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MÉDITATIONS SUR LE LIVRE DES JUGES

 

Ridout Samuel

 

STEM Publishing/Bible-notes

 

Table des matières abrégée : (Table détaillée)

1        Préface

2        Introduction

3        Chute initiale et mélange au monde

4        Othniel, Ehud, et Shamgar - Premières captivités et délivrances (Jug. 3)

5        Debora et Barak - Le triomphe de la faiblesse (Jug. 4)

6        Le cantique de Debora (Jug. 5)

7        Gédéon – préparation des instruments (Jug. 6:1 à 7:14)

8        La victoire et les difficultés qui suivent (Jug. 7:15 à 8:21)

9        L’éphod de Gédéon - Abimélec (Jug. 8:22 à 9:57)

10     Jephté + Ses prédécesseurs et ses successeurs (Jug. 10 à 12)

11     Samson et les Philistins – Le nazaréat (Jug. 13 à 16)

12     Samson – Alliances et conflits (Jug. 14 à 15)

13     Samson : derniers jours (Jug. 16)

14     Le développement de l’idôlatrie (Jug. 17-18)

15     Corruption morale en Israël et gouvernement inefficace (Jug. 19 à 21)

16     Le livre du déclin

 

Table des matières détaillée :

1        Préface

2        Introduction

2.1      Le lien du livre des Juges avec celui de Josué

2.2      L’héritage d’Israël en Canaan, une image de notre « héritage » en Christ dans les lieux célestes

2.3      Les victoires du peuple d’Israël et la possession du pays par les différentes tribus

2.4      L’avertissement donné par Josué à la fin de son livre

2.5      La faillite du peuple responsable de saisir son héritage

2.6      Le déclin du peuple d’Israël, une image de l’histoire de l’Assemblée sur la terre

3        Chute initiale et mélange au monde

3.1      Le livre des Juges se divise en trois parties distinctes :

3.2      Le déclin du peuple

3.3      La tribu de Juda

3.4      Caleb, Othniel et Acsa

3.5      Les Kéniens

3.6      Judas et Benjamin

3.7      Joseph

3.8      Manassé, Éphraïm, Zabulon

3.9      Aser, Nephthali et Dan

3.10          Le déclin du peuple - De Guilgal à Bokim : relations avec Dieu changées (Jug. 2 à 3:4)

3.11          De Guilgal à Bokim

3.11.1     Guilgal

3.11.2     Bokim

3.12          Le départ de Josué

3.13          L’apostasie et l’idolâtrie du peuple

3.14          L’esquisse d’une restauration

4        Othniel, Ehud, et Shamgar - Premières captivités et délivrances (Jug. 3)

4.1      La situation du peuple d’Israël

4.2      Les nations au milieu desquelles habitait Israël

4.2.1        Les Cananéens

4.2.2        Les Héthiens

4.2.3        Les Amoréens

4.2.4        Le Phérézien et le Jébusien

4.3      Les mariages profanes et le jugement de Dieu par le roi Aram

4.4      Othniel, un sauveur qui délivre

4.5      Les nouveaux ennemis du peuple d’Israël

4.6      La délivrance par le moyen d’un autre sauveur, Ehud

4.7      Shamgar

5        Debora et Barak - Le triomphe de la faiblesse (Jug. 4)

5.1      L’ennemi du nord du pays

5.2      L’intelligence utilisée sans Dieu

5.3      La foi confiante de Debora

5.4      La foi hésitante de Barak

5.5      La guerre contre Sisera et ses armées

5.6      L’action de Jaël

6        Le cantique de Debora (Jug. 5)

6.1      Un chant de louange à Dieu pour la délivrance

6.2      L’évocation du bas état du peuple et de ses causes, avant que Dieu n’intervienne en sa faveur

6.3      La réponse des tribus

6.4      Jaël et Sisera

7        Gédéon – préparation des instruments (Jug. 6:1 à 7:14)

7.1      Israël opprimé par Madian

7.1.1        Que représente pour l’Église cet ennemi mortel ?

7.1.2        La famine d’Israël sous l’oppression de Madian

7.1.3        Les fils d’Israël crient à l’Éternel

7.2      L’appel de Gédéon

7.2.1        L’activité de Gédéon

7.2.2        Les paroles de l’ange à Gédéon

7.2.3        L’encouragement de la part de l’Éternel

7.3      Les signes donnés à Gédéon et sa formation avant le combat

7.3.1        Le présent de Gédéon

7.3.2        La mission de Gédéon : abattre l’autel de Baal

7.3.3        L’Esprit de l’Éternel sur Gédéon

7.4      La sélection des combattants

7.5      Le songe du Madianite

8        La victoire et les difficultés qui suivent (Jug. 7:15 à 8:21)

8.1      Les préparatifs qui conduiront Gédéon à la victoire

8.2      L’enseignement moral du combat de Gédéon à la lumière de 2 Corinthiens 4

8.3      Le son de la trompette et le cri de la victoire

8.4      Une autre épreuve : le mépris et le rejet de Succoth et de Penuel

9        L’éphod de Gédéon - Abimélec (Jug. 8:22 à 9:57)

9.1      La flatterie des hommes d’Israël

9.2      La fin de la vie de Gédéon

9.3      Abimélec établi roi

9.4      La parabole de Jotham

9.5      Le jugement et la mort d’Abimélec

9.6      Une leçon sur la conduite à tenir parmi le peuple de Dieu

10     Jephté + Ses prédécesseurs et ses successeurs (Jug. 10 à 12)

10.1          Thola et Jaïr – un temps de paix pour Israël

10.1.1     Thola

10.1.2     Jaïr

10.2          Le nouveau déclin du peuple d’Israël

10.3          La repentance du peuple et la promesse d’une délivrance

10.4          Jephté, le huitième juge

10.4.1     La victoire sur Ammon

10.4.2     La défaillance de Jephté et la guerre civile parmi le peuple

10.5          Les successeurs de Jephté

10.5.1     Ibstan

10.5.2     Elon

10.5.3     Abdon

11     Samson et les Philistins – Le nazaréat (Jug. 13 à 16)

11.1          Les nouveaux manquements du peuple de Dieu

11.2          Le pays livré en la main des Philistins

11.3          Celui que Dieu va susciter pour délivrer le peuple des Philistins - un Nazaréen

11.4          L’offrande apportée par Manoah et sa femme.

12     Samson – Alliances et conflits (Jug. 14 à 15)

12.1          Les premières étapes de la vie de Samson

12.1.1     La descente à Thimna

12.1.2     Samson attiré par celle qui « plaît à ses yeux »

12.1.3     Un premier exploit de Samson

12.1.4     L’énigme que Samson propose aux Philistins

12.1.5     D’autres enseignements à retirer de cette scène du jeune lion

12.1.6     L’énigme révélée par Samson à sa femme

12.1.7     La descente de Samson à Askalon

12.1.8     La dernière visite à Thimna

12.2          La victoire de Samson sur les Philistins

12.2.1     L’intervention des hommes de Juda en faveur des ennemis !

12.2.2     Livré aux Philistins, Samson remporte une très grande victoire

12.2.3     Le cri de Samson adressé à l’Éternel

13     Samson : derniers jours (Jug. 16)

13.1          Samson descend à Gaza

13.2          Un piège pour Samson dans la vallée de Sorek

13.3          L’abandon du nazaréat

13.4          Samson vaincu par les Philistins

13.5          Le relèvement de Samson

14     Le développement de l’idôlatrie (Jug. 17-18)

14.1          L’idolâtrie introduite parmi le peuple comme système établi

14.2          L’idolâtrie en Éphraïm

14.2.1     Michée et sa mère

14.2.2     Le Lévite de Juda

14.2.3     La tribu de Dan

15     Corruption morale en Israël et gouvernement inefficace (Jug. 19 à 21)

15.1          La corruption indescriptible du cœur de l’homme

15.2          Le péché de Guibha

15.3          La réponse à l’infamie par la violence

15.4          La discipline

15.5          Le relèvement du peuple après l’affaire de Guibha

16     Le livre du déclin

16.1          Rappel des trois parties principales du livre des Juges

16.1.1     L’impossibilité de jouir de l’héritage

16.1.2     Christ, notre héritage

16.1.3     Les conséquences du fait de ne pas chercher à saisir Christ

16.1.4     La corruption intérieure pleinement manifestée

16.2          Tenir ferme pour Christ en un jour de ruine

 

1        Préface

Le Livre des Juges est un maillon important dans l’histoire d’Israël. Il présente le changement de régime de la théocratie du début, à la royauté qui prend fin à la captivité. Cette période de transition est marquée par l’incrédulité et le déclin qui forment la trame du récit ; nous y voyons la patience inlassable de Dieu qui, en dépit de l’incompétence totale du peuple et de son incrédulité, vient à leur secours à plusieurs reprises. En même temps, Dieu manifeste ses desseins qui ont leur accomplissement en Christ seul, et qu’Il achèvera dans « ce jour-là » qui est maintenant si proche.

Dans sa mise à l’épreuve, Israël représente l’humanité, c’est pourquoi les principes moraux impliqués ici s’étendent à tous les hommes, car chacun aura à rendre compte à Dieu. Le livre de Josué abonde en récits typiques dont on peut tirer des enseignements pour le christianisme, et nous verrons que ce livre approfondit ces enseignements typiques. Ils portent principalement sur le déclin et la restauration ; leur similitude avec l’histoire prophétique de l’Église professante, donnée dans les chapitres 2 et 3 de l’Apocalypse, est remarquable.

Nous verrons d’emblée que ce livre est d’une importance pratique considérable pour l’Église. Nous ne connaissons hélas que trop, par nos douloureuses expériences, ce qu’est le déclin. En des jours de ruine généralisée, puissions-nous entrer toujours plus dans le secret de la restauration et de la puissance divine s’opérant au moyen de faibles instruments dont les exemples abondent dans ce livre.

Ce livre a donc une portée très pratique. S’il produit l’effet escompté, il va nous amener à nous jeter, individuellement et collectivement, le visage contre terre à notre « Bokim », pour y trouver la tendre miséricorde de Celui dont le cœur manifeste, aujourd’hui encore, envers son Église bien-aimée, le même amour qui l’a amené à donner son Fils pour sa rédemption. Ce qui est ruiné ne sera jamais rebâti ; nous devons tous attendre la venue du Seigneur. Mais, si nous retenons l’enseignement présenté dans ce livre, il nous sera toujours possible de rendre témoignage pour Dieu, de faire paître paisiblement le troupeau de Christ, et de délivrer les siens de la main de l’Ennemi.

Les méditations suivantes ont pour but d’exposer ces enseignements, espérant que de vrais fruits pour Dieu résulteront de leur lecture. On y trouvera la simplicité et les imperfections du langage parlé - un style facile à comprendre, mais aussi une tendance aux digressions suscitant l’attention sur un enseignement particulier, dont le lecteur pourra poursuivre l’étude lui-même.

La prière de l’auteur est qu’à l’instar de l’aiguillon à bœufs de Shamgar et des torches de Gédéon, Dieu puisse utiliser ce modeste ouvrage pour présenter sa vérité.

 

2        Introduction

La première partie de l’Ancien Testament est le Pentateuque ; les conseils de Dieu, sa volonté et son autorité en sont les principales caractéristiques. Bien que la volonté de l’homme s’y montre souvent, il est néanmoins manifeste que Dieu a tout sous contrôle, car sa volonté est souveraine. Elle est particulièrement évidente dans le Pentateuque ; c’est pourquoi nous appelons à juste titre ces 5 livres » les Livres de la Loi ».

La deuxième partie de l’Ancien Testament, les livres historiques dont le livre des Juges est le second, composent le groupe de livres le plus grand de l’Ancien Testament. Là, c’est l’homme qui est en vue plutôt que Dieu. Il va sans dire que Dieu n’est pas mis de côté, mais Il a placé la responsabilité du gouvernement entre les mains de l’homme pour accomplir Sa volonté. Ils sont donc appelés à juste titre « les Livres de l’alliance », où se trouve le développement de la volonté expresse de Dieu donnée dans le Pentateuque.

Ces livres historiques ont, de plus, chacun leur particularité. Nous allons nous arrêter spécialement sur le livre des Juges qui imprime son caractère à l’ensemble des livres historiques. C’est le livre de l’histoire de l’homme, en montrant son évolution. Ce sera l’histoire du déclin, de l’éloignement de Dieu, des divisions plutôt que de l’unité, de la faiblesse plutôt que de la force, et en conséquence, la nécessité de l’intervention de Dieu pour être délivré. Bien que cette caractéristique se retrouve dans tous les livres historiques, de Josué à Esther, elle est particulièrement marquée dans le livre des Juges.

 

2.1       Le lien du livre des Juges avec celui de Josué

Le livre de Josué se relie à la fin du Pentateuque quand Moïse, sur le point de mourir, nomme Josué comme successeur, lui cédant son autorité de la part de Dieu ; ainsi dès le début du livre, Josué, choisi par Dieu, poursuit le travail que Moïse avait commencé ; il n’est qu’un autre conducteur.

La fin du livre de Josué est relié au livre des Juges : Josué appelle tout le peuple, et il place devant eux l’histoire des voies de Dieu et de sa miséricorde dans le passé, puis les met en garde contre le danger d’apostasier et de s’éloigner de Dieu.

En qualité de prophète, Josué en vue de l’histoire des Juges, a averti le peuple du danger qui le menaçait, et des conséquences qui arriveraient s’il ne tenait pas compte de l’avertissement. Le livre de Josué nous montre la puissance de Dieu, l’homme de foi et, en figure, le divin Conducteur. En type, Josué, le successeur de Moïse, correspond à l’Esprit Saint représentant Christ comme notre conducteur dans notre héritage.

 

2.2       L’héritage d’Israël en Canaan, une image de notre « héritage » en Christ dans les lieux célestes

De la même façon qu’il nous est dit dans l’épître aux Éphésiens que Dieu « nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ » (Éph. 1 : 3), il nous est dit en Josué que tout appartient au peuple. Ils doivent prendre possession avec l’énergie de la foi de l’héritage que Dieu leur a donné.

Mais il faut que Dieu désigne un conducteur pour acquérir leur héritage ; c’est ce pour quoi Josué est mandaté. Il est désigné conducteur de tout le peuple, et il n’y en a qu’un seul dans tout ce livre. Josué est un type de Christ vu comme conducteur sur le terrain de la résurrection, de même que Moïse était un type de Christ vu comme conducteur de son peuple quand Il était sur la terre. C’est pourquoi en type, il était nécessaire que Moïse, le conducteur terrestre, disparaisse, afin que le peuple puisse entrer dans son héritage céleste. Ainsi, il fallait que Christ meure pour qu’il puisse, comme ressuscité d’entre les morts, conduire son peuple dans la jouissance de son héritage céleste.

Mais plus encore, Josué est un type de Christ ressuscité qui continue de mener son peuple dans le combat pour prendre possession de ce qui leur appartient. C’est donc Christ, habitant dans nos cœurs par le Saint Esprit, qui nous conduit avec une énergie divine, à saisir tout ce qui nous est donné. L’héritage nous appartient, mais encore faut-il le saisir et y marcher : « Tout lieu que foulera la plante de votre pied, je vous l’ai donné » (Jos. 1 : 3). Nous devons le posséder pratiquement. C’est par l’Esprit Saint seul que nous entrons dans la jouissance de ce que nous possédons : nous avons tous la même source de joie, nous sommes tous de Christ, et tout ce qui est à Christ est à nous. Nous possédons tous la même part, et pourtant, combien la mesure dont nous en jouissons peut être différente ! Notre héritage est en Christ, mais nous ne pouvons en jouir que par la puissance de l’Esprit Saint qui demeure en nous et qui nous amène à en prendre possession. C’est Josué.

 

2.3       Les victoires du peuple d’Israël et la possession du pays par les différentes tribus

Le peuple entre dans le pays de Canaan et remporte les victoires de Jéricho jusqu’à Hatsor, jusqu’à ce que le dernier roi soit soumis et que tout le pays soit entre leurs mains ; tout est à eux.

Puis, dans la deuxième partie du livre de Josué, le pays est réparti entre les différentes tribus, chacune d’elles obtenant la part que Dieu lui a attribuée. Il est très instructif et rafraîchissant de voir que lorsque Dieu est souverain, et que l’Esprit de Dieu opère et conduit le peuple, tout dépend de Lui et de la foi qui Le suit.

Mais il y a une autre pensée. Le Saint Esprit est venu sur les apôtres comme sur l’Église entière. Dans le chapitre 4 de l’épître aux Éphésiens, nous lisons que lorsque Christ est monté au ciel, Il a donné des dons aux hommes, et d’abord aux apôtres qui ont posé le fondement de l’Église (v. 8, 11). Ainsi, bien qu’étant un type de l’Esprit Saint représentant Christ pratiquement, Josué est aussi un type de l’Esprit habitant avec autorité dans les hommes inspirés. Autrement dit, ce livre présente l’histoire de l’Église apostolique prenant possession de son héritage, conduite par des hommes divinement inspirés, dans l’énergie du Saint Esprit.

Dans le livre des Juges, au contraire, personne ne correspond à Josué en tant que conducteur choisi divinement pour lui succéder. Les conducteurs qui se sont levés, ont été suscités pour un travail ponctuel, impératif, puis ont disparu. Il est important de comprendre que les apôtres ont été une classe à part, seuls leurs écrits subsistent. Celui qui croit à la succession apostolique n’a qu’à comparer la signification spirituelle des livres de Josué et des Juges, et il verra que, si des apôtres ont introduit les saints dans la vérité de l’Église et dans leur héritage céleste, il n’y en a plus pour les maintenir dans cette position. C’est l’histoire du livre des Juges.

À la fin de l’histoire de Josué, on peut bien penser que le vieux conducteur regarde son héritage céleste avec la pleine assurance de ce qui est devant lui. Certains disent qu’il n’y a pas de révélation quant à l’immortalité dans l’Ancien Testament, et dans un certain sens, c’est vrai. Mais, en considérant l’attitude de Moïse et de Josué face à la mort, nous les voyons renoncer à tout ce qu’ils avaient de plus cher dans ce monde, sans éprouver la moindre incertitude. Sans aucune frayeur, sans l’ombre d’un doute, ils donnent leurs instructions à ceux qu’ils laissent et s’en vont. Où ? Qui peut en douter, avec une révélation telle que celle concernant Abraham : « il attendait la cité qui a les fondements, dont Dieu est l’architecte et le constructeur » (Héb. 11 : 10) ? Qui peut douter que Moïse et Josué savaient où ils allaient en quittant ce monde, et qu’ils étaient conscients d’aller à la maison, vers le Dieu bienheureux qu’ils avaient vu et servi par la foi et dans la présence duquel ils allaient maintenant entrer ? C’est très important. Relever les indications sur l’immortalité tout au long de l’Ancien Testament serait un sujet d’étude très intéressant, pour notre plus grand profit.

 

2.4       L’avertissement donné par Josué à la fin de son livre

Le conducteur âgé assemble le peuple autour de lui, et les avertit de ce qui les attend (Jos. 23-24). Il leur dit ce qui est dans leurs cœurs car l’Esprit de Dieu le lui a révélé. Il leur annonce qu’ils sont en danger d’apostasier, et va jusqu’à leur dire : « Otez les dieux étrangers qui sont au milieu de vous « (24 : 23).Ces dieux avaient déjà une place au milieu d’eux et les germes de la ruine et de l’éloignement de Dieu étaient déjà présents au sein même du peuple.

Un passage du Nouveau Testament correspond à cela, quand Paul, représentant les apôtres et l’apostolat en général, assemble les anciens d’Éphèse et leur dit ce qui va arriver : « Je sais qu’après mon départ il entrera parmi vous des loups redoutables qui n’épargneront pas le troupeau ; et du milieu de vous-mêmes se lèveront des hommes qui annonceront des doctrines perverses pour entraîner les disciples après eux » (Act. 20 : 29-30). L’apostolat que Josué représente en type prend fin avec lui. L’avertissement donné prévient que lorsque les conducteurs inspirés sont retirés, le risque de s’éloigner survient.

Cela nous amène au livre des Juges. Il était important d’insister sur ce qui précède pour bien saisir le cadre du livre, afin de comprendre les pensées de l’Esprit qui y sont.

 

2.5       La faillite du peuple responsable de saisir son héritage

Le livre de Josué présente l’héritage qui appartient au peuple ; celui des Juges présente le peuple responsable de se saisir de cet héritage, et son histoire aurait dû montrer une progression. Tout au long du livre de Josué, il nous est rappelé « qu’il restait une grande partie du pays à posséder ». Il s’agissait simplement de la conquête du pays dans son ensemble, mais pas dans les détails. Diverses limites avaient été tracées pour les tribus, et pourtant, de fait, un grand nombre d’ennemis étaient toujours en possession des villes et des forteresses au milieu des tribus.

Une des pensées importantes du livre des Juges est l’incapacité à progresser. Si elle avait été selon Dieu, cette histoire aurait dû montrer un progrès, mais la réalité est très différente. Pourquoi est-ce si grave ? Parce que ne pas croître spirituellement est la cause de la faillite totale du peuple et de son éloignement de Dieu.

 

2.6       Le déclin du peuple d’Israël, une image de l’histoire de l’Assemblée sur la terre

Le livre des Juges est rempli de manquements honteux et amers. Au fur et à mesure que l’histoire se déroule, jusqu’à la dernière page, elle fait ressortir les ténèbres plutôt que la lumière. Ne pouvons-nous pas avouer que si telle est l’histoire de l’homme, si telle est l’histoire de l’Église professante, oui, si telle est notre histoire, seules la honte et la confusion de face nous conviennent ?

Où en sommes-nous ? Sommes-nous incapables de faire des progrès ? Savoir que nous sommes bénis de toute bénédiction spirituelle en Christ, et de parler seulement de notre position en Lui, dans les lieux célestes, sans y entrer, est-ce suffisant ? Nous reposons-nous simplement sur ce que Christ a fait ? Pour le salut, nous ne pouvons rien faire d’autre que nous reposer simplement sur l’œuvre de Christ. Mais pour nous approprier pratiquement ce qui nous appartient, et en jouir, nous ne pouvons pas nous reposer sur ce qu’Il a fait ; non, nous devons poursuivre le travail dans l’énergie et la puissance du Saint Esprit.

Considérons cette pensée sous l’aspect individuel et collectif par rapport à l’Assemblée. Si, individuellement, nous n’avançons plus, alors nous nous sommes éloignés de Dieu. Si nous avons le sentiment d’être loin de Dieu, que notre communion avec Lui est rompue, c’est tout simplement qu’après avoir été sauvé et conduit à Christ, nous nous sommes arrêtés. Après avoir réalisé la plénitude de notre bénédiction en Lui, au lieu de persévérer pour jouir toujours plus de cette position bénie, nous avons baissé les bras. Quand Satan voit qu’on lui laisse le champ libre, il prend l’avantage ; il trouve l’entrée du cœur, pour y semer la graine de ce qui nous éloigne toujours plus. Qui peut dire ce qui va arriver à un chrétien dont l’âme s’est éloignée de Dieu ?

» Stagner au lieu de progresser ! » c’est ce que nous pourrions écrire en tête du livre des Juges. Tous les manquements ultérieurs, qu’ils soient individuels ou collectifs en sont le résultat.

Il en est de même de l’Assemblée sortant des mains des apôtres. Avant même que ces derniers aient quitté la terre, avant que Paul ait été recueilli pour la gloire, il a annoncé non seulement ce qui arriverait si les chrétiens ne persévéraient pas et ne tenaient pas ferme, mais que ce déclin avait en fait déjà commencé. Il écrit dans la seconde épître aux Thessaloniciens : « le mystère d’iniquité opère déjà » (2 : 7), et dans la seconde épître à Timothée : « tous ceux qui sont en Asie se sont détournés de moi » (1 : 15). L’apôtre Jean écrit dans sa première épître : « Maintenant aussi il y a plusieurs antichrists » (2 : 18). Et c’était au sein de l’Église ! Cela nous montre combien l’Église, dès le début, a manqué à son devoir en négligeant de prendre pleinement possession de son héritage et, en conséquence, a été exposée à la puissance de Satan.

Notons que ce n’est pas seulement le monde qui s’introduit pour prendre possession de quelque chose, mais Satan lui-même. Dans toutes les fausses doctrines et les attaques contre l’Église qui marquent les pages dès le début de son histoire, c’est Satan qui opère en utilisant ce dont l’Église ne s’est pas emparée. Telle est l’histoire du déclin et de l’éloignement de Dieu.

Dans ce livre des Juges, la voix de Dieu s’adresse à nous pour le temps présent. Si nous regardons autour de nous et en nous-mêmes, nous ne pouvons que constater les défaillances. Alors écoutons ce que l’Esprit de Dieu veut nous dire, à nous qui avons souvent failli si lamentablement et qui, hélas, sommes prêts à broncher encore si nous n’apprenons pas la leçon que Dieu voudrait écrire sur les tables de nos cœurs.

 

3        Chute initiale et mélange au monde

3.1       Le livre des Juges se divise en trois parties distinctes :

●        la première (chap. 1 à chap. 3 : 4) pourrait s’intituler : l’indépendance à l’égard de Dieu ;

●        la deuxième - la principale – (chap. 3 : 5 à chap. 16), imprime sa marque à l’ensemble du livre. Elle présente les conséquences de cette indépendance : l’arrivée de l’ennemi, l’esclavage qui en résulte, et la délivrance accordée par Dieu lorsque le peuple se repent.

●        la troisième (chap. 17 à la fin) révèle pleinement l’état de cœur du peuple qui ne peut que s’égarer ; le seul remède est que le Seigneur vienne prendre possession de l’héritage. Les délivrances successives n’améliorent rien, comme pour l’empire romain, l’histoire du peuple est celle du déclin. Le dernier libérateur, Samson, le plus fort de tous, est, en fait, le plus faible ; il a lui-même besoin de plus de délivrances qu’il n’en procure.

 

3.2       Le déclin du peuple

Même s’il n’est pas parlé de la venue de Christ, elle est mise en évidence par le fait qu’en raison de son absence, l’état du peuple décline toujours plus. Il en est de même de l’Église, où les choses vont de mal en pis. Après de profonds exercices de la part du peuple, des libérateurs se sont levés, et ont apporté une restauration partielle. Aujourd’hui, notre niveau n’est pas supérieur à celui de nos pères, bien que nous ayons de plus grands privilèges. Nous sommes à l’heure la plus sombre de l’histoire de l’Église, celle où l’appel à la délivrance est plus impérieux que jamais – délivrance non par un secours humain, mais par la venue du Libérateur qui prendra à Lui son Église, et qui, par son pouvoir divin, nous fera réaliser la pleine mesure de notre héritage dont nous jouissons, hélas, si peu.

La première partie se caractérise par l’indépendance du peuple vis-à-vis de Dieu, ou la rébellion du peuple élu, quoique cette expression soit un peu forte. Elle se compose de deux grandes sous-divisions :

●        de Juges 1 à 2 : 5, nous voyons le peuple identifié avec ses ennemis, au lieu d’en être séparé – union, hélas, qui n’est pas un signe de force.

●        de Juges 2 : 6 à 3 : 4, il s’agit de l’histoire de son éloignement de Dieu, dû à son état moral.

Dans la première sous-division, qui est vraiment un condensé du livre des Juges, se trouvent différentes phases de cette identification du peuple avec ses ennemis. Au moment où elle se relie au livre de Josué, l’histoire commence bien : « Et il arriva, après la mort de Josué, que les fils d’Israël interrogèrent l’Éternel, disant : Qui de nous montera le premier contre le Cananéen, pour lui faire la guerre ? Et l’Éternel dit : Juda montera ; voici, j’ai livré le pays en sa main » (1 : 1-2). La première partie commence par une victoire due à la puissance de Dieu s’exerçant parmi son peuple qui monte prendre possession de son héritage. Certes, des signes guère encourageants sont visibles, comme la perte de la simplicité en la Parole de Dieu, mais c’est le côté le plus brillant qui est mis au premier plan. Notons qu’une partie du récit se trouve déjà dans le livre de Josué.

Les vingt premiers versets relatent les victoires de la tribu de Juda. Le verset 21 donne l’histoire de la tribu de Benjamin, les versets 22 à 26, celle de la tribu de Joseph, puis du verset 27 à la fin du chapitre, six tribus sont mentionnées successivement – là, tout n’est que faillite.

Considérons un peu ces passages, nous y trouverons des enseignements importants.

 

3.3       La tribu de Juda

Dieu Lui-même dit que Juda doit être le premier à monter prendre possession de son lot. Cette partie pourrait s’intituler : « La puissance de Dieu par la vérité ». Plus nous étudions la signification du nom des différentes tribus, plus nous sommes frappés par leur portée spirituelle. Juda signifie « louange ». Mais qu’est-ce que la louange, et sur quoi est-elle fondée ? Ce n’est pas un bouillonnement de sentiments, comme beaucoup le pensent, et c’est une erreur d’essayer d’atteindre un état d’émotion, en l’appelant à tort louange et adoration ; la louange est fondée sur la Vérité.

Ainsi, Juda vient en tête, que ce soit pendant la traversée du désert ou dans le pays, et, comme nous le savons, c’est de la tribu de Juda que Christ a surgi (Héb. 7 : 14).

L’héritage de Juda était tout le sud du pays, la terre orientée vers le soleil. De même, la Parole de Dieu, qui est la Vérité, illumine notre précieux héritage. À l’instar de la vraie louange fondée sur la vérité, Juda – « louange » - représente aussi l’ensemble des vérités doctrinales qui sont la seule base d’un culte selon Dieu. Partout où la vérité est sacrifiée, où la Parole de Dieu est mise de côté, où ces vérités perdent leur autorité, la louange en souffrira – Juda ne sera plus vainqueur. C’est l’idée essentielle de ce passage. C’est comme si Dieu disait à son peuple : Christ a remporté une grande victoire, c’est en gardant la vérité que vous continuerez à vaincre et que vous jouirez pratiquement du précieux héritage dont les apôtres ont parlé dans leurs écrits inspirés.

Juda devait monter le premier. Or dès le début, la faiblesse le caractérise : il ne veut pas aller seul prendre possession de ce qui lui appartient. Il demande à Siméon, qui partage le même territoire, de venir l’aider dans sa conquête, et lui promet de l’aider en retour. Quel enseignement en tirer ? Si Dieu me commande une chose, dois-je rechercher le secours humain ? Quand Dieu a dit à Moïse d’aller délivrer son peuple, était-ce Lui obéir et L’honorer que de plaider et d’insister jusqu’à ce qu’Il lui accorde l’aide d’Aaron ? Cela ne montrait-il pas un manque d’assurance chez ce serviteur ? Chaque fois que la Parole de Dieu requiert notre obéissance et que nous cherchons un secours humain, nous pouvons être sûrs que cette faiblesse se manifestera tôt ou tard par une défaillance. C’est ce que nous apprenons avec Juda qui sollicite l’aide de Siméon.

Certes, il y a eu une victoire, mais la suite du passage montre qu’il n’y avait pas l’engagement de cœur absolu qui aurait permis d’achever la conquête et d’assurer ainsi un triomphe à la gloire de Dieu. Il ne semble pas y avoir l’honneur d’une victoire totale sur les forces d’Adoni-Bézek. Un ennemi mutilé n’est pas un ennemi entièrement vaincu et, bien qu’il meure plus tard et que Jérusalem soit pour un temps prise et brûlée, la conquête n’est pas définitive.

