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Edward Dennett
Table des matières :
2 Chapitre 2 — Christ nous révélant le Père
2.1 Révélation de Dieu avant Christ
2.2 C’est Christ qui a révélé le Père
2.3 Comment le Seigneur révèle le Père
2.4 Les actes et les paroles du Seigneur comme moyens de révéler le Père
2.5 Le Père révélé dans la mort de Christ
2.6 Christ parfaite révélation du Père
2.7 Christ connu dans l’Écriture seulement
2.8 Le Père révélé aux disciples
2.9 Les disciples dans la même position que Christ
3 Chapitre 3 — Les enfants de Dieu
3.1 Enfants selon Jean 11 et Jean 1
3.2 Enfants par la nouvelle naissance
3.2.1 Enfants comme conséquence de l’amour du Père
3.2.2 Nés de Dieu, nés de l’Esprit
3.2.3 Nés par l’effet de la Parole
3.3 Expiation et pardon nécessaires même avec la nouvelle naissance
3.4 La place d’enfant est un droit conféré par Dieu
3.5 Le nom du Père connu des enfants
4 Chapitre 4 — L’Esprit d’adoption
4.1 La relation enfant-Père connue par l’Esprit
4.2 Condition pour recevoir le Saint Esprit et rapports avec la nouvelle naissance
4.3 Effets de la présence du Saint Esprit
4.3.2 Rechercher l’esprit filial — Ne pas contrister l’Esprit Saint
4.3.3 Le Saint Esprit conduit les enfants
4.3.4 Le Saint Esprit notre seule puissance
4.3.5 Héritier de Dieu, co-héritiers de Christ
4.3.6 On ne peut échapper à la souffrance
5 Chapitre 5 — Trois classes dans la famille de Dieu (1 Jean 2)
5.2 Points communs à toute la famille
5.3.2 Celui qui est dès le commencement
5.3.3 Connaître Celui qui est dès le commencement
5.3.4 Le plus haut degré de la connaissance
5.3.5 Les pères ont aussi à croître
5.4.1 La Parole de Dieu demeure en eux
5.4.2 La Parole source de victoire
5.4.4 Danger des choses qui sont dans le monde
5.5.2 Exhortations spéciales aux petits enfants
5.5.4 Besoin d’être avertis —Les trois moyens d’être gardés
5.5.4.1 L’onction de la part du Saint
5.5.4.3 Retourner au commencement
5.5.5.1 La promesse de la vie éternelle
5.5.7 Attendre le retour de Christ
6 Chapitre 6 — Traits distinctifs des enfants de Dieu
7 Chapitre 7 — Les désirs du Père pour ses enfants
7.1 Manifester la vie de Christ
7.2 Parfait comme le Père céleste
7.3 Miséricordieux comme le Père
7.4 Sans murmures et sans raisonnements
8 Chapitre 8 — Le gouvernement du Père à l’égard de ses enfants
8.1 Le principe du gouvernement de Dieu
8.2 Garder la pensée du rachat par le sang de l’Agneau préconnu
8.3 La discipline des vrais fils
8.3.2 La contradiction des pécheurs utilisée comme discipline
8.3.3 La discipline : une expression de l’amour du Père
8.3.5 La discipline concerne les vrais fils
8.5 Amour et souffrances dans la discipline
8.6 Courage et confiance dans la discipline
9 Chapitre 9 — Les privilèges des enfants de Dieu
9.1 Entourés de bénédictions et de l’amour du Père
9.2 Enfants : les objets des soins du Père
9.3 Besoins du corps, besoins terrestres
9.4 Chercher premièrement le royaume de Dieu
9.5 Les enfants exposent à Dieu leurs besoins
9.6 L’exaucement ou le non exaucement des prières
9.8 Prière et besoins en dehors de nous
9.9 La communion avec le Père et le Fils
9.10 Rechercher la jouissance de nos privilèges
10 Chapitre 10 — La condition future et la demeure des enfants de Dieu
10.1 Condition des enfants de Dieu : rendus conformes à l’image de Christ
10.1.2 Dieu travaille à rendre ses enfants conformes à Christ
10.1.3 Les yeux fixés sur Christ
10.1.4 Rendus conformes à Christ comme condition présente
10.1.5 Rendus conformes à Christ comme condition future
10.1.6 Rendus conformes à Christ dans le corps ressuscité
10.1.7 Rendus conformes à Christ comme homme glorifié
10.2 La demeure des enfants de Dieu
10.2.2 Attendant la possession de la place préparée
10.2.3 Comment est la demeure préparée
10.2.4 Une demeure où l’on est avec Christ
Les sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest ; ME 1886 p. 293 à ME 1887 p. 221 (20 fractions)
L’auteur de ces pages a essayé d’exposer la vérité concernant la famille de Dieu. Il commence par parler de Christ qui nous a révélé le Père, puis il passe en revue les différents aspects de la famille de Dieu, que l’Écriture nous présente. Il recommande bien instamment ce sujet à ses lecteurs, parce que, au milieu des nombreuses questions ecclésiastiques qui troublent souvent les enfants de Dieu, le coeur peut être réchauffé et élargi par la contemplation de toutes les affections de Dieu. Dans les temps de discussion comme les nôtres, le coeur se refroidit et se rétrécit facilement, s’il n’a pas toujours présents devant lui les droits de tous les enfants de Dieu. Quelle inexprimable souffrance d’être forcé, pour l’amour du Seigneur et par obéissance à sa parole, de se retirer des saints qui marchent dans le désordre (2 Thes. 3:6) ; mais c’est pour cela qu’il est d’autant plus nécessaire de nous rappeler que nous ne pouvons jamais être déchargés de notre dette d’amour à leur égard. L’obligation que nous impose la parole du Seigneur subsiste toujours : «C’est ici mon commandement : Que vous vous aimiez les uns les autres, comme je vous ai aimés» (Jean 15:12).
Le désir de l’auteur, c’est d’exposer les relations de tous les croyants avec Dieu comme leur Père, de rappeler le fait que, tous ensemble, ils sont l’objet de l’amour du Père, et que, en conséquence, il existe nécessairement un lien commun entre eux et avec Dieu. Sa prière, c’est que, dans l’énergie du Saint Esprit, le Seigneur emploie ce moyen pour imprimer, tout de nouveau, Sa Parole dans les coeurs de ses bien-aimés.
Il a plu à Dieu de se révéler de différentes manières et sous différents caractères, dans tous les âges et dans toutes les dispensations. Avant la croix, il s’est fait connaître à Adam, aux patriarches et à son peuple d’Israël ; mais c’est seulement à la venue de Christ, qui a glorifié Dieu sur la terre et a achevé l’oeuvre que Celui-ci lui avait donnée à faire, que tout fut manifesté, que Dieu, sous son nom de Père, put être pleinement révélé. Avant cela, il était entouré de nuées et d’obscurité ; mais, aussitôt que l’expiation eut été accomplie par la mort de Christ sur la croix, le voile fut déchiré, et les croyants purent entrer dans la lumière comme Dieu est dans la lumière. Tout ce qui nous tenait à distance de Dieu, tout ce qui nous le cachait, avait disparu, et tout ce qu’il est, tout ce que nous rappelle ce nom de Père, fut pleinement manifesté. Christ lui-même, comme le Fils éternel, mais comme la Parole, qui fut faite chair et habita au milieu de nous (Jean 1:14), fut Celui qui nous révéla le Père ; mais jusqu’à la descente du Saint Esprit, il y avait peu de puissance pour saisir cette révélation, si même il y en avait, chez ceux auxquels elle était présentée. Quelques yeux rendus clairvoyants contemplaient sa gloire comme celle d’un Fils unique auprès du père ; mais Jean-Baptiste ne le connaissait que comme celui sur qui il avait vu le Saint Esprit descendre, et le Seigneur dut même dire à Philippe : «Celui qui m’a vu, a vu le Père» (Jean 14:9).
Pratiquement donc, Dieu n’était pas connu comme Père avant la Pentecôte. C’est ce qui paraîtra clair au lecteur, s’il considère les révélations successives que Dieu accorda à son peuple sous l’ancienne alliance. Dieu dit à Abraham : «Je suis le Dieu fort, tout-puissant ; marche devant ma face et sois intègre» (Gen. 17:1) et à Moïse : «Je suis celui qui suis». Il dit aussi : «Tu diras ainsi aux enfants d’Israël : Celui qui s’appelle Je suis m’a envoyé vers vous» (Ex. 3 ; 4) ; et lorsqu’il entra dans des relations particulières avec Israël, ce fut sous le nom de Jéhovah, qui resta Son nom comme Dieu de l’alliance avec Israël. Cherchez dans tout l’Ancien Testament, et vous verrez que le nom de Père appliqué à Dieu, ne s’y trouve pas plus de cinq ou six fois, et, dans la plupart de ces cas, pour indiquer la source de notre existence plutôt que nos relations.
Tous les saints de l’Ancien Testament étaient, sans doute, nés de nouveau. Cela est bien certain, car sans la vie nouvelle et la nouvelle nature, ils n’auraient pu converser avec Dieu ; mais il est également vrai qu’ils n’ont jamais connu Dieu comme Père, et que, par conséquent, ils ne pouvaient jouir des privilèges de cette relation. Une parole de l’Écriture fixe ce point d’une manière définitive : «Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui a qui le Fils voudra le révéler (Matt. 11:27).
Il est donc bien prouvé que Dieu n’est pas révélé comme Père avant la venue de Christ. Passant maintenant au Nouveau Testament, nous verrons, comme cela a déjà été établi, que Christ lui-même fut celui qui nous révéla le Père, et que c’est dans l’évangile de Jean qu’il se présente à nous comme tel. Dans le premier chapitre de cet évangile, il est dit : «Personne ne vit jamais Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l’a fait connaître» (Jean 1:18). Non seulement ce passage nous apprend que le Fils unique nous a fait connaître le Père, mais il nous enseigne aussi que nul autre que lui ne pouvait le faire, et cela à cause de la position qu’il occupait, position d’intimité et de communion dont il jouissait, lui seul, et qui est indiquée par ces mots : «dans le sein du Père». Il n’a jamais quitté cette place ; il y était (car ceci est une expression morale) autant, quand il était l’homme de douleur et sachant ce que c’est que la langueur, que lorsqu’il jouissait de la gloire du Père avant que le monde fût fait ; et sur la croix même, il y était encore, car il dit : «À cause de ceci le Père m’aime, c’est que moi je laisse ma vie, afin que je la reprenne» (Jean 10:17). Sa mort, par obéissance au commandement qu’il avait reçu, fournissait à l’amour de son Père un nouveau motif de s’exprimer. Plus loin dans cet évangile, nous voyons qu’un de ses disciples peut se reposer sur son sein, et ce même disciple fut l’instrument choisi pour développer, dans son évangile, ce qui nous est révélé, que Christ est le Fils éternel de Dieu ; et ceci peut, en quelque mesure nous aider à comprendre que celui-là seul qui était toujours dans le sein du Père, pouvait le révéler dans ce caractère et cette relation. Dans les choses de Dieu, c’est un principe bien établi, que nous ne pouvons exprimer aux autres que ce dont nous avons connaissance dans nos propres âmes. Si nous ne possédons pas bien la chose dont nous parlons, nos paroles, quelque claires qu’elles puissent paraître, n’auront que peu de portée. Le Seigneur lui-même a établi ce principe, quand il dit : «Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu» (Jean 3:11).
Voyons maintenant comment le Seigneur révèle le Père. Lui-même a répondu à cette question. «Si vous m’aviez connu», dit-il aux Juifs, «vous auriez connu aussi mon Père» (Jean 8:19) ; et encore, s’entretenant avec Philippe, il dit : «Si vous m’aviez connu, vous auriez connu aussi mon Père ; et dès maintenant, vous le connaissez, et vous l’avez vu. Philippe lui dit : Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit. Jésus lui dit : Je suis depuis si longtemps avec vous, et tu ne m’as pas connu, Philippe ? Celui qui m’a vu, a vu le Père, et comment dis-tu, toi : Montre-nous le Père ? Ne crois-tu pas que moi je suis dans le Père, et que le Père est en moi ? Les paroles que moi je vous dis, je ne les dis pas de par moi-même ; mais le Père qui demeure en moi, c’est lui qui fait les oeuvres. Croyez-moi, que moi je suis dans le Père, et que le Père est en moi ; sinon, croyez-moi à cause des oeuvres elles-mêmes» (Jean 14:7-11).
Christ donc, lui-même, dans tout ce qu’il était, dans toute sa vie terrestre, était la révélation du Père, c’est-à-dire que moralement il représentait parfaitement le Père dans tout ce qu’il est pour tous ceux qui avaient des yeux pour le reconnaître. Comme il dit : «Je leur ai fait connaître ton nom» (Jean 17:26). On sait que, dans l’Écriture, le nom est l’expression de ce qu’une personne est réellement ; — il signifie donc ici la vérité quant au Père. Ainsi, quand Christ traversait la scène de ce monde, il représentait parfaitement toutes les perfections, le coeur et la pensée de son Père, dans tous les traits de sa figure morale, en sorte que, si ceux qui étaient de Christ n’avaient pas été aveuglés, ils auraient vu en lui la vivante personnification du Père. Pour l’homme naturel, c’était Jésus de Nazareth le fils du charpentier, et rien de plus ; mais l’homme éclairé par le Saint Esprit contemplait en lui «la gloire du Fils unique du Père», et voyait en lui comme tel celui qui l’a fait connaître.
Mais entrons dans les détails de cette merveilleuse révélation. Le Seigneur a lui-même indiqué les deux moyens par lesquels elle s’est faite ; ces moyens sont d’ailleurs les seuls par lesquels l’homme puisse exprimer ce qu’il est. Nous avons déjà cité le passage dans lequel il dit qu’il ne parle pas de lui même ; et dans un chapitre précédent, il est dit : «Le Fils ne peut rien faire de lui-même, à moins qu’il ne voie faire une chose au Père» (Jean 5:19 ; 8:28). Il n’est donc la source (car c’est bien là la force de cette déclaration) ni de ses paroles, ni de ses actes. Quoiqu’il fût le Fils éternel, il était venu, non pour faire sa propre volonté, mais la volonté de Celui qui l’avait envoyé (Jean 6:38), et pour cette raison, toutes ses paroles et tous ses actes étaient l’expression de sa parfaite obéissance, car le motif des uns comme des autres n’était pas dans sa propre volonté, quelque parfaite qu’elle fût, mais dans celle de son Père. C’est-à-dire qu’il ne parlait et n’agissait que dans la dépendance de lui, et dans la soumission à sa volonté ; et c’est pour cette raison que ses paroles et ses actes étaient la révélation de Celui qui l’avait envoyé.
Quelle précieuse vérité quant à lui-même nous révèle ce trait, mais de notre côté, quel triste contraste ! Tel qu’il était, ses paroles étaient aussi parfaites que ses actes ; aussi, quand les Juifs lui demandaient : «Toi qui es-tu ?» il répondit : «Absolument ce qu’aussi je vous dis» (Jean 8:25) ; c’est-à-dire, pour emprunter les expressions d’un autre, que ses paroles étant la vérité, le présentaient lui-même. Nos paroles à nous disent souvent moins ou plus que la vérité, et nous sommes humiliés en découvrant que nous n’avons pas su exprimer ce que nous désirions, ou bien, à la pensée que nos paroles, à cause de leur imperfection, ont laissé une impression inexacte, sinon tout à fait fausse. Tandis que chez lui toute parole était parfaite, était, par conséquent, un rayon de sa propre gloire aussi bien qu’une manifestation du Père. Nous voyons ainsi dans Jean 14, qu’il identifie ses paroles avec ses actes : «Les paroles que moi je vous dis, je ne les dis pas de par moi-même ; mais le Père qui demeure en moi, c’est lui qui fait les oeuvres» (Jean 14:10). Ses paroles étaient aussi parfaites que ses oeuvres ; et les unes aussi bien que les autres étaient la révélation du Père. Quel prix infini cette pensée donne à tout ce qui nous est rapporté de notre Seigneur !
Toutes les choses que le Seigneur a dites et faites ici-bas n’ont pas été rapportées ; ne nous est-il pas arrivé parfois de le regretter ? Il est de fait que nous avons connaissance de toutes les paroles et de tous les actes qui étaient nécessaires pour la parfaite révélation du Père, ni plus, ni moins. Si nous avions eu davantage, cette révélation n’eût pas été plus complète. Nous n’avons donc rien perdu ; car la sagesse et l’amour divin ont veillé à ce que nous fût donné tout ce qui était nécessaire à la gloire de Dieu comme à notre instruction et à notre bien. En un mot, ce qui est rapporté est une parfaite représentation de lui-même, et ainsi du Père. S’il manquait au tableau une seule parole ou une seule action, il ne serait plus parfait. Il est bien nécessaire d’insister sur ce point, dans un temps comme le nôtre, où l’on voit d’un côté, une critique impitoyable, fruit d’un rationalisme impie, chercher à détruire la confiance dans l’authenticité de telle ou telle portion des évangiles, et où, de l’autre, une audacieuse présomption voudrait donner, à sa manière, un récit de la vie de notre bien-aimé Seigneur, récit destiné soit à remplacer, soit à élucider celui des quatre évangiles. De quel côté y a-t-il le plus de témérité ? C’est ce qu’il serait difficile de dire. Quoiqu’il en soit, il est certain que tout cela tend à ébranler la foi dans la parole de Dieu, à obscurcir le caractère sacré du Seigneur, et par là, à faire un tort irréparable aux âmes des lecteurs.
Le Seigneur lui-même, dans sa vie sur la terre, a donc révélé parfaitement le Père ; mais, en même temps, il n’est pas moins vrai que c’est par sa mort que cette révélation fut consommée. Comme le Fils unique du Père, comme Celui qui était sans péché dans son excellence et sa perfection immuables, il ne put, en aucun temps, être moins que ce qu’il était ; il n’y eut pas un moment de sa vie dans lequel il n’aurait pu dire : «Celui qui m’a vu a vu le Père», et cependant, il n’est pas moins vrai que sa mort fut l’acte qui a couronné, pour ainsi dire, la parfaite manifestation du Père. Elle l’était de deux manières. D’abord, en ce qu’elle donnait une preuve de son entière consécration à la gloire de Dieu, puisqu’il s’humiliait en devenant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix. Sur la croix, c’était, si l’on peut s’exprimer ainsi, une obéissance d’une autre sorte, une obéissance dans des circonstances et des conditions nouvelles ; car c’était là qu’il glorifiait Dieu, à la place même du péché et à cause du péché, étant fait péché pour nous. C’est ainsi qu’il parlait de sa mort, comme d’un motif spécial de l’amour de son Père pour lui (Jean 10:17), et c’est à cause de cela aussi que la mort de Christ était ce qui achevait la parfaite manifestation de sa gloire morale (Jean 13:31). Secondement, sa mort était nécessaire pour la pleine révélation du coeur du Père. «Et nous avons vu, et nous témoignons que le Père a envoyé le Fils pour être le Sauveur du monde» (1 Jean 4:14). Tout ce que Dieu est, — tous ses attributs, sa sainteté, sa justice, sa vérité, sa miséricorde, sa majesté et son amour, — tout fut manifesté dans et par la croix de Christ ; et quand nous voyons que le Père a envoyé son Fils, et qu’il l’a envoyé pour être le Sauveur de tous ceux qui croiraient, Juifs ou gentils, nous pouvons pénétrer dans les profondeurs insondables de son coeur. Oui, «Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui, ne périsse pas, mais ait la vie éternelle (*)» (Jean 3:16).
(*) La note suivante, tirée d’un autre auteur, pourra être utile à quelques-uns : «On verra dans les écrits de Jean, que, quand il est question de la responsabilité, c’est le mot Dieu qui est employé ; quand il s’agit de sa grâce en notre faveur, il est parlé du Père et du Fils».
Il est bien instructif, en effet, de remarquer que l’Esprit de Dieu n’emploie pas indifféremment les noms qui servent à désigner Dieu ou notre Seigneur lui-même. La signification de bien des passages de l’Écriture dépend de cette observation.
Nous comprendrons peut-être mieux, maintenant, les paroles du Seigneur à Philippe : «Celui qui m’a vu a vu le Père». Si donc nous voulons arriver à une connaissance plus complète du Père, nous ne le pouvons qu’en apprenant à mieux connaître Christ. Les pères auxquels Jean s’adressait (1 Jean 2), et qui sont caractérisés par ces mots : «Ils connaissent celui qui est dès le commencement», c’est-à-dire Christ, «la vie éternelle qui était auprès du Père et qui nous a été manifestée» (1 Jean 1:2), ces pères étaient ceux qui connaissaient mieux le Père lui-même, car c’est en Christ, comme nous l’avons vu, qu’il a été pleinement manifesté. Voilà ce qu’il ne faudrait jamais oublier, car l’une des erreurs de la théologie traditionnelle et formelle consiste à trop séparer Christ, comme Fils, de son Père. En insistant, avec raison, sur la sainteté de Dieu et la nécessité de l’expiation pour que Dieu puisse agir en grâce envers les hommes, cette théologie a perdu de vue le fait que Christ était la vraie expression du coeur du Père, de son caractère et de sa nature. Il en résulte que, lorsque, sous l’action de l’Esprit de Dieu, le coeur a cherché refuge auprès de Christ et vers l’oeuvre qu’il a accomplie sur la croix, il y a, en même temps, un sentiment d’éloignement de Dieu, parce qu’il a été présenté seulement sous l’aspect d’un juge. La connaissance donc que Dieu est bien disposé en faveur de son peuple, que le coeur du Père se repose sur les siens avec délices, a été comparativement le partage d’un bien petit nombre ; aussi les croyants, en général, n’ont-ils que peu de liberté en présence de Dieu, et presque aucune connaissance de leur relation avec lui comme leur Père. Ce serait une immense bénédiction pour tous, de saisir la vérité dont nous parlons, que Christ est la parfaite révélation du Père ; car alors, tous ceux qui sont enseignés par lui seraient aussi enseignés par le Père, et entreraient, par là, dans la jouissance pleine et toujours croissante de son amour. Lui-même nous a dit : «Moi et mon Père sommes un» (Jean 10:30), un en esprit, en pensée, en dessein, en but ; il est dans le Père et le Père est en lui, et ainsi nécessairement, il est l’expression parfaite de tout ce que le Père est.
On demandera peut-être : Où pouvons-nous trouver une connaissance plus complète de Christ, de manière à connaître le Père plus parfaitement ? La réponse à cette question est de toute importance. C’est seulement dans les Écritures que nous pouvons apprendre ce qu’est Christ. Nous pouvons méditer sur lui, sans doute ; mais si nous voulons être préservés des séductions du mysticisme et de l’imagination, il faut que nos méditations reposent sur le fondement de la parole de Dieu. Il faut tenir ferme cette vérité, que la révélation de Christ est dans les Écritures ; et quand le Saint Esprit glorifie Christ en prenant ce qui est à lui pour nous l’annoncer (Jean 16:14), c’est par la Parole qu’il le fait. Ce n’est pas trop de dire qu’il n’y a de contact avec un Christ vivant et glorifié que par la parole de Dieu écrite. Il y a une manifestation de Christ à l’âme, manifestation qui nous donne le sentiment particulier de sa présence ; mais ce privilège et cette bénédiction même sont liés à l’observation de ses commandements et de sa parole (Jean 14:21-23). Exposés, comme nous le sommes, à différents dangers, venant soit des raisonnements de l’homme, soit d’un mysticisme spiritualiste, on ne peut trop le répéter, nous ne pouvons saisir Christ, ce qu’il était sur la terre, et ce qu’il est à la droite de Dieu, toujours le même Christ, la gloire morale dont il jouit maintenant étant la même que celle qu’il avait ici-bas, mais dans des conditions différentes, nous ne pouvons apprendre tout ce qu’il est que par les pages inspirées de la parole de Dieu. Cette pensée sera pour nous un nouveau motif à l’étude des Écritures, et en même temps, quand nous les lisons, elle nous tiendra, comme Marie, aux pieds de notre bien-aimé Seigneur. Nous contemplerons partout l’homme Christ Jésus, et nous répéterons sans cesse à nos cœurs : Celui que nous contemplons, agissant selon sa miséricorde et son amour, Celui que nous entendons parler comme jamais homme n’a parlé, est le Fils unique qui est dans le sein du Père ; et dans tous ses actes et toutes ses paroles, il est lui-même la révélation du Père. Lire les Écritures dans un tel esprit, ce sera trouver l’occasion de rendre un culte d’adoration, de louanges et d’actions de grâces.
Avant de terminer ce sujet, nous devons remarquer deux choses que notre Seigneur a faites pour aider ses disciples à saisir cette vérité. Sur le point de les quitter, il leur dit : «Je vous ai dit ces choses par des similitudes ; l’heure vient que je ne vous parlerai plus par des similitudes, mais je vous parlerai ouvertement de mon Père. En ce jour-là, vous demanderez en mon nom, et je ne vous dis pas que moi je ferai des demandes au Père pour vous ; car le Père lui-même vous aime», etc. (Jean 16:25-27). Ils ne pouvaient venir au Père que par lui, mais il voulait qu’ils sussent qu’ils étaient venus au Père par lui. Ils devaient continuer à prier en son nom, mais le Seigneur voulait qu’ils comprissent que le Père lui-même les aimait. Il désirait diriger leurs regards sur le Père, afin qu’ils pussent le connaître et savoir aussi qu’ils étaient chers à son coeur. Plusieurs auraient besoin aujourd’hui d’être rendus attentifs à cet enseignement de notre Seigneur. N’y a-t-il pas danger pour nos âmes d’oublier que le Père nous a été révélé, que, par le Seigneur Jésus, nous sommes venus à lui, et que nous pouvons compter sur son coeur en tout temps ?
Une autre chose à remarquer, c’est que, avant de quitter ses disciples, le Seigneur les a mis dans la même position qu’il occupe lui-même. Il l’a fait quand il les a présentés au Père dans la prière qu’il a prononcée devant eux : «Je fais des demandes pour eux ; je ne fais pas de demandes pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés, parce qu’ils sont tiens (et tout ce qui est mien est tien, et ce qui est tien est mien), et je suis glorifié en eux. Et je ne suis plus dans le monde, mais ceux-ci sont dans le monde, et moi, je viens à toi. Père saint, garde-les en ton nom, le nom que tu m’as donné, afin qu’ils soient un, comme nous» (Jean 17:9-11, 16-26). Mais après sa résurrection, il leur présente, d’une manière précise, le caractère de la position dans laquelle ils étaient placés dès lors : «Va vers mes frères, dit-il à Marie, et dis-leur : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu» (Jean 20:17). Nous espérons expliquer ces paroles dans le chapitre suivant ; mais nous désirons appeler maintenant l’attention sur le fait que, sur la base de la rédemption accomplie par sa mort et sa résurrection, le Seigneur introduit les siens dans la place qu’il occupe, et dans les rapports où il est lui-même avec Dieu. Dieu ne devait pas être connu désormais comme Jéhova ou Jéhova Éloïm, ainsi qu’il était connu par Israël, mais comme Dieu et Père de son peuple, parce qu’il l’est de notre Seigneur Jésus-Christ. Aussi voyons-nous, en lisant les épîtres, que presque toutes les bénédictions qui nous sont assurées en Christ nous rappellent ce double fait. Voir 2 Corinthiens 1:2-3 ; Éphésiens 1:2-3 ; 1 Pierre 1:3.
C’est ainsi encore que se termine l’évangile de Jean (*). Cet évangile commence par ce qui est dit de la Parole qui était avec Dieu et qui était Dieu, qui était le Fils éternel, et comme tel le révélateur du Père, et à la fin nous voyons le Seigneur introduisant ses disciples dans la place qu’il occupe auprès de son Dieu et Père et dans les rapports où il est lui-même avec Dieu, et cela sur le principe de la résurrection. Jusque-là ils n’avaient pas pu jouir de ces bénédictions, mais il les leur avait apportées, et c’était le fruit de son oeuvre de rédemption. Béni soit son nom !
(*) Le chapitre 21 est, en quelque sorte, un appendice se rapportant au millénium, aux brebis qu’il faut paître, et au ministère de Jean qui devait durer jusqu’au retour du Seigneur. Le chapitre 20 est donc bien la fin de l’évangile historique.
Nous avons déjà vu que Christ, comme Fils, révélait le Père, et aussitôt que celui-ci est révélé comme tel, il faut qu’il y ait des êtres qui entrent dans la jouissance de cette relation ; en d’autres termes, le Père doit avoir ses enfants. C’est ainsi que nous trouvons la famille dans le même évangile où Dieu nous est révélé comme Père. C’est ce que nous voyons dans trois passages, sur lesquels nous allons attirer l’attention.
Le premier se trouve au chapitre 1 ; mais voyons d’abord celui du chapitre 11. Après la résurrection de Lazare, les principaux des Juifs se réunirent pour consulter ensemble. Ils ne pouvaient nier le miracle qui avait été accompli ; mais, fermant les yeux à l’enseignement divin qu’il renfermait et à la responsabilité qui en résultait pour eux, ne pensant qu’à leurs intérêts personnels et à leur avantage, ils prirent la résolution de se débarrasser de Celui qui troublait leur paix et faisait tant de disciples. Ils ne pensaient qu’à eux-mêmes dans leurs coupables desseins ; mais Dieu était derrière la scène, surveillant leurs pensées, et il allait faire tourner leur rage à sa gloire, dans l’accomplissement des éternels conseils de sa grâce et de son amour. C’est ainsi que, par la bouche de Caïphe, il prophétisa que Jésus devait mourir pour les Juifs, ce qui était dans les conseils de Dieu de toute éternité ; et, à cette prophétie, l’Esprit de Dieu en ajoute une autre pour caractériser pleinement la mort de Christ. Il le fait par la plume de Jean, qui dit : « Et non seulement pour la nation, mais aussi pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés» (Jean 11:49-52). Nous apprenons ainsi, non seulement que le coeur de Dieu était occupé de ses enfants, mais aussi que la mort de Christ était nécessaire, nécessaire pour la gloire de Dieu, aussi bien que pour la rédemption de son peuple, comme le fondement sur lequel l’Esprit de Dieu pouvait pénétrer dans tous les pays en y portant le message de l’évangile, et y réunir un à un ceux qui devaient composer la famille du Père et comme tels être les héritiers de Dieu et les cohéritiers de Christ. Comme le Père ne pouvait être pleinement révélé que par la vie et la mort de Christ, de même c’est par cette mort que les enfants pouvaient être cherchés, distingués, trouvés et réunis.
Le second passage se trouve au chapitre 1:12-13 ; il montre par quel moyen — le seul possible — nous devenons enfants. Considérons plus attentivement ce sujet. Ce moyen est présenté dès le commencement, selon le caractère de cet évangile. Dans les trois précédents évangiles, généralement appelés les synoptiques, Christ est présenté à l’acceptation de son peuple, et le cours du récit nous montre sa réjection. Cela est vrai des trois évangiles, malgré les différences caractéristiques qu’ils présentent. Dans Jean, au contraire, Christ est présenté, dès l’abord, comme déjà rejeté. «Il était dans le monde, et le monde fut fait par lui, et le monde ne l’a pas connu. Il vint chez soi ; et les siens ne l’ont point reçu». (Jean 1:10-11). Le monde était ignorant (ne connaissant pas Dieu, comme il est dit dans 2 Thes. 1:8), les Juifs le rejetèrent, c’est-à-dire n’obéirent pas à l’évangile, comme nous le voyons aussi dans le passage cité. De là vient que nous avons plus de détails sur la personne de Christ dans l’évangile de Jean, et que l’évangéliste introduit, dès le commencement (chapitre 3), la croix et les enseignements bénis qui en découlent, au lieu d’attendre la fin du récit pour en parler. C’est pourquoi, immédiatement après la déclaration relative à sa réjection, il est parlé de ceux qui l’ont reçu, et qui, par là, ont aussi reçu le pouvoir ou le droit d’être enfants de Dieu. Et pour ôter toute incertitude quant à la nature du changement, 1’évangéliste ajoute : «Lesquels sont nés, non pas de sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu» (v. 13). C’est une divine et souveraine opération, accomplie par un pouvoir et par des agents en dehors de l’homme, et avec lesquels, quoiqu’il puisse être le sujet de leur énergie, il peut n’avoir rien à faire.
