienfaits (v. 25). Hélas ! nous voyons apparaître ici la corruption irrémédiable du cœur humain. L’abondance des gratuités divines le rend orgueilleux, dur, insensible à sa Parole et indépendant de lui. Au lieu de lui rendre grâces, il se révolte contre Dieu (Deut. 32:15).

Il oublie que ces bénédictions et ces faveurs viennent de Lui. Il méconnaît ses droits, son autorité et les avertissements de sa Parole. Les prophètes furent envoyés à ces fils rebelles, mais ils les tuèrent et firent de «grands outrages» (v. 26) à l’Éternel.

 

9.3   Voies de Dieu en grâce et gouvernement

Mais nous trouvons un nouveau caractère des voies de Dieu envers son peuple. Ayant averti en vain les rebelles d’Israël, Il les livra entre les mains de ses ennemis qui les opprimèrent. C’étaient des avertissements de sa part, avant l’exercice du jugement qui allait fondre sur eux et les bannir de cette terre qu’ils avaient souillée des mêmes abominations que les Cananéens. Ils furent livrés à leurs adversaires, comme nous le lisons dans le livre des Juges. Toutefois, à maintes reprises, les compassions infinies de l’Éternel se déployèrent envers eux. Quand, dans leur détresse, ils criaient à lui, Il leur suscitait des libérateurs (v. 27), par la main desquels Il les délivrait de leurs oppresseurs. Mais, une fois délivrés, ils oubliaient bien vite les leçons du passé et recommençaient à faire le mal, attirant sur eux-mêmes de nouveaux châtiments. Ceux-ci étaient suivis de délivrances éclatantes, en réponse aux cris d’angoisse des opprimés (v. 28). De sa demeure «des cieux», le Dieu miséricordieux continuait ainsi à déployer les ressources insondables de sa longue patience envers ce peuple. Rien ne montre mieux que cette histoire sa grâce infinie d’une part et, de l’autre, l’incurable méchanceté du cœur de l’homme : «Ils opposèrent une épaule revêche et roidirent leur cou» (v. 28).

Remarquons que, dans sa grâce, Dieu suscita des prophètes qui parlaient au peuple par son Esprit (v. 30), rendant témoignage contre eux de la méchanceté de leurs voies et les sollicitant avec amour de revenir à l’Éternel avec humiliation et repentance. Par l’exercice de ce ministère, Il plaçait celui-ci sous une solennelle responsabilité, puisque les jugements inexorables qui devaient les atteindre dans ce chemin de rebellion leur étaient annoncés avec puissance. Les prophètes apparaissent sur la scène, lorsque l’ordre de choses établi de Dieu au commencement de l’histoire d’Israël avait failli et que la sacrificature donnée par lui pour le maintien de ses relations avec son peuple s’était corrompue. C’est ce que nous voyons clairement dès le début du premier livre de Samuel. Lorsque, dans la personne des fils d’Héli la sacrificature eut complètement failli, le premier prophète est suscité dans la personne de Samuel. I-Cabod (privé de gloire ; 1 Sam. 4:21), était écrit sur Israël, mais Dieu maintenait des rapports avec son peuple par Samuel en attendant de lui donner son roi. La royauté ayant manqué à son tour, la lignée des prophètes fidèles se continua jusqu’à la fin de cette période de l’histoire de la nation coupable. Ils servaient de lien entre elle et l’Éternel et cherchaient à la ramener à la conscience de sa responsabilité envers lui. Ils encourageaient les fidèles par la perspective des gloires du royaume qu’établirait le Messie promis, tout en annonçant ses souffrances et son rejet, ainsi que les jugements qui en seraient la conséquence. L’Esprit de Christ qui était en eux rendait témoignage à l’Homme de douleurs, à sa mort expiatoire et à sa victoire. Il agissait et parlait par le moyen des prophètes, sans que leur intelligence spirituelle fût à la hauteur des révélations qui leur étaient données, de sorte qu’ils devaient étudier celles-ci pour en comprendre l’application et la portée (1 Pierre 1:10, 12). Il n’était pas encore pour eux, comme il l’est pour nous, un Esprit d’adoption, leur donnant la jouissance d’une relation filiale établie avec Dieu sur le pied d’une rédemption accomplie.

Lorsque, pendant de longs siècles Dieu eut averti en vain son peuple rebelle, Il donna cours à sa colère. Son support et sa patience étant demeurés sans fruit, Il dut intervenir en jugement contre cette «génération tortue et perverse» (Deut. 32:5). Il livra son sanctuaire aux mains de l’ennemi et les fils d’Israël furent emmenés en captivité. Toutefois, Il ne les détruisit pas entièrement, car il est «un Dieu faisant grâce et miséricordieux» (v. 31). Cette mention trois fois répétée (v. 17, 31, 32), dans la prière du résidu, du nom glorieux sous lequel Dieu s’était révélé à Moïse après le veau d’or, montre avec quelles délices les hommes de foi s’étaient emparés de cette vérité, depuis qu’elle avait été donnée à connaître et combien il leur était précieux d’en faire le fondement de leur confiance, lorsque la ruine arriva en Israël. Si Dieu n’en a pas fini avec ce peuple misérable et coupable, c’est parce qu’Il se plaît à montrer ses compassions envers ceux qui ne méritent que le jugement. Toutefois Il est le Dieu «grand, puissant et terrible» (v. 32), qui a le pouvoir d’atteindre par des jugements redoutables ceux qui méconnaissent ses droits et sa gloire. C’étaient là les caractères de son gouvernement que son peuple rebelle apprit à connaître, lorsque sa main s’appesantit lourdement sur lui. Toutefois Il est aussi Celui qui «garde l’alliance et la bonté». Dans la colère, Il se souvient de sa miséricorde et de ses promesses. Il aime que les siens s’emparent par la foi de la révélation de son Nom et en fassent le fondement de leurs requêtes. Pour nous, nous le connaissons comme le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a amenés dans sa faveur, nous ayant «rendus agréables dans le Bien-aimé» (Éph. 1:6).

Après ce remarquable exposé des voies de Dieu, quelle est la requête de ces fidèles témoins ? En se fondant sur sa gratuité immuable, ils font appel à ses compassions. Sous l’oppression de l’ennemi, juste conséquence de leurs fautes, ils étaient «dans une grande détresse» (v. 37). Remarquons que, tout en rappelant l’histoire d’Abraham, ils ne se fondent pas, dans leur prière, sur les promesses inconditionnelles de grâce faites au patriarche. Comme Daniel, ils demeurent sur le terrain de l’alliance dont Moïse était le médiateur (Dan. 9:13). Dieu lui avait révélé son nom qui exprimait les exigences de son gouvernement, mais aussi les richesses de ses compassions (Ex. 34:6, 7), seule ressource de la foi pour ce peuple coupable. En suite de l’intercession de Moïse, figure de celle de Christ, il avait été placé ainsi, non pas strictement sous la loi qui les aurait instantanément consumés, mais sous une loi mitigée de grâce. Quant aux promesses faites à Abraham, elles s’accompliront au jour de Christ, par le déploiement de sa puissance et en vertu de son œuvre de rédemption, c’est-à-dire sur le même terrain de grâce souveraine que celui sur lequel l’Assemblée est mise en possession de ses privilèges et de ses bénédictions : «Car Dieu a renfermé tous, Juifs et nations, dans la désobéissance, afin de faire miséricorde à tous» (Rom. 11:32).

