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Le chant et les cantiques dans les Écritures
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quelques réflexions
Jacques-André Monard
Mes serviteurs chanteront de joie à cause du bonheur de leur cœur (Ésaïe 65,14)
Table des matières
6 Le chant à l’époque du Nouveau Testament
9 Le chant dans l’assemblée chrétienne
10 Les instruments de musique dans le culte
12 Les cantiques dans le culte
13 Au milieu de l’assemblée, je chanterai tes louanges
14 Le chant dans la gloire à venir
Les plus anciennes mentions du chant se trouvent dans la Genèse (31:27) et dans le livre de Job (8:21; 33:26; 35:10). Elles nous le présentent comme une expression de la joie. C’est là sa signification première et fondamentale. Cela n’exclut pas que le chant puisse occasionnellement traduire d’autres états d’âme. Pensons, par exemple, au «chant de l’Arc» (2 Sam. 1:17-27), complainte composée à l’occasion de la mort d’un intime ami.
Lorsqu’un coeur est rempli, non seulement de joie, mais de reconnaissance envers Dieu, et chante sa louange, son chant devient un cantique.
Le premier de ceux que nous trouvons dans l’Écriture est celui qu’Israël chanta après la traversée de la mer Rouge, en Exode 15. Il contient plusieurs traits caractéristiques: c’est une louange collective, la louange d’un peuple, d’un peuple que Dieu a racheté de l’esclavage, qu’il a amené à lui par sa grâce et par sa puissance, et qu’il reconnaît comme sien. On a là une figure remarquable du culte chrétien.
Souvent, dans la Parole, un cantique célèbre une délivrance. Il «raconte», c’est-à-dire décrit en détail, ce que Dieu a fait, et célèbre ce qu’il est. Sa grandeur, sa puissance, sa bonté, ses délivrances, ce qu’il a déjà fait et ce qu’il fera encore, en sont les thèmes (voir par exemple: Deut. 32; Jug. 5; 1 Sam. 2; 2 Sam. 22.)
Lorsque le peuple d’Israël fut établi dans son pays et que les temps troublés des Juges furent passés, lorsque Dieu manifesta «le roi selon son cœur» et le «lieu qu’il avait choisi pour y mettre son nom», le chant et les cantiques connurent un développement d’une richesse incomparable. David, «le doux psalmiste d’Israël» (2 Sam. 23:1), fut l’instrument que Dieu prépara et doua pour cela. Jeune homme, il est déjà connu comme joueur de harpe, quelqu’un qui sait bien jouer (1 Sam. 16:17). C’est une âme sensible et délicate (1 Sam. 24:6; 2 Sam. 3:39). Beaucoup plus que cela, c’est un homme qui craint l’Éternel, qui l’aime, qui se confie en lui. Les difficultés et les souffrances qui jalonnent son chemin le rapprochent de Dieu, et il fait l’expérience de ses délivrances. En dépit des privations et des angoisses qui sont sa part, il apprend à se réjouir en son Dieu. C’est dans le désert de Juda, lorsqu’il se cache pour sauver sa vie, qu’il écrit: « Tu as été mon secours, et à l’ombre de tes ailes je chanterai de joie» (Ps. 63:7).
David compose ainsi un grand nombre de psaumes. Il y exprime à Dieu non seulement ses louanges — en des formes multiples et variées — mais sa joie, ses angoisses, ses supplications, son humiliation même. Au temps de sa royauté, et en vue du temple qu’il prépare et que Salomon construira, il établit des chantres et règle la louange selon les directions que l’Esprit de Dieu lui donne. Plusieurs des chantres, Asaph en particulier, composent eux-mêmes des psaumes. Mais ce ne sont pas simplement les sentiments de leurs coeurs qu’ils écrivent; l’Esprit de Dieu parle en eux (2 Sam. 23:2). Il s’ensuit qu’un recueil de cantiques inspirés voit le jour, le livre des Psaumes. Ce recueil fournit aux Israélites pieux une expression selon Dieu de leurs états d’âme, de leurs besoins, de leurs désirs, de leurs louanges, de leurs prières. Et beaucoup de psaumes sont faits «pour instruire» (voir par exemple Ps. 78). Enseignés par une génération à celle qui suit, ces cantiques pourront perpétuer en Israël la connaissance de Dieu et de son oeuvre.
