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Un peuple pour Son Nom – Partie 8
Actes 18 à 20
Traduit de l’allemand, de CSV Verlag, 2016
Chr. Briem
Table des matières abrégée :
2 Le troisième voyage missionnaire.
3 Paul à Éphèse — Actes 19:1-40
4 Le voyage de retour vers Milet — Actes 20:1-38
Table des matières détaillée :
1.2 Paul chez Aquilas et Priscilla — 18:2-3
1.2.1 Il est plus heureux de donner que de recevoir
1.2.2 « Avec beaucoup de tremblements » — 18:4-6 (1 Cor. 2:3-5)
1.2.3 Un grand peuple dans cette ville — 18:7-11
1.3 Paul et Gallion — 18:12-17
1.4 Le départ de Corinthe et la fin du voyage — 18:18-22
2 Le troisième voyage missionnaire.
2.1 Paul à Éphèse — Actes 18:23-19:40
2.1.1 Affermissement des disciples — 18:23
3 Paul à Éphèse — Actes 19:1-40
3.1 Les douze disciples de Jean le Baptiseur — 19:1-7
3.2 Ministère à Éphèse — 19:8-10
3.3 Des miracles extraordinaires — 19:11-12
3.4 Les Juifs exorcistes — 19:13-17
3.5 Des consciences atteintes — 19:18-20
3.6 Des hésitations de cœur — 19:21-22
3.7 L’orfèvre Démétrius — 19:23-27
3.8 Le soulèvement à Éphèse — 19:28-34
3.9 Une intervention intelligente — 19:35-41
4 Le voyage de retour vers Milet — Actes 20:1-38
4.1 À travers la Macédoine et la Grèce en direction de la Troade — 20:1-6
4.2 La fraction du pain et le service de la Parole — 20:7-12
4.3 Le voyage de Troade à Milet — 20:13-16
4.4 Le discours de Paul devant les anciens d’Éphèse — 20:17
4.5 Paul, son état d’esprit et sa fidélité dans le ministère — 20:18-21
4.6 L’attente de souffrances. Différentes voies du ministère — 20:22-27
4.7 Exhortations aux surveillants — 20:28
4.8 Avertissements des dangers du dehors et du dedans — 20:29-30
4.8.2 Pas de succession apostolique
4.8.5 Les mauvaises doctrines qui favorisent le déclin
4.9 La parole d’adieu — 20:31-35
4.9.1 Actes 20:31-32 — Recommandés à Dieu et à la Parole de Sa grâce
Au ch. 17 des Actes s’est poursuivi le deuxième voyage missionnaire de l’apôtre Paul avec ses étapes à Thessalonique, Bérée et Athènes. Au premier verset du ch. 18, la scène d’activité de l’apôtre passe d’Athènes à Corinthe.
« Après cela, étant parti d’Athènes, il vint à Corinthe » (Actes 18:1).
Paul prit congé d’Athènes de son propre chef, personne ne l’en ayant chassé. Manifestement il voyait là sa mission terminée, et il dirigea alors ses pas vers Corinthe, la capitale de l’Achaïe, toute proche. Au nord il y avait l’autre province romaine, la Macédoine, avec Thessalonique comme capitale.
Quel contraste entre ces deux champs d’activité de l’apôtre, celui d’Athènes et celui de Corinthe ! L’une de ces villes était renommée par ses philosophes, et l’autre par sa débauche et son relâchement des mœurs devenu proverbial. Corinthe était la plus corrompue des villes de Grèce. En même temps, au temps de l’apôtre Paul, cette ville était une ville commerçante, riche et luxueuse, avec une population fortement mélangée. Corinthe était située sur la grande route commerçante joignant l’Asie à Rome, et les bateaux de toutes les régions accostaient à ses deux ports ; de ce fait on pouvait y entendre des langues et dialectes très variés et y rencontrer les gens de tous les pays possibles.
C’est de Corinthe que l’apôtre Paul écrivit ses deux épîtres aux Thessaloniciens et l’épître aux Romains. Le grand nombre de noms latins, à la fin de l’épître aux Romains, souligne qu’il y avait à Corinthe une importante colonie romaine. Paul y resta un an et demi.
« Et ayant trouvé un Juif, nommé Aquilas, originaire du Pont, tout récemment venu d’Italie, ainsi que Priscilla sa femme (parce que Claude avait commandé que tous les Juifs sortissent de Rome), il alla à eux ; et parce qu’il était du même métier, il demeura avec eux et travaillait, car leur métier était de faire des tentes » (18:2, 3).
C’est ici notre première rencontre dans l’Écriture avec le couple pieux Aquilas et Priscilla. Aquilas lui-même était originaire du Pont, une région au Nord de la Galatie, au bord de la mer noire ; il avait ensuite vécu à Rome ; puis en raison d’une ordonnance de l’empereur Claude obligeant tous les Juifs de quitter Rome, il avait dû s’en aller. Et c’est ainsi qu’avec sa femme Priscilla, il était venu d’Italie à Corinthe où l’apôtre Paul les rencontra.
Avant de nous occuper de la suite des événements, suivons à la trace ce que l’Écriture Sainte dit de ce couple. À Corinthe ils fournirent un logement et un foyer à l’apôtre et à ses collaborateurs pour tout le temps de leur séjour. Quand Paul quitta Corinthe après y avoir achevé son travail, il partit pour Éphèse accompagné de Priscilla et Aquilas (18:18, 19). Un peu plus tard ils rencontrèrent là Apollos, et purent lui être en aide dans le domaine spirituel (18:24-26). Ensuite, nous apprenons de la première épitre aux Corinthiens qu’ils étaient encore à Éphèse au temps de la rédaction de cette épître, et que l’assemblée locale se réunissait « dans leur maison » (1 Cor. 16:8, 19). Manifestement ils rentrèrent ensuite à Rome où nous retrouvons de nouveau l’assemblée « dans leur maison » (Rom. 16:3-5). Dans ce passage l’apôtre Paul ajoute que les deux époux avaient exposé leur propre cou pour sa vie. Dans sa dernière épître, l’apôtre Paul âgé fait saluer encore une fois Prisca (forme abrégée de Priscilla) et Aquilas par l’intermédiaire de Timothée (2 Tim. 4:19). À ce moment-là, ils séjournaient de nouveau à Éphèse comme Timothée (1 Tim. 1:3).
L’amitié de l’apôtre avec ce couple exquis commença ainsi à Corinthe, et dura jusqu’à sa mort. Des relations merveilleuses étaient nées, comme seule la grâce de Dieu est capable d’en nouer. Quelle trace bénie ces deux « compagnons d’œuvre dans le Christ Jésus » (Rom. 16:3) ont laissé à chaque étape de leur pèlerinage, — à Corinthe, à Éphèse, à Rome et encore une fois à Éphèse ! Si dans la mention du couple, Priscilla est plusieurs fois nommée en premier, cela doit bien sûr se comprendre comme une indication de la haute estime spirituelle en laquelle l’apôtre la tenait.
La question de savoir si Aquilas et Priscilla vinrent à la foi au contact de l’apôtre Paul, ou bien s’ils avaient trouvé le salut auparavant à Rome, n’est pas clarifiée avec certitude. Certains éléments parlent en faveur de ce qu’ils avaient déjà entendu l’évangile à Rome, et qu’ils l’avaient saisi là par la foi. Car malgré la relation intime qui les liait à l’apôtre Paul, il ne parle jamais d’eux comme de ses enfants dans la foi. S’ils étaient venus à la foi suite à leur contact avec Paul, alors nous nous serions attendus à en avoir quelque allusion de la part de l’historien dans ce passage d’Actes 18.
Le fait qu’Aquilas n’est pas décrit comme un disciple, mais comme « un certain Juif » ne pose pas de difficulté. En effet dans ces temps du commencement, les chrétiens juifs n’étaient pas distingués des Juifs ordinaires, de sorte que les premiers subissaient le même sort que les seconds. D’autre part l’origine de ce Juif particulier est précisée : Aquilas étaient natif du Pont. Nous trouvons quelque chose de semblable plus tard chez l’apôtre Paul. Il se désigne également une ou deux fois comme un Juif, et alors il donne aussi son origine : « … de Tarse en Cilicie » (21:39 et 22:3). Ainsi par naissance Aquilas était un Juif originaire du Pont.
Nous apprenons ici pour la première fois le fait que l’apôtre Paul pratiquait le même artisanat que ses hôtes, la fabrication des tentes, et qu’il travaillait effectivement dans cette profession. C’est ce que signifie « il demeura avec eux et travaillait ». La forme du verbe à l’imparfait dans cette phrase montre que cet état de chose a duré. Quel tableau se déroule ici à nos yeux ! Paul, le grand apôtre des nations, assure lui-même sa subsistance en travaillant de ses mains, y compris pour ses collaborateurs ! Cela ne nous rappelle-t-il pas l’état d’esprit de Celui qui n’est pas venu pour être servi, mais pour servir ? Par contre seul le Seigneur pouvait en outre donner sa vie librement en rançon pour beaucoup (Marc 10:45).
Si nous nous posons la question des mobiles d’un tel dévouement de l’apôtre, le mieux c’est de remonter au temps où il était à Thessalonique. Dans son séjour là, parmi les croyants, Paul leur avait été « tendrement affectionné » (1 Thess. 2:8) ; et il leur écrit plus tard : « vous vous souvenez, frères, de notre peine et de notre labeur ; c’est en travaillant nuit et jour pour n’être à charge à aucun de vous, que nous vous avons prêché l’évangile de Dieu » (1 Thess. 2:9). Dans sa deuxième épitre également, il revient encore sur la peine et la fatigue avec lesquelles il s’était dépensé au milieu d’eux « pour n’être à charge à aucun d’eux » ; et il ajoute : « non que nous n’en ayons pas le droit, mais afin de nous donner nous-mêmes à vous pour modèle, pour que vous nous imitiez » (2 Thess. 3:8, 9). Non il n’avait jamais mangé le pain de personne, bien qu’il en eût le droit.
Un tableau très semblable s’offre à nous à Corinthe. Si l’apôtre travaillait ici comme faiseur de tentes, il le faisait pour « rendre l’évangile exempt de frais » pour ses auditeurs (1 Cor. 9:18). Certes, il insiste aussi auprès des Corinthiens sur ce que le Seigneur a ordonné que ceux qui annoncent l’évangile « vivent de l’évangile ». Mais il n’a pas fait usage de son droit de vivre de l’évangile (1 Cor. 9:14, 18). Combien sont touchantes ces paroles : « nous supportons tout, afin de ne mettre aucun obstacle à l’évangile du Christ » (1 Cor. 9:12) ! Dans sa deuxième épitre, il reparle de cette manière d’agir. Il leur demande : « Ai-je commis une faute en m’abaissant moi-même, afin que vous fussiez élevés, parce que je vous ai annoncé gratuitement l’évangile de Dieu ? J’ai dépouillé d’autres assemblées en recevant un salaire pour vous servir. Et me trouvant auprès de vous et dans le besoin, je n’ai été à charge à personne ; (car les frères venus de Macédoine ont suppléé à mes besoins) ; et je me suis gardé de vous être à charge en quoi que ce soit, et je m’en garderai » (2 Cor. 11:7-9). Le verset 12 montre qu’il avait aussi en vue ses opposants, pour leur ôter tout prétexte au mal.
Sa manière noble d’agir trouve un couronnement dans ses paroles d’adieu aux anciens d’Éphèse à Milet, quand il leur rappelle : « Je n’ai convoité ni l’argent, ni l’or, ni la robe de personne. Vous savez vous-mêmes que ces mains ont été employées pour mes besoins et pour les personnes qui étaient avec moi. Je vous ai montré en toutes choses, qu’en travaillant ainsi il nous faut secourir les faibles, et nous souvenir des paroles du Seigneur Jésus, qui lui-même a dit : Il est plus heureux de donner que de recevoir » (Actes 20:33-35).
Combien ce paragraphe est une prédication qui nous touche tous au cœur au sujet de donner et de recevoir !
« Et chaque sabbat, il discourait dans la synagogue et persuadait Juifs et Grecs. Et quand et Silas et Timothée furent descendus de Macédoine, Paul était étreint par la parole, rendant témoignage aux Juifs que Jésus était le Christ. Et comme ils s’opposaient et blasphémaient, il secoua ses vêtements et leur dit : Que votre sang soit sur votre tête ! Moi, je suis net : désormais je m’en irai vers les nations » (18:4-6).
L’apôtre a commencé son œuvre à Corinthe tout seul, comme il l’avait fait à Athènes. Sans Silas et Timothée, il n’est pas resté inactif, mais il commença à s’entretenir chaque sabbat dans la synagogue, pour convaincre Juifs et Grecs. Cette manière de procéder ne correspondait pas seulement à « son habitude » (Actes 17:2), mais aussi à la parole : « au Juif premièrement, et au Grec » (Rom. 1:16). Sans doute, l’Ancien Testament lui a souvent servi de base pour ses entretiens. Mais Paul a-t-il vraiment pu persuader ses auditeurs ? Or pour « persuader », il y a dans le texte original une forme verbale qu’on appelle l’imparfait conatif, qui exprime qu’on a tenté ou débuté une action sans nécessairement l’avoir achevé : il cherchait à persuader. Cela clarifie les faits. Quant aux Grecs, il s’agissait certainement de prosélytes qui, ici comme si souvent, étaient présents dans la synagogue.
Ensuite, quand Silas et Timothée arrivèrent de Macédoine (ce n’était pas exactement au même moment ni en provenance du même endroit), Paul fut étreint par la Parole, rendant témoignage aux Juifs que Jésus était le Christ. Manifestement il se mit maintenant à consacrer tout son temps à la Parole. Les Juifs, ses « frères » selon la chair (Rom. 9:3), lui tenaient spécialement à cœur, et la grande question était de savoir s’ils accepteraient Jésus comme le Christ, le Messie.
L’arrivée de ses deux compagnons d’œuvre dut vraiment « donner des ailes » à l’apôtre Paul. Il paraît avoir ressenti profondément que Corinthe n’était pas un champ de travail facile. Certains pensent que l’apôtre était au-dessus des craintes et des difficultés, et qu’il « planait » pour ainsi dire au-dessus de toutes les circonstances parce qu’il était revêtu de l’autorité divine. Certainement il se confiait avec foi dans son Seigneur, et il savait que le Seigneur serait auprès de lui et avec lui. Néanmoins au vu de la puissance de Satan, il ressentait toute l’urgence d’apporter la lumière éclatante de la révélation de Dieu au sein des ténèbres profondes où le chef de ce monde tenait les gens prisonniers. Et ainsi, c’est dans la conscience de son insuffisance qu’il avait commencé le travail dans cette forteresse de Satan, — « dans la faiblesse et dans la crainte et dans un grand tremblement ». Son discours et sa prédication n’avaient pas été en paroles persuasives de sagesse, mais « en démonstration de l’Esprit et de puissance, afin que afin que leur foi ne repose pas sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu » (1 Cor. 2:3-5). Cependant selon le jugement dépréciatif de plusieurs à Corinthe, sa présence corporelle n’était pas seulement « faible », mais son discours « méprisable » (2 Cor. 10:10).
Tout cela était propre à abaisser l’apôtre, et il avait bien besoin maintenant d’encouragement. La grâce de Dieu le lui accorda par l’arrivée de Silas et de Timothée. Jusque-là, il avait servi fidèlement le Seigneur sans eux. Cependant, la présence et la coopération de ces ouvriers dévoués procurait à l’apôtre un encouragement inestimable. En outre, Timothée put lui apporter de bonnes nouvelles des croyants de Thessalonique, de sorte que l’apôtre fut consolé à leur égard et il pouvait dire en se réjouissant : « car maintenant nous vivons, si vous tenez fermes dans le Seigneur » (1 Thess. 3:7, 8).
Beaucoup de choses parlent en faveur de ce que la première lettre aux Thessaloniciens a été écrite immédiatement après l’arrivée de ces deux missionnaires. Dans le souhait de bénédiction au début de l’épître, Paul s’associe aussi bien Sylvain (Silas) que Timothée. Et quand il s’agissait d’annoncer le Fils de Dieu parmi les Corinthiens, l’apôtre inclut aussi ces deux mêmes compagnons : le Fils de Dieu a été prêché au milieu de vous « par moi et par Sylvain et par Timothée » (2 Cor. 1:19).
L’effort accru pour rendre témoignage aux Juifs que Jésus était le Christ suscita la résistance acharnée des Juifs. Non seulement ils repoussèrent la Parole, mais ils se mirent à blasphémer. Là-dessus Paul secoua ses vêtements. Nous nous sommes déjà occupés de la signification symbolique de ce geste quand nous avons vu Paul et Barnabas à Antioche de Pisidie secouant la poussière de leurs pieds contre les Juifs (Actes 13:51). La poussière de leurs pieds ou de leurs vêtements restait pour ainsi dire en témoignage de ce qu’ils avaient entendu la Bonne Nouvelle et qu’ils l’avaient rejetée. Secouer ses vêtements a la même signification que secouer la poussière de ses pieds. La seule différence est que l’un est fait à l’intérieur d’une maison, tandis que l’autre est fait dehors.
Des paroles, combien solennelles, accompagnèrent ce comportement symbolique ! « Que votre sang soit sur votre tête ! Moi, je suis net : désormais je m’en irai vers les nations ». Il avait entièrement dégagé sa responsabilité, il avait tout essayé pour les amener au salut. Mais ils ne l’avaient pas voulu. Aussi un jugement de Dieu mérité allait les atteindre. Ils le mettaient eux-mêmes sur leur tête. Mais lui, envoyé de Dieu, répéterait ce qu’il avait fait avec Barnabas à Antioche de Pisidie (Actes 13:46) : il irait vers les nations. L’œuvre à Corinthe prenait par-là un grand tournant.
« Et étant parti de là, il entra dans la maison d’un nommé Juste qui servait Dieu, et dont la maison tenait à la synagogue » (18:7).
Paul quitta alors la synagogue et vint dans une maison attenante à la synagogue. Elle appartenait un prosélyte dénommé Juste, dont il est dit de lui qu’il rendait culte à Dieu [sens littéral de « servait Dieu »]. Cet homme avait le cœur ouvert à l’évangile de sorte qu’il ouvrit tout grand sa maison à Paul pour qu’il puisse continuer son travail parmi les Corinthiens.
C’était doublement avantageux. Premièrement Juste était lui-même un païen, ce qui limitait les réticences des autres gens des nations à suivre son invitation et à entrer dans sa maison. D’autre part malgré le départ solennel de l’apôtre, la proximité de la synagogue offrait aux Juifs et aux prosélytes qui le désiraient la possibilité d’un contact supplémentaire avec la Parole de Dieu.
C’est ainsi que le Seigneur fidèle veillait sur Son évangile et sur Ses serviteurs. Sa riche bénédiction ne fit pas défaut, comme la suite de l’œuvre à Corinthe le montre.
« Mais Crispus, le chef de synagogue, crut au Seigneur avec toute sa maison ; et plusieurs des Corinthiens l’ayant ouï, crurent et furent baptisés » (18:8).
Quel triomphe de la grâce de Dieu : le chef de synagogue lui-même Crispus vint à la foi au Seigneur ! Et non seulement lui, mais toute sa famille le suivit : « il crut au Seigneur avec toute sa maison ». Involontairement cela nous rappelle Lydie et « sa maison » (Actes 16:15), et le geôlier et « tous les siens » (Actes 16:33, 34). Chez Crispus aussi, la bénédiction ne vint pas sur lui seul, mais pareillement sur toute sa maison.
À la suite de cela, il est parlé de beaucoup de Corinthiens venus à la foi, et il est expressément indiqué qu’ils furent aussi baptisés. Cependant cette indication manque pour Crispus et sa maison. Or nous savons que c’est l’apôtre Paul lui-même qui a baptisés Crispus avec quelques autres peu nombreux (1 Cor. 1:14-16). Dans la suite, Paul a été content et reconnaissant en raison des divisions, que Dieu ait ainsi conduit les choses « afin que personne ne puisse dire qu’il avait baptisé pour le nom de Paul ». Il n’est pas spécialement mentionné que la maison du chef de synagogue ait passé par le baptême, et ait reçu le signe d’être disciple, mais nous pouvons admettre qu’il en fut ainsi. Sûrement que dans ce cas Paul ne fut pas l’instrument utilisé par le Seigneur.