Il est remarquable de trouver, chez ce pauvre résidu revenu de la captivité, une telle intelligence des pensées de Dieu, ainsi que la direction de l’Esprit dans leurs requêtes. Dans l’expression de leurs pensées, ces fidèles sont gardés sur le terrain de la soumission à la Parole, en harmonie avec la position qu’ils occupaient sous l’économie de la loi. Pour que nos prières puissent être exaucées, il faut qu’elles soient formées par la Parole. Alors nous ne demanderons rien qui soit contraire à la volonté du Seigneur et nous pouvons être assurés de l’accomplissement de sa promesse (Jean 15:7).

Toute confiance en eux-mêmes, toute justification de leurs propres voies, tout murmure contre les dispensations divines étaient bannies des cœurs de ces fidèles. Ils implorent les compassions de leur Dieu, en se fondant uniquement sur la révélation qui leur en avait été faite par la Parole. Que leur désolation ne soit pas peu de chose à ses yeux, mais qu’elle émeuve ses entrailles et mette en activité son bras puissant en leur faveur. Telle doit être aussi l’attitude de tout pécheur aujourd’hui devant le Dieu saint qu’il a offensé. En la prenant, il apprendra à connaître les ressources infinies de sa grâce et la valeur de l’œuvre de Christ pour son salut. Remarquons ici la différence entre les deux économies : tout en prenant devant Dieu la place qui convenait à des pécheurs repentants, ces Juifs pieux ne jouissaient pas, comme nous aujourd’hui par la foi, du bonheur de l’homme à qui Dieu compte la justice sans œuvres, à cause de la satisfaction que cette justice a reçue à la croix (Rom. 4:6, 7). Ne connaissant pas encore les richesses de sa grâce qui pardonne et justifie les pécheurs repentants, ils se placent sur un terrain légal, en promettant à Dieu d’obéir désormais à ses «commandements et à ses témoignages» (v. 34). Ils ne réalisaient pas l’incurable méchanceté de leurs cœurs. Toutefois l’engagement solennel qu’ils prennent était le fruit de la conviction profonde de leur culpabilité passée et du désir ardent qui les animait de servir et d’honorer désormais le grand Dieu auquel ils appartenaient. Ils font avec lui une ferme alliance que tous signent, en s’engageant dorénavant à obéir à la loi. Ils oubliaient, hélas ! toute leur histoire qui aurait dû leur prouver leur impuissance. Néanmoins, tel était le fruit du réveil remarquable opéré par l’Esprit de Dieu au milieu de son peuple.

Prenons à cœur ce touchant récit que nous a conservé la Parole. Puissions-nous sortir aussi du sommeil qui nous a envahis et, sans aucune confiance en nos propres forces, rechercher avec ardeur la grâce de notre Seigneur Jésus Christ pour nous séparer résolument du mal et poursuivre, en attendant son prochain retour, «la justice, la foi, l’amour, la paix avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur» (2 Tim. 2:22).

 

 

10               Chapitre 10 — Nous n’abandonnerons pas la maison de notre Dieu

 

ME 1933 p. 282-297

 

Nous trouvons dans ce chapitre les noms de ceux qui signèrent la solennelle promesse faite par le peuple d’obéir désormais à l’Éternel, en commençant par Néhémie, puis les sacrificateurs, les Lévites et les chefs du peuple, qui représentaient les diverses classes dont se composait celui-ci. Tous étaient mus par un même sentiment des droits de l’Éternel, fruit de l’opération de sa grâce dans leurs cœurs, et par un besoin intense de retrouver sa bénédiction, en marchant dans l’obéissance à sa Parole. Sous le règne du pieux Josias, nous constatons un réveil analogue (2 Rois 23), mais qui fut bientôt suivi d’une apostasie complète (Jér. 3:10), car «l’esprit est prompt, mais la chair est faible». Le cœur naturel est porté au légalisme et disposé à prendre des engagements qui lui donnent de l’importance, mais il n’y a aucune force en l’homme pour obéir à Dieu. Israël a dû l’apprendre par une amère expérience qui l’amènera, à la fin, avec un cœur repentant, aux pieds de son Messie si longtemps rejeté : «Pour tout cela, nous faisons une ferme alliance et nous l’écrivons» (9:38), avait dit le faible résidu.

Cet engagement, pris devant Dieu par le peuple, s’appliquait à quatre objets, au sujet desquels il promettait solennellement de se conformer désormais aux commandements de la Parole : Ils déclarent vouloir

1° «marcher selon la loi de Dieu», en observant et pratiquant tous ses commandements (v. 29) ;

2° ne plus donner leurs enfants en mariage aux nations étrangères (v. 30) ;

3° observer le sabbat, ainsi que les prescriptions de la loi concernant l’année sabbatique ;

4° pourvoir à tous les besoins du service de la maison de Dieu, sacrifices, offrandes, etc. (v. 32-39). Ces réchappés de Juda sentaient profondément la ruine qu’avait amenée sur le peuple de Dieu, l’oubli et le mépris de la Parole quant à tous ces points, sur lesquels ses prescriptions étaient formelles. Ils désirent ardemment glorifier l’Éternel à l’avenir, en obéissant à sa loi sainte et en lui donnant sa place au milieu de son peuple. Nous pouvons reconnaître la sincérité qui les animait, mais constater aussi qu’ils ignoraient encore l’incurable méchanceté du cœur de l’homme ; et nous en verrons les preuves à la fin du livre.

Il arrive souvent, dans l’histoire des âmes, que l’œuvre de l’Esprit de Dieu en elles les conduit à passer condamnation sur le passé et à chercher, par un changement de conduite, à effacer leurs fautes et à trouver ainsi la paix pour leurs consciences troublées. Mais elles doivent apprendre, par une amère expérience, la folie et l’impuissance de la chair. Bienheureuses sont celles qui, par tous ces exercices, sont amenées aux pieds du Sauveur des pécheurs, en passant une entière condamnation sur elles-mêmes et qui, après s’être écriées, dans leur détresse : «Misérable homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ?» peuvent dire, dans la paix et la joie de la délivrance : «Je rends grâces à Dieu par Jésus Christ, notre Seigneur» (Rom. 7:24, 25).

À la fin de ses expériences, le résidu pieux comprendra cette leçon bénie. Alors «ils invoqueront mon nom, et moi je leur répondrai ; je dirai : C’est ici mon peuple ; et lui dira : L’Éternel est mon Dieu» (Zach. 13:9).

Toutes les classes du peuple étaient représentées dans la signature de l’alliance, même les femmes et les enfants, tous ceux de ces derniers «qui avaient de la connaissance et de l’intelligence» (v. 28), c’est-à-dire depuis l’âge de raison. Il est touchant de voir la place qu’occupaient les enfants, dans toutes les circonstances importantes de la vie d’Israël. Ce fait nous prouve le prix que Dieu attache à l’éducation pieuse, que doivent leur donner les parents qui le connaissent. Les enfants font partie intégrante de son peuple et doivent être élevés «sous la discipline et les avertissements du Seigneur» (Éph. 6:4), en apprenant, de bonne heure, quels sont les privilèges et les responsabilités qui se rattachent à cette position. Lorsque le résidu remonté de Babylone devait mener deuil devant Dieu, à cause de son infidélité, «une très grande congrégation d’hommes et de femmes et d’enfants» se réunit et «le peuple pleurait beaucoup» (Esdras 10:1). Dans un jour de joie, ils n’étaient pas oubliés. Esdras lut la loi devant «la congrégation des hommes et des femmes et devant tous ceux qui avaient de l’intelligence pour entendre», c’est-à-dire les enfants (Néh. 8:2).