Mais nous sommes ainsi conduits à considérer la source même de l’existence des enfants de Dieu. Ils sont nés de Dieu. Dans le chapitre 3, le Seigneur dit à Nicodème : «Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu» (v. 5) ; et ici, nous trouvons une autre vérité, savoir que ceux qui sont nés de nouveau par ces moyens, entrent, comme enfants, en relation avec le Père. En rapprochant ces passages, nous aurons devant nous toute la vérité relativement à la manière dont se forme la famille de Dieu.
Son origine est en Dieu lui-même ; et le même apôtre nous dit autre chose encore, non seulement que les croyants sont nés de Dieu, mais aussi que leur place et leurs relations découlent du coeur du Père. «Voyez, s’écrie-t-il, de quel amour le Père nous a fait don, que nous soyons appelés enfants de Dieu» (1 Jean 3:1) ; en sorte que le fait même que nous sommes enfants de Dieu est l’expression du coeur du Père. Il voulait avoir des enfants pour sa propre satisfaction et pour sa joie propre. Un autre passage nous montrera que ce dessein de grâce était formé de toute éternité. «Nous ayant prédestinés, comme dit Paul, pour nous adopter pour lui par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté à la louange de la gloire de sa grâce, dans laquelle il nous a rendus agréables dans le Bien-aimé» (Éph. 1:5-6). Nous ne pouvons trop nous arrêter sur ce fait que, si nous sommes enfants, ce n’est qu’une simple conséquence de l’amour du Père. Et quand encore nous considérons ce que nous étions, notre complet éloignement de Dieu, la profonde inimitié de nos coeurs pour lui, nous comprendrons, en quelque mesure, ce cri de l’apôtre : Voyez de quel amour le Père nous a fait don ! Oui, c’est un amour ineffable, illimité et divin, ne trouvant pas un motif pour s’exprimer, ailleurs que dans le coeur d’où il découle. Quel sujet de nous humilier en présence de cet amour, quand nous songeons que nous, autrefois pauvres pécheurs d’entre les gentils, en sommes devenus les objets et avons été amenés à en jouir, et cela pour l’éternité.
Le coeur de Dieu est la source, mais Dieu a ses moyens à lui de nous faire entrer dans sa famille. «Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il leur a donné le droit d’être enfants de Dieu ; savoir à ceux qui croient en son nom ; lesquels ne sont nés ni de sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu» (Jean 1:12-13). Il y a deux ou trois déclarations importantes dans ces paroles. D’abord, que ceux qui ont reçu Christ ou cru en son nom, sont maintenant nés de Dieu. Et plus que cela, sans doute. Cette déclaration est conçue en des termes qui excluent toute action ou tout droit humain. Pour le Juif, la descendance d’Abraham, être né de son sang, était d’une grande importance, car c’est ainsi qu’il faisait partie du peuple élu. Mais maintenant que Christ est venu, la descendance naturelle ne constitue plus aucune espèce de privilège, car les privilèges sont dès lors abolis, rien n’a de valeur que la nouvelle naissance. Ce n’est donc pas seulement, comme les théologiens disent, une adoption, — ce serait, sans doute, déjà une merveilleuse et précieuse grâce ; — mais c’est plus encore, c’est une nouvelle naissance actuelle, produite par l’action de la souveraine puissance de Dieu, puissance qui rend participants d’une nouvelle nature et d’une nouvelle vie ceux sur lesquels elle agit. C’est ainsi que Jean, parlant d’une manière abstraite (c’est-à-dire, en portant son attention uniquement sur le caractère de la nouvelle nature, sans regarder à la vieille, à la nature adamique que tous les croyants possèdent encore), peut dire : «Quiconque est né de Dieu ne pratique pas le péché, car la semence de Dieu demeure en lui, et il ne peut pas pécher, parce qu’il est né de Dieu» (1 Jean 3:9). Rien moins que cela, — né de Dieu, — n’est la vérité ; mais si nous voulons rappeler le caractère spécial de cet acte, né de Dieu c’est être né de l’Esprit. Le Saint Esprit est l’agent divin par lequel est opéré ce merveilleux changement, selon cette parole déjà citée : né d’eau et de l’Esprit.
Ceci nous amène à parler du second agent que Dieu emploie. Si l’Esprit est la puissance, et la seule suffisante, la Parole, car l’eau en est un emblème (voir Éphésiens 5:26), est l’instrument que le Saint Esprit emploie pour opérer la nouvelle naissance. Pierre dit : «Vous qui êtes régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la vivante et permanente parole de Dieu : parce que toute chair est comme l’herbe, et toute sa gloire comme la fleur de l’herbe : l’herbe (toute chair) est séchée et sa fleur (la gloire de l’homme) est tombée, mais la parole de Dieu demeure éternellement. Or, c’est cette parole qui vous a été annoncée» (1 Pierre 1:23-25). Comme tout ceci est simple ! — si simple que même un enfant peut le comprendre ! L’évangile est prêché, Christ est présenté dans l’évangile, et, par la grâce de Dieu, le coeur reçoit Christ, le reçoit comme le Sauveur, et, en le recevant, entre en possession d’une nouvelle vie et d’une nouvelle nature. Cette âme est née de Dieu. La foi en Christ est donc à la fois le signe et le moyen de la nouvelle naissance et ainsi, nous n’avons pas à nous inquiéter de la manière dont Dieu agit ou de la souveraineté de Dieu quand il agit, mais seulement et absolument de la foi dans le Seigneur Jésus-Christ. Tout dépend de là. Si vous l’avez reçu, si vous avez cru en son nom, vous êtes nés de Dieu ; si vous ne l’avez pas reçu, vous êtes sans la nouvelle naissance, et encore chair ; car ce qui est né de la chair est chair ; et toute chair est comme l’herbe, et toute la gloire de l’homme comme la fleur de l’herbe.
Un mot encore pour prévenir toute erreur, et, nous aimons à l’espérer, pour encourager les âmes faibles. En parlant de la nécessité et du fait de la nouvelle naissance, il y a un danger à signaler, danger qui se remarque particulièrement dans les écrits de quelques docteurs évangéliques, c’est celui de perdre de vue le pardon des péchés, et, en insistant sur la nécessité de la régénération, d’oublier celle de l’expiation pour les péchés, car nous avons autant besoin de la purification que de la nouvelle naissance. Dans Jean 3, les deux choses se trouvent réunies intentionnellement. Si, d’un côté, notre Seigneur dit : «Il faut que vous naissiez de nouveau», il dit aussi, d’un autre côté : «il faut que le Fils de l’homme soit élevé». La nouvelle nature, — si chose pareille pouvait arriver, — la nouvelle nature serait insuffisante à elle seule, puisque la question de nos péchés ne serait pas résolue. Mais, il est à peine besoin de le remarquer, quand l’âme croit en Christ, non seulement elle est née de nouveau, mais elle est au bénéfice de toute l’efficacité de son oeuvre rédemptrice. Cela peut n’être pas toujours bien compris. Il peut arriver que, par incrédulité, ignorance, ou par un enseignement défectueux, une âme soit née de nouveau, depuis des années, sans être dans la jouissance du pardon des péchés. Celui qui croit est sauvé par le plus léger contact avec Christ ; bien plus, si nous sommes amenés en contact avec Christ, nous sommes, devant Dieu, quoique souvent et même ordinairement nos âmes n’en aient pas conscience, en possession de toute la valeur de Christ, et au bénéfice de son oeuvre expiatoire. On éviterait bien des confusions, en faisant plus attention à la vérité contenue dans le chapitre 3 de Jean. Au lieu d’insister sur la nécessité de la nouvelle naissance (qui est, sans doute, absolument nécessaire), il faudrait présenter Christ au pécheur ; car le premier besoin qu’il sent vient de la conscience de sa culpabilité, et du moment que son coeur est ouvert pour recevoir Christ comme son Sauveur, le fardeau de sa culpabilité lui est ôté, il entre en jouissance du pardon, et est en même temps né de nouveau, né de Dieu. Tout revient donc à ceci : il faut que Christ soit présenté à l’âme et qu’elle le reçoive.
La dernière chose à remarquer dans ce passage, c’est la puissance, l’autorité, ou le droit conféré : «À tous ceux qui l’ont reçu, il leur a donné le droit d’être faits enfants de Dieu», de prendre cette position. Tous ceux qui sont ainsi désignés sont nés de Dieu, et en conséquence, ils sont autorisés, divinement autorisés, à prendre leur place d’enfants de Dieu. C’est le mot d’enfants qui se trouve ici et non celui de fils. Jean n’use jamais de ce terme de fils ; c’est toujours celui d’enfants que nous trouvons dans ses écrits. Paul emploie les deux. Dans son épître aux Galates, on ne trouve que celui de fils ; tandis que les deux sont employés dans le chapitre 8 des Romains, ce qui permet de saisir la différence de signification. Le mot de fils se rapporterait plutôt à la position dans laquelle nous sommes introduits par la foi en Christ, celui d’enfants rappelle plutôt l’idée de la relation, de son intimité et de ses jouissances.
Combien est merveilleux ce que l’évangéliste dit ici, savoir que tous ceux qui croient au nom de Christ, sont autorisés à prendre la place d’enfants de Dieu. Rien de semblable ne s’était vu avant l’arrivée de Christ. Les saints d’entre les Juifs étaient, sans aucun doute, nés de Dieu mais comme l’expiation n’était pas encore accomplie, et que l’Esprit Saint n’avait pas encore été donné, parce que Jésus n’était pas encore glorifié, il leur était impossible de prendre cette place d’enfants. Eussent-ils été enfants, ils auraient été incapables de jouir de cette position. Jusqu’à ce que, par une seule offrande pour le péché accomplie par la mort de Christ, nous soyons arrivés à n’avoir plus conscience de péchés, jusqu’à ce que nous ayons acquis la certitude que nous sommes parfaits pour toujours, il ne peut y avoir pour nous ni paix, ni liberté en présence de Dieu ; car l’idée que nous nous faisons d’un enfant, c’est qu’il est en parfaite liberté devant son père, et qu’il jouit de se trouver auprès de lui dans la conscience de son amour. Or c’est la place que nous avons le droit de prendre ; nous y sommes autorisés par la grâce divine et le privilège qui nous est conféré.
Le fait que cette place nous appartient nous est révélé ici, et, à la fin de l’évangile, comme nous l’avons vu dans le chapitre 20, le Seigneur lui-même, le matin de sa résurrection, y introduit ses disciples. Quel amour et quelle tendresse de sa part ! Ici (à la fin de l’évangile), il nous est dit que cette place nous appartient par droit divin ; et maintenant, pour que nous ne puissions pas en perdre la jouissance par notre faiblesse et notre incrédulité, il veut bien nous en expliquer le caractère et nous révéler combien elle est bénie. «Va vers mes frères», dit-il à Marie, «et leur dis : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu» (Jean 20:17). Nous apprenons donc, par ces paroles, que la place où Dieu nous veut comme enfants est celle qu’occupe Christ lui-même. Dieu était le Dieu de notre Seigneur en tant qu’homme ; en tant que Fils, Dieu était son Père. Ces deux relations se retrouvent dans la position qu’il occupait ici-bas et dans celle qu’il occupe, maintenant qu’il est glorifié à la droite de Dieu. C’est pourquoi, nous trouvons si souvent, dans les épîtres, cette expression : «le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ» (voir par exemple 2 Cor. 1:3 ; Éph. 1:3 ; 1 Pierre 1:3, etc.) ; et c’est pourquoi aussi, nous nous adressons à Dieu dans nos prières en l’appelant notre Dieu et Père, parce qu’il est le Dieu et Père de notre Seigneur ; — or ces titres révèlent en même temps la source des bénédictions individuelles qui découlent, pour nous, de la rédemption. Mais ici, puisqu’il est question d’enfants, nous avons particulièrement affaire avec le terme Père. «Mon Père et votre Père». En un mot, il nous donne sa propre place, et rien ne pouvait pareillement nous révéler la merveilleuse efficace de sa mort et de sa résurrection. Sa propre place disons-nous, c’est la place qui lui appartient en vertu de sa relation, en sorte que nous pouvons nous adresser à Dieu dans les mêmes termes que lui-même. Il faut toutefois faire bien attention que, s’il nous associe à lui devant Dieu, il conserve pourtant toujours la prééminence. Il ne dit pas, il ne pouvait pas dire : notre Père, mais «mon Père et votre Père», car s’il n’a pas honte de nous appeler ses frères, il est le premier-né, comme nous l’enseigne le passage qui nous dit que Dieu nous a prédestinés à être conformes à l’image de son Fils, afin qu’il fut le premier-né entre plusieurs frères (Rom. 8:29). Plusieurs de nos hymnes ont oublié cette distinction, et ont ainsi répandu des expressions et des idées qui ne sont pas selon l’Esprit de Dieu. Si notre Seigneur nous met, par sa grâce, dans la position qu’il occupe lui-même, s’il veut bien nous appeler ses frères, ce serait, de notre côté, oublier ce qui est dû à sa dignité, à sa suprématie absolue, si nous nous adressions à lui comme à notre frère. Quelque étroite que soit l’intimité dans laquelle, par son grand amour, il introduit les siens, quelque bienveillants que soient les termes qu’il leur applique, ils ne doivent jamais oublier — et ils s’en souviendront à proportion qu’ils jouissent réellement de son amour — que son nom est au-dessus de tout nom, et que la joie de leurs coeurs, en sa présence, doit se manifester par des accents de respect et d’adoration. Il veut que nous comprenions pleinement le caractère de la position dans laquelle il nous introduits, aussi bien que le fait de notre union avec lui en la présence de Dieu, comme étant notre Dieu et notre Père, parce qu’il est son Dieu et son Père.
Rappelons encore un autre passage de cet évangile, pour terminer nos méditations sur cette partie de notre sujet. En Jean 17, à la fin de cette merveilleuse prière que notre Seigneur présenta au Père avant de quitter ce monde, il dit : «Je leur ai fait connaître ton nom, et je le leur ferai connaître, afin que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et moi en eux» (Jean 17:26). Dans ces paroles, nous voyons le but de la révélation du Père, de même que notre introduction dans nos relations nouvelles. Le nom, comme on l’a déjà dit, exprime toujours, dans 1’Écriture, la personne même ; par exemple, quand il est dit que les saints sont réunis au nom du Seigneur Jésus-Christ (Matt. 18:20), cela signifie qu’ils sont réunis selon la vérité de tout ce que Christ est, aussi bien comme Sauveur que comme Seigneur. Ainsi, le nom du Père est la révélation de tout ce qu’il est dans la relation qui est ainsi exprimée. Le Seigneur avait fait connaître ce nom, et Il continuerait à le faire connaître par le ministère du Saint Esprit et par ses serviteurs, en sorte que le même amour qui avait reposé sur lui comme Fils quand il était dans le monde, non seulement reposât sur eux, mais qu’il fût aussi en eux, et que lui-même fût en nous, qu’il fût en nous comme le moyen ou le canal par lequel cet amour se répandrait dans nos coeurs.
Le chapitre 15:9, éclaire ce sujet d’une manière bien remarquable. Le Seigneur dit : «Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés». L’amour du Père découlait de son coeur dans le coeur de Christ, et ensuite du coeur de Christ dans celui de ses disciples, d’où aussi il se répandait de l’un à l’autre. Mais ici, le point important à remarquer, c’est que c’est le même amour, le même dans son caractère et le même dans son étendue. Qui pourrait le mesurer et le comprendre ? Qu’il est doux pour nos âmes en entendant cette voix du Père : «Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai trouvé mon plaisir», de penser que le même amour illimité et infini repose sur nous, est en nous, si nous sommes ses enfants. Son amour repose sur tout enfant de Dieu, voilà ce qu’il faut répéter avec joie, sans que cela diminue la force de la vérité dans nos âmes. Vous dites peut-être : je suis si faible, et ma marche est si défectueuse, que je tombe sans cesse et que je contriste l’Esprit de Dieu. Cela peut être vrai, hélas ! cette confession n’a rien d’étonnant, mais le fait n’en demeure pas moins, malgré tout, que vous êtes aimés de l’amour dont Christ était l’objet quand il était ici-bas, comme le Fils bien-aimé de Dieu. Ne perdez jamais de vue cette précieuse vérité, mais qu’elle remplisse vos cœurs ! car, par la grâce de Dieu et la puissance de son Esprit, elle vous gardera et sera pour vos coeurs une source de force et d’encouragement dans les temps de faiblesse et d’épreuve, une source de consolation dans vos afflictions ; enfin elle illuminera votre âme de sa radieuse lumière et, par là, vous donnera un précieux avant-goût de l’atmosphère de joie qui régnera dans la maison du Père, quand nous serons pour toujours avec le Seigneur.
Nous avons trouvé deux choses dans l’évangile de Jean ; d’abord, le Père révélé dans la personne du Fils, et secondement, le moyen par lequel la famille est réunie et formée, ainsi que sa place et sa relation avec Dieu. Il est aussi vrai que, dans le type de l’eau vive (Jean 4 ; 7), nous avons un enseignement, sous un certain aspect, relatif au Saint Esprit ; mais, l’évangéliste le dit expressément après l’invitation pleine de grâce que le Seigneur avait faite au grand jour des expiations : «Il disait cela de l’Esprit qu’allaient recevoir ceux qui croyaient en lui ; car l’Esprit Saint n’était pas encore, parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié» (Jean 7:39).
Quelle que fût donc l’étendue de la déclaration du Père et quelque bien établie que fût cette vérité de la famille, il n’était pas possible pour les âmes des croyants de saisir leurs relations avec le Père et d’en jouir, avant la descente du Saint Esprit à la Pentecôte. Être né de nouveau est une chose ; c’est un changement opéré par la puissance divine et par le moyen de la parole ; savoir que Dieu est notre Père est une autre chose dont nous ne pouvons jouir que par le don de l’Esprit habitant en nous. Cette distinction se remarque parfaitement dans l’épître de Paul aux Galates. Il dit : «Vous êtes les enfants de Dieu par la foi dans le Christ Jésus», déclaration qui correspond, quant au moyen de la nouvelle naissance, avec Jean 1:12-13, passage que nous avons déjà étudié. Dans le chapitre suivant, il dit : «Et parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos coeurs, criant : Abba, Père» (Gal. 4:6). De même, dans une autre épître, il écrit : «Vous avez reçu l’Esprit d’adoption, par lequel nous crions : Abba, Père» (Rom. 8:15).
Ce n’est donc qu’après avoir reçu le Saint Esprit de cette manière, que nous pouvons connaître cette relation d’enfants et en jouir ; mais avant d’entrer dans ce sujet, il peut être utile, surtout puisqu’il y a beaucoup de confusion là-dessus, de montrer clairement la base sur laquelle, d’après l’Écriture, l’Esprit est donné. C’est ce qu’on peut faire de deux manières : en rappelant la descente du Saint Esprit sur notre Seigneur lui-même, et en citant les déclarations directes de la parole de Dieu. La scène du baptême de notre Seigneur est d’un profond intérêt, non seulement parce qu’elle fait ressortir son humilité et sa grandeur morale, son amour pour les siens et son identification avec eux, qui sont les saints sur la terre et les excellents dans lesquels il prenait tout son plaisir (Ps. 16), mais aussi parce qu’elle révèle pleinement la position dans laquelle le croyant est maintenant introduit comme résultat de la rédemption. «Et Jésus ayant été baptisé, monta aussitôt, s’éloignant de l’eau ; et voici, les cieux lui furent ouverts, et il vit l’Esprit de Dieu, descendant comme une colombe, et venant sur lui. Et voici une voix des cieux, disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir» (Matt. 3:16-17). Ici, nous voyons les cieux ouverts, Christ scellé comme homme, et en conséquence le Père fait cette déclaration : «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir». Et cela, comme on l’a remarqué, montre la position de tout croyant qui a reçu le Saint Esprit. Les cieux lui sont ouverts, et le croyant lui-même est un enfant de Dieu, l’objet du coeur du Père. Il y a ici un contraste intéressant à observer. Dans la scène qui est devant nous, Christ sur la terre est l’objet de Dieu ; mais l’objet du croyant est Christ à la droite de Dieu, Christ vu par l’oeil de la foi à travers les cieux ouverts.
On demandera peut-être en vertu de quoi Christ fut scellé du Saint Esprit. La réponse est facile. Il reçut l’Esprit en vertu de son absolue et parfaite pureté. Notre condition offre, en ceci, un contraste complet qui montre aussi le fondement sur lequel Dieu peut donner le Saint Esprit aux siens. Par nous-mêmes, nous ne pouvons pas subsister devant Dieu, comme étant sans péché, ni souillure ; mais nous sommes devant lui plus blancs que la neige par le précieux sang de Christ. Aussitôt donc que nous sommes purifiés de notre culpabilité par le sang, Dieu envoie le Saint Esprit pour habiter au dedans de nous comme Esprit d’adoption, comme sceau, comme arrhes de l’héritage et comme onction. C’est l’ordre qu’il est si intéressant de retrouver dans les types. Quand les sacrificateurs étaient consacrés et quand le lépreux était guéri (Ex. 29 ; Lév. 14), l’ordre dans les deux cas était le même. D’abord, ils étaient lavés d’eau, ce qui signifiait la nouvelle naissance ; ils étaient ensuite aspergés de sang, type du sang de Christ qui lave de tout péché ; et enfin, ils étaient oints d’huile, l’huile étant, comme toujours, un emblème du Saint Esprit.
D’autres passages de l’Écriture ne feront que confirmer cet ordre. Quand, le jour de la Pentecôte, ceux dont le coeur était saisi dirent à Pierre et aux autres apôtres : «Que ferons-nous, frères ?» Pierre leur dit : «Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, en rémission des péchés, et vous recevrez le don du Saint Esprit» (Act. 2:37-38). De plus, quand Pierre annonçait l’évangile dans la maison de Corneille, nous voyons qu’au moment même où il annonçait la rémission des péchés par la foi en Christ, «comme il prononçait encore ces mots», est-il dit, «l’Esprit Saint tomba sur tous ceux qui entendaient la parole» (Act. 10:44). Ces exemples nous enseignent de la manière la plus évidente, que la condition pour recevoir le Saint Esprit c’est de connaître le pardon des péchés. De même, dans l’épître aux Romains, il n’est fait mention du Saint Esprit qu’après qu’il a été parlé de la justification par la foi, et de la paix avec Dieu (Rom. 5 ; Éph. 1:13). Ceci bien compris, fera disparaître une difficulté qui s’élève souvent. On demande : Est-il possible qu’une âme soit née de nouveau et qu’elle n’ait pas le Saint Esprit ? La question devrait être posée autrement. On devrait dire : Le Saint Esprit peut-il habiter là où manque la connaissance du pardon des péchés ? Ou : Est-il possible qu’une âme devienne le temple du Saint Esprit, avant d’être purifiée de toute culpabilité ? En présence des passages que nous avons considérés, on ne peut répondre que d’une seule manière à cette question. Et quel croyant intelligent ne sait pas que, par défaut de connaissance ou de foi, cette vie, la vie divine, peut exister dans bien des âmes longtemps avant qu’elles jouissent du pardon des péchés ?
L’ordre divin est donc : la nouvelle naissance par le moyen de la Parole et par la puissance de l’Esprit, le pardon des péchés, et ensuite l’habitation de l’Esprit. Mais qu’il soit bien établi, qu’il n’est nullement nécessaire qu’il y ait un intervalle, comme cela arrive souvent, entre la nouvelle naissance et le sceau de l’Esprit ; si l’évangile était plus souvent annoncé dans sa plénitude, si la nature de la grâce était bien exposée, cela se verrait plus rarement. Il faudrait rappeler, en même temps, que la nouvelle naissance doit précéder l’habitation du Saint Esprit. C’est parce que nous sommes enfants, que Dieu envoie l’Esprit de son Fils dans nos coeurs, par lequel nous crions : Abba, Père.
Voyons, maintenant, ce qui s’opère en nous quand nous avons reçu l’Esprit d’adoption. Le premier mouvement, comme nous l’avons vu, c’est de crier : Abba, Père. Dans les Galates, l’apôtre dit : «Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans vos cœurs» (Gal. 4:6). C’est aussi instructif que remarquable. Quand notre Seigneur était dans le jardin de Gethsémané, assailli par Satan, et en perspective de sa mort sur la croix, il s’écria dans cette heure d’agonie : «Abba, Père ! toutes choses te sont possibles ; transporte cette coupe loin de moi ; mais non point ce que je veux, moi, mais ce que tu veux, toi» (Marc 14: 36). Cela montre, d’un côté, ce qu’est l’Esprit de son Fils ; et de l’autre, que le Seigneur jouissait pleinement de sa relation, quelle que fût l’agonie par laquelle il passait. Le même Esprit, par la puissance duquel Christ comme Fils, s’adressait ainsi au Père, habite en nous, dans tous ceux qui ont été lavés par le précieux sang de Christ. Et habitant en nous, il nous enseigne, oui, il pousse nos coeurs à crier : «Abba, Père». Ce cri est, pour ainsi dire, la conséquence nécessaire du fait que nous possédons l’esprit filial. Avant cela, nous pouvons nous être adressés à Dieu dans d’autres termes ; mais aussitôt que la relation existe, et que Dieu l’a scellée par le don du Saint Esprit, nous ne pourrons faire autrement que d’appeler Dieu notre Père. Si nous ne le faisions pas, nous serions aussi peu raisonnables qu’un enfant qui persisterait à appeler son père terrestre maître, au lieu de lui donner le doux nom de père. Il ne faut pas l’oublier, «Abba, Père», est le cri de l’Esprit lui-même dans nos coeurs.
Si donc nous avons l’Esprit, nous ne pouvons pas nous adresser à Dieu autrement ; mais il est impossible à ceux qui n’ont pas l’Esprit de Dieu d’appeler, de tout leur coeur, Dieu leur Père, parce qu’ils ne jouissent pas de cette relation. Tout récemment, un chrétien bien fondé disait à l’auteur qu’après avoir été réveillé dans son âme, il s’efforça, pendant deux ans, d’appeler Dieu du nom de Père, mais en vain. Il ne pouvait pas prononcer ce nom devant Dieu ; mais aussitôt qu’il fut arrivé à la connaissance du pardon des péchés, cette manière de parler lui devint naturelle, parce qu’alors il avait reçu le Saint Esprit. Et cette expérience est en rapport avec la parole de Dieu. Si nous sommes réellement devant Dieu, c’est le fond de notre âme qui paraît ; et ainsi notre état et nos relations se montrent dans la prière, surtout dans la prière particulière, quand nous ne sommes influencés en rien par la présence d’autres personnes. Quelle sérieuse pensée : l’Esprit de Dieu fait maintenant de nos corps ses temples ; le nom même de Père, que nous prononçons devant Dieu, est réellement le cri de l’Esprit ! Et quelle grâce, de la part de Dieu, de nous faire connaître, dès maintenant, qu’il nous a mis au nombre de ses enfants, et qu’il a formé avec nous des relations qui dureront éternellement ! Être dans la puissance de cette vérité précieuse, voilà ce qui rendrait nos prières réelles et bénies, ce qui aussi nous remplirait d’une ineffable gratitude pour Celui qui, dans sa grâce et dans son amour, nous a réunis autour de lui-même comme ses enfants bien-aimés (Éph. 5:1).
Il y a cependant une autre chose. L’apôtre dit : «L’Esprit lui-même rend témoignage avec notre esprit, que nous sommes enfants de Dieu» (Rom. 8:16). Il est ainsi absolument impossible de se tromper. On pourrait appeler Dieu : Père, par imitation, mais nous voyons ici qu’il y a aussi, au dedans de nous, la conscience de nos relations, produite par le Saint Esprit. Il est important de remarquer qu’il ne dit pas : rend témoignage à notre esprit. Si c’était le cas, nous pourrions attendre un témoignage particulier, à un moment donné, pour nous assurer que nous sommes maintenant enfants de Dieu. L’apôtre dit : avec notre esprit, c’est-à-dire que le fruit de l’habitation de l’Esprit est de produire en nous des sentiments et des affections conformes aux relations dans lesquelles nous sommes, et de nous en donner la jouissance. L’enfant de Dieu connaît maintenant le Père et ne met pas en doute qu’il est un enfant, car il a au dedans de lui-même la conscience certaine de sa relation, et ainsi il peut se reposer, en quelque mesure au moins, dans la jouissance de l’amour et de la sollicitude du Père. En d’autres termes, l’esprit filial est le résultat de ce témoignage du Saint Esprit.
Il est permis de demander si cet esprit filial est suffisamment recherché, si on le voit assez chez nous ? Il n’y a rien de plus beau dans la vie chrétienne, rien qui donne un sentiment plus grand de la dépendance de Dieu ou plus de confiance dans la prière. L’apôtre Paul, écrivant aux Thessaloniciens, s’adresse à eux en les nommant l’assemblée des Thessaloniciens qui est en Dieu, le Père (1 Thes. 1:1 ; 2 Thes. 1:1). Aucune autre assemblée n’est ainsi désignée. La raison de ceci peut être que la vie chrétienne de ces jeunes croyants, qui étaient dans la ferveur de leur premier amour, se manifestait surtout par la jouissance de leurs relations filiales. Ce caractère aussi sera le nôtre dans la mesure où l’Esprit d’adoption, non contristé au dedans de nous, poussera nos coeurs à saisir l’amour du Père, et où il formera, au dedans de nous, toutes ces affections filiales que la connaissance de son amour pourra seule produire. La connaissance du Père et de nos vraies relations, voilà la première chose après laquelle l’Esprit pourra, graduellement peut-être, mais d’une manière toujours croissante, nous faire jouir librement de toutes les bénédictions qui sont attachées à notre position. Nous ne pouvons avoir des sentiments d’enfants avant de savoir que nous sommes tels. La jouissance de la relation, les affections filiales, la reconnaissance filiale, le respect, etc., en découleront bientôt. Le témoignage que l’Esprit rend avec notre esprit, la clarté et la puissance dont ce témoignage est rendu, dépendront toujours du caractère de notre marche. C’est ainsi qu’il est dit : «Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui» (1 Jean 2:15). Si le chrétien marche dans l’infidélité ou le relâchement, l’Esprit est contristé, sinon réduit au silence ; et le témoignage rendu avec son esprit, qu’il est un enfant de Dieu, sera affaibli, si même il existe encore. Mais rien d’autre et rien de moins ne doit nous satisfaire que la jouissance bénie et consciente des relations qu’il a plu à Dieu, dans sa grâce, de former avec nous ses enfants.
Les enfants de Dieu sont aussi conduits par le Saint Esprit. C’est sur ce fait que l’apôtre se base, pour développer le caractère de l’Esprit qui habite maintenant dans les croyants. Auparavant, il avait mis en contraste ceux qui marchent selon la chair et ceux qui marchent selon l’Esprit. Tous les hommes sont renfermés dans ces deux classes. Devant Dieu, les croyants ne sont pas dans la chair, mais dans l’Esprit ; c’est ce qui les caractérise maintenant quant à leur existence en présence de Dieu, si du moins l’Esprit de Dieu habite en eux (Rom. 8:9). Il n’y a pas de milieu entre ces deux états ; car il ajoute : «Si quelqu’un n’a pas l’Esprit de Christ, celui-là n’est pas de lui» (Rom. 8:9), — il n’est pas des siens. Tout chrétien donc, en qui habite le Saint Esprit, est dans un nouvel état devant Dieu. Il est en Christ et non en Adam, car par sa mort avec Christ, il a été séparé du premier homme (Adam), et par la résurrection de Christ, il a été amené sur une nouvelle scène et dans un nouvel état devant Dieu ; sur un terrain qui est au delà du péché, de la condamnation et de la mort, parce qu’on y est en résurrection. Le croyant est maintenant en Christ ressuscité, et le Saint Esprit habite en lui comme puissance de la nouvelle vie qu’il a en Christ, puissance qui lui permet de combattre victorieusement contre la chair. Ayant donc montré que nous sommes délivrés de l’esclavage de la loi et de la mort, jouissant de toutes les conséquences bénies de cette délivrance, et après avoir indiqué ce qui caractérise notre nouvelle position, l’apôtre ajoute : «Ainsi donc, frères, nous sommes redevables, non pas à la chair, pour vivre selon la chair, car si vous vivez selon la chair, vous mourrez ; mais si, par l’Esprit, vous faites mourir les actions du corps, vous vivrez. Car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu» (Rom. 8:12-14). Cela nous met en présence de vérités bien solennelles.