Par la bénédiction du Seigneur, Son œuvre à Corinthe fit des progrès remarquables, car beaucoup de Corinthiens « entendirent », « crurent » et « furent baptisés ». C’est toujours l’ordre divin, quand il s’agit de l’annonce et de la réception de la Bonne Nouvelle (Marc 16:15, 16). Il est intéressant de remarquer que les deux verbes ‘croire’ et ‘être baptisés’ sont à l’imparfait, ce qui signifie une répétition du processus : la foi et le baptême de beaucoup de gens eurent lieu sur un long espace de temps, peu à peu, selon que les circonstances exigeaient, et selon que les gens venaient à la foi individuellement. C’était un flux constant de nouveaux amis qui provenaient certainement surtout des Grecs. C’est ainsi que naquit « l’assemblée de Dieu qui est à Corinthe » (1 Cor. 1:2).
Bien que l’œuvre avançât de manière extrêmement bénie, le Seigneur qui connaît les cœurs, estima nécessaire de donner un encouragement particulier à son fidèle serviteur Paul — un fortifiant qui dépassait ce dont il avait fait l’expérience avec ses deux collaborateurs.
« Or le Seigneur dit de nuit, dans une vision, à Paul : Ne crains point, mais parle et ne te tais point, parce que je suis avec toi ; et personne ne mettra les mains sur toi pour te faire du mal, parce que j’ai un grand peuple dans cette ville. Et il demeura là un an et six mois, enseignant parmi eux la Parole de Dieu » (18:9-11).
L’apôtre Paul bénéficia à plusieurs reprises du privilège d’être conduit directement par une vision dans l’exécution de l’œuvre du Seigneur (comp. 16:9 ; 22:18 ; 27:23). C’est le cas ici.
Les premières paroles du Seigneur à Paul (« Ne crains point, mais parle et ne te tais point »), se composent du point de vue grammatical de deux impératifs présents, tandis que dans le « ne te tais point », il y a un aoriste. En soi, ces trois instructions du Seigneur à Paul se comprennent sans qu’il y ait rien à ajouter. Cependant ces différentes formes verbales, expriment en grec des finesses qui sont perdues en français ; nous pouvons les présenter de la manière suivante :
1. Paul avait déjà eu de la crainte, cependant il ne devait pas continuer à craindre.
2. Il devait bien plutôt continuer à parler et
3. en principe, et une fois pour toute, il devait ne pas se taire.
Voilà donc les trois points que le Seigneur donne en premier comme encouragement à Son serviteur. Cependant nous pouvons nous demander pourquoi le cœur de l’apôtre était rempli de crainte. C’est que, maintenant qu’une assemblée était fondée à Corinthe, il aurait pu penser que c’était le moment de chercher un autre champ d’activité, avant que l’hostilité des Juifs ne recommence contre lui personnellement. Les raisons du Seigneur pour Ses directives données à Paul traitent aussi ce côté : « Car Je suis avec toi ; et personne ne mettra la main sur toi pour te faire du mal ». Quel baume ces paroles ont dû être pour le cœur troublé du serviteur ! Selon la volonté du Seigneur, il devait poursuivre son séjour à Corinthe, et il devait continuer à parler malgré les attaques possibles, et ne devait pas se laisser pousser au silence. « Car je suis avec toi ». Cela suffisait.
Mais le Seigneur donne encore une deuxième raison pour que Paul poursuive l’œuvre à Corinthe : « parce que j’ai un grand peuple dans cette ville ». Dans sa parfaite préconnaissance, Il savait que beaucoup de Corinthiens viendraient et recevraient le salut en Christ. Le Bon Berger connaissait les brebis que le Père Lui avait données dans cette ville. Et ainsi Il tenait la porte ouverte et personne ne pourrait la fermer, pas même les pires ennemis.
De notre temps aussi le Seigneur a les clefs dans Sa main. Il ne cesse pas de conduire Ses serviteurs qui désirent Le servir avec fidélité, et Il leur ouvre une porte pour le service, « une porte que Lui ouvre et nul ne fermera » (Apoc. 3:7). Si nous désirons Le servir, Il nous parlera au cœur, Il rendra nos circonstances favorables, et nous aplanira le chemin.
L’apôtre dut être extrêmement consolé par la vision, car il resta dix-huit mois entiers à Corinthe, plus longtemps que dans aucune ville précédente, et il enseigna parmi eux la Parole de Dieu malgré toutes les résistances.
Le chroniqueur en vient maintenant à parler d’une action hostile contre Paul, tout en montrant la bonté du Seigneur et Maître qui veille sur Sa promesse : « personne ne mettra la main sur toi pour te faire du mal ».
« Mais pendant que Gallion était proconsul d’Achaïe, les Juifs, d’un commun accord, s’élevèrent contre Paul et l’amenèrent devant le tribunal, disant : Cet homme persuade aux hommes de servir Dieu contrairement à la loi. Et comme Paul allait ouvrir la bouche, Gallion dit aux Juifs : S’il s’agissait de quelque injustice ou de quelque méchante fourberie, ô Juifs, je vous supporterais à bon droit ; mais si ce sont des questions de paroles, et de noms, et de votre loi, vous y mettrez ordre vous-mêmes, car moi, je ne veux pas être juge de ces choses. Et il les chassa de devant le tribunal. Et ayant tous saisi Sosthène, le chef de synagogue, ils le battaient devant le tribunal ; et Gallion ne se mettait pas en peine de tout cela » (18:12-17).
La nomination de Gallion comme proconsul d’Achaïe était récente. C’était un homme extrêmement aimable. Sénèque, frère du philosophe stoïcien renommé, parle de lui comme « quelqu’un qu’on ne pourrait pas assez aimer ». La courte durée de son administration jusqu’ici, et son caractère aimable, paraissent avoir été pour les Juifs deux raisons prometteuses de succès pour tenter un coup contre Paul auprès de lui. Ils espéraient trouver chez lui une oreille attentive.
Ils s’élevèrent unanimement contre Paul et le conduisirent au tribunal. L’accusation portée était malhonnête. Ils cherchaient à donner l’impression que l’accusé avait fait quelque chose contre la loi romaine : « contre la loi ». En vérité, c’était leur propre loi qu’ils considéraient comme enfreinte. Gallion perçut immédiatement la tromperie. S’il s’agissait de leur loi, il n’avait rien à dire. Les questions juives sur la loi ne relevaient pas du domaine de sa compétence judiciaire. S’il s’était agi d’une quelconque injustice ou d’un agissement criminel, il les aurait écoutés. Mais il n’avait pas reçu mission de l’empereur de siéger pour juger des questions concernant leur loi, ou des disputes de mots ou de noms. Et ainsi il les chassa du tribunal. Le cas était clair, l’attaque avait échoué.
Paul n’eut pas besoin de répondre devant le juge romain. Avant que ses accusateurs aient pu riposter à ses reproches, Gallion leur coupa la parole. Dans son cœur il n’y avait pas de place pour Dieu, ni pour les choses divines. Même si la paresse insouciante de cet homme était déplorable, le Seigneur s’en servit pour libérer son serviteur. Oui, selon les paroles d’un cantique, « IL a toujours un chemin, IL ne manque pas de moyens ».
La scène devant le tribunal se termina par le fait qu’ils saisirent tous Sosthène, le chef de synagogue, et le battirent. Pourquoi le firent-ils et qui est visé par ce « tous » ? Cela n’apparaît pas clairement. Le fait est que Gallion ne s’intéressa pas du tout à cela, ce qui suggère la conclusion qu’après comme avant, il s’agissait de Juifs ayant un compte à régler avec leur chef de synagogue.
Dans la salutation de la première épître aux Corinthiens, l’apôtre s’associe un certain Sosthène, et il le présente comme un frère : « Sosthène, le frère » (1 Cor. 1:1). S’il s’agit du même personnage qu’ici, la haine des Juifs contre cet homme pourrait s’expliquer par le fait que, succédant à Crispus comme chef de synagogue, il était déjà lui aussi enclin au christianisme. Il se peut aussi qu’il ait refusé de donner son accord à la persécution de Paul engagée par d’autres. Qu’il s’agisse de l’une ou l’autre explication, Sosthène était une nouvelle preuve heureuse de ce que la grâce de Dieu peut produire chez un homme.
« Et Paul, ayant demeuré là encore assez longtemps, prit congé des frères et mit à la voile pour la Syrie, et avec lui Priscilla et Aquilas, après qu’il se fut fait raser la tête à Cenchrée, car il avait fait un vœu. Et il arriva à Éphèse et les y laissa ; mais étant entré lui-même dans la synagogue, il discourut avec les Juifs. Mais lorsqu’ils le prièrent de demeurer plus longtemps avec eux, il n’y consentit pas, mais il prit congé d’eux, disant : il faut absolument que je célèbre la fête prochaine à Jérusalem ; je reviendrai vers vous, si Dieu le veut. Et il partit d’Éphèse par mer. Et ayant abordé à Césarée, il monta et salua l’assemblée, et descendit à Antioche » (18:18-22).
Le second voyage missionnaire tirait bientôt à sa fin. L’apôtre n’était pourtant pas pressé de quitter Corinthe. Maintenant que l’attaque des Juifs avait échoué, personne ni rien ne le chassait. En tous cas nous n’entendons plus rien d’une quelconque persécution à Corinthe. Une grande œuvre de Dieu avait eu lieu dans cette ville. Les deux épîtres aux Corinthiens en témoignent. Cependant elles établissent que le cours ultérieur de leur histoire spirituelle a montré bien des carences. Leur état d’esprit en partie charnel est resté jusqu’à aujourd’hui un exemple et un avertissement, montrant où l’influence du monde peut conduire l’assemblée de Dieu.
Après avoir demeuré encore assez longtemps à Corinthe, Paul prit finalement congé des frères, et mit à la voile pour la Syrie. Si la Syrie en général est mentionnée comme le but de ce voyage, il faut comprendre par-là spécialement la ville d’Antioche en Syrie (Actes 18:22) ; c’est de là que le voyage avait commencé. De toute façon il ne fit pas le voyage de retour d’un trait, mais il fit halte à Éphèse. Jusque-là il prit avec lui Priscilla et Aquilas, ce couple pieux et tranquille, qui lui avait été un si grand encouragement.
Auparavant il avait rasé sa tête à Cenchrée, l’un des deux ports de Corinthe, parce qu’il avait fait un vœu. Nous pouvons être surpris que le grand apôtre des nations se livre encore à de tels usages Juifs, et qu’il laisse une place à ses anciennes habitudes religieuses. Mais il était un vrai Juif, et agissait ainsi. Nous verrons le même trait au v. 21 où nous apprendrons qu’il considérait dans son cœur comme nécessaire de célébrer « la prochaine fête à Jérusalem », vraisemblablement la « fête des semaines » ou Pentecôte. Le Saint Esprit mentionne ces circonstances pour nous montrer clairement que des liens religieux forts rattachaient encore le cœur de l’apôtre au système juif. Mais nous pouvons être certains que c’était l’amour profond pour ses frères selon la chair qui l’engageait dans une telle voie. Mais il est vrai que l’influence de ces liens jette une ombre sur la fin de sa carrière publique.
Quand ils arrivèrent à Éphèse, les chemins de Paul et du couple Aquilas et Priscilla se séparèrent pour un temps. Paul y laissa Priscilla et Aquilas, tandis que lui-même, comme d’habitude, alla à la synagogue s’entretenir avec les Juifs. La réception du message fut tout à fait amicale, de sorte qu’ils le prièrent même de rester plus longtemps, mais ce n’était pas du tout sa volonté, à lui Paul, de répondre maintenant à ce désir, parce qu’il voulait célébrer la fête prochaine à Jérusalem. Une inquiétude étrange paraît s’être emparée de lui. Il avait hâte d’aller à Jérusalem. Et ainsi il prit congé d’eux, non pas cependant sans leur avoir laissé entrevoir la possibilité qu’il revienne vers eux « si Dieu le veut ». Cette indication que nous trouvons pareillement ailleurs (1 Cor. 4:19 ; 16:7 ; Jacq. 4:15) n’était pas certainement une formule vaine dans la bouche de l’apôtre. Elle ne devrait pas l’être non plus chez nous ; nous savons que toutes nos allées et venues, tous nos faits et gestes sont soumis à la volonté de Dieu. Le reconnaître et l’appliquer remplit le cœur d’une paix profonde.
Après avoir accosté à Césarée, Paul monta rapidement à Jérusalem pour y saluer l’assemblée. De là il partit vers Antioche qui était le point de départ de son voyage.
Le deuxième voyage de l’apôtre Paul s’achevait ainsi. Il a été d’une importance toute particulière du fait que c’est pendant ce voyage que l’évangile de Dieu est parvenu pour la première fois en Europe.
Nous avons laissé l’apôtre Paul à Antioche. C’était là qu’il était revenu après avoir achevé son deuxième voyage missionnaire. Pourtant il ne dut pas y être resté longtemps, car l’écrivain sacré parle seulement, dans ce qui suit, de « quelque temps » passé là :
« Et ayant séjourné là quelque temps, il s’en alla, et traversa successivement le pays de Galatie et la Phrygie, fortifiant tous les disciples » (18:23).
Nous pouvons admettre que Paul n’a séjourné que quelques semaines à Antioche, même s’il y avait bien sûr beaucoup à raconter et à rapporter. Il ne resta donc pas longtemps là. Fidèle à sa propre parole « dans les travaux surabondamment » (2 Cor. 11:23), son zèle infatigable dans l’œuvre du Seigneur le fit se remettre en route pour un nouveau voyage après une courte pause seulement. Luc décrit le commencement de ce troisième voyage missionnaire par cette simple parole : « ayant séjourné là quelque temps, il s’en alla ».
Oui, « il s’en alla », manifestement seul, sans accompagnateur. Il ne choisit pas une nouvelle route, mais il traversa l’Asie en direction de l’Ouest comme dans le voyage précédent, toutefois en ordre inverse (comparer 16:6), il est vrai, en ce qui concerne les régions mentionnés. Du fait qu’il pensait poursuivre vers Éphèse, il parut approprié de visiter d’abord la Galatie située au nord, puis d’aller à Éphèse vers le sud à travers la Phrygie.
Le troisième voyage missionnaire commença comme le second : Paul visita d’abord les assemblées qui étaient nées par son ministère dans le voyage précédent. Son but était de nouveau de fortifier tous les frères (14:22). Luc n’en dit pas plus. Cette manière brève de s’exprimer suggère que les croyants de Galatie n’avaient pas encore été contaminés par les docteurs judaïsant. Ce triste développement a dû commencer pourtant peu de temps après les avoir laissés cette fois-ci. L’affermissement des âmes même par le plus grand des apôtres ne constituait aucune garantie de protection si on ne demeurait pas près du Seigneur. C’est une leçon que nous avons tous à prendre à cœur.
Cependant pour le moment, l’affermissement des disciples était l’ordre du jour. Ce ministère parmi les croyants récemment venus à la foi était, et est, d’une importance extraordinaire. Même si aucun détail ne nous est communiqué sur ce sujet et sur cette partie du voyage, il y en a quand même ceci de parfaitement clair : l’apôtre ne se contentait pas d’avoir annoncé l’évangile dans une région ou dans une ville et d’avoir été le moyen de la conversion de beaucoup. Vu les nombreuses influences mauvaises auxquelles les croyants sont exposés, il considérait comme tout aussi important de les édifier et de les fortifier dans la saine doctrine.
L’apôtre se consacrait à cette mission avec un plein dévouement. Il était aussi bien docteur qu’évangéliste. Il considérait comme un devoir qui lui incombait aussi à lui comme apôtre, de soutenir et fortifier les jeunes et les faibles en foi. Ceux qui sont insignifiants dans la famille de Dieu sont chers et précieux au grand Maître, et c’est pourquoi ils doivent l’être aussi à tous Ses serviteurs.
Ici, la description historique laisse de côté l’apôtre Paul pour un temps, et se tourne vers un autre serviteur du Seigneur, et vers les événements intervenus à Éphèse en l’absence de l’apôtre.
Avant de continuer à suivre le cours des événements, considérons le point particulier commun au dernier paragraphe du ch. 18 (v. 24-28) et au premier paragraphe du ch. 19 (v. 1-7). Dans l’un et l’autre apparaissent des croyants qui ne connaissaient que le baptême de Jean. Dans les deux cas cette carence a été comblée par un enseignement complémentaire sur la vérité chrétienne. Ce qui est mis en avant dans le premier cas est l’enseignement donné, tandis que dans le second cas, c’est la réception du Saint Esprit. Dans les deux cas, il est plus qu’intéressant de percevoir les progrès dans la doctrine et dans la puissance qui l’accompagnait.
« Et il vint à Éphèse un Juif, nommé Apollos, Alexandrin d’origine, homme éloquent et puissant dans les Écritures. Il était instruit dans la voie du Seigneur ; et, étant fervent d’esprit, il parlait et enseignait diligemment les choses qui concernaient Jésus, ne connaissant que le baptême de Jean. Et il se mit à parler avec hardiesse dans la synagogue. Et Aquilas et Priscilla, l’ayant entendu, le prirent et lui expliquèrent plus exactement la voie de Dieu » (18:24-26).
Nous avons vu qu’Aquilas et Priscilla étaient restés à Éphèse tandis que Paul poursuivait son voyage et qu’il n’était pas encore revenu. C’est dans ce temps intermédiaire qu’Apollos est venu à Éphèse.
Les caractères donnés pour cet homme sont remarquables. Le Saint Esprit nous en fait connaître quelques détails. S’il est d’abord désigné comme un « Juif », cela indique simplement son ascendance juive. Il ne faut pas y voir une opposition au fait d’être chrétien. « Alexandrin d’origine » donne l’information supplémentaire sur son lieu de naissance, la ville renommée d’Alexandrie en Égypte. Il est bien possible qu’il ait été formé là à une école réputée ou même à son université. L’indication qu’il était un homme « éloquent » (ou : érudit ») suggère en tout cas cette supposition. Ensuite il était « puissant dans les Écritures », celles de l’Ancien Testament. Contrairement aux rabbins Juifs qui possédaient aussi une connaissance extraordinaire de la Bible, Apollos se servait de celle-ci pour prêcher Jésus dans la mesure où il Le connaissait jusqu’alors.
S’il était « instruit dans la voie du Seigneur » comme il est dit, ce n’était en tout cas pas le résultat d’une école d’Alexandrie. Bien plutôt c’est par quelque disciple de Jean le Baptiseur qu’il avait appris quelque chose au sujet de « la voie du Seigneur », c’est-à-dire sur la doctrine chrétienne. La « voie » signifie la doctrine, la foi, la confession, la vie — tout à la fois. Mais par « le Seigneur » il faut absolument comprendre Jésus, car Apollos « enseignait diligemment les choses qui concernaient Jésus », et il le faisait avec un cœur brûlant et un saint zèle. Cependant il y avait une carence dans son ministère, comme déjà indiqué.
Ce qu’Apollos savait de Jésus était correct, mais sa connaissance n’allait pas suffisamment loin. Il ne connaissait que le baptême de Jean. Il semble qu’après la mort du Baptiseur, quelques-uns de ses disciples circulèrent et répandirent un peu de son enseignement, mais en ne comprenant ou ne sachant que peu ou rien de la mort et de la résurrection de Jésus et de leur signification. C’est ainsi qu’Apollos avait certainement été baptisé du baptême de Jean, le baptême de repentance. Il connaissait Jésus comme le Messie promis, et il était plus ou moins au courant de détails de Sa vie terrestre et de Ses miracles. Cependant la vérité proprement dite de l’évangile de la grâce, et la pleine doctrine chrétienne lui étaient inconnues. Mais où trouver quelqu’un susceptible de remédier à cette carence ?
Avant de donner suite à cette question brûlante et d’aborder les voies merveilleuses dont Dieu se servit pour y répondre, revenons brièvement sur le ministère de ce prédicateur zélé. « Et il se mit à parler avec hardiesse dans la synagogue » (18:26). Cela résume tout ce qui a été dit de lui jusqu’ici. Il se mit à parler avec hardiesse dans la synagogue d’Éphèse. Bien qu’il ne connût que peu de choses de Jésus et des voies de grâce de Dieu, cependant son cœur le poussait à parler de Lui.