Au peuple se joignent «tous ceux qui s’étaient séparés des peuples des pays pour s’attacher à la loi de Dieu» (v. 28). Outre ceux qui étaient revenus de la captivité, il y avait, dans le pays, des descendants d’Abraham qui avaient échappé à l’exil. Sous l’action bénie du réveil que Dieu accordait à son peuple, ils s’étaient séparés de l’inimitié des nations et se joignaient maintenant au résidu pour s’attacher à la Parole, avec le désir de marcher désormais dans l’obéissance et la crainte de Dieu. Un principe important de la conduite de ceux qui appartiennent au Seigneur, dans tous les temps, est exprimé dans ces paroles du prophète : «Cessez de mal faire, apprenez à bien faire.» (Ésaïe 1:16). Au milieu de la ruine actuelle de l’Église, nous avons besoin d’y prêter attention, comme les fidèles de ce temps-là. Si nous nous retirons de l’iniquité morale et doctrinale qui nous entoure, nous serons rendus capables de poursuivre «la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur» (2 Tim. 2:22).

Le peuple s’engage donc d’abord, «par exécration et par serment», à s’attacher à la loi de Dieu (v. 29). Par ces paroles, ils appelaient la malédiction divine sur tous ceux qui ne tiendraient pas leur promesse. S’ils s’étaient souvenus de leur histoire passée, ils n’auraient pas osé se placer sur un terrain semblable, mais se seraient abandonnés à la miséricorde de Celui qui les avait ramenés à sa montagne sainte, car c’était là leur seule ressource. Ils déclarent, au contraire, vouloir obéir à «tous ses commandements, ses ordonnances et ses statuts» (v. 29). Hélas ! le mal ne tarda pas à reprendre le dessus, malgré les bonnes résolutions et les sincères désirs du faible résidu. La leçon douloureuse de toute l’histoire de l’homme, même dans les circonstances les plus favorables, est que «la chair ne se soumet pas à la loi de Dieu» et que le voulût-elle, «elle ne le peut pas» (Rom. 8:7). Mais, enseignés par la grâce qui nous a donné un Sauveur, nous pouvons nous conformer à l’exhortation de la Parole : «Marchez par l’Esprit et vous n’accomplirez point la convoitise de la chair» (Galates 5:16). Une nouvelle vie et une nouvelle puissance étaient nécessaires pour marcher dans l’obéissance que réclamait la loi. Sans être placés sous son joug, puisque nous qui avons cru sommes morts à la loi, nous sommes rendus capables de répondre à «la juste exigence de la loi, en ne marchant pas selon la chair, mais selon l’Esprit» (Rom. 8:4). Il y avait certainement chez ces pieux témoins d’autrefois les désirs et les aspirations d’une nouvelle nature, mais sans la puissance nécessaire pour les réaliser.

Le second point de l’alliance concernait les mariages d’Israélites avec des idolâtres des nations qui les entouraient, mariages qui avaient été dans le passé une source continuelle de ruine et d’apostasie pour le peuple de Dieu, ces unions étant la négation des privilèges de celui-ci et de sa position de mise à part d’un monde de ténèbres. Il en est de même aujourd’hui, et «le joug mal assorti» est encore un des moyens les plus efficaces que l’ennemi emploie dans l’Église pour ruiner son témoignage. Il s’efforce toujours d’amener les croyants à s’associer au monde, sous une forme quelconque, sachant bien que la lumière qui est en nous devient ainsi ténèbres. Dieu avait dit d’Israël : «le peuple habitera seul et il ne sera pas compté parmi les nations» (Nomb. 23:9). S’il perd cette séparation, son témoignage est ruiné, et il ne peut plus être reconnu comme portant ce caractère ici-bas. L’Église infidèle s’étant liée au monde, le Seigneur viendra sur elle comme un voleur et son jugement sera inévitable (Apoc. 3:3).

Le troisième objet de l’alliance était relatif à l’observation du sabbat et des prescriptions de la loi quant à la septième année, ou année de relâche. Le sabbat était le repos de la première création et le signe de l’alliance de Dieu avec Israël, qu’Il faisait ainsi entrer dans son repos sous condition d’obéissance. En violant le sabbat, celui-ci rompait l’alliance et se plaçait sous la malédiction prononcée contre les transgresseurs. C’est ce qu’il avait fait dès le commencement de son histoire, et le chap. 13 nous prouve que le résidu ne tarda pas à reprendre sa vieille ornière de désobéissance et d’oubli de la Parole.

Quant à la septième année, il y avait trois prescriptions principales, qui en faisaient une image expressive de la délivrance future et des bénédictions millénaires (Deut. 15) :

1° Les dettes contractées pendant les six années précédentes étaient annulées (v. 1-6). Cette lourde dette contractée envers l’Éternel par son peuple coupable sera acquittée, en vertu du sang de l’Agneau, car Dieu répandra sur Israël repentant un esprit de grâce et de supplication : «Ils regarderont vers moi celui qu’ils auront percé et ils se lamenteront sur lui, comme on se lamente sur un fils unique» (Zacharie 12:10-14). «... Je pardonnerai leur iniquité et je ne me souviendrai plus de leur péché» (Jér. 31:34). C’était un jour béni en Israël que celui où les malheureux chargés de dettes apprenaient que celles-ci étaient acquittées ; c’était pour eux comme une quittance générale que Dieu leur donnait ; c’était la déclaration que tous les titres qui existaient à leur charge étaient annulés. Qu’est cette joie en comparaison de celle du pécheur, prêtant l’oreille à la voix de Jésus qui lui dit : «Tes péchés sont pardonnés, va-t’en en paix». Les péchés sont souvent représentés comme des dettes dans la Parole. Par nature, nous sommes tous des débiteurs insolvables. Bien loin de pouvoir diminuer cette dette immense, l’homme ne fait que l’augmenter chaque jour. Aussi que serions-nous devenus si Dieu n’avait eu compassion de nous, si, dans son grand amour, Il ne nous avait donné son Fils qui a payé pour tous ceux qui le reçoivent par la foi ? La mort de la sainte Victime fut le paiement de la dette et sa résurrection la quittance que Dieu a publiquement donnée, témoignant que notre dette était pleinement acquittée.

Il était très pénible pour les Juifs d’observer cette ordonnance, car le cœur naturel refuse d’abandonner ses droits. Mais Dieu attachait une grande importance à cette préfiguration du propos de son amour, non seulement de délivrer un jour son peuple terrestre de l’esclavage de ses péchés, mais d’accorder cette glorieuse délivrance à tous ceux qui mettraient leur confiance en l’œuvre de rédemption qu’accomplirait l’Agneau sans défaut et sans tache. Aussi le résidu repentant comprend qu’il doit se conformer strictement à l’ordonnance divine relative à la remise des dettes.

2° La terre devait être laissée en friche (v. 31). C’était donc une période de repos, tant pour la terre d’Israël que pour ses habitants et c’est là un des caractères essentiels du règne millénaire. Après les longs siècles de labeur et de souffrance amenés par le péché de l’homme, la création tout entière sera délivrée de la servitude de la corruption et amenée dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Pour compléter ce type du repos béni qui sera introduit par la manifestation de la puissance du Seigneur en son jour, l’Éternel avait institué, au bout d’une période de sept fois sept ans l’année du jubilé (Lév. 25:8-24). À ce moment-là non seulement les travaux des champs devaient être interrompus, mais chaque Israélite rentrait en possession de la propriété foncière qu’il pouvait avoir vendue ; tous se réjouissaient devant l’Éternel et le pays tout entier offrait l’image de la paix et de l’allégresse, préfigurant ainsi la délivrance finale de la terre de Canaan et de la création tout entière sous le sceptre du Roi de justice et de gloire.