Ce beau récit des victoires à Hébron et à Debir – Kiriath-Sépher, comme on l’appelait autrefois – se trouve aussi en Josué, et s’il est répété ici c’est qu’il est caractéristique de ce passage, et que nous devons y prêter attention.

 

3.4       Caleb, Othniel et Acsa

Les huit premiers versets ont relaté la victoire de Juda et de Siméon ; maintenant, des versets 9 à 15, l’exercice de foi de Caleb, Othniel et Acsa, met l’accent sur la suprématie de la Parole de Dieu, de la Vérité.

Juda ne peut gagner du terrain et le conserver qu’en gardant la vérité ; ainsi, le peuple de Dieu ne peut triompher qu’en croissant dans la connaissance de la Parole de Dieu. C’est ce que typifie cette scène d’Hébron : Hébron signifie « communion », et Kiriath-Sépher, la ville qui lui est étroitement liée, signifie » la ville du livre ». Nos pensées se dirigent d’emblée vers ce précieux Livre, la Bible, que nous avons entre les mains. Nous devons la conquérir, en prendre possession, l’arracher des mains de l’Ennemi, et l’avoir pour précieuse, car elle nous parle de Dieu. Lorsque Kiriath-Sépher a été prise, son nom a été changé en Debir qui signifie : la « Parole de Dieu » ; « le livre » est devenu « la Parole de Dieu ». Voilà en quoi consiste la victoire de Juda : la Bible n’est plus seulement un livre, elle devient la Parole de Dieu. Si Juda avait continué dans ce chemin, s’il avait pleinement pris possession de la Parole de Dieu, faisant de ses doctrines une réalité vivante et la considérant comme la voix de Dieu parlant à son peuple, alors la louange, le culte et la joie auraient été sans entrave, et la puissance aurait été de plus en plus manifeste.

Hélas ! L’Église n’a pas mieux fait, elle a très tôt négligé les doctrines. Au lieu de changer Kiriath-Sépher en Debir, une parole vivante, l’Église a pris le Livre des mains du peuple, et l’a placé dans les monastères, lui en interdisant l’utilisation. Au lieu de donner au peuple les vivants oracles de Dieu, elle les lui a ôtés ; il ne pouvait donc en résulter que ténèbres et faillites.

Il en est de même pour nous personnellement. Si ce Livre nous est fermé, n’étant qu’une succession de lettres et non la Parole vivante et opérante, ni progrès ni croissance ne se verront dans notre vie. Exit la doctrine, place à la pratique, clame le monde, ce que les chrétiens professants ont repris à leur compte en disant : nous voulons un enseignement pratique et non pas doctrinal. Ils ont eu gain de cause : la doctrine n’est plus enseignée mais, au lieu de la pratique désirée, ils subissent les conséquences inévitables de l’abandon de la Parole de Dieu : la recherche de tout ce qui plaît à l’homme naturel.

Grâce à Dieu, il y a des exceptions à cela, mais l’Église qui s’est détournée de la Parole de Dieu est tombée dans ce triste état. Il n’est donc pas étonnant de voir si peu de joie et de jouissance des choses de Christ parmi le peuple de Dieu. Comment y en aurait-il quand la vérité le concernant est si peu connue et appréciée, quand la Parole de Dieu, reléguée sur les étagères parmi une littérature de grande valeur et précieuse peut-être, n’est plus la Parole vivante du Dieu vivant. Si elle n’est placée qu’au rang de la littérature humaine, alors nous avons perdu la voix de Dieu ainsi que toute puissance ; l’Église a rompu ses amarres et s’en va à la dérive. C’est ce qui explique les ténèbres qui nous enserrent et le déclin de la chrétienté.

Le reste du récit d’Othniel et Acsa est très beau. Acsa signifie « chaînette de cheville ». Son nom suggère l’ornement de la doctrine, dans la marche et dans la vie, qui complète merveilleusement la foi d’Othniel, le « lion de Dieu » ou la « puissance de Dieu ». Acsa désire un champ fertile, et pour cela, elle sait qu’il faut des sources d’eau. Or l’une des caractéristiques du pays, c’est l’abondance de l’eau (Deut. 8 : 7). L’Esprit seul peut rendre la Parole de Dieu fraîche et féconde. Debir ne pourrait pas vraiment correspondre à son nom sans les flots rafraîchissants de l’Esprit. Les sources du haut et du bas lui sont données, et ainsi tout est rafraîchi par la vérité, qu’elle soit élevée ou pratique. Celui qui veut produire du fruit pour Dieu désirera comme Acsa un champ arrosé de sources. On se plaindrait moins que la Parole de Dieu est sans intérêt, s’il y avait plus d’Acsa pour la désirer ardemment.

Au début, l’Église a gardé la Parole dans une certaine mesure, et les victoires remportées étaient selon cette mesure.

 

3.5       Les Kéniens

Le paragraphe suivant relève une faiblesse évidente : il est parlé des fils du Kénien, beau-père Moïse ; c’est une relation selon la chair et non pas divine (v. 16). Ils venaient de Jéricho, la ville des palmiers. Avaient-ils été épargnés ? Rien ne dit qu’ils y avaient des droits. Tous ceux qui étaient liés à Jéricho étaient sous malédiction. Or ces gens montent de la ville des palmiers, et font leur demeure au beau milieu de Juda ! Lorsque le monde avec ses influences mauvaises trouve place au sein de l’Église, quand bien même ce serait des relations selon la chair avec le peuple de Dieu, c’est les prémices d’un prochain éloignement de Dieu, et nous pouvons être sûrs de les voir surgir à nouveau bientôt. Mais il y avait à cela une pieuse exception : Jaël, la femme de Héber le Kénien, qui opéra une grande délivrance. Héber avait laissé son propre peuple qui habitait à Arad et s’était manifestement identifié de cœur avec Israël. C’est ce que suggère ce nom, Héber qui signifie « un pèlerin ».

Ensuite, il s’agit d’Horma. Cette victoire remportée conjointement par Juda et Siméon a dû être entière, car ils ont absolument détruit cette cité.

 

3.6       Judas et Benjamin

Dans les versets 18 à 20 sont citées d’autres conquêtes. Cette première partie présente les principales victoires du peuple de Dieu, mais aussi les faiblesses qui seront la cause des manquements ultérieurs.

Souvenons-nous que la vérité doit faire autorité pour avoir la puissance qui assure la victoire. Pour connaître une restauration, nous devons retourner à la vérité, à la Parole de Dieu, et en faire une réalité vivante dans nos âmes.

Au verset 21, nous en venons à Benjamin. Juda représentait la suprématie de la vérité divine, Benjamin suggère la suprématie de Christ. Ce nom signifie : « fils de ma droite ». C’est la tribu guerrière, puissante, un type de Christ victorieux, l’épée ceinte à son côté, comme au Psaume 45. C’est aussi un type de Christ, maintenant dans les siens, celui qui règne, le Tout-Puissant. Dans la bénédiction de Jacob à l’égard des douze tribus, Joseph suggère Christ portant un fruit abondant – les siens, Benjamin, un loup qui déchire, suggère Christ sortant en jugement. Or, dans ce court verset 21, nous voyons que « les fils de Benjamin ne dépossédèrent pas le Jébusien, habitant de Jérusalem », mais qu’il a habité avec eux, à Jérusalem, « jusqu’à ce jour ». Ils ne les chassèrent pas ! La tribu guerrière n’a pas réussi à pousser l’ennemi hors de la ville où Dieu devait faire habiter son nom ; or, s’il est une tribu qui devait y arriver, c’était bien elle.

Christ doit avoir son trône dans nos cœurs. Nous avons vu que la Parole de Dieu est la base de tout. Or Christ en est le thème, aussi nos cœurs et nos vies doivent-ils lui être soumis. Il doit en être le centre, comme il l’est en ayant son trône à Jérusalem. Il peut être sur nos lèvres et dans notre intellect, nous pouvons reconnaître que tout est centré sur Lui, mais si nous ne parvenons pas à chasser de la citadelle de nos âmes et jusqu’en ses tréfonds, tout ce qui s’élève contre la connaissance de Christ et rabaisse à nos yeux la suprématie du Seigneur, c’est que Jérusalem est aux mains des Jébusiens. Nous pouvons jouir de la vérité, et avoir communion avec Christ, sans qu’Il soit le Seigneur absolu de notre âme !

Israël n’a donc pas réussi à posséder entièrement Jérusalem, le centre où Dieu devait mettre son nom. De même, l’Église n’a pas donné à Christ la place centrale qui Lui revient, son histoire le montre. Qui est à la tête de ce qui prétend être l’Église sur la terre ? Un séducteur, un homme qui prend la place du Saint Esprit et de Christ, disant être son vicaire sur la terre - un antichrist assurément. En considérant l’Église de Rome, nous pouvons bien affirmer que Jérusalem est encore entre les mains des Jébusiens.

Quant aux autres systèmes où, grâce à Dieu, nous voyons de la piété et où la Parole est bien recouvrée, Christ y règne-t-il ? Jérusalem est-elle entre les mains de Benjamin ? Le clergé, la théologie, la tradition et bien d’autres choses n’ont-ils pas remplacé le Seigneur Jésus au milieu de son peuple ?

Quant à nous collectivement, laisser à Christ la place qui lui revient implique qu’Il ait réellement l’autorité suprême parmi les siens réunis, que sa volonté soit souveraine, si douloureuse soit-elle pour la chair, et que nous soyons soumis à sa précieuse Parole. La ruine qui nous environne n’est-elle pas surtout due au fait que Christ n’a pas la seigneurie, et que le Jébusien n’est pas chassé ? Jébusien signifie « fouler aux pieds », ainsi tout ce qui n’est pas de Christ, dans l’âme, foulera aux pieds sa Parole.

Il arrive souvent parmi le peuple de Dieu, que la Parole soit appréciée sincèrement, sans être accompagnée d’une soumission à son autorité. Nous pouvons étudier assidument l’Ecriture et être satisfaits de notre connaissance de la Parole de Dieu, sans pour autant y obéir pleinement. Se soumettre à la Parole de Dieu signifie accepter l’autorité de Christ, car c’est Lui qui parle dans la Parole. Insistons bien sur ce point. Ceux qui prétendent obéir à Christ ne le font réellement que s’ils obéissent à sa Parole. Le Seigneur Lui-même fait le lien entre sa Parole et Lui, quand Il dit au résidu de Philadelphie qu’ils ont gardé sa Parole et n’ont pas renié son Nom (Apoc. 3 : 8).

Il est facile de professer Christ comme centre, d’en faire un point de ralliement, le schibboleth d’une secte ou d’un parti, mais Christ comme centre signifie Lui obéir, L’honorer, Le suivre à tout prix, et reconnaître l’autorité absolue de la moindre vérité et de sa volonté pour notre marche. Retenons bien l’enseignement donné par l’échec de Benjamin dans la conquête de Jérusalem : notre grand danger, est de renier le nom de Christ et Son autorité.

Passons à la suite de cette triste histoire, qui découle du fait que Benjamin n’a pas réussi à prendre possession de Jérusalem. Ce court verset 21 est le pivot autour duquel tournent toutes les défaillances ultérieures.

 

3.7       Joseph

Dans les versets 22 à 26, nous voyons la maison de Joseph aller prendre Béthel qu’il fallait impérativement posséder. La signification même de Bethel - « maison de Dieu » - évoque la présence divine. Au début, son nom était Luz - « séparation » - séparation purement extérieure. C’est ce que nous voyons dans toute l’histoire de l’Église.

N’insister que sur le côté négatif de la séparation - ne fais pas cette chose, renonce à cela, refuse ceci… - nous fait couper une chose après l’autre, mais ce n’est rien d’autre que Luz, et non la Maison de Dieu. Pour s’y trouver, il faut non seulement se séparer, mais aussi réaliser le saint sentiment de sa présence.

Mais quelle faiblesse pour s’emparer de Béthel ! Pourquoi envoient-ils des espions, si Dieu leur a donné ce lieu ? Ce manque de confiance dévoile leur incrédulité. Il en était de même de Moïse qui, avant de tuer l’Égyptien, montrait qu’il ne s’attendait pas à Dieu en regardant ici et là pour voir si quelqu’un l’observait. Il en était de même des douze espions envoyés en Canaan, ils ne représentaient que l’incrédulité du peuple que Dieu supportait patiemment. Ils envoient donc des espions à Luz et en prennent possession, épargnant l’homme qui leur en avait montré le chemin.

Du moment que la foi fait des concessions à la chair, espérant gagner en puissance spirituelle, que ce soit dans le couple ou dans les affaires, si un compromis est fait pour épargner la chair afin de jouir tranquillement du repos de Béthel, c’est laisser en liberté un ennemi qui s’en ira construire une autre ville du même nom. Combien de fois des ennemis de Dieu qui ont été épargnés rétablissent les mêmes choses qu’il faut à nouveau combattre et qui ne sont que plus difficiles à vaincre. Dans nos vies privées, nous pouvons considérer certains compromis comme minimes ; comme Lot, nous pouvons être infidèles envers Christ que sur un seul point, mais ce point épargné grandira jusqu’à détruire nos vies spirituelles.

L’Église a souvent épargné les habitants de Luz comme, par exemple, dans le système monacal qui, venu d’Orient, a prospéré au milieu d’elle. Ce système enseigne la séparation du monde, le mal inhérent à la matière et diverses formes d’ascétisme dont l’histoire de l’Église abonde. Épargner cet habitant de Luz a profité au système monacal, jusqu’à éclipser totalement Béthel où l’on sentait la présence de Dieu ; on y cherche la séparation du monde plutôt que la présence de Dieu. Dans toute séparation sans la présence de Dieu, l’Ennemi est épargné et des défaillances ultérieures sont en germe.

Combien nous avons besoin du sentiment de la présence de Dieu et du Saint-Esprit au milieu de nous !

Possédons-nous Bethel ou seulement Luz ? Habitons-nous la maison de Dieu, ou sommes-nous simplement un cercle de personnes séparées ? La présence de Dieu est-elle réelle, et sommes-nous conduits par l’Esprit, ou sommes-nous une secte qui ne fait que rejeter le mal, sans jouir pleinement de la sainte présence du Seigneur ?

 

3.8       Manassé, Éphraïm, Zabulon

Passons maintenant au dernier paragraphe, où nous voyons la faillite de plus en plus manifeste de six tribus. Nous avons tout d’abord Manassé qui signifie : « oublier ». C’est tout oublier pour ne se fixer que sur une chose, ainsi que pouvait l’exprimer l’apôtre Paul : « oubliant ce qui est derrière et tendant avec effort vers ce qui est devant, je cours droit au but pour le prix de l’appel céleste de Dieu dans le Christ Jésus » (Phil. 3 : 13-14). Si la maison de Dieu n’est pas soigneusement gardée pour Lui, nous nous chargerons vite de fardeaux au lieu de les délaisser pour courir la course qui est devant nous et remporter le prix, et nous n’estimerons pas toutes choses comme une perte, à cause de l’excellence de la connaissance du Christ Jésus notre Seigneur(Phil. 3 : 7-8). Ne pas tendre avec effort vers ce qui est devant, est la défaillance présentée ici.

Vient ensuite Éphraïm, de la tribu de Joseph, la tribu qui porte du fruit. Il représente les œuvres parmi le peuple de Dieu car la foi se montre par les œuvres comme nous le dit l’apôtre Jacques. Si Manassé a manqué, ne se fixant pas sur une seule chose, alors Éphraïm faillira aussi. Les œuvres dans la vie quotidienne cesseront, et l’Ennemi s’emparera de ce qui devrait être pour Dieu. La défaillance ici, est donc un manque de fruit pour la gloire de Dieu.

S’il y a manquement de la part de Manassé et d’Éphraïm, Zabulon, dont le nom signifie dévotion ou consécration à Dieu, sera également trop faible pour maintenir sa possession.

 

3.9       Aser, Nephthali et Dan

Ensuite, vient Aser qui signifie « bienheureux ». Si Christ n’est pas le chef, et si nous ne jouissons pas de la maison de Dieu, il va sans dire qu’Aser ne pourra pas chasser l’ennemi de son territoire. La tristesse, le manque de joie et un cœur triste dépeignent la défaillance d’Aser. L’apôtre Pierre dit : « Vous vous réjouissez d’une joie ineffable et glorieuse » (1 Pier. 1: 8). Ah, quelle joie indescriptible, remplie de la gloire à venir ! En pensant à cette gloire, à la bénédiction qui s’y rattache et à l’affranchissement de la souillure du péché, nos cœurs ne seraient-ils pas remplis de cette joie glorieuse ? Anticipons-nous le ciel ? Aser - « bienheureux » - devrait être notre nom et nous caractériser ! Hélas, reconnaissons humblement que cette joie spirituelle qui devrait se manifester parmi nous et dans l’Église, est bien peu visible.

Certes, nous traversons un désert terrible, et sommes en proie à toutes sortes de tentations, dans un monde où les larmes sont plus fréquentes que les sourires, mais il est faux de dire que l’enfant de Dieu ne doit pas être heureux dans ce monde. En considérant notre héritage et notre part, ce serait un affront de dire cela. Sommes-nous comme Aser, qui n’a pas réussi à chasser les habitants du pays ? Les villes qui devraient appartenir à la joie chrétienne sont-elles toujours détenues par l’Ennemi ? Qui nous vole donc notre bonheur ? Quels petits renards ravagent nos vignes en fleur (Cant. 2 : 15) ? Que ce soit individuellement ou collectivement, nous pouvons en voir la cause dans l’histoire de Benjamin, Joseph et Éphraïm.

Vient ensuite Nephtali, qui signifie « lutteur ». Il représente l’homme fort et vaillant qui combat pour Dieu, selon la pensée de Dieu, et non pas charnellement, ne se fiant pas à sa propre puissance. Il répond à la pensée de Dieu, et a l’assurance de lui appartenir. Il représente l’esprit de la puissance que l’homme a en Dieu, ou que celui qui réalise sa faiblesse possède dans le Tout-puissant. Là encore, la triste histoire des défaillances se répète. Celui qui oublie qu’il est faible, oublie que la source de sa force est en Dieu, et n’a donc pas de puissance pour lutter et vaincre l’Ennemi.

Le récit se termine avec Dan, qui aurait dû être un conducteur et un juge. Non seulement il ne parvient pas à chasser les habitants de ses villes, mais les Amoréens le repoussent dans les montagnes et habitent eux-mêmes dans les riches vallées. Quel déclin : l’ennemi prend possession de la vallée ! La vallée suggère l’humilité, et la fertilité spirituelle qui en est la conséquence. Le Seigneur a porté du fruit pour nous parce qu’Il est descendu dans la vallée de la mort ; ainsi, nous ne pouvons porter du fruit pour Dieu qu’en entrant par la foi dans la réalité de sa mort, en ayant la sentence de mort en nous-mêmes. Ici, ce n’est pas le peuple de Dieu qui demeure dans les vallées, mais les Amoréens, alors que leur habitat, à ce que les archéologues nous disent, était dans les montagnes, sur les hauteurs. Amoréens signifie « hautains », « grand orateur » ; leur manière de s’exalter est frappante. C’est un peuple qui parle beaucoup et qui chasse des vallées le peuple de Dieu. Chaque fois que le peuple de Dieu se laisse aller à parler avec emphase, et fait de grandes professions sans que cela corresponde à la réalité, il n’est plus humble et ne peut donc plus porter de fruits.

Gardons-nous des beaux discours ! Si nous sommes tentés de parler avec légèreté de notre mort et de notre résurrection avec Christ, demandons-nous qui, de l’Amoréen ou de l’Israélite, demeure dans la vallée. Quand nous disons que nous sommes bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ (Éph. 1 : 3), demandons-nous si c’est une vivante réalité dans nos âmes. Sondons nos cœurs, ne laissons jamais les Amoréens nous chasser de la vallée.

Pour illustrer cela, prenons la Réformation, dans l’histoire de l’Église. Voyez toutes ces controverses. Quelle a été la raison de la guerre de trente ans ? Qu’étaient les conflits parmi les protestants, sinon le cliquetis des armes des Amoréens chassant les hommes de Dieu des vallées ? Considérez l’Europe protestante quelques années après la Réformation, vous y verrez de nombreux théologiens, mais très peu de piété, de nombreux discoureurs combattant pour la doctrine, mais bien peu de cette humilité de cœur, de cet esprit paisible qui caractérise l’habitant des vallées où une pluie de bénédiction permet une abondance de fruits pour Dieu.

Quant à nous, individuellement ou collectivement, avons-nous été chassés de la vallée vers les montagnes ? Faisons-nous de grands discours, oubliant notre humble place de soumission à Christ ? Sommes-nous de beaux parleurs, repoussés sur la montagne de la profession ? Redescendons dans la vallée. Dieu habite avec celui qui a un cœur humble et contrit. Les Amoréens ont peut-être des chars de fer, mais l’Esprit de Dieu est plus puissant que toutes ses armées ; en revenant, nous en ferons l’expérience. Retournons dans la vallée de l’humilité, pour y produire du fruit pour le Seigneur.

 

3.10  Le déclin du peuple - De Guilgal à Bokim : relations avec Dieu changées (Jug. 2 à 3:4)

Le premier chapitre a donné un aperçu des circonstances extérieures et des défaillances du peuple lors de l’occupation du pays. Le déclin a été présenté par le récit d’une succession de combats dont les victoires deviennent de moins en moins complètes, jusqu’à ce que les conditions s’inversent, et que le peuple soit refoulé dans les montagnes par leurs ennemis.

Les passages que nous considérons maintenant nous occupent des relations du peuple avec Dieu, et des conséquences de son éloignement. Etroitement liés au chapitre précédent, ces versets disent peu de choses au sujet des lots des fils d’Israël ; en revanche, la question de leur fidélité envers Dieu y tient une grande place.

Ces quatre paragraphes ont une portée plutôt générale ; les circonstances qui y sont décrites couvrent de longues périodes. Ils présentent quatre vues d’ensemble du livre, révélant des principes que nous verrons par la suite. Nous allons trouver plusieurs caractéristiques importantes sur lesquelles nous nous arrêterons un peu longuement, avant de passer aux récits de la partie principale du livre.

 

3.11  De Guilgal à Bokim

3.11.1    Guilgal

Dans l’Ecriture, tout a un sens ; aussi chaque nom a-t-il certainement une signification. Guilgal est la ville caractéristique du livre de Josué. Après avoir traversé le Jourdain, et être entrés dans le pays, avant d’avoir conquis une seule ville, les Israélites campèrent à Guilgal (Jos. 4 : 19). Là, l’Éternel avait dit de se faire des couteaux tranchants pour se circoncire, car ils avaient été si longtemps dans le désert qu’ils avaient perdu le signe distinctif d’appartenance à Dieu. Le peuple devait être circoncis pour être prêt à combattre dans le pays.

Le sens spirituel est très simple. Tout comme la mer Rouge, le Jourdain représente la mort et le jugement.

La mer Rouge est en rapport avec la délivrance d’Égypte, le monde que nous avons quitté. La puissance et la domination du péché, représentées par le Pharaon et ses armées, sont anéanties à la mer Rouge ; un chemin est ouvert par la mort et le jugement, par la mort et la résurrection de Christ.

Le Jourdain présente une pensée similaire. Il suggère la mort et la résurrection, mais en rapport avec l’entrée dans le pays promis et non pas avec la sortie d’Égypte. L’entrée dans notre héritage se fait par la mort et la résurrection de notre Seigneur Jésus. Souvenons-nous bien que dans les deux cas le peuple est passé à sec ; il ne lui en a rien coûté de traverser la mer Rouge pour sortir du pays d’Égypte, pas plus que de passer le Jourdain pour entrer dans son héritage.

Qu’avons-nous eu à payer ou à abandonner pour être délivrés de la colère de Dieu ? Qu’avons-nous eu à faire pour être libérés de la servitude du péché et de l’esclavage de Satan ? Rien, nous sommes passés à sec. La mer menaçait de nous engloutir ; aucune puissance humaine ne pouvait nous faire passer de l’autre côté ni nous délivrer de l’armée terrible du Pharaon. Nous y avons échappé en passant à travers la mer, marchant paisiblement dans son lit comme sur un chemin, sans aucun effort de notre part. C’est le chemin de Dieu.

Insistons sur ce point, pour ceux qui sont perdus. Le chemin du salut que Dieu propose est le plus simple possible. Pas une seule bonne œuvre, ni aucun bon sentiment ne sont nécessaires. Tout a été parfaitement accompli par Christ. L’œuvre est achevée.

Si vous êtes encore sous la colère et le jugement de Dieu, comme tous le sont à cause de leurs péchés, voici le remède de Dieu : le Seigneur Jésus-Christ est descendu du ciel pour chercher et sauver ce qui était perdu, et Lui, non par sa vie mais par sa mort, a ouvert le chemin du salut pour quiconque croit en Lui. À la croix de Christ, je vois le sang qui m’abrite du jugement, et qui m’ouvre un chemin pour être délivré de la puissance et de la servitude du péché.

Regardez au salut que Dieu vous offre. Vous n’avez rien à faire pour l’obtenir, juste à vous reconnaître pécheur, coupable et perdu. La traversée de la mer Rouge n’est pas difficile. Beaucoup disent qu’ils n’en sont pas capables : ils ont peur de ne pas pouvoir continuer dans la vie chrétienne. Le problème n’est pas là, mais bien celui-ci : êtes-vous prêt à faire le pas et à accepter le Seigneur Jésus comme votre Sauveur ? Si vous l’acceptez, Il s’engage à tout faire pour vous. Non, ce n’est pas difficile d’être délivré de la puissance d’un mal plus grande que celle du Pharaon, puisque nous n’avons aucun effort à fournir.

Certains chrétiens estiment ce chemin de la délivrance un peu trop facile, et disent parfois : c’est antinomique et dangereux. Qu’est-ce qui les entrave pour être délivrés de la puissance du péché ? Pourquoi ne peuvent-ils pas s’approprier Romains 8 : 2 : « La loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus m’a affranchi de la loi du péché et de la mort » ? Ah, puissent-ils dire à genoux : Père, je te rends grâce de ce que la loi de l’Esprit m’a affranchi de ce qui me tenait en esclavage. - Celui qui sait qu’il est un pécheur pardonné et délivré, peut affirmer que le chemin de la délivrance est facile. En revanche, le chemin du péché, lui, est un chemin dur ; la servitude de Romains 7 est un esclavage dur. Mais du moment qu’avec une foi vivante nous nous emparons de la Parole de Dieu, nous sommes affranchis.

S’il est facile pour l’âme d’être libérée, il y aura néanmoins encore des exercices, et il faudra marcher tous les jours avec humilité, en se méfiant de la chair. Mais la ligne de démarcation est nette entre l’esclavage du péché, et la liberté dans laquelle Christ place son peuple. Cette ligne de démarcation est la mer Rouge, avec son passage à sec. Cela ne nous coûte rien. Il n’y a pas à attendre une deuxième bénédiction, à atteindre un certain niveau, ou à faire une expérience particulière. Beaucoup d’enfants de Dieu sont occupés d’expériences au lieu de la vérité. Il faut simplement marcher à travers les eaux qui se dressent, prêtes à nous engloutir. Quelle puissance en nous pourrait un instant résister à ces flots menaçants ? La main puissante qui les retient nous y a frayé le chemin facile de la liberté. Rappelons-le au peuple de Dieu : nous sommes libres, nous ne sommes plus dans la servitude du monde, ni sous l’esclavage du péché ou de Satan.

Cela nous ramène à Guilgal ; ce n’est pas une digression, mais une nécessité pour jouir de la liberté. Nous y arrivons en traversant le Jourdain à sec ; et là, de quelque côté que nous nous tournions, nous découvrons que tout nous appartient. Mais qu’est-il dit ensuite ? « Fais-toi des couteaux tranchants » (Jos. 5 : 2). Nous en arrivons à quelque chose qui coûte, non par un effort humain ou légalement, mais qui coûte à l’orgueil et au moi. Le couteau de Dieu nous amène maintenant à la réalité pratique de ce que nous possédons spirituellement. Nous sommes entrés dans le pays, nous connaissons la délivrance, nous pouvons dire que nous sommes libres, mais pour marcher comme des vainqueurs et des hommes affranchis, la marque du monde doit être retranchée, et seule la croix de Christ peut le faire.

Dans l’épître aux Galates, l’épître de la délivrance, comment Paul parle-t-il de la croix de Christ ? Au premier chapitre il écrit : « Christ... s’est donné lui-même pour nos péchés, afin de nous retirer du présent siècle mauvais » (v. 4), et au dernier chapitre : « Qu’il ne m’arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde » (v. 14). Dans le premier chapitre la délivrance est opérée pour nous, par Lui à la croix, et dans le dernier chapitre, elle s’applique pratiquement à nous dans la puissance du Saint-Esprit.

Le peuple de Dieu doit toujours revenir à Guilgal. L’enfant de Dieu n’a aucune puissance à moins de réaliser et sa faiblesse, et la mort. La sentence de mort étant venue sur lui, il l’applique dans la simplicité de l’obéissance de la foi, de sorte qu’il n’a plus confiance en la chair. Pour lui, la croix de Christ n’est pas seulement un titre ou un signe de liberté, elle est maintenant une arme libératrice ; il est affranchi de la puissance du monde et de l’énergie de la chair. Connaissons-nous pratiquement la pleine délivrance de l’âme par la croix de Christ, emblème de la mort ? Souvenons-nous qu’en montant de Guilgal, le peuple avait pu affronter Jéricho sans trembler ni avoir peur, et que les murs de la ville tombaient devant eux. Ils revenaient à Guilgal pour reprendre des forces en réalisant leur faiblesse, avant d’aller en guerre contre les autres villes du pays, et affronter toutes les formes sous lesquelles l’ennemi se présentait. Ils montaient de Guilgal, remportaient un combat, et revenaient à Guilgal pour jouir des fruits de la victoire et être gardés dans l’attitude qui convenait pour remporter de nouveaux combats.

Nous savons monter de Guilgal, mais savons-nous y revenir ? Une expérience a pu nous humilier jusque dans la poussière de la mort, mais y sommes-nous restés ? Nous nous sommes peut-être courbés devant Dieu jusque dans la poussière, et la croix s’étant appliquée pour juger entièrement notre moi ; Dieu a pu alors nous relever, et nous avons pu remporter une victoire dans la puissance de l’Esprit. Mais sommes-nous ensuite retournés à Guilgal, pour rester au lieu de notre humiliation, où la sentence de mort s’applique à tout ?

Le livre des Juges mentionne que Dieu était à Guilgal et y demeurait – combien c’est significatif ! Il se tenait là pour rencontrer le peuple, s’il venait à Lui.

Dieu demeure toujours à Guilgal, là où la mort de Christ s’applique à nous. Si nous voulons vraiment avoir affaire avec Dieu, c’est à Guilgal qu’il faut aller. Ce n’est pas un terrain légal terrifiant. Qu’elle est douce, la croix de Christ que nous considérons particulièrement chaque premier jour de la semaine, elle donne la paix avec Dieu ! C’est l’emblème de notre salut éternel. Elle ne devrait pas plus nous effrayer pour notre marche que pour notre salut.

Mais dans les Juges, le peuple n’est pas prêt à rencontrer Dieu à cet endroit. Aussi, dans sa grâce, l’Ange de l’Éternel monte-t-il de Guilgal, pour un lieu bien différent.