Cependant malgré tout, un problème a dû l’occuper, sur lequel nous n’avons guère réfléchi jusqu’ici. N’y avait-il pas une difficulté en ce que maintenant près de 20 ans s’étaient écoulés depuis que cette Personne bénie les avait quittés, sans que soient accomplies les promesses Le concernant Lui et Son royaume messianique ? Les prophètes en avaient parlé, mais jusqu’à présent il n’y avait pas eu d’accomplissement. Cela ne soulevait-il pas des questions dans son cœur, et en même temps cela ne réveillait-il pas une nostalgie d’apprendre davantage sur ce Jésus auquel il croyait ? Certainement il mettait aussi sa confiance en Dieu pour cela, et cela peut expliquer la hardiesse avec laquelle il continuait malgré tout à parler aux Juifs dans la synagogue. Quel bel exemple de vrai dévouement au Seigneur et à Son service nous donne cet « homme » à Éphèse !
Oui, la réponse du Seigneur au désir et au besoin de ce serviteur dévoué est arrivée. Comme souvent dans les voies du Seigneur, elle est venue sans apparence, de façon imprévue et non spectaculaire. Quand le couple Priscilla et Aquilas l’entendirent parler dans la synagogue, ils discernèrent, malgré toute son éloquence et sa hardiesse, une carence dans la doctrine chrétienne. Animés du désir de l’aider, « ils le prirent et lui expliquèrent plus exactement la voie de Dieu » (18:26). Sans tenir compte de ce qu’ils étaient des gens simples sans don spirituel particulier, ils n’estimèrent pas prétentieux de faire progresser ce précieux serviteur de Dieu dans la connaissance de Christ mort et glorifié. C’est l’amour qui les y poussait. Apollos, à son tour, ce grand prédicateur aux lèvres duquel les gens étaient suspendus, fut suffisamment humble pour s’asseoir aux pieds de ce faiseur de tentes et de sa femme, pour recevoir leur enseignement. Quelle occasion extraordinaire s’offrit ici à ces deux époux pieux de servir le Seigneur de cette façon ! Ils ne pouvaient pas enseigner dans la synagogue, mais ils pouvaient en privé communiquer leur connaissance à Apollos. Ils ne pouvaient pas prêcher, mais ils pouvaient soutenir un prédicateur.
Cela nous fait aussi découvrir la raison pour laquelle Dieu, dans Sa providence, a conduit les pas de ce couple à quitter Rome pour Corinthe, quand cela a paru nécessaire. C’est là qu’ils rencontrèrent Paul et l’hébergèrent 18 mois chez eux. Pendant ce temps, ils eurent l’occasion d’être eux-mêmes instruits par le grand apôtre dans la vérité chrétienne. Quand Paul quitta Corinthe, ils allèrent avec lui, mais restèrent à Éphèse, tandis que leur grand maître poursuivait son voyage quelque temps. À Éphèse ils rencontrèrent Apollos. Merveilleuse disposition arrangée dans le ciel ! C’était les mêmes soins divins qui autrefois avaient fait rencontrer Philippe et l’eunuque éthiopien dans le désert.
Si Priscilla et Aquilas exposèrent plus exactement la voie de Dieu à Apollos, nous en déduisons que personne d’autre à Éphèse n’aurait pu le faire. Le service intelligent de ce couple pieux contribua à ce que cet homme hautement doué pour comprendre la vérité et la redonner à d’autres, puisse devenir parmi les saints un ouvrier de la plus haute valeur. Le fait que Priscilla soit nommée en premier (*) peut amener à la conclusion qu’elle dépassait son mari intellectuellement et spirituellement. Cependant ses leçons ne lui firent pas quitter la place que Dieu lui assignait comme femme (1 Cor. 14:34 ; 1 Tim. 2:12). Ce qu’elle fit, elle le fit en privé, dans sa propre maison, et cela se passa avec son mari, et non pas indépendamment de lui. L’image dépeinte ici est ainsi touchante.
(*) Priscilla est nommée en premier selon la version allemande Elberfeld, comme Carrez. J.N. Darby en français nomme Aquilas en premier.
Au dernier paragraphe de son récit, le chroniqueur montre clairement que la leçon reçue par Apollos porta richement ses fruits.
« Et comme il se proposait de passer en Achaïe, les frères écrivirent aux disciples et les exhortèrent à le recevoir ; et quand il y fut arrivé, il contribua beaucoup par la grâce à l’avancement de ceux qui avaient cru ; car il réfutait publiquement les Juifs avec une grande force, démontrant par les Écritures que Jésus était le Christ » (18:27, 28).
Nous apprenons d’abord, plutôt en passant, qu’il y avait quelques autres frères à Éphèse en dehors d’Aquilas et Priscilla. Qui étaient-ils ? Peu importe pour le sujet. Apollos ayant eu l’intention de visiter l’Achaïe, ces frères écrivirent aux disciples de cette province, et leur recommandèrent de le recevoir. Pour la première fois nous entendons parler ici d’une lettre de recommandation chrétienne. La pensée à la base de cette lettre est qu’on ne peut être reçu et recommandé que par un témoignage approprié d’autrui quant à l’authenticité de son propre christianisme. Voilà une manière d’agir bénie ! Aujourd’hui nous ne devrions pas l’abandonner !
Quand Apollos arriva en Achaïe, il y fut très utile aux croyants, par la grâce de Dieu. Il ne faut pas attribuer son succès et sa réussite à son éloquence et à son érudition, mais seulement et uniquement à la grâce divine, — cette grâce au contact de laquelle il avait été dans la maison d’Aquilas et Priscilla. C’était quelque chose que tout serviteur du Seigneur doit graver dans son cœur : ne pas faire confiance à ses capacités et à son don, mais exclusivement à la grâce. Elle seule peut produire des résultats spirituels.
Apollos était justement utile aux croyants par le fait qu’il réfutait les Juifs publiquement de toutes ses forces, et qu’il prouvait par les Écritures de l’Ancien Testament que Jésus était le Christ. Cela se passait « publiquement », c’est-à-dire dans la synagogue des Juifs et non pas dans des réunions chrétiennes. Cela ne s’était pas passé de cette manière à Corinthe, car la synagogue hostile était depuis longtemps fermée à tous les prédicateurs chrétiens. Ces choses se déroulèrent en Achaïe, comme Luc le remarque expressément. Il termine cependant son cours récit au sujet d’Apollos par la remarque qu’il était à Corinthe (19:1). Manifestement il avait fait de cette ville son quartier général, à partir duquel il travaillait avec une grande bénédiction parmi les croyants, suivant fidèlement les paroles de l’apôtre Paul : « Moi, j’ai planté, Apollos a arrosé ; mais Dieu a donné l’accroissement » (1 Cor. 3:6).
Au commencement du ch. 19 Luc reprend le fil de son récit qu’il avait laissé au ch.18 v.23, et il poursuit avec les événements concernant Paul et son devenir.
« Or il arriva, comme Apollos était à Corinthe, que Paul, après avoir traversé les contrées supérieures, vint à Éphèse ; et ayant trouvé de certains disciples, il leur dit : Avez-vous reçu l’Esprit Saint après avoir cru ? Et ils lui dirent : Mais nous n’avons même pas ouï dire si l’Esprit Saint est. Et il dit : De quel [baptême] donc avez-vous été baptisés ? Et ils dirent : Du baptême de Jean. Et Paul dit : Jean a baptisé du baptême de la repentance, disant au peuple qu’ils crussent en celui qui venait après lui, c’est-à-dire en Jésus. Et ayant entendu [ces choses], ils furent baptisés pour le nom du Seigneur Jésus ; et, Paul leur ayant imposé les mains, l’Esprit Saint vint sur eux, et ils parlèrent en langues et prophétisèrent. Et ils étaient en tout environ douze hommes » (19:1-7).
Apollos avait quitté Éphèse avant l’arrivée de Paul. Il avait certes entendu parler de lui par Aquilas et Priscilla, mais il ne l’avait pas encore vu.
Maintenant Paul arrive pour la deuxième fois à Éphèse, la capitale de la province romaine d’Asie, sur la côte Ouest de l’Asie mineure. Il s’acquittait ainsi de la promesse qu’il avait faite au cours de sa précédente et courte visite : « je reviendrai vers vous, si Dieu le veut » (18:21). Et Dieu l’a voulu ! Une première fois Paul et ses compagnons avaient été empêchés par le Saint Esprit d’annoncer la Parole en Asie (16:6). Mais maintenant le moment était venu selon la volonté de Dieu que tous les habitants d’Asie, tant Juifs que Grecs, entendent la Parole du Seigneur (19:10). Une grande tâche se présentait à l’apôtre, et il s’y attela aussitôt.
Il trouva quelques disciples. Éphèse étant une grande ville, il n’y a rien d’étonnant à ce qu’ils ne se soient pas rencontrés lors de sa première visite qui avait été très courte. Entrés maintenant en contact avec eux, l’apôtre dut constater une certaine carence chez eux. Peut-être manquaient-ils de la joie chrétienne, ou bien manifestaient-ils un certain esprit légal. En tout cas il estima nécessaire de leur poser la question basique : « Avez-vous reçu l’Esprit Saint après avoir cru ? ».
Notez bien : ils étaient déjà croyants et l’apôtre ne met pas en doute l’authenticité de leur foi ; il ne s’enquiert pas pour savoir si une œuvre divine avait eu lieu dans leur âme. Non, ce qu’il demanda c’est si, après avoir cru, ils avaient reçu le Saint Esprit.
Sa question était en plein accord avec la doctrine de l’épître aux Éphésiens, où il est dit : « nous qui avons espéré à l’avance dans le Christ : en qui vous aussi [vous avez espéré], ayant entendu la parole de la vérité, l’évangile de votre salut ; auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit de la promesse » (Éph. 1:12, 13). Aussi bien la question posée, que l’Écriture qui vient d’être citée, insistent sur la réception du Saint Esprit après avoir cru. Ce n’est qu’alors, quand quelqu’un s’est soumis par la foi et sans réserve à parole de la vérité, à l’évangile de notre salut, qu’il est scellé du Saint Esprit. Recevoir le Saint Esprit est quelque chose de différent de naître de nouveau par l’Esprit. La réception du Saint Esprit vient en second, après la nouvelle naissance.
À cause de l’importance du sujet, voyons encore quelques passages du Nouveau Testament qui confirment ce qui a été dit. Le Seigneur Jésus avait rendu témoignage en Jean 7 : « Celui qui croit en moi, selon ce qu’a dit l’Écriture, des fleuves d’eau vive couleront de son ventre » (Jean 7:38). Ensuite figure ce qu’on peut appeler un commentaire de l’Esprit Saint : « Or il disait cela de l’Esprit qu’allaient recevoir ceux qui croyaient en lui ; car l’Esprit n’était pas encore, parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié ». Ce don ne pouvait être accordé qu’après la glorification du Seigneur, bien qu’il y eût déjà des croyants auparavant.
Les paroles de l’apôtre Pierre devant le sanhédrin sont aussi en accord avec cela : « et nous, nous lui sommes témoins de ces choses, ainsi que l’Esprit Saint que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent » (Actes 5:32). C’est seulement à ceux qui Lui obéissent, c’est-à-dire à ceux qui se soumettent par la foi à Son autorité, que Dieu donne le Saint Esprit comme marque d’une rédemption accomplie.
L’apôtre Paul peut encore servir de témoin de ce qui nous occupe. Car il écrit aux croyants de Galatie : « Et, parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, criant : Abba, Père » (Gal. 4:6). Il ne dit pas : « pour que vous deveniez fils… », mais « parce que vous êtes fils ». Le don du Saint Esprit est une confirmation de la position bénie dans laquelle le croyant est introduit, en même temps qu’il est le moyen de rendre capable de jouir de la relation avec le Père.
Répétons-le : le don du Saint Esprit est à différencier fondamentalement de la nouvelle naissance. Il est conféré à ceux qui ont déjà cru à l’évangile de leur salut, et qui sont fils de Dieu par la foi en Jésus Christ.
Revenons maintenant aux douze hommes du ch.19. Leur réponse manifeste qu’ils se trouvaient dans un état anormal : « nous n’avons même pas ouï dire si l’Esprit Saint est » (19:2). Ils ne doutaient pas de l’existence de l’Esprit Saint. Ce n’est pas ce que leur parole veut dire. Bien plutôt ils faisaient référence au témoignage de Jean Baptiste qui avait témoigné de Celui qui venait après lui, Jésus, en Le prévoyant, et qui avait dit : « Celui-là baptise de l’Esprit Saint » (Jean 1:33). Cette promesse était-elle accomplie maintenant ? — c’est justement ce qu’ils ne savaient pas. Encore moins pouvaient-ils dire d’eux-mêmes qu’ils avaient expérimenté son accomplissement.
À la question supplémentaire de l’apôtre de savoir de quel baptême ils avaient été baptisés, ils répondirent : « du baptême de Jean ». Ils ne se trouvaient évidemment pas encore sur le terrain chrétien. Car Jean n’avait baptisé que du baptême de la repentance, disant au peuple « qu’ils crussent en Celui qui venait après lui, c’est-à-dire en Jésus » (Actes 19:4). La mort du Seigneur, Sa résurrection et Sa glorification, Jean n’en avait pas parlé. Et ainsi ces douze hommes ne savaient rien de Christ, ni de Son œuvre de rédemption accomplie. Ils n’avaient pas encore entendu la Parole de la vérité, et ils ne pouvaient donc pas y avoir cru, ni être scellés du Saint Esprit (Éph. 1:13). Ils étaient nés de nouveau, mais n’étaient pas scellés !
Il est humiliant que beaucoup de croyants d’aujourd’hui tiennent la nouvelle naissance comme la bénédiction propre au christianisme, mais ils sont très largement ignorants du sceau du Saint Esprit, ou bien se méprennent à son sujet. Il s’ensuit souvent qu’en conséquence ils ne possèdent aucune certitude ferme du salut, et ils sont tourmentés par des doutes pour savoir si cela suffit pour aller au ciel. C’est pourquoi il est si important que l’enseignement sur la nouvelle naissance d’une part, et sur la réception du Saint Esprit d’autre part, soit bien compris et soit reçu dans le cœur. Cet enseignement ouvre la voie à la compréhension et à la jouissance de bénédictions plus vastes et infiniment précieuses du christianisme. Le don de l’Esprit Saint est, après Christ, le don le plus élevé que Dieu puisse nous accorder.
Du fait que les disciples de Jean Baptiste, sans que ce soit leur faute, ne connaissaient pas la vérité chrétienne, nous pouvons en déduire que Paul leur a annoncé l’évangile de Christ, quoiqu’il n’en soit rien dit. Il n’est pas davantage parlé de leur foi. Mais la tournure « ayant entendu ces choses… » renferme les deux : « ayant entendu ces choses, ils furent baptisés pour le nom du Seigneur Jésus » (19:5).
Quand Paul leur eut imposé les mains, l’Esprit Saint vint sur eux, et ils parlèrent en langues et prophétisèrent (19:6). Par le fait que l’Esprit Saint était venu par l’imposition des mains de l’apôtre, c’est l’apostolat de Paul que Dieu validait. Il n’était pas moindre que les autres apôtres ; car Paul faisait ici à Éphèse ce que Pierre et Jean avaient fait à Samarie (Actes 8) : transmettre le don du Saint Esprit par imposition des mains. Dieu n’a conféré cette puissance parmi les hommes qu’à des apôtres. Quant à ce qu’ils aient parlé en langues et prophétisé, c’était la preuve visible qu’ils avaient reçu le Saint Esprit. L’imposition des mains de l’apôtre pour recevoir le Saint Esprit est aussi peu la règle que le parler en langues qui a suivi, nous en faisons la remarque encore une fois, juste en passant à propos de ce passage.
Nous avons déjà parlé en détail sur ces questions vastes et complexes à propos du ch. 8 de ce livre des Actes. Le lecteur est prié de se reporter, pour plus de détails, à ce qui est dit à cet endroit (un peuple pour son Nom, partie 5 sur Actes 8, pages 49 à 57). Il suffit ici de remarquer que c’est la dernière fois dans ce livre des Actes que nous entendons parler du don du Saint Esprit et du parler en langues qui s’ensuit.
« Et étant entré dans la synagogue, il parla avec hardiesse, discourant (*) pendant trois mois et les persuadant des choses du royaume de Dieu. Mais comme quelques-uns s’endurcissaient et étaient rebelles (**), disant du mal de la voie devant la multitude, lui, s’étant retiré d’avec eux, sépara les disciples, discourant tous les jours dans l’école de Tyrannus. Et cela continua pendant deux ans, de sorte que tous ceux qui demeuraient en Asie entendirent la parole du Seigneur, tant Juifs que Grecs » (19:8-10).
(*) NdT : Ici et ailleurs, le terme grec que JND en français traduit par « discourir » est traduit en allemand (Bible Elberfeld) par « s’entretenir ». Carrez traduit comme Elberfeld.
(**) NdT : L’auteur traduit du grec en allemand par « ne croyaient pas ». Elberfeld indique en note « ou : étaient désobéissants ».
Le ministère de l’apôtre Paul à Éphèse recouvre trois années entières (20:31). Bien qu’il soit extraordinairement varié et vaste, il n’est décrit qu’en relativement peu de mots (19:8-22).
Selon son habitude (17:2), l’apôtre Paul commença par aller à la synagogue pour témoigner de la vérité à ses concitoyens en premier (Rom. 1:16). Lors de sa première visite à la synagogue d’Éphèse, il avait été reçu amicalement, et fut même prié de rester plus longtemps auprès d’eux. Il avait cependant refusé, mais non pas sans promettre de revenir « si Dieu le veut ». Maintenant il était là, et se mettait au travail auprès d’eux. Le fait de parler trois mois entiers dans la synagogue représente certainement une exception.
Deux points forts de son ministère sont mis en avant : il discourait avec eux et les persuadait des choses du royaume de Dieu. Pour les Juifs familiers avec les écritures de l’Ancien Testament, ces entretiens (*) et conversations étaient de loin la forme la plus appropriée pour annoncer l’évangile, mieux que des exposés ou des prédications. Cela laissait la place pour des questions et réponses, ce qui se rapprochait de l’esprit juif.
(*) NdT : « discours » selon Bible JND. Voir avant-dernière note.
L’apôtre les persuadait du royaume de Dieu (il ne cherchait pas seulement à le faire, mais il le faisait), mais nous devons d’abord être clairs sur ce qui est entendu par royaume de Dieu. Nous allons le voir par trois coups d’œil dans le Nouveau Testament.
o Quand le Seigneur Jésus était ici-bas, Il prêchait le royaume de Dieu (Luc 8:1). Dans Sa personne, ce royaume s’était approché des Juifs (Luc 10:9). Les Juifs pieux attendaient ce royaume dans sa forme visible (Marc 15:43 ; Luc 2:38). Cependant ce royaume leur fut ôté du fait du rejet du roi par Son peuple terrestre, (Matt. 21:43).
o Aujourd’hui il existe le royaume de Dieu en mystère, de manière cachée. C’est un royaume invisible, un royaume spirituel régi par des principes célestes. « Car le royaume de Dieu n’est pas manger et boire, mais justice et paix, et joie dans l’Esprit Saint » (Rom. 14:17).
o À la fin des jours pourtant, le royaume de Dieu prendra de nouveau une forme visible, et il sera en puissance et en gloire (Matt. 24:14,30 ; Apoc. 14:6, 7).
L’apôtre Paul ne parlait pas de l’aspect futur du royaume : ceci ressort déjà de ce que quelques-uns des Juifs le contredirent. Les Juifs qui en fin de compte accordent foi à leurs propres écritures et tiennent ferme l’espérance juive, n’offrent jamais de résistance quand on parle de promesses en rapport avec ce royaume glorieux. Il en va autrement quand l’objet de la prédication est le royaume de Dieu sous sa forme actuelle, chrétienne. Alors l’incrédulité et l’hostilité apparaissent habituellement au grand jour chez les Juifs. Il en était ainsi à l’époque, et il n’en est pas autrement aujourd’hui.
Comment ceux qui fréquentaient la synagogue à Éphèse réagirent-ils au ministère de l’apôtre ? La suite du récit ne laisse aucun doute sur le fait que beaucoup le reçurent. Mais nous apprenons que « quelques-uns s’endurcirent et ne croyaient pas [JND en français : étaient rebelles], disant du mal de la voie devant la multitude » (19:9). Ces trois expressions décrivent pleinement l’opposition de ces Juifs au christianisme.