3° Enfin, en la septième année, les esclaves, ayant servi six ans leurs maîtres, étaient libérés de ce joug. C’est ainsi que Dieu délivrera son peuple terrestre à l’aube du grand jour à venir, de tout esclavage. Par son incrédulité, cette nation coupable du rejet de son Messie, puis du message de l’Évangile, s’est privée des bénédictions que Dieu avait en vue pour elle.

«La colère est venue sur eux au dernier terme» (1 Thess. 2:16). Le vrai jubilé devait lui apporter la rémission de leurs dettes, le pardon de leurs péchés, mais, par leur refus de la grâce, ils sont encore sous le poids de la malédiction qu’ils ont prononcée contre eux-mêmes. Au lieu de l’affranchissement, ils ne connaissent que la servitude ; ils sont sous le joug humiliant de leurs préjugés, de leur ignorance, de leur aveuglement, de leur endurcissement : «Leurs entendements ont été endurcis... le voile demeure sur leur cœur» (2 Cor. 3:14, 15). Satan les tient dans ses chaînes. Au lieu de se voir rétablis dans leur terre, leur maison est laissée déserte, leur pays est désolé. Depuis près de dix-neuf siècles, ils sont toujours errants dans le désert des peuples et Jérusalem est toujours foulée aux pieds par les nations. Ils ne trouvent aucun repos ; le sabbat, signe de l’alliance, leur a été ôté. L’Éternel a accompli les paroles des prophètes : «Je ferai cesser toutes ses délices, sa fête, sa nouvelle lune et son sabbat et toutes ses assemblées ; et je détruirai sa vigne et son figuier... et j’en ferai une forêt» (Osée 2:11, 12).

Ainsi les Juifs ont perdu pour un temps tous les privilèges que promettait le jubilé ; ils ont été mis de côté, rejetés jusqu’à ce que l’indignation soit passée. Dieu a visité les nations et les visite encore, afin d’en tirer un peuple pour son nom.

L’Église, corps de Christ, os de ses os, chair de sa chair, est bénie en Christ de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes. Coupée de l’olivier sauvage, selon la nature, et entée sur l’olivier franc, à la place des branches qui ont été retranchées, elle est devenue participante de la racine et de la graisse de l’olivier : et par conséquent, elle a droit, mais dans un sens infiniment supérieur, spirituel et céleste, aux grâces que Dieu promettait aux enfants d’Israël, et dont ils jouiront au jour de Christ, lorsque la plénitude des nations étant entrée, l’Église ne sera plus sur la terre.

Bientôt le long intervalle sans fêtes qui succédait à la Pentecôte, prendra fin pour Israël ; bientôt commencera pour ce peuple l’antitype des fêtes du «septième mois» (Lév. 23). Puis le Fils de l’homme viendra sur les nuées du ciel, avec puissance et une grande gloire. Et il enverra ses anges avec un grand son de trompette et ils rassembleront ses élus des quatre vents, depuis l’un des bouts du ciel jusqu’à l’autre bout» (Matt. 24:30, 31). Sortant du sanctuaire céleste, Il viendra régner : «Il sera sacrificateur sur son trône. Et l’Éternel sera roi sur toute la terre» (Zach. 6:13 ; 14:9). Alors les enfants d’Israël, ayant affligé leur âme devant Dieu et «regarderont vers Celui qu’ils ont percé» (Id. 12:10), pourront jouir de toutes les bénédictions préfigurées par le jubilé, en vertu de l’œuvre parfaite de Jésus, Messie, Roi et Sacrificateur. Alors ils entendront cette parole bénie de sa bouche : «Parlez au cœur de Jérusalem et criez-lui que son temps de détresse est accompli, que son iniquité est acquittée, car elle a reçu de la main de l’Éternel le double pour tous ses péchés» (És. 40:2). S’agit-il de la délivrance de l’esclavage : «Quant à toi aussi, à cause du sang de ton alliance, je renverrai tes prisonniers hors de la fosse... Revenez à la place forte, prisonniers de l’espérance» (Zach. 9:11, 12). Quant à la restitution des héritages en l’année du jubilé, image de la réintégration d’Israël dans la terre de Canaan, nous lisons : «Ainsi dit le Seigneur, l’Éternel : Voici, je prendrai les fils d’Israël et je les délivrerai... et je les purifierai, et ils seront mon peuple et moi je serai leur Dieu. Et ils habiteront dans le pays que j’ai donné à mon serviteur Jacob... Et je ferai avec eux une alliance de paix, ce sera avec eux une alliance éternelle ; et je les établirai et je les multiplierai, et je mettrai mon sanctuaire au milieu d’eux pour toujours ; et ma demeure sera sur eux... mon sanctuaire sera au milieu d’eux à toujours» (Éz. 37:21-28). Telles sont les délivrances, telles les bénédictions qu’apportera avec lui le Rédempteur, lorsqu’Il «viendra à Sion et vers ceux qui, en Jacob, reviennent de leur rébellion» (És. 59:20).

Ainsi le jubilé millénaire sera bien réellement, pour Israël et pour la terre, «les temps de rafraîchissement et de rétablissement de toutes choses dont Dieu a parlé par la bouche de ses saints prophètes» (Actes 3:18-23). «Il reste un repos sabbatique pour le peuple de Dieu». Cette glorieuse délivrance sera le fruit de l’œuvre de la rédemption. La terre est aussi la possession que l’Homme de douleurs a acquise par sa mort. Le monde est le champ dans lequel était caché le trésor et qu’Il a acheté pour avoir celui-ci (Matt. 13:44). Bientôt il reviendra pour délivrer son acquisition, qui est encore sous le pouvoir de l’ennemi. Quant au trésor, qui est aussi la perle de grand prix, Il l’aura alors avec lui dans la gloire. Bientôt Il rompra les sceaux du livre qui contient comme le contrat d’acquisition, ou les titres de l’Agneau rédempteur à la possession et à l’héritage de toutes choses. Alors commencera le jubilé de la création, car le Seigneur entrera dans son règne (Apoc. 5 ; 11:15-17).

Revenons maintenant à l’alliance contractée par le résidu avec l’Éternel son Dieu. Le quatrième point, sur lequel portait l’engagement solennel que prennent les fidèles de lui obéir désormais, concernait le service du sanctuaire, les sacrifices et la subsistance des Lévites. Dans leur zèle pour la maison de Dieu, ils prennent toutes les mesures nécessaires pour l’entretien des serviteurs et le maintien de l’ordre établi au commencement, et auquel Dieu attachait tant d’importance. Tous ces faits sont remplis d’instruction pour nos âmes. Dans un jour d’affaiblissement spirituel, nous sommes en danger de tomber dans l’égoïsme et d’oublier nos responsabilités relativement au service du Seigneur, soit pour y vaquer nous-mêmes, soit pour pourvoir aux besoins matériels de ceux qui s’y emploient. Rappelons-nous que Dieu prend plaisir au sacrifice de nos biens temporels et qu’Il trouve ses délices à nous voir occupés des soins de sa maison.