 

3.11.2    Bokim

« Et l’Ange de l’Éternel monta de Guilgal à Bokim » (2 : 1). Notez ce mot « monta ». Il marque une distance et une dénivellation certaine entre Guilgal et Bokim. Le lieu de l’humilité a été abandonné, pour un terrain élevé et une attitude hautaine. Collectivement ou individuellement, cette ascension est facile ! L’orgueil spirituel et la confiance en soi s’y trouvent.

À Guilgal, il y a des couteaux, mais pas de larmes amères ! Là, Dieu ne fait aucun reproche. Quand un homme a été brisé par la croix, Dieu n’a pas besoin de le briser à nouveau ; il s’est humilié en présence de Dieu, et cela suffit. Lorsque j’ai jugé ma marche, et ma vie, Dieu n’a pas besoin de le faire pour moi. Aussi, Guilgal est-il un lieu de douce et sainte communion.

Mais si Dieu quitte Guilgal pour nous rencontrer sur un autre terrain, ce sera pour nous faire sentir la misère liée à nos manquements et à notre éloignement de Lui ; ce sera pour nous rappeler qu’Il nous a fait sortir d’Égypte, et nous a introduits dans le pays, avec la promesse de toujours rester fidèle à son alliance établie avec son peuple.

Dieu demande donc aux fils d’Israël pourquoi ils se sont éloignés de Lui et ont servi d’autres dieux, et Il précise qu’Il ne peut les bénir ni être avec eux tant qu’ils restent dans cette position. Il ne chassera pas les ennemis de leur territoire, et les laissera dans une misérable servitude toute leur vie, parce qu’ils ne L’ont pas rencontré à Guilgal qui est l’emblème de leur néant et de Sa suprématie en toutes choses.

Il fallait s’attarder sur Guilgal car c’est ce qui nous amène au cœur de notre sujet. Le jugement de soi-même est la grande leçon que l’enfant de Dieu doit apprendre. C’est peut-être encore plus nécessaire collectivement, bien qu’il n’y ait pas de priorité dans ce tout qui est impératif. Les aspects individuels et collectifs sont étroitement liés.

Pour n’avoir pas réalisé cela collectivement, l’Église n’a manifestement pas saisi ce que Dieu lui a donné. Elle s’est éloignée de Guilgal. Quelle que soit la dénomination parmi le peuple de Dieu, le jugement de soi et le brisement devant Dieu font souvent défaut ; c’est pour cela que les ennemis ne sont pas chassés complètement, comme pour les tribus d’Israël.

Revenons, individuellement, à Guilgal, sinon au moins à Bokim, le lieu des pleurs, où Dieu déclare qu’Il ne peut continuer à bénir si nous désobéissons à sa sainte volonté. Dieu peut nous rencontrer à Bokim. Pensez à ce Bokim de Luc 7, où une pauvre âme qui n’a que ses péchés à apporter à Christ, les dépose en pleurs à ses pieds, dans la honte et la douleur. Le Fils de Dieu pouvait-Il répondre à ses besoins ? Bokim, c’est le lieu des larmes où une âme peut prendre sa vraie place devant Dieu, et trouver, là, ce qu’Il est pour elle. Si un pécheur réalise qu’il ne peut apporter à Christ que ses péchés, qu’il dépose son fardeau aux pieds du Seigneur Jésus, Il répondra à ses besoins. À Bokim, se trouve un sacrifice qui a ôté le péché pour toujours de devant la face de Dieu.

Cette histoire se résume ainsi : le peuple s’est éloigné de Dieu, Dieu se distance alors d’eux à cause de leurs manquements, puis, exercés par cette situation, ils confessent leurs fautes dans la crainte de Dieu. Là, se trouve un sacrifice qui est le gage de la miséricorde de Dieu prête à répondre à ceux qui, dans l’humilité, se tournent vers Lui.

Ce qui suit fait ressortir la vérité déjà vue au premier chapitre. Il n’y a rien de nouveau, la même histoire se répète, mais vue sous l’aspect de leurs rapports avec Dieu, plutôt qu’en rapport avec leur héritage. Nous avions vu qu’ils n’ont pas réussi à prendre possession de ce qui leur appartenait, ici nous voyons qu’ils n’arrivent pas à garder ce qui appartient à Dieu. Dans les choses spirituelles, si nous n’acquérons pas ce qui est nôtre et n’en jouissons pas, nous ne rendrons pas à Dieu ce qui Lui revient. La seconde partie de cette première division nous montre combien le peuple s’est éloigné de Dieu, et comment, par manque de foi et d’obéissance à sa volonté, il ne prend pas possession de ce qui lui appartenait. Nous pourrions dire en notre for intérieur : si je n’ai pas une vie spirituelle plus grande, je suis le seul responsable et le seul à être pénalisé. Non, c’est Dieu le grand perdant. Il attend des siens l’obéissance et l’adoration de cœurs reconnaissants, dans le service et dans le culte. La principale victime, c’est Dieu, et non pas nous. « Un homme frustrera-t-il Dieu ? » (Mal. 3 : 8).

 

3.12  Le départ de Josué

« Et le peuple servit l’Éternel tous les jours de Josué, et tous les jours des anciens dont les jours se prolongèrent après Josué » (Jug. 2 : 7). Josué vivait dans la sainte présence de Dieu. Son âme étant entièrement consacrée à Dieu, il lui était facile de prendre possession de ce qui était à lui. Si Dieu s’empare de moi, je serai disposé à tout lui acquérir.

Comme nous l’avons vu, Josué représente à la fois Christ notre chef dans la puissance de l’Esprit de Dieu, et l’homme de foi qui tient ferme pour Dieu, avec une foi vivante. De leur vivant, Josué et les anciens qui connaissaient et suivaient Dieu, maintenaient toute la nation. C’est une grâce quand Dieu dispose de telles personnes pour maintenir ses saints dans la dépendance. Mais Josué n’est plus, et n’a pas de successeur. Il représente l’esprit apostolique dans l’Église. De même, au début, Paul et les autres apôtres maintenaient les saints ensemble, aussi l’Église était-elle épargnée de défaillances manifestes. Mais les apôtres sont morts sans laisser de successeur. Dans tout mouvement, la deuxième génération est souvent un temps de faillite. Du temps de Josué et des anciens, Israël était fidèle et vivait, en apparence, dans la crainte de Dieu. Puis s’est levée une génération qui n’avait pas vu les œuvres de l’Éternel ; ils n’avaient pas reçu les vérités directement de Dieu, mais de la main des anciens ; ils les avaient apprises de manière intellectuelle plutôt que de cœur.

Il est à craindre que la deuxième génération de tout mouvement possède la vérité dans la tête, et non dans le cœur ! De précieuses vérités, achetées pour quelques centimes peuvent être rangées sur nos étagères, mais une chose est de les payer de sa poche, et une autre de les payer de son âme ; les avoir dans la tête est une chose, mais il faut les avoir dans le cœur. Josué et les anciens, qui avaient une foi personnelle vivante, s’en étaient emparés, mais pour la génération suivante, c’était autre chose de les imiter. Quand l’Esprit de Dieu a sonné le cri de minuit - « Voici l’époux » - avec quelle puissance, il avait saisi les âmes et les avait menées à la rencontre de l’époux ! Que la gloire était près ! Que le Seigneur était cher ! Que le monde avait peu d’importance pour ces croyants ! Qu’en est-il aujourd’hui ?

Pensons aux bénédictions que l’Esprit de Dieu a révélées : un Christ glorieux à la droite de Dieu, une Église céleste, et toutes les vérités qui en découlent. Il ne faut pas seulement en parler, mais les assimiler avec l’aide du Saint Esprit ; cela est capital. Les anciens ne sont plus ; la première génération de ce mouvement a disparu, et nous nous sommes levés à la place de nos pères. Posons-nous alors la question : ces vérités nous ont-elles simplement été léguées par des hommes fidèles, ou les avons-nous reçues de Dieu ? Avons-nous été seuls avec Dieu à Guilgal pour les acquérir ? En avons-nous fait une question personnelle avec Lui, ou les avons-nous apprises parce que tel frère les a gardées et enseignées ? Les conducteurs sont donnés de Dieu, nous pouvons l’en bénir, mais nous ne pouvons les imiter qu’en suivant un Christ vivant dans la présence et la puissance de l’Esprit Saint.

Lot n’était pas un homme de foi, mais il pouvait suivre Abraham partout où il allait. Abraham, à qui le Dieu de gloire apparut quand il habitait en Mésopotamie, obéit à l’appel divin et quitta tout, sa maison, son pays, sa parenté. Pourquoi Lot est-il allé avec Abraham ? Parce qu’il avait les yeux sur lui. Abraham partit regardant à Dieu ; Lot, regardant à l’homme. Et nous, pourquoi sommes-nous séparés et professons-nous porter l’opprobre pour le nom de Christ ? Avons-nous répondu à l’appel divin ou à des proches qui nous sont chers ? Les enfants ont-ils simplement suivi les parents, les maris les épouses ou les épouses les maris ? Avons-nous seulement suivi ceux que nous avons aimés et honorés dans la chair ou avons-nous obéi à Christ ? Avons-nous écouté la direction de l’Esprit de Dieu, ou celle d’hommes de foi qui ne sont conducteurs que s’ils ont les yeux réellement fixés sur Christ ?

Abraham va dans le pays et Lot l’accompagne. Au mauvais jour, éprouvé, Abraham descend en Égypte. Lot va avec lui, et c’est là que la chair s’empare de lui. Si nous suivons un croyant sans imiter sa foi, tout ira bien, en apparence, s’il marche avec Dieu, mais s’il descend en Égypte, nous y descendrons aussi. À leur retour, Abraham est restauré, mais il n’est pas dit que Dieu avait des relations avec Lot et que sa main était sur lui. En fait, nous ne voyons pas que Lot ait péché aussi gravement qu’Abraham en Égypte ; il ne faisait que le suivre ici et là. Mais le moment est venu où il a dû s’arrêter de le suivre, et choisir pour lui-même – tout comme chacun de nous. Où s’est alors porté le choix de Lot ? La chair l’a dirigé vers les plaines fertiles de Sodome qui sont sous le jugement de Dieu. Si notre foi n’est pas vivante et n’est qu’une tradition, elle sera testée tôt ou tard, et nous devrons répondre à la question : dans quel chemin marcher ? Celui de la facilité, qui plaît aux affections naturelles, ou le chemin solitaire de séparation pour Dieu, dans lequel Abraham a marché seul avec Dieu

C’est l’enseignement de cette deuxième partie : le peuple sert Dieu aussi longtemps qu’un homme de foi le conduit, mais quand vient le moment de la mise à l’épreuve, il montre ce qui est dans son cœur, et s’écarte. Que Dieu nous accorde de nous en souvenir, et nous garde de considérer cet enseignement comme secondaire.

Tout ce récit en porte le caractère, jusqu’à l’enterrement même de Josué : dans le livre de Josué, le lieu de son sépulcre est Thimnath-Sérakh (24 : 30), alors que dans le livre des Juges, c’est Thimnath-Hérès (v. 9). Quand il était question de l’héritage dans lequel il était entré par la foi, comme représentant le peuple de Dieu, c’est Thimnath-Sérakh : « une riche part », et assurément, telle est la part de Dieu. Et maintenant qu’il s’agit de la défaillance du peuple et de leur éloignement de Dieu, la tombe de Josué se trouve à Thimnath-Hérès : « une part d’argile ». L’abondance est changée en un petit lopin de terre ! Cela nous montre la différence entre une foi vivante et une profession formelle. Notre héritage est-il riche ou n’est-il qu’un petit lopin de terre ? Est-ce un champ fertile, ou de l’argile stérile qui ne donne ni fruit pour Dieu, ni nourriture pour notre âme ?

 

3.13  L’apostasie et l’idolâtrie du peuple

Dès le paragraphe suivant, quand Josué est mort, le peuple s’écarte de Dieu. Non seulement les fils d’Israël ne saisissent pas ce qui leur appartient, mais ils commencent à servir Baal ; ils servent de faux dieux qu’ils se sont fait eux-mêmes, dieux des nations environnantes. Ils forment leurs pensées concernant Dieu d’après celles des peuples idolâtres !

La fin de la première épître de Jean - que nous pourrions appeler l’épître du sanctuaire ou l’épître du sein du Seigneur - est frappante. Les derniers mots de cette lettre consacrée à placer devant nous Christ et Dieu qui est lumière et amour, sont : « Enfants, gardez-vous des idoles ». Dirions-nous à un homme qui a sa tête sur le sein du Seigneur, qui marche dans la lumière, comme Il est dans la lumière, qui connaît le Père et le Fils de se garder des idoles ? Si l’Esprit de Dieu donne une telle exhortation, c’est que le danger existe et que nous avons besoin d’en être gardés.

Qu’est-ce qu’une idole ? Pour un homme, ce peut être le monde ou son travail ; pour une mère, ce peut être son enfant. Mais dans l’Ecriture, une idole est toujours associée à un aspect religieux, à ce qui sollicite la conscience - la consécration et l’obéissance entrent alors en jeu. Alors, qu’est-ce qu’une idole ? Dans le désert, quand Aaron fit le veau d’or, les fils d’Israël dirent : « C’est ici ton dieu, ô Israël ! qui t’a fait monter du pays d’Égypte », puis Aaron dit : « Demain, une fête à l’Éternel » (Ex. 32 : 4, 6). L’idole a été appelée Éternel ! Pauvre Aaron, il essayait de concilier la vérité qu’il tenait de Dieu avec l’idolâtrie qui était dans le cœur du peuple. C’était un mélange des deux qui faisait appel aux sentiments religieux du peuple. Ainsi, pour les chrétiens comme pour les païens, l’idolâtrie est ce qui fait appel au sens religieux.

Y a-t-il de l’idolâtrie parmi le peuple de Dieu ? Des choses sont-elles mêlées à la vérité de Dieu ? Ici, il nous est dit que le peuple a servi les Baals, qui signifie seigneurs. Or la souveraineté de Dieu est un fait : l’humanité Lui appartient, Il est Dieu sur elle, mais sous combien de dieux et de seigneurs les hommes se sont-ils placés, ne conservant qu’une partie des éléments de la vérité divine ! Qu’est-ce donc que s’écarter de Dieu et servir les Baals ? C’est mettre de côté ne serait-ce qu’un seul attribut de Dieu et le remplacer par d’autres qui viennent de l’homme. Par exemple, adorer le Dieu Tout-puissant, comme la Bible le révèle, en mettant sa sainteté de côté, c’est adorer une idole. Adorer le Dieu de sagesse et de connaissance selon les Ecritures, en mettant son amour et sa justice de côté, c’est de l’idolâtrie. L’idolâtrie est plutôt l’apport d’éléments ténébreux dans la lumière, que l’immersion dans les ténèbres.

Au Psaume 115 se trouve une description très instructive des « idoles des nations ». Elles ont des yeux mais ne voient pas, elles ont des oreilles mais n’entendent pas, des mains mais ne touchent pas, une bouche mais ne parlent pas. Extérieurement tout parle de sagesse, de puissance et d’intelligence mais sans qu’il y ait la réalité. Servir des idoles, c’est donc avoir le cœur et la conscience sous la puissance de ce qui n’est pas la réalité divinement révélée. Le dieu n’est pas Celui de l’Écriture, révélé par le Saint Esprit ; les pensées de l’homme y sont ajoutées, et il devient un Baal ou une idole.

Quel Dieu ce monde adore-t-il, et quelle conception de Dieu les hommes ont-ils ? Est-il présenté dans tous ses attributs ? Est-ce le Dieu vivant – Lakaï-roï, « le Vivant qui se révèle » - qu’Agar fut amenée à rencontrer face à face ? Ah, si la notion de la déité est fondée sur les pensées humaines au lieu de la révélation divine, alors ce dieu là n’est qu’une idole.

Pour quelle raison le premier chapitre de l’épître aux Romains donne-t-il une description si terrible de la dépravation de l’homme ? C’est une corruption inconcevable, sauf pour ceux qui connaissent le cœur de l’homme. Elle est mentionnée dans une épître écrite à des gens qui connaissent Dieu, pour les avertir que s’ils perdent cette connaissance, s’ils altèrent la conception qu’ils ont de Dieu et s’écartent de lui, ils se corrompront certainement. Il est dit que Dieu les a livrés à un esprit réprouvé parce qu’ils ont perverti leurs pensées à son égard, et n’ont pas eu de sens moral pour garder sa connaissance. C’est la raison pour laquelle s’épanouissent tous les vices du paganisme.

En compagnie d’Ezéchiel, regardons, par le trou dans le mur, les cabinets d’images du temple de l’idole (Ezé. 8 : 7-13). Quelles horreurs inimaginables dépeintes là - le mal sous ses formes les plus viles ! Comment ce peuple a-t-il pu imaginer un tel culte religieux ? Le scénario est toujours le même : ils se détournent de Dieu tel qu’Il s’est révélé en Christ, se font un dieu selon leur propre imagination puis donnent libre cours aux convoitises de leurs cœurs. C’est pour cela qu’il y a tant de corruption au nom de la religion. Cela devrait nous faire trembler de penser que si nous nous écartons de l’obéissance envers Dieu, et commençons à servir un dieu selon notre propre imagination, Dieu nous livrera aux désirs de nos propres cœurs corrompus.

 

3.14  L’esquisse d’une restauration

Dieu intervient en miséricorde et suscite des juges pour délivrer Israël (Jug. 2 : 16). Le peuple s’est éloigné de Lui et a établi, comme idoles, les dieux des nations à l’entour. Dieu les livre alors à l’ennemi qui vient comme un fleuve et prend possession du pays. Puis, sous ce gouvernement terrible, le peuple demande grâce, et Dieu, dans sa miséricorde, accorde des juges pour les délivrer de la main de ceux qui les pillaient. C’est ainsi que les juges ont été suscités : après le déclin, la servitude, puis un appel au secours, et Dieu octroie un libérateur qui les restaure temporairement, mais ce n’est, hélas que pour retomber ensuite dans le même mal.

Cet enseignement se répètera dans les chapitres suivants. Nous ne nous y attarderons pas plus maintenant, mais c’est une pensée solennelle. Dieu ne donnera pas un autre Josué, il ne restaure pas ce qui a été détruit. Il suscite un juge dans un but précis, et lorsque celui-ci meurt après avoir fait son devoir, le cœur du peuple tombe à nouveau dans le mal, ayant besoin d’une autre restauration par le moyen d’un autre juge. Mais les choses s’affaiblissent toujours plus, jusqu’à en arriver à une obscurité presque totale.

La fin du second chapitre et le début du troisième montrent le résultat de cette légèreté envers Dieu. Il n’y a plus de réelle conquête. Les délivrances ne sont que partielles, et l’ennemi est laissé au milieu du peuple, comme des épines, étant à la fois le témoin du fruit de leur propre incrédulité et le moyen d’une nouvelle mise à l’épreuve.

L’état de la chrétienté actuelle témoigne contre l’Église qui s’est beaucoup éloignée de son état d’origine ! La présence du mal moral et doctrinal en son sein, due à la puissance spirituelle de méchanceté - celle de Satan - témoigne que nous ne nous sommes pas maintenus dans la grâce qui nous a été manifestée.

Cependant, la présence même de ce mal dans l’Église professante est un test pour l’obéissance et la foi. N’est-ce pas là une pensée encourageante pour la foi ? Ne soyons pas accablés par l’état de chose qui nous environne. C’est dans l’obscurité que la foi brille le plus, et le livre des Juges donne plusieurs exemples d’une foi qui brille en contraste avec ce qui l’entoure. Puissions-nous apprendre à ne pas être découragés par la ruine autour de nous, mais à être exercés comme il convient. Puissions-nous voir qu’en laissant le mal subsister, Dieu se propose de nous aider à le conquérir, et non à le laisser nous engloutir. Que la liste des ennemis spirituels, donnée dans les quatre premiers versets du chapitre 3, puisse nous stimuler, et non pas nous effrayer ! Ayons cette foi vivante de Caleb, une foi qui ne vieillit ni ne faiblit jamais ! Et surtout, soyons humbles, haïssant tout esprit hautain, et n’ayons pas confiance en la chair.

Revenons à Guilgal, là où nous pouvons rencontrer Dieu tel qu’Il est. Que le Seigneur nous y conduise et nous y maintienne !

 

4        Othniel, Ehud, et Shamgar - Premières captivités et délivrances (Jug. 3)

4.1       La situation du peuple d’Israël

Au chapitre précédent, nous avons vu que Dieu n’allait pas chasser les ennemis du pays, mais les laisser comme des épines dans le côté des fils d’Israël, comme témoins permanents de leur infidélité, parce qu’ils n’avaient pas achevé la conquête du pays. De plus, ils seraient une menace constante pour leur témoignage et leur existence nationale. En effet, toute nation ayant au milieu d’elle d’autres peuples très différents, voire hostiles, résidant sur une partie de son territoire, peut craindre pour son existence. C’est le côté politique, mais si cette nation doit rendre un témoignage religieux envers Dieu, ce sera pire, pour elle, de laisser subsister des ennemis en son sein, et de se mêler à eux. C’était la situation d’Israël ; il lui était impossible de rester fidèle à Dieu, de garder sa loi et d’être soumis à son gouvernement. La présence de ces nations invaincues dans le pays de Canaan était un témoignage de la faillite du peuple, et une menace perpétuelle pour leur intégrité et leur fidélité ; ce danger a finalement porté ses fruits, et leur infidélité a été la cause de leur déportation en captivité.

D’un autre côté, Dieu a laissé ces nations pour mettre à l’épreuve leur fidélité. C’est une leçon très importante. La présence de ces peuples témoignait des défaillances passées, mais Dieu n’en reste pas là. Si son peuple, par sa désobéissance et son incrédulité, s’est compromis et l’a déshonoré, Il ne l’abandonne pas. Avec une patience infinie, Il use de longanimité envers eux. Il les laisse aux conséquences de leur désobéissance, pour en tirer de nouvelles circonstances afin de tester à nouveau leur soumission et celle des générations futures, pour voir s’ils allaient finalement accomplir Sa volonté en chassant l’ennemi de leur territoire. Autrement dit, la présence même de ces peuples témoignait toujours des défaillances passées, mais invitait Israël à être restauré.

Tirons-en une application. Il arrive que de chers enfants de Dieu soient découragés, à juste titre, par les résultats de leur propre désobéissance. Quelqu’un dira : J’ai déshonoré le Seigneur par des alliances et en me mettant sous un joug dont je ne peux pas être délivré. À quoi bon essayer d’obéir à Dieu plus longtemps, autant abandonner - Le chemin de Satan est toujours celui-là : il vous enserre d’abord dans des liens, puis vous dit que vous ne pouvez pas en être libérés ; il vous attire dans le chemin de l’insoumission, puis vous dit qu’il est inutile d’essayer de faire le moindre pas dans le chemin de Dieu, et vous êtes son esclave jusqu’à votre dernier jour.

Ne baissons pas les bras. Rappelons-nous qu’il n’existe pas de situation dans laquelle notre désobéissance envers Dieu nous aurait placés, pour laquelle tout espoir de compter sur sa puissance pour en être délivrés serait perdu. Les victoires ne seront peut-être pas aussi complètes que celles que nous avons déjà pu expérimenter, mais la foi n’abdique pas. Il est faux de dire qu’il n’y a plus aucun espoir. Faire appel à l’Éternel des armées, c’est implorer Celui qui ne sera jamais vaincu. Sous sa bannière, la victoire est assurée même si nous avions battu en retraite ; si, comme Éphraïm, nous avions tourné le dos au jour du combat, le Seigneur veut encore nous rassembler pour affronter à nouveau l’Ennemi. C’est toujours son chemin, jusqu’à notre dernier jour.

Ne soyons pas résignés devant des situations qui semblent inévitables. Rien n’est inévitable pour la foi ; seule la toute-puissance de Dieu ne peut être évitée pour remporter la victoire. Prenons courage, la présence même de l’Ennemi, que notre incrédulité et notre désobéissance ont laissé nous enserrer, n’est qu’une nouvelle mise à l’épreuve. Comptons sur Dieu, faisons-Lui confiance, et coopérons aux plans qu’Il a définis pour nous dès le début.

Individuellement, cela concerne nos associations dans la vie de tous les jours : toute alliance passée avec le monde, avec l’Ennemi, avec ce qui compromet notre témoignage et nous-mêmes. Collectivement, cela peut s’appliquer à notre témoignage à l’unité, si nous avons laissé s’établir au milieu de nous des principes contraires à la volonté de Dieu et à sa Parole. Si nous sommes confrontés à quelque épreuve ou opposition de l’Ennemi, rappelons-nous ceci : elles sont maintenues afin de nous apprendre ce qu’est la guerre, ce que sont les batailles du Seigneur, afin de ceindre l’armure pour engager, dans ces derniers jours, une bataille qui aurait dû être remportée depuis longtemps.

N’est-ce pas une belle façon encourageante d’agir de la part de Dieu ? N’est-ce pas touchant de parler ainsi de la présence de l’Ennemi parmi nous ? C’est comme s’Il disait : je l’ai laissé là pour tester la loyauté de votre obéissance envers Moi.

 

4.2       Les nations au milieu desquelles habitait Israël

Au verset 5, il est dit : « Les fils d’Israël habitèrent – ils s’installèrent – au milieu des Cananéens, des Héthiens, et des Amoréens, et des Phéréziens, et des Héviens, et des Jébusiens ». Chacun de ces noms a une signification particulière : les Cananéens sont des trafiquants ; les Héthiens sont des fils de terreur ; les Amoréens sont des bavards ; les Phéréziens sont des dominateurs ; les Héviens sont des villageois ; les Jébusiens sont des gens qui foulent aux pieds. Ils représentent des principes spirituels qui influencent notre conduite. Si l’un de ces principes prévaut dans notre position ou nos associations, que ce soit individuellement ou en assemblée, nous nous trouvons alors dans les mêmes circonstances qu’Israël, et Dieu mettra certainement notre obéissance à l’épreuve. Considérons un moment ces principes.

 

4.2.1        Les Cananéens

Ils s’occupent de choses seulement pour le bénéfice qu’ils en retirent. Ils n’ont pas à cœur la vérité divine mais la marchandent ; ils l’utilisent à diverses fins, certains pour un gain financier ou social, d’autres seulement pour éviter des conflits avec ceux qu’ils aiment. Cette façon de se servir de la vérité divine n’est qu’un trafic cananéen qui utilise la Parole de Dieu de façon trompeuse. Si, comme les Athéniens, nous ne la traitons qu’intellectuellement, en cherchant à retirer quelque nouveauté de la Parole de Dieu, non pour la conscience et le cœur, mais pour l’intelligence seulement, alors c’est un principe cananéen. Si nous trouvons, parmi nous ce principe de faire un trafic de la vérité de Dieu, si pénible que ce soit d’avoir à le reconnaître, rejetons-le.

Il est souvent question de ce peuple cananéen. En Zacharie 14, nous lisons qu’il n’y aura plus de Cananéen dans la maison de l’Éternel des armées, en ce jour-là. C’est le nom général donné aux différentes formes sous lesquelles l’ennemi se présente sur le territoire de Dieu ; c’est le trafiquant, celui qui manipule la vérité divine sans y avoir un intérêt vivant.

 Ce sont des principes du mal. Or il est dit, dans l’épître aux Éphésiens que notre lutte est contre « les puissances spirituelles de méchanceté » (6 : 12) ; ainsi, un principe du mal est toujours lié au Méchant. Satan qui s’exalte lui-même, est l’incarnation même de l’orgueil. Les hommes croient en son existence, mais il cherche à s’effacer de leurs esprits en suscitant le doute quant à son existence, sa présence ou son vrai caractère. Satan aime se faire passer pour un être terriblement immoral, mais il ne l’est pas, au sens ordinaire du mot. La chair, elle, l’est ; toutes ses convoitises font d’elle une servante utile de Satan, mais elle n’est pas Satan lui-même. Un homme marchant dans l’immoralité n’a, pour ainsi dire, pas besoin de Satan pour l’aider à sa propre destruction.

 Quand Satan se transforme en ange de lumière, il se sert des principes. Derrière tout principe erroné se trouve Satan lui-même. Si des croyants ont tendance à ne trafiquer la Parole qu’intellectuellement, c’est là un principe cananéen cachant de mauvais esprits ; c’est cette puissance de Satan à combattre. Il en est ainsi pour tous les autres principes que nous allons voir.

 

4.2.2         Les Héthiens

Leur empire était l’un des plus grands de l’Antiquité. Les vestiges montrent que c’était une race énergique, différente de toutes les autres, et que le territoire qu’ils avaient conquis, à une époque, était immense. Leur nom - « fils de terreur » - évoque la peur, la timidité, la crainte d’avancer là où Dieu nous voudrait ; c’est cela le principe des Héthiens. Il est étrange de dire qu’une grande puissance évoque la faiblesse, mais la peur peut être très osée. Il n’est pas surprenant que la première chose que l’apôtre Pierre dise de joindre à la foi, soit « la vertu » – le courage (2 Pier. 1 : 5). La peur, qu’elle soit de l’homme, des conséquences, de marcher sur l’eau ou sur l’étroit chemin de l’obéissance, s’empare trop souvent du peuple de Dieu, et l’empêche de lutter pour Lui, par son esprit et par sa force !

Les Héthiens sont partout ; si nous les laissons faire, ils s’établiront parmi nous et nous fermeront la bouche. Alors, nous aurons peur de dire une parole de la part du Seigneur, peur de prendre position pour Christ – de Le confesser pleinement, peur de faire ce que dit la Parole de Dieu et ce que nous dit notre conscience. Pourquoi y a-t-il tant de silence parmi le peuple de Dieu ? Pourquoi si peu de voix s’élèvent en témoignage pour l’évangile, en ministère parmi les saints, en prière ou en action de grâces dans les assemblées ? N’est-ce pas parce que nous laissons les Héthiens demeurer au milieu de nous ? Leur présence témoigne que nous n’avons pas réussi à les anéantir. Cependant, Dieu soit béni, Il nous invite dès maintenant à les chasser, à en finir avec cette frayeur et cette retenue, et à être forts dans le Seigneur et « dans la puissance de sa force » (Éph. 6 : 10).

 

4.2.3        Les Amoréens

 Après les timides, les bavards, ce sont les vantards – c’est la parole sans la puissance. N’est-il pas facile de parler et d’exposer nos propres pensées, même quand on a peur de confesser le Seigneur ? Il va sans dire que confesser Christ, et parler de sa part, par la foi, n’est pas la manière d’agir des Amoréens qui n’ont rien d’autre qu’un vain babil. Si parmi nous se trouvent de grands discours sans une marche qui corresponde, de beaux sermons sans réalité pratique, c’est l’Amoréen qui doit être jeté dehors.

 

4.2.4        Le Phérézien et le Jébusien

Le Phérézien représente l’hégémonie de l’homme. Ce n’est pas une autorité morale, divine, à travers laquelle on se soumet à la volonté de Dieu et à sa Parole, dans les moindres détails. Non, le Phérézien représente l’esprit autoritaire d’une classe qui gouverne et qui doit être respectée, non en raison de ce qu’elle enseigne, mais pour ce qu’elle est en elle-même. Qui dit classe gouvernante, dit aussi classe inférieure. C’est pourquoi, nous avons aussi les Héviens, les deux vont ensemble, ils représentent le clergé et les laïcs.