1. La première est qu’ils s’endurcirent. Quelle attitude de cœur tout à fait solennelle ! Combien cette attitude se rencontre souvent ! Le pécheur résiste à tous les efforts de la grâce de Dieu, et ferme son cœur devant Son amour qui veut le sauver. De cette manière, il empêche le Saint Esprit d’agir davantage sur lui. Finalement, Dieu le laisse aller, après s’être employé deux ou trois fois « pour détourner son âme de la fosse, pour qu’il soit illuminé de la lumière des vivants ». « Mais s’ils n’écoutent pas, ils s’en iront par l’épée, et expireront sans connaissance » (Job 33:30 ; 36:12). Le cœur s’endurcit contre Dieu, ce dont le Pharaon est un exemple bouleversant dans l’Écriture. Cinq fois il a endurci son cœur, jusqu’à ce que finalement Dieu endurcisse son cœur.
2. La deuxième expression d’attitude hostile n’est pas moins solennelle : « ils étaient rebelles ». On peut aussi traduire « ils ne croyaient pas » ou « ils furent désobéissants ». Ces pensées se rejoignent. Ces Juifs ne voulaient pas obéir à l’appel salutaire de la grâce de Dieu, et cela signifie qu’ils ne voulaient pas croire au salut offert en Jésus. En face du jugement qui vient, « Dieu ordonne maintenant aux hommes que tous, en tous lieux, ils se repentent » (Actes 17:30). Mais s’ils refusent, ils sont non seulement incrédules, mais aussi désobéissants. Ils devront en répondre devant Dieu.
3. Mais l’état d’esprit méchant des Juifs incrédules, fut encore manifeste sur un troisième point : « ils disaient du mal de la voie ». Ce dernier terme désigne la voie de la confession chrétienne, comme le montrent ch.9 v.2 et ch.19 v.23 où la même tournure apparaît. Ils parlaient en mal de cette voie qui leur était présentée. Un mal en engendre un autre. L’incrédulité peut être invisible en soi, mais tôt ou tard elle se manifeste. Quand on refuse un chemin pour soi-même, l’étape suivante est de le discréditer devant les autres. C’est précisément ce qui eut lieu dans la synagogue d’Éphèse. Pour Paul ce fut un signe certain que le moment était crucial pour agir sérieusement.
En fait, le moment décisif était venu ! Rester plus longtemps en relation avec la synagogue, n’aurait conduit à rien de bon. Cela venait donc sans doute de Dieu, quand Paul se sépara d’eux, et sépara les disciples, et continua ses entretiens journaliers dans l’école de Tyrannus (Actes 19:9). À la fin des trois mois de son ministère dans la synagogue, il y avait un bon nombre de « disciples », sans qu’il soit précisé combien ; et Paul les sépara de la synagogue. C’est de cette manière que « naquit » l’assemblée locale à Éphèse. Si Paul s’entretenait chaque jour dans l’école de Tyrannus, c’est qu’il avait trouvé une place appropriée pour le faire, comme la maison de Juste lui avait servi en son temps à Corinthe de lieu de rassemblement temporaire.
Il n’est pas expressément dit avec qui il s’entretenait. Les versets suivants montrent cependant clairement que des Juifs comme des Grecs entendirent la Parole du Seigneur. De cette manière l’hostilité de la synagogue contribua à l’avancement de l’œuvre de Dieu. Les gens des nations étaient plus habitués à un rassemblement dans une école que dans une synagogue. On peut douter que les chrétiens se rassemblassent dans l’école de Tyrannus pour leurs réunions régulières.
On ne sait rien de la personne de Tyrannus. Il peut s’agir d’un orateur ou d’un philosophe. Il est aussi bien possible qu’il ait simplement donné son nom au bâtiment, ou bien qu’il vivait là ou qu’il était le propriétaire de l’école. Si on se trouvait dans ce dernier cas, on peut se demander pourquoi la Parole de Dieu mentionne le nom de cet homme. Peut-être a-t-il trouvé le Seigneur durant ces jours-là ?
Le travail dévoué de l’apôtre dans l’école de Tyrannus eut lieu chaque jour pendant deux ans de sorte que tous ceux qui habitaient en Asie, tant Juifs que Grecs, entendirent la Parole du Seigneur (Actes 19:10). Quelle portée extraordinaire de l’œuvre nous est signalée ! La Parole fut répandue non seulement dans la ville, mais aussi dans toute la province romaine, et avec des résultats considérables. Ils ne sont certes pas décrits ici, mais le livre de l’Apocalypse nous en dit quelque chose. Aux ch. 2 et 3, sept assemblées de cette région-là sont nommées. Ne sont-elles pas, entre autres, le fruit du travail de cet instrument exceptionnel dans les mains de Dieu ?
« Et Dieu faisait des miracles extraordinaires par les mains de Paul, de sorte que même on portait de dessus son corps des mouchoirs et des tabliers sur les infirmes ; et les maladies les quittaient, et les esprits malins sortaient » (19:11, 12).
Il plut à Dieu que des miracles extraordinaires s’effectuent par les mains de Paul. Par cela Il crédibilisait Son serviteur et confirmait sa prédication. Tous ceux qui voulaient bien voir, étaient forcés de voir que Paul était un serviteur reconnu du Dieu du ciel. Il s’était déjà abondamment montré comme un vase pour communiquer la grâce de Dieu. Maintenant il fallait qu’il soit confirmé comme un vase de la puissance de Dieu.
Si les miracles que Dieu opéra par Paul sont qualifiés ici d’« extraordinaires », on peut se demander si tous les miracles ne sont pas extraordinaires. Certainement, ils le sont. Mais pour mieux comprendre cette manière de s’exprimer, il est bon de voir la traduction littérale du passage : « et Dieu faisait des miracles, non pas les premiers venus, ceux qui arrivent occasionnellement ». C’était tout à fait des miracles, mais ils n’étaient pas d’un genre banal, connu.
Il faut regarder d’un peu plus près les miracles dépeints ici. Des mouchoirs et des tabliers étaient ôtés du corps (ou de la peau) de Paul, et étaient posés sur des infirmes couchés loin, et ils étaient guéris ou délivrés d’esprits malins. La particularité de ces miracles résidait en ce qu’ils avaient manifestement lieu en l’absence de l’apôtre, et sans que celui-ci n’ait dit un mot. Paul n’en était pas moins l’instrument de Dieu, car Dieu faisait ces miracles « par les mains de Paul ». Ce dernier n’était donc pas pour rien dans le processus : c’est avec son accord qu’on prenait des morceaux d’habits de dessus lui. Mais ceux qui le faisaient agissaient certainement avec foi en la puissance et la bonté de Celui qui n’est pas indifférent à la souffrance des gens.
Jamais auparavant à Éphèse ou ailleurs, on n’avait vu pareils miracles. Ils étaient un accomplissement de ce que le Seigneur Jésus avait prédit : « En vérité, en vérité, je vous dis : Celui qui croit en moi fera, lui aussi, les œuvres que moi je fais, et il en fera de plus grandes que celles-ci ; parce que moi je m’en vais au Père » (Jean 14:12).
Mais la scène change, et des exorcistes entrent en jeu.
« Mais quelques-uns aussi des Juifs exorcistes qui couraient çà et là, essayèrent d’invoquer le nom du Seigneur Jésus sur ceux qui avaient des esprits malins, disant : Je vous adjure par Jésus que Paul prêche. Et il y avait sept fils de Scéva, Juif, principal sacrificateur, qui faisaient cela. Mais l’esprit malin, répondant, leur dit : je connais Jésus et je sais qui est Paul ; mais vous, qui êtes-vous ? Et l’homme en qui était l’esprit malin, s’élança sur eux, et, s’étant rendu maître des deux, usa de violence contre eux, de sorte qu’ils s’enfuirent de cette maison, nus et blessés. Et cela vint à la connaissance de tous ceux qui demeuraient à Éphèse, Juifs et Grecs ; et ils furent tous saisis de crainte, et le nom du Seigneur Jésus était magnifié » (19:13-17).
La manifestation de la puissance de Dieu de manière hautement remarquable avait aussi pour but de couvrir de honte la puissance mauvaise des ténèbres et de l’anéantir. Ce combat entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres, entre la grâce et Satan, a remué les gens depuis toujours. Et si la grâce remporte encore aujourd’hui de grandes victoires sur le mal, le temps pour l’élimination définitive du mal n’est pas encore venu. Cependant c’est la volonté du Seigneur que le combat de la foi se poursuive par des hommes, et il continue dans la puissance de l’Esprit Saint qui habite dans les croyants.
Les miracles opérés par Paul éveillèrent chez des hommes méchants le désir de l’imiter et même de chasser les démons. Manifestement ils l’avaient déjà vu et entendu dans ce sens, en plusieurs occasions dont le récit est consigné dans les v. 11 et 12.
Quand le Seigneur Jésus était sur la terre, Il avait signalé aux pharisiens de Jérusalem qu’il y avait parmi les fils d’Israël des gens qui chassaient des démons (Matt. 12:27). Ici à Éphèse, il s’agissait de nouveau de Juifs exorcistes qui entreprirent d’invoquer le nom du Seigneur Jésus sur ceux qui avaient des esprits mauvais ; et pour cela ils disaient : « je vous adjure par Jésus que Paul prêche » ! Ces exorcistes pensaient que Paul avait, d’une manière ou d’une autre, découvert un nom beaucoup plus efficace que les formules magiques qu’ils possédaient, à savoir le nom de « Jésus ». Ils s’en servirent, s’attendant à avoir par-là un succès semblable à celui de Paul.
Mais ces hommes se trompaient. Dans le conflit avec les démons, on ne peut se servir du nom précieux de Jésus que sous deux conditions : Il faut d’abord soi-même croire au Seigneur Jésus. Et ensuite il faut Le reconnaître comme Seigneur et Maître. Ces deux choses manquaient chez ces Juifs exorcistes. Ils avaient raison quand ils disaient « … que Paul prêche ». Mais pourquoi prêchait-il Jésus ? Parce qu’il croyait en Lui. Or pas un seul mot de leur côté ne laisse entendre qu’eux aussi croyaient au Seigneur Jésus Christ. Ensuite ils parlaient de Lui simplement comme de « Jésus », évitant tout titre d’honneur. Cela montre qu’ils ne reconnaissaient pas Jésus comme Seigneur. Quel droit dès lors avaient-ils de parler, avec la moindre autorité, en ce nom ? Pouvaient-ils tromper les démons quand ils se présentaient comme disciples de Jésus sans l’être ? Ils ne le pouvaient pas, bien sûr !
Luc nous fait savoir qu’ils étaient en tout sept hommes, tous fils d’un certain principal sacrificateur Juif, dénommé Scéva, qui agissaient de la sorte. C’est simplement une remarque d’ordre général. Mais alors nous apprenons qu’en particulier deux d’entre eux (19:16) cherchaient justement à faire ce qui vient d’être mentionné : se servir du nom de Jésus comme d’une formule magique. Mais le démon ne se laissa pas tromper par eux, il refusa toute complicité avec leurs agissements. Et combien ces paroles durent frapper tous ceux qui entendirent parler de l’affaire : « Je connais Jésus et je sais qui est Paul ; mais vous, qui êtes-vous ? » Il est remarquable que le démon fasse une différence entre le Seigneur et Son serviteur Paul. De Jésus, il dit qu’il Le connait ; de Paul, il dit simplement qu’il sait qui il est. « Mais vous, qui êtes-vous ? » Ce ‘vous’ est accentué dans le texte original. Par-là, le démon ne demandait pas simplement qui ils étaient (fils de Scéva), mais il demandait quelle relation ils avaient avec Jésus ou avec Paul, pour qu’un démon quelconque ait à leur obéir.
Soudain, l’homme en qui était l’esprit mauvais leur sauta dessus, s’empara des deux et les violenta, avec le résultat qu’ils s’enfuirent nus et blessés de cette maison. Le démon se rendit maître de ses victimes avec une force surnaturelle, une force à laquelle les exorcistes n’avaient rien à opposer. Car la puissance satanique est une puissance effective. Il n’y a que la puissance divine qui peut la vaincre et délivrer d’elle. Les démons eux-mêmes le savent bien.
Cet événement solennel que nous venons de considérer, fut connu de tous les habitants d’Éphèse, tant Juifs que Grecs, « ils furent tous saisis de crainte, et le nom du Seigneur Jésus était magnifié » (19:17). La punition des fils de Scéva fit une impression si profonde sur toute la ville, que la crainte tomba sur eux tous sans exception, et le Nom béni qui est au-dessus de tout nom fut de nouveau glorifié.
Cependant l’influence des événements ne s’étendit pas seulement aux habitants d’Éphèse, Juifs ou Grecs, mais aussi à un troisième groupe : les croyants. C’est sur eux que le Saint Esprit attire maintenant notre attention.
« Et plusieurs (beaucoup) de ceux qui avaient cru, venaient, confessant et déclarant ce qu’ils avaient fait. Plusieurs (beaucoup) aussi de ceux qui s’étaient adonnés à de la magie, apportèrent leurs livres et les brûlèrent devant tous ; et ils en supputèrent le prix, et ils trouvèrent [qu’il se montait à] cinquante mille pièces d’argent. C’est avec une telle puissance que la parole du Seigneur croissait et montrait sa force » (19:18-20).
Il est intéressant que la forme du verbe en grec, un participe parfait, soit utilisée ici pour décrire les croyants en question. Cela veut dire « qu’ils étaient venus à la foi et qu’ils continuaient à croire ». Cela vaut, naturellement, pour tous les vrais enfants de Dieu. Cependant dans notre texte, il n’est question que de croyants qui, avant leur conversion, avaient pratiqué la magie. Ils étaient nombreux. Ils furent profondément touchés dans leurs consciences par ce qu’ils venaient d’entendre et de vivre.
Leur droiture se manifesta en ce qu’ils vinrent confesser et déclarer leurs actions d’autrefois. Ils voyaient leur chemin antérieur à la lumière de Dieu, et ne pouvaient que s’en détacher avec horreur. Cela alla si loin que beaucoup d’entre eux réunirent les livres qui contenaient les formules d’évocation d’esprits et les paroles magiques, et ils les brûlèrent devant tous, c’est-à-dire publiquement. Leur grande valeur, estimée à cinquante mille pièces d’argent, ne les a pas du tout empêchés de le faire. Ils reconnaissaient l’incompatibilité qu’il y a à posséder de tels mauvais livres avec leur nouvelle position en Christ. Ils n’ont pas non plus vendu les livres pour en récupérer le prix — non, ils les brûlèrent. « Félicitations ! » avons-nous envie de dire. Puissions-nous, nous aussi, procéder de cette manière avec tout ce qui est douteux, et nous en séparer sans réticence, quand bien même ce serait des choses de valeur aux yeux des autres !
Le verset 20 contient une constatation extraordinairement vaste quant au résultat de tout cela : « C’est avec une telle puissance que la parole du Seigneur croissait et montrait sa force ». Le regard se porte en arrière et parcourt toute la section qui précède et le récit sur l’œuvre du Seigneur à Éphèse. Le travail et la prédication du « vase d’élection » dans la puissance du Saint Esprit était si béni que le fruit en était le suivant : « la parole du Seigneur croissait et montrait sa force ».
Quand il est question de « croissance » de la Parole de Dieu, cela peut en général s’entendre de deux manières. Il peut s’agir premièrement d’une diffusion et d’une réception multipliées de l’évangile. Quand de plus en plus de gens se convertissent, il y a, dans ce sens, une croissance de la Parole. On a déjà eu cela au ch. 12 v.24.
D’un autre côté, il peut s’agir d’une croissance dans la compréhension de la Parole par les individus. Nous saisissons progressivement la vérité divine. Que Dieu veuille que nous comprenions de manière croissante les richesses insondables de Son évangile, et que sa Parole croisse aussi de cette manière. Quand « la parole de la vérité de l’évangile » parvint aux Colossiens, elle se mit à porter du fruit et à croître, comme aussi dans tout le monde, depuis le jour où ils l’avaient entendu (Col. 1:5, 6). Visiblement ici, il faut penser aux deux sens de la croissance de la Parole.
À Éphèse et dans toute la province, c’est justement ce qui s’était passé : la Parole du Seigneur gagnait de plus en plus de convertis, et progressivement et de manière croissante elle remplissait les cœurs et les vies. C’est de cette manière que la Parole montrait sa force. Il est merveilleux de voir présenté ce résultat final de l’Esprit Saint dans l’action de l’apôtre Paul pendant les deux ou trois ans à Éphèse ! Il nous faut louer le Seigneur Jésus et lui demander qu’Il veuille encore opérer par l’Esprit dans nos jours de la fin, et attirer des pécheurs à Son cœur.
« Or, après que ces choses se furent accomplies, Paul se proposa dans son esprit de passer par la Macédoine et par l’Achaïe, et d’aller à Jérusalem disant : après que j’aurai été là, il faut que je voie Rome aussi. Et ayant envoyé en Macédoine deux de ceux qui le servaient, Timothée et Éraste, il demeura lui-même quelque temps en Asie » (19:21, 22).
L’expression « Après que ces choses se furent accomplies » nous amène à la fin des deux années mentionnées au v. 10. C’est pendant ce temps-là (56 à 57 ap. J. C.) que Paul écrivit depuis Éphèse sa première épître aux Corinthiens (1 Cor. 16:8).
L’apôtre sentait que son travail à Éphèse tirait à sa fin. Et ainsi il se proposa dans son esprit de passer d’abord à travers la Macédoine et l’Achaïe. De là, il voulait faire le voyage vers Jérusalem, et finalement Rome. Ce plan fut effectivement accompli comme Luc le raconte dans le reste du livre des Actes, sauf que Paul a vu Rome d’une manière à laquelle il ne s’attendait pas : comme prisonnier.
Si Paul envisageait de traverser la Macédoine et l’Achaïe, il y avait au moins deux raisons à cela. D’une part, il voulait encore une fois visiter les diverses assemblées, pour voir comment elles allaient. C’était toujours sa manière de faire. D’autre part, il lui tenait très à cœur de veiller à la grande collecte faite à cette époque pour les saints souffrant la faim à Jérusalem (1 Cor. 16:1 ; 2 Cor. 8 ; Rom. 15:25). Il est touchant de voir comment le grand apôtre lui-même se souciait des besoins temporels les plus ordinaires des croyants.
Le véritable but de son voyage était pourtant Rome (Actes 19:21). Dans son épître aux Romains, il écrit aux croyants de là-bas combien il avait tant désiré venir chez eux et qu’il en avait été empêché jusque-là (Rom.1:10-13). L’assemblée à Rome n’était pas née par son moyen. Et ainsi il voulait seulement « affermir » les saints là-bas et leur « faire part de quelque don de grâce spirituel » (Rom.1:11), — afin de ne pas édifier sur le fondement d’autrui (Rom. 15:20). Le but de tout était aussi touchant que simple : il s’agissait d’être consolé au milieu d’eux et avec eux, « vous et moi, chacun par la foi qui est dans l’autre » (Rom.1:12). Quelle humilité chez ce grand homme de Dieu ! C’est en plein accord avec cette simplicité qu’il faut comprendre l’indication du chroniqueur, selon laquelle Paul avait seulement dit qu’il devait « voir » aussi Rome (Actes 19:21).
Néanmoins, c’est avec une autorité apostolique que Paul agit quand il envoie en Macédoine deux de ceux qui le servaient, Timothée et Éraste. Il séjourna lui-même encore un long temps en Asie. Quant aux deux frères nommés, Timothée est déjà connu, un « véritable enfant dans la foi » pour l’apôtre (1 Tim. 1:2). Par contre nous rencontrons Éraste pour la première fois ici. C’est la même personne que celle de 2 Tim. 4:20. Par contre l’administrateur de la ville de Rom. 16:23, Éraste, n’a guère appartenu à ceux qui se tenaient constamment auprès de l’apôtre et le servaient.
« Or il y eut en ce temps-là un grand trouble au sujet de la voie ; car un certain homme nommé Démétrius, qui travaillait en argenterie et faisait des temples de Diane en argent, procurait un grand profit aux artisans ; et il les assembla, ainsi que ceux qui travaillaient à de semblables ouvrages, et dit : Ô hommes, vous savez que tout notre bien-être vient de ce travail ; et vous voyez et apprenez que non seulement à Éphèse, mais presque par toute l’Asie, ce Paul, usant de persuasion, a détourné une grande foule, disant que ceux-là ne sont pas des dieux, qui sont faits de main. Et non seulement il y a du danger pour nous que cette partie ne tombe en discrédit, mais aussi que le temple de la grande déesse Diane ne soit plus rien estimé, et qu’il n’arrive que sa majesté, laquelle l’Asie entière et la terre habitée révère, soit anéantie » (19:23-27).