Mais les paroles composées par les psalmistes dépassent souvent le cadre des circonstances qui les ont fait naître. Et l’Esprit de Dieu, agissant en eux comme Esprit prophétique, nous révèle ce qui se trouvera dans le coeur du Seigneur Jésus lui-même, comme aussi dans le coeur d’Israël restauré au temps de la fin. C’est ainsi que naissent les précieux psaumes messianiques, qui décrivent d’une manière unique la profondeur des souffrances de Christ, et les gloires qui suivront.
Ces paroles inspirées nous ont été conservées, Dieu soit béni, mais les mélodies composées en même temps sont perdues. Cependant l’Écriture témoigne de la place importante qui a été donnée à la musique à cette époque. Nous apprenons que David a «inventé» et «fait» un grand nombre d’instruments de musique, et que ceux-ci ont été en usage durant les siècles qui ont suivi (1 Chron. 23:5; Amos 6:5; 2 Chron. 29:26, 27; Néh. 12:36). Au temps d’Ézéchias — et même après le retour de la captivité, — ils sont encore appelés «les instruments de David». Plus remarquable encore est l’expression «les instruments de musique de Dieu», utilisée en 1 Chroniques 16:42. Elle nous enseigne qu’il y a un genre de musique qui s’accorde avec les cantiques et avec la louange de Dieu. Bien que non inspirée, la musique de David a été intimement liée au culte de l’Éternel (voir par exemple: 1 Chron. 25:1; Ps. 33:3; 71:22; 81:2.) Elle était en accord avec les sentiments qui s’élevaient des âmes pieuses vers Dieu. Et elle était digne du message divin qu’elle avait à porter.
En est-il de même des cantiques que nous chantons? Chaque civilisation a eu ses traditions musicales. La civilisation chrétienne, à laquelle nous appartenons, a sa culture musicale propre. Il est important de remarquer que cette musique — qui a sa source dans la tradition musicale juive, et donc son origine lointaine en David — s’est développée au cours des siècles dans une étroite liaison avec le christianisme. II en résulte que la musique dite classique fournit des moyens d’expression bien adaptés aux sentiments chrétiens, — ce qui ne signifie pas, d’ailleurs, que tout ce qu’elle a produit ait ce caractère-là. D’autres musiques se sont développées au sein du paganisme, et sont propres à traduire les états d’âme caractéristiques des traditions païennes et du culte des démons. Notre siècle, dans lequel une civilisation qui fut christianisée rejette l’un après l’autre tous les héritages du christianisme, montre un grand intérêt pour ces musiques. Prenons garde de ne pas nous laisser entraîner. Il y a des genres musicaux qui sont incompatibles avec le chant chrétien.
Certains mots obscurs que l’on trouve dans les suscriptions des psaumes, Alamoth, Sheminith, Leannoth, ... indiquent très vraisemblablement des «modes» (1 Chron. 15:20, 21), ou registres, dans lesquels ces psaumes devaient être exécutés. La manière de chanter un cantique doit être adaptée aux paroles qui le composent. Le Psaume 102 et le Psaume 103, pour ne citer que ceux-là, ne peuvent pas être chantés de la même manière! Or tout cela doit être appris. C’est pour cette raison qu’au temps de David, on enseigne à chanter: «Kenania, le chef des Lévites pour la musique, enseignait la musique; car il était intelligent» (1 Chron. 15:22). Et dans cet heureux temps, on trouve jusqu’à deux cent quatre-vingt-huit «hommes experts», «instruits dans l’art de chanter à l’Éternel» (1 Chron. 25:7). Par là, notre attention est attirée sur l’utilité, et même la nécessité, d’une certaine étude de la musique, ou tout au moins du chant. Penserions-nous pouvoir chanter convenablement, si nous ne cultivons pas en quelque mesure «l’art de chanter»?
Les mentions du chant dans le Nouveau Testament sont relativement peu nombreuses. Elles attestent néanmoins que, parmi les Israélites qui craignaient Dieu, les cantiques existaient toujours et qu’on savait les chanter. Jacques, s’adressant aux douze tribus dans la dispersion, et particulièrement à ceux qui parmi eux étaient devenus chrétiens, leur dit: «Quelqu’un est-il joyeux, qu’il chante des cantiques» (Jacq. 5:13). Prenons à coeur cette exhortation.