De là découle le Jébusien qui foule aux pieds tout ce qui est de Dieu.

 

4.3       Les mariages profanes et le jugement de Dieu par le roi Aram

Voilà donc les ennemis qui habitaient au beau milieu du peuple de Dieu. Ils sont toujours parmi nous aujourd’hui, et trouvent souvent place dans nos cœurs. Satan les utilise pour faire du tort, autant qu’il peut. Qu’allons-nous en faire ?

Cela nous conduit à considérer le premier esclavage du peuple. Ils s’étaient unis étroitement, par mariage, avec ces nations ennemies. Les considérant comme faisant partie d’Israël, ils avaient adopté leurs dieux, leurs pratiques et leurs services religieux. Ah, qu’ils sont nombreux les croyants pris au piège par des mariages avec des personnes du monde ! « Quelle part a le croyant avec l’incrédule ? » (2 Cor. 6 : 15). Oh que de maisons sans Christ, de cœurs souffrants, de vies brisées, résultats d’une désobéissance à la Parole de Dieu !

C’est pour cette raison que l’Éternel « vendit » les fils d’Israël aux mains de leurs ennemis (v. 8). Chose remarquable, il ne s’agit pas de ceux que nous venons de voir au milieu d’eux, mais d’un adversaire lointain, Cushan-Rishhathaïm, roi de Mésopotamie, qui les gouverna avec une verge de fer pendant huit ans, jusqu’à ce qu’ils crient à l’Éternel et qu’Il leur envoie un sauveur en la personne d’Othniel.

Tous ceux qui connaissent des circonstances semblables passent par cette même première étape. Encore une fois, cet ennemi n’est pas le premier qu’ils épargnent et à qui ils s’unissent, mais le premier qui les asservit. Le fait qu’il soit très éloigné géographiquement du pays que Dieu a donné, évoque l’idée de séparation et d’éloignement de Dieu. Il s’agit du roi d’Aram dont le nom signifie exaltation, orgueil. Dans un autre contexte, Aram suggèrerait notre glorification en Christ ; mais s’il y a glorification en dehors de Lui, celui qui usurpe la place de Christ est le pire ennemi qui soit, à l’instar de l’Antichrist qui s’oppose et s’exalte lui-même. Or, ce roi d’Aram, ce roi qui s’exalte, s’appelle justement Cushan-Rishhathaïm signifiant : noirceur d’une méchanceté double (Cushan, de Cush, Ethiopie, signifiant : noir). La pensée ici, c’est que toute personne ou principe qui prend la place de Christ a, moralement, un caractère ténébreux accentué. Il n’est pas question ici d’immoralité ou de pratique, mais de principe.

Chaque fois que la créature s’exalte, en dehors de Christ et de Dieu Lui-même, cela correspond à la servitude au roi d’Aram de Mésopotamie.

Aram, en Mésopotamie (entre les deux fleuves) – le Tigre et l’Euphrate – est le berceau de l’humanité. C’est là que la puissance de Babylone, qui y est étroitement liée, s’est développée, et que le peuple de Dieu a finalement été emmené captif.

C’est très typique, et cela nous rappelle que dans la lettre à l’Assemblée à Éphèse, en Apocalypse 2, la pensée de leur éloignement de Dieu - « souviens-toi donc d’où tu es tombé » (v. 5) - fait suite à celle de l’abandon du premier amour (v. 4). Ayant substitué Christ par l’exaltation de soi, le jugement est prononcé : « J’ôterai ta lampe de son lieu » ; autrement dit, la captivité finale est la conséquence de ce premier pas qui s’éloigne de Christ.

La première puissance à régner sur eux est donc Aram ou Babylone – Babel. C’est le résultat de leur orgueil et de leur indépendance envers Dieu. Cette captivité à Babylone se renouvellera lorsque le dernier vestige du royaume de Juda y sera transporté, et que le temps des nations commencera ; le gouvernement de Dieu passera alors de la maison de David aux rois des Gentils (ou : Nations). Cette dernière étape fait partie de la toute première. C’est le principe quasi universel des voies de Dieu : le dernier pas est inclus dans le premier. La domination du roi de Babylone sur le peuple est le premier avertissement de Dieu montrant où aboutissent l’orgueil et l’indépendance à son égard. Tolérer de faux principes ou les racines de toute espèce de mal conduira inévitablement à en récolter les tristes résultats. Dans le cas de nos premiers parents, leur désobéissance envers Dieu, montrée en mangeant le fruit défendu, a conduit l’homme à être séparé de Lui et a amené toute la misère qui a cours depuis.

 Un chrétien a beau se trouver parmi le peuple de Dieu, s’il s’enorgueillit, sa communion avec Dieu est interrompue et il s’éloigne de Lui. Il est comme un bateau dont la solide amarre a été coupée ; le bateau peut rester près du bord sans dériver ; en regardant les choses superficiellement, on le croirait en sûreté comme n’importe quel autre bateau, mais il n’est besoin que d’un petit reflux de marée, d’un brin de vent – un peu de vent de doctrine -, et il s’en va au loin. Pourquoi de chers enfants de Dieu semblent s’éloigner de Lui parfois soudainement ? C’est que la corde qui les maintenait en communion avec Lui était coupée depuis longtemps, et quand le vent de doctrine ou les tentations de ce monde sont venues, ils n’ont pu que dériver.

 

4.4       Othniel, un sauveur qui délivre

Voyons maintenant comment le peuple est restauré de cet état d’indépendance envers Dieu, et quelle vérité les délivre de cette incrédulité. Dieu suscite Othniel. Remarquons l’ordre scripturaire dans lequel les choses sont rapportées : « Il jugea Israël ; et il sortit pour la guerre » (v. 10) : le jugement de soi d’abord, la lutte contre l’Ennemi ensuite. Souvenons-nous que Dieu a laissé l’ennemi vaincre Israël sur de nombreux champs de bataille. En effet, Il ne pouvait pas lier son saint Nom à eux, en allant au combat, sans qu’ils se soient jugés. Othniel agit ainsi ; pour les délivrer de la puissance de l’indépendance envers Dieu, il les amène d’abord à s’incliner sur leurs faces (on pourrait dire qu’ils vont à Bokim, le lieu des pleurs), pour les juger de la part de Dieu avant d’aller à la guerre.

Comment se fait-il que de chers enfants de Dieu, confrontés à un principe absolument contraire à la pensée de Dieu, aient si peu de puissance pour le combattre ? Pourquoi le mal relève-t-il la tête sans que nous puissions l’affronter, comme nous le devrions, par la force de Dieu ? N’est-ce pas parce que nous commençons à avancer sans nous juger, et que nous n’arrivons pas à nous courber devant Dieu pour lui demander de sonder nos cœurs et d’amener « toute pensée captive à l’obéissance du Christ » (2 Cor. 10 : 5) ? Si tel était le cas, nous pourrions faire face au mal. Celui qui se juge lui-même devant Dieu peut vaincre et abattre les raisonnements et toute hauteur qui s’élève contre la connaissance de Dieu.

Mais continuons avec Othniel. Nous l’avons déjà vu, dans le grand combat au Sud du pays, comme le héros de Debir qui a donné au peuple la puissance de la communion avec Dieu. Ayant pris Kiriath-Sépher, la ville du livre, il l’a appelée « la vivante Parole de Dieu ».

Othniel, qui signifie lion de Dieu (la puissance de Dieu, et non de l’homme), fait en sorte que ce livre – les Ecritures inspirées – soit reconnu par le peuple comme étant la Parole de Dieu qui sonde et éprouve les cœurs, l’amenant ainsi au jugement de soi. Si l’orgueil et l’indépendance surviennent, nous en serons délivrés en nous laissant sonder par la Parole de Dieu et nous y soumettant, la reconnaissant comme étant vivante. On aime entendre parler de réveil, ou plutôt de foi ranimée parmi le peuple de Dieu. Ce qui le caractérise n’est pas une sorte d’excitation ou de sentiment merveilleux qui nous réunit tous par une sorte d’amour naturel, non, un véritable esprit de réveil, comme ceux qui ont marqué les grandes époques de l’histoire de l’Église, ramène la Parole de Dieu à la conscience, à l’esprit et au cœur, conduisant le peuple à s’incliner sous son autorité.

Seule la soumission à la Parole de Dieu peut nous délivrer de la propre volonté. Mais comment agir si je vois mon frère manifester sa propre volonté ? Je ne peux pas m’opposer à lui, car ma volonté propre est aussi mauvaise que la sienne ; je dois lui présenter la Parole de Dieu, et l’inviter à s’y soumettre. C’est ainsi que la puissance de cette double méchanceté, qu’est l’indépendance envers Dieu, sera chassée, et que Dieu nous délivrera de cet esprit de propre volonté. Telle est la leçon à tirer de cette première victoire : ce premier esclavage à la propre volonté et à l’indépendance est vaincu par la soumission à la Parole de Dieu et par la puissance d’une foi vivante.

 

4.5       Les nouveaux ennemis du peuple d’Israël

Considérons maintenant les deux ennemis suivants et les victoires qui s’y rapportent. Leur puissance est très différente de celle que nous avons considérée, et ils sont plus près. Nous voyons le premier (v.12-30) – Moab, à l’Est, de l’autre côté du Jourdain, et le second au verset 31 – les Philistins, du côté Ouest, vers la grande mer.

Moab avait un lien de sang avec Israël. Il descendait de Lot, le neveu d’Abraham. Les Moabites étaient donc apparentés aux Israélites. Mais, comme nous l’avons déjà vu, la relation de Lot avec Abraham était essentiellement charnelle. Dans le cas de ses descendants, elle n’était plus que charnelle. Israël n’avait pas d’ennemis plus amers et acharnés que ces Moabites et ces Ammonites, leur propre famille.

 Notre Seigneur a dit que « les ennemis d’un homme  seront les gens de sa maison » (Matt.10 : 36). Ainsi, dans les choses de Dieu, les relations selon la nature sont souvent un obstacle plutôt qu’une aide. De plus, Moab étant lié extérieurement au peuple de Dieu, sans aucun lien vital ou divin, pourrait-on dire : Nous sommes parents, pourquoi serions-nous inimitié l’un contre l’autre ? Profitant alors du relâchement d’Israël, cet ennemi pourrait s’introduire petit à petit, et aller jusqu’à régner sur ses frères selon la chair, puis finalement les asservir. L’inimitié spirituelle est bien réelle ; si Satan séduit au début, à la fin il frappe. De même, tel principe étroitement lié aux choses divines peut finir par asservir le peuple de Dieu.

 La profession ressemble fort aux réalités divines. Vis-à-vis de la foi, en revendiquant ses relations naturelles, elle peut affirmer être le peuple de Dieu, être séparée du monde et appartenir à Christ. S’il en est ainsi, le roi de Moab règne sur le peuple de Dieu, la profession l’emporte et amène le peuple à son propre niveau de mondanité.

 Églon s’associe avec Ammon et les Amalékites. Ceux-ci suggèrent diverses formes de la nature et de la chair. Nous verrons Ammon plus tard dans le combat de Jephté. Amalek parle des œuvres de la chair qui sont les compagnes inévitables d’une simple profession.

Il est très frappant de voir que le roi de Moab vient sur le territoire du peuple de Dieu jusqu’à Jéricho. Cette ville est un type du monde avec tous ses parfums de séduction, c’est le tout premier ennemi que le peuple de Dieu dût renverser. Ici, Moab – la profession – y établit son quartier général. Aujourd’hui, la profession chrétienne est partout dans le monde, le peuple de Dieu en est criblé. Quel que soit le nom éminent qu’elle porte, elle a son siège à Jéricho. Elle a beaucoup d’influence sur les enfants de Dieu, parce qu’elle leur procure un lien pratique avec le monde.

La profession chrétienne est une chose terrible. Il est triste et solennel de penser que ceux qui ont le nom de Christ sur les lèvres, ont le cœur dans le monde. Il est encore plus triste de voir tout le peuple de Dieu être assujetti à une puissance qui les lie au monde – non à Jéricho, parce que l’Ennemi est trop intelligent pour donner un nom clair aux choses. Jéricho est appelée la ville des palmiers, qui sont de beaux arbres, majestueux. Au Psaume 92, il est dit que « le juste poussera comme le palmier » (v. 12). La ville des palmiers sous-entend donc justice, morale, honnêteté, droiture pratique dans la marche – or si Moab y a son trône, il ne peut en aucun cas être mauvais ! Rappelons-nous bien où est son trône. La puissance de Moab produit une réforme extérieure très séduisante ; la profession fait qu’un ivrogne renonce à son ivresse et devient un citoyen respectable. Moab a plus d’une corde à son arc : honnêteté politique, droiture morale, bienfaisance. Oui, le professant sans Christ peut bien vivre dans la ville des palmiers, il peut parler de droiture, mais ça ne lui fait pas aimer Christ pour autant, ni s’unir à Lui. Ah, combien la profession s’est établie dans le territoire de Dieu.

 Nous avons lu qu’Églon était « un homme très gras » (v. 17). Cela dénote une absence de vigueur et de force, qui l’empêche d’être actif. La profession est une masse morte, inerte, qui, par son poids même, étouffe la spiritualité du peuple de Dieu. Églon signifie : un circuit - c’est quelqu’un qui tourne en rond, faisant toujours le même circuit, tout comme les aiguilles d’une montre, ou les saisons de l’année. Un tel professant prend les choses comme elles viennent ; il est peu exigeant, et n’entreprend jamais un acte qui demande un exercice. Cette nonchalance entrave complètement la relation d’une âme envers Dieu, quant à la communion ou au témoignage.

 

4.6       La délivrance par le moyen d’un autre sauveur, Ehud

 Qui va débarrasser le peuple de Dieu d’un tel cauchemar ? C’est Ehud, un Benjaminite qui va nous libérer de la puissance d’une profession sans réalité. Benjamin, nous l’avons déjà vu, représente un esprit de soumission absolue à Christ – l’Esprit de Christ en nous, contrôlant et animant nos cœurs et nos vies. Benjamin, « fils de ma droite » (Gen. 35 : 18), suggère la perfection de notre position devant Dieu. Nous sommes en Christ, Christ est en nous, en puissance ici-bas. Il est frappant de voir que ce Benjaminite, fils de ma droite, est gaucher !

Notre position est parfaite ; nous sommes accomplis en Christ devant Dieu, et Christ en nous est souverain. Cela signifie qu’il n’y a pas de puissance en nous-mêmes. Ehud n’est qu’un pauvre gaucher, sans force en lui-même, comme beaucoup d’hommes de cette tribu. Cela suggère la pensée que nous avons à nous glorifier dans nos faiblesses afin que la puissance de Christ repose sur nous. Paul était Benjaminite à double titre : en tant que descendant de la tribu de Benjamin, et spirituellement ; il disait se glorifier dans ses faiblesses, car quand il était faible, alors il était fort (2 Cor. 12 : 10). « Enlevé jusqu’au troisième ciel » (v. 2), sa main droite a été, en figure, paralysée, et il est revenu ici-bas faible, gaucher, pour être un témoin de Dieu, et un témoignage à la puissance de Christ. Ehud a la même signification que Juda : louange, ou plutôt confession. Confesser est très différent de professer comme Moab.

 Ehud avoue sa propre faiblesse et la puissance de Christ. C’est lui qui va délivrer le peuple de Dieu. Notons bien qu’il vient de Guilgal ; cela renforce la pensée de l’absence de force en nous, et de la mort du vieil homme. Ehud vient vers le roi de Moab avec une épée à deux tranchants d’une longueur d’une coudée. La coudée qui est la longueur du coude à la main, est une mesure de dimension humaine. Ehud a fourbi une épée qu’il va appliquer à la profession – et nous savons que l’épée de l’Esprit est « la parole de Dieu » (Éph. 6 : 17). L’épée n’est pas toute l’Écriture, mais tel passage qui, avec ses deux bords tranchants, convient à tel ou tel cas. Elle coupe des deux côtés ; la Parole de Dieu tranchera toujours de tout côté. Vous ne pouvez pas utiliser l’épée pour certaines personnes et en épargner d’autres ; la Parole de Dieu ne fait pas acception de personnes.

Ehud rencontre le roi de Moab, cette masse de graisse inerte, cette chose méprisable qu’est la profession qui écrase de son poids le peuple de Dieu. Il dit au roi de Moab : « J’ai une parole de Dieu pour toi » (v. 20). Quelle est-elle ? C’est la parole qu’il sait manier. Il fait rentrer toute l’épée jusqu’à la garde, y compris la poignée, dans la masse devant lui. Cette épée de longueur humaine représente la compréhension que j’ai de la Parole de Dieu, appliquée par la faiblesse humaine, mais avec une puissance divine. Le roi de Moab est alors tué.

 Cette masse professante - et tout son peuple qui a maintenu l’Israël de Dieu en captivité - est tuée. Les gués du Jourdain sont pris, le peuple de Dieu est réveillé par la trompette, et aucun Moabite n’échappe. L’héritage de Dieu est pour l’instant délivré de ce terrible cauchemar qu’est la profession.

 Avons-nous remporté une telle victoire, et ressenti en nous-même l’effet de « la parole de Dieu vivante et opérante, plus pénétrante qu’aucune épée à deux tranchants » (Héb. 4 : 12), frappant toute profession dans nos propres cœurs, les débarrassant de simples apparences ? Que le Seigneur nous en fasse faire l’expérience.

 Ayant déjà vu la ressemblance qu’il y a entre la domination d’Aram et la suffisance d’Éphèse et la froideur de cœur, nous ne pouvons qu’être frappés de la similitude entre la domination de Moab – l’emprise de la profession, et le mélange avec le monde se trouvant à Pergame. C’est le monde qui entre dans l’Église, éteint son témoignage et étouffe sa spiritualité, et l’Église qui s’unit au monde, s’installant confortablement à Jéricho, « où est le trône de Satan » (Apoc. 2 : 13).

 À Pergame, il est aussi parlé d’Ehud, de « l’épée aiguë à deux tranchants » : c’est Christ, dans les siens, combattant avec l’épée qui sort de sa bouche pour délivrer les siens captifs de la profession. Dans un jour à venir, Il l’utilisera pour juger les professants.

 

4.7       Shamgar

Le dernier verset du chapitre évoque l’ennemi situé à l’Ouest. Nous y reviendrons plus loin. Il s’agit de la victoire d’un homme sur 600 Philistins, et non d’une victoire nationale. Quand Samson les combattra, il n’aura pas non plus une entière victoire. Les Philistins, sur la côte Ouest, étaient étroitement liés à l’Égypte. Comme leur nom l’indique, ce sont des nomades venus dans le pays sans exercice, ayant emprunté le raccourci et non pas le Jourdain ; ils sont là comme des professants. À la différence de Moab qui n’est jamais resté dans le pays, les Philistins s’y sont installés. Ils prétendaient y avoir des droits, bien qu’étant là sans être passés par le Jourdain, c’est-à-dire sans être passés par la mort et la résurrection. C’est encore la profession, mais sous un aspect différent. Ce n’est plus seulement une simple façade, mais une imitation ; on y trouve le principe de succession, des rites, des cérémonies... C’est le ritualisme qui n’en est ici qu’à ses débuts, mais qui finira par être incarné et dirigé par Rome.

Nous en avons une illustration avec les Galates qui voulaient introduire le judaïsme dans le christianisme, mêlant des ordonnances du monde avec les choses de Dieu. Nous l’avons à nouveau dans l’épître aux Hébreux où certains voulaient retourner aux formes vides du judaïsme duquel ils avaient été délivrés.

Nomades et pèlerins peuvent se ressembler, mais sont très différents. Un pèlerin étranger a un objectif précis devant lui ; un nomade erre ici et là sans but précis. Les pèlerins sont étrangers ici-bas, mais bien connus là-haut ; ils se rendent vers un repos certain, avec une espérance certaine.

Shamgar, l’étranger, fait face à la horde nomade venant asservir le peuple de Dieu en apportant ses doctrines mondaines et charnelles. Il prend un « aiguillon à bœufs » – qui représente bien un bâton de pèlerin - et s’en sert pour tuer des centaines de nomades Philistins qui ne savent pas où ils sont. L’enseignement à tirer est simple. Si nous sommes de vrais pèlerins, tout ce qui, dans nos mains, manifeste notre faiblesse, suffit à Dieu pour remporter la victoire. Une simple exhortation agira comme un aiguillon à bœufs – cet instrument sert à faire marcher les animaux de trait un peu plus vite ou les faire avancer dans la bonne direction s’ils s’écartent – en aiguillonnant la conscience, et en détruisant la profession qui semble si forte. Sachons donc l’utiliser plus souvent !

De même que les Philistins sont liés à Moab pour représenter la masse professante gouvernant l’Église, Thyatire est aussi étroitement liée à Pergame. Le vainqueur, à Thyatire, reçoit comme puissance pour vaincre l’espérance de la venue du Seigneur propre au pèlerin, ce qui correspond bien au pèlerin Shamgar.

Nous n’identifions pas de façon absolue ces églises aux trois ennemis que nous avons considérés, et ne limitons la comparaison à ceux-ci seulement, mais nous trouvons cependant une forte ressemblance dans les principes impliqués chez les uns et chez les autres.

Pour l’Église, les enseignements à tirer de ce chapitre sont des mises en garde contre l’orgueil et la profession ; et bien qu’elles concernent historiquement les premières étapes du déclin de l’Assemblée, elles ont toute leur pertinence de nos jours où la glorification de l’homme et la profession rappellent le temps d’Aram.

Dans ce triste état de choses, que des âmes brisées puissent crier au Dieu vivant pour trouver du secours, et que des hommes de foi se lèvent et frappent ces ennemis pour délivrer le peuple !

Pour cela, il faut avoir le sentiment de la souveraineté de Dieu qui brise toute suffisance, le sentiment de faiblesse qui permet de frapper la profession, avec l’épée aigüe de la Parole de Dieu, et l’esprit de séparation du pèlerin qui peut terrasser la religion charnelle.

Puissions-nous avoir un tel sentiment !

 

5        Debora et Barak - Le triomphe de la faiblesse (Jug. 4)

Les trois puissances qui nous ont occupés précédemment asservissaient généralement Juda, ou, du moins, les tribus qui occupaient le sud du pays, dont Juda était le chef, Benjamin et Siméon lui étant associés. Nous avons vu que les deux derniers ennemis - Moab et les Philistins - représentent la profession, soit sous une forme grossière avec Moab, soit sous une forme religieuse plus raffinée avec les Philistins. Si toute la nation souffrait de l’esclavage, il est cependant évident que le pays n’était pas entièrement sous l’emprise de ces puissances. Ainsi, de même que Moab et les Philistins occupaient le sud du pays, le premier oppresseur d’Israël - le roi de Mésopotamie - n’avait probablement envahi que cette partie du pays, car Othniel qui a libéré le peuple de son oppression, était de Juda.

Le caractère typique des délivrances est étroitement lié au territoire libéré. Dans les trois cas concernant le sud du pays, la Parole de Dieu était prééminente : Othniel évoque l’oracle vivant – Debir ; Ehud, l’épée de l’Esprit, vivante et opérante ; Shamgar, les paroles des sages dont les exhortations acérées sont comme des aiguillons.

 

5.1       L’ennemi du nord du pays

Ici, l’ennemi a un caractère différent, et d’autres tactiques sont utilisées pour le vaincre. Voyons tout d’abord ce qu’évoquent le Nord et le Sud, d’après l’Ecriture elle-même, car dans la Parole de Dieu, tout a une signification.

Le Sud fait face au soleil qui l’éclaire, été comme hiver ; il est habitué à sa lumière. Le Nord tourne le dos au soleil ; le mot même - Nord, signifiant caché, sombre, suggère l’absence de lumière. La pensée est donc que la nature loin de Dieu se trouve dans les ténèbres qui résultent de la chute. Dieu est lumière, aussi, quand l’homme se détourne de Lui, il erre dans les ténèbres de ses propres pensées et de ses propres plans.

L’humanité est constituée de deux classes de personnes : celles sur lesquelles a brillé la lumière de la vérité divine, provenant de l’Ecriture, et celles qui ont tourné le dos à la Parole de Dieu et qui vivent dans les ténèbres du monde, loin des révélations divines. Toutes deux sont exposées aux assauts des ennemis spirituels et à leur domination, car ils affluent de tous côtés. Pour les uns, posséder une Bible ne garantit pas que des ennemis spirituels ne chercheront pas à employer cette Parole abusivement. Même avec une Bible ouverte, le peuple de Dieu peut se laisser asservir par la profession ou par le ritualisme. Pour les autres, qui nient à l’Ecriture sa place et son autorité comme Parole de Dieu, ce Livre leur reste fermé.

Voyons cet ennemi du Nord. Habitant dans les ténèbres, il rassemble ses forces loin de la lumière qu’il veut nous ravir à tout prix ; il veut imprimer de son incrédulité tout ce que nous avons de plus précieux, afin de s’emparer de notre héritage. Il s’agit de la puissance de l’intellect humain, en contraste à la puissance de la Parole de Dieu. C’est l’infidélité, qu’elle soit effrontée, ou qu’elle méprise simplement la Parole de Dieu. De même qu’en tournant le dos au soleil, on se trouve face au Nord, en rejetant les Ecritures, on est face aux ténèbres spirituelles. Nier la révélation de Dieu conduit à être laissé à la faible lueur de son propre raisonnement.

Quand elle domine les choses divines, l’intelligence humaine est une puissance terrible. Elle exerce son influence partout, et glorifie l’homme au détriment de la vérité divine.

 Le roi de Hatsor, qui domine cette fédération du Nord, s’appelle Jabin, qui signifie intelligence. Quel nom significatif pour un homme qui, en type, rejette la révélation ! Il n’a pas besoin de la lumière du soleil car la lumière de sa propre intelligence lui suffit. Hatsor, sur laquelle il règne, signifie enclos. La révélation divine en est exclue, il se suffit à lui-même.

Jabin avait été vaincu par Josué plus de cent ans auparavant. Lors des premières conquêtes d’Israël prenant possession du pays, il avait été anéanti, avec son peuple et tous ses chars de guerre. Hatsor avait été détruit de dessus la face de la terre, si bien que les fils d’Israël n’ont pas pu y habiter, comme ils le faisaient pour d’autres villes. Si donc Josué a réduit Hatsor à néant, pourquoi en entendons-nous encore parler, qui plus est avec un roi du même nom ? Sur le plan spirituel, Jabin (intelligence) a été vaincu par les apôtres qui nous ont donné la vérité ; l’intelligence humaine pourrait-elle à nouveau exercer son influence ? Du point de vue individuel, la sagesse de l’esprit charnel a été vaincue à la croix ; est-il possible qu’un danger resurgisse de cette même source ?

Satan connaît bien ce qu’est la résurrection. Il sait que la résurrection de la puissance du mal peut renverser le croyant et l’amener à en être à nouveau captif. N’avons-nous jamais fait l’expérience de vaincre quelque puissance spirituelle de méchanceté qui nous tenait captifs, puis, après avoir remporté la victoire et pensé qu’il était impossible de retomber dans le même mal, retrouver un jour ce même vieil ennemi, ce même ancien péché tout aussi fort qu’avant !

L’église aussi en sait quelque chose ; elle se soumet trop souvent à la puissance d’un mal qui a déjà été vaincu, comme le rationalisme ou l’intellect humain qui la maintiennent toujours captive. Tout le monde admire l’intelligence humaine qui permet d’apprendre et de raisonner. C’est pourquoi les enfants de Dieu se soumettent facilement à l’autorité de quelque incrédule capable de parler avec un brin de sagesse, mais ainsi, ils tournent le dos au soleil illuminant le Sud pour honorer le Nord froid et ténébreux.

 

5.2       L’intelligence utilisée sans Dieu

C’est de l’infidélité – peu importe son nom, elle en a des centaines. Cette puissance du Nord était une confédération dont Jabin était le chef. De même, l’influence que l’esprit exerce porte divers noms. À un moment c’était l’Arianisme (niant la divinité de notre Seigneur) ; à un autre, le Déisme (excluant Dieu de Son propre monde et croyant en un Dieu créateur sans référence à la révélation) ; plus tard, le Rationalisme (n’admettant comme dogmes religieux que ce qui est compatible avec la raison), ou encore la Haute Critique (étude de l’origine des livres de la Bible par l’incrédulité humaine). Mais quelle qu’en soit la forme, l’intelligence de l’homme est exaltée ; même si l’Ecriture semble avoir une grande valeur et une certaine autorité, l’intellectualisme a l’ascendant : de pauvres pécheurs se croient capables de porter un jugement sur la Parole de Dieu ! Si l’Ecriture n’est pas considérée comme la parfaite révélation de Dieu, peu importe la place qui lui est donnée. Si elle n’a pas une autorité absolue, elle a la même place que Jabin lui accordait. Ceux qui adhèrent au mouvement de la Haute Critique ne se considèrent ni infidèles ni incrédules face à la Bible. Non, ils disent la croire plus que quiconque. Ils utilisent leur intelligence pour la défendre et éliminer les soi-disant pensées de l’homme qui s’y trouvent, de sorte que se plaçant en juge sur elle, ils prétendent faire la part de ce qui est divin et ce qui est humain. Ce faisant, l’homme pécheur devient un ennemi résolu de la Vérité.

Ce sont des exemples où l’énergie de l’intelligence humaine est flagrante. Mais elle peut se manifester dans une moindre mesure : n’avons-nous jamais mis nos pensées à la place de la Parole de Dieu ? Chaque fois que c’est le cas, c’est la puissance de Jabin, roi de Hatsor.

Le capitaine de l’armée est un grand guerrier, fier de ses réussites et de ses connaissances. Nous savons que si l’on met en cause les connaissances d’un homme, son orgueil est atteint. De là viennent les contestations, chacun affirmant détenir la vérité. L’apôtre Jacques pose la question : « D’où viennent les guerres, et d’où viennent les contestations parmi vous ? » et il répond : « N’est-ce pas de cela : de vos voluptés qui combattent dans vos membres ? » (4 : 1). Les convoitises de l’esprit tout comme celles de la chair conduisent à la guerre. Le chef de l’armée de Jabin est Sisera, dont le nom signifie justement ordre de bataille.

En Galates 5, l’apôtre classe la liste des « œuvres de la chair » de façon significative : viennent d’abord les formes les plus grossières de la corruption morale, puis les superstitions de l’idolâtrie, et enfin « les haines, les querelles, les jalousies, les colères, les rivalités, les divisions, les sectes... » (v. 19-20). Cet ordre de bataille, dans lequel l’Ennemi voudrait placer le peuple de Dieu, est très frappant.

Remarquons aussi que le chef de Sisera est Jabin, la sagesse du monde. Dans la première épître aux Corinthiens, nous retrouvons cet ordre de bataille en relation directe avec la sagesse du monde. Avant d’évoquer les convoitises grossières de la chair, dans les chapitres 5 à 7, l’apôtre Paul insiste sur la sagesse du monde qui conduit les saints de Corinthe à être charnels et à marcher comme les hommes.

Il y avait des sectes ou partis ayant chacun leur chef. Ils étaient divisés, ligués les uns contre les autres dans des rivalités qui ressemblaient aux conflits des écoles contradictoires de la philosophie grecque. « Moi, je suis de Paul ; moi, d’Apollos ; moi, de Céphas» (1 Cor. 1 : 12).