Pendant le temps que Paul passa en Asie (19:22), il se souleva une grande émeute « au sujet de la voie ». Ce terme « la voie » veut dire la voie chrétienne, la voie de la confession chrétienne. Nous avons déjà eu ce terme au v.9 (notre ch. 19) et nous le rencontrerons encore une fois au ch. 24, où il est dit de Félix qu’il avait une connaissance plus précise de la voie (24:22). Cette voie chrétienne était maintenant à Éphèse l’occasion d’un soulèvement considérable fomenté cette fois-ci, non pas par des Juifs mais par des païens.
Le meneur était un certain orfèvre Démétrius. Celui-ci fabriquait de petits temples portables en argent de la déesse Diane, ce qui lui procurait ainsi qu’aux autres artisans un gain considérable. Il semble que Démétrius présidait toute une corporation de ces gens-là.
Le temple de Diane, selon le nom romain, ou Artémis selon le nom grec, était l’une des sept merveilles du monde. Sa surface de base mesurait 140 sur 70 mètres ; 127 colonnes de marbre se dressaient là, ayant chacune 20 mètres de haut. Sa construction avait duré 200 ans, et il fut détruit par les Goths en l’an 262 après J.C. Au temps de l’apôtre Paul, il se dressait dans tout l’éclat de sa grandeur et de son prestige ; mais Diane ou Artémis, déesse de la chasse, l’une des douze divinités principales des Grecs, était vénérée dans le monde entier. Nous pouvons bien nous représenter combien les gens désiraient ces petits souvenirs en argent.
La source abondante de rentrée d’argent se trouvait en danger de tarir, et Démétrius s’en rendait compte. À cause de la diffusion extraordinaire de l’évangile dans cette région, les acheteurs de temples en argent se volatilisaient. Et ainsi il eut recours à la force pour réprimer la liberté de l’évangile à Éphèse. Il rassembla les artisans et les autres ouvriers de la branche et leur tint un discours militant.
Il est instructif de voir les arguments dont il se servit. Il n’en utilisa pas qu’un, mais trois. D’abord il attira l’attention sur la perte de prospérité qui les menaçait, si cette activité déclinait. Il est bien remarquable que ce soit le premier argument ! Le côté pécunier était absolument primordial. Il pesait davantage à ses yeux que toute la vénération de la déesse Diane.
Avant de mettre sur le tapis le deuxième argument, il se met à parler de la réussite extraordinaire de l’activité de Paul. Il est intéressant d’entendre un tel jugement de la bouche d’un orfèvre païen ; « ce Paul » avait persuadé et détourné une grande foule, non seulement à Éphèse, mais presque dans toute l’Asie, disant que ce ne sont pas des dieux, ceux qui sont faits de main d’homme. Bien sûr, la pensée de Paul était certainement rendue correctement sur ce point. Mais nous ne devons pas croire que cette grande foule dont parlait Démétrius, ces nombreuses personnes qu’il avait en vue, étaient toutes devenues chrétiennes. Manifestement des milliers de païens avaient perdu la foi dans leurs dieux païens sous l’effet de la prédication de Paul.
La source abondante de rentrée d’argent des artisans était effectivement en danger de tomber en discrédit ! Or à cela se rajoutait, mais seulement en deuxième argument, qu’à cause de tous ces événements, le temple de la grande Diane ne soit estimé pour plus rien, et que sa « majesté », révérée par l’Asie entière et par toute la terre habitée, soit anéantie. C’est l’élément religieux qui, souvent comme ici, ne sert que d’auréole.
Or si la déesse Diane perdait sa grande gloire, alors Éphèse aussi perdrait sa position de premier rang parmi les provinces environnantes. La prospérité de la ville était inséparable de la popularité du culte de Diane. C’est là le troisième argument que Démétrius avance. Nous pouvons le qualifier d’argument patriotique.
« Et quand ils eurent entendu [ces choses], ils furent remplis de colère, et s’écriaient, disant : Grande est la Diane des Éphésiens ! Et [toute] la ville fut remplie de confusion ; et, d’un commun accord, ils se précipitèrent dans le théâtre, entraînant avec eux Gaïus et Aristarque, Macédoniens, compagnons de voyage de Paul. Et comme Paul voulait entrer vers le peuple, les disciples ne le lui permirent pas ; et quelques-uns aussi des Asiarques, qui étaient ses amis, envoyèrent vers lui pour le prier de ne pas s’aventurer dans le théâtre. Les uns donc criaient une chose, les autres une autre ; car l’assemblée était en confusion, et la plupart ne savaient pas pourquoi ils étaient assemblés. Et ils tirèrent Alexandre hors de la foule, les Juifs le poussant en avant ; et Alexandre, faisant signe de la main, voulait présenter une apologie au peuple. Mais quand ils eurent connu qu’il était Juif, ils s’écrièrent tous d’une seule voix, durant près de deux heures : Grande est la Diane des Éphésiens ! » (19:28-34).
Le discours incendiaire de Démétrius ne manqua pas son but. Une grande émeute se souleva dans la ville, et les gens affluèrent, remplis de colère, criant et disant : Grande est la Diane des Éphésiens ! Il est remarquable que ce cri commun ne fait que reproduire ce que les zélateurs de tous les temps ont l’habitude de clamer dans les fêtes de leur divinité. Elle restait toujours « la Diane des Éphésiens », car c’est à Éphèse que son image était tombée du ciel, et c’était là que se dressait son sanctuaire central, de sorte qu’ailleurs aussi elle portait ce nom.
Le soulèvement fit tache d’huile rapidement, de sorte qu’à l’improviste toute la ville fut en confusion. Les gens affluaient tous ensemble vers l’amphithéâtre. Celui-ci avait une arène de plus de 20000 places assises, et elles servaient comme lieu de rassemblement habituel pour les grandes foules. La tempête au théâtre ne paraît pas avoir été planifiée, mais s’être développée spontanément. Il était habituel que les affaires publiques soient traitées et décidées à l’amphithéâtre, justement quand il y avait menace de tumulte.
La foule incontrôlée entraîna les macédoniens Gaïus et Aristarque, les compagnons de voyage de Paul jusqu’au théâtre. Mais à l’évidence, eux-mêmes ne savaient pas pourquoi. En tout cas personne ne les agressa, et aucun mal n’arriva. L’affaire aurait tourné certainement autrement si Paul lui-même avait été présent au lieu de ses compagnons de voyage.
Effectivement celui-ci envisagea d’aller parmi le peuple, — une entreprise audacieuse extrêmement dangereuse ! Mais les disciples ne le lui permirent pas. Il n’aurait fait qu’aggraver la situation. Il est alors parlé de quelques Asiarques (des gens qui présidaient aux fêtes et jeux publics), qui sont appelés « ses amis », et qui envoyèrent vers lui pour le prier de ne pas s’aventurer au théâtre. Comment se fait-il que ces hommes qui ne faisaient pas partie des disciples soient devenus ses amis, cela ne nous est pas dit. Cependant nous pouvons en déduire que la doctrine de Paul et sa personnalité avaient eu une profonde influence sur eux. Malgré tout le grand courage et le caractère intrépide de l’apôtre, il écouta les observations des disciples et de ses amis, ne méprisant aucun conseil. Cela n’est-il pas un témoignage touchant de la grâce et de l’humilité qui conduisaient ce serviteur de Dieu ? Cependant c’était la main de Dieu qui se servait de ces hommes comme instruments pour préserver Son serviteur.
Quant à la foule, elle était dans un désordre total. Les uns criaient une chose, les autres une autre, et la plupart ne savaient même pas pourquoi ils étaient rassemblés. Démétrius avait lancé un mouvement qu’il ne pouvait plus contrôler. Peut-être aussi était-il même envahi par la peur.
Un certain Juif nommé Alexandre fut poussé par ses compatriotes à parler à la foule. Vraisemblablement ils le choisirent en tant qu’orateur pour montrer à la population grecque, avec toute son éloquence, que même parmi les concitoyens de Paul, il y avait beaucoup de gens qui n’étaient pas de son côté. C’était justement le cas de ces Juifs présents. C’est ce qu’ils voulaient faire comprendre par Alexandre. Mais leur projet de se distancer de Paul échoua complètement. La foule n’avait pas encore appris à distinguer entre Juifs et chrétiens. Pour eux un Juif était un Juif et donc un ennemi déclaré de leur idolâtrie. Quand ils se rendirent compte qu’Alexandre était Juif, ils le firent taire par leurs cris, et clamèrent d’une seule voix pendant deux heures : Grande est la Diane des Éphésiens ! — Quel tableau bouleversant et affligeant de l’homme sans Dieu donnent ces Éphésiens si fiers !
Le soulèvement démesuré de la foule, exacerbé encore par l’apparition d’Alexandre, ne put être apaisé que par l’intervention du secrétaire de la ville.
« Mais le secrétaire de la ville, ayant apaisé la multitude, dit : Hommes éphésiens, qui est donc l’homme qui ne sache pas que la ville des Éphésiens est consacrée à la garde du temple de la grande Diane, et à l’image tombée du ciel ? Ces choses donc étant incontestables, il convient que vous vous teniez tranquilles et que vous ne fassiez rien précipitamment : car vous avez amené ces hommes qui ne sont ni des voleurs sacrilèges, ni des blasphémateurs de votre déesse. Si donc Démétrius et les artisans qui sont avec lui ont quelque affaire contre quelqu’un, les tribunaux sont ouverts et il y a des proconsuls : qu’ils s’accusent les uns les autres. Et si vous avez une réclamation à faire sur d’autres sujets, on en décidera dans l’assemblée légale ; car nous sommes en danger d’être accusés de sédition pour ce qui s’est passé aujourd’hui, puisqu’il n’y a pas de motif que nous puissions alléguer pour rendre raison de cet attroupement. Et quand il eut dit ces choses, il congédia l’assemblée » (19:35-41).
Le secrétaire de la ville était une personnalité importante de la vie publique de la ville. On pourrait comparer sa fonction avec celle d’un adjoint au maire. La seule apparition de cet homme calma la foule. Le fait qu’il ne soit apparu qu’après deux heures de clameur, peut provenir de ce qu’il s’était d’abord occupé à comprendre les circonstances. Car son argumentation montre qu’il était parfaitement au courant des faits.
Son discours au peuple était sensé et modéré, pour ne pas dire hautement diplomatique. Il commença par flatter les gens d’Éphèse avec la déclaration exagérée que personne n’ignorait que la ville d’Éphèse était une gardienne du temple de la grande Diane et de son image tombée du ciel. Pourquoi alors une telle clameur ? La chose étant incontestable, ils avaient à se tenir tranquilles et à ne pas se précipiter dans l’action, comme ce qui se passait maintenant. Il n’y avait aucune raison valable pour ce qu’ils faisaient.
Si nous qualifions le discours du secrétaire de la ville de diplomatique, c’est qu’au sujet du culte de Diane, c’est un exemple frappant de l’effronterie avec laquelle est affirmé avec vigueur ce qui est entièrement faux et mensonger quant à Dieu et aux choses saintes ; c’est pour nous un avertissement. Certes, cet homme était un païen comme tous les autres. Cependant il conforte ses auditeurs au plus haut degré dans la folie de leur superstition, qu’il y croie lui-même ou non. Dans ce sens, il était un instrument de Satan, un jouet de celui qui par cette tactique a déjà induit en erreur et trompé des foules de gens ayant des idées religieuses. L’intelligence et la logique humaines n’ont pas prospéré dans cette tactique.
Ensuite, le secrétaire de la ville s’est mis à parler des deux hommes qui avaient été amenés, les compagnons de voyage de Paul. Il certifie qu’ils n’étaient ni des voleurs du temple, ni des blasphémateurs de leur déesse. Manifestement, il était au courant de ce qu’étaient Gaïus et Aristarque et de ce qu’ils avaient fait, de sorte qu’il peut parler librement de la cause de chacun, sans craindre d’être contredit.
Nous pouvons en tirer la conclusion que Paul avait agi à Éphèse avec autant de prudence qu’à Athènes. Certainement, par la prédication de Christ il sapait toute l’idolâtrie. Mais jamais il n’a invectivé ce qui était saint pour les autres. Ses arguments étaient toujours sérieux et pleins de retenue. Il ne blessait pas inutilement les préjugés des païens. Quel modèle à imiter, pour nous aussi de nos jours ! Car n’est-il pas typique dans cette affaire, qu’un idolâtre se soit senti obligé de protester de l’innocence de ces hommes en face des accusations religieuses qu’on leur mettait à charge ?
En ce qui concerne maintenant Démétrius et ses collègues, il leur rappelle qu’il y avait des tribunaux. Ils pouvaient se tourner vers eux, au cas où un tort illégitime leur aurait été causé. En outre il y avait des proconsuls auxquels ils pouvaient faire appel pour le cas où les instances juridiques inférieures auraient failli en prononçant le droit. L’affaire pouvait donc suivre son cours, autant que Démétrius et ses compagnons le désiraient.
Mais si sur d’autres sujets ajouta-t-il, ils avaient une requête à faire, on en déciderait dans l’assemblée légale. Leur rassemblement du jour était tout sauf légal, et le secrétaire de la ville ne laissa aucun doute à cet égard. C’était toujours une affaire sérieuse de provoquer un rassemblement.
Finalement il tire l’argument massue : « ils étaient tous en danger d’être accusés de sédition » par le proconsul. Diplomatiquement il s’inclut dans le risque couru : « nous sommes en danger… ». Effectivement en tant que représentant de la ville il serait impliqué dans l’affaire. Car rien ne rendait les Romains plus méfiants et jaloux qu’un rassemblement tumultueux. Ils ne supportaient aucun tumulte qui mettait en danger la paix publique, mais réagissaient très durement à l’encontre. C’est pourquoi le secrétaire de la ville termine son discours au peuple avec l’avertissement grave qu’aucun d’eux n’avait d’excuse plausible pour le proconsul quant au déroulement de la journée. Avec cela, il congédia l’assemblée en ordre.
Ainsi l’attaque de Satan échoua complètement, et ses efforts méchants pour stopper l’œuvre bénie du Seigneur dans cette ville, n’aboutirent à rien. Dieu dans Sa providence et dans Sa grâce veillait sur Ses serviteurs à Éphèse, et Il se servit pour cela des autorités régulières. Il en est ainsi comme nous l’avons souvent dit : notre grand Dieu a les rênes en main, et rien n’échappe à Son contrôle. Il siège aux commandes, et conduit tout selon Ses plans et Sa volonté. Faisons-Lui confiance !
Le ch. 19 des Actes a placé devant nos cœurs le ministère dévoué et continuel de l’apôtre Paul à Éphèse. Une riche moisson put être engrangée. Bien que Dieu dans Sa providence accordât longtemps des conditions paisibles sans persécution, l’adversaire finit ici aussi par se mettre à troubler l’œuvre bénie pour si possible l’anéantir. Il se servit pour cela d’un soulèvement populaire fomenté par un orfèvre idolâtre, mais qui fut rapidement dissous, il est vrai par les autorités. Paul et ses deux compagnons de voyage ne souffrirent de rien. Sans trouble ils purent aller leur chemin. Cependant Paul considéra que le moment était venu de prendre congé des amis d’Éphèse et de reprendre son voyage. C’est par cela que commence le ch. 20.
« Or, après que le tumulte eut cessé, Paul fit venir les disciples et les ayant embrassés, il partit pour aller en Macédoine. Et ayant traversé ces quartiers-là, et ayant beaucoup exhorté les disciples, il vint en Grèce. Et après qu’il y eut séjourné trois mois, les Juifs lui ayant dressé des embûches comme il allait s’embarquer pour la Syrie, on fut d’avis de s’en retourner par la Macédoine. Et Sopater de Bérée, fils de Pyrrhus, l’accompagna jusqu’en Asie, et les Thessaloniciens Aristarque et Second, et Timothée de Derbe, et Tychique et Trophime d’Asie. Ceux-ci ayant pris les devants, nous attendirent en Troade. Et pour nous, nous partîmes à force de voiles, de Philippes, après les jours des pains sans levain, et nous arrivâmes au bout de cinq jours auprès d’eux dans la Troade, et nous y séjournâmes sept jours » (20:1-6).
Paul n’avait pas encore quitté Éphèse que le tumulte s’était calmé. Il voulut être encore une fois avec les disciples dans le calme et le repos. C’est pour cela qu’il les fit venir et les exhorta (ou encouragea) [ndT : c’est ainsi que la traduction Elberfeld rend « les ayant embrassés » de JND]. Combien il était nécessaire qu’ils aient cet encouragement juste au moment où l’apôtre les laissait et qu’ils restaient sans son secours dans une ville pareillement adonnée à l’idolâtrie ! Après avoir pris congé — combien cela a dû être lourd pour Paul, — il partit pour voyager vers la Macédoine.
Nous devons ici nous rappeler que le but final et réel du voyage de l’apôtre était Jérusalem (19:21). La grande pauvreté des saints vivant là-bas lui tenait à cœur, et il était soucieux de soulager leur détresse par les collectes faites au milieu des chrétiens des nations (2 Cor. 8:9). Mais auparavant il voulait aller en Macédoine et consoler les assemblées nées dans ces régions à la suite de ses précédents voyages et de son ministère. Il les ‘exhorta beaucoup’, ce qui nous rappelle de nouveau toute l’importance aux yeux de Dieu de l’édification et de l’affermissement de ceux qui sont Siens. Paul, en tout cas, en plus de gagner des âmes, n’oubliait pas de s’occuper des croyants et de leurs progrès dans la foi. Nous voyons encore une fois cela clairement ici en Macédoine, même si le récit à ce sujet est fort concis.
La concision de Luc est vraisemblablement la raison pour laquelle il mentionne certes la visite de trois mois en Grèce, mais revient immédiatement à son voyage vers Jérusalem à travers la Macédoine et la Troade. Il passe complètement par-dessus le fait que Paul avait déjà été peu auparavant en Troade. La deuxième épître aux Corinthiens donne l’explication de l’affaire et le chaînon manquant. Nous y lisons ce que dit l’apôtre : « Or, étant arrivé dans la Troade pour l’évangile du Christ, et une porte m’y étant ouverte dans le Seigneur, je n’ai point eu de repos dans mon esprit, parce que je n’ai pas trouvé Tite, mon frère ; mais, ayant pris congé d’eux, je suis parti pour la Macédoine » (2 Cor. 2:12, 13). Son séjour en Troade avait été extrêmement court et sans résultat, de sorte que Luc n’avait guère à raconter là-dessus. Nous comprenons pourquoi l’écrivain s’abstient de toute mention de cette visite en Troade.
Après un séjour de trois mois en Grèce, pendant lequel Paul a aussi écrit l’épître aux Romains, les pensées de l’apôtre se tournèrent de nouveau vers Jérusalem. Il y avait deux routes. Laquelle choisir ? La plus simple était d’aller par mer vers la Syrie, et la deuxième passait par la Macédoine. Initialement il voulait prendre la première route, mais ayant appris une attaque des Juifs contre lui, il décida de revenir par la Macédoine. Car sur l’un des nombreux bateaux il aurait été facile de le neutraliser et de l’éliminer. La décision de Paul montre une fois de plus qu’il n’était pas seulement courageux, mais aussi réfléchi, ne mettant pas à la légère sa vie en jeu. Il ne se mettait pas inutilement en danger. N’était-ce pas Dieu qui lui avait donné l’information sur une attaque de la part des Juifs ?
Ainsi Paul revint à Philippes par voie terrestre. Sept frères l’accompagnèrent. En premier il y a Sopater (ou Sosipater). Il était de Bérée ; il est mentionné encore une fois en Rom. 16:21. Aristarque et Second étaient de l’assemblée à Thessalonique. Nous avons déjà entendu parler d’Aristarque au ch.19 v.29 (voir aussi 27:2 ; Col. 4:10 ; Philémon 24). Second n’apparaît qu’ici. Gaïus était de Derbe. Littéralement il est dit, Gaïus un Derbien. Ce Gaïus n’est nommé qu’ici. Timothée est le plus connu. Il venait de Lystre (16:1). Tychique et Trophime d’Asie sont bien connus. Tychique est souvent mentionné. Paul en parle avec amour et estime en Éph. 6:21 et Col. 4:7 (voir aussi 2 Tim. 4:12 ; Tite 3:12). Trophime apparaîtra devant nous encore une fois à Jérusalem (Actes 21:29). C’était un Éphésien, et il est nommé une dernière fois en 2 Tim. 4:20.