«Le tiers d’un sicle» (v. 32) que s’impose le peuple pour le service du temple était sans doute l’impôt ou tribut mentionné en Matt. 17:24-27, et dont le montant était au commencement, d’un demi-sicle (*) (Ex. 30:11-16) que chaque membre de la congrégation devait acquitter, le pauvre comme le riche. Dieu montrait ainsi que, pour le rachat de nos âmes, une même satisfaction devait être donnée à sa justice et ne pouvait l’être que par la mort expiatoire de son Agneau. Puis sont énumérés les divers sacrifices, offrandes de gâteau, holocaustes, etc., qui devaient être présentés à l’Éternel et que les fidèles s’engagent à fournir. Les douze «pains à placer en rangées» sur la table d’or typifiaient le peuple de Dieu, associé à Christ dans l’administration du royaume et vu selon toute son excellence. Ces pains étaient mangés dans un lieu saint par la famille d’Aaron. Faits de fine farine, pétrie à l’huile, ils représentaient aussi la parfaite humanité, jointe à la divinité du Fils de l’homme ici-bas. Les pains étaient oints d’huile et ils étaient présentés à Dieu recouverts d’encens. C’est ainsi que Dieu le Père manifesta le bon plaisir qu’Il trouvait en l’homme obéissant, en le scellant de son Esprit. L’encens nous parle des perfections de son humanité pour le cœur du Père et qui montaient comme un parfum de bonne odeur devant lui. L’unité indissoluble et la position de faveur du peuple vu par Dieu sur la table d’or, pendant la longue nuit de sa dispersion, nous sont présentées par les douze pains ; quelle que soit sa ruine actuelle, Dieu le voit en Christ, selon toute l’excellence de sa Personne et de son œuvre. Puis, il y avait les holocaustes offerts continuellement, matin et soir, sur l’autel d’airain. Combien le maintien de cet ordre de choses qui parlait de la valeur infinie de la sainte Victime, prête pour le sacrifice au moment voulu de Dieu, était important pour lui, et pour la foi qui entrait quelque peu dans ses pensées. Le sacrifice de l’Agneau divin qui allait donner sa vie pour revendiquer la gloire du Père était typifié par l’holocauste : celui du matin et celui du soir montaient continuellement devant Dieu comme un encens agréable, image du bon plaisir qu’Il trouve maintenant dans la mort expiatoire et l’obéissance de l’Homme de douleurs, consommée dans le sacrifice de sa précieuse vie à la croix. Les sacrifices pour le péché (v. 33) parlaient en type de l’ardeur du courroux de Dieu subie par notre divin Substitut sur le bois maudit. Ces sacrifices faisaient «propitiation pour Israël» et permettaient à Dieu d’agir en grâce envers lui, parce qu’ils parlaient d’avance du parfait sacrifice dans lequel Il trouverait un jour une pleine réponse aux exigences de sa justice.

 

(*) Réduit à un tiers de sicle, sans doute à cause de la pauvreté du peuple.

 

Remarquons que ce faible résidu embrassait dans ses pensées tout Israël (v. 33), c’est-à-dire le peuple entier vu dans son unité devant Dieu. En dépit de la ruine et de la dispersion des douze tribus, ces témoins entraient par la foi dans son propos immuable et s’appropriaient les bénédictions que Dieu a en réserve pour son peuple et qu’Il accomplira en vertu du sacrifice de son Agneau, et cela malgré sa ruine et le jugement qui l’a atteint. Il en est de même pour nous aujourd’hui. Envisagée dans sa responsabilité, l’Église a complètement failli. Toutefois ceux qui désirent rester fidèlement attachés à la Parole doivent maintenir la vérité de l’unité du corps de Christ en se réunissant autour de Lui à sa table et en gardant l’unité de l’Esprit par le lien de la paix. En participant au seul pain, symbole de cette unité, nous rendons témoignage à la vérité du seul corps et invitons tous les croyants fidèles à se grouper autour du mémorial de sa mort et à marcher dans la paix et la communion fraternelle, en attendant son retour.

La contribution volontaire que s’imposait le peuple (v. 32) devait servir aux divers besoins de la maison de Dieu. Ensuite nous trouvons les mesures prises pour la fourniture du bois, servant à consumer l’holocauste perpétuel sur l’autel. Ces détails nous font connaître l’importance que Dieu attache au plus petit service accompli par amour pour son Nom et pour l’ordre de sa maison. Puis les fidèles s’engagent à apporter aux sacrificateurs les prémices de leurs récoltes et de leurs biens, selon qu’il est prescrit dans la loi de l’Éternel (Lév. 23:9). Ils reconnaissaient ainsi ses droits souverains sur tout ce qu’ils possédaient ; c’était de lui que procédait l’abondance dont ils jouissaient, et à lui qu’appartenait cette bonne terre dont ils n’étaient que les tenanciers. Dans l’offrande de la gerbe des prémices, le lendemain du sabbat de la pâque, il y avait aussi le type de l’acceptation de l’Homme obéissant ressuscité d’entre les morts, gage de notre glorieuse délivrance à sa venue.

Apprenons par ce récit, combien est agréable au Seigneur la consécration de tout ce qu’Il nous a donné à son service et à sa gloire. N’oublions pas que le sacrifice de nos biens lui est aussi agréable et que si, dans ce domaine, nous semons chichement, nous moissonnerons aussi chichement, tandis que «celui qui sème libéralement moissonnera aussi libéralement» (2 Cor. 9:6). Puis ils promettent d’apporter aux sacrificateurs les premiers-nés de leurs fils et de leurs bêtes selon Ex. 13. Ils se reconnaissent ainsi un peuple racheté, appartenant à l’Éternel. Les premiers-nés étaient à lui, en vertu de la délivrance dont ils avaient été les objets dans la nuit de la pâque. Plus tard, les Lévites les remplacèrent et furent mis à part pour le service de la maison. (Nomb. 8). Quant à ces derniers, les prescriptions les plus minutieuses relativement à leur entretien furent édictées, ainsi que pour celui des sacrificateurs (v. 37). S’employant au service de l’Éternel, ils avaient droit aux soins et à la sollicitude du peuple. Aujourd’hui encore, la Parole nous trace une ligne de conduite à suivre analogue, à l’égard des serviteurs du Seigneur : «Que celui qui est enseigné dans la Parole, fasse participer à tous les biens temporels celui qui enseigne» (Gal. 6:6). «Qui jamais va à la guerre à ses propres dépens ? Qui plante une vigne et n’en mange pas le fruit ? Ou qui paît un troupeau et ne mange pas du lait du troupeau ?... Si nous avons semé pour vous des biens spirituels, est-ce beaucoup que nous moissonnions de vos biens charnels ?... De même aussi, le Seigneur a ordonné à ceux qui annoncent l’Évangile de vivre de l’Évangile» (1 Cor. 9:4-14).

Les Lévites n’ayant pas d’héritage en Israël, devaient être les objets des soins de tout le peuple. Les prémices et les dîmes étaient pour la maison de l’Éternel et devaient y être apportées. La dîme de la dîme était consacrée par les lévites au service du temple. Que de leçons importantes nous avons à recueillir de tous ces faits quant à l’offrande de nos biens matériels qui est agréable au Seigneur pour les besoins de ses saints ! Dans un jour de fraîcheur et de réveil, comme celui que nous considérons, ces sacrifices étaient donnés en abondance, tandis que si le déclin se produit au milieu de l’assemblée, l’égoïsme et la mondanité augmentent et les serviteurs du Seigneur sont négligés. Puissions-nous secouer l’indifférence et le sommeil qui nous envahissent si facilement et abonder toujours dans l’œuvre qu’Il nous confie, sachant que notre travail n’est pas vain dans le Seigneur.