C’était le raisonnement humain se réaffirmant au sein de l’assemblée à Corinthe. Il n’est pas étonnant que des querelles en aient résulté ; ce sera toujours le cas parmi les enfants de Dieu s’ils tournent le dos à la Parole de Dieu pour adopter la sagesse de l’homme.

Notons aussi que Jabin règne non seulement sur Hatsor (enclos, les sectes exclusives des partis humains), mais sur Canaan – le nom d’une grande partie des habitants du pays. Son règne étendu est marqué par le commerce des choses saintes. C’est le marchand cananéen dans la maison de Dieu ; il n’utilise ce qui est de Dieu que pour glorifier le moi.

Sisera habitait « Harosheth des nations » ; or, comme nous l’avons vu, les luttes charnelles du raisonnement humain caractérisent plus les hommes des nations que les saints. Qu’il est humiliant de voir le peuple de Dieu, asservi à l’esprit du monde, et marcher « comme marche le reste des nations, dans la vanité de leurs pensées : ils ont leur intelligence obscurcie, ils sont étrangers à la vie de Dieu, à cause de l’ignorance qui est en eux, à cause de l’endurcissement de leur cœur » (Éph. 4 : 17-18). Dans ce court passage, nous voyons les ténèbres du Nord, la vanité de Jabin et les Gentils parmi lesquels Sisera avait élu domicile.

L’influence de Jabin n’est-elle pas à craindre à l’heure actuelle ? Nous l’avons déjà vue dans la Haute critique où l’intelligence humaine se permet de juger la Parole de Dieu, mais ne peut-on pas la voir aussi dans les diverses dénominations ? Chacune défend son propre crédo. Cela montre l’incapacité de l’homme à s’unir autour de principes communs. Seule la Parole de Dieu, qui met de côté la sagesse du monde, peut rassembler les hommes, mais pas les crédos humains.

 Notons également que la domination de Jabin a lieu après la mort d’Ehud, quand le peuple s’est alors détourné de Dieu. Quand le vrai confesseur n’est plus, le cœur s’éloigne, et l’esprit de l’homme naturel resurgit. Que Dieu nous accorde de toujours confesser la vérité, pour que cet ennemi ténébreux du Nord ne vienne pas nous opprimer.

Tel est l’enseignement que nous pouvons tirer de cet esclavage. Le raisonnement humain arrive hélas facilement à faire taire la plupart des voix qui parlaient jadis pour la vérité, voire à les inciter à parlementer avec l’Ennemi. Il est triste de voir ceux qui défendaient autrefois hardiment la vérité descendre au niveau du monde, et s’associer à de prétendus docteurs – tels ceux qui enseignent la théorie de l’évolution – qui ne sont que les émissaires de Jabin. En s’associant à eux, ils contribuent à emmener captif le peuple de Dieu vers Jabin, roi de Hatsor. Alors, parler pieusement importe peu : s’ils adoptent les raisonnements de la «connaissance, faussement ainsi nommée » (1 Tim. 6 : 20), ils se détournent de Dieu, et contribuent à égarer les fidèles.

 

5.3       La foi confiante de Debora

Mais voyons le remède qui délivrera le peuple de Dieu. Qui va se lever contre ce courant d’infidélité qui s’infiltre, s’élève toujours plus jusqu’à tout balayer ? Qui fera face à ces hommes fiers de leur savoir et de leur capacité, en les enlaçant dans leurs raisonnements charnels ? Une femme : Debora.

Il y a une instruction à tirer du fait que le libérateur soit une femme, et non un homme. L’homme viendra plus tard, mais tout émane de la femme. Quel témoignage à la faillite générale, de ne trouver apparemment aucun homme prêt à faire l’œuvre du Seigneur ! Cela prouve la faillite totale du peuple, mais aussi la grande miséricorde de Dieu qui intervient alors en bénédiction, en utilisant l’instrument le plus humble. Partout où Dieu voit la foi se confier en Lui, ne serait-ce que faiblement, Il trouve là un instrument de choix pour son œuvre !

Là encore, les noms ont sans équivoque un sens spirituel. Debora et Debir ont la même racine, ils signifient la parole. Quel moyen serait mieux adapté pour vaincre la raison humaine que la Parole de Dieu ? Debora était prophétesse ; cela signifie que la Parole de Dieu est une Parole vivante et pas seulement les Ecritures, car l’Esprit de prophétie, parlant sous inspiration divine, applique la Parole de Dieu à un cas particulier et la rend ainsi vivante. De plus, Debora était l’épouse de Lappidoth qui signifie torche flamboyante ; ceci nous rappelle ce passage de l’épître aux Philippiens : « une génération dévoyée et pervertie, parmi laquelle vous brillez comme des luminaires dans le monde, présentant la parole de vie » (Phil. 2 : 15-16). Lappidoth, un luminaire dans le monde portant la parole de vie : voilà ce qui peut vaincre la raison humaine.

Debora jugeait Israël sous le palmier, entre Rama et Béthel, ce qui suggère une autre pensée. Debora (la Parole de Dieu), juge le peuple comme une flamme de feu, elle est comme un feu brûlant les scories. Cette première étape est indispensable pour vaincre les ennemis, et alors seulement la délivrance peut être en vue. Cela met l’accent sur deux choses : la faiblesse de l’homme et la puissance de la Parole de Dieu ; quand elles sont associées, quelle combinaison pour faire la volonté de Dieu ! Tout est faiblesse en nous, nous ne sommes que des êtres méprisables, mais c’est en le réalisant que nous pouvons nous attacher à sa Parole. Si cette Parole est comme une torche flamboyante, il est certain que Dieu vaincra l’Ennemi.

 

5.4       La foi hésitante de Barak

À première vue, Debora est l’instrument utilisé, mais la prophétesse appelle Barak, fils d’Abinoam, pour mener le conflit. Barak signifie l’éclair ; il symbolise la Parole de Dieu présentée aux âmes par l’Esprit de Dieu ; elle n’est pas seulement une torche qui flamboie, mais la foudre tombant du ciel sur tout ennemi spirituel. C’est ainsi que l’ennemi sera défait, si grand soit-il, quelles que soient son érudition et sa suffisance. Le grand homme de lettres incrédule, avec ses connaissances en grec, en hébreu, en archéologie, etc. a souvent dû s’incliner devant quelque faible Debora ou Barak, qui présentaient simplement la Parole de Dieu : « Ainsi dit l’Éternel ».

Apprenons à utiliser cette expression, elle suffit à tout et règle tout. Elle remplace la théologie, l’astronomie, ou l’archéologie que certains croient indispensable pour découvrir la pensée de Dieu ! Le « Ainsi dit l’Éternel » surpasse toutes les inscriptions archéologiques du monde païen qui exaltent ses grands hommes, et qui sont souvent avancées par les infidèles pour s’opposer à la Parole de Dieu. L’infidélité est toujours inimitié contre Dieu – qu’elle soit effrontée comme celle du monde, ou plus subtile et dangereuse comme celle qui se glisse dans l’Église et conduit le peuple en captivité. Seule la Parole de Dieu peut la vaincre.

Veillons à ne pas nous laisser prendre dans ce piège subtil. Si quelqu’un disait  qu’il ne croit pas en Jésus Christ, ou s’il affirmait que la Bible n’est que fables et mensonges, il n’aurait aucune influence sur nous. Mais s’il dit que nous avons besoin de notre raisonnement, de la philosophie, de l’histoire, ou de l’archéologie, pour comprendre l’enseignement scripturaire de la Parole, c’est là le piège ! Quand un homme commence à étaler ses connaissances en grec aux âmes sans instruction, méfiez-vous. Il place l’intelligence humaine au-dessus de la Parole de Dieu, se permettant de juger de la Parole qui nous juge. Quelle piètre démarche que d’éclairer avec la lumière de l’homme cette précieuse Parole qui, avec la puissance de l’Esprit, est en soi une lampe à notre pied et une lumière sur notre sentier (Ps. 119. 105). C’est la seule lumière qui soit. Toute autre n’est que ténèbres.

N’est-ce pas l’enseignement à tirer du règne de Jabin ?

 

5.5       La guerre contre Sisera et ses armées

Pour être efficace, la Parole doit trouver un instrument. Debora fait appeler Barak pour aller à la guerre, car ce n’est pas elle, mais lui qui doit agir. Il vient de Kédesh-Nephthali, une des villes de refuge dont le nom signifie le sanctuaire du combattant. C’est bien l’asile adéquat : aucun combattant ne peut être victorieux à moins de demeurer dans le sanctuaire.

Le contraste est frappant avec le lieu où demeure le belliqueux Sisera. C’est à Harosheth des nations (ruse des nations). Ce nom évoque aussi l’idée d’un travail d’artisan, mais ici il semble plutôt évoquer le fait de tromper, ce qui est si commun dans la façon de penser des hommes, « dans leur habileté à user de voies détournées pour égarer » (Éph. 4: 14). Hors du sanctuaire, on est exposé à cette ruse de l’Ennemi.

Debora, fidèle à son nom, rencontre Barak avec la Parole : « L’Éternel, le Dieu d’Israël, ne l’a-t-il pas commandé ? » (Jug. 4 : 6). Cela donne de l’assurance car nous avons la force du Tout-Puissant. Les « dix mille hommes des fils de Nephthali et des fils de Zabulon » ne sont rien en comparaison des armées puissantes et des chars de Sisera, mais si l’Éternel l’a commandé, la bataille est gagnée d’avance.

Cet éclairage fait ressortir l’incrédulité de Barak. Si Dieu en a donné le commandement, c’est le gage de sa présence, pourquoi alors recourir au faible instrument par lequel cet ordre a été donné ? Dieu avait dit : « J’attirerai vers toi… Sisera, chef de l’armée de Jabin, et ses chars, et sa multitude, et je le livrerai en ta main « (v. 7) !

Manifestement, Barak ne l’a pas vraiment cru, car malgré ce commandement clair, il dit à Debora : « Si tu vas avec moi, j’irai ; mais si tu ne vas pas avec moi, je n’irai pas » (v. 8). Mais ne jugeons pas Barak trop sévèrement, car ne nous sommes-nous pas, nous aussi, souvent appuyés sur la chair, quand Dieu nous a donné un commandement ?

La victoire ne lui reviendra pas, car Sisera tombera par les mains de Jaël, une femme effacée (v. 21). Dieu veille, avec une sainte jalousie, à ce que sa place ne soit pas usurpée, même par l’instrument qu’Il se plaît à utiliser.

 Nous avons peu de détails de ce grand combat. Barak, accompagné par Debora, mène sur le mont Thabor sa petite armée d’hommes de Zabulon et de Nephthali, sur lesquels l’emprise de Jabin était la plus forte. Zabulon suggère une communion constante, Nephthali l’esprit du vrai combat, aussi leur union est-elle pertinente. La montagne évoque l’élévation de l’âme provenant de la communion ; de là, elle peut avoir une vue d’ensemble du conflit, dans la paix. Plusieurs pensent que le nom Thabor signifie amas de terre ou élévation ; d’autres, une montagne striée ; ces significations ne décrivent que sa forme. Le sens résolution qui a été aussi donné décrirait davantage son sens spirituel. Le mont des résolutions est un point de départ approprié pour entrer dans un tel conflit, car Dieu ne peut pas utiliser quelqu’un qui vacille.

L’orgueilleux Sisera entend parler de ce rassemblement et réunit ses puissantes armées pour écraser cette misérable entreprise. La scène du conflit se passe au torrent de Kison où, plus tard, Elie tuera les faux prophètes (1 Rois 18 : 40). Le mot Kison signifie courber, généralement traduit par sinueux. D’autres mots ayant la même racine y sont étroitement liés : un arc et tendre un piège, qui ne sont autres que l’arme de guerre et l’embuscade dans laquelle tombera Sisera lui-même. Il semble que c’est lui qui a choisi ce lieu de Kison pour la bataille, et c’est lui qui tombe dans la fosse qu’il avait creusée pour les autres. Mais en fait, Dieu l’avait prévu et avait pourvu à tout.

Ceux qui réalisent leur faiblesse et qui s’appuient sur Dieu peuvent ainsi vaincre les raisonnements et les disputes de mots. L’orgueil de l’homme est humilié, Sisera doit s’enfuir à pied. Barak et ses hommes poursuivent les armées qui fuient et les détruisent entièrement, sans laisser un seul survivant. Où sont les fières ressources de l’esprit humain ? Le cantique de Debora célèbrera cette victoire.

 

5.6       L’action de Jaël

Son armée vaincue, le chef déshonoré descend de son char et s’enfuit à pied, dans l’espoir d’échapper à ses poursuivants. Il semble atteindre son but en trouvant un abri dans la tente de Jaël, la femme de Héber le Kénien. Nous avons déjà vu que ces Kéniens, venus de Jéricho, s’étaient établis dans la tribu de Juda. Ils représentent un principe du monde qui a été épargné, et qui trouve refuge parmi le peuple de Dieu. Mais Héber, bien que son nom signifie compagnon, s’était séparé de sa parenté et avait trouvé refuge en Nephthali, près de Kédesh (le sanctuaire). Il suggère donc l’opposé de ce que représente sa famille. Etranger, il pouvait rester en paix avec Jabin sans en être coupable, comme Israël. Il n’était pas un complice du chef de l’armée de Jabin.

Ce n’est cependant pas lui, mais son épouse Jaël, que Dieu utilise. Sa foi l’identifie avec le peuple de Dieu, aussi, leurs ennemis sont les siens. Comme Rahab, elle sait où est la vérité de Dieu et agit, en conséquence, avec foi ; elle semble user de tromperie, mais avant de l’affirmer péremptoirement, regardons le passage d’un peu plus près. Nous retrouvons l’enseignement qui est souvent répété dans ce livre : la puissance de Dieu se déploie à travers la faiblesse. Dieu n’utilisera un instrument que s’il est suffisamment faible et renonce à lui-même. C’est ce qui caractérise Jaël.

Elle tue Sisera avec un pieu de sa tente. La tente est l’habitation qui sied au pèlerin tant que le Seigneur est absent ; elle évoque aussi le fait que l’on n’est pas attaché aux choses d’ici-bas, contrairement à l’homme naturel qui désire ce qui est solide et durable – ce qu’une tente n’est pas. De plus, l’autel accompagne souvent la tente. En vivant en étranger dans le monde, nous sommes près de Dieu, de sorte que nous pouvons offrir l’adoration du pèlerin.

Jaël vient du mot escalader, d’où sa signification : bouquetin – la chèvre qui escalade. La chèvre évoque le péché, car elle était utilisée pour le sacrifice pour le péché, ce qui nous rappelle la mort de Christ à la croix. L’escalade suggère le fait de s’élever au-dessus des choses terrestres.

On peut dire que Jaël a appris à marcher sur un chemin qui s’élève : ressuscitée avec Christ, elle cherche « ce qui est en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu » (Col. 3 : 1). Elle s’élève tout en vivant dans une tente, car celui qui cherche ce qui est en haut réalise qu’il n’a pas ici-bas de cité permanente, mais qu’il est étranger et pèlerin.

Quel enseignement spirituel peut-on tirer de ce qui semble être un acte de trahison, en ce qu’elle se venge sur un homme fatigué qu’elle a invité dans sa tente ? Dieu est vérité, il ne veut pas que nous usions de tromperie pour remporter des victoires pour lui. Mais comme Rahab, si sa foi pouvait la faire s’identifier avec le peuple de Dieu, elle n’allait pas jusqu’à ne plus craindre l’homme.

Quoi qu’il en soit, nous y voyons une leçon très claire : il est possible de maintenir une paix extérieure en vue de remporter une victoire. En outre, les pèlerins sont si insignifiants que les grands de la terre estiment qu’il serait indigne de les combattre, et les laissent en paix. Ici, Jaël voit l’ennemi acharné du peuple de Dieu entre ses mains ; la question n’était pas de savoir ce qui était dû à l’hospitalité, mais comment le maîtriser et le faire disparaître.

Transposons cela dans le domaine spirituel, dans le conflit entre l’intelligence humaine et la révélation de Dieu. Si nous sommes confrontés à la raison humaine, que faire, faut-il lui accorder une place ? Si, comme Sisera, un homme vient nous présenter des arguments que nous ne pouvons pas accepter, écoutons-le pour le prendre dans sa propre ruse. Il vaut la peine de recevoir un infidèle, si c’est pour mettre un terme à son infidélité. Pour enfoncer le pieu de la vérité dans sa tête, commençons par écouter avec prudence ses principes erronés ; après avoir entendu ses arguments, nous pourrons lui opposer un témoignage divin, le témoignage d’un pèlerin qui suffira pour le vaincre.

Rappelons-nous que nous ne sommes pas des soldats, mais des pèlerins. Nous ne mettons pas à mort des hommes, mais nous combattons la puissance spirituelle de méchanceté dans les lieux célestes. « Les armes de notre guerre... ne sont pas charnelles, mais puissantes par Dieu » (2 Cor. 10 : 4). Il y a beaucoup à apprendre des Ecritures sur les leçons du combat : battre en retraite, se mettre en embuscade, attaquer de flanc, attaquer de nuit, défaire une grande puissance même quand on est plus faible. S’il est difficile d’en comprendre les détails, il n’y a aucune difficulté à saisir l’enseignement spirituel : être loyal et ferme dans le maintien de la vérité n’empêche pas d’être aimable avec ceux qui sont dans l’erreur.

Sisera endormi, Jaël prend alors ce qui témoigne de sa vie de pèlerin étranger, et le tue. Son arme insignifiante rappelle que « nous n’avons pas ici de cité permanente, mais que nous recherchons celle qui est à venir » (Héb. 13 : 14). Un simple piquet de tente a tué le puissant guerrier ! Lot, lui, ne pouvait pas en utiliser contre les hommes de Sodome, car il n’habitait pas une tente (il n’y avait peut-être même pas un seul piquet de tente dans tout Sodome). Lot dressa sa tente jusqu’à Sodome, et c’est la dernière fois que nous entendons parler de son caractère de pèlerin dans sa vie. Seul le grimpeur séparé du monde, qui est vraiment étranger et pèlerin, possède un pieu qu’il peut planter dans la tête de tout infidèle qui se dresse contre la Parole de Dieu. Voilà le secret : Ayons ce caractère d’étranger dans notre vie pratique, saisissons le marteau de la Parole de Dieu – c’est une arme « de la main droite » (2 Cor. 6 : 7) – appliquons-la à nos arguments qui attenteraient à la vérité de Dieu, et brisons ce vil raisonnement dont nous serions esclave. Saisissons le pieu et le marteau, détruisons les principes qui rongent notre âme. Qu’il y ait beaucoup de Jaël qui se délivrent d’abord elles-mêmes et ensuite le peuple de Dieu ! C’est par notre caractère d’étranger, en réalisant que nous sommes d’un autre monde et que nos trésors et notre espérance ne sont pas ici-bas, que nous pourrons vaincre la puissance la plus grande que l’Ennemi peut dresser contre nous.

 

6        Le cantique de Debora (Jug. 5)

Nous arrivons maintenant au chant de triomphe de Debora. Barak lui est associé, mais les paroles sont de toute évidence celles de la prophétesse. C’est un des rares cantiques que nous trouvons dans l’Ancien Testament, et le seul du livre des Juges. Il dévoile les pensées de Dieu quant à cette victoire.

Le cantique des fils d’Israël après la traversée de la Mer Rouge lui ressemble beaucoup. Les deux décrivent une victoire, mais en Exode, elle est attribuée à l’Éternel seul, alors qu’ici, elle l’est à l’Éternel et à ceux dont Il s’est servi. Il y a aussi une ressemblance avec le dernier cantique de Moïse, juste avant sa mort, où il est parlé de la faillite du peuple. Mais considérons le contenu de ce cantique.

 

6.1       Un chant de louange à Dieu pour la délivrance

Tout d’abord, nous avons le thème général : la louange à Dieu pour la délivrance opérée par les chefs qui, avec un peuple de franche volonté, se sont dévoués au combat. Mais la pensée se tourne aussitôt vers Celui qui est la source de toute victoire, l’Éternel lui-même. Il est présenté dans sa majesté, s’avançant d’Edom, et conduisant son peuple à la victoire, après leur voyage dans le désert. Cette majesté est aussi en relation avec le Sinaï, où Il donna la loi et fit alliance avec eux. D’emblée, l’âme est élevée dans cette atmosphère grandiose. Que les choses charnelles et les adversaires sont petits, en présence d’une telle grandeur divine ! Cela nous rappelle l’ouverture du Psaume 68 :

» Que Dieu se lève, que ses ennemis soient dispersés, et que ceux qui le haïssent s’enfuient devant lui » et les sublimes accents d’Habakuk : « Dieu vint de Théman, et le Saint, de la montagne de Paran. Sélah. Sa magnificence couvre les cieux, et sa louange remplit la terre... Il se tint là et mesura la terre, il regarda et mit en déroute les nations ; et les montagnes antiques furent brisées en éclats, les collines éternelles s’affaissèrent.... Tu parcourus le pays avec indignation, tu foulas les nations avec colère » (Hab. 3 : 3-12).

Il est beau de voir que ce sont les lèvres d’une faible femme qui louent ce Dieu tout-puissant infiniment glorieux. Les cieux parlent en silence de sa grandeur, mais c’est de la bouche des petits enfants et de ceux qui tètent qu’Il a établi sa louange. « Le Seigneur donna la parole » – tout est de Lui – « grande fut la foule des femmes qui répandirent la bonne nouvelle » (Ps. 68 : 11). C’est la faiblesse qui peut célébrer la puissance de Dieu qui intervient là où cette faiblesse est réalisée.

 

6.2       L’évocation du bas état du peuple et de ses causes, avant que Dieu n’intervienne en sa faveur

Dans les jours de Shamgar et de Jaël – qui habitaient respectivement le Sud et le Nord du Pays et ont libéré le peuple chacun à leur manière – les chemins étaient délaissés, car le peuple, par crainte de l’ennemi, allait par des sentiers détournés.

Quel triste tableau des résultats de l’esclavage spirituel ! Le psalmiste pouvait dire : « Il me conduit dans des sentiers de justice à cause de son nom » (Ps. 23 : 3). Dans le chemin de Dieu, la peur de l’Ennemi ne devrait jamais exister ; or ici, les sentiers étaient déserts ! Il n’y avait plus de relation entre villes, personne allant en divers lieux pour échanger le produit de sa terre contre des marchandises ou de l’or, plus de famille d’Israël allant en chantant au lieu où l’Éternel avait mis son nom – tout était solitude. Celui qui voulait se déplacer, se cachait à la vue de ses ennemis en passant par des chemins détournés. Ces chemins tortueux n’évoquent-ils pas l’hésitation et l’incertitude d’une faible foi ? Les enfants de Dieu sont souvent réduits à emprunter des moyens équivoques devant les difficultés, lorsque Jabin règne sur eux ! Quel contraste avec la grande route de l’Éternel pour Israël au jour de la bénédiction !

» Et il y aura là une grande route et un chemin, et il sera appelé le chemin de la sainteté : l’impur n’y passera pas, mais il sera pour ceux-là. Ceux qui vont ce chemin, même les insensés, ne s’égareront pas. Il n’y aura pas là de lion, et aucune bête qui déchire n’y montera et n’y sera trouvée ; mais les rachetés y marcheront. Et ceux que l’Éternel a délivrés retourneront et viendront à Sion avec des chants de triomphe ; et une joie éternelle sera sur leur tête ; ils obtiendront l’allégresse et la joie, et le chagrin et le gémissement s’enfuiront. » (Es. 35 : 8-10).

Les villes ouvertes - ou villages - aussi étaient délaissés. L’homme est un être social ; par grâce, c’est une loi de la nature qu’il ne soit pas seul. Si les villes évoquent souvent une exagération artificielle de ce désir de compagnie, les villages bourdonnant d’activité, dans les campagnes, parlent de façon heureuse d’une vie simple, sans contrainte.

Une ville murée est un refuge si l’ennemi menace, ou une prison si celui-ci l’assiège ; dans les deux cas, la vie villageoise cesse. Les villes ouvertes, non murées, ont leurs maisons éparpillées parmi les champs, ce qui parle de repos et de sécurité, mais quand l’ennemi menace, ce n’est plus le cas.

N’est-ce pas une triste nécessité de se réfugier dans les villes murées, chaque fois que le peuple de Dieu est dans l’esclavage ? Ce serait folie d’habiter dans les villages quand une force hostile peut déferler à tout moment et emmener tout le monde captif. Les murailles et les barres d’une ville sont nécessaires, et on doit y recourir pour être en sécurité.

Certains se plaignent que la communion est trop limitée et trop stricte, que la vie sans contrainte des villes ouvertes a fait place à une rigueur martiale. Mais n’est-ce pas nécessaire ? Si le rationalisme ou d’autres infidélités veulent s’imposer, pouvons-nous les laisser s’introduire dans le peuple de Dieu ? Si quelqu’un parlemente avec l’Ennemi, peut-il avoir une place parmi les saints ?

C’est un témoignage qui est certes à notre honte, mais c’est une sauvegarde en un jour de ruine. Habitons les villes fortifiées et surveillons de près les portes, car l’Ennemi cherche à s’implanter là où il peut, par le moyen de personnes ou de principes – nous ne pouvons pas séparer les deux. Une âme qui détient des principes non scripturaires doit être considérée à la lumière des principes qu’elle professe et non selon son caractère personnel. En perdant cela de vue, la porte est ouverte à toute sorte de mal. L’histoire de l’Église et l’état actuel de la chrétienté en rendent un même témoignage. Au lieu d’ignorer la difficulté et d’ouvrir grand les portes à une plus large communion, reconnaissons avec tristesse qu’il faut être attentifs et soigneux pour recevoir ceux qui professent être des enfants de Dieu. Mais bien que les « villes ouvertes » ne soient pas rétablies entièrement, il peut cependant y avoir une certaine mesure de restauration qui témoigne de la sagesse de Dieu.

La raison de cet état de choses, aujourd’hui comme aux jours de Debora, est l’éloignement de Dieu et l’idolâtrie. « On choisissait de nouveaux dieux, alors la guerre était aux portes » (v. 8a). Qu’il soit partiel ou total, subtile ou grossier, cet éloignement est toujours suivi de la guerre. Tout ce qui usurpe la place de Dieu nous expose aux assauts de nos ennemis jurés.

Quel était donc le niveau de préparation du peuple devant une telle invasion ? « On ne voyait ni bouclier ni pique chez quarante milliers en Israël » (v. 8b) ; pas une arme de guerre provenant de l’armurerie de la vérité divine ! Qu’en est-il aujourd’hui ? La Parole de Dieu seule est l’arsenal qui peut nous fournir « les armes de notre guerre » (2 Cor. 10 : 4) ; où sont les soldats de Christ, équipés de « l’armure complète de Dieu » (Éph. 6 : 11) ?

 

6.3       La réponse des tribus

Mais, passons à un côté plus brillant. Après avoir vu le choix volontaire de nouveaux dieux, nous voyons maintenant les chefs s’offrir volontairement, et ils seront bientôt suivis par le peuple.

Quelle grande responsabilité ont ceux qui sont à la tête et exercent un ascendant parmi les saints ! Leur influence peut orienter grandement les décisions de leurs frères, que ce soit pour le bien ou pour le mal ; c’est solennel. Aucun homme ne convoitera cette place, s’il veut la tranquillité, car elle implique travail, prière, responsabilité, fermeté, amour ; s’il n’y a pas cet exercice, il conduira le peuple de Dieu à s’égarer.

Le cœur de Dieu, comme celui de Debora, est tourné vers ces chefs qui se sont offerts au service des saints. Quand la paix reviendra, ces fidèles auront la joie de célébrer les victoires de l’Éternel, et de voir à nouveau le peuple dans les villages, sans que personne ne les effraie. Nous ne pouvons, hélas, l’espérer pour l’Église avant le retour du Seigneur, mais nous pourrons le voir localement partout où il y a ne serait-ce qu’une victoire partielle.

À partir du verset 12, le cantique parle du peuple et du combat qui aboutit à la glorieuse victoire. Elle appartient certes à Dieu seul, mais Il prend soin de souligner la fidélité de tous ceux qu’Il s’associe, et, avec une sainte jalousie, Il pointe du doigt celui qui est indifférent ou qui est à la traîne.

Éphraïm et Benjamin sont cités en premier, ensuite Makir (de la tribu de Manassé, de Galaad, au-delà du Jourdain) et Zabulon. Issacar est mentionné comme étant particulièrement associé à Barak, et portant le poids de la lutte. Zabulon est cité à nouveau avec Nephthali (v. 18), comme étant allé au péril de leur vie, sans motif égoïste, car ils n’ont pas pris « de butin d’argent » (v. 19).

Où se trouve un tel courage aujourd’hui ? Où sont ceux qui sont prêts à sacrifier leur vie pour les frères, avec le seul motif de glorifier Christ dans la délivrance de son peuple ? De tels hommes sont associés au ciel, selon le style imagé du cantique : « On a combattu des cieux ; du chemin qu’elles parcourent, les étoiles ont combattu contre Sisera » tandis que sur la terre : « Le torrent de Kison les a emportés » (v. 20-21).

D’autres tribus se tenaient en arrière. La première d’entre elles est Ruben, le premier-né, le chef naturel que l’instabilité avait privé du commandement qui était revenu à Éphraïm. Il garde son caractère comme, hélas, beaucoup d’entre nous ; la même hésitation et le même égoïsme le caractérisent encore.

Ruben, Gad et la demi-tribu de Manassé, avaient choisi pour part le pays à l’est du Jourdain, le côté terrestre. La raison avancée avait été : tes serviteurs ont des troupeaux. Ici, le « bêlement des troupeaux » (v. 16) les maintient toujours là. Leurs motifs sont partagés, ils ont une grande considération de cœur à se joindre à la noble compagnie des fidèles, et de grandes délibérations de cœur mais sans vraie décision. Ils restent près des étables, comme Dan sur ses navires, et Aser à son commerce au bord de la mer.

Qu’ils sont nombreux aujourd’hui ceux qui restent indifférents à l’irruption du mal ! Combien le bêlement des brebis étouffe le gémissement des captifs ! « Le gémissement du prisonnier » atteint parfois leurs oreilles et leur fait sentir qu’ils devraient faire quelque chose, mais leurs brebis sont plus importantes que les brebis du Seigneur, leurs intérêts que les Siens. Ils se tournent sur leur lit, comme le paresseux (Prov. 26 :14), et n’ont jamais vraiment la foi pour se décider à mettre de côté le moi et ses préoccupations, et à donner la priorité à Dieu.

Qui que nous soyons, et quel que soit notre service, nous ne ferons jamais rien de bon si nous n’accordons pas à Dieu la première place. Même si nous n’avons pas un service en vue, si nos affaires, nos familles ou les choses de la vie quotidienne, sont plus importantes pour nous que les intérêts de Dieu et de son peuple, nous ne combattrons jamais pour Lui.

Lorsque le Seigneur Jésus a dit : « Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice » (Matt. 6 : 33), Il venait de parler de « ce que vous mangerez, et dont vous vous vêtirez » (v. 31) - c’est-à-dire des choses indispensables à notre vie terrestre. Cependant, face à ces nécessités mêmes, notre Seigneur dit délibérément : « Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice ». Prenons garde à cette parole. Où plaçons-nous la priorité ?