Tous ces serviteurs du Seigneur étaient des compagnons d’œuvre estimés de l’apôtre Paul. Ils considéraient comme un privilège de s’associer autant qu’il était possible à cet instrument béni dans son service, et de travailler en communion avec lui. Paul les envoyait ici ou là chargés de missions précises quand d’autres travaux ou des circonstances particulières l’empêchaient d’aller lui-même. D’autres ouvriers, comme par exemple Apollos, servaient le Seigneur de manière plus autonome, et indépendante de Paul. Cela ne nuisait pourtant en aucune manière à son amour et sa confiance en eux.
Les sept collaborateurs « ayant pris les devants, nous attendirent en Troade » selon l’expression du chroniqueur. C’est la manière modeste de signaler que lui-même a de nouveau rejoint l’apôtre Paul à Philippes pour l’accompagner. Nous avions vu au ch.16 v.10-17 comment Luc s’introduit avec le mot « nous » ; il refait la même chose ici. À cette période-là il était manifestement resté à Philippes (16:40), et nous le retrouvons maintenant de nouveau dans cette ville. Nous pouvons en conclure que Luc a passé les années intermédiaires (5 ou 6 ans) essentiellement là, au service du Seigneur, sans être auprès de Paul. Maintenant il utilise de nouveau le « nous » : « nous partîmes à force de voiles, de Philippes, après les jours des pains sans levain, et nous arrivâmes au bout de cinq jours auprès d’eux dans la Troade, et nous y séjournâmes sept jours ».
Ces sept hommes allèrent directement en Troade [ou : à Troas], selon la volonté de Paul, et durent l’attendre là, lui et Luc. Nous ne savons pas pourquoi ces deux restèrent seuls quelques jours à Philippes. Nous ne savons pas davantage la raison pour laquelle le voyage relativement court par mer jusqu’en Troade exigea cinq jours. Quoi qu’il en soit, ils arrivèrent là et trouvèrent leurs sept compagnons bien portant, et séjournèrent sept jours avec eux en Troade.
Nous ne savons pas comment l’assemblée est née en Troade [à Troas]. Mais elle existait à ce moment-là, et dans ce qui suit (20:7-12) nous vivons un morceau de la vie normale d’assemblée, ce qui a de quoi nous réjouir profondément.
« Et le premier jour de la semaine, lorsque nous étions assemblés pour rompre le pain, Paul qui devait partir le lendemain, leur fit un discours, et il prolongea le discours jusqu’à minuit. Or il y avait beaucoup de lampes dans la chambre haute où nous étions assemblés. Et un jeune homme nommé Eutyche, qui était assis sur la fenêtre, accablé d’un profond sommeil, comme Paul prêchait très longuement, tomba, accablé par le sommeil, du troisième étage en bas, et fut relevé mort. Mais Paul étant descendu, se pencha sur lui, et l’ayant embrassé, il dit : ne soyez pas troublés, car son âme est en lui. Et après qu’il fut remonté, et qu’il eut rompu le pain et mangé, et qu’il eut conversé longtemps jusqu’à l’aube, il partit. Et ils amenèrent le jeune garçon vivant, et ils furent extrêmement consolés » (20:7-12).
La section s’ouvre avec une constatation extrêmement importante : « Et le premier jour de la semaine, lorsque nous étions assemblés pour rompre le pain… » (20:7).
Nous avons ici la deuxième mention historique de la fraction du pain dans le livre des Actes, la première étant au ch.2 v.46. Du fait que nous avons parlé à cette occasion des points principaux de cette institution du Seigneur (voir un peuple pour Son nom, parties 1 et 2, pages 308 à 312 ), il peut suffire ici de se limiter à un coup d’œil sur les enseignements contenus dans la section qui est devant nous.
C’est la volonté de Dieu qu’il y ait déjà sur la terre une expression visible de ce qu’est l’assemblée dans Sa pensée. Mais comment peut-on voir l’assemblée de Dieu sur la terre, comment devient-elle visible ? Par le fait que les saints se rassemblent à certaines réunions et qu’ils le font selon les directions que Dieu a consignées pour cela. En tout le Nouveau Testament montre trois réunions, et seulement ces trois-là, où les croyants sont réunis « comme [en] assemblée » (1 Cor. 11:18), c’est-à-dire dans leur caractère d’assemblée réunie au nom du Seigneur Jésus. Ces trois réunions sont : la réunion pour la fraction du pain (Actes 2:42, 46 ; 20:7), la réunion pour l’édification (1 Cor. 14), et la réunion pour la prière (Matt. 18:19).
C’est aussi la première fois que nous apprenons ici que des croyants en Troade se réunissaient avec l’intention expresse et exclusive de rompre le pain. Il est tout à fait certain que la réunion pour la fraction du pain n’est pas l’occasion de présenter des demandes, sinon une seule : « viens Seigneur Jésus », car nous rompons le pain seulement « jusqu’à ce qu’Il vienne ». Également la prière pour les malades et les affaiblis, les demandes pour le monde perdu, les supplications pour notre propre croissance, et d’autres de ce genre n’ont pas leur place à ce moment-là. Nous pouvons prier en tout temps chez soi et dans les réunions pour la prière ; mais ce nouveau service, la fraction du pain, doit être caractérisé par les actions de grâce (remerciements).
Cela ressort clairement de la manière d’agir du Seigneur lors de l’institution de la Cène : Il a pris du pain et a rendu grâce. Dans un autre passage il est dit qu’Il a béni. Le Seigneur se tenait là peu avant Sa mort sur la croix. Aussi grande qu’allait être Sa souffrance (Lui seul savait ce qu’elle comporterait pour Lui, et pour Lui seul), Lui voyait le conseil de Dieu, Lui voyait l’œuvre qui allait être accomplie et qui est le fondement de l’accomplissement de ce conseil ; par-delà Il voyait les immenses résultats de Sa mort, et Son cœur débordait d’actions de grâce. Aujourd’hui nous nous tenons derrière l’œuvre de rédemption accomplie par Christ, nous en sommes les objets ; et ce qui nous convient c’est l’action de grâce, la louange et l’adoration. Ces choses-là ne sont-elles pas notre réponse au « testament » qu’Il nous a laissé ? « Faites ceci en mémoire de moi » (Luc 22:19 ; 1 Cor. 11:24). Voilà pour ainsi dire Son « testament » pour nous, les Siens.
Notre verset d’Actes 20 donne un éclaircissement sur un deuxième point, à savoir la question du jour et de la fréquence à adopter pour la fraction du pain. Certes, l’Écriture ne donne pas d’ordre spécial, et nous savons que les premiers chrétiens à Jérusalem ont rompu le pain chaque jour (2:46). Cependant cela semble n’avoir été le cas qu’au commencement et qu’à Jérusalem.
Plus tard, au temps d’Actes 20, les chrétiens en Troade avaient l’habitude de se réunir pour la fraction du pain chaque premier jour de la semaine, le jour de la résurrection du Seigneur. Le fait que ce soit l’habitude des chrétiens de ce temps-là, est confirmé par une circonstance particulière, qui ne doit pas rester méconnue. Il semble précisément que l’apôtre n’était pas arrivé chez les saints en Troade [à Troas] à temps pour la fraction du pain, car nous lisons qu’il séjourna là sept jours avec ses compagnons. Ce séjour est d’autant plus remarquable qu’il se sentait très pressé d’arriver à Jérusalem. Manifestement il séjourna en Troade aussi longtemps que nécessaire pour rompre le pain avec les croyants de l’endroit au prochain jour du Seigneur. Et après avoir discouru jusqu’à l’aube, il repartit en voyage sans hésiter. Une réunion particulière pour la fraction du pain durant la semaine ne fut visiblement pas convoquée. Par ailleurs l’apôtre avait ordonné, au sujet de la collecte pour les saints, que chacun mette à part chez lui « chaque premier jour de la semaine » (1 Cor. 16:1, 2). Cela suggère que la collecte de ce qui avait été mis à part se faisait en liaison avec la fraction du pain au premier jour de la semaine.
La fraction du pain est une institution permanente et perpétuelle dans la maison de Dieu jusqu’au retour du Seigneur. Il ne faut la remplacer par rien, ni par une prédication ni par autre chose. Elle est la chose la plus importante pour le jour du Seigneur
Il faut distinguer la fraction du pain d’avec le service de la Parole. Les croyants en Troade s’étaient rassemblés pour rompre le pain. Mais ensuite nous voyons qu’après la fraction du pain, l’apôtre s’est entretenu avec eux et la présentation de la Parole s’est prolongé jusqu’à minuit. Il était conscient des dangers qui l’attendaient dans l’avenir (20:23), et ainsi il s’efforçait d’autant plus, dans ses paroles d’adieu aux disciples, de leur communiquer le plus possible la vérité divine. Quel serviteur dévoué !
Le local dans lequel ils se rassemblaient doit avoir été d’une certaine dimension, car beaucoup de lampes (flambeaux) étaient nécessaires pour éclairer la salle. On peut bien se représenter que ces nombreux flambeaux parmi les nombreuses personnes avaient pour effet de chauffer la salle. Eutyche, un jeune homme assis sur un rebord de fenêtre, fut pris d’un profond sommeil pendant que Paul parlait longuement, et tomba en bas du troisième étage. Il fut « relevé mort », non pas « comme mort ». Il était réellement mort, et celui qui en a fait le diagnostic n’est autre que Luc, le médecin bien-aimé.
Au vu de ce grave incident, Paul interrompit son discours, descendit, se pencha sur lui et l’embrassa. C’est semblable à ce qu’avait fait autrefois le prophète Élie quand il ressuscita le fils de la veuve. Cependant, à l’époque, l’âme de l’enfant avait déjà quitté le corps (1 Rois 17:21, 22), tandis qu’ici, Paul leur dit de ne pas s’inquiéter, car l’âme était encore en lui. Il devait seulement rétablir le lien entre l’âme et le corps. Cela eut lieu par le moyen de l’apôtre et par la puissance de Dieu. C’est ainsi que les frères ramenèrent le garçon vivant et une joie profonde remplit ceux qui étaient rassemblés. « Ils furent extrêmement consolés ».
Du fait qu’Eutyche était de nouveau éveillé à la vie, Paul revint dans la chambre haute. Après tout ce qui s’était passé, il avait d’abord besoin de se fortifier le corps. C’est ce dont il s’agit quand il est dit : « après… qu’il eut rompu le pain et mangé ». Il ne s’agissait pas ici de la fraction du pain comme action commune de l’assemblée, mais il s’agit d’une action personnelle de l’apôtre, la prise normale de nourriture pour se revigorer personnellement. Cela est confirmé par la traduction littérale de « mangé », l’expression signifiant plutôt « quand il eut goûté ». Cela exprime une certaine jouissance. Il est caractéristique que le Seigneur, lors de l’institution de la Cène, a justement évité ce mot, et a simplement dit : « prenez, mangez » (Matt. 26:26).
Après la fraction du pain, Paul parla longuement jusqu’à l’aube. Son cœur était plein de consolation pour ses frères ; car il ne savait pas s’il les reverrait jamais. Et ainsi il se sépara d’eux et leur laissa Eutyche vivant pour leur grande joie.
« Or pour nous, ayant pris les devants sur un navire, nous fîmes voile vers Assos où nous devions prendre Paul à bord ; car il l’avait ainsi ordonné, étant dans l’intention d’aller lui-même à pied. Et lorsqu’il nous eut rejoints à Assos, nous le prîmes à bord, et nous allâmes à Mitylène. Et ayant fait voile de là, nous arrivâmes le lendemain à la hauteur de Chios ; et le jour suivant nous touchâmes à Samos ; et, nous étant arrêtés à Trogylle, nous vînmes le jour d’après à Milet ; car Paul avait résolu de passer devant Éphèse, de manière à ne pas dépenser son temps en Asie ; car il se hâtait pour être, s’il lui était possible, le jour de la Pentecôte à Jérusalem » (20:13-16).
La description du voyage suivant de Troade à Milet se limite à mentionner les uns après les autres les lieux particuliers où cette compagnie de voyageurs accosta.
Deux remarques méritent cependant notre attention. Ce fut le désir de l’apôtre de faire à pied la première étape jusqu’à Assos, éloignée d’environ 30 km, tandis que les autres allaient en bateau. Manifestement Paul voulait être seul pendant un certain temps, seul avec Dieu. Si nous pensons à la charge de travail prodigieuse que ce serviteur extraordinaire du Seigneur abattait, son désir est bien compréhensible. Si la jouissance de la communion chrétienne est précieuse, il est aussi nécessaire de temps en temps d’avoir un temps de méditation, de calme, de prières, autrement dit d’isolement. Paul le ressentait, et c’est pour cela qu’il était prêt à se séparer pour un temps de ses chers compagnons. C’est aussi pour nous une chose sage, dans toute activité pour le Seigneur et si le Seigneur nous en offre la possibilité, de nous retrouver régulièrement seuls avec Lui pour méditer sur Lui et réfléchir à Son œuvre, et pour ressentir plus profondément notre responsabilité.
À cela s’ajoute une deuxième remarque sur notre texte. Les compagnons de voyage de l’apôtre Paul le reprirent à Assos qu’ils avaient atteint avant lui. Ils arrivèrent ensuite à Mitylène, puis Chios, Samos, Trogylle et finalement Milet. Et ici l’écrivain Luc remarque que Paul avait décidé de passer outre Éphèse, car il craignait de passer trop de temps en Asie. S’il était possible, il voulait être à la Pentecôte à Jérusalem.
‘Passer outre devant Éphèse’ n’a pas dû être chose facile pour l’apôtre. Il avait travaillé là si longtemps ! Quels liens intimes le liaient aux bien-aimés de cette ville ! Ses affections étaient trop profondes, ses relations en Christ trop nombreuses et trop précieuses pour qu’il puisse s’en tenir à une courte visite chez eux. C’est pour cela qu’il décida de passer outre devant Éphèse et d’aller directement à Milet.
« Or il envoya de Milet à Éphèse, et appela auprès de lui les anciens de l’assemblée » (20:17).
Quatre jours après leur départ d’Assos, Paul et ses huit compagnons arrivèrent à Milet. De là, Paul fit appeler les anciens de l’assemblée à Éphèse. Ce n’était pas un manque d’amour qui le faisait passer outre devant Éphèse. Il éprouvait au plus profond que les saints de cet endroit, avaient justement besoin dans la situation présente de paroles de grâce, de consolation et d’avertissements. Et s’il ne pouvait pas venir à eux, alors il les fit venir à lui, au moins leurs anciens. C’était une manière de faire inhabituelle, mais pourtant très heureuse. Car ces anciens avaient la confiance de l’assemblée et la représentaient du point de vue spirituel. Ils étaient, en fait, les instruments appropriés pour transmettre ce qu’ils entendirent et vécurent à Milet. Il ressort aussi de la suite du chapitre qu’ils n’étaient pas en petit nombre.
Sur la fonction d’anciens, nous avons déjà parlé en détail à propos du ch. 14 v.23. Aussi suffit-il ici d’indiquer que les « anciens » (en grec presbyteros) du v. 17 sont les « surveillants » (en grec episkopos) du v. 28. Il s’agit de la même fonction, ce dont la chrétienté a toujours convenu.
Le discours de l’apôtre devant les anciens à Milet est un discours d’adieu. Deux autres grands discours provenant de sa bouche nous ont été transmis jusqu’ici. Le premier s’adressait aux Juifs à Antioche de Pisidie (13:16-41), le deuxième aux païens d’Athènes (ch. 18). Le troisième nous est donné dans notre chapitre, et il s’adresse à l’assemblée. Ce troisième discours dans lequel il parle de lui-même et de son ministère, est profondément touchant, et en même temps du plus haut intérêt et de la plus grande importance.
Nous pouvons diviser le discours de l’apôtre en quatre parties :
o La première nous fait connaitre l’esprit et les sentiments dans lesquels il avait servi le Seigneur (20:19-21).
o La deuxième partie expose ce qu’il prévoyait comme attente de souffrances et considère rétrospectivement différentes voies de son ministère (20:22-27).
o La troisième partie contient des exhortations et des avertissements adressés aux anciens (20:28-31).
o Et la quatrième partie nous donne les paroles d’adieu de l’apôtre (20:32-35).
« Et quand ils furent venus vers lui, il leur dit : Vous savez de quelle manière je me suis conduit envers vous tout le temps, depuis le premier jour que je suis entré en Asie, servant le Seigneur en toute humilité, et avec des larmes, et des épreuves qui me sont arrivées par les embûches des Juifs ; comment je n’ai rien caché des choses qui étaient profitables, en sorte que je ne vous eusse pas prêché et enseigné publiquement et dans les maisons, insistant et auprès des Juifs et auprès des Grecs sur la repentance envers Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus Christ » (20:18-21).
Si l’apôtre dit ici quelque chose au sujet de lui-même et de son ministère, ce n’est pas du tout pour s’en vanter. Rien n’était aussi éloigné de lui que cela. Quand il avait été obligé de parler aux Corinthiens de ses peines et de ses souffrances, il avait qualifié cela de folie, (2 Cor. 11).
Si ici et dans ses épîtres il parle de lui-même, la raison en est bien plus dans le fait que beaucoup de saints étaient encore jeunes dans la foi, et ne comprenaient guère le christianisme pratique, ni ce qu’est réellement le ministère pour le Seigneur. Jusqu’alors ils n’avaient connu que les ténèbres du paganisme. Maintenant ils avaient besoin d’être enseignés sur le chemin du chrétien, et cela non seulement par des instructions orales, mais aussi par un exemple vivant et personnel. Pensons que les premiers chrétiens n’avaient pas encore le Nouveau Testament écrit dans les mains. Ils dépendaient donc du ministère oral, et de ce que l’interprétation correcte de tout leur était donnée par l’exemple pratique et le modèle de leur enseignant. Inspiré par le Saint Esprit, l’apôtre pouvait dire : « Soyez mes imitateurs, comme moi aussi je le suis de Christ » (1 Cor. 11:1).
En premier, il commence par parler de son ministère : « … servant le Seigneur ». Le mot grec utilisé ici pour « servir » signifie ‘servir comme esclave’. Paul s’estimait un esclave du Seigneur ; c’est ainsi qu’il s’est toujours considéré. Il soumettait entièrement sa volonté à celle de son Seigneur divin, et il tirait toutes les instructions et les ordres de Lui seul. Son ministère concernait exclusivement le Seigneur. Lui était aussi bien le point de départ que le but de son œuvre. Heureux ceux qui peuvent dire comme l’apôtre : « servant le Seigneur ».
Mais alors suivent deux compléments explicatifs qui sont amenés par la préposition « avec » : « en [avec] toute humilité, et avec des larmes, et des épreuves », ou autrement dit : « avec toute humilité et [avec] des larmes et des épreuves ». L’humilité était le caractère primordial de son ministère pour le Seigneur. Certainement il n’y en a eu qu’un qui a été « humble de cœur », c’est le Seigneur Jésus (Matt. 11:29). Cependant, on trouvait aussi « toute humilité » chez Son serviteur dévoué. La grandeur particulière de cet homme résidait dans son humilité. Il y a là un modèle à imiter pour tous les serviteurs du Seigneur, — à l’époque comme aujourd’hui. Combien il est facile de nous tenir pour quelque chose de bon, alors que pourtant tout provient de la grâce de Celui que nous servons. Combien il est approprié et indispensable que l’humilité accompagne notre service !
Et alors l’apôtre Paul rappelle ses larmes, des larmes qui se mélangeaient à son ministère. Cela peut nous surprendre que l’apôtre pleure, et même il le répète (20:31). Pourtant il n’avait rien de mou. Pourquoi pleurait-il ? Il y a plusieurs raisons à cela.