Nous attirons l’attention d’abord sur ce fait que, d’après ce passage, ce qui caractérise tout enfant de Dieu, c’est qu’il est conduit par l’Esprit. «Tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu» (Rom. 8:14) ; c’est-à-dire que tous les croyants sont ainsi conduits, et de cette manière manifestés comme enfants de Dieu. Il n’est pas tenu compte ici du fait humiliant que, quelquefois, les croyants sont gouvernés par la chair et non par l’Esprit. Ceci, hélas ! est souvent vrai ; mais l’apôtre décrit plutôt ce qui caractérise les croyants comme classe. Ils sont conduits par l’Esprit et non par la chair. Mais ce fait étant bien établi, il est important de nous rappeler que nous sommes toujours conduits ou par l’Esprit ou par la chair. Sans doute, il y a la nature et les affections naturelles comme Dieu les a créées, et que le croyant doit toujours maintenir selon Dieu ; mais nous parlons ici du parfait et absolu contraste que les Écritures établissent toujours entre la chair et l’Esprit. Comme Paul dit dans une autre épître : «La chair convoite contre l’Esprit et l’Esprit contre la chair ; et ces choses sont opposées l’une à l’autre, afin que vous ne pratiquiez pas les choses que vous voudriez» (Gal. 5:17). La chair et l’Esprit sont toujours en antagonisme, de telle sorte que, quand nous ne sommes pas sous la direction de l’Esprit, nous sommes sûrs d’être sous celle de la chair. Comme nous avons donc besoin d’être vigilants ! Hélas ! que nous sommes loin d’être toujours sur nos gardes ! Si nous cessons un moment de veiller, aussitôt la chair excitée, comme c’est toujours le cas, par Satan, saisira cette occasion de se montrer, de nous pousser dans le péché et de contrister le Saint Esprit de Dieu.
La troisième chose à rappeler, c’est que le Saint Esprit est notre seule puissance. Nous n’en avons pas d’autre pour la marche, la lutte, le service ou le culte. Ce qui distingue donc vraiment les fils de Dieu, c’est qu’ils sont conduits par l’Esprit de Dieu. C’est ce que l’on voyait d’une manière si admirable dans la vie de notre Seigneur. Après son baptême, il fut conduit par l’Esprit dans le désert pour être tenté par le diable ; c’est dans la puissance de l’Esprit qu’il prêchait, qu’il faisait des miracles, qu’il chassait les démons, qu’il guérissait ceux que le diable avait asservis, et qu’il allait de lieu en lieu faisant le bien (Matt. 4 ; 12 ; Luc 4 ; Act. 10). Oui, à chacun de ses pas, dans chacun de ses actes, dans chacune de ses paroles, pendant toute sa vie ici-bas, il fut conduit par le Saint Esprit. Et Jésus est notre modèle, c’est notre privilège d’être conduits aussi par l’Esprit de Dieu ; et dans la mesure où nous serons ainsi conduits, il sera manifesté que nous sommes fils de Dieu.
L’apôtre nous montre de plus grandes choses encore. L’Esprit que nous avons reçu est l’Esprit d’adoption ; nous sommes donc enfants. Il nous est dit : «Si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers ; héritiers de Dieu, cohéritiers de Christ ; si du moins nous souffrons avec lui, afin que nous soyons aussi glorifiés avec lui» (Rom. 8:17). Pour le moment, nous nous bornons à parler de la position que nous occupons comme enfants, espérant voir, dans un autre chapitre notre condition future dans la maison du Père. Tous les enfants sont donc héritiers, héritiers de Dieu. Non seulement il lui a plu, dans son amour, de nous placer dans des relations bénies avec lui, mais il nous a aussi faits ses héritiers, et comme si cette merveilleuse manifestation de sa grâce n’était pas suffisante pour répondre aux besoins de son coeur, nous trouvons encore ces mots : cohéritiers de Christ. Ces mots renferment la clef de toutes nos bénédictions. Dieu nous a associés à son Fils bien-aimé. Il est le premier-né d’entre les morts ; nous formons l’Église des premiers-nés par notre union avec lui, et nous sommes ainsi de même associés avec lui pour hériter de tout ce qu’il héritera lui-même comme homme, en vertu de son oeuvre de rédemption. Tout enfant de Dieu est donc mis au rang et dans la position du premier-né, sa propre prééminence et sa dignité personnelle et essentielle étant toujours réservées. Comme enfants, nous sommes devant lui au rang de cohéritiers de Christ. Quelles paroles pourraient exprimer convenablement la richesse de la grâce de Dieu, ou de la bénédiction dans laquelle nous sommes introduits ? Car non seulement il nous a sauvés, nous a amenés à lui et nous a accordé des privilèges et des bénédictions, mais pour satisfaire pleinement son coeur, il nous met au même rang que son Fils bien-aimé. Que ces mots «cohéritiers de Christ», occupent donc une place permanente dans nos âmes, afin que nous puissions, en y pensant continuellement, apprendre toujours mieux ce que Dieu est dans sa grâce, et ce qu’il a fait pour nous par la mort et la résurrection de notre Seigneur et Sauveur ; et sûrement, plus nous les pèserons, plus nous pourrons sonder et explorer le trésor infini de l’héritage qui nous appartient, parce que nous sommes héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ.
Mais il y a encore cette parole : «Si du moins nous souffrons avec lui, afin que nous soyons aussi glorifiés avec lui» (Rom. 8:17). Ce «si» n’implique nullement un doute, il indique simplement quelle est la condition nécessaire des enfants et le sentier par lequel passent ceux qui seront glorifiés avec Christ, c’est-à-dire que, si nous sommes enfants, nous aurons à souffrir avec Christ ici-bas. Si nous sommes nés de nouveau et que nous ayons l’Esprit d’adoption, nous ne pouvons échapper à cela. La nouvelle nature en nous, née de Dieu, comme nous le sommes nous-mêmes, doit en quelque mesure éprouver ce que Christ a éprouvé en présence du péché, de Satan, de l’affliction et de la mort. L’Esprit de Dieu qui habite en nous doit nous conduire, à proportion que nous sommes soumis à sa direction, dans le même sentier que celui dans lequel Christ a marché, et nous faire sentir et agir comme il a lui-même senti et agi dans de semblables circonstances. Nous ne pouvons donc être enfants de Dieu, sans souffrir avec Christ. Mais nous ne souffrirons avec lui que dans la mesure où nous sommes sous la conduite et la puissance du Saint Esprit. Un enfant de Dieu qui marche fidèlement devant Dieu, sans contrister l’Esprit, souffrira avec Christ beaucoup plus que celui dont la marche est relâchée. Mais c’est le chemin nécessaire et, on peut le dire, c’est un inexprimable privilège. Quel plus grand privilège, en effet (sauf celui de souffrir pour Christ), de passer à travers ce monde en société et en communion de sentiments avec notre Seigneur, de souffrir comme il a souffert en traversant ce désert de péché et de mort ? Et plus nous souffrirons avec lui, plus nous connaîtrons les profondeurs de son coeur d’amour, qui jamais ne se lassa dans son ministère de grâce, quoiqu’il eût, tous les jours, à endurer la contradiction de la part des pécheurs contre lui-même. Les encouragements à suivre ce chemin ne manquent pas. «Car, dit l’apôtre, j’estime que les souffrances du temps présent ne sont pas dignes d’être comparées avec la gloire à venir qui doit nous être révélée» (Rom. 8:18). La joie placée devant lui soutint notre Seigneur lui-même quand il souffrait la croix, méprisant l’ignominie ; et ici, la vue de la gloire — «étant glorifiés avec Christ» — doit avoir le même effet sur nous. Car rien ne nous élève au-dessus de la souffrance comme la contemplation de la gloire future, et quand nous la comparons avec la souffrance, celle-ci devient bien insignifiante. Comme l’apôtre le dit dans un autre endroit : «Notre légère affliction qui ne fait que passer, opère pour nous un poids de gloire éternel» (2 Cor. 4:17). Mais il ne faudrait jamais oublier que c’est avec Christ qu’il s’agit de souffrir, comme c’est avec lui que nous serons glorifiés. Nous souffrons avec lui et nous sommes glorifiés avec lui. Il y a identification avec un Christ rejeté maintenant, comme il y aura identification avec un Christ glorifié. Que pourrions-nous désirer, ou que pourrait donner de plus le Dieu de toute grâce ?
La famille de Dieu est une, nécessairement une, parce que chaque membre de cette famille possède la même nature et la même vie. Elle est si bien une que le Seigneur a voulu que le monde vît l’expression de cette unité. Il dit : «Je ne fais pas seulement des demandes pour ceux-ci, mais aussi pour ceux qui croiront en moi par leur parole ; afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi ; afin qu’eux aussi soient un en nous, afin que le monde croie que c’est toi qui m’as envoyé» (Jean 17:20-21). Cette prière fut exaucée d’une manière bien évidente, et il ne pouvait pas d’ailleurs en être autrement. Nous lisons qu’aux jours de la Pentecôte, «la multitude de ceux qui avaient cru était un coeur et une âme (Act. 4:32) ; et en rapport avec cette manifestation de l’unité de la famille de Dieu, les apôtres rendirent témoignage, avec une grande force, à la résurrection du Seigneur Jésus. Leur témoignage était accompagné de signes de puissance, convainquant le monde que Christ avait été envoyé de Dieu. La manifestation de l’unité de toute l’Église disparut bientôt, et ne se verra plus dans ce monde. Mais malgré cela, tout croyant bien instruit doit retenir fermement cette précieuse vérité que la famille de Dieu est une, et que les coeurs des enfants de Dieu ne doivent pas se mouvoir dans un cercle plus étroit que le coeur du Père lui-même. Jean dit : «Quiconque aime celui qui a engendré, aime aussi celui qui est engendré de lui». Mais pour qu’il n’y ait pas de méprise, et pour montrer la sainteté de l’amour qu’il s’agit d’exprimer, aussi bien que le canal par lequel il coule, l’apôtre ajoute : «Par ceci, nous savons que nous aimons les enfants de Dieu, c’est quand nous aimons Dieu et que nous gardons ses commandements» (1 Jean 5:1-2). En nous souvenant donc avec joie, que tous ceux qui sont chers au coeur du Père doivent aussi nous être chers en vertu de nos relations communes, nous devons en même temps ne pas oublier que le Père lui-même doit avoir la première place dans nos affections, et que le véritable amour divin, pour ses enfants, ne peut se manifester que quand nous obéissons à sa Parole. L’amour doit toujours être dans nos coeurs, mais l’expression de cet amour doit être selon Dieu. Ces deux choses ne doivent jamais être confondues.
L’unité de la famille doit toujours être maintenue, et la triple division que l’apôtre Jean en donne n’est nullement en contradiction avec cette unité ; car les différentes classes sous lesquelles il range les enfants de Dieu expriment seulement des différences d’état ou de connaissance. Comme dans une famille d’ici-bas, il y a différents degrés de croissance ou de connaissance, il en est de même dans la famille de Dieu. Il y a, nous dit Jean, des pères, des jeunes gens et des petits enfants (1 Jean 2:13-14). Mais, avant de s’adresser à chacune de ces classes en particulier, il s’adresse à l’ensemble, et parle de ce qui caractérise toute la famille. «Je vous écris, enfants, parce que vos péchés vous sont pardonnés par son nom» (1 Jean 2:12). Le terme enfants, dans ce verset, n’est pas le même que celui du verset suivant. Si nous disons enfants, au v. 12, comme comprenant toute la famille, nous pouvons réserver le terme petits enfants, au v. 13, pour désigner une classe particulière (*).
(*) Au vers. 28, l’apôtre emploie de nouveau le terme enfants (non pas petits enfants), parce que là, il recommence à s’adresser à tous.
Le caractère divin de tout enfant de Dieu est donc que ses péchés sont pardonnés. On ne voit pas dans les Écritures, nous devons nous le rappeler, qu’un enfant de Dieu puisse ne pas avoir l’Esprit d’adoption, et comme nous avons montré, dans le chapitre précédent, le fondement sur lequel Dieu donne l’Esprit, nous comprendrons aussitôt ce caractère. Tout enfant de Dieu donc, c’est-à-dire tout enfant de Dieu qui peut crier : Abba, Père», jouit du pardon des péchés, et le nom de Christ est le fondement sur lequel a été reçue cette inexprimable bénédiction. «Vos péchés vous sont pardonnés, dit Jean, par son nom» (1 Jean 2:12). Voilà le témoignage divin, témoignage basé sur la valeur du nom de Christ devant Dieu, sur toute la valeur de ce que Christ est en vertu de sa mort et de sa résurrection. Le pardon des péchés dont Dieu veut que ses enfants jouissent est donc, à la fois, divin et éternel, — divin dans son caractère et éternel dans sa durée. Oui, en vertu de l’efficace du précieux sang de Christ, quand nos péchés sont pardonnés, ils le sont pour toujours. Telle n’a pas été ma pensée, direz-vous peut-être. Sondez les Écritures, et voyez si ce n’est pas la pensée de Dieu, et si c’est sa pensée, elle peut bien devenir aussi la vôtre. La foi consiste, pour nous, a recevoir les pensées de Dieu et à nous y tenir plutôt qu’aux nôtres, et par cette foi nous pouvons nous réjouir en recevant pleinement, dans toute sa portée, le message de l’apôtre : «Vos péchés vous sont pardonnés par son nom» (1 Jean 2:12). Un autre dira peut-être : Mais n’ai-je pas besoin, tous les jours, du sang qui purifie ? Nous péchons chaque jour, c’est ce qui est vrai, hélas ! quoiqu’il faille toujours se rappeler que le croyant ne doit pas nécessairement pécher. «Je vous écris ces choses, dit Jean, afin que vous ne péchiez point» (1 Jean 2:1). Mais tel est notre état, que de fait nous péchons chaque jour ; aussi, pour montrer la grâce de Dieu qui a pourvu à nos malheureuses chutes, il ajoute : «Si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste ; et lui est la propitiation pour nos péchés, et non pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier» (1 Jean 2:1-2).
La vérité est donc que, une fois délivrés de la culpabilité du péché, nous sommes lavés pour toujours. «Par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés» (Héb. 10:14). En vertu de l’efficace de ce sacrifice unique et parfait, Dieu, dans sa grâce, non seulement pardonne nos péchés, mais il n’impute plus jamais le péché au croyant. Il ne peut tolérer le péché dans les siens, et ainsi, s’ils ont péché, leur avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste, prend leur cause en main sur le principe de la propitiation parfaite accomplie pour leurs péchés ; il prie pour eux ; et Dieu répond en agissant par son Esprit, et par le moyen de sa Parole il met le péché sur leur conscience, produit le jugement de soi-même et la confession, et alors, comme le dit l’apôtre, «si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité» (1 Jean 1:9). Tout croyant est sous l’efficace permanente du précieux sang de Christ, et en conséquence, il n’y a plus à revenir sur la question de culpabilité qui est réglée pour toujours. Mais si ses enfants pèchent et persévèrent dans le péché, Dieu les châtiera en vue de les humilier en sa présence, afin qu’ils puissent confesser leurs péchés devant lui. Alors ils sont lavés par l’eau de la Parole — par l’action de la parole de Dieu sur leurs coeurs et sur leurs consciences — ils ne sont pas nettoyés par le sang, car cela a été fait une fois pour toutes et ne peut être répété. Il est donc absolument vrai, comme ce passage l’établit, que les péchés de tous les enfants de Dieu sont pardonnés, pardonnés par son nom, le nom de Christ, et pardonnés éternellement.
Après s’être adressé à toute la famille, Jean en vient aux trois classes qu’il appelle les pères, les jeunes gens et les petits enfants. Il les caractérise tous dans le v. 13, et puis leur donne des conseils et des avertissements. Nous abordons, maintenant, ces différentes classes, telles qu’elles sont déterminées par l’apôtre (1 Jean 2:13-27).
«Je vous ai écrit, pères, parce que vous connaissez Celui qui est dès le commencement» (1 Jean 2:14). Ce terme de pères a trait à la connaissance et à cela seulement. Il ne s’en suit donc nullement que les pères soient les croyants âgés, quoique généralement la classe ainsi appelée soit surtout composée de croyants avancés en âge. Il faut encore bien remarquer que beaucoup d’anciens chrétiens — anciens dans ce sens qu’il s’est écoulé beaucoup de temps depuis qu’ils ont cru — sont encore de petits enfants, tandis que, dans certains cas, ceux qui sont comparativement de jeunes croyants, peuvent, par leurs rapides progrès dans la grâce et dans la connaissance du Seigneur Jésus, se trouver parmi les «pères». Cette classe — c’est là ce qu’il faut bien comprendre — renferme tous ceux, de quelque âge que ce soit, en qui se remarque ce caractère spirituel qu’ils connaissent Celui qui est dès le commencement.
Ces mots «dès le commencement», dans Jean, désignent une époque bien distincte. Ce n’est pas, comme dans son évangile, «au commencement», expression qui nous transporte dans l’éternité elle-même, mais dès le commencement, c’est-à-dire depuis le moment où Christ, comme vie éternelle, a été introduit sur la scène ; car aussitôt que Christ parut dans le monde, il était le second Adam, quoiqu’il soit vrai aussi qu’il ne prit sa place comme tel qu’après la résurrection. Et il ne fut en vérité dans la condition du second Adam (quant aux circonstances), que quand il fut ressuscité d’entre les morts. Celui qui est dès le commencement désigne donc Christ, Christ comme il est à la droite de Dieu, comme le premier-né d’entre les morts et «le commencement de la création de Dieu» (Col. 1:18 ; Apo. 3:14). À la croix et par le moyen de la croix, Dieu a terminé ses relations avec Adam comme homme responsable ; et dès lors, tout se rapporte à l’homme de son conseil, à Christ monté au ciel et glorifié. Aussi selon le témoignage de Jean, le sang et l’eau sont sortis du côté d’un Christ mort, pour montrer que la vie n’est pas dans le premier mais dans le second Adam — le sang qui expiait le péché et l’eau qui nettoie et purifie. Christ est donc lui-même notre vie, comme dit Paul, et il est ainsi le vrai commencement, puisqu’il est le premier-né d’entre les morts.
Connaître Celui qui est dès le commencement, c’est donc connaître Christ tel qu’il est, et où il est, comme la vie éternelle qui était avec le Père et qui nous a été manifestée, ainsi que tout ce qu’il est maintenant en lui-même, comme l’Homme glorifié à la droite de Dieu. Mais on entend quelquefois dire : Est-ce que les croyants ne le connaissent pas ? Cette question prouve, chez ceux qui la font, l’ignorance de la vérité contenue dans notre passage. Tous les croyants connaissent plus ou moins Christ comme leur Sauveur et l’appellent leur Seigneur, mais c’est bien autre chose de le connaître lui-même. Heureux sommes-nous si nous connaissons certains traits, certains caractères de Christ, mais la connaissance dont parle ici l’apôtre, comprend tout ce qu’il est indépendamment de tout caractère, de tout aspect particulier. Nous pouvons, par exempte, reconnaître un roi comme notre souverain, sans le connaître personnellement lui-même. Ses enfants, d’autre part, sans oublier qu’il est le souverain, le connaissent plutôt tel qu’il est en lui-même — sa pensée son caractère, sa manière d’agir. Ainsi les pères se sont élevés au-dessus de tout caractère, de tout office, ou de toute relation de Christ avec eux, et trouvent leur délice en lui, en ce qu’il est, dans toute sa beauté morale, dans ses perfections.
Et ceci, il faut bien le remarquer, est le plus haut degré de connaissance que nous puissions atteindre. Il n’y a rien au delà. Au moment de notre conversion, nous sommes occupés surtout de l’oeuvre de Christ et de la grâce de Dieu ; après nous trouvons nos délices dans la vérité mais enfin, en nous avançant vers les choses qui sont devant nous, Christ lui-même absorbe notre attention, et c’est alors seulement que nous devenons «pères», dans le sens que l’apôtre donne à cette expression. Un exemple remarquable servira à illustrer ce que nous avons dit. Il y a quelque temps, j’eus le privilège de visiter un saint qui souffrait beaucoup dans son corps. Ses mains et sa figure étaient complètement déformées par la violence du mal. Mais, quoiqu’il endurât des douleurs très vives, et qu’il fût privé de tout moyen d’adoucir sa position, il ne disait absolument rien de lui-même ou de ses souffrances. Sa conversation roulait uniquement sur le Seigneur. Dans le cours de notre visite, il nous dit entre autres : «Dans les dix premières années de ma vie chrétienne, je connaissais l’efficace du sang de Christ et j’en jouissais. Après cela, toutes les vérités relatives à l’Église apparurent à mon esprit et, sans perdre les bénédictions procurées par l’efficace du sang versé, ces vérités nouvelles pour moi, étaient le principal sujet de mes méditations. Mais maintenant, dit-il, par la bonté de Dieu, je suis entré dans un nouvel ordre de pensées où Christ absorbe tout. Non pas, ajouta-t-il, que les autres vérités me soient moins précieuses, seulement Christ lui-même est plus précieux encore, et je sens que maintenant je n’ai besoin de rien d’autre. Oui, dit-il enfin, c’est Christ lui-même maintenant et Christ seul». Ce frère était, comme le lecteur le comprend, un vrai père, et son expérience marque la mesure de sa stature comme chrétien ; elle justifie ce qui a déjà été dit que la connaissance de Christ lui-même est le dernier degré de développement que l’on puisse atteindre.
Ajoutons encore que, comme c’est le dernier degré à atteindre, quand nous le possédons, nous n’avons besoin de rien d’autre que de croître dans la connaissance de Celui que nous connaissons. C’est ce qui ressort du fait que Jean, s’adressant aux différentes classes de chrétiens, n’a point de conseil ni d’avertissement, ni d’exhortation à donner aux pères. Il répète seulement : «Pères, je vous ai écrit, parce que vous connaissez Celui qui est dès le commencement» (1 Jean 2:14). Cela se comprend facilement. Ces pères étaient complètement occupés de Christ lui-même, et avaient ainsi découvert le secret de toute croissance, de tout progrès, de toute sûreté. Car ce qui produit la conformité avec Christ, c’est la puissance de l’Esprit et la contemplation de Christ (2 Cor. 3:18). Le seul objet de la vie chrétienne, c’est d’être toujours plus enseigné par Christ lui-même, et Satan ne peut entrer dans son coeur qui est plein de Christ. Jean n’avait pas besoin de rien dire aux pères ; car, de fait, ils n’avaient besoin de rien. Prenez, par exemple, tous les préceptes de l’Écriture ; quel est leur but sinon de rappeler quelque trait de Christ ; or ces pères qui le connaissaient possédaient ainsi tout, ou étaient à la source de tout ce qui était nécessaire pour être soutenus et pour croître dans la vie divine. S’ils avaient besoin d’encouragement, de sagesse, de direction, de consolation ou d’avertissements, tout cela, toutes les bénédictions qui nous sont assurées par la rédemption, oui tout, ils le possédaient dans Celui qu’ils connaissaient.
Un petit nombre de chrétiens sont peut-être réellement devenus des pères. Mais la question pour nos âmes est celle-ci : Pouvons-nous être satisfaits de rien d’autre ? Celui qui est enfant aujourd’hui, deviendra homme et père un jour. Spirituellement, n’en est-il pas de même de nous ? Hélas ! pourquoi y a-t-il parmi nous tant de nains spirituels qui ne vont jamais au delà de l’enfance ? Nous lisons dans l’épître aux Hébreux : «Lorsque vous devriez être des docteurs, vu le temps, vous avez de nouveau besoin qu’on vous enseigne quels sont les premiers rudiments des oracles de Dieu, et vous êtes devenus tels, que vous avez besoin de lait et non de nourriture solide» (Héb. 5:12). Mais pour connaître toutes les bénédictions de la vie chrétienne, ou plutôt, pour puiser plus profondément dans ces trésors inépuisables que la personne de Christ renferme pour nous, il nous faut étudier avec persévérance tout ce que la Parole de Dieu nous dit de sa personne, de sa grâce, de sa beauté et de sa perfection. Si donc, comme Marie, nous restons assis tous les jours aux pieds du Seigneur pour entendre sa parole, nous serons sur la voie pour devenir père dans la famille de Dieu.
C’est la seconde classe que Jean distingue parmi les enfants de Dieu ; nous avons d’abord ce qui les caractérise, et puis les conseils divins qui leur sont adressés comme directions ou comme avertissements. En commençant son exhortation, l’apôtre répète ce qui les caractérise spécialement et ajoute quelque chose qui nous révèle la source de leur force. Les jeunes gens sont forts ; ils tirent leur force de la parole de Dieu, c’est ce qu’a montré leur victoire sur le méchant (Comparer v. 13 et 14). Il y a un très grand intérêt à étudier ces différents points. Mais nous relevons seulement ce fait qu’ils sont forts ; c’est la source de leur force qui renferme une instruction pour nous. Leur force vient de ce que la parole de Dieu demeure en eux. C’est là, en effet, ce qui rend fort — être avec Dieu devant les hommes, et, comme ici, dans la lutte avec Satan.
Qu’est-ce donc que signifient ces mots : la parole de Dieu demeure en vous ? Notre Seigneur nous en donne la clef, quand il dit : «Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez ce que vous voudrez et il vous sera fait» (Jean 15:7). Ce qui signifie que ses paroles demeurent dans nos coeurs de manière à former nos pensées ; ou plutôt, par le fait qu’elles nous ont remplis de pensées divines, elles ont produit en nous l’esprit et les pensées de Christ, de telle sorte que les désirs que nous exprimons dans nos prières, ne sont que l’expression de ses désirs et de sa volonté à lui. C’est pourquoi il peut dire : «Vous demanderez ce que vous voudrez et il vous sera fait». Il en est ainsi des jeunes gens ; la parole qui demeure en eux, c’est la parole si bien gardée dans leurs âmes qu’elle forme et gouverne leur vie, et qu’elle est toujours là à leur disposition pour repousser les attaques de Satan.
C’est là précisément, direz-vous, ce que nous désirons ; et ce désir est exprimé par bien des âmes. Mais, par exemple, si je lis rarement l’Écriture, ou si je le fais d’une manière superficielle ou rapide, il est impossible que la parole de Dieu demeure en moi. Non, cette bénédiction n’appartient qu’à ceux qui la lisent en priant, en méditant et en écoutant l’enseignement de l’Esprit. De cette manière, la parole écrite dans la Bible est transportée, en quelque sorte, dans nos coeurs, où elle forme un trésor précieux pour devenir la source de toutes nos pensées, de toute notre activité, de toutes nos luttes. Nous lisons en Hébreux 8:10-11, que dans les derniers jours Israël aura la loi de Dieu dans son entendement, écrite dans son coeur, et qu’alors tous connaîtront le Seigneur, depuis le plus petit jusqu’au plus grand. Ils avaient toujours possédé la loi sur les tables de pierre, mais cela ne leur donnait pas de puissance pour l’obéissance ou la lutte : mais quand elle est gravée dans leurs coeurs, tout est changé ; ils deviennent fidèles et forts dans les voies du Seigneur. Il en est ainsi de nous ; si nous possédons la parole de Dieu seulement dans la Bible, cela ne nous servira de rien pour notre vie de tous les jours ; mais, du moment que nous l’avons dans nos coeurs, elle devient, comme nous l’avons vu, une source de vie et de puissance par l’Esprit de Dieu.
C’était donc par la Parole demeurant en eux que les jeunes gens remportaient la victoire sur le méchant, et cela pour deux raisons. Gardant la parole, ils lui obéissaient, et Satan ne peut toucher le croyant obéissant. Aussi longtemps qu’il reste dans la dépendance et l’obéissance, tous les assauts de Satan sont déjoués. Et cette même parole, habitant dans le coeur, devient l’épée de l’Esprit par laquelle nous pourrons repousser et mettre en fuite l’ennemi de nos âmes. Le Seigneur lui-même a été, en ceci comme en toute autre chose, un parfait exemple pour nous, dans la tentation du désert. Parlant par l’Esprit dans les Psaumes, il dit : «Je prends plaisir à faire ta volonté, ô mon Dieu : oui, ta loi est dans mon coeur». Conduit par l’Esprit dans le désert, il fut tenté par le diable ; mais à chaque tentation, il répondait par ces mots : «Il est écrit». Il employait la Parole qui était déjà dans son coeur ; c’est ainsi qu’il résistait à tous les assauts et qu’il tint tête à l’adversaire qui, à la fin, se retira confondu et vaincu. L’instruction, pour nous, est en ceci, que si la Parole ne demeure pas constamment dans notre âme, nous ne pouvons l’employer comme une arme pour notre défense. Nous avons bien souvent à confesser que si nous nous étions rappelé tel passage, nous aurions évité telle erreur, ou tel piège ! Il est donc de la dernière importance, pour nous, d’avoir la parole de Dieu demeurant en nous. C’est la seule épée de l’Esprit, et aucune autre arme ne pourra repousser les assauts continuels de Satan. Si donc nous, jeunes gens, voulons être forts, il est absolument nécessaire, toujours, mais particulièrement dans des temps comme les nôtres, où l’on dirige tant d’attaques contre les fondements de notre foi, de garder soigneusement le trésor de la vivante parole de notre Dieu dans le fond de nos coeurs. La divine ressource pour nous dans cet état de choses, est d’apprécier la parole permanente et assurée de notre Dieu, de la méditer et de nous en nourrir.
Il y a cependant un danger spécial auquel les jeunes hommes sont exposés, danger qui motive l’exhortation que l’apôtre leur adresse. «N’aimez pas le monde, leur dit-il, ni les choses qui sont dans le monde : si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui, car tout ce qui est dans le monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie, n’est pas du Père, mais est du monde ; et le monde s’en va et sa convoitise, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement» (1 Jean 2:15-17). Le monde constitue donc, pour les jeunes gens, un danger spécial résultant du combat auquel ils sont exposés. C’était le cas pour Samson le nazaréen ; il était jeune et fort, mis à part pour le Seigneur, il ne buvait point de vin, mais était rempli de l’Esprit (Comparer Nom. 6 ; Éph. 5:18). Il fut en butte aux assauts de l’ennemi, et la tentation à laquelle il céda et qui fut pour lui une cause de honte et de ruine, était une de ces choses qui sont dans le monde, dont Jean parle dans notre passage, — la convoitise de la chair.
Deux choses sont mentionnées ici : le monde et les choses qui sont dans le monde. Il est bien important, pour nous tous, de comprendre cela. Jean emploie ce terme «le monde» dans un sens moral et non, j’ai à peine besoin de le faire remarquer, dans le sens matériel, c’est-à-dire non pas comme le lieu où nous vivons, le monde créé, la terre, mais comme représentant tout le système des choses qui nous entourent, le monde tel qu’il est organisé par l’homme et gouverné par Satan, son prince et son dieu (Voir Jean 12:31 ; 14:30 ; 2 Cor. 4:4). C’est Caïn que nous trouvons à l’origine de ce monde-là, quand il s’éloigna de la présence du Seigneur et qu’il bâtit une ville — ce qui suppose une société organisée ; et ses descendants embellirent le monde par les arts et les sciences qui avaient pour objet de rendre l’homme heureux loin de Dieu. Le monde est donc toujours en antagonisme avec Dieu ; ou, pour parler selon les Écritures du Nouveau Testament, avec le Père. La chair est en opposition avec l’Esprit, Satan avec Christ, et le monde avec le Père. C’est pour cela que Jean dit : «Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est point en lui» (1 Jean 2:15). Cela ne signifie pas que tous ceux qui aiment le monde ne sont pas des croyants, mais qu’en aimant le monde on ne peut jouir de l’amour du Père (*). Le Père ne peut pas manifester son amour à celui qui aime le monde ; car il y a opposition absolue entre le monde et le Père. C’est ce qui s’est vu à la croix de Christ. Dieu a montré par cette croix ce qu’était l’homme et ce qu’était le monde. C’est le monde qui a crucifié Christ. Satan a réussi à réunir contre le Fils unique de Dieu tous les rangs et toutes les classes de la société. Tout le monde, Juifs et gentils, les autorités civiles et religieuses, le monde entier, était uni comme un seul homme pour le mettre à mort ; et ainsi, Satan a montré qu’il était le prince de ce monde. Maintenant Dieu tient le monde pour coupable de la mort de son Fils ; un enfant de Dieu ne pourrait donc aimer le monde et avoir en même temps en lui l’amour du Père. Non, son sentiment à l’égard du monde ne peut être absolument que celui de l’apôtre Paul, quand il disait : «Qu’il ne m’arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde» (Gal. 6:14). Tout ceci est si simple qu’aucun croyant ne voudrait le mettre en doute ; mais qui, en même temps, ne reconnaîtra pas qu’il y a de ce côté là un danger pour nous tous ? Satan est très actif, et nos coeurs très rusés, en sorte que la mondanité, sous une forme ou sous l’autre, trouve facilement accès parmi les enfants de Dieu. Nous avons donc besoin d’être toujours sur nos gardes, et de nous rappeler ces solennelles paroles sur l’amour du monde qui exclut absolument du coeur l’amour du Père. Quelle n’est pas souvent notre folie ! Pour un plaisir passager, nous renonçons à la plus douce jouissance de l’âme, nous consentons à priver nos coeurs des rayons du soleil de justice et de ce qui est pour nous une consolation dans toutes les épreuves de notre marche à travers le désert.