Mais une parole de jugement plus solennelle est prononcée sur Méroz : « Maudissez Méroz... car ils ne sont pas venus au secours de l’Éternel... avec les hommes forts » (Jug. 5 : 23). Méroz est mis à l’index pour deux raisons : d’abord parce que leur situation géographique les impliquait particulièrement et parce que leur exemple aurait été très utile pour aider leurs frères, dans un moment critique. Mais, comme toujours, la faillite a plusieurs causes. Méroz signifie « habitants dans des palais de cèdre ». Cela n’évoque-t-il pas le luxe de l’autosatisfaction spirituelle, en opposition avec l’humilité requise dans le service pour le Seigneur ?

Quel contraste entre les somptueux palais de cèdre de Méroz et l’humble tente de Jaël ! De nombreux enfants de Dieu ont amené la malédiction sur eux-mêmes pour avoir eu un palais de cèdre qui a éloigné leur cœur de Christ. En revanche, la tente du pèlerin et ses pieux peuvent contribuer à la victoire. C’est pour souligner ce contraste, que Jaël vient juste après Méroz, dans le chant de triomphe. Sans rechercher une place de premier rang, ni les honneurs, c’est une vérité bénie que le nom de ceux qui, comme Jaël, se rangent du côté de Dieu et de son œuvre, ne sera pas oublié dans le chant de triomphe, au jour où le Seigneur sera célébré dans la gloire.

Avant de terminer cette partie, notons l’expression frappante utilisée pour décrire le comportement des habitants de Méroz : « ils ne sont pas montés au secours de l’Éternel avec les hommes forts » (v. 23). Nous sommes non seulement appelés à nous secourir l’un l’autre, mais surtout à aider le Seigneur. Certes, Il n’a pas besoin de notre soutien car, comme Il le fera un jour, Il peut renverser tous ses ennemis avec l’épée qui sort de sa bouche, mais notre Seigneur s’identifie Lui-même aux siens affligés ou emprisonnés et considère l’aide qui leur est apportée comme lui étant accordée personnellement. C’est cela, monter au secours de l’Éternel avec les hommes forts.

 

6.4       Jaël et Sisera

L’appréciation portée sur la conduite de Jaël insiste sur les détails dont nous avons déjà parlé. Elle est « bénie par-dessus les femmes » (v. 24), car elle a tué l’ennemi puissant et fier qui tenait le peuple de Dieu dans la servitude !

Ensuite, la description de la mère de Sisera est faite avec une ironie solennelle qui nous rappelle cette terrible parole : « Celui qui habite dans les cieux se rira d’eux, le Seigneur s’en moquera » (Ps. 2 : 4). Quelle pensée terrible que la dérision de l’Éternel !

Les sages princesses de la mère de Sisera - chef de l’intellectualisme qui rejette la vérité de Dieu – donnent de bonnes raisons pour le retard des chars du vainqueur présumé. Ainsi, dans un jour à venir, le sage de la terre trouvera beaucoup de raisons pour le retard de la marche victorieuse de l’esprit humain. Pour l’intellectuel orgueilleux, il n’y aura ni triomphe, ni butin, ni vêtement brodé pour orner la chair. Lorsqu’ils diront « paix et sureté », une subite destruction viendra sur eux, et ils n’échapperont point (1 Thes. 5 : 3).

Alors l’humble épouse, étrangère, recevra sa parure, et sera vêtue comme il sied à celle qui sera pour toujours avec Christ ; un repos éternel sera alors notre héritage.

» Qu’ainsi périssent tous tes ennemis, ô Éternel ! mais que ceux qui t’aiment soient comme le soleil quand il sort dans sa force ! » (v. 31).

 

7        Gédéon – préparation des instruments (Jug. 6:1 à 7:14)

Le cantique de Debora et de Barak, qui célèbre leur victoire, est le point culminant du livre des Juges. Ensuite, concernant les participants, aucune ombre ne vient ternir ce tableau. En type, il évoque la victoire complète d’Israël qui marquera le début des gloires du millénium.

Nous arrivons maintenant à la quatrième section qui contraste avec la précédente. Au lieu du sanctuaire, nous avons le monde, un lieu marqué par la mise à l’épreuve, la faiblesse, et la faillite. Ces caractères vont se retrouver chez l’ennemi, le sauveur et partout ailleurs. Il n’est pas surprenant que la faiblesse se montre aussi bien après qu’avant la délivrance. Même s’il y a faillite, il y a de nombreuses leçons à tirer, et de la plus haute importance, même si elles sont humiliantes. Tout comme nous apprenons beaucoup de nos échecs personnels, laissons-nous instruire par de telles expériences. Puissions-nous tirer profit de ce qui a été écrit « pour nous servir d’avertissement « (1 Cor. 10 : 11).

Mais rappelons les leçons précédentes : dans le premier ennemi, le roi d’Aram, nous avons vu l’esprit d’indépendance envers Dieu qui est le début de tout éloignement ; en Moab, nous avons vu la profession ; dans les Philistins, la religion de la chair ; avec Jabin et l’ennemi du Nord, l’intrusion de la raison humaine dans les choses de Dieu. Quelle leçon pouvons-nous tirer maintenant de l’oppression de Madian ?

 

7.1       Israël opprimé par Madian

La puissance donnée à l’ennemi est due à l’infidélité du peuple. « Les fils d’Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel ; et l’Éternel les livra en la main de Madian pendant sept ans » (Jug. 6 : 1). La puissance de cette nation n’aurait pu prévaloir, si le Seigneur ne l’avait pas permise, et Il ne l’aurait pas suscitée si l’état d’Israël n’avait pas rendu ce châtiment nécessaire. Ceux qui n’apprennent pas dans la communion avec Dieu, doivent être enseignés, recevoir instruction dans les mains de l’ennemi. « Ton iniquité te châtie, et tes rebellions te reprennent ; et connais, et vois, que c’est une chose mauvaise et amère que tu aies abandonné l’Éternel, ton Dieu » (Jér. 2 : 19). Cette vérité dont l’Ecriture est remplie se trouve à chaque page du livre des Juges.

De nombreux détails qui montrent la nature de l’oppression nous aideront à comprendre qui sont ces Madianites, spirituellement. Ayant peur d’eux, les fils d’Israël sont amenés à se creuser des antres et des cavernes pour s’abriter. Accompagnés des Amalékites et d’une multitude de tribus de l’orient, ils montaient nombreux comme des sauterelles, détruisant les produits du pays et ne laissant point de vivres (v. 3-4). Ils ne se contentaient pas, comme les Moabites, de rester aux frontières du pays ; ils balayaient, comme un fléau destructeur, l’ensemble du territoire « jusqu’à ce que tu viennes à Gaza » (v. 4), le bastion des Philistins. Leur oppression était si terrible que les fils d’Israël crièrent à Dieu duquel ils s’étaient éloignés.

 

7.1.1        Que représente pour l’Église cet ennemi mortel ?

Descendant d’Abraham, Madian était lié selon la nature avec Israël, comme beaucoup de ces peuplades. Très tôt, cette nation s’est montrée ennemie du peuple de Dieu. Ce sont des Madianites qui, avec les Ismaélites, ont transporté Joseph en Égypte et l’ont vendu là comme esclave. Quand Israël, délivré de la servitude de l’Égypte, était près d’arriver dans son héritage, ce sont les Madianites qui, avec Moab, ont essayé d’obtenir la malédiction de Dieu sur eux par le biais de Balaam. Ayant échoué, ils ont réussi à les souiller, et à faire peser la main de Dieu sur eux, en les incitant à participer aux rites impies de Baal Péor. C’est pour cela que Dieu avait ordonné à Israël : « Serrez de près les Madianites, et frappez-les » (Nom. 25 : 17).

C’est l’esprit du monde qui amène le peuple de Dieu en Égypte et qui le souille par ses alliances profanes. Il n’est pas surprenant que Madian soit étroitement lié à Moab et lui soit semblable à bien des égards, qu’il se soit associé Amalek - les convoitises de la chair - et les hordes inconnues de l’orient. Le monde et la chair sont de proches alliés agissant toujours ensemble et entraînant avec eux un tas de faux principes et de pratiques mauvaises.

Madian signifie « conflit », un nom convenant à l’esprit du monde dont les convoitises suscitent des conflits dans l’âme. « La chair convoite contre l’Esprit » (Gal. 5 : 17) ; partout où le monde est accepté, il fera la guerre à tout ce qui est de Dieu. Illustrons-le en prenant l’exemple d’un jeune chrétien. Dans le premier amour du début, il trouve sa joie dans les choses de Dieu et la communion avec les enfants de Dieu. Un jour, ses affections peuvent se refroidir et le monde trouve alors une entrée dans son cœur. Ce n’est pas forcément par des choses grossières et immorales, mais il peut céder à certains plaisirs inoffensifs et tisser des liens d’amitié agréables qui entreront en conflit avec les choses divines. Sa conscience ne laissera pas sa vigueur spirituelle décliner sans protester vigoureusement, et son cœur, qui était en paix « comme un jardin arrosé » (Es. 58 : 11 ; Jér. 31 : 12), sera changé en un champ de bataille de forces qui s’opposent. Madian – le monde – a apporté un conflit dans sa vie autrefois heureuse, et continuera à faire son travail mortel jusqu’à ce qu’il soit totalement pris au piège, à moins qu’il n’en soit délivré. Si un chrétien, le voyant en danger, cherche à l’avertir et le délivrer, il ne pourra pas éviter d’être entraîné dans le « conflit » - Où est le mal ? D’autres font pire que moi  - Combien la mondanité suscite de combats dans l’âme !

» Les ennemis d’un homme seront les gens de sa maison » (Matt. 10 : 36). Dans une maison divisée où un conjoint chrétien fidèle cherche à marcher avec Dieu et à maintenir le monde hors de sa maison, tandis que l’autre fait tout son possible pour l’y attirer, il y a de nombreux conflits pour rester fidèle au Seigneur et à la vérité ! C’est ce que représente Madian. Alors qu’il n’y a rien de plus heureux qu’une maison chrétienne où Christ est reconnu comme Seigneur ; c’est un petit avant-goût de la maison céleste où rien ne gâchera notre paix éternelle, car rien ne s’opposera à la souveraineté de Christ.

Nous avons déjà vu que l’assemblée à Pergame s’était mise sous la domination du monde, et nous avions fait le lien avec Moab représentant la profession qui prend possession de l’Église. Nous pouvons aussi faire le lien avec Madian, car dans la lettre à Pergame, il est fait allusion à la souillure avec les Moabites et les Madianites à l’instigation de Balaam (Apoc. 2 : 14). Très tôt, dans son histoire, l’Église s’est placée sous ce pouvoir. C’est en se mettant sous l’emprise de l’empereur Constantin et de ses successeurs, que Rome a accru sa puissance.

Qu’en est-il depuis ? Dans sa miséricorde, Dieu a accordé à son peuple des réveils, et les saints de pays entiers ont connu des restaurations, étant, par grâce, libérés de la puissance du monde. Mais ces délivrances n’ont pas duré. L’emprise de Madian se fait toujours sentir aujourd’hui. La satisfaction de Laodicée est hélas venue s’ajouter au compromis de Pergame (Apoc. 3 : 17). Le Madianite est toujours là, pillant l’héritage de Dieu. Si nous ne le voyons pas, cela ne fait que montrer la misère de l’esclavage dans lequel nous sommes.

Que sont devenus les témoignages qui avaient pris clairement position contre le monde ? Beaucoup d’enfants de Dieu sont affligés, incapables de combattre les abominations qui s’y commettent, comme les plaisirs mondains dans l’Église, les méthodes mondaines pour gagner de l’argent! L’épouse professante de Christ s’est abaissée au niveau du monde, et succombe aux mêmes désirs ! Il faut retenir les jeunes, dit-on, et pour y arriver on use de méthodes mondaines. Cette terrible servitude de Madian, qui prend de l’ampleur, nous fait pleurer.

Quant à nous, veillons, car si le monde est admis parmi ceux qui sont réunis au nom du Seigneur, c’en est fini du témoignage de Christ. Que Dieu nous rende attentifs à l’égard de cet ennemi terrible et insidieux !

 

7.1.2        La famine d’Israël sous l’oppression de Madian

Canaan était connu pour sa fertilité, et il l’est encore à ce jour dans certaines régions. Dieu en parlait comme la gloire de tous les pays, et avait promis que son peuple ne mangerait pas son pain dans la pauvreté ni ne manquerait de rien (Deut. 8 : 9) ; or, Madian venait de détruire tout le fruit de la terre ! Ah, combien d’enfants de Dieu se plaignent du manque de nourriture ! La Bible est pour eux un livre fermé ; leurs âmes sont affamées car le monde a détruit leur nourriture ! Nous ne pouvons pas jouir et du monde et de Christ, c’est impossible. En laissant le monde usurper la place de Christ qui est notre nourriture, nous ne connaîtrons que la famine.

Si Moab suggérait le poids de la profession chrétienne, en ce qu’Églon était très gras, une masse pesante et inerte, Madian ne semble pas suggérer un caractère aussi négatif. L’énergie de ces hordes évoque un ennemi toujours en mouvement qui cherche constamment de nouveaux angles d’attaque. Il n’est pas besoin de rappeler combien Satan est actif pour amener les hommes sous la puissance du monde. Mais il lui faut d’abord une brèche pour s’engouffrer. L’esprit de mondanité est sournois. Il est impossible de donner une liste exhaustive d’activités et d’habitudes mondaines. Cependant l’Esprit de Dieu nous indique quelque chose de mieux. Il nous dit ce que le monde n’est pas : « Tout ce qui est dans le monde - la convoitise de la chair, la convoitise des yeux, l’orgueil de la vie - n’est pas du Père, mais est du monde » (1 Jean 2 : 16). Ce qui caractérise le monde, ce sont les convoitises ; il est indéniable que ce n’est pas du Père. Tout ce dont nous ne pouvons pas jouir en communion avec le Père, même si cela semble inoffensif, est une chose du monde à éviter. L’apôtre Jacques le présente simplement : « Quiconque voudra être ami du monde se constitue ennemi de Dieu » (Jac. 4 : 4).

Combien le mot « Père » est touchant - l’amour du Père, le cœur du Père, les soins du Père. Pour l’âme qui en jouit, les choses du monde n’y ont plus leur place ; étant satisfaite, elle n’en a pas besoin : « L’âme rassasiée foule aux pieds les rayons de miel » (Prov. 27 : 7). Le premier pas vers la mondanité ne provient-il pas d’un cœur refroidi envers le Père ? En revanche, si nous sommes occupés de ses pensées révélées dans sa parole, et jouissons de Celui qui est l’objet des délices du Père, il n’y aura rien pour nous dans le monde.

 

7.1.3        Les fils d’Israël crient à l’Éternel

Le peuple, sous la servitude, crie enfin à Dieu. Un croyant ne peut qu’être malheureux sous la domination de ses ennemis spirituels ; tôt ou tard, il criera à Dieu. Toutefois, Dieu ne le délivre pas immédiatement ; il lui envoie un prophète, pour lui faire sentir son mécontentement. Il remonte à la rédemption de l’Égypte qui est le gage de toutes les délivrances ultérieures. Il rappelle qu’Il avait amené les Israélites dans ce pays, en avait chassé l’ennemi, et leur avait dit de ne pas craindre les faux dieux que les Amoréens avaient servis. Il n’y avait pas lieu de craindre les puissances de méchanceté qui avaient été vaincues. Pourtant, ils n’ont pas obéi à sa voix – mais sont-ils les seuls ?

Quelle sagesse divine ! Le peuple opprimé crie amèrement à Dieu, mais Il lui fait mesurer la méchanceté de ses voies avant de le secourir. Nous commençons toujours par vouloir nous soustraire aux conséquences de nos désobéissances, mais Dieu veut nous voir juger à fond ce qui nous a conduits là où nous en sommes. Il use de patience et de compassion en des proportions divines, afin que nous puissions tirer profit de la leçon. Souvenons-nous-en, quand nous avons affaire à autrui ou à nous-mêmes. Ne soyons pas trop pressés de délivrer les saints d’une position difficile ; veillons plutôt à ce que tout soit réglé à fond avec Dieu. Si nous agissions toujours ainsi, nous verrions moins de cas décevants de personnes que l’on croit restaurées et qui retombent.

 

7.2       L’appel de Gédéon

Ayant dénoncé le péché du peuple, Dieu va maintenant intervenir en sa faveur, pour le délivrer de la servitude de Madian. Pour cela, il doit trouver l’instrument adéquat dont le caractère correspondra aux leçons à tirer de cette délivrance, et mettra en évidence les causes de sa servitude.

 

7.2.1        L’activité de Gédéon

L’Éternel envoie son messager à Ophra dans la tribu de Manassé, vers Gédéon, fils de Joas. Il le trouve battant le blé dans le pressoir, pour le cacher aux Madianites (v. 11).

Madian représentant le monde, il fallait que le libérateur porte le caractère de ce qui triomphe du monde, c’est-à-dire notre foi (1 Jean 5 : 4). Celle-ci se manifeste dans le caractère suggéré par la tribu de Manassé. Manassé, signifiant « oubli » (Gen. 41 : 51), évoque le coureur céleste qui, « oubliant ce qui est derrière et tendant avec effort vers ce qui est devant », se distance des éléments du monde, ayant toujours devant lui le prix de l’appel céleste (Phil. 3 : 13-14). Ce qui vaincra le monde est donc un esprit de séparation du monde qui a ses espérances et ses attentes ailleurs.

Ophra signifie « poussière » – celui qui réalise que c’est une honte d’être assujetti au monde, demeurera dans la poussière. Comme Daniel, honteux du déshonneur porté sur le nom de Dieu, il épanchera son cœur et s’humiliera d’un tel état de chose. Un esprit vraiment spirituel ne critique pas les péchés de l’Église professante, mais réalise, avec douleur, la honte liée à un tel état de choses. Celui qui juge le péché sans ressentir l’opprobre que celui-ci a apporté sur le témoignage, ne pourra jamais être utilisé pour délivrer les saints de leur servitude. Il y avait à Rome plein d’auteurs satiriques qui ont traité avec dérision les vices et les folies de la luxueuse capitale, mais ils étaient incapables de rompre un seul lien, ou de tourner une âme vers Dieu, car la critique ne fait pas intervenir Dieu, ni ne mène deuil. Si nous voulons être délivrés du monde, il faut demeurer à Ophra ; nous serons alors en mesure de délivrer aussi les autres.

Son père s’appelait Joas (« désespéré »), fils d’Abiézer (« mon père est une aide »). Réalisant sa propre faiblesse, celui qui désespère trouver de l’aide se tournera vers Dieu le Père, en qui seul se trouve le secours. L’Ecriture contient de nombreux exemples où la signification des noms est la clé pour comprendre un passage.

L’activité de Gédéon est très instructive : il bat le blé et cache cette nourriture dans le pressoir, où il est peu probable que les Madianites le trouvent pour le détruire. Le blé parle de Christ, la nourriture de l’âme, comme cela nous est dit dans les Ecritures ; battre le blé évoque l’effort patient déployé pour chercher la nourriture dans la Parole. Le pressoir évoque le « sang du raisin » (Deut. 32 : 14 ) et nous parle du sang de Christ qui « purifie de tout péché » (1 Jean 1 : 7). Tout ceci suggère la croix qui a été comme le pressoir pour Lui ! Pour la foi, ce lieu est bien un abri efficace, caché à la puissance du monde. En prenant notre place près de la croix, aucun Madianite n’osera contester notre position.

Notons la détermination de la foi. Malgré la présence de l’ennemi, Gédéon aura sa nourriture, quoi qu’il arrive. Il va la recueillir et la cacher à ceux qui veulent la détruire, sans avoir besoin de l’autorisation d’un ami ou d’un ennemi. La terre est opprimée par l’ennemi, et tous sont affamés, mais Gédéon ne l’est pas ; il pourra se nourrir, car sa foi surmonte toutes les difficultés pour obtenir ce dont elle a besoin.

Considérons un instant cet homme solitaire. Il s’applique avec sérieux et n’abandonnera pas, car ce qu’il cherche est une nécessité absolue pour lui. Qu’en est-il de nous ? Christ est-Il une nécessité pour nous, est-Il notre nourriture, quels que soient les obstacles et les défections autour de nous ? Mettons-nous à l’abri de la croix, non seulement pour acquérir le salut éternel, mais pour être délivrés du présent siècle mauvais. Là, notre nourriture ne nous sera pas ravie.

 

7.2.2        Les paroles de l’ange à Gédéon

L’ange répond à Gédéon d’une manière étonnante : « L’Éternel est avec toi, fort et vaillant homme » (v. 12). À première vue, il ressemble à tout sauf à un vaillant homme - il se cache au lieu de faire face à l’ennemi et conduire le peuple à le chasser du pays. Mais Dieu « ne regarde pas ce à quoi l’homme regarde » (1 Sam. 16 : 7). Il voit la vaillance dans cette détermination à acquérir du blé à tout prix. Il sait que cet humble travail est le reflet de la disposition de cœur de Gédéon, peut-être même à son insu.

Qui sont les vaillants hommes de Dieu, et où sont-ils ? Ils ne sont pas forcément dans les lieux publics, combattant les infidèles ou dénonçant les folies du jour. Pour voir de vaillants hommes de Dieu, il faut aller dans les lieux secrets.

Ici, ce sera une mère de famille qui a charge d’enfants et un travail qui n’en finit jamais. Elle pourrait être tentée de suivre la mode du monde, tentation devant laquelle peu de personnes résistent ! Submergée de travail, elle pourrait prier à la hâte et passer la journée le cœur loin de Dieu ; il ne faudrait alors pas s’étonner de voir les enfants s’éloigner du chemin de Dieu. Non, elle suspend son travail, prend sa Bible et passe un moment tranquille pour lire et prier. La croix de Christ lui a acquis ce privilège ; elle le revendique comme sien et s’y accroche. Mais si elle n’a pas cette disposition de cœur à nourrir son âme chaque jour, elle ne sera jamais victorieuse.

Là, ce sera un homme d’affaires qui se lève tôt pour prendre le temps de lire la Parole de Dieu avant d’avoir affaire au monde. Il lui faut ce moment, coûte que coûte, même si c’est au dépend d’un repas ou d’une affaire en cours. Il cherche d’abord le royaume de Dieu (Matt. 6 : 33), c’est cela l’affaire importante prioritaire. Si notre cœur n’y est pas disposé, nous ne serons jamais vaillants comme Gédéon, et nous ne délivrerons jamais un seul enfant de Dieu de l’emprise de ce monde ; une mère ne pourra que déplorer les incursions répétées du monde dans sa famille, et voir ses enfants se tourner naturellement vers le monde au lieu de regarder à Christ.

Christ et sa Parole premièrement – que cette expression soit gravée dans nos âmes. Tout le reste est secondaire. S’il en est ainsi, Madian s’enfuira bientôt.

Cela demande beaucoup plus de courage que de parler en public, car de nombreux obstacles se dressent pour nous empêcher de maintenir une telle habitude. Si nous sommes vainqueurs dans le secret de notre chambre, nous serons prêts pour des combats plus en vue, et nous constaterons que les batailles sont pratiquement gagnées d’avance ; Dieu pourra nous reconnaître comme un homme fort et vaillant, et nous utiliser pour aider les autres.

Gédéon signifie « abattre » ; nous allons bientôt le voir à l’œuvre, mais ici nous le voyons abattre pour lui-même, sous les yeux de Dieu seul. S’il peut faire cela, il pourra faire plus.

Nous ne sommes pas appelés à faire de grandes choses, mais seulement à veiller fidèlement à la santé de notre âme, et à rechercher Christ par-dessus tout. Il semble impossible de ne pas le désirer, mais combien peu en ont le courage !

Celui qui amasse de la nourriture pour lui-même se préoccupe toujours de l’honneur dû à Dieu et du bien-être de son peuple.

 

7.2.3        L’encouragement de la part de l’Éternel

Gédéon dit à l’ange : « Ah mon Seigneur, si l’Éternel est avec nous, pourquoi toutes ces choses nous sont-elles arrivées ? Et où sont toutes ces merveilles que nos pères nous ont racontées, en disant : l’Éternel ne nous a-t-il pas fait monter hors d’Égypte ? » (v. 13). Il remonte à la rédemption de l’Égypte, comme l’ont fait tant de saints de l’Ancien Testament.

Ce sera la supplication du résidu aux jours de l’oppression des Gentils, juste avant l’établissement du royaume de notre Seigneur: « Tu as transporté d’Égypte un cep ; tu as chassé les nations, et tu l’as planté » (Ps. 80 : 8). « O Dieu ! nous avons entendu de nos oreilles, nos pères nous ont raconté l’œuvre que tu as opérée dans leurs jours, aux jours d’autrefois. Tu as, par ta main, dépossédé les nations, et tu as planté nos pères » (Ps. 44 : 1-2). Pensant aux œuvres du passé, la foi plaide concernant le terrible état présent : « Mais tu nous as rejetés et rendus confus, et tu ne sors plus avec nos armées ; tu nous as fait retourner en arrière devant l’adversaire, et ceux qui nous haïssent ont pillé pour eux-mêmes » (Ps. 44 : 9-10). Cela ressemble fort à l’oppression de Madian, et au vibrant plaidoyer de Gédéon. Dieu répond toujours à de tels appels, même s’Il doit approfondir le travail dans le cœur du peuple, pour les amener à prendre conscience de leur péché.

Ceux qui pleurent sur l’état de l’Église aujourd’hui ne se lamentent pas seulement du déclin des dernières années, déplorant simplement que les choses ne sont plus ce qu’elles étaient autrefois, ils comparent l’état actuel à celui du début, à la Pentecôte. Lorsque le Seigneur dit à Éphèse : « Souviens-toi donc d’où tu es tombé » (Apoc. 2 : 5), Il remonte à son premier amour. Il est touchant de voir Dieu plaider avec Jérusalem de la même manière : « Je me souviens de toi, de la grâce de ta jeunesse, de l’amour de tes fiançailles » (Jér. 2 : 2). Si merveilleux qu’aient été les réveils, nous ne pourrons jamais nous glorifier en pensant à ce qu’était l’Église aux jours de son premier amour. Seuls le chagrin et la honte nous conviennent.

C’est donc un tel homme que Dieu va utiliser pour délivrer Israël. « Va avec cette force que tu as, et tu sauveras Israël de la main de Madian. Ne t’ai-je pas envoyé ? » (v. 14). Notons bien qu’il ne lui donne pas une force nouvelle, mais il estime que celle qu’il a déjà montrée suffit pour délivrer Israël. C’est ainsi que Dieu encourage la foi qui recueille sa propre nourriture en dépit des divers dangers : « Va avec cette force que tu as ».

Mais Gédéon, comme Moïse et bien d’autres serviteurs de Dieu, a dû aller jusqu’au bout de lui-même. Il devait en finir avec son humilité tout autant qu’avec sa fierté. Malgré l’assurance d’avoir l’Éternel avec lui, il demande : « Avec quoi sauverai-je Israël ? » (v. 15) ; il était centré sur lui-même en évoquant la pauvreté de sa famille et sa propre petitesse dans la maison de son père. En quoi cela concernait-il le Dieu vivant ? Pensait-il devoir renverser Madian avec sa propre force ? Il oubliait ce que sa propre foi lui enseignait !

 Mais Gédéon n’est pas le seul dans ce cas. Il est fréquent de trouver des gens qui, après s’être vantés de leur grandeur, sont occupés de leur petitesse. Mais un petit « je » est un obstacle aussi grand qu’un grand « je ». Il peut sembler très humble de se déprécier soi-même et de se mettre en arrière-plan, mais c’est souvent un orgueil très subtil qui porte cet habit d’humilité. Le moi, bon ou mauvais, ne doit pas être devant nous ; faible ou fort le « je » doit être rejeté, afin que Dieu seul soit glorifié.

Avec quelle grâce lui est reproché ce peu d’humble fierté ! Elle n’était pas tellement enracinée, une seule parole suffisait pour l’ôter. « Moi je serai avec toi ; et tu frapperas Madian comme un seul homme » (v. 16). Après tout, pour la foi, l’ennemi n’est qu’un ; il est une foule quand il effraie, mais du moment que la foi s’affirme, il n’y a plus qu’un seul homme, comme lorsque David a rencontré le géant (1 Sam. 17).

 

7.3       Les signes donnés à Gédéon et sa formation avant le combat

7.3.1        Le présent de Gédéon

Gédéon veut avoir confirmation que c’est l’Éternel qui lui parle. Les signes qu’il va obtenir porteront l’enseignement dont il a besoin. Etant un adorateur, il apporte comme offrande le sacrifice ordinaire - un chevreau, un épha de fleur de farine et des pains sans levain (v. 19). Tout cela parle de Christ. Le chevreau, quoique présenté ici comme sacrifice de prospérité, suggère la pensée du péché, pour lequel il était le plus souvent offert dans le service lévitique. Il nous rappelle Christ « fait péché pour nous » (2 Cor. 5 : 21), seule victime parfaitement agréable à Dieu. Les pains sans levain et la fine fleur de farine accompagnant le chevreau évoquent la perfection de sa Personne, ce qui était nécessaire pour accomplir son œuvre. Tout est mis sur le rocher – une autre figure de Christ – et le feu emporte le tout à Dieu. Il n’apporte donc que Christ, Celui que Dieu accepte toujours. Quelle meilleure offrande désirer ? Si nous n’apportons que Christ, sa personne et son œuvre, nous sommes sûrs de leur acceptation par Dieu, et c’est le gage que nous serons « plus que vainqueurs par Celui qui nous a aimés « (Rom. 8 : 37). Le monde ne pourra jamais faire face à ces choses précieuses ; il ne peut pas tenir devant l’âme la plus simple pour qui ces réalités divines sont le fondement de sa relation avec Dieu, et témoignent de sa séparation du monde et de sa victoire sur le monde.

Gédéon ne semble pas se rendre compte qu’il est en présence de l’Ange de l’Éternel, mais une fois qu’Il est parti, il est troublé par ce fait solennel et en redoute les conséquences. La grâce le rassure aussitôt, alors il bâtit un autel à l’Éternel – Jéhovah-Shalom, « L’Éternel de paix » (v. 24). Au milieu du tumulte qui faisait rage autour de lui, en dépit des combats redoutables qui se préparaient, il y avait un lieu où régnait la paix, dans la présence de l’Éternel lui-même. Cela nous rappelle les paroles de notre Seigneur à ses disciples : « Vous avez de la tribulation dans le monde ; mais ayez bon courage, moi, j’ai vaincu le monde » (Jean 16 : 33).

Quelle beauté et quelle paix au milieu de la ruine totale et de la confusion ! « Quand il donne la tranquillité, qui troublera ? » (Job 34 : 29). Gédéon a trouvé le Dieu de paix ; il est agréé comme adorateur. Dans le secret de la présence de Dieu, il est caché à l’orgueil de l’homme et à la contestation des langues (Ps. 31 : 20). L’adoration est le vrai remède contre la mondanité. Les deux ne peuvent coexister.

 

7.3.2        La mission de Gédéon : abattre l’autel de Baal

La scène change. L’instument préparé dans le secret a besoin de toute sa foi pour l’étape suivante. Il doit abattre l’autel de Baal appartenant à son père, détruire l’ashère et offrir un taureau sur un autel à l’Éternel. Ce n’est que la suite normale du culte dont il avait joui. Dieu ne partagera pas sa gloire avec Baal, l’un ou l’autre autel doit être renversé. Gédéon doit justifier son nom, « celui qui abat », montrer l’énergie de sa foi et la réalité de son obéissance.