Vers la fin de son discours il revient encore sur ses larmes : « C’est pourquoi veillez, vous souvenant que, durant trois ans, je n’ai cessé nuit et jour d’avertir chacun [de vous] avec larmes » (20:31). Ici, ses larmes étaient l’expression de toute la tendresse et la gravité avec lesquelles il exhortait les disciples, pensant aux dangers qui les menaçaient. Il en était autrement à Corinthe. C’est à cause de l’état charnel des Corinthiens qu’il écrivait sa première épître à ses chers amis, avec beaucoup de larmes, dans une grande affliction et avec serrement de cœur (2 Cor. 2:4). C’était un amour surabondant pour eux qui le faisait pleurer sur eux.
D’un autre côté ce qui remplissait l’apôtre de douleurs, c’était de voir combien beaucoup se détournaient du Seigneur Jésus. Ce n’est qu’« en pleurant » qu’il pouvait parler d’eux comme des ennemis de la croix de Christ (Phil. 3:18). Dans une mesure accrue, c’est « une grande tristesse et une douleur continuelle dans son cœur » qu’il éprouvait pour ses frères et parents selon la chair (Rom. 9:1-3), parce qu’ils rejetaient le Seigneur, le Christ de Dieu. Il les aimait au point qu’il aurait voulu être séparé du Christ par anathème à cause d’eux. Ce n’est pas quand il était souffrant ou qu’il était malade qu’il versait des larmes. Les larmes s’échappaient de son cœur dans le service pour le Seigneur seulement quand il constatait combien les gens refusaient et rejetaient le Sauveur des pécheurs. Ce genre de larmes était celles du Seigneur Jésus quand Il pleurait sur la ville de Jérusalem à cause de son endurcissement (Luc 19:41, 42).
En troisième lieu l’apôtre mentionne les épreuves qui lui arrivaient par les embuches des Juifs, et qui lui étaient une source continuelle de détresse. Dès le début de son ministère, à peine s’était-il converti, que « les Juifs tinrent conseil pour le tuer » (Actes 9:23). Ces attaques et persécutions traversent tout le récit de Luc sur le ministère et la vie de l’apôtre depuis son expérience de Damas.
Quelques passages peu nombreux de ses épîtres montrent avec quelle douleur il a éprouvé les persécutions. Il rappelle aux jeunes croyants de Thessalonique qu’avant d’arriver chez eux, lui et Silas avaient souffert et avaient été outragés à Philippes (1 Thess. 2:2). Un peu plus tard dans cette épître, il indique que « les Juifs nous ont chassés par la persécution, et … ne plaisent pas à Dieu et … sont opposés à tous les hommes, — nous empêchant de parler aux nations afin qu’elles soient sauvées » (1 Thess. 2:15, 16). Et combien est saisissante sa demande aux frères de Rome de combattre avec lui dans les prières à Dieu pour lui « afin que je sois délivré des incrédules qui sont en Judée » (Rom. 15:30, 31) !
Quant à sa fidélité dans le service pour le Seigneur, l’apôtre pouvait rappeler aux anciens qu’il n’avait rien caché des choses qui étaient profitables, les ayant prêchées et enseignées publiquement et dans les maisons (Actes 20:20). Dans ces v. 20 et 21 il nomme en tout trois points qui rendent témoignage de sa fidélité.
Le premier point parle de la largeur de son cœur et de ce qu’il ne craignait pas d’avoir retenu ou caché quelque chose de ce qui leur était utile, et qu’il leur avait tout annoncé. Dans le texte grec le mot utilisé pour « cacher, retenir » signifie « reculer par lâcheté, redouter par lâcheté, tenir derrière la montagne ». Il peut facilement arriver qu’on retienne des choses désagréables dans la prédication. Nous avons par exemple peur naturellement d’indiquer les conséquences malencontreuses de la désobéissance. Ce n’était pas le cas de l’apôtre. Son seul mobile, son objectif ferme était de ne pas taire la moindre chose utile à ses auditeurs. Jamais il n’avait cherché à s’épargner lui-même, jamais il n’avait pris en considération sa réputation. Si quelqu’une des choses de Dieu était utile à ses auditeurs, il la leur avait prêchée et enseignée. Prêcher, c’est plutôt faire connaître ; enseigner c’est plutôt une explication, une initiation à la cohérence intérieure.
Le second point renseigne sur la manière de prêcher et d’enseigner de Paul : « … publiquement et dans les maisons ». Il ne se limitait pas à de la prédication publique, mais il allait aussi dans les maisons pour parler avec les individus. Justement le service dans les maisons est d’une importance extraordinaire, et il n’est pas rare aussi qu’il réussisse mieux que les discours publics.
Le troisième point indique les éléments du commencement de l’évangile et de sa prédication : « … insistant et auprès des Juifs et auprès des Grecs sur la repentance envers Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus Christ » (20:21). Notons d’abord l’ordre de succession des choses dans la prédication, que nous avons déjà souvent rencontré dans ce livre ! La fidélité à la Parole de Dieu (Rom. 1:16) et l’habitude de Paul orientaient son témoignage d’abord vers les Juifs et ensuite vers les Grecs : « … et au Juif premièrement, et au Grec ».
Quand un homme veut venir vers Dieu, le seul chemin possible passe par la repentance et par la foi. Le mot grec pour ‘repentance’ signifie littéralement « le sentiment d’après ». Il s’agit donc d’un changement de sentiment fondamental, et en même temps d’un changement de toute la vie, et pas seulement d’un regret de choses fausses qu’on a faites. Ce changement de sentiment ou repentance s’accompagne d’une tristesse selon Dieu, comme le montre 2 Cor. 7:10. La repentance est un jugement de soi devant Dieu. Elle est liée, répétons-le, à une profonde tristesse de l’âme, et implique à la fois qu’on se détourne du péché, et qu’on se tourne vers Dieu avec foi. La repentance n’est pas seulement un changement de sentiment, mais le fait de prendre le côté de Dieu contre soi-même, et ce n’est vraiment pas chose facile.
De la même manière qu’il n’y a pas de repentance authentique sans foi, ainsi il n’y a pas de foi sans repentance. Les deux choses vont toujours ensemble. Cela est appuyé aussi par le fait que dans le texte grec, il y a un article commun devant les mots repentance et foi. Par cela, ces deux vertus morales sont réunies dans une unité : l’une implique l’autre.
Cependant comment sont-elles produites ? Uniquement et seulement par le Saint Esprit qui place la Parole de Dieu devant l’âme, et qui la rend familière avec la sainteté et l’amour de Dieu. Ainsi on peut dire en résumé que la repentance et la foi sont le résultat de la révélation de Dieu à l’égard de l’homme ; la repentance se dirige vers Dieu, tandis que la foi s’appuie sur notre Seigneur Jésus Christ, sur Sa personne et sur Son œuvre expiatoire. Quand il y a une vraie repentance dans la présence de Dieu et dans la considération de qui Il est et de ce qu’Il est, alors le cœur est rempli de paix et de joie par la foi en notre Seigneur Jésus Christ.
Merveilleuses voies de grâce de Dieu !
Après avoir parlé du passé, il se tourne maintenant vers le présent et l’avenir.
« Et maintenant, voici, étant lié dans mon esprit, je m’en vais à Jérusalem, ignorant les choses qui m’y doivent arriver, sauf que l’Esprit Saint rend témoignage de ville en ville, me disant que des liens et de la tribulation m’attendent. Mais je ne fais aucun cas de ma vie, (ni ne la tiens) pour précieuse à moi-même, pourvu que j’achève ma course, et le service que j’ai reçu du Seigneur Jésus pour rendre témoignage à l’évangile de la grâce de Dieu » (20:22-24).
Les anciens savaient que l’apôtre était en route vers Jérusalem. Mais il leur fait maintenant savoir qu’il parcourait ce chemin comme quelqu’un lié dans son esprit. Lié est un participe parfait qui donne la signification suivante : il avait été lié et il était maintenant lié. Paul se considérait donc comme quelqu’un lié dans son esprit. Dans son for intérieur, il se voyait forcé de poursuivre son chemin, quoi que celui-ci lui apporte. Ce n’était pas une décision de sa propre volonté qu’il aurait pu changer n’importe quand. Non, « lié » indique une instance supérieure, qui l’avait conduit jusque-là, et qui l’obligeait maintenant à aller à Jérusalem, — une instance à laquelle il avait subordonné toute sa vie.
Paul confesse qu’il ne savait pas ce qu’il rencontrerait là. Mais le Saint Esprit lui rendait témoignage de ville en ville que des liens (la prison) et de la tribulation (oppression de tous côtés) l’attendaient. Ainsi il allait les yeux ouverts à la rencontre des détresses et des dangers à venir, même s’il n’en connaissait pas la forme en détail. Le fait que le Saint Esprit l’avertissait à l’avance de cela montre clairement que c’est Lui qui, en vérité, le « liait » pour aller à Jérusalem. C’était la volonté divine qu’il devait endurer ces choses. Et son Maître n’avait-il pas montré que souffrir dans un monde de péché et de misère sert à glorifier Dieu ? Aussi la perspective de la souffrance et même de la mort, ne pouvait l’ébranler un seul instant. Son cœur était dirigé sur la gloire de Christ et sur la volonté de Dieu, et cela lui donnait une confiance inébranlable dans les directions divines.
Effectivement la main de Dieu était en tout. Pensons simplement aux « chaînes » et aux « liens » que l’apôtre endura ensuite. N’ont-ils pas été justement l’occasion pour lui d’écrire ses épîtres les plus profondes, — des communications qui répandent la lumière la plus brillante sur les choses et les relations célestes ?
Quand Paul parle de ne faire aucun cas de sa vie, ni de la tenir pour précieuse à lui-même, il ne veut pas du tout exprimer qu’il ne s’intéressait pas à la vie, mais que le service que lui avait confié le Seigneur supplantait tout intérêt égoïste qu’il pourrait avoir dans cette vie. Quel dévouement extrême cela montre pour le service qui lui était confié et pour Celui duquel il l’avait reçu ! Oui, il était prêt à achever la course et par-là à achever aussi le service qu’il avait reçu du Seigneur. Quant à la manière dont cela devait se passer, il remettait tout à son Maître.
En quoi son ministère avait-il consisté ? Il nomme en tout trois directions ou domaines essentiels. Il s’agissait d’abord « de témoigner de l’évangile de la grâce de Dieu » (Actes 20:24). Désignation précieuse : « l’évangile de la grâce de Dieu » ! Cet évangile, la Bonne Nouvelle était l’expression de la grâce de Dieu, — une grâce qui a livré son Fils pour des pécheurs, et qui L’a ressuscité d’entre les morts pour la justification de ceux qui croient, et qui L’a fait asseoir à Sa droite. Ce témoignage de l’évangile, il en avait parlé plus haut : c’était un témoignage rendu aussi bien aux Juifs qu’aux Grecs à « la repentance envers Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus Christ » (20:21).
Les deux versets qui suivent montrent deux autres voies du ministère :
« Et maintenant, voici, moi je sais que vous tous, parmi lesquels j’ai passé en prêchant le royaume de Dieu, vous ne verrez plus mon visage. C’est pourquoi je vous prends aujourd’hui à témoin, que je suis net du sang de tous ; car je n’ai mis aucune réserve à vous annoncer tout le conseil de Dieu » (20:25-27).
Ensuite [comme seconde voie du ministère] l’apôtre leur avait aussi prêché le royaume, non pas « à tous », mais à « eux [vous] tous » (20:25), c’est-à-dire aux disciples. C’est une pensée autre que celle de l’évangile, bien qu’elle lui soit étroitement liée. Paul et les autres apôtres dans le livre des Actes ont parlé du royaume dans deux directions différentes : l’aspect présent et l’aspect futur. D’un côté il s’agit du royaume comme domaine de l’autorité de Dieu, sous laquelle les croyants se sont déjà mis aujourd’hui en acceptant le Seigneur Jésus. Ce côté est malheureusement peu compris de beaucoup d’enfants de Dieu, et même souvent entièrement méconnu. De l’autre côté il s’agit du royaume qui sera érigé un jour en puissance et en gloire, par le Fils de l’homme glorifié, — par Celui qui s’est autrefois abaissé jusqu’à la mort de la croix. Quand Christ apparaîtra dans Sa gloire, ce sera le triomphe glorieux de la justice de Dieu. Cet aspect du royaume peut déjà aujourd’hui nous remplir de consolation et de joie.
Comme troisième voie de son ministère, il leur avait annoncé tout le conseil de Dieu (20:27). Il n’avait mis aucune réserve à le faire, malgré toute l’hostilité des Juifs que cela entrainait. Le conseil de Dieu ne peut pas être séparé de l’évangile de la grâce de Dieu, mais il va bien au-delà. Le passage suivant de l’épître aux Éphésiens décrit ce conseil avec une précision divine : « … Nous ayant fait connaître le mystère de sa volonté selon son bon plaisir, qu’il s’est proposé en lui-même pour l’administration de la plénitude des temps, savoir de réunir en un toutes choses dans le Christ, les choses qui sont dans les cieux et les choses qui sont sur la terre, en lui, en qui nous avons aussi été faits héritiers, ayant été prédestinés selon le propos de celui qui opère toutes choses selon le conseil de sa volonté, afin que nous soyons à la louange de sa gloire » (Éph. 1:9-12).
La conviction de l’apôtre qu’eux tous, parmi lesquels il avait servi, ne verraient plus son visage, conférait à ses paroles une profonde solennité et une intimité touchante : un père spirituel faisait ses adieux à ses enfants spirituels.
En outre il se voyait net du sang de tous dans cette région, grâce à sa prédication de la vérité (comp. 18:6). Le « sang » est une expression touchante et bouleversante de la culpabilité sur laquelle pèse la mort, et même ici la seconde mort. Quand les gens de cette région se tiendront un jour devant le grand trône blanc, pas un d’entre eux ne sera en mesure de montrer Paul et de prétendre que la faute était de son côté. Paul était pur de ce terrible reproche. Ce courant de pensées solennel ne parle-t-il pas aussi à nos cœurs et à nos consciences ?
« Prenez donc garde à vous-mêmes, et à tout le troupeau au milieu duquel l’Esprit Saint vous a établis surveillants pour paître l’assemblée de Dieu, laquelle il a acquise par le sang de son propre [fils] » (20:28).
Ce n’est qu’après avoir rendu compte de lui-même et de son service (ou : ministère) devant les anciens, que l’apôtre en vient à parler de leur service et de leur responsabilité. Il y avait et il y a un « troupeau », et il faut veiller dessus, et le garder.
Pour décrire l’assemblée de Dieu, Paul se sert de l’image touchante d’un troupeau. Le Seigneur Jésus a aussi utilisé cette image, par exemple quand Il a parlé de Lui comme le ‘Bon Berger’ qui laisse sa vie pour ses brebis (Jean 10:11). Il est aussi le ‘Berger et le Surveillant’ de nos âmes (1 Pierre 2:25), comme aussi le ‘souverain Pasteur’ (1 Pierre 5:4) et le ‘grand Pasteur’ des brebis (Héb. 13:20). En Luc 12 le Seigneur désigne Ses disciples par le terme de ‘troupeau’, quand Il leur parle de manière si consolante : « Ne crains pas, petit troupeau, car il a plu à votre Père de vous donner le royaume » (Luc 12:32). Finalement en 1 Pierre 5:2 il est parlé de paitre le troupeau de Dieu, et de le surveiller.
Avant d’entrer de plus près dans ce sujet de surveiller et de paitre, nous voulons jeter un œil sur les hommes auxquels ces services ont été confiés. Paul parle aux anciens d’Éphèse (20:17). Or ici il les nomme ‘surveillants’. ‘Anciens’ et ‘surveillants’ sont donc les mêmes personnes, et il s’agit de la même fonction. Nous voyons cela aussi dans l’épître à Tite. Après que Paul ait commandé à son compagnon d’œuvre d’établir des anciens dans chaque ville (Tite 1:5), il lui indique les qualités requises pour les surveillants (Tite 1:7-9). Le terme ‘ancien’ caractérise davantage la personne, et ‘surveillant’ davantage l’activité confiée. Mais il ne s’agit pas du tout de personnalités différentes, ni de fonctions différentes.
Nous avons déjà parlé en détail de la fonction d’ancien à propos d’Actes 14:23 et de ce qui s’y rattache (voir ‘Un peuple pour Son Nom’, partie 7, pages 58 à 65). Aussi il peut suffire pour le moment de revenir seulement sur quelques traits de caractère, qui ont une importance particulière pour la considération du texte actuel.
Certes, les anciens avaient à faire à tout le troupeau, comme cela est dit expressément, mais néanmoins cela se limitait au lieu ou à l’assemblée où ils vivaient. Le domaine de la mission des anciens n’allait pas au-delà de l’assemblée locale pour laquelle ils avaient été choisis. L’ancien n’était ancien que dans l’assemblée locale où il servait. Cela est en contraste complet avec les dons, qui sont donnés mondialement à tout le corps (Éph. 4:11-13). Mais ici il n’est pas question de dons de grâce spirituels, mais de fonction et de mission de surveillant (ou ancien).
En ce qui concerne la question de savoir qui établissait les anciens dans leur fonction, ce n’était pas l’assemblée qui choisissait, mais les apôtres. Les anciens ne furent établis que par l’autorité apostolique, ou bien par les apôtres eux-mêmes ou bien par leurs délégués (Tite 1:5). Mais dans notre texte il est dit que c’est le Saint Esprit qui avait établis les anciens d’Éphèse dans le troupeau comme surveillants. Par-là, le Saint Esprit donnait son approbation à l’action apostolique [en rapport avec l’établissement des anciens] et l’accompagnait. C’est un processus remarquable !
Même si aujourd’hui il n’y a pas d’anciens ordonnés, ni de surveillants accrédités par le Saint Esprit, c’est cependant notre privilège d’apprendre et de tirer parti de ce qui est dit d’eux et de leur service. Mais il y a plus encore : nous pouvons toujours compter sur Dieu, y compris dans la question des anciens. Il a aussi pourvu pour nos jours, et Il donne des anciens dans un sens élargi : non pas des anciens ordonnés, mais des hommes mûrs, plus âgés, qui assurent le service d’anciens. Ils ne sont pas ainsi désignés, mais ils s’occupent de la surveillance des croyants là où ils sont.
En ce qui concerne maintenant le service et la responsabilité des surveillants, ils doivent d’abord veiller sur eux-mêmes (Actes 20:28). Il est aussi nécessaire pour nous de commencer par-là. Si quelqu’un doit veiller sur d’autres, il doit d’abord veiller sur lui-même. Nous devons d’abord être purs nous-mêmes avant de chercher à conduire d’autres à la pureté. Nous devons d’abord être enseignés de Dieu nous-mêmes, avant de chercher à enseigner les autres. Nous devons d’abord être dans la proximité de Dieu, avant de chercher à en rapprocher les autres. Dans ce sens, il n’y a rien de plus dangereux que de s’occuper de l’état et des voies des autres quand, au même moment, l’insouciance et l’indifférence caractérisent notre comportement. Paul avertit plus tard son enfant Timothée : « Sois attentif à toi-même et à l’enseignement » (1 Tim. 4:16).
Le mot grec pour ‘veiller’ a une portée large : ‘fixer son regard vers, être attentif à, faire attention à, se soucier de, prendre soin de, s’occuper de’. S’il s’agit de veiller personnellement sur nous-mêmes, cela signifie que nous faisons attention en premier lieu aux mobiles de nos faits et gestes, et ensuite que nous veillons aussi à tout notre comportement pratique. Quand il s’agit de veiller sur le troupeau, il s’agit davantage de porter notre attention sur la prospérité spirituelle et la préservation des enfants de Dieu : s’en soucier, s’en occuper.
Il reste encore à remarquer que Paul pousse les surveillants à avoir à cœur tout le troupeau. Il attache chaque brebis individuellement au cœur de ces hommes. Un bon berger ne connaît pas de préférences pour des individus particuliers, il aime toutes les brebis, spécialement les faibles et les nécessiteuses.
Et il est alors parlé de paître l’assemblée de Dieu. ‘Paître’ va plus loin que ‘veiller’. Le mot grec dérive directement du mot ‘berger’ et signifie ‘être berger, soigner comme un berger’. Cela décrit toute la tâche d’un berger : ‘nourrir, paître, soigner, conduire, protéger’. Quel « bouquet » touchant d’activités et de services qui reposent sur le berger et qui ont pour but l’assemblée de Dieu !