Toutes les clauses de l’alliance faite par le résidu se terminent par cette déclaration solennelle : «Et nous n’abandonnerons pas la maison de notre Dieu» (v. 39). Cette touchante promesse montre combien était profond et réel le réveil des consciences, mais faire des vœux est une chose et les tenir en est une autre ; le peuple ne tarda pas à en faire la pénible et humiliante expérience. Sous l’influence puissante de la bénédiction, on peut s’engager dans une voie de dévouement, dans laquelle on ne peut se maintenir que par une foi ouverte en lui. Puisse la devise de chacun de nous être telle et pour cela, nous avons besoin d’être «fortifiés en toute force, selon la puissance de sa gloire, pour toute patience et constance avec joie» (Col. 1:11). Rappelons-nous l’exhortation de Paul à Timothée : «Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce qui est dans le Christ Jésus» (2 Tim. 2:1).

 

 

11               Chapitre 11 — Ruine et relèvement

 

ME 1934 p. 148-159

 

Un des traits précieux du réveil opéré par la grâce divine dans le résidu remonté de la captivité nous est présenté au commencement de ce chapitre. Il comprenait que Jérusalem était le centre et le foyer du témoignage de Dieu sur la terre à ce moment-là. Il était nécessaire que tout le peuple en réalisât le prix aux yeux de Celui qui a dit : «Voici, je t’ai gravée sur les paumes de mes mains ; tes murs sont continuellement devant moi» (És. 49:16). Il fallait que les fidèles se groupassent dans la «sainte ville» (v. 1), autour du sanctuaire où, sur le fondement des sacrifices offerts sur l’autel, la présence du Seigneur pouvait être goûtée, bien que la gloire s’en fût allée. Le pays entier de Canaan est appelé «la terre sainte» (Zacharie 2:12) et Jérusalem «la sainte ville» (Dan. 9:24 ; Matt. 27:53), ainsi que «la cité du grand Roi» (Id. 5:35). Il en est ainsi malgré la désolation actuelle de ce pays et de cette ville, sur lesquels Dieu a constamment les yeux arrêtés et qu’Il a mis à part pour être le lieu de son habitation. Le jour vient où l’iniquité de ce pays sera ôtée en un seul jour et alors «Sion sera une couronne de beauté dans la main de l’Éternel»... «On t’appellera : Mon plaisir en elle, et ta terre : La mariée, car le plaisir de l’Éternel est en toi et ton pays sera marié» (És. 62:3, 4).

Il y avait de la place dans la sainte ville. Ailleurs, dans ce livre, nous lisons qu’elle «était spacieuse et grande, mais le peuple peu nombreux au milieu d’elle» (7:4). Mais il fallait avoir du cœur pour les intérêts du Seigneur et le bien de son peuple pour s’y rendre, afin d’y demeurer, vu qu’elle était en ruine et offrait peu de ressources à ses habitants.

Au milieu de la ruine de l’Église, Dieu a aussi aujourd’hui un témoignage auquel Il invite tous les siens à se rallier. Pour y prendre place, il est nécessaire que nos affections soient concentrées sur un Objet céleste, le Christ glorieux, maintenant méprisé du monde et qui nous invite à nous grouper autour de sa bannière, afin de le suivre dans le sentier de l’opprobre et de la souffrance. Moïse, marchant par la foi, refusa les honneurs de la cour de Pharaon, choisissant plutôt d’être dans l’affliction avec le peuple de Dieu, parce qu’il estimait l’opprobre de Christ un plus grand trésor que les richesses de l’Égypte, «car il regardait à la rémunération» (Héb. 11:26).

Au temps de Néhémie, beaucoup de Juifs préféraient rester associés à Babylone, ou au monde sous une forme ou une autre, plutôt que de s’engager dans le chemin de souffrances, de combat et de séparation dans lequel marchait le faible résidu revenu de la captivité, pour s’abriter derrière les murailles rebâties de Jérusalem. De même aujourd’hui, beaucoup d’enfants de Dieu ne comprennent pas le privilège d’être identifiés avec un Christ rejeté du monde et préfèrent trouver leurs aises au milieu de ceux qui le haïssent et rejettent sa croix.

Nous lisons que «le peuple bénit tous les hommes qui s’offrirent volontairement pour habiter à Jérusalem» (v. 2). Tous appréciaient le dévouement de ceux qui sacrifiaient leurs propres intérêts pour se ranger ainsi autour de la bannière de Sion, mais tous n’avaient peut-être pas le courage et le renoncement nécessaires pour le faire eux-mêmes. Il n’est pas rare de trouver des chrétiens qui estiment la foi et la consécration de cœur de ceux qui marchent dans le sentier tracé par la Parole, sans avoir eux-mêmes l’énergie spirituelle dont ils auraient besoin pour les imiter. Jonathan aimait David, mais il ne quitta jamais la maison de son père et, au lieu de partager les souffrances, puis l’exaltation de l’Oint de l’Éternel, il fut associé à Saül dans sa ruine finale. Prenons à cœur les leçons que nous donne l’histoire du peuple de Dieu, afin de suivre les traces de ceux qui, par la foi, furent étrangers et forains sur la terre et montrèrent clairement qu’ils recherchaient une patrie céleste. Aussi Dieu n’eut point honte d’être appelé leur Dieu «car il leur a préparé une cité» (Héb. 11:16).

Nous trouvons ensuite la nomenclature et le dénombrement par classes de ceux qui vinrent habiter à Jérusalem, ainsi que la mention de ceux qui habitaient d’autres lieux du pays. Tous ces détails nous montrent quel intérêt profond Dieu prenait au rétablissement du centre béni de son témoignage. Cette ville appelée de son nom devait être encore mise à part pour être le lieu de son habitation ; c’est pourquoi, comme nous l’avons rappelé déjà, elle est désignée en plusieurs passages, comme étant la ville sainte ; car, malgré sa désolation actuelle, elle sera un jour purifiée de son iniquité, de sorte que Dieu y habitera avec son peuple. «Elle sera appelée ville de justice, cité fidèle. Sion sera rachetée par le jugement, et les siens qui reviennent, par la justice» (És. 1:26). «Et moi je lui serai, dit l’Éternel, une muraille de feu tout autour, et je serai sa gloire au milieu d’elle.» (Zach. 2:5).

En raison de la place qu’occupe cette cité dans le cœur et les pensées de Dieu, nous ne devons pas être surpris de la bénédiction qu’Il faisait reposer sur ceux qui avaient à cœur sa restauration : «Demandez la paix de Jérusalem ; ceux qui t’aiment prospéreront» (Ps. 122:6). Il était aussi vrai au temps de Néhémie qu’aux jours glorieux de Salomon que «l’Éternel aime les portes de Sion plus que toutes les demeures de Jacob» (Ps. 87:2).