Mais par quel exercice de cœur doit-il passer ! Il doit glorifier Dieu dans sa propre maison. Sa relation personnelle avec Dieu ayant été établie, comme en témoigne sa victoire en privé, il doit maintenant établir cette relation dans le cercle familial. S’il est un adorateur et désire obéir à Dieu, la même obéissance est alors requise dans sa sphère de responsabilité. Pourrait-il libérer tout Israël si sa propre famille est dans la servitude ? Relèverait-il l’autel de l’Éternel pour tout Israël, alors que ceux qui lui sont le plus cher vont se courber devant Baal ? Notre sphère de responsabilité commence par ce qui est le plus proche de nous, avant de s’étendre au-delà. Beaucoup sont tentés d’inverser cet ordre et sont jaloux à l’égard de l’autel de Dieu pour tout Israël, alors qu’ils ne l’ont jamais dressé dans leurs propres maisons. Comment jouir pleinement des privilèges de l’autel public, si l’autel familial est négligé ? Celui qui est trop timide pour lire la parole de Dieu et prier en famille, aurait-il la liberté de le faire en public ? Ce n’est qu’un point parmi d’autres.

Ce n’est pas chose facile d’ériger l’autel de Dieu sur les ruines de Baal. Plus d’un homme ayant confessé courageusement Christ en public, n’a pas osé le faire à la maison. Mais sans cette mise à l’épreuve, il n’y aura pas de nouveaux progrès.

Gédéon hésite à le faire publiquement, il ne montre pas un grand courage. À l’instar de Nicodème, qui n’a pas osé aller au Seigneur en plein jour (Jean 3 : 2), Gédéon accomplit sa tâche difficile de nuit. Cependant, que ce soit avec courage ou non, le travail est fait, et c’est ce qui importe.

Nous pouvons imaginer combien Gédéon a dû attendre le lendemain en tremblant ! Mais peut-être était-il paisible, s’il s’attendait à Dieu. Les hommes de la ville se rassemblent et exigent que le sacrilège de Baal soit vengé, appelant le père de Gédéon à livrer le malfaiteur. Mais c’était sans compter sur Dieu. Son père qui n’était jusque-là qu’un idolâtre, méprise complètement ce dieu qui ne peut maintenir sa propre dignité. « Que Baal plaide », dit-il (v. 32) – et Gédéon remporte sa deuxième victoire : Dieu est tenu en honneur dans sa maison. Quelqu’un tremble-t-il et hésite-t-il à faire franchement le pas de la foi ? Que l’exemple de Gédéon l’encourage, les conséquences redoutées ne se réalisent pas forcément. Ceux-là mêmes dont il craint l’opposition l’approuveront peut-être. Sinon que peut-il arriver ? Quand bien même serait-il mis à mort, craindrait-il ce qui l’introduira dans la présence du Seigneur ?

 

7.3.3        L’Esprit de l’Éternel sur Gédéon

Le récit passe maintenant de la sphère privée à la sphère publique. Il semble que le renversement de l’autel de Baal suffise à éveiller les Madianites, car ils assemblent une grande armée, et prennent position. Gédéon monte au front ; après avoir été fidèle dans sa maison, il fait sonner la trompette dans tout Israël. L’Esprit de Dieu le revêt pour un service particulier, et les Abiézerites, qui avaient autrefois demandé sa mort, ainsi que ceux de Manassé, d’Aser et de Zabulon se mettent sous sa bannière. Si l’ennemi vient comme un fleuve, l’Esprit de Dieu se dresse contre lui. Quand un travail de Dieu se produit dans une âme, d’autres suivront son exemple et désireront aussi être libérés de l’esclavage. Si Christ seul est devant nous et si nous marchons fidèlement derrière Lui, Il nous utilisera, chacun selon sa mesure, pour aider dans le grand combat.

Gédéon demande alors deux signes et reçoit la confirmation que Dieu sauvera Israël par sa main. Il met une toison sur l’aire qui, à sa demande, est pleine de rosée tandis que la terre est sèche. La nuit suivante, le contraire se produit, la toison reste sèche alors qu’il y a de la rosée sur la terre. Ainsi, Gédéon sait qu’il a affaire avec Dieu, et que toute la puissance est par devers Lui. Quel encouragement cela a dû être d’avoir une preuve directe et tangible que Dieu était avec lui. La détermination de la foi, même quand elle semble avoir besoin de signes de confirmation, n’offense jamais un Dieu miséricordieux. Quand Il a promis à Abraham qu’il hériterait du pays de Canaan, et qu’Abraham demande : « À quoi connaîtrai-je que je le posséderai ? » (Gen. 15 : 8), Dieu est-il offensé de constater que sa parole n’est pas suffisante ? Non, il donne la merveilleuse vision de la fournaise et du brandon de feu. « Éprouvez-moi », dit-Il à Israël (Mal. 3 : 10). « Demande pour toi un signe de la part de l’Éternel, ton Dieu », dit-Il au roi Achaz (Es. 7 : 11).

Ces signes ne sont pas des miracles arbitraires. Ils lui sont donnés non seulement pour encourager sa foi, mais pour l’enseigner par une leçon appropriée. Que pouvons-nous donc apprendre de ce double signe ?

La rosée est le symbole usuel de la faveur de Dieu, en ce qu’elle fertilise la terre qui serait sèche et stérile sans elle. Isaac prend cette image, en prononçant la bénédiction sur Jacob (Gen. 27 : 28), de même que Moïse, dans sa bénédiction finale sur les tribus (Deut. 33 : 28). Elie, annonçant le jugement de Dieu sur la terre, déclare qu’il n’y aurait pas de rosée (1 Rois 17 : 1). Le prophète Aggée prend aussi cette image : « C’est pourquoi au-dessus de vous les cieux ont retenu la rosée, et la terre a retenu son produit » (Agg. 1 : 10). Osée, décrivant la restauration de la nation quand Dieu les bénira à nouveau, dit : «Je serai pour Israël comme la rosée ; il fleurira comme le lis, et il poussera ses racines comme le Liban » (Osée 14 : 5). Ces différents passages nous montrent donc ce que signifie la rosée.

Tout rafraîchissement, que ce soit pour Israël ou pour l’Église, vient de l’Esprit Saint ; son influence bénie apportant aide et fraîcheur est une rosée divine. Tout comme la terre cesserait d’être fertile sans la rosée, il ne peut y avoir de fruits sans le travail de l’Esprit ; ce serait la stérilité.

Une toison de laine est ce qui est retiré à la brebis ; elle a été dépossédée de ce qui lui appartient. Dans trois passages où la tonte des brebis est mentionnée, le mal y est associé :

●        le péché de Juda avec Tamar (Gen. 38)

●        la raillerie de Nabal à l’égard de David (1 Sam. 25)

●        le meurtre d’Amnon par Absalom son frère (2 Sam. 13).

 

Le prophète Ezéchiel, parlant des faux bergers, dit : « Vous mangez la graisse, et vous vous habillez de la laine ; vous égorgez ce qui est engraissé ; vous ne paissez pas le troupeau » (Ézé. 34 : 3). L’Ecriture abonde en exemples de soins d’un berger pour son troupeau, mais il est frappant de constater que les seules fois où la tonte des brebis est évoquée, la violence et la corruption y soient liées.

Le peuple a comme été tondu par les Madianites, jusqu’à ce qu’il ne reste que la toison – un résidu. S’il en était ainsi à ce moment-là, que dire de leur captivité à Babylone et de leur totale dispersion actuelle ! C’est en effet « un peuple dispersé et ravagé » (Es. 18 : 2).

L’aire est l’endroit où le grain est séparé de la balle, sous le sabot des bœufs ou avec une batteuse. Nous pouvons y voir l’épuration du peuple. Cette même image est prise au sujet des nations, en Amos 1 : 3, quand elles se retranchent elles-mêmes pour être épurées par des jugements similaires.

Quand Gédéon demande que la rosée soit sur la toison, cela représente Dieu accordant sa bénédiction à son peuple persécuté, que ce soit à ce moment-là ou aux derniers jours, quand Il sera comme la rosée pour Israël. En revanche, quand la rosée est sur la terre et non sur la toison, cela évoque la bénédiction venue sur les nations pendant le rejet d’Israël – c’est le temps actuel.

Qu’Il accorde ou retire la bénédiction, Dieu se manifeste à son peuple. Ses châtiments mêmes sont un gage de la miséricorde à venir. La sécheresse qui est aujourd’hui sur les Juifs, alors que la bénédiction est sur les Gentils, est une preuve certaine que Dieu interviendra un jour pour son peuple terrestre bien-aimé. « En ce qui concerne l’évangile, ils sont ennemis à cause de vous ; mais en ce qui concerne l’élection, ils sont bien-aimés à cause des pères » (Rom. 11 : 28).

C’est ainsi qu’il nous faut considérer les voies de Dieu envers son peuple. Sous le châtiment comme dans la bénédiction, la foi voit le signe de la délivrance. S’Il nous discipline, c’est pour notre profit, afin que nous participions à sa sainteté. La foi qui s’attend à Lui verra la sécheresse même du peuple de Dieu comme le signe d’une pluie à venir.

 

7.4       La sélection des combattants

Voyons maintenant Gédéon en relation avec le peuple. Il s’agit plus de leur préparation pour le service que de la sienne.

Une armée peu nombreuse, sans peur et prête à faire la perte de tout

L’armée de 32 000 hommes campe près de la source de Harod qui signifie « tremblant » ; ce nom décrit avec pertinence l’état du grand nombre ; en effet lorsque l’Éternel lui fait proclamer que tous ceux qui ont peur s’en retournent, vingt-deux mille hommes se retirent !

Dieu avait toujours pourvu à cela. Dans la loi, Il avait ordonné qu’une telle proclamation soit faite, pour éviter que la peur des timides ne sème la panique par contagion. Mais il a une autre raison ici. Le peuple était trop nombreux pour qu’il fût évident que la victoire était due à la puissance divine et non à celle de l’homme. Celui-ci est trop enclin à se vanter, aussi toute occasion de le faire doit lui être ôtée.

Un danger subtil guette nombre d’entre nous. Pourquoi l’homme veut-il avoir des statistiques, ou connaître le nombre de conversions ou de « membres », s’il ne pense pas que la force est dans le nombre ? L’Ecriture abonde en illustrations contraires. Le nombre a trop souvent suscité l’orgueil qui va devant la ruine. C’est lorsque le nombre des disciples a augmenté que les murmures ont commencé (Act. 6). Loin de nous la pensée de refuser le nombre en soi. Nous devons nous réjouir qu’un grand nombre reçoive la bénédiction, mais nous devons regarder au Seigneur et pas au nombre.

C’est particulièrement vrai en un jour de déclin, quand Dieu a suscité un témoignage à la vérité. Si le témoignage n’est pas vraiment clair, s’il n’est pas passé au crible, le grand nombre ne fera que l’entraver. Mieux vaut un petit groupe, mis à l’épreuve par Dieu Lui-même, qu’un grand groupe qui, par son effectif, inspire le respect aux yeux du monde.

Les peureux s’en vont. Il est humiliant de penser que les deux tiers de ceux qui avaient rallié Gédéon étaient trop timides pour continuer ! N’y en a-t-il pas beaucoup de nos jours qui connaissent le chemin du témoignage et du combat, mais qui n’ont pas le courage de le prendre ? Si nous craignons la persécution, le mépris, le qu’en dira-t-on, nous ne serons, hélas, pas prêts et devrons être mis de côté.

Si nous réalisons cela et le reconnaissons avec honte devant Dieu, confions-nous en Lui pour reprendre courage. Souvenons-nous que Gédéon craignait d’accomplir sa première tâche de jour. Il vaut mieux cela que d’être fier. Que Dieu nous donne le courage de l’obéissance pour suivre son chemin, même si c’est en tremblant !

Mais un crible plus sévère devait encore être appliqué. Dieu dit : « Le peuple est encore nombreux » (Jug. 7 : 4). Ils sont amenés vers l’eau, et sont mis à l’épreuve, sans le savoir. Il s’agit de voir comment ils boivent. Ne sont choisis que ceux qui prennent l’eau dans leurs mains et la lapent comme les chiens. Seuls trois cents l’ont fait ; le reste des dix mille se sont agenouillés pour boire.

La signification de ce test est simple. Etancher la soif est une nécessité, comme tous les besoins de cette vie, mais cela ne doit pas tenir la première place. Sommes-nous occupés de ces choses en passant, ou sommes-nous absorbés par elles ? Combien d’entre nous passent-ils le test divin ? Il est solennel de penser que nous sommes éprouvés à notre insu. Si nous savions quand le test est appliqué, nous nous comporterions bien, mais Dieu nous regarde, nous sélectionne ou nous met de côté pour les missions dangereuses et honorifiques, quand nous n’y pensons pas.

Il va sans dire qu’il n’est pas question du salut, mais du service et du témoignage. Dieu ne peut nous utiliser comme instruments pour délivrer son peuple de l’esclavage du monde si nous y sommes liés. Quelle terrible pensée de ne pas être en état pour le service, et d’être mis de côté par Dieu ! Soyons exercés pour voir si nous sommes esclaves du monde ou si les intérêts de Dieu sont prioritaires. Comme ici, un rien peut manifester notre état, un simple verre d’eau. Seul un cœur qui ne veut que la volonté de Dieu réussira le test . « Je fais une chose », dit l’apôtre Paul (Phil. 3 : 13).

Sommes-nous mis de côté comme inaptes au service, ou sommes-nous des « vases à honneur, sanctifiés, utiles au Maître, préparés pour toute bonne oeuvre » (2 Tim. 2 : 21) ?

Ainsi, la petite troupe des trois cents a l’honneur d’aller renverser le pouvoir de Madian. Ils étaient peu et sans doute méprisés, peut-être même par beaucoup de leurs frères, mais ils sont néanmoins les élus. N’aimerions-nous pas en faire partie ? Que donnerions-nous pour cela ? Ni argent, ni connaissances, ni influence, ne peuvent acheter une telle place, c’est le « moi » qu’elle coûte. Ne pas avoir confiance en soi est la seule façon d’être apte au service de Christ. Y sommes-nous disposés ?

Ainsi, en considérant les voies de Dieu envers Gédéon et sa troupe, nous voyons comment Il prépare les vases pour le service. C’est toujours le même enseignement, mais accentué par de nouveaux critères : il n’y a ni force, ni bien en nous. Christ, seul, est tout.

 

7.5       Le songe du Madianite

Voyons encore les soins patients de Dieu qui donnent une fois de plus à Gédéon l’assurance absolue de la victoire avant d’aller au combat. Notez qu’il ne demande pas ce signe, mais il en tire profit quand Dieu l’accorde.

Un soldat des armées de Madian a fait un rêve, et il est permis à Gédéon de l’entendre raconter à son compagnon. C’est d’une simplicité presque triviale : un gâteau de pain d’orge tombe dans le camp de Madian et renverse une tente. Son compagnon l’interprète en langage clair : « Ce n’est pas autre chose que l’épée de Gédéon, fils de Joas, homme d’Israël : Dieu a livré Madian et tout le camp en sa main » (v. 14). Ainsi de la bouche même de l’ennemi, il a l’assurance de la part de Dieu du succès du combat.

Le pain d’orge est le plus pauvre des aliments, évoquant en cela la pauvreté et la faiblesse. Il est significatif que ce soit de la nourriture et non pas une épée qui renverse Madian : c’est en se nourrissant de Christ que le peuple de Dieu est armé contre l’Ennemi. Dieu peut utiliser même notre faible connaissance de Christ comme une arme des plus efficace. Le jeune garçon n’avait que cinq pains d’orge, mais cela suffisait, dans la main du Seigneur, pour nourrir la multitude (Jean 6 : 8-13). Il en est toujours ainsi, retenons-le : faiblesse, néant, impuissance, dans les mains de Christ, triompheront de toute la puissance du monde.

Que le Seigneur nous accorde de le réaliser pratiquement toujours plus, pour l’amour de Christ, notre Seigneur, et pour le bien de son Église.

 

8        La victoire et les difficultés qui suivent (Jug. 7:15 à 8:21)

8.1       Les préparatifs qui conduiront Gédéon à la victoire

Jusque-là, le travail de Dieu dans l’âme de Gédéon et dans ceux qu’Il avait rassemblés autour de lui, avait été lent et graduel, pour qu’ils soient propres au service. Il en est toujours ainsi. Si Dieu veut se glorifier par notre moyen, Il le fera par des vases sanctifiés et utiles au Maître. Le vase doit être préparé avant d’être utilisé pour manifester Sa puissance. Chaque étape de l’histoire de Gédéon est marquée par cela. Il ne peut y avoir ni vrai service, ni réelle victoire, si Dieu n’a pas préparé le vase pour Son usage.

Au chapitre précédent, nous avons vu comment le peuple avait été épuré jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une seule poignée de soldats et comment Dieu avait encouragé la foi de Gédéon, en lui donnant un dernier signe, gage d’une victoire certaine. C’était le message de Dieu lui-même, prononcé par des lèvres ennemies. C’était sa propre faiblesse qui frapperait de terreur le cœur de ses ennemis.

Il n’y a rien qui sème plus de terreur dans le cœur de l’Ennemi que de voir le peuple de Dieu réaliser sa faiblesse. Un vieux couplet dit ceci, à juste titre : « Satan tremble en voyant un faible saint s’agenouillant «. Etre sur ses genoux indique que l’on ressent sa faiblesse, et ce n’est qu’ainsi que la force de Dieu peut intervenir.

Le gâteau de pain d’orge semble une comparaison grossière ; il témoigne que l’impuissance de l’homme est totale, mais que Dieu est à l’œuvre. L’orge parle d’une grande pauvreté et d’une grande faiblesse. Pourtant, c’est ce simple pain d’orge, roulant dans le camp qui va détruire la puissance de l’ennemi. Il n’est pas étonnant que Gédéon prenne courage quand de la bouche même de ses ennemis, il prend connaissance de la faiblesse du peuple de Dieu. Cette faiblesse qui les a rejetés sur Lui, est un gage de Sa victoire. Si je suis fort, alors c’est moi que Satan va rencontrer. Si je suis faible et rejeté sur Dieu, l’Ennemi sait qu’il doit rencontrer l’Éternel des armées, et c’est tout autre chose que de rencontrer des hommes sûrs d’eux, dont la force est leur honte. Il n’est pas étonnant que Gédéon se prosterne et adore quand il comprend cette leçon.

Dès lors, la victoire sera facile parce que la crainte a disparu du coeur. Affronter le monde et nos adversaires spirituels n’est pas difficile si ce combat a déjà été livré dans le jugement de nous-mêmes, si nous nous sommes tenus devant Dieu dans le secret de notre âme.

Il est à nouveau insisté sur le vrai caractère du combat. C’est une leçon que nous connaissons bien, mais qui ne doit pas pour autant être oubliée. Ces 300 hommes sont divisés en trois corps, comme si ce nombre était trop grand pour s’y fier. Ils ont tous le même étrange équipement : ni épée à la main, ni arc, ni lance, rien que des cruches - des vases de terre - dans lesquelles se trouve une lumière cachée, et dans l’autre main une trompette pour publier la victoire.

 

8.2       L’enseignement moral du combat de Gédéon à la lumière de 2 Corinthiens 4

Il y avait des lumières dans les cruches. « Le Dieu qui a dit que du sein des ténèbres brille la lumière, c’est lui qui a brillé dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de la gloire de Dieu dans la face de Christ » (2 Cor. 4 : 6). Dieu a brillé dans le vase de terre. Il est lumière, et sa grâce qui nous a été révélée est cette lumière qui a brillé dans nos cœurs. Et si elle a brillé dans nos cœurs, ce n’est pas pour la cacher. Or si la cruche est entière, la flamme qui est à l’intérieur est occultée. Mais, comme nous le voyons ici, le brisement de la cruche permettra à la lumière de luire au dehors ; c’est la seule façon de faire. Or, plus la cruche a de la valeur, plus il sera difficile de la briser ; et plus nous réaliserons que le vase qui contient le trésor n’est qu’en terre, plus il sera facile à briser, afin que son contenu apparaisse dans tout son éclat.

Nous connaissons bien cette leçon, mais la mettons-nous en pratique ? Savons-nous laisser briser ce vase, ce moi excellent, sous toutes ses formes, que l’on a façonné avec tant de soin et que l’on chérit tant ; il est devenu le réceptacle de la lumière divine : Dieu a relui dans nos cœurs. Et maintenant, que faire ? La lumière éclaire l’intérieur, et le vase l’empêche de briller au dehors. La lumière est reçue, par grâce, et cette même grâce ne peut se montrer dehors que si le vase est brisé.

Tant qu’il n’a pas reçu la lumière, le pécheur tient à son vase de terre, il ne veut pas le perdre. Dans ce monde où l’on se vante de sa propre excellence, de tout ce que l’on possède, pourquoi ne le ferait-il pas ? Mais voici qu’un jour son cœur est éclairé par l’excellence de la connaissance de la gloire de Dieu, dans la puissance du Saint Esprit. Nous voici donc devant cette alternative : soit le vase reste intact et la lumière intérieure est cachée, soit le vase est brisé, et alors la gloire divine peut briller au dehors. Si la gloire de Dieu remplit notre âme du sentiment de son amour, de sa grâce, et de tout ce qu’Il nous a donné en Christ, quelle place aura le moi ? Si nous avons pleinement conscience de la grâce, nous ne pouvons épargner le vase en le mettant soigneusement de côté pour le réutiliser, il faut en finir avec lui, et le briser pour que la lumière brille au dehors. C’est une question de foi. C’est ainsi que sera vu que « l’excellence de la puissance » est de Dieu et non pas de nous (v. 7).

Oh, ce misérable moi ! Pourquoi le peuple de Dieu n’a-t-il aucun pouvoir sur le monde ? En lisant Romains 7, il est frappant de voir que les pronoms à la première personne - je, moi, mes - sont employés quarante fois ! Ce vase empêchait sûrement la lumière de reluire au dehors, aussi ne la voyons-nous pas briller dans ce chapitre. Le je obscurcit tout. Il ne reste donc qu’à nous estimer morts, comme l’apôtre nous le montre. C’est le brisement effectif du vase. Alors, seulement, l’excellence de la puissance de Dieu pourra se manifester.

Qui penserait pouvoir affronter untel ennemi par ses propres forces ? Il n’est pas étonnant que de chers enfants de Dieu soient oppressés, voire effrayés à cette idée. Mais, en faisant confiance à Dieu, nous comprenons que tout ce qu’Il attend de nous, c’est que nous soyons des vases brisés sans aucune force. Alors quel réconfort, quelle consolation ! Et quand le vase est brisé, nous sommes prêts à sonner de la trompette.

En 2 Corinthiens 4, l’apôtre évoque donc de façon évidente cet épisode de Gédéon. Nous avons déjà cité le verset parlant de la lumière ; le reste du chapitre est une illustration de la façon dont le vase est brisé par des circonstances extérieures. Vient tout d’abord, l’estimation de la foi par laquelle le moi est mis de côté, puis suivent les choses fâcheuses – difficultés, persécutions, perplexité, mort – qui ne sont que le brisement pratique de ce que la foi a déjà mis de côté : la force de la vieille nature. En conséquence, le croyant est conduit en triomphe, en Christ. Pierres, cachots, longues années de captivité ne servent qu’à laisser briller l’excellence de la puissance de Dieu, une lumière qu’aucune épreuve ne peut assombrir.

 

8.3       Le son de la trompette et le cri de la victoire

Sonner de la trompette, qui parle du témoignage, est nécessairement lié au brisement du vase. Ces choses vont de pair. Dieu désire que le témoignage soit accompagné de la lumière et non pas des ténèbres. Il ne veut pas seulement des paroles, aussi puissantes, aussi claires ou aussi vraies soient-elles. Il veut que le vase soit brisé pour que la lumière apparaisse. La trompette est associée à la lumière, ou le témoignage à la vie, comme nous l’avons dans l’épître aux Philippiens : « Que vous soyez sans reproche et purs, des enfants de Dieu irrépréhensibles, au milieu d’une génération dévoyée et pervertie, parmi laquelle vous brillez comme des luminaires dans le monde, présentant la parole de vie » (2 : 15-16). Briller comme des luminaires, c’est la lumière divine qui brille ; présenter la parole de vie, c’est le témoignage de la trompette qui accompagne la lumière. Le monde ne peut résister devant le plus faible rassemblement de croyants détenant la parole de vie, et brillant comme des luminaires dans le monde.

Ainsi, Gédéon et ses compagnons n’avaient qu’à se tenir simplement là avec leur lumière, et à sonner de leur trompette en proclamant : « L’épée de l’Éternel et de Gédéon ! « (Jug. 7 : 20). Alors l’Éternel « tourne l’épée » de chaque ennemi contre son compagnon et l’armée se disperse (v. 22). Cette puissante armée fuit comme un troupeau de brebis effrayées devant la puissance irrésistible de Dieu. Nous aussi, étant faibles, nous pouvons être rendus forts, devenir vaillants au combat et repousser des armées étrangères (Héb. 11 : 34), si nous apprenons cette leçon et la réalisons pratiquement.

Une première difficulté après la victoire : la jalousie d’Éphraïm

Le peuple s’assemble pour la victoire, comme c’est le cas chaque fois que la foi individuelle ouvre le chemin ; c’est encourageant de voir cela. Nous l’avons vu avec Ehud : après avoir tué le roi de Moab, lui seul, il sonna de la trompette, et Israël s’assembla après lui. De même ici, quand la bataille est gagnée et l’ennemi mis en fuite, le reste d’Israël s’assemble et se joint à la poursuite. En fait, pour leur montrer qu’il ne veut pas s’attribuer la victoire, Gédéon envoie des messagers à Éphraïm, pour descendre et prendre les gués du Jourdain, afin qu’ils puissent anéantir entièrement l’ennemi. Et c’est là qu’arrive ce qui n’est que trop commun dans ce livre : des querelles liées à la victoire, voire produites par elle.

De la jalousie se manifeste, non pas chez Gédéon, mais chez Éphraïm qui la montre envers l’homme de foi. Dès le livre de Josué, Éphraïm avait montré cette jalousie en tant que tribu, et s’était sans doute enorgueilli de ce que Josué, qui était un des leurs, ait été conducteur d’Israël. Lorsque la tribu avait reçu son lot, ils avaient objecté qu’il n’était pas assez grand pour eux, car ils étaient un grand peuple. Voilà ce qu’Éphraïm a manifesté tout au long de son histoire : c’est un grand peuple. Mais Gédéon n’était pas un grand homme, et un homme qui réalise sa petitesse, ne va pas se laisser entraîner dans un conflit avec un grand peuple.

En son temps, la réponse de Josué à Éphraïm avait été : « Si tu es un peuple nombreux, monte à la forêt, et coupe-la pour t’y faire de la place… Tu es un peuple nombreux… tu dépossèderas le Cananéen, quoiqu’il ait des chars de fer » (Jos. 17 : 15-18) - autrement dit : Que votre grandeur se montre au travail, et non par la vanterie. Mais depuis lors, cette tribu a toujours été jalouse de sa position dans la nation d’Israël, et de ceux qui faisaient quelque chose pour Dieu. Nous les voyons se mettre en avant tout au long des Juges, et du temps de David, jusqu’à ce que la jalousie porte ses fruits dans la division du royaume.

Jacob avait déclaré qu’Éphraïm, le plus jeune, aurait la préséance sur Manassé. Éphraïm devait tenir à cette promesse, et l’initiative de Manassé devait donc l’irriter particulièrement. Mais les voies de Dieu ne sont pas les nôtres, et tout orgueil humain doit être abaissé. La préséance d’Éphraïm en était une illustration, en ce que lui, le plus jeune, avait été mis au-dessus de son aîné, de même que Ruben avait dû être destitué. Dieu manifeste sa souveraineté en exaltant celui qui est humble et en abaissant celui qui est élevé.

Mais maintenant, cet état de fait reconnu, Éphraïm estime sa position de chef comme un droit. Manassé, en revanche, comme son nom l’indique, représente celui qui oublie le passé, et avance avec l’énergie de la foi présente.

Un enseignement spirituel d’une grande portée est à tirer de la jalousie d’Éphraïm. Éphraïm représente le fait de porter du fruit ou de faire des œuvres, d’une manière générale. Mais les œuvres ne peuvent jamais être en tête, elles doivent toujours suivre ; c’est Juda, la louange ou l’adoration qui doit venir en premier.

Ah, combien facilement les œuvres semblent plus importantes. C’est le différend entre Marthe et Marie, si fréquent dans l’Église aujourd’hui. Là où la foi faiblit, les œuvres sont considérées comme primordiales, et passent de leur place de second rang à une place d’autorité qu’elles ne doivent jamais occuper.

Partout où le moi est mis en avant il y aura jalousie et mécontentement. Gédéon nous montre le moi mis de côté, Éphraïm, le moi mis en avant. Ils querellent donc Gédéon, demandant pourquoi ils n’ont pas été appelés à combattre et à renverser l’ennemi dès le début. Gédéon aurait très bien pu répondre : Madian, notre ennemi, a submergé tout le pays, pourquoi ne l’avez-vous pas chassé ? Dieu m’a suscité pour le faire, et je l’ai fait avec son aide. Pourquoi ne l’avez-vous pas combattu au lieu de trouver à redire à celui qui l’a fait ?

Avons-nous déjà éprouvé de tels sentiments de mécontentement, d’envie et de jalousie, en voyant d’autres utilisés par Dieu ? Paul se réjouissait toujours, lorsque l’évangile était prêché, peu importe par qui. Si Christ était prêché par esprit de parti, de rivalité ou par jalousie et non avec sincérité, il pouvait quand même rendre grâce à Dieu, car d’une manière ou d’une autre, Dieu serait glorifié (Phil. 1 : 12-20). Ici, Éphraïm est jaloux parce que Dieu avait utilisé un instrument plus spirituel que lui. Le fait qu’il soit jaloux de l’état spirituel, de la puissance spirituelle d’un autre, est la raison même pour laquelle Dieu ne peut s’en servir. Si nous sommes jaloux de nos frères, nous devons nous juger nous-mêmes et nous humilier devant Dieu, en reconnaissant que nous ne sommes pas des instruments fidèles. C’est ce qu’Éphraïm aurait dû apprendre, mais il ne l’a pas fait.

Gédéon leur parle avec grâce, montrant qu’il a été enseigné de Dieu. Dans mes relations avec les frères, il est bon d’appliquer la leçon que j’ai apprise de Dieu. Quelle grâce manifeste Gédéon en leur disant : « Qu’ai-je fait maintenant en comparaison de vous ? Les grappillages d’Éphraïm ne sont-ils pas meilleurs que la vendange d’Abiézer ? Dieu a livré en votre main les princes de Madian, Oreb et Zeëb ; et qu’ai-je pu faire en comparaison de vous ? » (Jug. 8 : 2-3a). « Alors leur esprit s’apaisa envers lui, quand il leur eut dit cette parole » (v. 3b). Il pourrait sembler déplacé de les louer pour les apaiser, mais cela montre que Gédéon n’était pas jaloux. Il leur dit qu’en raison de sa faiblesse, il n’avait pas combattu l’ennemi mais avait seulement proclamé la puissance de Dieu ; il n’avait pas fait grand-chose, alors qu’Éphraïm avait pris les gués et avait capturé les princes. Aux yeux de Dieu le travail de Gédéon était sûrement bien plus précieux que celui d’Éphraïm, mais à ses propres yeux, son service était moindre que celui de ses frères. Puissions-nous apprendre cette belle leçon de cet homme vidé de lui-même, que Dieu avait suscité pour son peuple.