La valeur extraordinaire de l’assemblée pour le cœur de Dieu ressort de la proposition saisissante suivante : « … laquelle il a acquise par le sang de Son propre Fils » (20:28). Voilà le prix élevé que Dieu a payé pour acquérir l’assemblée : le sang de son propre [Fils], Jésus Christ. Si cela montre la vraie valeur de l’assemblée pour Dieu, chaque berger (ou surveillant) ne doit-il pas être animé, rempli de cette même estimation ? L’assemblée que Dieu a confiée à ses soins, Lui a coûté le sang de son Fils ! Peut-Il être indifférent à la manière dont on traite l’assemblée pour laquelle Il a payé un si grand prix ? Ayons tous davantage les consciences pénétrées de l’appréciation que Dieu en a de sa valeur ! Alors nous penserions avec dévouement à n’agir que pour le bien et par amour envers ceux qui forment l’assemblée de Dieu. Pensons toujours que l’assemblée appartient à Dieu et non pas à n’importe qui.
Les deux versets suivants donnent la raison de l’exhortation faite aux surveillants, et montrent pourquoi il est si nécessaire qu’ils veillent sur eux-mêmes et sur tout le troupeau.
« Moi je sais qu’après mon départ il entrera parmi vous des loups redoutables qui n’épargneront pas le troupeau ; et il se lèvera d’entre vous-mêmes des hommes qui annonceront des [doctrines] perverses pour attirer des disciples après eux » (20:29, 30).
Avant de parler en détail des dangers contre lesquels l’apôtre avertit, faisons quelques remarques fondamentales au préalable.
En premier lieu nous déduisons des paroles de l’apôtre qu’il considérait son ministère parmi ces croyants comme terminé. Ils ne verraient plus son visage. Par cet adieu, c’est toute une époque de l’assemblée qui est révolue, celle de la présence et de l’activité apostoliques. Jusqu’alors Paul a servi et pris soin des assemblées, il les a préservées des dangers autant que possible. La puissance spirituelle qui était en lui pour promouvoir le bien et retenir le mal était très grande. Mais maintenant une nouvelle ère s’ouvrait, celle de la responsabilité des croyants individuellement. Ils étaient désormais tenus de prendre soin d’eux-mêmes dans une certaine mesure, et de prendre garde eux-mêmes aux problèmes et aux difficultés qui surgiraient. Cela montre clairement l’importance qui incombe au service et au travail des anciens dans cette nouvelle période. Dorénavant la responsabilité reposait particulièrement sur eux. Nous vivons encore dans ce temps postapostolique. C’est pourquoi les enseignements donnés ici sont d’une si grande importance pour nous aussi.
Cela nous conduit à un autre point : l’apôtre parle certes de son départ, mais il ne suggère en aucune manière un quelconque successeur. Ni ici ni nulle part ailleurs dans la Parole, il ne parle d’une succession apostolique. Tout au contraire ! De mauvais ouvriers viendraient après lui qui n’épargneraient pas le troupeau, et qui introduiraient des erreurs corruptrices de toutes sortes. Au vu des dangers qui menaçaient, il recommandait les saints, non pas à un quelconque successeur, mais à Dieu et à la Parole de Sa grâce (20:32).
De ce qui vient d’être dit, une conclusion s’impose, une règle humiliante en découle : tout ce que Dieu a confié à la garde et à l’administration de l’homme, celui-ci l’a toujours gâté. Que ce soit aux premiers jours de l’humanité dans le jardin d’Éden, ou que ce soit avec le peuple d’Israël mis à l’épreuve par Dieu au temps de l’Ancien Testament, l’homme a toujours failli et s’est toujours rebellé contre Dieu. Et quand Dieu a commencé une nouvelle œuvre dans le christianisme, les mêmes résultats malfaisants sont apparus. Les hommes rêvent bien de la conquête du monde un jour par l’évangile. Mais le Saint Esprit nous enseigne autre chose. Les paroles de l’apôtre devant les anciens d’Éphèse en rendent témoignage. Il ne parle pas d’une progression, mais d’un déclin du témoignage chrétien.
Le Seigneur Jésus, pour n’en donner qu’un exemple, avait déjà montré dans la parabole de l’ivraie du champ (Matt. 13:24 et suiv.) que le royaume des cieux commencerait bien (avec de la « bonne semence »), mais que l’adversaire profiterait de l’inadvertance de l’homme, et sèmerait aussitôt « l’ivraie parmi le froment ». L’ivraie subsisterait à côté du blé ; une séparation, un arrachage de l’ivraie, n’aurait lieu qu’au temps de la moisson, quand le Fils de l’homme ôterait en jugement tous les scandales de Son royaume. C’est ce que nous apprenons ici aussi : la chrétienté, comme témoignage extérieur, a été gâté dès le début, et elle est maintenant caractérisée par la coexistence du bien et du mal. Il en est encore ainsi aujourd’hui pour le ‘blé’ ou ‘froment’. Quel chrétien droit pourrait nier la résistance des professants sans vie contre la volonté du Seigneur ? Cet esprit de rébellion marque la chrétienté de son empreinte. On ne va pas vers un rétablissement de l’état initial, mais vers le jugement du Seigneur sur toute impiété.
Les épîtres du Nouveau Testament dressent le même tableau triste. Jetons-y un rapide coup d’œil ! Déjà dans une de ses premières épîtres, l’apôtre indique aux jeunes croyants de Thessalonique qu’un jour l’apostasie viendrait, et que l’homme de péché (l’antichrist) serait révélé (2 Thess. 2:3, 4). Le passage de 1 Tim. 4 ne va pas si loin, cependant l’Esprit y indique expressément que « dans les derniers temps quelques-uns apostasieront de la foi, s’attachant à des esprits séducteurs et à des enseignements de démons » (1 Tim. 4:1). La deuxième épître à Timothée nous amène de nouveau à cela dans les « derniers jours ». Il surviendra des « temps fâcheux » où les hommes auront la forme de la piété, mais en auront renié la puissance (2 Tim. 3:1-5). Dans sa seconde épître, Pierre nous dit aussi qu’aux « derniers jours » des moqueurs viendront, et demanderont en se moquant : « Où est la promesse de sa venue ? » (2 Pierre 3:3-4). Quant à l’épître de Jude qui nous mène également jusqu’aux jours de la fin, nous allons bientôt en reparler spécialement.
En ce qui concerne maintenant les agents utilisés par Satan, Paul indique deux groupes de mauvais ouvriers. Les uns viendraient du dehors, « des loups redoutables qui n’épargneront pas le troupeau » (20:29). L’expression « loups redoutables » indique une violence exercée par ces hommes pour atteindre leur but, celui de dévorer l’assemblée. Jude parle également dans son épître de « certains hommes qui se sont glissés parmi les fidèles ». Ils participent aux agapes des croyants, « faisant des festins sans crainte avec eux, se repaissant eux-mêmes » (Jude 4, 12). Et combien est juste ce trait que l’écrivain ajoute : « admirant les hommes en vue de leur propre profit ! » (Jude 16). Quelle attitude mauvaise et abominable : tirer du troupeau un profit pour soi avec des motifs égoïstes !
Le deuxième groupe est encore plus blâmable, parce que plus dangereux. Il s’agit ici de gens provenant du milieu même des anciens, et qui annonceront des doctrines perverses pour attirer les disciples après eux. Leur intention déclarée est de créer des scissions, et de s’établir eux-mêmes à la tête de partis. Il ne s’agit pas seulement d’attirer « quelques » disciples, mais d’attirer « les » disciples comme il est dit expressément. Tout l’ensemble des disciples, tous les disciples, les disciples comme tels, voilà l’objectif des efforts corrupteurs de ces gens.
Et quels moyens utiliseraient-ils pour atteindre leur but ? Ils annonceraient des « doctrines perverses ». Combien cela est solennel ! Des doctrines perverses sont des doctrines et des enseignements qui contredisent la Parole de Dieu et qui détournent de Christ. Ces gens remplaceraient la vérité de Dieu par l’erreur, et le Seigneur Jésus par eux-mêmes. Quelle prétention monstrueuse ! Mais tout cela ne nous apprend-il pas combien il est extraordinairement important pour les enfants de Dieu de tous les temps, d’être familier avec l’Écriture Sainte, et de s’incliner dans l’humilité et l’obéissance devant le Seigneur et Sa Parole ? Ce n’est que par un « il est écrit » que nous pouvons résister à Satan, et que nous pouvons faire face aux dangers qui nous menacent.
Un exemple qui sert d’avertissement contre ces faux docteurs nous est fourni par Paul dans sa dernière épître. Après avoir mis en garde Timothée contre « les discours vains et profanes, car ceux qui s’y livrent iront plus avant dans l’impiété, et leur parole rongera comme une gangrène », il ajoute : « desquels sont Hyménée et Philète qui se sont écartés de la vérité, disant que la résurrection a déjà eu lieu, et qui renversent la foi de quelques-uns » (2 Tim. 2:16-18). Nous voyons ici les conséquences fatales d’une fausse doctrine. Celui qui lui prête l’oreille, sa foi (ou le contenu de sa foi) sera détruite.
Au vu de ce genre de menaces auxquelles le troupeau est aussi exposé de nos jours, ne pouvons-nous pas bien comprendre que l’apôtre lance encore de sérieux avertissements dans la dernière section de son discours ?
« C’est pourquoi veillez, vous souvenant que, durant trois ans, je n’ai cessé nuit et jour d’avertir chacun [de vous] avec larmes. Et maintenant je vous recommande à Dieu, et à la parole de sa grâce, qui a la puissance d’édifier et de vous donner un héritage avec tous les sanctifiés » (20:31, 32).
L’exhortation aux anciens est très brève, mais d’autant plus percutante : « veillez », « veillez constamment » selon le sens de la forme verbale du texte original. Voilà ce à quoi ils devaient absolument faire attention : se tenir sur leur garde du point de vue spirituel, afin de pouvoir reconnaître les premiers commencements du danger, et de pouvoir leur résister.
Ils ne devaient pas oublier cet exemple précieux d’amour que Paul leur avait donné durant toutes ces années. Il avait parlé auparavant d’une manière semblable aux croyants de Thessalonique, et il s’était comparé à une nourrice qui chérit ses propres enfants et à un père qui exhorte et console ses propres enfants (1 Thess. 2:7, 11). Et maintenant à la fin de son service public, il rappelle aux anciens combien il n’avait cessé durant trois ans, nuit et jour, d’avertir chacun d’eux avec larmes.
En fait il était sur le point de les quitter. Mais il leur laissait quelque chose de précieux : le souvenir de son exemple d’amour divin. Ils avaient eu le privilège de le laisser opérer sur eux plusieurs années. Il avait eu à l’œil chaque brebis en particulier, il avait exhorté chacun avec larmes, nuit et jour. Ce serviteur dévoué est depuis longtemps auprès de son Seigneur et Maître. Des millénaires sont passés, cependant son exemple sublime nous parle encore aujourd’hui.
Quand Paul s’est vu obligé de prendre congé des anciens, il lui restait quand même une chose qu’il pouvait faire pour eux, et il l’a faite : les recommander à Dieu. N’était-ce pas le meilleur ? Et n’est-ce pas pour nous encore aujourd’hui le mieux à faire, de recommander à Dieu par la prière nos frères et nos sœurs que nous aimons et qui sont peut-être en danger ? Recommander quelqu’un à Dieu signifie le Lui confier à Ses soins et à Sa protection. Il est remarquable que, pour « recommander », l’apôtre utilise ici précisément le même mot que le Seigneur a utilisé quand Il a « remis » Son esprit entre les mains de son Père, c’est-à-dire qu’Il l’a « confié » entre Ses mains, Il l’a « recommandé » (Luc 23:46). Quel parallèle saisissant se présente à nous ici !
Mais Paul ne les recommande pas seulement à Dieu, mais aussi à la « parole de Sa grâce ». Cela est très remarquable. En fait, nous avons besoin des deux. Sans le secours de Dieu, nous serions vite découragés ; sans la Parole, nous perdrions vite la sagesse et les directions divines. Aussi Dieu et la Parole de sa grâce vont toujours ensemble. Et quand Dieu fait connaître Sa grâce, cela a lieu par le moyen de Sa Parole. Si nous voulons apprendre à connaître de plus près Sa grâce, nous devons regarder dans la Parole de Sa grâce. Au v. 24 de notre chapitre, nous avons une expression semblable : « l’évangile de la grâce de Dieu ».
Au sujet de la Parole de la grâce, deux choses sont dites : « … qui a la puissance d’édifier et de vous donner un héritage avec tous les sanctifiés ». Il n’est pas tout à fait sûr si « qui a la puissance » se rapporte à Dieu ou à Sa Parole. Grammaticalement les deux sont possibles. Cependant cela semble devoir être mis en relation avec la Parole, et non pas avec Dieu, d’après ce que suggère une citation de 2 Tim. 3:15 où Paul écrit ce qui suit à Timothée son enfant dans la foi : « dès l’enfance, tu connais les saintes lettres, qui peuvent te rendre sage à salut par la foi qui est dans le Christ Jésus ». Ici aussi l’action spirituelle est attribuée à l’Écriture Sainte.
La première chose de ce que notre texte dit de la Parole, c’est qu’elle a le pouvoir d’édifier. Quelle capacité précieuse et bénie de la Parole de Dieu ! Elle est en mesure de nous édifier sur notre foi. Ceci est de la plus grande importance pour le développement spirituel de la vie éternelle en nous. La croissance spirituelle, l’approfondissement de la confiance en Dieu, l’accroissement de la force dans le combat de la foi, la stimulation de l’espérance céleste, l’intensification du dévouement à Christ, — voilà quelques-uns des fruits que la Parole de Sa grâce peut produire en nous.
Il y a encore quelque chose que peut faire cette parole : « … donner un héritage avec tous les sanctifiés ». De nouveau une déclaration étonnante ! L’héritage céleste, selon ce qui est présenté ici, est un don de la Parole de Sa grâce. Il faut certainement le comprendre dans le sens que les croyants jouissent de cet héritage par la Parole de Dieu, et qu’ils peuvent en jouir déjà aujourd’hui par la foi. La Parole les rend familiers avec l’héritage céleste, avant même qu’ils l’obtiennent (1 Pierre 1:4), et elle montre à qui il appartient : « à tous les sanctifiés ».
« Les sanctifiés » sont ceux qui sont mis à part pour Dieu une fois pour toute, par la foi en Christ et par l’opération du Saint Esprit. Quand le Seigneur glorifié a envoyé du ciel Saul de Tarse avec le message du salut aux nations, Il a alors aussi rattaché l’héritage aux sanctifiés, et Il a dit de ceux qui croiraient : « … pour qu’ils reçoivent la rémission des péchés et une part avec ceux qui sont sanctifiés » (Actes 26:18). Ici il est également question de la sanctification fondamentale qui a lieu au début de la vie chrétienne.
Ainsi la considération du v. 32 nous a amené une foule d’enseignements dont on ne saurait trop estimer l’importance et la valeur. Quelle consolation, pour les jours sombres, que Dieu demeure et que la Parole de Sa grâce demeure ! Rien ni personne ne peuvent porter atteinte à Dieu. Dans Sa providence, Il veille sur Sa Parole et nous la conserve malgré toutes les attaques de l’ennemi contre ce rempart. À nous il ne nous reste qu’à louer de tout cœur le Dieu de toute grâce, et à Le glorifier par Jésus Christ notre Seigneur.
La pensée que les saints attendent l’héritage céleste conduit l’apôtre, encore une fois, à parler de la manière dont il a vécu et travaillé pendant les trois ans à Éphèse.
« Je n’ai convoité ni l’argent, ni l’or, ni la robe de personne. Vous savez vous-mêmes que ces mains ont été employées pour mes besoins et pour les personnes qui étaient avec moi. Je vous ai montré en toutes choses, qu’en travaillant ainsi il nous faut secourir les faibles, et nous souvenir des paroles du Seigneur Jésus qui lui-même a dit : Il est plus heureux de donner que de recevoir » (20:33-35).
Quel état d’esprit céleste animait ce serviteur du Seigneur ! Il n’y avait là aucune aspiration vers des choses terrestres, et surtout pas celles qui appartenaient aux autres. S’il nomme l’argent et l’or et un vêtement, c’est parce qu’ils étaient un signe de richesse pour les orientaux. Il n’avait pas convoité tout cela. L’exemple de l’apôtre est d’autant plus digne d’être imité par nous tous, que depuis toujours il y a eu le danger de vouloir combiner le service du Seigneur et l’appât du gain. Dans la liste des traits de caractère moraux qui devraient distinguer les anciens, on trouve deux fois une mise en garde contre l’amour de l’argent : « … n’aimant pas l’argent » (1 Tim. 3:3), « … non avide d’un gain honteux » (Tite 1:7). Considérer la piété comme une « source de gain » est quelque chose d’absolument abominable aux yeux du Seigneur (1 Tim. 6:5).
Mais il y avait encore le côté positif. Ses auditeurs savaient que « ces mains avaient été employées » pour ses besoins et ceux des personnes qui étaient avec lui. On dirait le voir en train de leur tendre les mains en disant cela, les tenant hautes pour qu’ils voient les traces de son travail comme faiseur de tentes. Il avait insisté ailleurs sur l’ordonnance du Seigneur, que ceux qui annoncent l’évangile doivent vivre de l’évangile. Et il avait aussi expliqué pourquoi lui-même ne faisait pas usage de ce droit (1 Cor. 9). Mais ici devant les anciens d’Éphèse, il mentionne seulement le fait de sa manière d’agir, sans en donner la raison. Il veut seulement leur montrer encore une fois, à eux et à nous, « qu’en travaillant ainsi il nous faut secourir les faibles ».
À cette occasion, il pense à une parole du Seigneur Jésus, — bien qu’elle ne figure pas dans les évangiles, — qui était resté devant lui comme une ligne de conduite qu’il avait cherché à suivre : « il est plus heureux donner que de recevoir ». Cette parole illustrée de manière si touchante par l’exemple de l’apôtre, eux aussi devaient maintenant la conserver dans leurs cœurs. Le Seigneur Jésus Lui-même l’avait prononcée !
Or cette parole du Seigneur ne signifie pas que prendre ou recevoir ne sont pas bénis. Tout au contraire ! C’est seulement que donner est plus heureux que recevoir. Sur ce point aussi l’apôtre Paul donne un excellent exemple par la manière avec laquelle, étant prisonnier à Rome, il avait accepté les dons que les croyants de Philippes lui avaient envoyés. Plein de reconnaissance, il caractérise ces dons comme « un parfum de bonne odeur, un sacrifice acceptable, agréable à Dieu » (Phil. 4:10-18).
C’est par une parole provenant des lèvres du Seigneur Jésus Lui-même que Paul termine son discours : « Il est plus heureux de donner que de recevoir ».
« Et ayant dit ces choses, il se mit à genoux et pria avec eux tous. Et ils versaient tous beaucoup de larmes, et se jetant au cou de Paul, ils le couvraient de baisers, étant surtout peinés de la parole qu’il avait dite, qu’ils ne verraient plus son visage. Et ils l’accompagnèrent au navire » (20:36-38).
Le discours de l’apôtre était achevé. Ses dernières paroles étaient un rappel de la grâce que le Seigneur avait déployée, et qui devait maintenant caractériser les Siens. Combien il est approprié que Paul termine son discours par des paroles de grâce provenant de la bouche du Seigneur Jésus !
Maintenant il s’agenouille et prie avec eux tous. Quelle prière cela a dû être ! Il avait jusqu’à présent parlé aux gens, et maintenant il épanchait son cœur devant Dieu.
Beaucoup de pleurs ont alors coulé parmi les amis. Leur cœur s’épanchait vers leur cher apôtre Paul, et son cœur s’épanchait vers eux, les objets de son amour et de son ministère. Ils se jetèrent tous à son cou, le couvrant de baisers. Ils étaient spécialement affligés par la parole qu’il avait dite qu’ils ne verraient plus son visage.
Départ saisissant ! Cependant ils se résignèrent à la volonté du Seigneur, et le conduisirent jusqu’au navire qui l’emporta finalement de devant leurs yeux — pour toujours.
Départ solennel ! La fin de son activité publique comme apôtre des nations était arrivée. Paul le savait. Même si l’ombre de la mort planait sur la suite de son chemin, il avait la ferme confiance que son Seigneur et Maître continuerait à le conduire à Se glorifier en lui. Au bout du chemin il voyait la couronne de justice que le Seigneur, juste juge, lui donnerait en récompense, non pas seulement à lui seul, mais à tous ceux qui aiment Son apparition.
À Dieu seul la gloire.