Pour être reconnus comme faisant partie du peuple de Dieu et, par conséquent pour avoir le droit d’habiter à Jérusalem, il fallait pouvoir prouver par sa généalogie sa descendance d’Abraham. Ceux qui, pendant leur séjour sur la terre d’exil, avaient montré de la négligence en ne conservant pas le registre qui établissait leurs droits furent exclus de leurs privilèges. Ce fut le cas, notamment, de sacrificateurs qui furent privés de leur place. Le gouverneur leur dit «qu’ils ne devaient pas manger des choses très saintes, jusqu’à ce que fût suscité un sacrificateur avec les urim et les thummim» (lumière et perfection) (Esdras 2:63). Pendant soixante-dix ans, ils avaient habité Babylone. Connaissant l’influence d’un tel centre d’idolâtrie et de corruption, nous ne serons pas surpris que, s’étant établis dans ce lieu de ténèbres, eux et leurs enfants eussent oublié le pays de leurs pères et que Jérusalem eût cessé d’être «au-dessus de la première de leurs joies» (Ps. 137:6). Ainsi, par leur mélange avec les nations ils avaient perdu leur généalogie. Par contre, ceux qui étaient fidèles à l’Éternel mettaient un soin jaloux à la conservation de leurs droits. Ils considéraient leur descendance d’Abraham comme leur plus précieux héritage, parce qu’il les plaçait au milieu d’un peuple favorisé de l’Eternel et au sein duquel Il avait fait sa demeure. Ils n’étaient pas comme Ésaü qui méprisa son droit d’aînesse ; au contraire, dans toutes leurs tribulations, ils s’y attachaient comme étant le titre donné de Dieu à toutes leurs espérances nationales.

Il est important en tout temps que les saints conservent leur généalogie. Les Juifs le faisaient en gardant avec soin le témoignage écrit de leur descendance. Le chrétien ne peut le faire qu’en marchant dans l’obéissance, dans la puissance de l’Esprit, qui nous rend capables de crier : «Abba, Père» ; déclarant ainsi avec notre esprit que nous sommes enfants de Dieu (Rom. 8:16). Pour avoir le droit et le privilège de prendre place à la Table du Seigneur, il faut donner la preuve de sa généalogie, c’est-à-dire manifester par les fruits de la vie divine qu’on fait bien partie de la famille de la foi. Nous ne pouvons pas lire dans les cœurs et, s’il y a chez ceux qui désirent faire partie du témoignage de Dieu ici-bas, de la négligence et de la mondanité, il arrive quelquefois que cette preuve est difficile à donner. Les âmes qui sont dans ce cas sont dans une position identique à celle des Juifs qui, par insouciance, avaient perdu leur généalogie et qui, comme nous l’avons vu, furent privés de la sacrificature. Quand le Seigneur viendra dans sa puissance, Il ne laissera aucun des siens en dehors des bénédictions qui sont le fruit de son œuvre à la croix. Jusque là, il incombe à chacun d’eux de prouver par sa marche, qu’il fait partie de son Assemblée. Dans un jour de profession générale, il est nécessaire que la sainteté de la Table du Seigneur soit préservée et que ceux qui s’en approchent marchent dans la crainte ; sinon ils ne peuvent être reconnus comme ayant leur place dans son témoignage.

Remarquons que nous trouvons dans l’énumération des habitants de Jérusalem que nous donne ce chapitre les sept classes de personnes dont ils se composaient :

Israël. Quoique deux seules tribus, celles de Juda et Benjamin (v. 4, 7) fussent remontées comme tribus de la captivité, l’Esprit de Dieu nous rappelle sans cesse que les pensées divines à l’égard des douze tribus demeurent inchangées. Celles-ci forment un tout qui sera manifesté dans la gloire du royaume, lorsque «l’Israël de Dieu» sera amené à la repentance et à la foi. Alors, dans une harmonie parfaite, ce peuple restauré et béni exaltera la grâce de son Dieu et se prosternera devant Celui qu’il a si longtemps rejeté et il proclamera Sa gloire à la face de l’univers. Ainsi, même dans ce jour de dispersion et d’abaissement, des représentants des dix tribus perdues se trouvaient au milieu de leurs frères, montrant par là que Dieu n’oubliait pas son propos envers tout Israël qui, dans un jour à venir, sera sauvé comme peuple et formera l’Israël de Dieu (Rom. 11:26).

Dans un jour de ruine, la foi d’Élie saisissait la pensée de Dieu quant à l’unité de son peuple et lui faisait bâtir un autel de douze pierres, représentant les douze tribus, malgré la division du royaume (1 Rois 18). Il en est de même aujourd’hui quant à l’unité du corps de Christ, qui existe en vertu de son union indissoluble avec le Chef glorifié par le Saint-Esprit. Nous devons proclamer cette vérité et nous appliquer à la manifester en gardant l’unité de l’Esprit par le lien de la paix (Éph. 4:3).

2° Les sacrificateurs. La première classe appelée Israël comprenait le peuple dans son ensemble, vu selon les pensées de Dieu comme objet de sa grâce et héritier des bénédictions promises à Jacob, devenu Israël, prince de Dieu. Puis nous avons la famille sacerdotale, descendant d’Aaron, et dont le service était particulièrement élevé, puisqu’il avait pour objet le maintien des relations d’Israël avec Dieu sur le terrain des sacrifices qui typifiaient la parfaite excellence du sacrifice de l’Agneau de Dieu. Nous avons tous aujourd’hui le privilège d’exercer la sacrificature, soit envers Dieu, comme une sainte sacrificature, offrant des sacrifices de louange, le fruit de nos lèvres qui bénissent son nom (1 Pierre 2:1-9 ; Héb. 13:15), soit envers les hommes, en faisant part de nos biens et des bénédictions que nous avons reçues de Dieu comme une sacrificature royale (Id. et Jean 7).

Séraïa était prince ou surintendant de la maison de Dieu (v. 11) parmi ses frères qui, au nombre de huit cent vingt-deux, «faisaient les travaux de la maison de Dieu». Aujourd’hui encore, dans l’Assemblée, il y a des «surveillants» qui, sans être officiellement établis dans cette charge, sont donnés du Seigneur pour exercer ce service et veiller au bon ordre de sa maison. Pour cela ils doivent posséder un caractère moral et manifester des vertus chrétiennes qui imposent le respect à tous et leur donnent l’autorité nécessaire pour accomplir cette surveillance (1 Tim. 3).

3° Les Lévites dont le nombre était très restreint (v. 18). En un jour de ruine, ceux qui se consacrent au service du Seigneur remplissant ainsi les fonctions des lévites, sont peu nombreux. Il faut du renoncement et de l’énergie spirituelle pour vaquer à ce service qui entraîne de la souffrance et des peines parfois bien douloureuses. Si le coeur est attaché au Seigneur, la force ne manquera pas à celui qui désire faire sa volonté.

Tous les croyants maintenant revêtent le double caractère de lévites et de sacrificateurs. Nous entrons dans le sanctuaire pour adorer et nous sortons «pour annoncer les vertus de celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière» (1 Pierre 2:9). Nous devenons ainsi, comme une «sacrificature royale», les dispensateurs des bienfaits de Dieu. N’oublions ni l’un ni l’autre de ces services qui nous sont confiés. Ceux dont les lèvres sont ouvertes pour louer le Seigneur d’un cœur rempli de son amour seront aussi ceux qui pourront le mieux accomplir leurs fonctions de lévites, soit en œuvres de bienfaisance (Héb. 13:15, 16), soit en paroles de grâce, pour faire connaître son Évangile à ceux qui y sont encore étrangers.