(*) Sans doute dans ce passage, les mots «l’amour du monde et l’amour du Père» sont employés dans un sens caractéristique ; mais nous parlons ici de la vérité générale dans son application.
Pour empêcher toute méprise, l’apôtre parle non seulement du monde, mais aussi des choses qui sont dans le monde ; et ces choses sont désignées comme étant la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie (1 Jean 2:16). C’est-à-dire que tout ce que la chair peut désirer sous une forme quelconque, tout ce qui peut plaire aux yeux, tout ce qu’ils peuvent convoiter ou désirer, et aussi tout ce qui peut exciter l’orgueil de l’homme, tout ce qui lui donne de l’importance dans ce monde ou l’élève au-dessus de ses semblables, que ce soit le rang, la distinction, la science, la force, le talent ou la puissance, tout ce, en un mot, qui sert l’homme comme homme dans ce monde, le jeune homme doit l’éviter, et il l’évitera dans la mesure où il comprend la relation de toutes ces choses avec un Christ rejeté et, par conséquent, avec le Père et son amour.
On verra de plus que ce passage nous indique les trois chemins par lesquels Satan pénètre dans nos âmes, car il cherche toujours à nous enlacer par ses fascinations et ses enchantements. Il faut donc garder, avec soin, ces avenues. Il est plus facile de tenir l’ennemi dehors que de le chasser une fois qu’il est dedans. Tout comme Néhémie établit des gardes qui devaient veiller sur les murs de Jérusalem, chacun aussi devant veiller sur sa maison, de même nous devons garder les portes de nos âmes contre la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie, afin que nous soyons gardés nous-mêmes dans l’amour du Père. Pour y réussir, il nous faut absolument marcher en présence de Dieu, veiller constamment, et prier dans la puissance de l’Esprit.
L’apôtre appuie son exhortation d’un autre argument. «Le monde, dit-il, s’en va et sa convoitise, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement» (1 Jean 2:17). Il nous rappelle le caractère transitoire du monde et de tout ce qu’il renferme en opposition avec la durée perpétuelle et le caractère immuable de tout ce qui se rapporte à Dieu. En faisant sa volonté, nous demeurons à toujours ; car, dans sa grâce, il nous a associés avec lui et son Fils (1 Jean 1:3), et l’éternité, par conséquent, est notre part, une éternité de bénédiction et de joie. Et plus nous comprenons cela et saisissons le caractère de la position dans laquelle nous avons été introduits et où nous sommes conduits par l’amour du Père, plus nous serons forts contre les séductions du monde, plus nous apercevrons leur complète vanité. Toute trace de l’Égypte, dit un auteur bien connu, est un opprobre sur le croyant. Ceci est vrai, car Christ s’est donné lui-même pour nos péchés, afin qu’il nous retirât du présent siècle mauvais, selon la volonté de notre Dieu et Père (Gal. 1:4).
Nous avons déjà considéré deux des trois classes entre lesquelles, selon l’apôtre, toute la famille de Dieu est divisée. Il nous reste à considérer la troisième, celle des petits enfants. Nous rappellerons que ces trois classes servent à distinguer différents degrés de connaissance spirituelle. Les petits enfants donc, ne sont pas, comme on pourrait s’y attendre nécessairement, les plus jeunes des enfants de Dieu, parce que malheureusement il arrive quelquefois que des chrétiens restent dans cette classe pendant la plus grande partie de leur vie.
Ce qui les caractérise, comme on le voit au verset treizième, c’est qu’ils connaissent le Père ; car c’est la première chose qu’ils apprennent en recevant l’esprit d’adoption. Ils sont convaincus de péché par la miséricorde de Dieu, et le sang de Christ a répondu à leur besoin comme pécheurs en les nettoyant de la coulpe et en leur donnant ainsi la paix et la confiance en présence de Dieu. Puis, scellés par le Saint Esprit qui est l’Esprit du Fils de Dieu, ils crient Abba, Père, et sont ainsi amenés à le reconnaître comme tel. Non seulement ils sont sauvés, mais ils savent aussi qu’ils sont enfants, et comme enfants ils ont appris à connaître le Père. C’est une bénédiction immense, quoique ce ne soit qu’un commencement ; car comprenant la relation divine que la grâce de Dieu a formée entre eux et lui et la sachant indestructible, ils saisissent quelque chose de ce que renferme ce nom de Père donné à Dieu, et se réjouissent dans cette précieuse assurance qu’ils sont devenus les objets du coeur de Christ, qui fera tout servir à leur bien et qui trouvera sa joie dans leur bonheur, maintenant et dans toute l’éternité.
On verra ainsi qu’il n’y a pas de raison pour qu’un seul enfant de Dieu ne connaisse le Père. Cela arrive, sans doute, mais cela vient, nous l’avons déjà remarqué à propos du pardon des péchés, d’un enseignement défectueux, de l’incrédulité ou de l’ignorance de ce qu’est la plénitude de la grâce. Dieu veut que tous ses enfants le connaissent comme Père, et il y a pourvu, en sorte que, si cette connaissance manque, la faute en est à l’homme et non à Dieu. Il n’y a rien de plus triste que les efforts continuels, faits par des docteurs professant le christianisme, pour saper les vérités de la rédemption et les privilèges des croyants.
Ne voulant pas croire que Dieu est aussi bon et l’homme aussi méchant qu’il l’est, leur but est d’exalter l’homme aux dépens de Dieu, et ainsi ils deviennent aveugles quant à l’enseignement fondamental de la Parole. C’est à cause de cela qu’il est d’autant plus nécessaire d’affirmer toute la vérité quant à la grâce et à la rédemption.
L’apôtre s’adresse aux enfants, du v. 18 jusqu’à la fin du v. 27. Au v. 28, il s’adresse à toute la famille. Le monde, voilà particulièrement le danger pour les jeunes hommes ; tandis que les petits enfants sont particulièrement exposés au piège des fausses doctrines, et cela donne à l’apôtre l’occasion de développer des instructions précieuses pour diriger les croyants à quelque degré qu’ils soient parvenus. C’est ce que nous allons maintenant examiner.
Il leur rappelle d’abord que c’est la dernière heure (v. 18). Ils savaient, car ils l’avaient appris, que l’antichrist devait venir ; mais il y avait déjà plusieurs antichrists — des ennemis du christianisme, animés de l’esprit de l’antichrist, et cela prouvait que c’était la dernière heure. Dans les écrits de Paul, il est fait mention des «derniers jours», et cette expression désigne plus particulièrement la fin des derniers temps, — c’est-à-dire de la dispensation actuelle. À la croix de Christ, Dieu a cessé d’agir avec le monde sur le principe de la responsabilité. Il a été démontré là que l’homme était perdu et que le monde était jugé. Mais le Seigneur tarde encore, dans sa grâce patiente, «ne voulant pas qu’aucun périsse, mais que tous viennent à la repentance» (2 Pierre 3:9) ; et c’est ce qui caractérise le jour de la grâce, la dernière heure durant laquelle ce cri se fait entendre de tous côtés : « Quiconque veut, prenne de l’eau de la vie gratuitement» (Apo. 22:17). Jean, cependant, montre que c’est la dernière heure, par le fait qu’il existe plusieurs antichrists, preuve que l’antichrist était à l’arrière-plan, l’homme de péché qui ne paraîtra sur la scène qu’après l’enlèvement des saints, lorsqu’ils seront réunis pour toujours avec le Seigneur. (Comparer 1 Thes. 4:13-18, avec 2 Thes. 2). Les antichrists sont regardés comme les hérauts du chef-d’oeuvre de Satan ; et, pour mettre les petits enfants sur leurs gardes, l’apôtre définit leur caractère. Les antichrists étaient des apostats. « Ils sont sortis du milieu de nous» (v. 19). Ils fussent demeurés avec nous, dit Jean, s’ils eussent été des nôtres, et maintenant, en se séparant de nous, ils ont montré qu’ils n’étaient pas des nôtres (v. 19). Que ceci est sérieux ! Ces antichrists avaient été une fois sur le terrain du christianisme, rompant le pain avec les saints à la table du Seigneur et ils s’en étaient allés ; ils avaient abandonné même la profession du nom de Christ et pris une position d’hostilité complète vis-à-vis de celui qu’ils avaient confessé une fois comme leur Sauveur et Seigneur. Mais, sans doute, il fallait un sens spirituel pour découvrir cette hostilité à Christ, sans cela il aurait à peine été nécessaire d’avertir les petits enfants au sujet d’un tel danger. Satan se transforme toujours en ange de lumière et ses ministres aussi se transforment en ministres de justice (2 Cor. 11:14-15) ; c’est ainsi qu’il arrive souvent que ces faux docteurs cherchent à séduire les âmes simples sous l’apparence d’une plus grande spiritualité, d’une consécration plus complète, ou sous le prétexte qu’ils ont découvert des vérités d’un ordre plus élevé. Jean les démasque et leur donne le nom qui leur convient, celui d’antichrists. Cela le conduit à développer plus complètement le caractère de l’antichrist. «C’est un menteur qui nie que Jésus est le Christ ; celui-là est l’antichrist qui nie le Père et le Fils» (v. 22). Le premier point concerne spécialement les Juifs : il nie le Père ; le second est l’erreur anti-chrétienne qui se répand partout, aujourd’hui : il nie le Fils. Les deux points réunis résument l’antichrist. Nous avons donc, dans ce passage, le développement et le résumé de toutes les hérésies et de toutes les mauvaises doctrines. En somme, toutes les formes de l’opposition à la vérité reviennent à ceci : d’abord elles nieront non pas qu’un Christ doive venir, mais que Jésus est le Christ ; et enfin, mais pas dès le commencement, remarquons-le, elles nieront non pas qu’il y a un Dieu, mais la vérité relative au Père et au Fils ; en un mot, le christianisme. Et quel est le chrétien un peu versé dans la parole de Dieu, connaissant un peu les erreurs dominantes, qui n’ait remarqué les germes, chaque jour plus évidents, de ces différentes formes de l’opposition à la vérité de Dieu ? Oui, si Jean pouvait le dire de son temps, nous avons bien plus de raisons de l’affirmer aujourd’hui : il y a maintenant plusieurs antichrists (v. 18). De toutes manières la parole de Dieu est sapée ; des docteurs, qui se disent chrétiens, ignorent les vérités fondamentales du christianisme, encore plus peut-être que les athées ou les impies avoués ; de sorte qu’il est possible qu’un homme prenne le nom de ministre de Christ, tout en rejetant la vérité relative à sa personne et à son oeuvre. Ce sont les chaires de la chrétienté qui constituent le plus grand danger du moment présent. Maintenant, ils sont avec nous, avec nous seulement parce que la chrétienté elle-même étant en train de devenir apostate, si elle ne l’est déjà, s’accorde ainsi avec ces ennemis de la vérité ; mais avant qu’il soit longtemps, beaucoup (comme quelques uns l’ont déjà fait) jetteront le masque et prendront résolument leur place au milieu de ceux qui rejettent Christ et le christianisme. Ce sont réellement des antichrists.
Il est bien important de remarquer que ce sont les petits enfants qui sont ainsi mis en garde contre ce danger et ce piège. De nos jours, on pense souvent qu’il est superflu, sinon tout à fait insensé, d’avertir les jeunes convertis au sujet des erreurs qui ont cours. Et pourtant, nous voyons que Jean leur parle clairement des dangers qu’ils rencontreront sur leur chemin. Un proverbe populaire ne dit-il pas : Être averti, c’est être armé ? Ce mot est vrai dans tous les sens ; il est confirmé par notre passage. Bien des naufrages auraient été évités, si ceux qui dirigent dans l’Église de Dieu avaient suivi l’exemple de Jean. Mais l’apôtre fait plus que de signaler le danger ; il enseigne aussi à ces jeunes croyants les moyens d’être gardés. Mais Dieu, dans sa grâce, prévoyant toutes les difficultés et la nature de tous les ennemis que son peuple aurait à affronter, a pourvu à tout ce qui pourrait arriver. C’est pourquoi Jean dit : «Et vous avez l’onction de la part du Saint, et vous connaissez toutes choses. Je ne vous ai pas écrit parce que vous ne connaissez pas la vérité, mais parce que vous la connaissez, et qu’aucun mensonge ne vient de la vérité» (v. 20-21), et plus loin, il dit : «Pour vous donc, que ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous : si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous aussi vous demeurerez dans le Fils et dans le Père» (v. 24).
Ces trois moyens de se garantir de l’erreur sont dignes d’une sérieuse attention. D’abord, Jean leur rappelle l’onction de la part du Saint, onction par laquelle ils connaissaient toutes choses. Le même Esprit qui habite en nous comme Esprit d’adoption, est l’onction aussi bien que le sceau et les arrhes (Voir 2 Cor. 1:21-22, etc.). Cette onction de l’Esprit de Dieu qui nous lie fermement à Christ (2 Cor. 1:21) nous donne deux choses : l’intelligence et la puissance. Dans ce passage, il est question de l’intelligence, et Jean enseigne aux enfants que, depuis qu’ils ont été oints par le Saint Esprit, ils sont eux-mêmes à la source de toute connaissance, non pas qu’ils sachent actuellement toutes choses, mais, ayant reçu l’onction, ils ont en eux la faculté de connaître et ainsi de distinguer la vérité de l’erreur. Dans les choses de Dieu, il est bon de se le rappeler constamment, l’Esprit de Dieu est ce qui nous permet de saisir la vérité (Voir 1 Cor. 2). L’esprit, la raison humaine et l’intelligence n’ont rien à faire ici. Comme quelqu’un l’a dit : «L’activité de l’esprit est le grand obstacle qui empêche de comprendre la vérité de Dieu». C’est ainsi qu’il arrive souvent qu’un simple enfant dans les choses du monde, est le plus sage dans les choses de Dieu. Le psalmisle dit : «J’ai plus d’intelligence que tous ceux qui m’enseignent, parce que je médite tes préceptes. J’ai plus de sens que les anciens, parce que j’observe tes préceptes» (Ps. 119:99-100). La source donc, pour le croyant, de toute sagesse et de toute connaissance est la parole de Dieu expliquée par le Saint Esprit. Dieu a ainsi pourvu les petits enfants de sa famille d’un moyen pleinement suffisant, pour discerner les erreurs qui les entourent et pour s’en défendre. Ceux-ci n’ont pas besoin que personne les enseigne (1 Jean 2:27), parce que, marchant dans la dépendance de Dieu, le Saint Esprit lui-même les mettra sur leurs gardes et leur montrera ce qu’est la vérité et ce qu’est l’erreur. Un fait qui s’est passé récemment à X, est une illustration vivante de ce que nous avons dit. Dans cette localité, sous prétexte de plus de lumière et d’une plus grande charité, les fondements de la vérité furent attaqués et les enfants de Dieu furent surtout atteints. Un frère s’aperçut du danger, mais au commencement, par amour de la paix et dans la pensée que les pauvres et les simples seraient incapables de comprendre de telles questions, il garda le silence. Enfin la fidélité au Seigneur l’obligea à se séparer de ceux qui soutenaient ces fausses doctrines ; et dans une lettre reçue récemment, il rapporte à la gloire de Dieu qu’aucune des âmes simples pour lesquelles il avait eu des craintes n’avait été entraînée ; et il ajoute que, sauf de rares exceptions, toutes les personnes cultivées et instruites avaient refusé de juger ou avaient accepté les doctrines erronées. Comme les petits enfants de notre passage qui s’étaient trouvés fidèles, ils avaient et ils ont l’onction du Saint, et ainsi, distinguant la vérité de l’erreur, ils ne furent pas entraînés par les habiles séductions du méchant.
Ces petits enfants aussi connaissaient la vérité et savaient, par conséquent, qu’aucun mensonge ne vient de la vérité (v. 21). C’est là ce qui fait la sûreté des saints, quand, sous de spécieux déguisements, les erreurs marchent tête levée. Si nous avons la vérité, cela nous suffit, nous n’avons pas besoin d’examiner tout ce qui se dit être la vérité. Le Seigneur nous épargnera la souillure et le trouble. Ses brebis, comme il nous l’a lui-même enseigné, connaissent sa voix, mais elles ne connaissent pas la voix des étrangers (Jean 10:5). Si nous ne connaissons pas la voix qui cherche à nous séduire, cela suffit : nous refuserons de l’écouter, parce que c’est la voix d’un étranger. «Jésus Christ est le même hier, aujourd’hui et éternellement», et nous ne serons pas entraînés par des doctrines nouvelles.
Nous nous trompons grandement si, sachant que nous avons la vérité, nous examinons une erreur qui prétend se substituer à ce que nous possédons. Ce peut être le devoir des docteurs de le faire pour dénoncer les artifices de Satan, mais il suffit aux petits enfants de demeurer dans la vérité elle-même qui est une certitude, et dans l’assurance qu’aucun mensonge ne vient de la vérité.
Ensuite l’apôtre, comme on l’a déjà remarqué, caractérise le menteur comme celui qui nie, non pas qu’il y a un Christ, ou qu’il doit venir, mais que Jésus est le Christ. «Celui-là est l’antichrist, qui nie le Père et le Fils» (v. 22), c’est-à-dire toute la vérité du christianisme ; car personne ne connaît le Père que le Fils, et celui à qui le Fils l’aura révélé. Mais cet avertissement est bien solennel : «Quiconque nie le Fils n’a pas non plus le Père ; celui qui confesse le Fils a aussi le Père» (v. 23). Dieu — Dieu le Père — ne peut donc être connu en dehors du Fils, en dehors de ce que le Fils est en vérité, dans sa dignité essentielle, en dehors de la vérité de sa personne comme Jésus-Christ venu en chair (1 Jean 4:2-3 ; 2 Jean 7-9). Tous les raffinements du déisme ne sont donc que d’impies spéculations ; car faire profession qu’on croit en Dieu, en dehors de Christ, c’est tout simplement rejeter le vrai Dieu, puisque c’est seulement en Christ qu’il a été révélé et qu’il peut être connu.
Les petits enfants avaient l’onction du Saint et ils connaissaient la vérité ; mais, maintenant, l’apôtre ajoute une exhortation : «Pour vous, dit-il, si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous aussi vous demeurerez dans le Fils et dans le Père» (v. 24). C’est la troisième source ou le troisième moyen, pour eux, d’être gardés ; il y a là un principe d’une importance capitale. Il n’y a d’autre remède à la corruption qui, par ses envahissements a jeté la confusion partout, que de retourner au commencement. C’est ainsi que l’apôtre Paul exhorte Timothée, dans les temps difficiles où il se trouvait, à demeurer dans les choses qu’il avait apprises et dont il avait été pleinement convaincu, sachant de qui il les avait apprises (2 Tim. 3:14-17). Toutes les erreurs, toutes les falsifications de la vérité, peuvent ainsi être signalées et réfutées. Satan lui-même est impuissant contre la vérité de Dieu, quand on en use avec simplicité. Si nous nous reposons sur la Parole, telle qu’elle a été donnée par les apôtres, nous sommes sur un solide rocher contre lequel viennent se briser, sans force, toutes les erreurs, comme des vagues que le choc réduit en poussière. Dans les disputes théologiques, il arrive souvent qu’on cite, comme faisant autorité, les pères (c’est ainsi qu’on appelle les écrivains qui sont venus après les apôtres, ou les auteurs de temps plus rapprochés), en laissant de côté presque entièrement ce qui a été enseigné dès le commencement. Mais la vérité de Dieu ne change pas ; elle est une autorité aujourd’hui, aussi bien que quand elle fut révélée au commencement, et elle est, par conséquent, le seul critérium de l’homme, de tous ses systèmes et de ses prétentions. Ce qui ne s’accorde pas avec ce qui a été enseigné dès le commencement, doit donc être rejeté sans miséricorde, et sans qu’on puisse alléguer, pour s’en dispenser, le fait que les circonstances sont autres et que les conditions de la société ont changé. Dieu, qui ne change point, communique son propre caractère à la vérité qui passe ainsi, à travers les siècles, aussi immuable dans sa perfection, que Celui dont elle est la parole.
La vérité demeurant en eux, dans la puissance du Saint Esprit, devait être leur sauvegarde contre les antichrists qui déjà sont dans le monde mais il y a autre chose encore, une bénédiction positive : «Vous aussi vous demeurerez dans le Fils et dans le Père» (v. 24). Nous l’avons vu dans notre chapitre 1, la réception de la vérité annoncée par les apôtres, comme message au sujet de Christ, parole de vie, apportait une nouvelle nature et la vie éternelle dans la communion avec le Père et le Fils ; de même ici nous voyons que, pour être gardé dans cette communion, il faut retenir dans le coeur ce qui a été enseigné au commencement — c’est ce qui fait qu’on demeure dans le Père et dans le Fils. Il est extrêmement important, pour nos âmes, de conserver la vérité telle qu’elle a été donnée au commencement ; nous serons ainsi gardés contre les fausses doctrines. Rien ne produit de saintes affections, rien ne sanctifie, rien ne conduit à la jouissance de ce qui est notre portion dans le Père et dans le Fils, que la vérité, et la vérité seule est l’épée de l’Esprit. Pour qu’elle soit tout cela pour nous, il faut la serrer dans nos coeurs et l’y conserver comme un saint dépôt, afin qu’elle devienne, par le Saint Esprit, le mobile de nos actions et ce qui dirige notre marche, qu’elle nous fournisse des armes propres à nous défendre contre les assauts de Satan ; elle sera ainsi, en même temps, le moyen de maintenir nos âmes dans la jouissance de la communion avec le Père et le Fils.
Vient maintenant un mot d’encouragement et de consolation. Il avait dit : «Si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous» etc., il ajoute maintenant «C’est ici la promesse que lui nous a promise, — la vie éternelle» (v. 25). Les «si» de l’Écriture ne limitent jamais la grâce, ne la rendent pas conditionnelle, car la grâce de Dieu a un caractère absolu. Ils montrent que nous sommes responsables et que c’est à la grâce que nous devons de persévérer. C’est ainsi que le Seigneur lui-même dit à des Juifs qui faisaient profession de croire en lui : «Si vous persévérez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples» (Jean 8:31) ; cette persévérance en était la preuve pour d’autres. Ainsi, pour persévérer dans le Père et dans le Fils, il faut nécessairement garder la vérité dans son âme. Nous insistons sur ces «si», qui nous rappellent notre responsabilité et que Dieu veut que nous employions pour nous sonder et nous juger nous-mêmes, mais il est tout aussi nécessaire d’insister, sans réserve, sur le caractère absolument inconditionnel de la grâce de Dieu pour notre salut. La vie éternelle est la vie éternelle, et une fois qu’on la possède on ne peut jamais la perdre ; car, comme nous l’avons vu, elle est vraiment Christ lui-même ; c’est cette vie éternelle qui était auprès du Père, et qui nous a été manifestée (1 Jean 1:2). Aussitôt donc qu’il a insisté sur la responsabilité de garder ce qu’ils avaient entendu dès le commencement, il fortifie leurs coeurs en leur rappelant que c’est la vie éternelle que Dieu avait promise.
Cela fait ressortir un principe bien précieux des voies de Dieu envers nous, tel qu’il nous a été révélé dans la Parole. Il ne veut jamais que nous mettions en doute si nous sommes ses enfants ou non, — cela est toujours considéré comme une chose réglée, si nous sommes croyants. L’examen de soi-même ne nous est donc jamais recommandé pour nous faire connaître si nous sommes ou non de vrais chrétiens, mais seulement pour découvrir le péché, afin qu’il soit amené à la lumière, en présence de Dieu, et qu’il y soit jugé. Les relations entre nos âmes et lui sur le terrain de la rédemption ayant été établies une fois pour toutes, ses droits sur nous et notre responsabilité résultant du fait que nous lui appartenons, peuvent bien être rappelés, mais ils ne le sont jamais, faisons-y bien attention, pour affaiblir la grâce ; toutes les exhortations de cette nature reposent sur le fondement de la grâce, et ont pour but d’amener nos âmes à jouir plus complètement de leurs privilèges. C’est pour avoir perdu de vue cette distinction, que des âmes sont dans l’esclavage, usant des préceptes et des avertissements de l’Écriture d’une manière légale, pour s’exciter à plus de zèle et plus de dévotion. C’est la grâce qui fonde et fait vivre l’âme, — la précieuse et souveraine grâce de Dieu qu’il donne librement et sans condition. Il nous en rend participants, mais, pour que nous apprenions à connaître son coeur, il nous avertit, dans cette même grâce, des dangers que nous pouvons rencontrer et nous dit à quelles conditions nous pourrons jouir pleinement de l’action efficace de sa grâce. Ceci nous aide à comprendre pourquoi l’apôtre ajoute après le v. 24 : «Et c’est ici la promesse que lui nous a promise, — la vie éternelle» (v. 25).
Les versets suivants (v. 26-27) résument les instructions données par l’apôtre aux petits enfants. Il leur rappelle encore l’onction qu’ils avaient reçue de Christ et à cause de laquelle ils n’avaient pas besoin que personne les enseignât au sujet de ces faux docteurs apostats, qui cherchaient à les entraîner. L’apôtre ne veut pas dire que ces saints pouvaient se passer des docteurs qui étaient des dons de Christ à l’Église, pour le perfectionnement des saints et l’édification du corps de Christ (Éphésiens 4), mais plutôt que, s’ils étaient assaillis par les antichrists, ils avaient, quoique réduits à eux-mêmes, une ressource pleinement suffisante dans l’onction du Saint Esprit. Il leur dit encore : «Comme la même onction vous enseigne à l’égard de toutes choses, et qu’elle est vraie et n’est pas mensonge, — et selon qu’elle vous a enseignés, vous demeurerez en lui» (v. 27). On pourrait également traduire : en elle, mais en lui semble être la meilleure interprétation. Qu’il est intéressant d’observer cet ordre ! D’abord, on reçoit l’onction ; ensuite, cette onction enseigne toutes choses, enfin on demeure en lui. Ah ! qu’est-ce qui pourrait nous égarer, si l’onction du Saint Esprit remplissait nos âmes, si nous étions constamment occupés à recevoir ses enseignements, et si nous demeurions en Christ ? Nous serions alors à la source de toute connaissance, de la puissance et de la bénédiction.
Ainsi, au verset 28, où l’apôtre s’adresse encore une fois à toute la famille, il n’a qu’un mot à leur dire, après les instructions qu’il a données aux différentes classes, et ce mot est : «Demeurez en lui». «Et maintenant, enfants, demeurez en lui, afin que, quand il sera manifesté, nous ayons de l’assurance, et que nous (nous qui vous avons enseignés et avons été des instruments de bénédiction pour vous) ne soyons pas couverts de honte de par lui, à sa venue» (v. 28), ce qui arriverait si l’on voyait que les travaux des apôtres et docteurs chrétiens au milieu d’eux avaient été vains. Ils perdraient, dans ce cas, les choses qu’ils avaient opérées, et ne recevraient pas un plein salaire (2 Jean 8). Il les place aussi, par là, comme il se place lui-même et ses compagnons de travail, en présence du retour du Seigneur. Rien ne pousse autant soit les ouvriers, soit les saints, en général, à être actifs dans l’oeuvre du Seigneur, que l’attente du retour de Christ. C’est ce motif que Jean présente à tous les enfants de la famille de Dieu, quand il place sur leur coeur ce précepte divin : demeurez en lui. Demeurer en lui dans l’espérance de le voir bientôt face à face, quand le caractère de notre oeuvre (c’est bien ce que peut dire l’apôtre) sera pleinement manifesté. Que le Seigneur grave cette recommandation, en caractères vivants, dans les coeurs de tous les enfants de Dieu, pour l’amour de son nom !
Si nous sommes enfants de Dieu, cela se reconnaîtra à certains traits, à certains caractères ; car si nous sommes nés de nouveau, si nous avons reçu une nouvelle nature et la vie éternelle en Christ, cette nouvelle nature — tel est, en effet, le raisonnement de l’apôtre Jean — s’exprimera nécessairement. En d’autres termes, puisque Christ lui-même est la vie éternelle, la vie que nous possédons en croyant en lui coulera par les mêmes canaux que la sienne, quand il était ici-bas au milieu des hommes. Une nature divine doit toujours s’exprimer de la même manière dans les mêmes circonstances, et se montrer semblable à Celui dont notre nouvelle nature tire son origine. C’est pourquoi l’apôtre, dans toute sa première épître, indique certains caractères distinctifs des enfants de Dieu.
Avant d’en venir à ces caractères, il faut établir soigneusement qu’ils ne nous sont pas donnés pour nous aider à découvrir si nous sommes enfants de Dieu ou non. Employer l’Écriture de cette manière, ce serait ne pas comprendre du tout le but de l’Esprit de Dieu, remplir nos âmes d’incertitude, et nous mettre sous le dur esclavage du légalisme qui détruirait bientôt toute fraîcheur et toute énergie de vie chrétienne. Telle a été l’erreur dans tous les âges de la théologie formaliste. Il en résulte que les âmes sont conduites à s’occuper d’elles-mêmes, de leur état spirituel, à rechercher continuellement les fruits de l’Esprit en elles-mêmes, au lieu de s’occuper de Christ, de le suivre, et de méditer sur sa beauté morale et sur ses perfections, — ce qui est la condition essentielle des progrès spirituels, — et ainsi elles arrivent à se constituer leurs propres juges. Il y a des milliers d’enfants de Dieu qui se trouvent sur cette mauvaise voie, sont maintenus dans le doute et l’incertitude toute leur vie, au lieu de se réjouir dans leurs privilèges et dans la jouissance de l’amour du Père, et qui même regardent la crainte et le doute comme des signes d’humilité. Mais ce n’est pas la voie qu’enseigne l’Esprit de Dieu ; et ces traits ne sont pas donnés pour nous aider à découvrir, par l’examen de nous-mêmes, si nous sommes vraiment régénérés, mais ils le sont pour nous faire connaître le caractère et l’action de la nature divine, dont par grâce nous avons été rendus participants. Notre relation avec Dieu étant considérée comme une chose réglée, le Saint Esprit peut maintenant nous faire connaître quelle est la manière de vivre des enfants de Dieu.
Cette simple parole de l’apôtre Jean servira de preuve à ce que nous venons de dire : «Quiconque croit que Jésus est le Christ, est né de Dieu» (1 Jean 5:1). La nouvelle naissance nous est représentée comme dépendant non du fait que l’on peut découvrir en nous tel ou tel fruit de l’Esprit, mais seulement et uniquement de ceci : croyons-nous, oui ou non, que Jésus est le Christ ? C’est merveilleusement simple ! Le jour de la Pentecôte, Pierre déclara que Dieu avait fait Seigneur et Christ ce même Jésus que les Juifs avaient crucifié. Ce Jésus qui était une fois ici-bas, sur la terre, est ainsi appelé, par le témoignage divin, le Christ de Dieu. Il n’a pas cessé de l’être pendant son séjour ici-bas, mais il se présente maintenant dans ce caractère sous un nouvel aspect, comme Celui qui a été rejeté, qui est ressuscité des morts et qui est assis à la droite de Dieu. Jésus est le Christ, et quiconque s’incline devant ce témoignage et le reçoit dans son coeur comme vrai, est né de Dieu. Au lieu donc de regarder au dedans pour y chercher des preuves de la nouvelle naissance, il s’agit simplement de s’adresser cette question : «Est-ce que je crois que Jésus est le Christ (*) ?»