Après l’institution de la Cène, quelques instants avant le départ du Seigneur Jésus et de ses disciples pour le jardin de Gethsémané, il nous est rapporté qu’«ayant chanté une hymne, ils sortirent et s’en allèrent à la montagne des Oliviers» (Matt. 26:30; Marc 14:26). Malgré le trouble profond qui étreint le coeur du Sauveur à ce moment (Jean 13:21), il chante avec les siens une hymne de louange à Dieu. Accents solennels s’élevant du coeur de Celui qui, dans une soumission parfaite à la volonté divine, peut se réjouir malgré tout, sachant que Dieu n’abandonnera pas son âme au shéol! (Voir au Psaume 16 l’enchaînement des versets 9, 10 et 11.)
Paul et Silas, du fond de leur prison, et malgré leurs plaies, «chantaient les louanges de Dieu; et les prisonniers les écoutaient» (Actes 16:25). Ce beau passage nous montre que la joie chrétienne peut être réalisée dans les circonstances les plus adverses. Il nous dit aussi que le chant peut être en témoignage à ceux qui ne connaissent pas le Seigneur Jésus.
1 Corinthiens 14:15 présente le chant dans l’assemblée, en parallèle avec la prière: «Je prierai avec l’esprit, mais je prierai aussi avec l’intelligence; je chanterai avec l’esprit, mais je chanterai aussi avec l’intelligence.» Le cantique ou la prière doit être une action intelligente, sous la conduite du Saint Esprit. Cela nous montre la nécessité d’un exercice devant le Seigneur, non seulement pour proposer à l’assemblée le chant de tel ou tel cantique, mais aussi pour chanter en étant entièrement engagés dans cette action. Quelle bénédiction si ce n’est pas uniquement nos lèvres qui chantent, mais tout notre être!
Encourageons-nous à indiquer des cantiques, ou des strophes de cantiques, qui, par leur à-propos, facilitent le ralliement de tous les coeurs à ce qui est exprimé. Et si une seule strophe d’un cantique est bien à sa place, devons-nous nous sentir obligés de proposer le chant du cantique entier?
Dans aucun passage du Nouveau Testament, nous ne trouvons les instruments de musique associés au service divin (sauf dans l’Apocalypse, où ils sont mentionnés de façon figurative). On le comprend sans peine. Toute la splendeur terrestre qui se manifestait autrefois dans le culte rendu au Dieu d’Israël — les vêtements somptueux, les ustensiles artistement ouvragés, le temple recouvert d’or, — tout cela n’a plus sa place depuis la venue de Jésus. Les choses extérieures, celles qui ont de l’apparence, celles qui ont de l’attrait pour l’homme naturel, celles qui mettent l’homme en avant, n’ont rien à faire dans le culte chrétien. Tout est spirituel, intérieur. «Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité» (Jean 4:24). Les sacrifices de louanges sont le fruit des lèvres qui confessent son nom (Héb. 13:15).
Deux passages des épîtres mettent l’accent sur le fait que le chant est d’abord dans les coeurs, et que c’est en réalité de là qu’il s’élève vers Dieu. «Vous entretenant par des psaumes et des hymnes et des cantiques spirituels, chantant et psalmodiant de votre coeur au Seigneur» (Éph. 5:19); «vous enseignant et vous exhortant l’un l’autre, par des psaumes, des hymnes, des cantiques spirituels, chantant de vos coeurs à Dieu dans un esprit de grâce» (Col. 3:16). Et ces passages montrent aussi que par les cantiques, nous pouvons nous encourager, nous exhorter, et même nous enseigner mutuellement.
Ces versets nous invitent à chanter peut-être davantage que nous ne le faisons. Que nous soyons seuls, ou en famille, ou à quelques-uns, le chant demeure un précieux moyen d’expression de ce que Dieu a produit dans nos coeurs. Et non seulement il exprime ce qui s’y trouve déjà, mais il y stimule des pensées et des sentiments selon Dieu. II apporte ainsi l’édification, l’encouragement et la consolation. Il nous rapproche de Dieu. Bien sûr, pour que les cantiques puissent retentir dans nos foyers, il faut que l’atmosphère le permette. Si une autre musique remplit constamment nos maisons, avons-nous encore le désir ou la possibilité de chanter des cantiques?