Il y avait, dans le service des lévites, ce qui concernait «l’ouvrage extérieur de la maison de Dieu» (v. 16) ; cela correspondait un peu aux fonctions des serviteurs ou diacres (1 Tim. 3:8), qui s’occupaient des besoins temporels des saints, et de leurs circonstances extérieures. Bien que les charges officielles de surveillants et serviteurs n’existent plus dans l’Assemblée, le Seigneur suscite des frères ayant à cœur de remplir ces fonctions pour le bien des saints. Si elles sont accomplies fidèlement, il peut arriver que ceux qui s’y emploient acquièrent «un bon degré» et que le Seigneur leur confère le ministère de la Parole, soit celui de l’édification des saints, soit celui de la prédication de l’Évangile (1 Tim. 3:13). Nous en avons un bel exemple en Étienne et en Philippe qui, choisis «pour servir aux tables» (Actes 6:5), devinrent de puissants instruments pour la prédication de la Parole aux Juifs et aux nations (Actes 7 et 8).

4° Les chantres. Matthania, le chef des lévites, «entonnait la louange à la prière» (v. 17), avec d’autres qui lui étaient associés. Dans le désert, un tel service n’avait pas encore été institué. Ce ne fut que lorsque le royaume fut établi en puissance entre les mains de David, l’oint de l’Éternel, que la louange fut réalisée en Israël ; des Lévites furent établis devant l’arche de l’Éternel pour rappeler et célébrer et louer l’Éternel leur Dieu (1 Chron. 16:4). David remit ce service à Asaph et à ses frères «pour célébrer l’Éternel». La généalogie de Matthania, qui avait les mêmes fonctions, nous est donnée jusqu’à Asaph, ce qui nous montre combien, dans les moindres détails, le résidu fidèle avait à cœur de rétablir l’ordre établi, soit par Moïse, soit par David, en recherchant, dans ce but, toutes les directions nécessaires dans la Parole. Dans un jour de ruine comme le nôtre, cette Parole est aussi la sauvegarde de la foi. Nous avons à revenir à ce qui est dès le commencement, en rejetant les traditions et tout ce qui est le fruit de la propre volonté de l’homme.

Quant au service de Matthania, remarquons encore combien il est précieux de le réaliser dans l’Assemblée. Nous pouvons déjà entonner la louange du ciel. Pour exprimer publiquement l’adoration des saints réunis, il faut un cœur en communion avec le Seigneur et conduit par l’Esprit qui emploie ceux qu’Il veut pour ce service. Lorsque le royaume sera établi en puissance entre les mains du Roi de gloire, la joie sera complète et les cantiques éclateront de toutes parts. Dans les cieux et sur la terre, il y aura une même voix pour donner gloire à l’Agneau.

5° Les portiers (v. 19) et leurs frères qui gardaient les portes. C’était à eux qu’incombait la responsabilité de n’admettre dans la cité que ceux qui avaient le droit d’y entrer et de refuser l’admission à ceux qui n’étaient pas qualifiés pour y pénétrer. C’était donc un poste des plus importants pour la sécurité de la ville. Il y a aussi aujourd’hui des gardiens aux portes de l’Assemblée de Dieu. Car, bien qu’il soit vrai que tout croyant, tout membre du corps de Christ ait sa place à la Table du Seigneur, ceux qui ont reçu de lui la sagesse et l’autorité morale, nécessaire pour discerner l’état des âmes qui désirent prendre cette place, doivent s’assurer que celles-ci sont qualifiées pour être reçues dans l’Assemblée. Le relâchement et la négligence à cet égard ont eu des conséquences funestes dans bien des rassemblements de croyants groupés autour de la Table du Seigneur et ont même amené la ruine de ceux-ci dans bien des cas. Il est donc de la plus haute importance que des hommes fidèles et expérimentés soient chargés du service de portiers dans l’Assemblée.

6° Les Néthiniens (v. 21), dont le nom signifie donné, étaient probablement les descendants des Gabaonites, établis «coupeurs de bois et puiseurs d’eau pour l’assemblée et pour l’autel de l’Éternel» (Jos. 9:27). À ceux-là furent ajoutés les Madianites donnés par Moïse aux Lévites pour vaquer «au service du tabernacle de l’Éternel» (Nomb. 31:47). De race étrangère, leur asservissement à Israël était devenu une source de bénédiction pour eux, puisqu’on les voit manifester un intérêt touchant pour le service du sanctuaire auquel ils avaient été consacrés ; tandis que, dans ce jour de réveil, la plus grande partie des fils d’Israël étaient demeurés dans le pays de la captivité, ils en étaient remontés pour rebâtir l’autel de l’Éternel (Esdras 2:58). Nous pouvons voir en eux une image des nations qui seront amenées à l’obéissance du grand Roi et qui jouiront, avec son peuple, des bénédictions de son règne sous son sceptre de paix.

7° Les serviteurs de Salomon (v. 3), étaient aussi de race étrangère. Tous ceux qui restaient des nations dépossédées de Canaan, «Salomon les assujettit aux levées pour servir» (1 Rois 9:21). Comme les Néthiniens, ils occupent une place honorable dans le rétablissement du peuple de Dieu revenu de la captivité. Ce fait nous prouve que la grâce divine s’élève au-dessus de toutes les barrières et prend les misérables pour les faire asseoir «avec les nobles» et leur donner en héritage un trône de gloire (1 Sam. 2:8).

Le reste du peuple, «les lévites et les sacrificateurs habitèrent dans toutes les villes de Juda, chacun dans son héritage» (v. 20). Ce rétablissement était une image de celui qui sera réalisé au jour où le Messie régnera en gloire et qui, étant fondé sur son œuvre de rédemption, sera immuable à toujours. Au temps de Néhémie le gouvernement de Dieu s’exerçait sur son peuple à cause de ses voies passées. Nous lisons avec tristesse que les chantres dépendaient pour leur entretien d’un traitement fixe qui leur était donné «selon le commandement du roi» (v. 23). Ceci nous rappelle qu’Israël avait perdu son indépendance et que «Lo Ammi» (pas mon peuple) était écrit sur lui. Péthakhia, des fils de Juda, était auprès du roi «pour toutes les affaires du peuple» (v. 24). Il l’informait de tout ce qui concernait l’administration et les besoins des Juifs, faible image de Celui qui est toujours vivant pour intercéder pour nous auprès de Dieu, qui défend la cause des siens et fait intervenir en leur faveur sa grâce et sa puissance jusqu’au jour de la gloire.

En terminant, rappelons encore combien il importe que, semblables à ce résidu fidèle, nous gardions précieusement notre généalogie spirituelle. C’est ainsi que le chrétien affermit sa vocation et son élection (2 Pierre 1:10), non dans le cœur de Dieu, mais dans son propre cœur. Paul pouvait dire aux Thessaloniciens : «Sachant, frères, aimés de Dieu, votre élection» (1 Thess. 1:4). Leur marche fidèle en était la preuve éclatante pour lui et les autres croyants.

Ajoutons encore que tous ceux d’Israël qui montèrent volontairement à Jérusalem pour y habiter (v. 2), la voyaient selon les pensées de Dieu, comme objet de ses affections, la Sion qu’Il aime et qu’Il a choisie pour y habiter. C’était le cas du moins des hommes de foi de ce temps-là. Nous avons besoin d’entrer dans les pensées de Dieu relativement à l’Assemblée, chère au cœur de Christ, malgré sa ruine actuelle, afin de pouvoir prier pour elle, travailler à son bien et souffrir avec elle : «À cause de mes frères et de mes compagnons, je dirai : Que la paix soit en toi ! À cause de la maison de l’Éternel, notre Dieu, je rechercherai ton bien» (Ps. 122:8, 9).