(*) Voyez dans notre chapitre 2, d’autres développements sur les moyens de devenir enfant de Dieu.
Le premier caractère des enfants de Dieu se trouve en 1 Jean 3:9. «Quiconque est né de Dieu ne pratique pas le péché, car la semence de Dieu demeure en lui, et il ne peut pas pécher, parce qu’il est né de Dieu» (Voir aussi 1 Jean 5:18). La difficulté de cette déclaration disparaît, si l’on se place au point de vue de l’apôtre. Il établit cette vérité, comme on l’a souvent remarqué, d’une manière abstraite et par conséquent absolue ; c’est-à-dire qu’il se borne à considérer, à l’exclusion de toute autre, la seule chose devant lui. Ainsi, dans ce passage, il parle seulement de ce qui caractérise la nouvelle nature, née de Dieu, sans s’arrêter au fait que les enfants de Dieu possèdent aussi la vieille nature qui est si complètement mauvaise, que Paul la caractérise par ces mots : «le corps du péché» (Rom. 6:6). Tout croyant a ces deux natures, et Jean parle seulement de celle qui est divine, et comme la croix est considérée comme ayant mis fin judiciairement pour toujours à la vieille nature, quoique cela ne soit pas son sujet, il dit : «Quiconque est né de Dieu ne pèche pas» (1 Jean 3:9). C’est la nouvelle nature et non la vieille qui caractérise notre vie devant Dieu ; et ainsi, dans ce sens absolu, il peut dire : «Nous savons que quiconque est né de Dieu ne pèche pas, mais celui qui est né de Dieu se conserve lui-même, et le méchant ne le touche pas» (1 Jean 5:18). Cela ne signifie donc pas que l’enfant de Dieu ne tombe plus dans le péché (car qui, hélas ! pourrait affirmer qu’il ne pèche jamais ?), mais simplement que le caractère de la nouvelle nature, c’est qu’elle ne pèche pas. Car comment ce qui est né de Dieu pourrait-il pécher ?
Il ne faut pas oublier que tandis que, de fait, nous possédons aussi la vieille nature, et qu’il n’y a personne qui ne pèche, il n’y a en même temps pas, comme cela a été établi déjà, de nécessité pour le croyant de pécher. «Mes enfants, dit Jean, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez pas» (1 Jean 2:1). Car quoique nous portions avec nous la vieille nature, c’est notre privilège de nous tenir nous-mêmes «pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus» (Rom. 6:11). De là aussi l’exhortation de Pierre : «Christ donc, ayant souffert pour nous en la chair, vous aussi, armez-vous de cette même pensée que celui qui a souffert en la chair s’est reposé du péché, pour ne plus vivre le reste de son temps dans la chair pour les convoitises des hommes, mais pour la volonté de Dieu» (1 Pierre 4:1-2). La déclaration de Jean ne doit donc en aucune manière être modifiée, et quand par négligence ou défaut de dépendance, nous avons été loin de la présence de Dieu, et que nous avons déshonoré le nom de Christ en tombant dans le péché, nous devons nous juger sans ménagement, sans rabaisser le niveau qui nous est donné. Quels que nous soyons en pratique, que notre mesure reste celle-ci : «Quiconque est né de Dieu ne pèche point». Tel est le caractère de l’enfant de Dieu. Il peut y manquer en tombant dans le péché, mais triste et humilié quand cela arrive, il ne cesse pas pour cela d’être un enfant de Dieu. D’un autre côté, l’apôtre, en nous rappelant qu’il n’y a pas pour nous de nécessité de pécher, nous montre comment Dieu a pourvu au cas où ses enfants tomberaient dans le péché. Il dit : «Si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ, le juste ; et lui est la propitiation pour nos péchés, et non pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier» (1 Jean 2:1-2). Lavés par le précieux sang de Christ, nous sommes purifiés pour toujours de la coulpe du péché devant Dieu ; mais par le ministère de Christ, comme avocat, il a pourvu à un moyen de laver nos pieds de toutes les souillures que nous pourrions contracter dans notre marche à travers ce monde. D’abord, si nous péchons, Christ prie le Père pour nous ; ensuite, en réponse à son intercession, le Saint Esprit, tôt ou tard, applique la parole à nos consciences, et cela nous conduit au jugement de nous-mêmes et enfin à la confession de nos péchés. Dieu est «fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité» (1 Jean 1:9).
Un second caractère des enfants de Dieu, c’est qu’ils pratiquent la justice. «Si vous savez qu’il est juste, dit Jean, sachez que quiconque pratique la justice est né de lui» (1 Jean 2:29 ; 1 Jean 3:7, 10). L’enfant sera semblable à celui dont il est né. Ayant la même nature, il portera les mêmes fruits. Mais il faut prendre garde de bien comprendre ce que signifie «la justice». Comme Paul l’enseigne, tout croyant est fait justice de Dieu en Christ (2 Cor. 5:21) ; c’est pourquoi, «en Christ» répond à toutes les exigences divines selon la sainte mesure de Dieu. Cela donne au croyant une position parfaite devant Dieu, si parfaite que Dieu peut trouver tout son plaisir dans le croyant. Mais Jean, dans ce passage, ne parle pas de notre position ; il parle de notre vie ici-bas ; cette justice est toute pratique, elle est le déploiement de la vie éternelle que nous avons en Christ. Or, tout en étant pratique, c’est une justice selon les pensées de Dieu et non selon les nôtres. Elle est expressément liée à Dieu, à Dieu tel qu’il est manifesté en Christ. «Si vous savez qu’il est juste, sachez que quiconque pratique la justice est né de lui». Elle a donc le même caractère que lui ; la justice du croyant, dans ce sens, étant de la même nature que celle de Christ dans sa marche ici-bas. Ainsi ce n’est pas ce que l’homme appelle justice, mais ce qui, par le caractère de sa manifestation, montre que sa source est dans une nouvelle nature, ce qui est produit seulement par le Saint Esprit.
Voyons donc plus particulièrement en quoi consiste cette justice. Quand notre Seigneur, dans son humble grâce, se présente à Jean pour être baptisé, Jean l’en empêchait en lui disant : «Moi, j’ai besoin d’être baptisé par toi, et toi, tu viens à moi ! Et Jésus répondant, lui dit : Laisse faire maintenant, car ainsi il nous est convenable d’accomplir toute justice» (Matt. 3:14-15). Cette parole est la réponse précise de notre Seigneur à la question que nous venons de nous poser. Ayant pris tout son plaisir dans les saints qui sont sur la terre, il s’identifie avec eux comme étant les élus de Dieu dans son ancien peuple et étant venu pour faire la volonté de Dieu, il était soumis avec eux à toute parole venant de Dieu. Quand donc Jean Baptiste, prêchant le baptême de repentance, disait : «Repentez-vous ; car le royaume des cieux est proche», cette parole liait le coeur et la conscience de tous les Israélites pieux, et en tant que Jésus avait maintenant pris sa place au milieu de son peuple, elle le liait aussi, non pas qu’il eût besoin d’être baptisé, (loin de nous cette pensée !) mais parce que, dans son amour et par sa grâce, il prit cette position pour glorifier Dieu et pour bénir son peuple. Il nous enseigne ainsi que l’obéissance est le chemin de la justice. C’est la voie de la justice pratique ; non pas l’obéissance pour être sauvé, mais l’obéissance comme étant l’expression de la nouvelle vie que nous avons reçue par la nouvelle naissance opérée par l’Esprit. (Voir 1 Jean 5:2-3 ; 2 Jean 6). Quels sont, en effet, les commandements qui nous sont donnés ? Ils ne sont que le déploiement de la nature de Dieu, précisément comme tous les préceptes renfermés dans les épîtres ne sont que l’expression des traits de la vie de notre Seigneur. Si donc nous avons une nouvelle nature, si Christ lui-même est notre vie, toute l’activité de cette nature et de cette vie doit couler dans des canaux divins, et les commandements et les préceptes du Nouveau Testament sont ces canaux divins. On ne peut trop insister là-dessus ; car, quoique il soit vrai que Dieu nous sauve absolument sur le fondement de la grâce par la rédemption qui est dans le Christ Jésus, il réclame la justice pratique dans la marche et les voies de ses enfants. C’est en vue de cela qu’il nous a donné sa Parole, afin qu’elle fût une lampe à nos pieds et une lumière à nos sentiers ; et si nous sommes guidés par elle, si nous lui sommes soumis, et que nos vies soient réglées par cette Parole, nous marcherons dans la justice. Nous lisons dans Apoc. 19:8, qu’il «a été donné à l’épouse de l’Agneau d’être vêtue de fin lin, éclatant et pur, et que ce fin lin ce sont les justices des saints». C’est la pleine et complète manifestation future de la justice de tout enfant de Dieu, qui a été déployée par eux sur la scène de ce monde, dans l’obéissance à la parole de Dieu. Partout où se trouvent la nouvelle nature et la vie divine dans l’âme, il y aura justice pratique, mais la mesure en sera déterminée par notre obéissance à la parole de Dieu.
L’amour des frères est un troisième trait caractéristique des enfants de Dieu. «Par ceci les enfants de Dieu et les enfants du diable sont rendus manifestes : quiconque ne pratique pas la justice, n’est pas de Dieu, et celui qui n’aime pas son frère. Car c’est ici le message que vous avez entendu dès le commencement, savoir que nous nous aimions l’un l’autre... Nous, nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons les frères» (1 Jean 3:10-14). Et puis : «Quiconque aime celui qui a engendré, aime aussi celui qui est engendré de lui» (1 Jean 5:1). Et encore : «Bien-aimés, aimons-nous l’un l’autre, car l’amour est de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour» (1 Jean 4:7-8). Cette dernière phrase renferme le secret divin : «Dieu est amour». C’est l’essence de sa nature, sa sainteté étant exprimée par cette autre parole : «Dieu est lumière». Si, étant nés de lui, nous possédons cette nature, c’est l’amour qui doit nous caractériser et qui fera que tout ce qui occupe le coeur de Dieu nous occupera nous-mêmes. Il faut encore observer que l’amour ne nous est pas présenté sous ce point de vue comme responsabilité, car ce n’est pas le moyen de produire l’amour. Non, il nous est présenté comme une nécessité de la nature divine, et par conséquent comme une nécessité pour l’enfant de Dieu. Nous devons aimer si nous sommes enfants de Dieu, parce que c’est le caractère de la nouvelle nature que nous avons reçue.
Remarquons encore qu’aucun enfant de Dieu ne peut faire exception, où qu’il habite, dans quelque milieu qu’il vive, quel que soit son état spirituel. Tous ceux qui sont nés de Dieu doivent être les objets de notre affection selon Dieu. On ne peut nullement restreindre le cercle. Dieu embrasse tous les membres de sa famille, et nous devons faire de même. Ceci une fois bien compris et reçu, la question relative à la manière dont l’amour doit se manifester se présente naturellement. Cette question a été l’occasion de bien des discussions amères dans l’Église de Dieu. Quelques-uns ont soutenu au sujet de cette vérité qu’il faut montrer de l’amour à tous les enfants de Dieu, tandis que d’autres se sont sentis obligés de se séparer de tel et tel enfant de Dieu, à cause de la marche et de ses relations, et de renoncer à tout rapport avec lui. Il est donc important de bien élucider cette question. La meilleure manière de le faire est de s’en rapporter à la Parole elle-même. Cette parole de l’apôtre : «Quiconque aime celui qui a engendré, aime aussi celui qui est engendré de lui», est suivie immédiatement de cette autre : «Par ceci nous savons que nous aimons les enfants de Dieu, c’est quand nous aimons Dieu et que nous gardons ses commandements ; car c’est ici l’amour de Dieu, que nous gardions ses commandements» (1 Jean 5:1-3). Il est clair, d’après ce passage, rapproché du verset précédent, premièrement, que tous les enfants de Dieu ont droit à notre amour ; mais secondement, que notre amour, l’amour selon Dieu, l’amour selon l’Esprit, ne doit s’exprimer que dans la voie de l’obéissance.
Ceci deviendra plus clair encore par d’autres passages. Paul écrit : «Vous supportant les uns les autres, et vous pardonnant les uns aux autres, si l’un a un sujet de plainte contre l’autre ; comme aussi le Christ vous a pardonné, vous aussi faites de même» (Col. 3:13). Le Seigneur dit : «Prenez garde à vous-mêmes. Si ton frère pèche contre toi, reprends-le, et s’il se repent, pardonne-lui ; et si sept fois le jour il pèche contre toi, et que sept fois le jour il retourne à toi, disant : Je me repens ; tu lui pardonneras» (Luc 17:3-4). Le premier de ces passages nous apprend que nous devons toujours être disposés à pardonner, lorsque nous avons un sujet de plainte contre quelqu’un ; le second nous apprend quand il convient d’exprimer ce pardon, à savoir quand celui dont on a à se plaindre a fait la confession de son péché. Il en est ainsi à l’égard de l’amour. Rien ne peut justifier l’absence d’amour pour nos frères ; mais l’amour ne peut se montrer que dans la voie de l’obéissance à la parole de Dieu. Si donc un saint de Dieu vit dans une désobéissance manifeste, je ne dois pas m’associer avec lui dans sa désobéissance, ou je renverserais tous les principes qui, pour notre instruction, nous sont donnés ici sur l’amour.
La vérité est qu’en cela, comme en toute autre chose, nous sommes les représentants de Dieu. Or Dieu ne manifeste pas son amour à ceux qui s’associent avec le mal (2 Cor. 6: fin), ni à ceux qui aiment le monde (1 Jean 2), et notre Seigneur dit : «Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole (non pas mes paroles), et mon Père l’aimera ; et nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui (Jean 14:23) ; c’est-à-dire que l’expression de l’amour du Père, l’habitation du Père et du Fils dans l’âme, nous sont présentés comme dépendant de la marche du croyant. Nous devons agir de même. Non pas que nous devions nous constituer les juges de nos frères — en aucune façon ; mais individuellement, nous devons garder une bonne conscience devant Dieu, et ainsi nous ne devons pas nous associer avec ce qui risquerait de nous faire agir contrairement à la parole de Dieu ou de nous entraîner dans la désobéissance. Nous devons néanmoins entretenir dans nos coeurs un amour aussi vaste que celui de Dieu lui-même ; mais l’expression de notre affection doit se régler sur sa volonté, telle qu’elle est renfermée dans sa Parole. Mais quand les voies ou les rapports qu’un croyant soutient avec d’autres sont tels que nous ne pouvons pas lui tendre la main, notre amour aura toujours le moyen de s’exercer en priant pour lui et, si l’occasion nous en est offerte, en l’exhortant ou en l’avertissant sérieusement. Nous ne prêchons pas l’étroitesse de coeur, que personne ne le croie ; au contraire, nous rappelons, et nous insistons là-dessus, que quiconque aime celui qui a engendré, doit aussi aimer celui qui est engendré de lui (1 Jean 5:1) ; mais avec cela nous maintenons que l’amour selon Dieu ne peut se manifester que dans des voies divines. C’est le propre de la nouvelle nature que nous avons reçue, d’aimer ; mais il faut se garder d’oublier que l’amour selon Dieu est un saint amour et ne peut en conséquence couler que dans des canaux divins.
L’amour est vraiment une nécessité de la nouvelle nature. C’est pourquoi Jean dit : «Nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons les frères». Ensuite, il ajoute ces paroles sérieuses : «Celui qui n’aime pas son frère demeure dans la mort», et «quiconque hait son frère est un meurtrier, et vous savez qu’aucun meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui» (1 Jean 3:14-15). Là-dessus il présente la mesure de l’amour, et cette mesure c’est la mort de Christ. «Par ceci nous avons connu l’amour, c’est que lui a laissé sa vie pour nous, et nous, nous devons laisser nos vies pour les frères» (1 Jean 3:16). Il nous met ainsi en présence de l’amour incommensurable de Christ, de celui qui nous a aimés, et s’est donné lui-même pour nous, qui nous a donné tout ce que l’amour peut donner ; et en contemplant cet amour qui surpasse toute connaissance, nous nous rappelons que c’est là ce qui nous donne la mesure de notre responsabilité envers nos frères, et rien de moins. L’apôtre Paul pouvait bien dire : «Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer les uns les autres» (Rom. 13:8), parce que l’amour est en quelque sorte une dette qui subsiste toujours sans être jamais acquittée. Une dette ? — Oui, nous parlons à la manière des hommes ; car c’est la nature de l’amour selon Dieu de se répandre toujours sur son objet, sans connaître aucune limite. Il trouve ses délices à servir, toujours prêt à satisfaire les besoins de tous les frères. L’apôtre ajoute un exemple à ce qu’il a dit au sujet de la mesure de l’amour ; il demande si l’amour de Dieu peut demeurer en celui qui, ayant les biens de ce monde et voyant son frère dans le besoin, lui fermerait ses entrailles ? (1 Jean 3:17). Non, l’amour ne se résume pas dans un sentiment, c’est une réalité exprimée par des actes. Rappelons ici les propres paroles du Seigneur : «À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour entre vous» (Jean 13:35). «C’est ici mon commandement : Que vous vous aimiez les uns les autres, comme je vous ai aimés» (Jean 15:12).
Nous attirons maintenant l’attention sur un quatrième caractère des enfants de Dieu : «Tout ce qui est né de Dieu, dit l’apôtre, est victorieux du monde ; et c’est ici la victoire qui a vaincu le monde, savoir notre foi. Qui est celui qui est victorieux du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ?» (1 Jean 5:4-5). Le Père et le monde sont toujours en opposition. Tout ce qui est dans le monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie, n’est point du Père, mais est du monde. Étant nés de Dieu et ayant ainsi la même nature, comment pourrions-nous aimer ce qui est en antagonisme avec le Père ? Et cet antagonisme a été démontré d’une manière qui met pour toujours en évidence la profonde hostilité du monde contre Dieu ; c’est-à-dire par la réjection et la crucifixion de son Fils bien-aimé. Jacques dit que l’amitié du monde est inimitié contre Dieu (Jacq. 4:4). Ils ne peuvent être réconciliés. Mais il y en a un dans cette scène qui a pu dire pour la consolation des siens : «Ayez bon courage, moi, j’ai vaincu le monde» (Jean 16:33). C’est pourquoi Jean a pu dire : «C’est ici la victoire qui a vaincu le monde, savoir notre foi» (1 Jean 5:4), car cette foi croit que Jésus rejeté par le monde est le Fils de Dieu. C’est là que se trouve le secret de la victoire sur le monde. Car comment le monde pourrait-il attirer une âme, qui vit dans la puissance de la foi que Jésus est le Fils de Dieu ? Bien plus, avec cette foi qui fortifie nos coeurs, la croix forme une barrière insurmontable entre le monde et nous-mêmes. Nous avons les propres pensées de Dieu sur le monde, et il l’accuse du meurtre de son Fils bien-aimé. Comme il dit à Caïn : «Où est Abel, ton frère ?» de même, il demande aujourd’hui au monde : «Où est mon Fils unique ?» Les Juifs criaient devant Pilate : «Que son sang soit sur nous et sur nos enfants», et son sang, dans ce sens, est sur le monde ; ce sang répandu est la cause du jugement qui tombera bientôt sur lui. Les croyants qui ont une nature divine, qui savent que Jésus est le Fils de Dieu, l’attendent des cieux, et, par le fait qu’ils l’attendent, montrent qu’ils ne sont pas du monde, comme il n’était pas du monde. Ils le surmontent par leur foi, — la foi en Christ, en ce qu’il est en lui-même et en ce qu’il a fait.
Sans doute que bien des croyants ne surmontent pas le monde et manquent ainsi pratiquement à leur vocation. Mais Jean ne s’occupe pas de cette question. Ce qu’il montre, c’est que le propre de ceux qui sont nés de Dieu, qui croient que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, est de le surmonter. Si donc ils manquent en cela, c’est parce qu’ils ne demeurent pas dans l’activité de la nouvelle nature, ou dans l’exercice de la foi par la puissance du Saint Esprit. Car, si, comme nous l’avons déjà dit, nous sommes enfants de Dieu, si nous sommes sous l’influence de cette vérité que Jésus — Jésus rejeté — est le Fils de Dieu, il faut que nous soyons victorieux du monde. Pratiquement, notre victoire sur le monde sera manifestée dans la mesure où nous serons sur le terrain dont parle l’apôtre, quand il dit : «Qu’il ne m’arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde» (Gal. 6:14). La croix révèle le caractère du monde, et le fait que celui qu’ils ont crucifié est le Fils de Dieu, les condamne d’une manière absolue. C’est ainsi que le Seigneur lui-même disait par anticipation : «Maintenant est le jugement de ce monde ; maintenant le chef de ce monde, sera jeté dehors» (Jean 12:31). C’est là-dessus qu’est fondée cette déclaration de notre passage : «Tout ce qui est né de Dieu est victorieux du monde» (1 Jean 5:4).
Nous venons de voir qu’il y a certaines marques indubitables de la nouvelle nature et de la vie que possèdent les enfants de Dieu ; en d’autres termes que, comme l’enseigne l’apôtre Jean, cette nouvelle nature, soit qu’on la voie dans le Seigneur Jésus-Christ sur la terre ou dans le croyant, doit nécessairement couler dans les mêmes canaux. Mais, dans d’autres passages, nous trouvons des préceptes et des exhortations nous révélant ce que Dieu désire pour ses enfants et indiquant quelle est la marche qui plaît à ses yeux. Or nous trouvons, en les considérant bien, que toutes ces exhortations ne sont que des traits de la vie de notre bien-aimé Sauveur, nous montrant ce qu’il était et ce qu’il faisait dans son passage sur la scène de ce monde ; et ainsi, en nous donnant une direction divine pour nos âmes, elles sont à la fois la mesure de notre appréciation de nous-mêmes et l’encouragement pour nous stimuler à suivre ses traces. C’est une immense bénédiction de rapporter ces passages à Christ, car autrement ils ont quelque chose de sec et de légal qui n’apporte aux enfants de Dieu que l’esclavage, au lieu de leur fournir un motif tiré de l’amour et de la grâce de Christ pour une sainte et heureuse liberté dans le sentier de l’obéissance.
Le premier de ces préceptes qui se rapportent à notre sujet spécial se trouve dans le sermon sur la montagne. Notre Seigneur dit : «Vous avez ouï qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous font du tort et vous persécutent, en sorte que vous soyez les fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et envoie sa pluie sur les justes et sur les injustes. Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense en avez-vous ? Les publicains même n’en font-ils pas autant ? Et si vous saluez vos frères seulement, que faites-vous de plus que les autres ? Les nations même ne font-elles pas ainsi ? Vous, soyez donc parfaits, comme votre Père qui est aux cieux est parfait» (Matt. 5:43-48).
Le principe fondamental de ces préceptes, c’est que les enfants de Dieu doivent être ses représentants dans ce monde, que leur conduite doit exprimer ce qu’ils sont et à qui ils appartiennent. C’est le sens de ces mots : «En sorte que vous soyez les fils de votre Père qui est dans les cieux» (Matt. 5:45), c’est-à-dire : Agissez de telle manière que l’on voie votre ressemblance avec le Père. L’exemple que le Seigneur emploie rend la chose claire. Les hommes disent : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi ; mais le Seigneur, lui, dit : «Aime ton ennemi». Ces deux préceptes nous révèlent le coeur de l’homme et le coeur de Dieu. L’homme peut avoir de la peine à accepter ceci comme vrai, qu’il aime son prochain et hait son ennemi ; mais c’est l’exacte expression de la chair, du coeur corrompu de l’homme. Ce n’est pas naturel à l’homme d’aimer ceux qui le haïssent. Mais Dieu, d’un autre côté, nous a montré son coeur dans le don de son Fils bien-aimé à un monde qui l’a rejeté et crucifié. Comme dit l’apôtre Paul : «Mais Dieu constate son amour à lui envers nous, en ce que lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous» (Rom. 5:8). C’est quand nous étions encore ennemis, que nous avons été réconciliés à Dieu par la mort de son Fils. Tel est l’amour particulier de Dieu, l’amour agissant en grâce en faveur de ceux qui n’avaient rien en eux qui pût le mériter, mais au contraire, tout ce qui pouvait le rebuter ; un amour découlant des profondeurs du coeur de Dieu, parce que, étant amour, Dieu prend plaisir à aimer, et ainsi à bénir les objets sur lesquels il repose. C’est ce même amour, — un amour de la même nature, — qui doit distinguer les enfants de Dieu. Les plus méchants d’entre les hommes aiment ceux qui les aiment et font du bien à leurs frères, mais c’est un amour égoïste, qui se répand sur ceux dont il espère quelque chose en retour, un amour humain et non divin ; c’est pourquoi le Seigneur dit aux siens : «Mais moi je vous dis : Aimez vos ennemis... Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait» (Matt. 5:44-48).
On a élevé tout un système théologique sur ces dernières paroles ; mais un peu d’attention au contexte aurait empêché toute erreur. La doctrine de la perfection — perfection dans la chair, après tout, — ne peut nullement s’appuyer sur ces paroles, à moins qu’on ne les sépare du contexte. Car le point essentiel ici, comme nous l’avons dit, c’est que les disciples de Christ, contrairement à ce que font les hommes de ce monde et comme Dieu lui-même le fait, doivent montrer de la bonté et de l’amour à tous, aux amis et aux ennemis, aux bons et aux méchants ; c’est que, comme Dieu, agissant en grâce, répand ses bénédictions temporelles sur tous les hommes également, sans avoir égard à leur caractère, ainsi doivent faire les siens ; et en le faisant, ils prouveront qu’ils sont ses enfants et qu’ils sont parfaits comme lui-même est parfait.
Il y a quelques années que deux dames visitaient un serviteur de Dieu bien connu. Dans le cours de la conversation, elles dirent un mot de la doctrine de la perfection. — Avez-vous atteint cette perfection, leur demanda-t-il ? — Nous le croyons. — Alors, vous êtes parfaites ? — Oui. — Êtes-vous aussi parfaites que Christ ? Après quelque hésitation, elles répondirent affirmativement. Alors, reprit le serviteur de Dieu, je ne donnerais pas grand-chose de votre Christ. Que pouvait-il leur dire d’autre ? Car parfait signifie, ou parfait selon la mesure de Dieu, ou parfait selon une mesure moins élevée. Si c’est le premier, Christ seul est notre mesure ; si c’est l’autre, ce n’est pas la perfection. Mais, même en admettant que nous ayons dans ce passage une exhortation à arriver à la perfection morale de Dieu (ce qui n’est pas, comme nous l’avons vu), il ne pourrait pas être invoqué à l’appui de cette doctrine. Christ lui-même est notre modèle ; nous devons marcher comme il a marché (1 Jean 2:6). Mais ce serait oublier ce qu’il a été sur la terre, si nous disions nettement : Nous avons atteint le modèle ; notre marche est aussi parfaite que la sienne, et plus encore, nous avons atteint sa perfection. C’est la perfection et rien de moins ; et par la grâce de Dieu nous l’atteindrons, mais non pas avant de voir notre bien-aimé Sauveur tel qu’il est (1 Jean 3:2). Alors nous lui serons semblables. En attendant, nous devons nous purifier comme lui est pur, être transformés chaque jour à sa ressemblance ; et cette oeuvre de transformation s’accomplira en proportion que la contemplation de la gloire du Seigneur occupera nos pensées. Mais ce sera seulement «de gloire en gloire», par degrés, et alors, quand nous le verrons face à face, nous serons transformés à sa ressemblance. Nous ne pouvons donc jamais, comme quelqu’un l’a dit, nous reposer dans la pensée que nous avons atteint, mais bien dans la pensée que nous allons atteindre. De plus, pendant notre séjour ici-bas, nous sommes appelés à représenter le Père dont la grâce est offerte à tous, et dans ce sens à être parfaits comme lui-même est parfait.
L’évangile de Luc présente un autre aspect de cette vérité. Là, nous lisons : «Soyez donc miséricordieux, comme aussi votre Père est miséricordieux» (Luc 6:36). Ce mot «miséricordieux» est très remarquable, c’est ce que nous verrons en rapprochant cette parole d’un autre passage. «Je vous exhorte donc, frères, par les compassions (ou les miséricordes) de Dieu», etc. (Rom. 12:1). Ce mot compassions est le même que dans Luc. Et quelles sont les compassions dont parle l’apôtre ? Celles qui ont été manifestées dans la rédemption, et dont il a parlé depuis le chapitre 5 jusqu’à la fin du chapitre 8. C’est, en d’autres termes, la manifestation du coeur de Dieu dans le déploiement de sa grâce pour l’accomplissement de notre salut ; car c’est sur la manifestation et la jouissance de ces compassions, que l’apôtre fonde son exhortation à présenter nos corps en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui est notre service intelligent (Rom. 12:1). Quand donc notre Seigneur nous dit d’être miséricordieux comme notre Père aussi est miséricordieux, il nous rappelle la responsabilité que nous avons de représenter le Père, d’annoncer les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière (1 Pierre 2:9), d’agir envers les autres, comme il a agi envers nous, en sorte que le coeur et la nature du Père soient manifestés dans notre marche et dans toutes nos voies. Nous devons donc faire du bien à tous, donner toujours sans attendre de récompense, et aimer nos ennemis, car autrement nous ne représenterions pas notre Dieu et notre Père. Quelle belle mission que celle à laquelle nous sommes appelés ! Christ a révélé le Père, et il veut que nous l’imitions aussi en cela, afin que d’autres puissent reconnaître à ce que nous sommes, pendant notre passage ici-bas, le caractère de Celui qui a fait de nous ses enfants.
Cette même vérité se trouve dans plus d’une épître. Paul, écrivant aux Éphésiens, leur dit : «Soyez bons les uns envers les autres, compatissants, vous pardonnant les uns aux autres, comme Dieu aussi, en Christ, vous a pardonné. Soyez donc imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants» (Éph. 4:32 ; 5:1). Il n’y a pas : comme Dieu vous a pardonné pour l’amour de Christ, ainsi que le portent certaines versions, mais : comme Dieu vous a pardonné en Christ. Car l’apôtre présente ici Dieu dans les richesses de sa grâce, n’ayant de motif qu’en lui-même pour agir, et n’ayant, par conséquent, pas besoin d’être engagé à pardonner ; il n’a qu’à agir selon son coeur — ce que d’ailleurs, il nous a montré dans la rédemption. Mais c’est dans ce sens que l’apôtre nous le présente comme un modèle ; c’est pourquoi il dit : «Soyez les imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants» (Éph. 5:1). Ici, comme dans les évangiles, les enfants de Dieu sont appelés à présenter dans leur conduite le caractère de Dieu comme leur Père. Et là-dessus, l’apôtre nous montre Dieu comme amour et comme lumière — deux mots qui expriment tout ce que Dieu est ; et il nous dit : Vous aussi manifestez l’amour et la lumière : «Marchez dans l’amour» (Éph 5:2), et : «Marchez comme des enfants de lumière» (Éph. 5:8). Christ lui-même est introduit comme un exemple d’amour en ce qu’il «nous a aimés et s’est livré lui-même pour nous, comme offrande et sacrifice à Dieu, en parfum de bonne odeur» (Éph. 5:2) ; car dans ce sacrifice il est l’expression de tout le coeur de Dieu. Et en tant que nous sommes maintenant lumière dans le Seigneur, nous devons marcher comme enfants de lumière, et le fruit de la lumière (ici la lumière, non l’Esprit) consiste en toute bonté, et justice, et vérité, éprouvant dans cette marche ce qui est agréable au Seigneur (Éph. 5:9-10).