Le culte chrétien — dans le vrai sens du terme — se réalise dans le rassemblement autour du Seigneur Jésus. Ceux qui l’ont reçu comme leur Sauveur personnel, qui s’appuient sur son oeuvre à la croix comme le fondement inébranlable de leur salut, ont le privilège de l’entourer. Ils ont été «justifiés sur le principe de la foi» (Rom. 5:1); ils savent que leurs péchés sont pardonnés, et que rien ni personne ne peut porter atteinte à leur sécurité absolue devant Dieu. Ils ont été introduits dans la douce relation d’enfants de Dieu, et, avec Jésus, ils s’approchent de Celui qu’ils connaissent maintenant comme Père. Lorsqu’ils sont ainsi rassemblés, il leur est précieux de se souvenir de leur Sauveur et de l’oeuvre unique qu’il a accomplie, — non pas seulement de ce qu’il a fait pour eux, mais de Jésus lui-même et de ses souffrances, de sa mort ignominieuse et de sa résurrection. Par des prières et des cantiques, ils expriment au Père et au Fils la louange, la reconnaissance et l’adoration de leurs coeurs. Ils parlent au Père de son Fils bien-aimé et de l’oeuvre par laquelle il l’a pleinement glorifié. Avec le Père, ils se réjouissent dans le Fils. «Notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ» (1 Jean 1:3). En mangeant le pain et en buvant la coupe, ils annoncent la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne (1 Cor. 11:26). Et le cantique qu’ils chantent à ce moment est comme un écho de l’hymne que leur Sauveur a chanté avec ses disciples la nuit où il fut livré.
Mais la Parole de Dieu nous révèle que, tandis que l’assemblée est ainsi réunie autour de Jésus pour adorer le Père, une autre voix est présente, bien qu’imperceptible aux oreilles humaines: celle de Jésus lui-même! «J’ai attendu patiemment l’Éternel; et il s’est penché vers moi, et a entendu mon cri. Il m’a fait monter hors du puits de la destruction, hors d’un bourbier fangeux; et il a mis mes pieds sur un roc, il a établi mes pas. Et il a mis dans ma bouche un cantique nouveau, la louange de notre Dieu. Plusieurs le verront et craindront, et se confieront en l’Éternel» (Ps. 40:1-3).
Dans une obéissance parfaite, Jésus a accompli la volonté de Dieu (Ps. 40:6-8). Il a porté les iniquités de ceux qui sont maintenant les siens, et des maux sans nombre l’ont entouré (v. 12). Sa supplication « Éternel! hâte-toi de me secourir» (v. 13) a enfin été exaucée. Et maintenant il peut louer Dieu pour sa délivrance (v. 1, 2). II y a dans sa bouche un cantique nouveau (v. 3). Hébreux 2:12, citant le Psaume 22, nous déclare aussi ce mystère: «J’annoncerai ton nom à mes frères; au milieu de l’assemblée je chanterai tes louanges». Paroles inexprimables! Et la voix de ceux qu’il n’a pas honte d’appeler frères (Héb. 2:11) se joint à la sienne, faiblement, mais de tout coeur, pour adorer le Père.
Dans les scènes futures qu’elle nous présente, l’Apocalypse mentionne plus d’une fois le chant et les cantiques. Le passage qui nous concerne le plus directement est celui du chapitre 5, dans lequel les rachetés glorifiés sont vus sous la figure des vingt-quatre anciens entourant l’Agneau qui a été immolé. Dans cette scène glorieuse où retentit la louange universelle à Dieu et à l’Agneau, les rachetés seuls chantent un cantique nouveau (comparer v. 9: ils «chantent», et v. 12 et 13: les anges et toutes les créatures «disent»). Part merveilleuse de ceux qui ont été lavés de leurs péchés dans le sang de l’Agneau, et qui, maintenant revêtus de leurs corps glorieux, voient leur Sauveur face à face et connaissent comme ils ont été connus (1 Cor. 13:12).
Alors le divin Semeur, Celui qui est allé en pleurant, portant la semence qu’il répandait, reviendra avec chants de joie, portant ses gerbes (Ps. 126:6).