En présence de pareilles déclarations, demandons-nous sincèrement si ces désirs de notre Dieu sont assez profondément gravés dans nos coeurs. La tentation de nous comparer avec les autres est si grande, que nous ne pouvons trop souvent nous rappeler que c’est Dieu lui-même qui est notre modèle pour notre marche et pour notre conduite, Dieu tel qu’il s’est manifesté, amour et lumière dans la rédemption. Et quels puissants motifs nous sont ici donnés pour devenir les imitateurs de Dieu, comme ses enfants bien-aimés ! Ainsi, par exemple, nous devons nous pardonner les uns aux autres, comme Christ nous a pardonné ; c’est-à-dire que nos coeurs doivent agir en grâce, comme Dieu a agi pour notre salut, ne cherchant pas de motif en dehors de nous-mêmes (sauf dans le Dieu de notre salut), mais trouvant nos délices à exprimer cette grâce ineffable dont nous avons été les objets. Ce n’est pas cependant, en aucune manière, que nous devions toujours déclarer à ceux qui ont péché contre nous que nous leur pardonnons ; mais quant à nos sentiments, nous devons toujours être disposés à pardonner et ne jamais garder dans nos coeurs le péché de notre frère. On peut avoir péché contre nous, mais devant Dieu nous devons aussitôt pardonner ; et ensuite, comme nous l’avons déjà dit, quand, ainsi que le Seigneur l’a enseigné à Pierre, celui qui a commis le tort, vient à nous et dit : «Je me repens» (Luc 17:4), il faut lui accorder le pardon. Dieu lui-même agit de cette manière. «Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité» (1 Jean 1:9), et nous, comme ses enfants, nous devons agir sur le même principe. La grâce ne retient rien et pardonne toujours ; mais pour l’amour de l’offenseur, pour la gloire de Dieu avant tout, elle attend que le pécheur se juge lui-même pour lui déclarer ouvertement que son péché est pardonné.
Nous sommes ainsi tout près du coeur de Dieu et de Christ ; et c’est de la grâce ineffable de l’un, de l’amour insondable de l’autre, que nous devons tirer nos motifs pour notre marche et notre conduite, car plus nous sommes nous-mêmes sous la puissance de la grâce et de l’amour divins, plus la grâce et l’amour se répandront de nos coeurs sur ceux qui sont croyants comme nous. C’est donc une question de coeur, du coeur rempli du sentiment de l’amour de Dieu dans la puissance du Saint Esprit ; et si en quelque mesure c’est notre cas, nous agirons dans cet esprit envers tous ceux qui sont autour de nous.
Dans l’épître aux Philippiens, l’apôtre exhorte les saints à se rendre recommandables comme enfants de Dieu. «Faites toutes choses sans murmures et sans raisonnements, afin que vous soyez sans reproches et purs, des enfants de Dieu irréprochables, au milieu d’une génération tortue et perverse, parmi laquelle vous reluisez comme des luminaires dans le monde, présentant la parole de vie» etc. (Phil. 2:14-16). La manière dont cette exhortation est introduite est digne d’attention. C’est : «Faites toutes choses sans murmures et sans raisonnements, afin que vous soyez sans reproches et purs». Le Père savait, et nos pauvres coeurs savent aussi en quelque mesure, combien nous sommes enclins à ces murmures et à ces raisonnements. Nous murmurons au sujet de mille choses qui nous arrivent, comme les Israélites le faisaient dans le désert, et ainsi nous mettons en doute les soins, l’amour et la sagesse de Celui qui a déterminé notre sentier, et nous perdons le sentiment béni de sa présence. Il en résulte que nous sommes facilement en proie aux suggestions et aux tentations de l’ennemi. C’est pour cela qu’il est fait mention des murmures et des raisonnements ; car du moment que l’incrédulité prévaut de manière que nous marchions par la vue, le raisonnement prend la place de la foi. Il n’y a rien qui tue la confiance en Dieu comme un esprit disposé aux questions. Un enfant de Dieu doit avoir peur de raisonner, se souvenant de cette parole du psalmiste : «Je hais les pensées diverses» (Ps. 119:113). Les pensées de Dieu sont notre portion, elles doivent nous suffire : en être satisfait, c’est la marque d’une foi vivante.
Ah ! ces murmures et ces raisonnements sont véritablement les petits renards qui gâtent les vignes ! Et quelles suites fâcheuses n’ont-ils pas ! Il faut les éviter, afin que nous soyons sans reproche et purs, ce que nous ne sommes pas, quand nous nous y laissons aller. Non, ce n’est pas trop de dire que rien ne déshonore plus le nom de Christ, que rien ne rabaisse plus notre caractère comme enfants de Dieu. Et pourtant, ils sont si communs qu’on n’y attache pas d’importance. Mais comment pourrais-je murmurer, si j’ai le sentiment des soins et de l’amour du Père ? Comment pourrais-je raisonner, si je connais ma position d’enfant à l’égard du Père ? L’un et l’autre portent atteinte à la grâce de Dieu.
Si maintenant, nous examinons plus attentivement le v. 15, nous verrons que l’apôtre nous a réellement donné un portrait de Christ. Car tous les mots de cette exhortation sont l’exacte expression de ce qu’il était dans le monde. Il fut sans reproche et pur dans toute sa carrière, de Bethléem au Calvaire. Qui d’entre vous, dit-il à ses adversaires, me convainc de péché ? Et trois fois, Pilate témoigna qu’il ne trouvait aucun crime en lui (Luc 18). Nous savons qu’il était infiniment agréable à Dieu, car il était le seul en qui Dieu trouvât tout son plaisir, mais l’homme aussi, tout en le haïssant et le rejetant, était contraint de rendre témoignage à sa vie sans tache. Il allait de lieu en lieu faisant le bien, répandant partout les bénédictions sur ses pas ; marchant de telle manière devant Dieu et devant les hommes, que les yeux perfides de ses ennemis ne découvrirent pas un seul acte sur lequel ils pussent élever contre lui une accusation valable. Déjoués, confus, sinon confondus dans tous leurs efforts, pour tirer de sa bouche des paroles qu’ils pourraient employer pour le perdre, ils eurent recours à de faux témoins qui tordirent ses paroles pour produire quelque chose qui ressemblât à une accusation sérieuse contre lui. Et comment pouvait-il en être autrement, en présence de cette vie sainte et sans tache ?
De plus, il était le Fils de Dieu irréprochable, ou plutôt, pour traduire plus exactement sans tache. Aucune souillure ne pouvait s’attacher à Lui. Il pouvait même toucher un lépreux sans être souillé et, dans la puissance de l’Esprit de sainteté qui était en lui, guérir la lèpre elle-même. Ce n’est là qu’un emblème de toute sa vie. Le péché et toutes ses souillures l’entouraient ; il était au milieu d’une génération tortue et perverse ; mais, comme un clair ruisseau que l’on voit parfois traverser des eaux bourbeuses sans s’y mêler et sans perdre sa pureté cristalline, le Seigneur demeura pur et sans tache. Au milieu des ténèbres il ne fut que lumière ; et ainsi, comme l’Agneau préordonné avant la fondation du monde, il fut sans reproche et sans tache, et comme tel l’Agneau par le précieux sang duquel nous avons été rachetés. De plus, il parut comme la lumière dans le monde, car, comme Jean nous le dit : «En elle (la Parole) était la vie, et la vie était la lumière des hommes. Et la lumière luit dans les ténèbres ; et les ténèbres ne l’ont point comprise» (Jean 1:4-5). Oui, comme lui-même le témoigne, il était la lumière du monde, et comme tel il présente la parole de vie.
C’est donc une image parfaite de ce que Christ était, et de plus, ces paroles montrent les désirs du Père à l’égard de ses enfants, pour tous les membres de sa famille dans ce monde. Il veut que chacun de nous cherche à réaliser ce caractère. C’est dire de nouveau que Christ lui-même est le modèle des enfants de Dieu. Nous serons bientôt comme lui, quand nous le verrons tel qu’il est ; alors nous serons rendus parfaitement conformes à son image. Mais maintenant, et tandis que nous anticipons sur ce moment où nous serons ainsi consommés en lui, il veut que nous marchions comme Christ. Si nous disons que nous demeurons en lui, nous devons aussi marcher comme il a marché. Nous pouvons manquer à chaque heure, à chaque moment, mais le modèle demeure le même, et plus nous serons constamment occupés de lui, plus nous méditerons sur lui comme étant l’objet de notre joie et de nos délices, plus nous serons transformés à son image, et mieux, en conséquence, nous suivrons ses traces.
Le désir de Dieu à notre égard, c’est que nous reflétions en quelque mesure l’image de son Fils. Nous savons donc ce qui plaît le plus à notre Dieu et Père. Dans les anciens temps et même dans les temps actuels, il est souvent question de chrétiens professants qui font de coûteux sacrifices pour gagner la faveur de Dieu. Les prêtres persuadent à leurs ouailles qu’elles se rendront agréables à Dieu par des offrandes, leur extorquant des présents et de l’argent, et s’enrichissent ainsi à leurs dépens. Il n’y a qu’un moyen d’être agréable à Dieu, c’est la foi au Seigneur Jésus qui a été livré pour nos offenses et qui est ressuscité pour notre justification. «Ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, par lequel nous avons eu accès aussi, par la foi, à cette faveur dans laquelle nous sommes, et nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu» (Rom. 5:1-2). Ayant maintenant acquis la faveur de Dieu par ce moyen, c’est en suivant l’exemple de notre Seigneur et Sauveur que nous lui serons le plus agréables. C’est ainsi qu’il est dit : «Par la foi, Énoch fut enlevé pour ne pas voir la mort ; et il ne fut pas trouvé, parce que Dieu l’avait enlevé, car avant son enlèvement, il a reçu le témoignage d’avoir plu à Dieu» (Hébr. 11:5). Et qu’est-ce qui caractérisait la vie d’Énoch ? C’est qu’il marchait avec Dieu, — ce que le Seigneur Jésus faisait d’une manière parfaite, — et le Saint Esprit prend plaisir aussi à témoigner qu’Énoch plut à Dieu. C’est donc ainsi que l’on est agréable à Dieu, non en faisant de riches dons et de coûteuses offrandes, mais en marchant dans la soumission à sa Parole selon sa pensée, étant occupé de tout ce qui le concerne, et ayant communion avec lui. C’est la voie qui est ouverte devant tout enfant de Dieu, et c’est aussi ce que l’apôtre Pierre exprime d’une autre manière, quand il dit : «Comme Celui qui vous a appelés est saint, vous aussi soyez saints dans toute votre conduite ; parce qu’il est écrit : Soyez saints, car moi je suis saint» (1 Pierre 1:15-16).
Telle est la route royale pour arriver à la jouissance de la faveur de Dieu. Il aime tous ses enfants parfaitement, mais celui qui suivra de plus près le Seigneur jouira de la plus riche manifestation de cet amour. Le Seigneur aimait Pierre autant que Jean, mais Jean seul pouvait appuyer sa tête sur le sein du Sauveur. Le fait est que Jean, suivant le Seigneur de plus près, pouvait recevoir cette marque de faveur préférablement à Pierre. Elle n’était point interdite à Pierre, mais l’état d’âme de cet apôtre l’empêchait d’en jouir. Le Seigneur lui-même établit ce principe, quand il dit : «Celui qui a mes commandements, et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime, sera aimé de mon Père ; et je l’aimerai, et je me manifesterai à lui» (Jean 14:21). Ainsi donc, c’est l’enfant obéissant qui recevra la plus grande manifestation de l’amour du Père. Si donc le Père révèle ses pensées à l’égard de ses enfants, ce n’est que pour montrer le seul moyen de lui plaire, d’être béni et de jouir de ses affections illimitées.
Après avoir considéré quels sont les désirs du Père à l’égard de ses enfants, nous passons maintenant à un autre côté de notre sujet ; c’est-à-dire au gouvernement de sa famille. Car si Dieu a une famille, il doit nécessairement la gouverner selon ses propres pensées, pour sa propre gloire, et pour la plus grande bénédiction de chacun de ses membres. Ayant confié à chacun de ses enfants l’honneur et le privilège d’être ses représentants devant les hommes, il ne peut leur permettre de suivre encore leur volonté propre, ou de se complaire en eux-mêmes. Il a donc établi sur eux un saint gouvernement qui, comme tout gouvernement, a établi des châtiments en cas d’insubordination et de désobéissance, et des récompenses pour ceux qui lui sont soumis. Voilà ce que tout enfant de Dieu doit comprendre ; car il n’y a rien de plus triste que la tendance qui se répand de plus en plus chez les chrétiens à chercher leur loi en eux-mêmes. Oui, si par grâce, je suis un membre de la famille de Dieu, la volonté du Père doit être ma seule loi ; et je dois être jaloux de son autorité. L’honneur de Dieu, notre Père, y est intéressé ; mon bonheur et celui de tous les enfants de Dieu en dépendent. Si un enfant dans une famille refuse de se soumettre à ses parents, il apporte le désordre et le malheur dans la maison. Tous en souffrent. Il en est de même dans la famille de Dieu. Tous ses enfants sont tellement liés ensemble, qu’ils doivent être affectés, d’une manière consciente ou inconsciente, par la conduite de l’un d’entre eux. Tous également sont intéressés à ce que l’autorité du Père soit respectée.
Nous trouvons ce principe clairement établi dans un passage de Pierre. Il dit : «Si vous invoquez comme Père celui qui, sans acception de personnes, juge selon l’oeuvre de chacun, conduisez-vous avec crainte durant le temps de votre séjour ici-bas» (1 Pierre 1:17). Faute d’être considéré attentivement, ce passage a souvent été bien mal compris. C’est ainsi qu’on l’a souvent rapporté au jugement à venir, à notre manifestation devant le tribunal de Christ. Mais c’est impossible, car le Seigneur lui-même dit expressément que le Père ne juge personne, mais qu’il a donné tout jugement au Fils (Jean 5:22). Ce ne peut être le jugement à venir, qu’il s’agisse de celui qui a lieu devant le tribunal de Christ ou de celui du grand trône blanc ; dans ces deux cas, la sentence est prononcée par le Fils. De quel jugement Pierre parle-t-il donc ? De celui que le Père exerce chaque jour au milieu de sa famille, d’un jugement présent et non à venir. Rien de plus solennel que ce qui est dit ici de ce jugement. Dans les familles humaines, les parents sont souvent faibles et ont peu d’autorité ; ainsi beaucoup de fautes passent inaperçues, et le plus coupable échappe souvent. La partialité ne détruit que trop souvent la paix des familles. Mais il n’en est pas ainsi de la famille de Dieu. Quoique, ou plutôt parce qu’il aime tous ses enfants d’un amour parfait, il n’y a pas pour lui d’acception de personnes, pas d’indulgence montrée à l’un plutôt qu’à l’autre ; mais il exerce son autorité envers tous également et gouverne pour le bien de tous.
Le jugement a lieu selon l’oeuvre de chacun. Il pèse les actions avec une exactitude infaillible ; car il voit comme l’homme ne voit pas ; l’homme regarde à l’apparence extérieure, mais le Seigneur regarde au coeur, et ainsi discerne le vrai caractère de nos actions. Au dehors elles peuvent paraître bonnes et dignes de louange, mais si nous connaissions le motif qui les a inspirées, peut-être les jugerions-nous tout autrement. L’oeil du Père discerne les sources cachées de nos actes, c’est pourquoi il n’est jamais trompé. La nature de toutes nos paroles et de tous nos actes est complètement à nu et à découvert devant lui, et c’est sur cette connaissance qu’est basé ce jugement juste et cependant inspiré par l’amour.
Quelle différence ce serait, si la pensée que nous sommes sous les yeux du Père et sous son gouvernement était présente à nos coeurs ! On comprend ainsi l’exhortation que l’Esprit de Dieu nous donne par le moyen de Pierre. Passons donc le temps de notre séjour ici-bas dans la crainte, c’est-à-dire une crainte filiale d’offenser le coeur du Père ; la crainte qui vient du sentiment qu’il est saint. Après avoir rappelé que nous serons manifestés devant le tribunal de Christ, l’apôtre Paul dit : «Connaissant donc combien le Seigneur doit être craint, nous persuadons les hommes» (2 Cor. 5:11). Il est bon assurément pour nos coeurs de nous rappeler que, tout en étant dans les relations les plus tendres et les plus intimes avec Dieu comme notre Père, il est toujours le Saint, et que le gouvernement de sa famille est saint également. Tout en ayant confiance dans sa grâce et dans son amour, tout en jouissant pleinement, en sa présence, de la liberté que sa grâce nous a procurée, nous ne devons jamais nous départir du respect qui lui est dû. Il est vrai que le parfait amour chasse la crainte, — la crainte qui redoute Dieu comme un juge ; mais il apporte avec lui et augmente la sainte crainte dont Pierre parle.
Cela paraîtra plus évident encore si nous remarquons le fondement sur lequel il base son exhortation : «Sachant, continue-t-il, que vous avez été rachetés de votre vaine conduite, qui vous avait été enseignée par vos pères, non par des choses corruptibles, argent ou or, mais par le précieux sang de Christ, comme d’un agneau sans défaut et sans tache, préconnu dès avant la fondation du monde, mais manifesté dans les derniers temps pour vous qui, par lui, croyez en Dieu qui l’a ressuscité d’entre les morts et lui a donné la gloire, en sorte que votre foi et votre espérance fussent en Dieu» (1 Pierre 1:18-21). Il nous rappelle ainsi que Dieu a sur ses enfants des droits absolus fondés sur la rédemption. Ces deux choses sont toujours unies. Dans Exode 12, nous voyons que Dieu épargne les Israélites (leurs premiers-nés), à cause de l’aspersion qui a été faite du sang de l’agneau pascal ; et dans le chapitre 13, nous avons l’institution de la fête des pains sans levain, où les enfants d’Israël apprenaient que toute leur vie, représentée par les sept jours, devait être consacrée à Dieu. L’apôtre fait allusion à cela, quand il dit : «Car aussi notre pâque, Christ, a été sacrifiée pour nous. C’est pourquoi faisons la fête, non avec du vieux levain, ni avec un levain de malice et de méchanceté, mais avec des pains sans levain de sincérité et de vérité» (1 Cor. 5:7-8). Ou, comme il dit dans un autre endroit : «Et vous n’êtes pas à vous-mêmes ; car vous avez été achetés à prix» (1 Cor. 6:19-20).
Mais Pierre, pour mieux faire valoir les droits de Dieu sur nous, insiste sur ce qu’a coûté notre rédemption. Quand se faisait le dénombrement des enfants d’Israël, Dieu exigeait que chaque homme donnât une rançon pour son âme. Cette rançon consistait en un demi-sicle d’argent qu’ils devaient donner pour faire propitiation pour leurs personnes (Ex. 30:11-16). Une fois, en signe de reconnaissance, après avoir été épargnés d’une manière remarquable dans la guerre contre les Madianites, ils offrirent de l’or au lieu d’argent. (Voir Nombres 31). L’argent et l’or, comme étant les deux métaux les plus précieux, étaient ainsi destinés à figurer la rédemption. C’est à quoi Pierre fait allusion quand, s’adressant à ces Juifs croyants, il leur dit : « Vous avez été rachetés... non par des choses corruptibles, de l’argent ou de l’or, mais par le sang précieux de Christ, comme d’un agneau sans défaut et sans tache» (1 Pierre 1:18-19). Il met en opposition la valeur du sang de Christ, valeur infinie aux yeux de Dieu, puisqu’il s’agit de la personne de Christ, avec celle de l’argent et de l’or ; et le point sur lequel il veut attirer notre attention, c’est que les droits de Dieu sur ses enfants sont en rapport avec le prix infini du sang par lequel ils ont été rachetés.
C’est ce que nous voyons en type dans la consécration des sacrificateurs. Leur oreille, le pouce de leur main droite et le gros orteil de leur pied droit étaient teints de sang, ce qui signifiait que désormais ils n’étaient plus à eux-mêmes, mais à Jéhova ; qu’ils devaient écouter, agir et marcher pour lui. Il en est de même pour nous. C’est une simple mais bien précieuse vérité, que nous appartenons à Celui qui nous a rachetés. Cela résout toutes les difficultés de notre vie ordinaire. Il ne s’agit pas de notre volonté et de notre bon plaisir, mais de la volonté et du bon plaisir de Dieu. Nous avons été «convertis des idoles à Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai et pour attendre son Fils des cieux» (1 Thes. 1:9-10). Nous comprenons donc bien cette recommandation apostolique : «Si vous invoquez comme Père celui qui, sans avoir égard à l’apparence des personnes, juge selon l’oeuvre de chacun, conduisez-vous avec crainte durant le temps de votre séjour ici-bas» (1 Pierre 1:17).
Il ajoute encore un motif. Cet agneau — l’Agneau de Dieu — a été préconnu dès la fondation du monde, mais manifesté à la fin des temps. Dieu a pensé de toute éternité à son peuple, et a manifesté tout ce qu’il avait dans son coeur pour eux par le don de son Fils bien-aimé ; et quand Celui qui était mort pour nous racheter était couché dans le sépulcre, Dieu le ressuscita et lui donna la gloire, afin que ceux qui croient puissent avoir foi et confiance en Dieu. Assurément, c’est un Dieu dont la grâce et l’amour sont parfaits ! Il nous a rachetés par le précieux sang de Christ, il nous a faits ses enfants, de sorte que nous pouvons nous adresser à lui comme à notre Dieu et Père ; et il est Celui qui, dans son gouvernement, juge selon l’oeuvre de chacun. Qui nous gouvernerait sinon Dieu ? Oui, les piliers du gouvernement de sa famille sont son amour et sa grâce, tels qu’il les a montrés dans le don de son Fils unique, et ils reposent sur l’éternelle rédemption qui a été accomplie par le précieux sang de christ.
Si nous considérons maintenant l’épître aux Hébreux, nous trouverons plus de développements encore sur le caractère et l’objet du gouvernement de Dieu. Nous lisons, à propos des épreuves par lesquelles passaient ces saints : «Si vous endurez la discipline, Dieu agit envers vous comme envers des fils, car qui est le fils que le père ne discipline pas ? Mais si vous êtes sans discipline, à laquelle tous participent, alors vous êtes des bâtards et non pas des fils» (Héb. 12:7-8). La discipline est une conséquence du gouvernement ; et, comme le dit l’auteur de l’épître, la discipline naît des relations entre un père et son fils. Mais tout ce sujet est si intéressant qu’il vaut la peine de l’étudier dans le contexte.
Au chapitre 11, il est question de la foi, de son action et de sa puissance, avec de nombreux exemples pris parmi les saints de l’ancienne alliance. Mais tous ces exemples ne font que rappeler celui de Jésus-Christ le seul parfait, dont ils ne sont que l’ombre. Lui seul, quelles que soient l’excellence et la piété de ceux qui l’avaient précédé, lui seul est le chef et le consommateur de la foi, Celui qui ne s’en est jamais départi, du commencement à la fin de sa course. «C’est pourquoi», dit l’auteur de l’épître, «ayant une si grande nuée de témoins qui nous entoure ; rejetant tout fardeau et le péché qui nous enveloppe si aisément, courons avec patience la course qui est devant nous, fixant les yeux (en les détournant de tous ces témoins) sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi» (Héb. 12:1-2). Sa vie de foi est ici caractérisée en peu de mots. La joie placée devant lui, voilà ce qui l’encourage et le soutient. Mais sa vie ici-bas est résumée brièvement dans ces paroles remarquables : «Il a enduré la croix, ayant méprisé la honte». Quelle vie que la sienne !
Oui, la croix est ce qui caractérise la vie de la foi ; mais la foi, qui est «l’assurance des choses qu’on espère et la conviction de celles qu’on ne voit pas» (Héb. 11:1), rend capable de mépriser la honte, et à la fin, il y aura pleine jouissance des fruits de la foi, en sa présence qui est un rassasiement de joie, à la droite de Dieu, quoique cette place n’appartienne qu’à Christ.
Maintenant, nous voyons pourquoi l’exemple parfait de notre Seigneur nous est présenté. Dans le sentier de la foi, tous doivent endurer la croix. «Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce soi-même, et qu’il prenne sa croix et me suive» (Matt. 16:24). On ne peut éviter la croix. Il faut renoncer au moi, prendre la croix, c’est-à-dire qu’il faut accepter la mort. Mais Dieu produit souvent cet état en nous par le moyen des adversaires, des persécuteurs. C’est pourquoi l’apôtre leur dit : «Considérez Celui qui a enduré une telle contradiction de la part des pécheurs contre lui-même, afin que vous ne soyez pas las, étant découragés dans vos âmes. Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang (vous n’êtes pas morts de la mort des martyrs) en combattant contre le péché» (Héb. 12:3-4). Il encourage ainsi et console ces croyants, en dirigeant leurs regards sur les souffrances inouïes que Christ a endurées, souffrances qui aboutirent au martyre. Sa mort était beaucoup plus encore que cela, car il était en même temps victime pour le péché mais il s’agit ici simplement de ce qu’il rencontra sur le chemin de la foi.
Ayant ainsi encouragé par l’exemple de Christ les coeurs défaillants des saints, l’apôtre ajoute une autre chose qui appartient spécialement à notre sujet, le gouvernement que Dieu exerce au milieu de ses enfants : «Vous avez oublié, dit-il, l’exhortation qui s’adresse à vous comme à des fils : «Mon fils, ne méprise pas la discipline du Seigneur, et ne perds pas courage, quand tu es repris par lui ; car celui que le Seigneur aime, il le discipline, et il fouette tout fils qu’il agrée» (Héb. 12:5-6). La chose essentielle à remarquer relativement aux voies de Dieu à l’égard de ses enfants c’est ceci, qu’il emploie la contradiction de la part des pécheurs, pour nous, l’opposition et la persécution que nous pouvons rencontrer dans le chemin de la foi, et qu’il s’en sert comme d’une discipline nécessaire. Car dans cet endroit, il n’est pas question de l’action directe de Dieu, mais des épreuves et des difficultés qui se présentent sur le sentier d’un croyant dans son passage au milieu de la scène de ce monde, difficultés qui, dans la main de Dieu, deviennent des instruments de bénédiction.
Or rien n’est plus précieux que cette vérité bien comprise. Avec quelle paix nos âmes se reposeront alors sur Dieu, car nous savons que toutes ces choses, c’est lui qui les dirige et qu’il les emploie pour notre bien. Nous avons, dans la vie de notre Seigneur, un bel exemple de cette action de la foi en présence de la puissance de l’ennemi. Dans le jardin de Gethsémané, quand, sous la conduite de Judas, une bande d’hommes et d’officiers envoyés par les sacrificateurs et les pharisiens vinrent pour saisir le Seigneur, Pierre, dans l’impétuosité de son zèle et dans son énergie charnelle, tira son épée et frappa l’esclave du souverain sacrificateur et lui coupa l’oreille droite... «Jésus donc dit à Pierre : Remets l’épée dans le fourreau : la coupe que le Père m’a donnée, ne la boirai-je pas ?» (Jean 18:3-11). C’était Satan qui conduisait ces méchants hommes, excitant la contradiction des pécheurs contre notre Seigneur. Leurs pensées et leurs actions étaient mauvaises. Mais notre Seigneur, dans la pleine confiance de sa foi, était au-dessus de ces instruments du méchant et en communion avec son Père, et ainsi il avait voulu recevoir la coupe non de Satan, mais des mains du Père. Il était donc dans une paix et dans un calme parfaits ; il ne se laissait pas troubler par la malice et la haine de ses adversaires, sachant que, quoiqu’ils fussent les esclaves de Satan et conduits à son gré, il y en avait un derrière la scène qui faisait servir la rage de l’ennemi à l’accomplissement de ses conseils de grâce et d’amour. Loin de nous la pensée que le Seigneur eût besoin de cette contradiction des pécheurs contre lui, mais il a appris l’obéissance par les choses qu’il a souffertes ; et toutes ces persécutions et ces épreuves étaient sur le sentier dans lequel il marchait pour l’accomplissement de la volonté de Dieu. Comme le chef de notre salut, il a été consommé par les souffrances. Et c’est justement pourquoi il est si précieux de détourner les yeux de toutes choses pour regarder à lui, à lui qui a enduré la croix et méprisé la honte.
Si nous appliquons tout ceci à nous-mêmes, nous pourrons en recueillir d’utiles leçons. Nous apprenons d’abord à voir la main de notre Père dans tout ce que nous rencontrons sur notre chemin, dans toutes les épreuves, quelles qu’elles soient, qui nous viennent de l’injustice, de la méchanceté des hommes, ou qui résultent des circonstances. En le faisant, nous ne serons jamais tentés d’éprouver du ressentiment envers notre prochain ; mais nous nous reposerons tranquillement dans les bras de notre Père, avec l’esprit qui animait David, quand, maudit par Shimhi, il dit : «Qu’il me maudisse ; car l’Éternel lui a dit : Maudis David ; et qui lui dira : Pourquoi l’as-tu fait ?» (2 Sam. 16:10). Oui, toute pensée de révolte se calmera, et l’indignation que fait naître en nous l’injustice ou la persécution s’apaisera, si, en toute humilité et avec une pleine confiance, nous pouvons dire avec notre Seigneur : «La coupe que mon Père m’a donnée, ne la boirai-je pas ?».
Une seconde leçon que nous retirons de ce passage des Hébreux, c’est que toutes ces choses ne sont que l’expression de l’amour du Père. C’est celui que le Seigneur aime qu’il discipline ; «Dieu agit envers nous comme envers des fils» (Héb. 12:6-7). C’est dire qu’il agit dans son amour paternel, veillant sur nous dans sa tendresse, voyant le besoin que nous avons d’être corrigés ou repris, et permettant que toutes choses accomplissent le but qu’il a en vue pour nous. Les parents ici-bas passent trop souvent par-dessus les fautes de leurs enfants : ils épargnent la verge pour éviter leurs pleurs, et ainsi, par partialité ou par faiblesse, ils laissent s’invétérer de mauvaises habitudes ou de coupables dispositions. Il n’en est pas ainsi de Dieu. Il nous aime trop pour jamais épargner la verge, quand elle doit être une bénédiction pour ses enfants. Si nous entrons dans cette pensée, quel changement se produira dans toute notre expérience ! En présence des épreuves et des difficultés, nous nous demanderons aussitôt : Qu’est-ce que mon Père a à me dire par cela ? De cette manière, les circonstances les plus pénibles ne nous apporteront que des bénédictions.
La troisième leçon a déjà été indiquée, mais nous pouvons la formuler encore d’une manière plus particulière. C’est que Dieu ne nous châtie que quand il y a quelque chose qui l’y oblige. Si cette vérité est gravée au dedans de nous, au lieu de nous plaindre de nos peines ou de nos épreuves, nous chercherons aussitôt en présence de Dieu à découvrir quel secret péché, ou quelle habitude coupable, nous avons laissé s’établir en nous sans les juger, ce qui a fait que Dieu a dû intervenir avec la verge. Car nous ne devons pas oublier que c’est une discipline que nous endurons, et que Dieu agit envers nous comme envers des fils (Héb. 12:7). Nous ne mépriserons donc pas la discipline du Seigneur, puisque nous aurons appris qu’il a un motif et une raison pour l’employer ; et nous ne perdrons pas courage quand nous serons repris par lui (Héb. 12:5), assurés que nous serons de son amour dans ses dispensations à notre égard.
Il y a aussi ce solennel avertissement que, si nous sommes sans la discipline à laquelle tous participent, alors nous sommes des bâtards et non pas des fils (Héb. 12:8). Un incident raconté par le vieil évêque Fuller illustre cette vérité. Il vit une fois dans la rue deux jeunes garçons qui se querellaient. En les observant, il comprit lequel des deux était surtout en faute. Là-dessus il voit un homme qui, sortant d’une maison, saisit le garçon le moins coupable et se met à le frapper. L’évêque s’interposant lui dit : Pourquoi frappez-vous ce garçon ? c’est l’autre qui mérite le plus d’être puni. — Peut-être, reprit cet homme, mais celui-ci est mon fils. Il en est ainsi pour nous, Dieu châtie ses enfants : «Si donc vous êtes sans la discipline, dit l’Esprit, … alors vous êtes des bâtards et non pas des fils» (Héb. 12:8). Asaph ne comprenait pas cette vérité, quand il dit : «J’ai porté envie aux arrogants, en voyant la prospérité des méchants. Car il n’y a pas de tourments dans leur mort, et leur corps est gras. ils n’ont point de part aux peines des humains, et ils ne sont pas frappés avec les hommes». Mais de lui-même il dit : «J’ai été battu tout le jour, et mon châtiment revenait chaque matin» (Ps. 73:3-14). Sa difficulté disparut quand il entra dans le sanctuaire de Dieu ; elle est abordée et résolue par le Saint Esprit dans ce passage de Hébreux 12:8.
L’apôtre maintenant poursuit son instruction, en établissant d’abord un parallèle puis un contraste. Il nous rappelle que nous avons respecté nos pères selon la chair, quand ils nous disciplinaient. La soumission et le respect pour leurs parents convient à des enfants qui se savent tels. C’est là-dessus que l’apôtre fonde le motif pour se soumettre à Dieu quand il nous discipline : «Ne serons-nous pas beaucoup plutôt soumis au Père des esprits, et nous vivrons ?» (Héb. 12:9). Le terme «Père des esprits», est ici on contraste avec celui de «pères selon la chair». Voici le raisonnement de l’apôtre : Si nous respectons les derniers, nous devons d’autant plus respecter le premier. C’est le chemin de la vie. Comme le disait un ancien : «Dieu secoue souvent sa verge pour ne pas être obligé de frapper, et il frappe pour ne pas être obligé de tuer». En cela il manifeste son amour, c’est qu’il veut préserver ses enfants de toute fausse voie, de la voie qui paraît droite à l’homme, mais dont la fin est la mort.
Le but du châtiment est maintenant bien établi, et cela en contraste avec la discipline à laquelle nous sommes soumis par nos pères selon la chair. Ceux-ci nous châtiaient pour peu de jours, selon qu’ils le trouvaient bon, à propos ou mal à propos, et souvent, hélas ! par pur caprice ou pour obéir à un mouvement passager. Il n’en est pas ainsi de Dieu. Il a toujours en vue notre bien, et son but est que nous soyons participants de sa sainteté. Telle est la grande fin que Dieu se propose toujours — notre sanctification, la conformité à l’image de Christ. Il cherche cette fin par tous les châtiments que nous sommes appelés à endurer. Comme la vigne, nos pauvres coeurs s’attachent à droite et à gauche à tout ce qui les entoure ; et c’est alors que le Père permet aux épreuves ou aux persécutions, ou peut-être à la maladie, de fondre sur nous et de briser ces liens qui nous retiennent à des objets autres que Christ, et en se faisant connaître à nous, en nous découvrant tout son amour dans les châtiments que sa main nous dispense, il cherche à nous sevrer de tout ce qui pourrait empêcher nos progrès, et à nous attirer plus complètement à lui.
Il est peut-être bon de faire remarquer qu’il y a différentes causes de châtiments. Dans 2 Corinthiens 12, nous voyons que le but de l’écharde dans la chair était de préserver l’apôtre de l’orgueil spirituel au sujet des merveilleuses révélations qu’il avait reçues, quand il fut ravi dans le paradis. Dans 1 Corinthiens 11, nous voyons que le Seigneur châtie son peuple pour la manière légère dont ils se conduisaient à sa table. Dans Jean 15, nous voyons que le sarment est émondé pour qu’il porte encore plus de fruit. Mais quelle qu’en soit la cause, quoi que ce soit en nous qui rende la discipline nécessaire, le but que notre Dieu et Père se propose, dans son amour ineffable, c’est toujours notre vraie bénédiction (*).
(*) Nous n’avons pas fait de distinction ici entre les différents châtiments. Dans 1 Corinthiens 11, le châtiment vient du Seigneur, parce que c’est de péchés relatifs à sa table qu’il s’agit. De même, il permet l’écharde dans la chair, parce qu’il s’agit de Paul en tant que serviteur. Le lecteur trouvera un grand profit à remarquer ces différences.
Comme tout ceci nous montre bien les tendres soins et l’amour du Père. Ses yeux sont toujours sur nous, il prend connaissance de notre état et de notre condition, auxquels il conforme ses dispensations, nous envoyant des épreuves, peut-être la maladie, selon les circonstances et selon que le but sera le mieux atteint par un moyen ou par l’autre. Il sait, et lui seul le sait, ce qui touchera le plus promptement nos coeurs ; il sait à quel point doit être chauffée la fournaise pour que les scories soient enlevées, et il régie tout en conséquence ; mais il est fidèle et ne permettra point que nous soyons tentés au delà de nos forces, mais avec la tentation il donnera aussi l’issue, afin que nous puissions la supporter (1 Cor. 10:13). Oui, «il l’ôta par son vent fort, un jour de son vent d’orient» (Ésaïe 27:8).
Mais l’Esprit de Dieu nous rappelle que cette voie sera douloureuse. «Aucune discipline, pour le présent, ne semble être un sujet de joie, mais de tristesse ; mais plus tard, elle rend le fruit paisible de la justice à ceux qui sont exercés par ce moyen» (Héb. 12:11). Dieu veut que nous sentions le châtiment. Sans doute, il veut produire en nous le jugement de nous-mêmes et l’humiliation ; c’est pourquoi, le résultat de cette discipline sera béni dans la mesure où nous serons exercés par ce moyen. Si ces exercices d’âme n’existent pas, il n’y aura pas non plus de bénédiction. Quand donc il commence à agir à notre égard, notre première pensée doit être : il y a une raison pour cela ; et nous serons ainsi placés en présence de Dieu, comme cela eut lieu pour David, quand le fléau de la famine était sur le pays, et qu’il fut poussé à consulter l’Éternel (Voir 2 Samuel 21). Il nous révélera alors pourquoi il a été contraint d’employer la verge, et nous humiliant sous sa puissante main, il nous donnera dans le temps convenable la jouissance du fruit paisible de la justice.
Ce but des voies de Dieu à notre égard nous étant ainsi révélé, l’apôtre peut bien maintenant nous exhorter au courage et à la confiance. «C’est pourquoi, dit-il, redressez vos mains lasses, et vos genoux déjoints, et faites des sentiers droits à vos pieds, afin que ce qui est boiteux ne se dévoie pas, mais plutôt se guérisse» (Héb. 12:12-13). Si nous sommes dans l’agitation et la défiance quand le châtiment pèse sur nous, cela peut avoir les plus désastreux effets sur les croyants faibles ; tandis que, d’un autre côté, Dieu est glorifié et les âmes sont bénies, quand un saint passant par les eaux profondes s’appuie avec une confiance inébranlable sur le coeur de celui entre les mains duquel nous sommes. Nous ne pouvons donc trop souvent nous répéter que Dieu a un but en nous châtiant, et nous ne pouvons compter avec trop de confiance sur son amour pour nous soutenir dans l’épreuve. Comme il est notre Père, il nous gouverne selon son bon plaisir ; mais son but, en le faisant, est toujours de nous bénir.
Dieu qui nous a introduits dans sa famille, nous y entoure de bénédictions de toutes sortes. Et comme tout est par grâce, nous n’avons droit à rien qu’à notre position en Christ. Où la grâce règne, tout est privilège ; mais, dans ce chapitre, nous nous proposons de montrer quelques-uns des privilèges spéciaux que notre Dieu et Père nous a conférés, privilèges qui nous révèlent tout ce qu’il y a dans son coeur, toujours disposé à pourvoir aux besoin de ses enfants. Tout, dans ses conseils de grâce, est une manifestation de lui-même et de son amour immuable, aussi nous pouvons reporter tous ces privilèges à son propre coeur comme à leur source. Comme nous l’avons fait remarquer dans un précédent chapitre, le Seigneur dit, avant de quitter la scène de ce monde : «Je leur ai fait connaître ton nom, et je le leur ferai connaître, afin que l’amour dont tu m’a aimé soit en eux, et moi en eux» (Jean 17:26). Ce n’est pas seulement que nous sommes les objets des affections du père ; mais son amour, dans la même mesure qu’il était en Christ, est aussi en nous ; — en nous, parce que Christ lui-même est en nous, et qu’ainsi il est le milieu par lequel cet amour se répand dans nos âmes. Quelque faiblement que nous entrions dans cette pensée, nous n’aurons pas de difficulté à comprendre la nature des précieux privilèges qu’il nous a conférés. Mais il est de toute importance que nous commencions avec l’amour du Père, et non pas avec les privilèges, qu’en un mot nous cherchions à comprendre les privilèges à la lumière de l’amour, plutôt que l’amour à la lumière des privilèges. C’est la voie divine. C’est ainsi que l’apôtre dit : «Lui qui n’a pas épargné son propre Fils, mais qui l’a livré pour nous tous, comment ne nous fera-t-il pas don aussi, librement, de toutes choses avec lui ?» (Rom. 8:32). Les dons inférieurs découlent du plus grand de tous.
Le premier privilège à signaler est celui des soins du Père. Notre bien-aimé Seigneur, lui-même, a attiré notre attention là-dessus en Luc 12. Ce chapitre suppose que le Seigneur est absent de ce monde ; nous sommes donc appelés à attendre son retour (Voir Luc 12:35-36). Le Seigneur parle en premier lieu des dangers auxquels sont exposés les siens par la persécution, — persécution excitée contre eux par Satan. Après les avoir exhortés à ne pas craindre ceux qui tuent le corps et qui, après cela, ne peuvent rien faire de plus, mais plutôt à craindre Celui qui, après avoir tué, a le pouvoir de jeter dans la géhenne, il les encourage en leur rappelant les soins constants de Dieu. Qu’il est admirable de voir comment ils s’exercent. Ne vend-on pas, dit-il, cinq passereaux pour deux sous ? et pas un d’entre eux n’est oublié devant Dieu ; ou, comme porte l’évangile de Matthieu, «pas un d’entre eux ne tombe en terre sans votre Père» (Matt. 10:29). L’application est évidente, aussi continue-t-il en disant : «Les cheveux même de votre tête sont tous comptés. Ne craignez donc pas : vous valez mieux que beaucoup de passereaux» (Luc 12:7).
Quelle consolation ces paroles renferment pour les enfants de Dieu ! Nous sommes souvent aussi exposés à des dangers de diverses natures, et notre vie est souvent menacée, soit par les ennemis et les persécuteurs, soit par d’autres causes. Dans notre service journalier, à la maison ou dans les visites que nous faisons à des malades souffrant de maladies contagieuses, en voyage sur terre ou sur mer, la mort nous menace. Mais nous avons ici le vrai remède qui pourvoit à tout — les cheveux même de votre tête sont tous comptés. Cette pensée nous fait aller courageusement en avant, non pas que nous soyons insensibles au péril, mais parce que nous sommes pénétrés du sentiment de la protection et des soins d’un Père qui veille sur nous. C’est la simple vérité que nous avons dans cette parole d’un poète : «Aucune flèche ne frappe qu’au moment où le permet l’amour de Dieu». Comment l’enfant de Dieu pourrait-il donc avoir peur ? Sa seule crainte devrait être d’être infidèle et de craindre l’homme plus que Dieu, d’oublier cet amour constant qui le rend invulnérable à toutes les armes que Satan emploie pour travailler à sa ruine, jusqu’au temps que Dieu a fixé. Si les enfants de Dieu étaient dans la puissance de cette vérité, ils seraient aussi beaucoup moins inquiets et anxieux dans les temps de maladie. Dieu nous permet d’user de moyens, mais combien souvent n’y a-t-on pas recours dans un esprit d’incrédulité, comme si notre rétablissement dépendait uniquement de l’aide et des conseils humains ? Sans doute, si un passereau ne peut tomber à terre sans la permission de notre Père, ses enfants ne le peuvent pas non plus. Non, les cheveux même de notre tête sont tous comptés, et Dieu est honoré quand nous demeurons dans le calme et dans la confiance, en présence des plus grands dangers, étant assurés que les maladies, comme les ennemis, ne sont que des instruments dans sa main pour exécuter les conseils de son amour.
Le Seigneur applique ceci d’une autre manière encore. Pendant notre passage comme pèlerins et étrangers dans ce monde, nous avons certains besoins. Nous sommes tout à fait indépendants de la scène que nous traversons, sauf pour ce qui regarde nos corps. Pour tout le reste, nous pouvons bien dire avec le Psalmiste, que c’est un pays desséché où il n’y a point d’eau. Mais nos corps ont des besoins, il faut les nourrir et les vêtir. Notre Seigneur, dans sa tendresse et sa sympathie pour nous, prend connaissance de ces besoins et il le fait, parce qu’il sait combien souvent il arrive que les soucis causés par ces besoins viennent se mettre entre nos âmes et lui-même, pour nous ôter la jouissance de l’amour du Père. Dans la parabole du semeur, il mentionne, en effet, les soucis de ce monde comme une des choses qui étouffent la semence de la Parole, en sorte que aucun fruit ne vient à maturité. Il a aussi préparé un remède à ce mal. Il dit à ses disciples de n’avoir pas de souci pour leur vie, de ce qu’ils mangeraient, ni pour leur corps, de quoi ils seraient vêtus, et pour donner plus de force à l’exhortation, il leur rappelle que la vie est plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement, et il appuie son exhortation par deux exemples qui nous parlent des soins de Dieu pour nous, exemples qui frappaient sans cesse leurs yeux : les oiseaux de l’air et les lis des champs qu’ils voyaient dès qu’ils faisaient un pas hors de leurs demeures. Ils avaient ainsi sans cesse l’occasion de se rappeler que Dieu nourrit les uns et revêt les autres, et que, puisque eux-mêmes avaient plus de valeur, à ses yeux, que les corbeaux ou les lis, à plus forte raison il les nourrirait et les vêtirait (Matthieu 6).
Comme les voies de Dieu sont parfaites ! et comme ces paroles sont merveilleusement propres à combattre la tendance de nos coeurs à s’inquiéter au sujet des choses terrestres ! Mais il va plus loin encore. Il leur rappelle que si les nations du monde recherchent toutes ces choses, il n’en doit pas être de même des enfants de Dieu. Penser aux choses de ce monde est ce qui caractérise les hommes de ce monde. Et qu’est-ce qui peut délivrer les enfants de Dieu de cet esclavage ? La confiance dans les soins et l’amour du Père. C’est pourquoi le Seigneur ajoute : «Votre Père céleste sait que vous avez besoin de toutes ces choses» (Matt. 6:32). Quelle puissance nous avons dans cette bienheureuse assurance, quand elle s’est emparée de nos âmes ! Quand nous sommes dans la détresse, dans des circonstances difficiles, dans l’angoisse au sujet de notre pain quotidien, cette pensée : «Notre Père sait», devrait dissiper toute crainte et bannir tout découragement. Si donc nous, qui sommes méchants, savons donner de bonnes choses à nos enfants, comme le Seigneur nous l’a enseigné ailleurs, combien plus notre Père céleste donnera-t-il des biens à ceux qui les lui demandent. Oui, ses yeux sont sur chacun de ses enfants. Il voit tous leurs besoins et, s’il tarde à y pourvoir, ce n’est que pour les bénir davantage. Nous pouvons donc bien dire avec Habakuk : «Le figuier ne fleurira pas, et il n’y aura aucun fruit dans les vignes ; le fruit de l’olivier trompera l’attente, et les champs ne donneront point de nourriture ; le menu bétail manquera aux parcs, et il n’y aura plus de boeufs dans l’étable. Mais moi, je me réjouirai en l’Éternel, je tressaillirai de joie dans le Dieu de mon salut» (Hab. 3:17-18).
La seule préoccupation des enfants de Dieu, c’est le royaume de Dieu, ce sont ses droits et ses intérêts. «Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par-dessus». (Matt. 6:33). C’est-à-dire que la volonté de Dieu doit être notre seule loi, et que nos coeurs doivent être fixés sur les choses du ciel plutôt que sur celles de la terre. Sa gloire doit être la fin et le but de nos vies ; et lui, de son côté, veillera à tout pour nous. Sa fidélité s’engage à pourvoir à tous les besoins de ses enfants, quand ils cherchent son royaume. C’est comme le poète le dit :
Trouvez votre plaisir à servir le Seigneur,
Et vous serez l’objet de sa sollicitude.
Il n’est donc pas nécessaire de vous amasser des trésors sur la terre. Si nous le faisons, nos richesses sont exposées aux voleurs et à la teigne ; et outre cela, là où est notre trésor, là aussi sera notre coeur (Matt. 6:19-21). Si donc notre trésor est dans ce monde, notre coeur y sera aussi ; il faut donc que Christ soit notre seul trésor, afin que nos coeurs soient fixés sur lui. Si nous faisons de la gloire de Dieu notre objet, nous serons à l’abri des inquiétudes au sujet des choses temporelles, parce qu’il veille sur nous et travaille pour nous ; nous pouvons donc passer à travers la scène de ce monde comme étrangers et pèlerins, ayant les reins ceints et nos lampes allumées ; et comme des serviteurs attendent leur maître, nous attendons le retour de notre Sauveur qui nous prendra à lui, afin que nous soyons avec lui dans la maison du Père.
Un autre précieux privilège dont jouissent les enfants de Dieu, c’est de lui présenter leurs besoins. En d’autres termes, ils sont avec le Père dans des rapports d’intimité. Combien souvent le Seigneur Jésus l’a rappelé à ses disciples : «En vérité, en vérité, je vous dis que toutes les choses que vous demanderez au Père en mon nom, il vous les donnera. Jusqu’à présent vous n’avez rien demandé en mon nom ; demandez, et vous recevrez, afin que votre joie soit accomplie» (Jean 16:23-24). Qui comprendra toute l’étendue de la bénédiction renfermée dans un tel privilège, de nous décharger de tous nos soucis et de toutes nos peines dans le coeur de Celui qui nous comprend et nous aime ?
Mais que pouvons-nous dire au Père dans nos prières ? demandera-t-on peut-être. Il n’y a ni limites, ni réserve. Tout ce qui nous trouble, tous nos besoins, nos difficultés ou nos chagrins passagers, tout peut être dit à Celui dont l’oreille est toujours ouverte à nos cris. Comme le dit l’apôtre Paul : «Ne vous inquiétez de rien, mais, en toutes choses, exposez vos requêtes à Dieu» (Phil. 4:6). Il veut que nous soyons dans l’intimité de son amour, que nous soyons absolument sans réserve devant lui, que nous lui disions tout sans rien garder par devers nous. Il n’y a jamais danger pour nous à ce que nous lui disions trop, c’est plutôt le contraire qui est à redouter. Et plus nous connaîtrons son coeur, plus nous serons disposés à user de ce privilège. Comme quelqu’un l’a dit : «Tout ce qui est souci pour nous, devient soin pour nous dans le coeur de Dieu». C’est pourquoi, nous n’avons jamais à craindre d’aller trop loin dans nos requêtes. Il aime à entendre le cri de ses enfants, car il sait bien que ce cri est l’expression de leur confiance en lui. Il se peut, et c’est souvent le cas, que ce soit un cri insensé ; mais c’est toujours le cri de son enfant, et il n’est jamais fatigué de l’entendre. Nous avons dans l’Écriture bien des exemples propres à nous encourager, exemples du caractère le plus familier. Voyez comme Ananias, quand le Seigneur l’envoie à Saul, se hasarde à rappeler au Seigneur le caractère de celui auprès duquel il devait se rendre, comme si le Seigneur n’en savait rien ! «Seigneur», dit-il, «j’ai ouï parler à plusieurs de cet homme, combien de maux il a faits à tes saints dans Jérusalem ; et ici il a pouvoir, de la part des principaux sacrificateurs, de lier tous ceux qui invoquent ton nom» (Actes 9:13-14). Et cela ne déplut pas au Seigneur, mais, plein de tendresse pour son serviteur, il lui dit : «Va ; car cet homme m’est un vase d’élection pour porter mon nom devant les nations et les rois, et les fils d’Israël» (Actes 9:15). C’est ainsi que le Seigneur aime que nous répandions nos coeurs devant lui, en ayant toujours pleine confiance en son amour.
Cependant, et malgré cela, le Seigneur ne promet pas toujours d’exaucer nos requêtes. Dans le passage de Jean cité plus haut, il est dit que tout ce que nous demanderons au nom de Christ nous sera accordé. Au nom de Christ — cette expression signifie que nous sommes devant Dieu selon ce que Christ est lui-même, et qu’en conséquence nous avons tous ses droits sur le coeur du Père. Mais on verra aussitôt que nous ne pouvons être devant le Père au nom de Christ, pour lui demander quelque chose qui ne serait pas selon sa volonté. Nous ne pourrions pas même dire à un bienfaiteur humain que nous venons au nom d’un autre dont nous n’aurions pas l’approbation. Et nous ne pourrions pas employer le nom de Christ dans nos requêtes, si le Saint Esprit ne le produisait pas dans nos coeurs selon la volonté de Dieu ; mais toute demande pareille sera infailliblement exaucée, comme Christ le dit lui-même positivement.
Si nous considérons maintenant le passage des Philippiens, c’est différent. Nous pouvons, selon ce passage, exposer en toutes choses nos requêtes et nos supplications avec des actions de grâces (Phil. 4:6) ; mais il n’est pas dit que nos requêtes seront exaucées. Il y a seulement la promesse que la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence gardera nos coeurs et nos pensées dans le Christ Jésus. Cela est infiniment précieux, car, nous le voyons, Dieu veut que nous soyons devant lui dans une confiance parfaite, jouissant d’une pleine liberté, en sorte que nous puissions lui exposer tous nos besoins, et s’il n’exauce pas nos prières, parce que dans son amour et dans sa sagesse il juge que cela vaut mieux pour nous autrement, il gardera pourtant nos coeurs dans sa paix ineffable. Si nous déposons nos fardeaux devant lui, en lui disant tout ce qui est dans nos coeurs, il nous fera connaître par Jésus-Christ cette paix parfaite que rien ne peut troubler. Nos coeurs seront en repos, pleins de confiance dans l’amour du Père et gardés par la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence.
On peut considérer ce privilège sous un autre aspect qu’il ne faut pas laisser de côté. Quand nous sommes devant Dieu, notre Père, c’est sans doute, non seulement pour lui exprimer nos désirs, mais aussi pour lui rendre nos actions de grâces et nos louanges. Comment, en effet, pourrions-nous être dans la présence du Père, avec le sentiment de tout son amour et de sa grâce, sans être prosternés devant lui dans l’adoration ? ce qui d’ailleurs est entièrement selon la pensée de son coeur. Le Seigneur dit à la femme de Samarie : «L’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car aussi le Père en cherche de tels qui l’adorent» (Jean 4:23). Qu’il est précieux de le savoir ! Non seulement Dieu, dans sa grâce infinie, cherche les pécheurs perdus et les supplie par l’évangile d’être réconciliés avec lui, mais, comme Père, son coeur soupire après des adorateurs. C’est pour répondre à ce désir que Christ est venu dans le monde, qu’il est mort sur la croix, qu’il est ressuscité d’entre les morts ; qu’il est monté dans les lieux célestes, qu’il a envoyé le Saint Esprit et fait annoncer l’évangile. Et par grâce nous avons été amenés à croire son témoignage, nous sommes nés de nouveau, nous avons été lavés de nos péchés par le précieux sang de Christ, et nous avons reçu l’Esprit d’adoption par lequel nous crions «Abba, Père».
Le sentiment que nous avons de la grâce et de la miséricorde de Dieu en Christ serait bien peu de chose si, avec la conscience que nous sommes devant lui, nous ne pensions qu’à nos propres besoins. Plus nous sommes pénétrés de reconnaissance pour toutes les bénédictions que nous avons reçues, plus nous nous souvenons de ce qui est dû à Celui qui nous a sauvés et a fait de nous ses enfants. Les droits du Père doivent toujours avoir la première place dans le coeur de l’enfant ; car le Père a ses droits, comme il le dit lui-même par la bouche du prophète : «Si donc je suis père, où est l’honneur qui m’est dû ?» (Mal. 1:6). Le respect et l’adoration lui appartiennent, en vertu des relations dans lesquelles il veut bien se trouver avec nous. Tout le monde confessera que cela est vrai ; mais s’il a, sans aucun doute, des droits absolus sur nous, droits qui exigent nos hommages et l’adoration de nos coeurs à cause de la rédemption accomplie, nous, de notre côté, devons trouver nos délices à penser au privilège que nous avons d’être admis en sa présence en qualité d’adorateurs. Plus nous nous souvenons que c’est uniquement par grâce que nous occupons cette heureuse position, plus nos coeurs seront remplis de reconnaissance et de louanges. Nous pouvons donc bien nous demander si nous sommes assez sensibles à ce privilège. Les moments, plus ou moins longs, que nous passons chaque jour devant Dieu comme notre Père, de quoi sont-ils remplis ? Est-ce la prière ou la louange qui en occupe la plus large place ? Sont-ce nos besoins ou ce qui lui est dû ? Si, étendant le cercle de ces questions, nous considérons nos assemblées entre enfants de Dieu, quand nous sommes réunis en sa présence, est-ce la prière ou l’adoration qui domine ? Il est bon de nous examiner à cet égard ; car, comme nous l’avons vu, le Père cherche des adorateurs ; il prend donc plaisir à voir ces adorateurs réunis comme tels, il aime à entendre les accents joyeux de leur culte et de leur reconnaissance.
Il y a encore un autre privilège dont nous jouissons quand, dans la puissance de l’Esprit, nous atteignons le caractère le plus élevé du culte. L’apôtre Jean nous dit : «Notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ» (1 Jean 1:3). Or, d’après l’enseignement de l’Écriture, cette place appartient à tous ceux qui ont reçu Christ comme la vie éternelle. Ayant une nouvelle nature et la vie éternelle, nous sommes introduits dans la communion avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ. C’est là notre position. Il ne peut y avoir une expression plus élevée de la grâce ; et il ne nous est pas possible, dans notre état présent, de concevoir l’étendue illimitée de bénédiction qui caractérise cette position. Par grâce, nous pouvons goûter quelque chose de cette jouissance ineffable ; le Saint Esprit nous conduit quelquefois sur quelque Pisga, d’où nous pouvons embrasser l’héritage, et dans notre mesure nous connaissons maintenant déjà le caractère de cette communion qui est toute céleste, et dont l’éternité elle-même nous dévoilera seule les trésors infinis.
Nous pouvons encore demander ce que signifie cette expression : «Avoir communion avec le Père». C’est être rempli de ses pensées, de ses désirs, de son objet et de ses affections. Il en est de même de la communion avec le Fils. Par exemple, si Christ est l’objet du coeur du Père et que la gloire de Christ soit le but de tous ses conseils, si je suis en communion avec le Père, Christ sera aussi l’objet de mon coeur ; et mon but dans tout ce que je suis et que je fais sera sa gloire. Et si Christ a la gloire du Père en vue dans tout ce qu’il accomplit maintenant encore, comme quand il était sur la terre, et si je vis dans la communion avec le Fils, la gloire du Père sera aussi la pensée dominante de mon âme. Quelle position bénie ! C’est notre privilège d’être délivrés de nous-mêmes, de nous perdre dans l’amour du Père et du Fils ! Quand nos esprits sont remplis de pensées et d’affections divines, le moi disparaît. Pourrai-je poursuivre mes pensées et mes desseins, si je suis occupé de ceux, du Père et du Fils ? Tiendrai-je à mes propres affections, si je suis possédé par celles qui remplissent le coeur du Père et celui de son Fils Jésus-Christ ? Loin de moi cette pensée ! Plutôt être perdu dans cet océan de bénédiction qui, dans la grâce merveilleuse de Dieu, s’ouvre devant moi et devant tous ses enfants Ah ! comme nous sommes humiliés, quand nous comparons les pensées de Dieu pour nous, avec nos propres pensées ! Puissent tous ses enfants qui lisent ces pages, désirer répondre plus pleinement à ses desseins de grâce, afin que nous connaissions cette communion avec le Père et avec son Fils bien-aimé !
C’est aussi notre privilège, comme enfants de Dieu, d’habiter déjà maintenant en esprit dans la maison du Père. Quand le fils prodigue revient et qu’il a reçu le baiser du père, la plus belle robe, l’anneau au doigt et les sandales aux pieds, il disparaît, perdu dans la joie de la maison du père. Mais qui peut douter que la maison du père et sa table ne soient désormais la place naturelle qui lui appartient ?
Il est important de faire remarquer que la table du Père ne doit pas être confondue avec la table du Seigneur. Celle-ci est dressée pour nous sur la terre, tandis que l’autre l’est là-haut. À la table du Seigneur, nous rappelons sa mort. Aussi souvent que nous mangeons le pain et que nous buvons la coupe, nous annonçons la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne (1 Cor. 11:26). À la table du Père, nous avons communion avec lui dans sa propre joie, exprimée dans ces paroles : «Amenez le veau gras et le tuez ; et mangeons et faisons bonne chère ; car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé» (Luc 15:23-24). De plus, c’est comme membres du corps de Christ (1 Cor. 10:16-17), que nous sommes réunis autour de la table du Seigneur. Nous sommes aussi enfants de Dieu, par sa grâce ineffable ; mais c’est en qualité de membres du corps de Christ, que nous nous souvenons de lui dans sa mort. C’est seulement par le fait que nous sommes enfants, que nous jouissons du privilège d’avoir une place à la table du Père.
Oui, c’est le privilège de tous les rachetés de Dieu d’habiter dans la maison du Père et de s’asseoir à sa table. La place où leur Père lui-même habite est devenue la leur. Il en est ainsi dans les familles terrestres. Un enfant ne demande pas s’il peut entrer dans la maison de ses parents. Il est tellement sûr de leur amour qu’il sait qu’il est le bienvenu, et qu’il ne sera jamais un intrus. Une telle pensée serait indigne du coeur de ses parents. Si rien n’est venu troubler l’intimité de leur affection, les parents se réjouissent de sa présence, et l’enfant de la leur. À plus forte raison en est-il ainsi des rapports de Dieu avec ses enfants. Il prend plaisir à les avoir devant lui, à être entouré des siens. Et il nous a placés en sa présence, afin que nous puisions savoir quelle joie il y a à être devant lui, à se reposer auprès de lui dans la conscience que nous sommes les objets de son coeur, aimés comme Christ lui-même (Jean 17:23). La porte de sa maison ne nous est jamais fermée, la seule chose qui nous en tienne éloignés, c’est la folie de nos pensées, de nos voies et de nos actes. Et si le sentiment de péchés non pardonnés nous tient à distance et en dehors, tandis que nous pouvons être au dedans, souvenons-nous que «si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité» (1 Jean 1:9). Nous pouvons rendre grâces au Père qui nous a rendus participants de l’héritage des saints dans la lumière ; et dans sa grâce, il a pourvu à ce que, quand nous avons péché, nous fussions purifiés par le lavage d’eau, par la Parole, afin que rien ne nous empêche d’être dans une communion constante avec lui dans son amour.
Puisque donc notre place est déjà maintenant dans la maison du Père, demandons-nous si nous comprenons ce que c’est que d’y être ? Quand nous avons accompli notre service ou terminé nos occupations, retournons-nous instinctivement à la maison du Père comme à notre lieu de prédilection, où nous trouvons rafraîchissement, joie et bénédiction ? Dans l’épître aux Éphésiens, les saints sont représentés comme habitant en présence du Père, comme sortant de là pour accomplir leur service, et comme appelés à révéler dans leur marche le caractère du Dieu souverainement bienheureux, en présence duquel ils se tiennent, et la place qui est la leur. Ils agissent comme représentants de leur Père et de sa demeure, afin que d’autres, enseignés par eux, soient attirés vers la même position. Ceux, par exemple, qui ne se trouvent qu’occasionnellement à la cour n’en connaissent guère les manières, les habitudes, les usages. Mais ceux qui y vivent, en prennent le ton et deviennent bientôt eux-mêmes des hommes de cour. Il en est ainsi des enfants de Dieu. S’ils ne font que de rares visites dans la maison du Père, si la plupart du temps, ils trouvent leur jouissance ailleurs, ils n’apprennent jamais à connaître ni le coeur du Père, ni les habitudes de sa maison ; c’est pourquoi, ils ne peuvent que mal représenter Celui qui a daigné faire d’eux ses enfants.
Prenons garde de ne pas traiter légèrement l’amour du Père en ne recherchant pas activement sa présence. Nous ne pourrons jamais sonder les profondeurs de son coeur, et cependant il répand tout son amour sur ceux qui étaient autrefois ses ennemis et qui sont maintenant ses enfants rachetés. Plus nous comprendrons cela, plus nous voudrons jouir du privilège qu’il nous a accordé de vivre en sa présence comme ses enfants. La croix de Christ est la mesure de son amour insondable. Mais plus nous vivrons avec le Père, plus nous apprendrons à connaître cet amour, et plus aussi nous apprécierons cette grâce merveilleuse qui a fait de nous ses enfants, et si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers ; héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ. Son coeur, ses yeux, sa main, sont à notre service, et il veut que nous jouissions pleinement de toutes les bénédictions qu’il nous a accordées en Christ, et qu’il met jour après jour à notre portée pendant notre passage à travers le désert. Tout ce que Dieu est, est pour nous, parce qu’il nous a rachetés par le précieux sang de Christ, et toutes les richesses du coeur du Père sont continuellement répandues sur nous, parce que nous sommes ses enfants. Qu’il nous donne davantage de cette sainte hardiesse qui nous rendra capables de nous approprier tous les privilèges qu’il nous a conférés et qui sont comme l’expression de sa grâce et de son amour !
Nous avons passé en revue bien des aspects différents de la vérité quant aux enfants de Dieu. Il y a cependant encore une chose à considérer, c’est leur condition et leur demeure futures. Un passage de l’épître aux Romains servira de base à notre étude de ce sujet. Nous lisons en Rom. 8:28-29 : «Mais nous savons que toutes choses travaillent ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son propos. Car ceux qu’il a préconnus, il les a aussi prédestinés à être conformes à l’image de son Fils, pour qu’il soit premier-né entre plusieurs frères».
Il y a, dans ce passage, deux choses distinctes quoique réunies. La première, c’est que de toute éternité la pensée de Dieu a été de rendre tous ses enfants conformes à l’image de son Fils, de ce Fils qui, tout en ayant la prééminence comme il convient à sa personne et à sa dignité, est pourtant le modèle de tout enfant de Dieu. Ce précieux passage des Romains nous montre mieux que beaucoup d’autres, les infinies richesses de la grâce de Dieu, et ce résultat a lieu de nous surprendre si nous considérons ce que nous sommes par nous-mêmes. Il nous explique aussi tout le secret de la rédemption. Il est bien vrai que Dieu, dans sa miséricorde et sa grâce, nous a élus dans la vue d’accomplir ses desseins de miséricorde à notre égard, mais il faut se garder d’oublier que le motif suprême de la grâce de Dieu dans la rédemption, tel qu’il est manifesté dans ses conseils éternels, est la gloire de son Fils bien-aimé. Les enfants de Dieu sont ici sur la scène que décrit ce passage, mais Christ en est le centre, Christ comme le premier-né entre plusieurs frères. Ce qu’il y a de merveilleux, c’est que Dieu, dans sa grâce et dans son amour, nous a associés à son Fils unique dans les conseils qu’il a formés pour sa gloire. Associés avec lui maintenant, — car nous sommes ses cohéritiers, — nous serons associés avec lui dans toute l’éternité ; car s’il est le premier-né, il daigne pourtant nous appeler ses frères. La famille ne serait pas complète sans lui, ni, béni soit son nom ! sans nous. C’est pourquoi il dit à Marie : «Va vers mes frères et dis-leur : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu» (Jean 20:17).
Une autre chose encore peut servir à illustrer le vrai caractère de la rédemption. Christ, — et Christ dans la gloire, — cela est évident d’après ce passage, était toujours dans la pensée de Dieu, soit comme le fondement, soit comme l’objet de ses conseils. Les enfants de Dieu ne doivent pas être rendus conformes à l’image d’Adam, mais à l’image de Christ. L’introduction de la semence de la femme n’était pas une pensée venue après coup, pour ainsi dire, ni seulement un moyen de remédier au dommage que Satan avait causé à la création par la folie de l’homme, mais plutôt la manifestation du secret renfermé dans le coeur de Dieu pour sa propre gloire, comme pour celle de son Fils bien-aimé. Le premier Adam, comme homme responsable, fut introduit sur la scène ; mais le résultat ne servit qu’à prouver combien il était incapable de porter le poids de la gloire de Dieu, quoiqu’il fût entouré de tout ce qui pouvait favoriser sa dépendance et son obéissance, ou l’aider à maintenir l’honneur de Celui dont il était le représentant. Il tomba, et nous le savons, de la manière la plus désastreuse, mais Dieu intervint et prouva, comme toujours, qu’il était au-dessus de l’ennemi, là où celui-ci avait agi avec orgueil, car le triomphe apparent de Satan ne fut que l’occasion de la révélation du second Adam — non pas l’homme responsable, mais l’homme selon le conseil de Dieu, Celui dans lequel et par lequel Dieu accomplirait tous ses desseins à sa louange et à sa gloire éternelles. Or ce second homme, le Fils de Dieu, est celui auquel tous les enfants de Dieu doivent être rendus conformes, afin que, pendant toute l’éternité, ils puissent briller en réfléchissant sa lumière, et contribuer ainsi à sa gloire, et à la gloire de Celui par les conseils miséricordieux duquel ils ont été rachetés.
La seconde chose que nous enseigne ce passage, c’est que Dieu travaille déjà maintenant dans ce but. Dans toutes ses dispensations présentes à notre égard, dans nos diverses expériences, dans toutes nos épreuves, dans les tribulations, les dangers, les persécutions, que nous rencontrons sur notre chemin, c’est Dieu qui nous conduit et qui emploie tout ce qu’on appelle des adversités, comme le sculpteur emploie son ciseau, pour produire la conformité à l’image de son Fils. Le résultat, comme on le verra plus tard, ne sera pas pleinement obtenu ici-bas, mais c’est le but que Dieu a toujours en vue. Ayant cette confiance, car il nous le révèle dans sa Parole, nous pouvons dire avec joie : « Toutes choses travaillent ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son propos» (Rom. 8:28). Quelle ineffable consolation pour nos âmes ! Toutes choses, sans exception, oui, toutes les choses amères et les choses douces, l’adversité et la prospérité, la maladie et la santé ; oui, la tribulation, la détresse, la persécution, la famine, la nudité, le péril ou l’épée, toutes ces choses ne sont que des instruments dans les mains de Dieu pour amener la fin qu’il se propose. Avec quel calme nous pouvons donc nous reposer en lui et dans son amour ! Comme Jacob, nous sommes peut-être souvent tentés de dire : « Toutes ces choses sont contre nous» ; mais non, elles sont pour nous, travaillant ensemble pour notre bien. Nous pouvons ne pas voir la nécessité de ces épreuves, mais Dieu veille sur nous, tenant compte de tout, de ce que notre état réclame et au résultat produit par ces choses. Il voit la condition à laquelle il veut nous amener, et il nous fait passer par le chemin qui nous conduit à la bénédiction.
Or nous serons puissamment soutenus, si nous avons les yeux fixés sur Celui à qui nous devons être rendus conformes. Dieu, comme nous l’avons vu, a Christ devant lui ; et si Christ est aussi devant nos âmes, ce qui est l’objet de Dieu est donc aussi le nôtre. C’est ce qu’il veut pour nous, et il ne pouvait nous exprimer plus complètement, d’une autre manière, les richesses de la grâce qu’il nous a accordée en Christ. C’est au-dessus de notre conception, quoique nous sachions que cela est, que Dieu veuille nous associer ainsi avec lui, qu’il nous mette dans cette heureuse position où nous pouvons nous réjouir de ce qui fait les délices de son coeur. De plus, avoir les yeux sur Christ, c’est le moyen, pour nous, d’être transformés à son image. C’est ainsi que nous lisons : «Or nous tous, contemplant, à face découverte, la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en esprit» (2 Cor. 3:18). Dieu nous a prédestinés à être conformes à l’image de son Fils, mais il travaille à amener ce résultat par les moyens qu’il a lui-même préparés, et tout ce qui se rencontre sur notre chemin y contribue. Mais maintenant, ici-bas, beaucoup de choses dépendent de la disposition de nos âmes. Il est parfaitement vrai que tout croyant est dans la position où il peut contempler le Seigneur à face découverte ; c’est la position du chrétien par opposition à celle du Juif. C’est sur quoi il faut toujours insister ; mais il faut néanmoins ne pas l’oublier, c’est dans la mesure où nous avons conscience de notre position, que nous serons transformés à l’image de Christ. Supposons, par exemple, deux enfants de Dieu, l’un négligent, indifférent, mondain, l’autre zélé, dévoué, trouvant sa joie à s’occuper de Christ ; le dernier aura bientôt devancé l’autre pour la conformité croissante avec Christ. L’oeuvre est tout entière de Dieu, mais il emploie des moyens ; et là où le coeur est engagé dans la poursuite du but, il y aura progrès dans la grâce et dans la connaissance du Seigneur Jésus-Christ.
C’est ce que nous comprendrons aussitôt, si nous considérons un moment la signification de ce passage. Nous contemplons la face découverte du Seigneur, et cette face du Seigneur nous révèle toute la gloire de Dieu (Voir 2 Cor. 4:6). C’est que toute la gloire morale de Dieu, — la somme de ses perfections spirituelles, l’excellence de tous ses attributs, — tout est concentré dans la face de Christ comme homme glorifié à la droite de Dieu. Occupés de lui, l’ayant devant nous comme notre modèle, méditant sur sa perfection et sur sa beauté morale, telles qu’elles sont révélées, et révélées pour nous dans la Parole écrite, où nous pouvons entrer en contact avec lui et jouir de lui, nous sommes transformés en la même image de gloire en gloire, étant toujours transformés et passant d’un degré à l’autre, parce que, aussi longtemps que nous serons dans ce monde, nous n’atteindrons jamais sa parfaite ressemblance. La perfection ne se trouve qu’en Christ, et elle ne sera en nous que quand nous serons avec lui là où il est. Mais en attendant, la gloire dont nous sommes occupés et que nous considérons, devient une puissance transformatrice par l’opération de l’Esprit de Dieu ; elle laisse son empreinte sur nous, produisant sans cesse en nous le reflet de sa propre beauté, et de cette manière nous sommes transformés jour après jour à la ressemblance de Christ. Si donc nous sommes occupés d’autre chose, si nous laissons d’autres objets s’emparer de nos coeurs, nous sommes en opposition au but pour lequel Dieu nous a pris à lui ; tandis que, si Christ fait nos délices et notre joie, nous sommes dans le plein courant de sa pensée et, comme l’argile dans les mains du potier, nous nous laissons modeler comme il lui plaît. Quelle bénédiction pour nous tous, non seulement si nous comprenons quel objet Dieu a en vue, mais encore si nous sommes en communion avec lui quant à cet objet, et si notre seul désir est que ses desseins à notre égard soient accomplis.
Tel est donc le but de Dieu, de nous rendre conformes à l’image de son Fils. Si, maintenant, nous prenons un autre passage, nous y verrons le but réalisé. «Bien-aimés», écrit l’apôtre Jean, «nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n’a pas encore été manifesté ; mais nous savons que quand il sera manifesté, nous lui serons semblables, car nous le verrons comme il est» (1 Jean 3:2-3). L’apôtre met ici en opposition la condition présente des enfants de Dieu avec leur condition future. Maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Quant à l’apparence extérieure, nous paraissons comme les autres hommes. Le Seigneur lui-même ne pouvait pas être reconnu par l’oeil naturel. Si nous l’avions rencontré dans les rues d’une des villes de la Galilée ou à Jérusalem, nous n’aurions vu en lui qu’un homme de la classe inférieure. Nous aurions dit avec les Juifs incrédules : «Celui-ci n’est-il pas le charpentier, le fils de Marie et le frère de Jacques, et de Joses, et de Jude, et de Simon ?» (Marc 6:3). Jean Baptiste même dit qu’il ne le connaissait pas, jusqu’à ce qu’il vit l’Esprit descendant et demeurant sur lui. Il en est ainsi des enfants de Dieu. Ils ont le même corps d’humiliation que les autres hommes, ils ont les mêmes épreuves, les mêmes chagrins, ils rencontrent les mêmes difficultés sur leur chemin de tous les jours ; c’est pourquoi le monde ne les connaît pas, parce qu’il ne le connaissait pas. Il y a un grand changement en eux, ils ont été amenés des ténèbres à la merveilleuse lumière de Dieu ; ils ont reçu l’Esprit d’adoption par lequel ils crient : «Abba, Père» ; ils ont le ciel lui-même en vue avec le retour du Seigneur ; mais toutes ces choses ne sont saisies et l’on n’en jouit que par la foi. Elles ne sont rien pour l’oeil de l’homme naturel, car ces choses ne sont pas encore manifestées.
Mais Jean nous transporte au temps où elles le seront, c’est-à-dire à la manifestation du Seigneur, car ce n’est pas à la venue de Christ pour son Église que l’apôtre fait allusion (quoique ce soit alors que les croyants lui seront faits semblables), mais à l’apparition future de Christ dans ce monde. La raison se trouve dans son sujet même. Ici-bas, les enfants de Dieu sont pour ainsi dire dans une condition cachée, et c’est ici qu’ils seront manifestés dans leur pleine conformité à Christ, quand il viendra pour être glorifié dans ses saints et admiré dans tous ceux qui auront cru (2 Thes. 1:10). C’est à cela que le Seigneur pense, quand il dit : «Et la gloire que tu m’as donnée, je la leur ai donnée, afin qu’ils soient un, comme nous sommes un ; moi en eux, et toi en moi ; afin qu’ils soient consommés en un, et que le monde connaisse que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé» (Jean 17:22-23). Le monde connaîtra alors, parce qu’il verra Christ révélé en gloire et les saints manifestés dans la même gloire que lui.
Il nous est donc clairement enseigné que, dans notre condition future, nous serons comme Christ. Qu’est-ce que cela peut signifier ? En rapprochant, de ce dernier, les deux passages déjà cités (Rom. 8:29 ; 2 Cor. 3:18), on peut répondre en premier lieu que, à la fin, les enfants de Dieu seront dans une pleine conformité morale avec Christ. Comme nous l’avons montré, c’est ce modèle que Dieu a toujours eu devant lui ; et l’on peut remarquer, une fois de plus, que puisque nous ne serons jamais moralement comme Christ jusqu’à ce que nous le voyons face à face, il ne peut rien y avoir maintenant qui ressemble à une perfection absolue, — nous l’attendons encore ; il faut toutefois ajouter qu’il n’y a pour le croyant aucune nécessité de pécher. De fait, il pèche, et Dieu, dans sa grâce, nous a donné Christ comme avocat pour répondre à ce besoin. Il en est ainsi, de fait, mais ce n’est pas une raison pour tolérer le péché, et tout notre désir devrait être de croître, chaque jour, dans la ressemblance avec Celui que nous attendons.
Il y a autre chose encore. Nos corps eux-mêmes seront semblables au corps glorifié de Christ. L’apôtre Paul dit : «Notre conversation est dans les cieux, d’où aussi nous attendons le Seigneur Jésus-Christ, qui transformera le corps de notre abaissement afin qu’il soit rendu conforme au corps de sa gloire, selon l’opération de cette puissance par laquelle il peut même s’assujettir toutes choses» (Phil. 3:20-21). Nous lisons aussi dans 1 Cor. 15:49 : «Comme nous avons porté l’image de celui qui est poussière, nous porterons aussi l’image du céleste». C’est-à-dire que, comme nos corps sont maintenant semblables à celui du premier homme qui est de la terre et terrestre, après le retour du Seigneur ils seront semblables à celui du second homme qui est le Seigneur lui-même. C’est la puissance divine qui opérera ce changement. Notre conformité morale avec Christ s’opère maintenant et sera complète quand nous le verrons face à face. La conformité de nos corps à son corps de gloire sera accomplie à son retour. C’est ainsi que l’apôtre dit : «Voici, je vous dis un mystère : Nous ne nous endormirons pas tous, mais nous serons tous changés : en un instant, en un clin d’oeil, à la derrière trompette, car la trompette sonnera et les morts ressusciteront incorruptibles, et nous, nous serons changés. Car il faut que ce corruptible revête l’incorruptibilité, et que ce mortel revête l’immortalité. Or, quand ce corruptible aura revêtu l’incorruptibilité, et que ce mortel aura revêtu l’immortalité, alors la parole qui est écrite s’accomplira : La mort a été engloutie en victoire» (1 Cor. 15:51-54).
Il y a deux classes indiquées dans ce passage, ceux qui seront changés et ceux qui seront ressuscités d’entre les morts, et dans une autre épître nous avons d’autres détails sur cette puissante et divine opération. Nous lisons dans les Thessaloniciens : «Car si nous croyons que Jésus mourut, et qu’il est ressuscité, de même aussi Dieu amènera ceux qui se sont endormis par Jésus avec lui. Car nous vous disons ceci par la parole du Seigneur : que nous les vivants, qui demeurons jusqu’à la venue du Seigneur, nous ne devancerons aucunement ceux qui se sont endormis. Car le Seigneur lui-même, avec un cri de commandement, et une voix d’archange, et la trompette de Dieu, descendra du ciel et les morts en Christ ressusciteront premièrement ; puis nous, les vivants qui demeurons, nous serons ravis ensemble avec eux dans les nuées à la rencontre du Seigneur en l’air ; et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur» (1 Thes. 4:14-17). Rien de plus évident que ce qui nous est enseigné là. Quand le Seigneur descendra du ciel, il appellera hors de leur tombeau tous ces saints endormis, — tous ceux qui sont morts avant qu’il vienne ; et quand cette grande armée sortira, tous seront revêtus d’un corps incorruptible, — corps semblable au corps glorifié de Celui qui les a appelés ; et alors tous les saints qui vivront à ce moment sur la terre, seront changés en un instant, — un puissant courant de vie passera soudain dans leur corps, et ce qui était mortel auparavant sera revêtu de l’immortalité ; ce qui est mortel sera absorbé par la vie, car ils seront revêtus de leur «domicile qui est du ciel» (2 Cor. 5:3). Après cela, tous ensemble seront enlevés dans les nuées, pour aller à la rencontre du Seigneur en l’air. Il vient du ciel et là comme un puissant aimant, si l’on ose dire ainsi, il attire à lui tous les siens, soit qu’ils dorment ou qu’ils soient vivants, afin de les avoir avec lui. La rédemption par le sang est désormais consommée dans la rédemption par la puissance (Rom. 8:23), et le Seigneur lui-même voit le fruit du travail de son âme et en est satisfait. Il a d’autres fruits de rédemption à recueillir encore pendant le millénium ; mais quant à ce qui concerne l’Église et les saints des précédentes dispensations, son oeuvre avec toutes ses conséquences est dès lors achevée, et les desseins de Dieu à leur égard ont eu leur plein développement, car chacun de ceux qui forment les myriades des saints a été rendu conforme à l’image de son Fils.
Être comme Christ dans la gloire, c’est donc être comme lui, esprit, âme et corps. Mais en disant cela, il faut se souvenir que nous parlons de lui comme de l’homme glorifié. Il demeure toujours unique, dans sa dignité divine et essentielle comme Fils éternel. Pendant toute l’éternité, il n’est jamais moins que Dieu, quoique en même temps il se soit abaissé jusqu’à devenir un homme ; et en conservant sa supériorité sur l’homme, il reste l’Homme glorifié. Le mystère de sa personne demeure, il est toujours le Dieu-homme. Mais c’est comme homme qu’il est le premier-né entre plusieurs frères. Quelle précieuse et merveilleuse assurance de savoir qu’il n’a pas eu honte de nous appeler ses frères, mais qu’il trouve aussi sa joie à nous associer pour toujours avec lui ! Et que de difficultés n’a-t-il pas dû surmonter pour exécuter ce dessein de Dieu et pour assurer ce résultat béni ! Il y avait les peines de sa vie sur la terre, ses épreuves et ses tentations, l’agonie de la croix quand il fut abandonné de Dieu, sa mort et sa résurrection ; mais quoique il n’y ait jamais eu, et qu’il ne puisse jamais y avoir aucune souffrance comme la sienne, il sera complètement satisfait, quand il contemplera la glorieuse issue de toutes les souffrances qu’il a endurées pour accomplir cette oeuvre de la rédemption, et qu’il se présentera à lui-même son Église glorieuse n’ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable.
Voilà donc la condition future des enfants de Dieu — nous serons tous comme Christ. Reste la question de la demeure des enfants de Dieu. Le Seigneur lui-même nous en a parlé. Avant de quitter ses disciples affligés de la perspective qu’ils avaient devant eux, il leur dit ces paroles destinées à les consoler et à les instruire : «Que votre coeur ne soit pas troublé ; vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père ; s’il en était autrement, je vous l’eusse dit : car je vais vous préparer une place. Et si je m’en vais, et que je vous prépare une place, je reviendrai, et je vous prendrai auprès de moi ; afin que là où je suis, moi, vous, vous soyez aussi» (Jean 14:1-3). Il nous est ainsi révélé que la maison du Père est notre future demeure. Dans le chapitre précédent, nous avons vu que c’est notre privilège d’habiter là dès maintenant en esprit, mais ici, nous voyons que nous y serons en réalité, ayant notre place dans ces plusieurs demeures dont parle le Seigneur.
Remarquons particulièrement deux ou trois points de ce passage qui nous est bien connu, afin que nous puissions mieux comprendre combien notre future demeure est un lieu béni. Ce n’est pas une faible preuve de la tendresse de notre Seigneur, qu’il dise à ses disciples : «S’il en était autrement, je vous l’eusse dit» (Jean 14:2). Ils devaient s’être formé, relativement à la maison du Père, certaines idées que le Seigneur aurait rectifiées, s’ils avaient été dans l’erreur. Oui, dit-il, il en est bien ainsi, il y a plusieurs demeures, il y a assez d’espace pour tous ; aucun des miens ne sera exclu. Et s’ils se demandaient, dans leurs doutes et leurs craintes, pourquoi il devait s’en aller et les laisser seuls dans un monde où ils seraient entourés d’ennemis acharnés, ils l’entendaient leur dire : «Je vais vous préparer une place» (Jean 14:2). Jusqu’à ce qu’il se fût présenté là après avoir accompli la rédemption, jusqu’à ce qu’il eût pris sa place comme homme dans la gloire de Dieu, pas un des saints ne pouvait y entrer. En toutes choses, c’est à lui qu’appartient la prééminence ; et non seulement cela, mais jusqu’à ce que, non par le sang des boucs et des veaux, mais par son propre sang, il soit entré une fois dans le lieu saint, ayant obtenu une rédemption éternelle, la place n’était pas préparée. Mais du moment qu’il était entré, et qu’il s’était assis sur le trône de son Père, tout était prêt. Étienne mourant le vit debout à la droite de Dieu, parce que même alors, si cette nation coupable des Juifs s’était repentie, il serait revenu pour les introduire dans les bénédictions promises ; mais rejetant le témoignage de l’Esprit, comme ils avaient rejeté et crucifié Christ lui-même, il reprit, pour ainsi dire, sa place. Mais il pouvait dire encore : «Je viens bientôt», précisément pour la raison que la place étant préparée, il n’y avait rien, autant que nous le voyons par les Écritures, qui l’empêchât de revenir d’un moment à l’autre pour prendre les siens à lui.
La place est préparée, et maintenant il attend seulement de venir pour nous en mettre en possession. Il aime à nous voir toujours dans l’attitude de l’attente. Assis à la droite de Dieu, il nous attend ; car le désir de son coeur est de nous avoir avec lui ; et tandis que nous sommes ici-bas dans le désert, il désire que nous l’attendions, et sûrement le besoin de nos coeurs pour répondre à son ineffable amour, sera d’être avec lui. «L’Esprit et l’Épouse disent : Viens» ; c’est la seule vraie attitude de l’Église et le seul désir qui convienne aux saints. Comme nous le trouvons à la fin du livre de l’Apocalypse, quand le Seigneur dit : «Oui, je viens bientôt» (Apoc. 22:20), son serviteur répond : «Amen ! viens, Seigneur Jésus !» Cette vive attente est uniquement une affaire de coeur. Si le Seigneur lui-même est notre trésor, nos coeurs seront avec lui, et toute notre espérance sera de le voir face à face. Comme Marie au sépulcre, rien alors ne satisfera nos coeurs que la présence de Celui qui possède et absorbe nos affections. Sans lui le monde n’est, pour nous, qu’un vaste sépulcre ; et toute cette scène est marquée du sceau de la mort. D’autres peuvent être préoccupés de leurs demeures terrestres, trouver leur bien-être ici-bas, mais aucune place sur la terre ne nous satisfera, aussi longtemps que Christ lui-même est absent. Comme des pèlerins et des étrangers, nous traverserons cette terre desséchée et sans eau, ayant les reins ceints, les lampes allumées, et étant nous-mêmes comme des serviteurs qui attendent leur Maître.
Ce que nous dit le Seigneur est bien propre à augmenter notre désir de son retour : «Si je m’en vais, et que je vous prépare une place, je reviendrai, et je vous prendrai auprès de moi ; afin que là où je suis, moi, vous, vous soyez aussi» (Jean 14:3). C’est lui-même qu’il présente à nos âmes ; lui-même dans son ineffable amour comme notre objet ; lui-même dans ses perfections sans pareilles, comme venant pour nous avec tout l’attrait qu’exerce sa personne adorable, comme celui avec lequel nous devons passer toute l’éternité. Si l’on saisissait Christ présenté de cette manière, le désir de son retour ne pourrait manquer d’être réveillé dans les coeurs où il n’existait pas auparavant, et d’être ravivé et soutenu chez ceux dans lesquels il se serait affaibli.
Si nous passons maintenant à la demeure elle-même, il y a peu de chose à ajouter. Les pensées de Dieu ne sont pas les pensées de l’homme. En tout temps, l’homme a cherché à se représenter le lieu qu’habiteront les enfants de Dieu, et la conséquence, comme on pouvait s’y attendre, a été qu’il s’est efforcé de peindre les traits extérieurs de ce lieu, laissant nécessairement de côté son caractère essentiel et ce qui en fait un lieu de bénédiction. L’imagination ne peut saisir ni décrire les choses de Dieu, aussi ne réussit-elle qu’à montrer son incapacité et son impuissance quand elle cherche à pénétrer leur caractère. Comme le dit Jérémie : «Les sages sont couverts de honte, ils ont peur et sont pris ; voici, ils ont méprisé la parole de l’Éternel, et quelle sagesse ont-ils ?» (Jér. 8:9).
Prenant donc la parole de Dieu seule, voyons ce qui nous est révélé de notre future demeure. Quant au lieu, très peu de chose ; mais, de tout ce que peut désirer l’homme spirituel, assez pour satisfaire nos plus vastes désirs. Tout cela est contenu dans deux expressions. La première, c’est que c’est la maison du Père. Et qui pourrait développer tout ce qui est contenu dans ce mot béni ? Un enfant a été longtemps absent de la maison paternelle, il est sur le point d’y rentrer, n’est-ce pas assez pour lui de savoir que c’est la maison paternelle ? S’inquiétera-t-il de ses dimensions, de sa forme, de sa situation ? Non, la seule chose qu’il a dans l’esprit, c’est qu’il va dans la maison de son père, dans son home. C’est là ce qui lui donne son caractère, ce qui en fait pour lui un lieu de bénédiction. Les détails de sa position ou des environs n’ont que peu d’importance pour lui. La maison de son père, c’est là ce qui constitue pour lui son chez-soi, et le coeur de ses parents est la source de ses délices. Il en est ainsi des enfants de Dieu. L’assurance qu’il vont dans la maison du Père, qu’il y a une place déjà préparée dans ces «plusieurs demeures», répond à tout ce qu’ils peuvent désirer. Là, ils le savent, il y a de quoi pourvoir abondamment à tous leurs besoins, quels qu’ils soient ; car c’est là que se manifeste tout l’amour du Père — c’est là que toutes les affections de son coeur se répandent sur tous ses enfants, pour les bénir et les rendre éternellement heureux.
La seconde expression qu’il nous est si précieux de relever, c’est ce mot : Avec Christ. Comme dit le passage : «Afin que là où je suis, moi, vous, vous soyez aussi» (Jean 14:3). Cette parole est toujours l’espérance présentée à notre âme ; elle est proprement l’espérance chrétienne. Le Seigneur disait au brigand crucifié à côté de lui : «Aujourd’hui tu seras AVEC MOI dans le paradis». L’apôtre dit : «Déloger et être AVEC CHRIST, cela est de beaucoup meilleur» (Phil. 1:23) ; et aussi : «Nous aimons mieux être absents du corps et être présents AVEC LE SEIGNEUR» (2 Cor. 5:8). Et qu’est-ce que nos âmes pourraient désirer de plus pour exprimer le parfait bonheur qui règne dans la maison du Père, que ces mots : Être avec Christ ! Nulle joie n’est comparable à la réalisation de sa présence. Être avec lui en esprit, c’est maintenant notre plus grand privilège, mais nous serons là avec lui, dans une communion perpétuelle que rien ne troublera. Il soupera continuellement avec nous et nous avec lui. Dans la promesse faite à celui qui vaincra en Philadelphie, il nous permet de jeter un coup d’oeil sur le bonheur dont nous jouirons par notre association éternelle avec lui. Il dit : «Celui qui vaincra, je le ferai une colonne dans le temple de mon Dieu, et il ne sortira plus jamais dehors ; et j’écrirai sur lui le nom de mon Dieu, et le nom de la cité de mon Dieu, de la nouvelle Jérusalem, qui descend du ciel d’auprès de mon Dieu, et mon nouveau nom» (Apo. 3:12). Cette promesse tire son caractère spécial de celui du livre qui la renferme, aussi bien que des circonstances au milieu desquelles se trouvaient les saints de Philadelphie. Mais le point sur lequel nous désirons appeler l’attention, c’est l’association du vainqueur avec Christ. C’est le nom de «mon» Dieu, le nom de la cité de «mon» Dieu et «mon» nouveau nom. Et c’est là ce qui fait la joie de Christ lui-même, comme aussi la nôtre. Sa joie, c’est de nous avoir pour toujours avec lui, et la nôtre d’être toujours avec lui.
Telle est la perspective que la parole de Dieu déroule devant ses enfants. Nous n’avons guère de détails révélés sur notre demeure dans la maison du Père. Il nous est dit que nous serons comme Christ et avec Christ ; nous ne pouvons pas désirer en savoir davantage. Un seul passage lève un peu le voile qui nous cache, maintenant, l’état éternel. Il nous montre deux choses : la première, que l’Église sera le tabernacle de Dieu ; la seconde, que nous ne serons pas les seuls, il y aura d’autres hommes encore, les saints des autres dispensations. Voici le passage qui parle de leur condition : «Voici, l’habitation de Dieu est avec les hommes, et il habitera avec eux ; et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux, leur Dieu. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux ; et la mort ne sera plus ; et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni peine, car les premières choses sont passées» (Apo. 21:3-4). C’est Dieu qui remplit ici la scène, Dieu dans tout ce qu’il est comme Père, Fils et Saint Esprit. Comme c’est l’état éternel, le Fils lui-même est maintenant assujetti à Celui «qui lui a assujetti toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous» (1 Cor. 15:28). Le Fils, comme Homme glorifié, est identifié pour toujours avec ses frères, c’est pourquoi Dieu lui-même remplit tout le champ de notre vision dans cette description. Les hommes qui jouiront de cette bénédiction seront bénis de deux manières. Positivement, en ce qu’ils auront Dieu lui-même demeurant avec eux, qu’ils seront son peuple, et que Dieu lui-même sera avec eux, — leur Dieu. Négativement, en ce qu’aura cessé tout ce qui causait leur souffrance pendant qu’ils étaient dans ce monde de douleur. Dieu a été leur consolateur ; il a essuyé leurs larmes. Quelle infinie tendresse renferme cette expression : La main de Dieu essuie leurs larmes, il les essuie pour toujours ! Leurs larmes, en effet, ne doivent jamais revenir, car la mort ne sera plus. «Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort a passé à tous les hommes, en ce que tous ont péché» (Rom. 5:12). Désormais, l’Agneau de Dieu a ôté le péché du monde. Une fois, dans la consommation des siècles, il est apparu pour l’abolition du péché par le sacrifice de lui-même, et désormais, sur le fondement de ce sacrifice accompli, Dieu l’a ôté de sa vue pour toujours ; et par ce même sacrifice la mort a été pour toujours engloutie en victoire pour les heureux habitants de cette scène. Une fois qu’auront disparu le péché et la mort, sources de toutes nos douleurs dans cette vie, il ne peut plus y avoir de souffrance, de deuil ni de peine. Non, les premières choses sont passées. La scène elle-même est parfaite, comme étant l’oeuvre de Dieu lui-même. La justice y habite ; et les perfections de Dieu qui se montrent en plein, sont la source d’une joie éternelle pour son peuple racheté. Toutes choses sont faites nouvelles ; et «celui qui vaincra héritera de ces choses ; et je lui serai Dieu, et lui me sera fils» (Apo. 21:7).