Il ne semble pas que c’était une flatterie de la part de Gédéon, il le croyait sincèrement. Il appréciait le travail d’Éphraïm à sa juste valeur, sans dire que c’était à son initiative. On peut supposer qu’il était si près de Dieu qu’il s’oubliait lui-même au point de ne voir que Dieu. Qu’il est bon que le moi soit éclipsé !

Il ne serait pas juste de déprécier le travail d’Éphraïm ; Oreb (corbeau) et Zeëb (loup), les princes de Madian, étaient tombés entre leurs mains près des gués du Jourdain. Leurs noms indiquent le caractère destructeur de ce monde dont le « prince » n’épargne rien. Mais les fruits de l’Esprit surmontent les armées de ce monde, ainsi que les « pouvoirs et les puissances » qui les dirigent. Quand elles sont faites à leur vraie place – au bord du Jourdain, le fleuve de la mort – les « œuvres » alors sont efficaces.

 

8.4       Une autre épreuve : le mépris et le rejet de Succoth et de Penuel

Gédéon ne peut s’attarder, il s’avance jusqu’à la victoire complète. Il traverse le Jourdain, et poursuit l’armée en fuite, « avec les 300 hommes qui étaient avec lui, fatigués, mais poursuivant toujours » (Jug. 8 : 4). Quel est le rapport entre ces deux mots poursuivre et fatigué ? Nous pourrions presque lire : les poursuivant parce qu’ils étaient fatigués - « de faibles qu’ils étaient furent rendus forts « (Héb. 11 : 34). L’impuissance même de l’homme l’amène à continuer, car c’est Dieu qui travaille en lui. Comme l’un des hommes forts de David dont la main « demeura attachée à l’épée » (2 Sam. 23 : 10), Gédéon n’avait plus que Dieu en vue, et ne se reposa que lorsqu’il eut renversé toute la puissance de l’ennemi.

Fatigué physiquement, il demande de la nourriture aux gens de Succoth et de Penuel, qui étaient Israélites et devaient partager la victoire. Mais la réponse que donnent ces hommes est une honte. Elle contredit la signification de leurs noms ! Succoth, qui signifie « tentes », évoque le pèlerin et Penuel signifie « la face de Dieu » ; or ceux qui habitent des tentes et ceux qui voient la face de Dieu devraient être prêts à aider à renverser la puissance du monde dont Madian est un type. Hélas, leur conduite fait mentir leurs noms. Ils répondent : l’ennemi est-il en vos mains, que nous vous aidions ?

Gédéon n’usera pas de douceur envers ceux qui se moquent de lui comme il l’avait fait pour les hommes d’Éphraïm. La situation est très différente. Éphraïm était allé au champ de bataille contre l’ennemi, mais les hommes de Succoth, en restant en arrière, se mettaient vraiment du côté de Madian. Une fois que la ligne entre Christ et le monde est tracée, celui qui est neutre est du côté de l’ennemi. « Celui qui n’est pas avec moi est contre moi », dit le Seigneur (Matt. 12 : 30). Aussi, ces hommes étaient de plus grands ennemis que Madian, parce que c’étaient des professants.

Gédéon continue donc sans leur aide. Dieu livre entre ses mains toute l’armée de Madian, ainsi que les rois Zébakh et Tsalmunna. L’honneur de détruire les rois de Madian revient à Gédéon. Le fait qu’ils soient deux suggère la variété qu’il y a dans le monde, et les formes variées sous lesquelles se présente Satan lui-même.

Zébakh (sacrifice) ne suggère pas ici la façon de s’approcher de Dieu, mais plutôt le massacre sans pitié que le monde se plaît à infliger au peuple de Dieu, ce que Tsalmunna (abri refusé) indiquerait. C’est pourquoi ils seraient à leur tour châtiés sans miséricorde : « Le jugement est sans miséricorde pour celui qui n’a pas usé de miséricorde » (Jac. 2 : 13). Cette victoire sur Madian est prise comme exemple pour la chute finale des ennemis d’Israël, dans la prière du résidu souffrant (Ps. 83 : 9-12), et dans l’accomplissement prédit par Ésaïe (9 : 4).

Après cela, Gédéon revient vers ce peuple qui prétendait appartenir à Dieu, mais restait neutre dans une journée comme celle-là. Il enseigne les hommes de Succoth avec les ronces et les épines du désert qui parlent de la malédiction apportée sur ce monde à cause du péché de l’homme.

Certains enfants de Dieu sont fouettés par les ronces et les épines de cette vie, parce qu’ils ne prennent pas clairement position pour Christ dans ce monde. Une telle neutralité conduit à être enseignés par les épines, au lieu de l’être par la Parole de Dieu. Que de vies gâchées, que de croyants sont enseignés par les épines de la vie au lieu d’être des pèlerins ! Quelle façon amère d’apprendre par de tristes expériences, loin de Dieu, au lieu de battre le blé et d’être un instrument sanctifié, utile au Maître ! Ainsi, ces hommes de Succoth, pour avoir été neutres, récoltent le fruit de leur folie.

L’ennemi est donc entièrement jeté à terre, Gédéon (celui qui abat) a véritablement renversé « ...toute hauteur qui s’éleve contre la connaissance de Dieu » (voir 2 Cor. 10 : 5). C’est un puissant vainqueur.

 

9        L’éphod de Gédéon - Abimélec (Jug. 8:22 à 9:57)

9.1       La flatterie des hommes d’Israël

Cette dernière partie de la vie de Gédéon est triste. « Les hommes d’Israël dirent à Gédéon : Domine sur nous, et toi et ton fils, et le fils de ton fils ; car tu nous as sauvés de la main de Madian. Et Gédéon leur dit : Je ne dominerai point sur vous, et mon fils ne dominera point sur vous ; l’Éternel dominera sur vous « (Jug. 8 : 22-23). Israël avait toujours tendance à vouloir un chef comme toutes les nations, pour les conduire à la bataille et régner sur eux en temps de paix. Ce désir sera finalement satisfait quand Saül sera établi sur eux. Ici, nous avons les prémices de ce désir dans le souhait de voir Gédéon régner, mais il connaissait trop l’autorité de Dieu pour l’usurper. Il est beau de le voir continuer à s’abaisser, comme il l’avait toujours fait.

Si quelqu’un veut être roi, son royaume sera le monde. S’il veut diriger le peuple de Dieu, il prendra la place de Satan et non celle de Christ, et sera le représentant de Satan et non celui de Christ. Gédéon a certainement dû réaliser que le seul trône qu’il pourrait occuper était celui qui était laissé vacant par Zébakh et Tsalmunna, rois de Madian. Mais il ne voulait pas être un souverain mondain sur le peuple de Dieu. Dieu sera leur roi, déclare-t-il.

Si Israël s’était toujours souvenu que Dieu était suffisant, et que lui seul devait être leur roi, combien de leçons amères auraient été épargnées ! Mais cela n’a pas été le cas ; ils voulaient que Gédéon, son fils et le fils de son fils, soient leurs chefs pour toujours. Par la foi, Gédéon refuse ; cependant, cette requête reviendra peu après, et le peuple obtiendra ce qu’il désirait.

Mais Gédéon n’a pas su résister à l’épreuve suivante. Si l’une des choses les plus tentantes pour l’homme est le pouvoir, il y a une chose plus grande encore, c’est le privilège d’être en vue dans la proximité visible de Dieu. Gédéon demande l’or du butin pris à l’ennemi vaincu, et en fait un éphod sacerdotal, à l’instar d’Aaron qui avait fait le veau d’or avec l’or ramené d’Égypte.

L’éphod serait témoin de sa place exclusive de proximité de Dieu. En reprenant son histoire, nous comprenons que le fait même que Dieu avait eu affaire avec lui si intimement, lui donnait un sentiment de proximité particulière avec Lui, une sorte de position sacerdotale. Il avait déjà son autel, Dieu lui avait déjà dit d’offrir un sacrifice, et il avait même apporté, dès le début, un sacrifice spécial que Dieu avait accepté. Ces indications ne le désignait-il pas comme sacrificateur pour le peuple ?

Il pouvait se dire : Après tout, c’est l’apostasie le plus grand péché du peuple. Il a plus besoin d’un chef religieux que civil pour les maintenir en relation avec Dieu. - Ainsi, Gédéon pouvait se méprendre et penser qu’il faisait la volonté de Dieu, en liant plus étroitement le peuple à Dieu par son sacerdoce. C’était oublier que Dieu avait déjà un sacrificateur, et que, de la part du peuple, la tentation de faire de cet éphod d’or une idole, était plus grande que d’avoir un sacerdoce.

Nous avons peut-être fait l’expérience d’avoir été brisés par Dieu qui nous a fait réaliser notre néant, tout en nous faisant jouir de sa proximité. Certains ont pu le remarquer et penser avec étonnement : ce doit être un homme exceptionnel pour avoir une telle intimité avec Dieu. Voilà le piège : penser avoir une place privilégiée, proche de Dieu, qui nous autoriserait à être un intermédiaire entre ceux que nous avons peut-être conduits victorieusement, et Dieu de qui ils dépendent directement. Ce serait refuser la royauté, mais accepter le sacerdoce.

Dans la chrétienté, la montée de l’esprit clérical - la distinction entre clergé et laïcs parmi le peuple de Dieu - est plus une question de sacerdoce spirituel que d’autorité spirituelle. Prenons par exemple la Table du Seigneur, avec les signes du corps et du sang de Christ ; de nombreux chrétiens non instruits seraient horrifiés à la pensée qu’un laïc rompe le pain, estimant que c’est le service du pasteur, et qu’un homme non ordonné ne doit pas y toucher. Cette pensée sur le sacerdoce est celle de l’église catholique où seul le prêtre consacre l’hostie et la distribue au peuple.

L’apparition et le développement du sacerdoce sont dus au fait que les gens sont prêts à reconnaître un conducteur spirituel qui se tient près de Dieu, pour éviter d’avoir besoin d’être aussi proches. C’est par ce piège que le caractère de l’Église, du culte et du ministère a changé.

Tout Israël se prostitua après l’éphod (v. 27). Ainsi, lorsque des hommes sont reconnus avoir une grande foi, ou être spécialement utilisés par Dieu, le danger est grand d’en faire une classe sacerdotale dans la proximité de Dieu pour nous représenter. Souvenons-nous toujours que le ministère n’a rien à voir avec l’éphod, qu’un don spirituel quel qu’il soit n’a rien à voir avec une fonction sacerdotale, qui appartient soit à Christ, seul souverain Sacrificateur qui accomplit toujours son ministère devant Dieu pour nous, soit à tout homme en tant qu’adorateur, sans distinction. « Il a fait de nous un royaume, des sacrificateurs pour son Dieu et Père « (Apoc. 1:6).

 

9.2       La fin de la vie de Gédéon

Vers la fin du chapitre 8, il est dit que Madian a été entièrement vaincu : « Et Madian fut humilié devant les fils d’Israël ; et il ne leva plus sa tête. Et le pays fut en repos quarante ans, aux jours de Gédéon « (v. 28). C’était, à l’évidence, une œuvre de Dieu, de grande portée, même si l’énergie de la foi qui avait marqué ses débuts avait cessé. En effet, les nombreuses femmes de Gédéon et sa grande famille suggèrent non pas la vigueur spirituelle qui marque les hommes de foi, mais plutôt une vie de plaisir égoïste, source de nombreux maux qui porteront leurs fruits ultérieurement. Son fils Abimélec qu’il a eu de sa concubine, en est un exemple trop frappant pour nous permettre d’éluder cet enseignement.

Nous arrivons à la fin de la vie de Gédéon. Il est important de constater que, bien qu’ayant refusé la royauté, en apparence, pour s’intéresser au sacerdoce, il va finir par soulever la question de la royauté. Il est important de noter les origines du mal. Par exemple, la doctrine des Nicolaïtes (Apoc. 2 : 16), qui signifie « conquête du peuple », est la conséquence de l’abandon du premier amour, qui marque la perte du sens de notre sacerdoce devant Dieu. Par ailleurs, le cléricalisme, cette domination sur le peuple, vient de ce que les saints ont perdu le sens de leur accès sans intermédiaire humain à la sainte présence de Dieu.

Gédéon meurt, et sa mort est accompagnée du même refrain que précédemment : « Et quand Gédéon fut mort, il arriva que les fils d’Israël retournèrent et se prostituèrent après les Baals, et ils s’établirent Baal-Berith pour dieu. Et les fils d’Israël ne se souvinrent pas de l’Éternel, leur Dieu, qui les avait délivrés de la main de tous leurs ennemis tout à l’entour » (v. 33) S’éloigner de Dieu implique la répétition des tristes fruits qui en découlent : l’esclavage et la déchéance. Mais ici, il est insisté sur la situation intérieure, sans qu’il semble y avoir de servitude à un pouvoir extérieur.

 

9.3       Abimélec établi roi

Le sacerdoce qui s’est établi n’est pas selon Dieu. La désobéissance porte ses fruits, et Abimélec, fils de Gédéon, se lève pour prendre la place de son père. Il ne la prend pas en tant que sacrificateur, mais en tant que roi, car le peuple s’étant tourné vers Baal ne semble plus désirer ce sacerdoce. Son nom même (mon père était roi) - qui lui a peut-être été donné par sa mère pour attester qu’il descend du grand homme d’Israël, et essayer de couvrir la honte de sa naissance - montre comment cet esprit subtil était à l’œuvre (même si cette expression avait été fondée). En effet, son père n’était pas roi ; il avait refusé ce titre qui revenait à Dieu seul. Malgré tout, Abimélec déclare que son père était roi, et de plus, il affirme avec témérité que son fils règnera aussi.

Il use d’autorité sur le peuple de Dieu en asseyant son trône par la violence, car le règne de l’homme ne peut s’établir qu’ainsi. Il tue donc tous ses frères, les nombreux fils de Gédéon, sauf un qui s’était caché. Après avoir éliminé tous ses rivaux, il se rend à Sichem, la ville de sa mère, la ville selon la nature - il est très significatif que cette ville soit en Éphraïm, la tribu qui cherche toujours à dominer. Il persuade les hommes de Sichem de le soutenir et de le reconnaître comme roi. C’est alors que Jotham, son frère qui avait échappé à la tuerie, prononce une parabole très frappante qui résume toute la leçon de ce chapitre 9. Cette allégorie sur le gouvernement explique ce qui se passait, et montre le mal que fait le gouvernement humain dans la maison de Dieu.

 

9.4       La parabole de Jotham

L’arbre est une image du gouvernement. Nebucadnetsar était un grand arbre, la tête de l’empire des nations (Dan. 4) ; la graine de moutarde devient un arbre dans la parabole (Luc 13 : 19).

Les arbres de la forêt demandent un roi, et se tournent naturellement vers ceux qui portent du fruit. Vient d’abord l’olivier. Ils lui demandent : « Règne sur nous », et il répond : « Laisserais-je ma graisse, par laquelle on honore par moi Dieu et les hommes, et irais-je m’agiter pour les arbres ? » (v. 9). En d’autres termes l’olivier déclare que son travail est de porter du fruit, et non pas de régner. Le figuier et la vigne font la même réponse. L’application de cette parabole au gouvernement du peuple de Dieu est très simple. Qui va régner sur les saints ? Ils vont se tourner naturellement vers ceux qui portent du fruit dans leur vie, par exemple, vers l’un qui représente l’olivier dont l’huile suggère l’énergie, la lumière, la puissance et les fruits du Saint Esprit. Ils lui diront : Frère, dirigez-nous, soyez notre conducteur. - Il répondra : Ah, mes frères, je suis trop engagé dans les choses de Dieu, dans la communion bienheureuse du Saint Esprit, dans ce qui rafraîchit son peuple, dans ce qui glorifie Dieu (car Dieu est honoré et glorifié par les fruits de l’Esprit dans les siens) ; je suis trop occupé à porter du fruit pour être un conducteur ».

Le figuier représente plus particulièrement la nourriture et la guérison apportées par le fruit porté pour Dieu par les siens. Le figuier produisant des fruits suaves, dit : Si je règne, je devrai cesser de porter du fruit, et je préfère de loin nourrir le peuple de Dieu, que le gouverner. - Si l’Esprit de Dieu accorde à un serviteur - pasteur ou docteur - de porter du fruit, qui nourrit, rafraîchit et guérit le peuple de Dieu, échangerait-il une telle place pour dominer sur le peuple ?

La vigne nous rappelle peut-être plus particulièrement le ministère évangélique qui met l’accent sur le sang précieux de Christ, dont le vin est un type. L’évangéliste se plaît à présenter la croix de Christ et l’œuvre accomplie. Le peuple dit : Voilà celui qu’il faut pour gouverner, donnez-nous un bon évangéliste pour assumer la direction du rassemblement des saints. - L’évangéliste répondra : Dois-je laisser ce qui rafraîchit Dieu et l’homme, ce qui réjouit le cœur défaillant, ce qui apporte la paix à la conscience coupable et glorifie la grâce de Dieu ? Dois-je renoncer à mon ministère de l’évangile de Sa grâce pour le vain honneur de régner sur le peuple de Dieu ?

Ainsi, on voit que ceux qui portent du fruit pour Dieu ne peuvent diriger le peuple. Qui doit prendre cette place ? Ah, la Parole nous dit que celui qui gouverne le mieux est celui qui sert. Celui qui est aux pieds des saints, à leur service, lui, est vraiment et pratiquement un conducteur. Ceux qui, comme l’olivier, le figuier et la vigne, apportent aux saints les fruits précieux de la grâce de Dieu, les conduisent, mais en les servant. Diriger, c’est servir. S’il n’a plus que la pensée de diriger, le serviteur cessera de porter du fruit ; et s’il cesse de porter du fruit, il n’y aura plus rien, comme ici.

Une épine est alors élue pour régner sur les arbres, et la réponse de la ronce est très significative : « Si vraiment vous voulez m’oindre roi sur vous, venez, mettez votre confiance en mon ombre ; sinon, un feu sortira de l’épine, et dévorera les cèdres du Liban » (v. 15). C’est le règne ou la ruine. Une ronce est une plante sans fruit qui, au lieu de fournir énergie, sève et vigueur pour porter du fruit, s’est recroquevillée sur elle-même. Tout comme l’épine, c’est une malédiction de la terre, une branche avortée. Si elle s’était ouverte, elle aurait pu être une branche portant beaucoup de fruits, mais elle s’est renfermée et centrée sur elle-même. La ronce, ce buisson d’épines, figure d’un homme égoïste, égocentrique, va donc régner. Ce règne revêt cette caractéristique : Vous devez vous courber devant moi, ou être brûlés, qui que vous soyez.

Cette parabole sonde nos cœurs et nous fait réaliser qu’il est facile de devenir de simples ronces, en cherchant une place à la tête et non aux pieds des saints. C’est celui qui sert ses frères comme Christ l’a fait qui conduit. «Qui est le plus grand, celui qui est à table ou celui qui sert ? N’est-ce pas celui qui est à table ? Or moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Luc 22 : 27). Celui qui désire attirer le regard des saints sur lui, n’est qu’une ronce. Les gens à qui il faut regarder sont ceux qui ne prennent pas de place, mais cherchent à porter du fruit précieux pour Dieu et pour la bénédiction des saints ; soyons-y tout entier.

Ne recherchons pas de place d’honneur. Ne soyons pas comme Abimélec, en désirant nous asseoir sur la chaise vide de quelque prédécesseur, ce que son père avait en fait refusé. Si le désir de succession se trouve dans nos cœurs ou si nous voulons à tout prix nous laisser diriger par des conducteurs, ce sera comme des ronces sans fruit pour Dieu qui envahiront les saints.

Un vrai conducteur ne parle pas de lui-même, ni de sa dignité ou de son autorité ; il a le sentiment de sa faiblesse et se tient pour Dieu en toute circonstance, car c’est de cette faiblesse dont Dieu se sert. Prenons garde à cet enseignement. L’Église, l’ayant négligé, a été réduite en pièces. C’est la grande leçon du cléricalisme, qui est parvenu à ravir la paix du peuple de Dieu.

Dès le début de l’histoire du peuple de Dieu, ceux qui ont apporté du trouble sont ceux qui se sont octroyés la place de conducteur du peuple, non pour servir, mais pour diriger. Ce sont eux qui ont apporté la détresse autour d’eux, du déshonneur sur Dieu, et la corruption qui a hélas terni l’histoire de l’Église dès le temps des apôtres.

N’est-il pas frappant qu’Abimélec ait le nom des rois Philistins, ce titre transmis de père en fils ? Il en est de même pour le Pharaon. C’est la religion mondaine et charnelle qui se doit d’avoir un dirigeant nommé d’après son prédécesseur. Si la succession s’arrête, il n’y a plus de dirigeant, c’est pourquoi le chef des Philistins est appelé Abimélec  - mon père était roi, et je suis roi après lui.

Pourquoi cet esprit se montre-t-il de temps à autre parmi les saints ? N’est-ce pas oublier que nous sommes tous sacrificateurs ? Ce faisant, nous établissons une distinction entre clergé et laïc qui peut aller jusqu’à ce que nous venons de voir.

 

9.5       Le jugement et la mort d’Abimélec

Sans entrer dans les détails de la prophétie de Jotham, nous voyons qu’elle s’est accomplie à la lettre : un feu sort des hommes de Sichem, consume Abimélec, et réciproquement. Ceux de Sichem se tournent avec hésitation vers un rival d’Abimélec, et l’envoient à la rencontre d’Abimélec qui le met en fuite. Puis Abimélec vient combattre les hommes de Sichem qui se réfugient dans une tour. Alors, il apporte des branches d’arbres (qui rappellent ceux de la parabole de son frère Jotham), met le feu à la porte de la tour, et brûle ceux qui avaient pris le parti de son rival.

Abimélec s’en va dans une autre ville, et veut aussi brûler ceux qui avaient trouvé refuge dans la tour. Mais une femme l’achève avec une pierre de meule, instrument de son humble tâche quotidienne, qu’elle lui jette dessus (v. 53). Il disparaît avec sa puissance, par la main d’une femme.

Maintenant, voyons le contraste avec Jotham. Ne pouvant se mêler à toutes ces querelles, il fuit à Béer et demeure là (9 : 21). Béer est un « puits » ; il habite près du puits, tandis que le peuple de Dieu se querelle pour revendiquer l’autorité. Il boit de la fontaine de la parole de Dieu, d’où seule proviennent nourriture et rafraîchissement.

Ainsi, tandis qu’évêques luttaient contre évêques et papes contre papes, pour savoir qui aurait la prééminence, les enfants de Dieu, heureux de se réfugier auprès de la Parole de Dieu, buvaient d’un courant de vie et d’amour infiniment supérieur à tous les Abimélec du monde. Comme « une branche qui porte du fruit près d’une fontaine ; ses rameaux poussent par-dessus la muraille » (Gen. 49 : 22), ces fruits ont profité à ceux qui en avaient besoin.

 

9.6       Une leçon sur la conduite à tenir parmi le peuple de Dieu

Nous avons parlé de l’homme qui veut diriger. S’il y a quelque chose d’odieux pour Dieu, c’est bien cet esprit-là. Mais alors n’y a-t-il donc ni gouvernement ni autorité dans la maison de Dieu ? Faut-il donc rejeter toute pensée d’autorité ? S’il y a affrontement de deux volontés humaines, autant être ouvertement sous l’autorité de l’homme. Mais si l’ordre et le gouvernement de la maison de Dieu sont exercés dans la puissance de l’Esprit Saint, selon sa Parole, malheur à ceux qui méprisent cette autorité.

Nous devons veiller à ce qu’il n’y ait aucune intrusion humaine quant au gouvernement et à l’autorité, parce que ce serait remplacer l’autorité de Christ. En effet, si un homme prend la place de conducteur, supervisant le peuple de Dieu, il usurpe la place de Christ tout aussi réellement que Gédéon a usurpé la place du sacrificateur, ou Abimélec la place du conducteur.

Christ est le conducteur de son peuple. Il le dirige par sa Parole et Son Esprit, selon la vérité. Nous montrons notre soumission à Christ, et à son gouvernement par la soumission à sa Parole ! Toute la vérité que la Parole nous dévoile est le commandement de notre Conducteur et Seigneur. Je dois obéir à cette Parole, quel que soit celui qui me l’apporte. Si quelqu’un me communique la volonté de Christ, Lui qui est Chef et Seigneur, rejetterais-je ce message parce que je méprise l’instrument employé ? Agir ainsi serait mépriser Christ. Non, le vrai gouvernement est celui de Christ, et Il gouverne par sa Parole qu’Il nous apporte au moyen de tout instrument qu’Il jugera propre à utiliser.

Le Seigneur honore le vrai gouvernement dans sa maison, et Il l’honorera en utilisant ceux qui connaissent le mieux sa pensée, et qui sont le moins en contradiction avec l’ordre établi de Dieu.

Sans aucun doute, l’autorité de Christ sera plus fréquemment représentée par le moyen de frères anciens, parce que c’est cohérent avec l’ordre selon Dieu. La nature même enseigne l’obéissance et le respect envers ceux qui sont plus âgés, et en particulier les parents. Et dans la famille de Dieu, il est bon que l’ordre de Dieu soit reconnu dans la mesure du possible.

Cela implique, bien sûr, que les croyants aînés demeurent en communion avec Christ, et puissent être utilisés en tant que canaux pour Lui, pour transmettre ses messages à son peuple. S’Il les utilise pour conduire son peuple, ce n’est pas en raison de ce qu’ils sont en eux-mêmes, mais parce ce que cela est conforme à l’ordre qu’Il a établi, même dans la nature. Mais si, parmi le peuple de Dieu, des anciens ne demeurent pas en Christ, ne sont pas remplis de sa Parole et ne marchent pas dans la séparation du monde, il ne faut pas s’attendre à ce que le Seigneur les utilise. Que de fois doit-Il déroger à l’ordre établi et utiliser des jeunes au lieu de plus âgés, parce que ces derniers ne sont pas prêts !

Cela devrait toucher notre conscience, car c’est un principe de la plus haute importance. À propos de l’ordre dans sa maison, pour être utilisés par le Seigneur afin d’apporter la vérité à son peuple, nous devons être en communion avec Lui. Alors, s’ensuivront nécessairement l’obéissance, le respect de l’autorité de Christ et de sa Parole, et le respect pour celui qui nous l’apporte, non pour ce qu’il est en lui-même, mais parce que nous reconnaîtrons qu’il veille sur nos âmes, comme ayant à rendre compte. Nous reconnaîtrons qu’il demeure en Christ, et nous communique non pas la volonté humaine, mais celle du Seigneur Jésus.

C’est dans ce chapitre 9 des Juges que le gouvernement s’effondre. Ce sera pire avec Jephté, plus désastreux encore avec Samson, et il finira par disparaître à la fin du livre. Nous avons vu comment l’esprit de succession qui vient du sacerdoce arbitraire veut régner coûte que coûte et tout ruiner. C’est la volonté propre dans les choses de Dieu qui amène l’anarchie, les querelles et la confusion. Apprenons à nous soumettre au Seigneur, chef de son Église, Seigneur de nous tous. Si nous sommes près de Lui pour recevoir sa Parole, inclinons-nous devant celle-ci et reconnaissons l’autorité de Christ sur sa maison. Mais pour cela il faut que nous marchions avec Dieu ; s’il en est ainsi, le gouvernement sera selon Lui, les surveillants serviront librement ; ils seront à la hauteur de leur responsabilité, et Christ sera tout pour leur coeur et pour celui des croyants.

 

10 Jephté + Ses prédécesseurs et ses successeurs (Jug. 10 à 12)

La dernière partie du chapitre 9 présentait l’aboutissement inévitable d’un chemin de propre volonté tel que celui de l’autoritaire Abimélec. Son ascension, son parcours et sa chute, sont illustrés par le règne de la ronce, en contraste avec le service des arbres portant du fruit. Prêtons attention à la parabole de Jotham, c’est une des leçons caractéristiques du livre des Juges concernant les relations parmi le peuple. Auparavant, nous avions vu principalement les relations du peuple avec leurs ennemis ; dans l’épisode d’Abimélec il s’agit des relations internes les uns envers les autres. Un témoignage collectif ne pourra être maintenu pour Dieu que sur la base des principes présentés dans la parabole de Jotham.

 

10.1  Thola et Jaïr – un temps de paix pour Israël

Le début du chapitre 10 contraste avec ce qui précède. La brièveté des deux premiers paragraphes dont l’un présente le règne de Thola, et l’autre celui de Jaïr, semble indiquer la simplicité de leur règne. Généralement, les Abimélec font les longs chapitres dans la Bible, car l’histoire de la propre volonté que Dieu doit briser et humilier rend de nombreux détails nécessaires pour notre instruction. Mais quand il y a la bénédiction divine, un véritable travail selon Dieu peut souvent être décrit en quelques mots. Comme disent les historiens, ce sont les moments les plus difficiles qui rendent les chapitres d’histoire les plus passionnants, tandis que les meilleurs moments, comme une ère de calme et de prospérité, rendent les pages d’histoire ternes et sans intérêt. Aucun détail frappant en rapport avec ces deux juges n’est révélé. Pourtant, le fait qu’ils viennent immédiatement après Abimélec, présente un contraste. « Et après Abimélec, Thola, fils de Pua… se leva pour sauver Israël » (Jug. 10 : 1). À part son nom, peu de choses nous indiquent ce que nous pouvons apprendre de lui. Si le nom d’Abimélec suggérait son orgueil en ce qu’il revendiquait la succession : Mon père était roi, je serai donc roi ; le nom de Thola suggère une pensée opposée.

 

10.1.1    Thola

Thola signifie : un ver - un ver pour juger Israël ! Quel contraste avec l’orgueil de celui qui est fier de sa généalogie et de sa propre valeur, et qui écrase tout ce qui ne s’inclinerait pas devant sa propre volonté ?

La généalogie de Thola est donnée jusqu’à deux générations en arrière. Dodo -bien-aimé - est le premier, puis vient son fils Pua – discours -, et enfin Thola - un ver. Ainsi, l’amour de Dieu est la source d’où tout découle ; celui qui en jouit parlera de l’abondance de son cœur, et sera conduit à une humble mise de côté de lui-même, ce qui est suggéré dans le « ver ». Pua - discours ou expression - vient d’une racine signifiant respirer ; cela évoque l’Esprit soufflé en chaque croyant d’une part, et la louange et la confession exprimées dans la puissance de ce même Esprit.

Thola est un homme d’Issacar (récompense), évoquant la récompense d’une vie de foi, soit ici-bas soit dans l’au-delà. Il est frappant de voir qu’il n’habite pas une ville de sa propre tribu, mais à Shamir dans la montagne d’Éphraïm. Humblement, il laisse la pensée de la récompense, ne servant pas pour cela, mais ayant une vie de renoncement fructueuse. Un Thola en Éphraïm n’est pas en danger de s’enorgueillir contrairement à cette tribu qui y est particulièrement exposée.

Il habitait Shamir. Ce nom est dérivé d’une racine signifiant être raide ou ferme. Le principal mot dérivé qui en est issu est « observer ». Ceci suggère la vigilance nécessaire à un conducteur, quelqu’un qui conduit avec diligence.

Thola mourut et fut enterré où il avait vécu. Fermeté et immutabilité sont indiquées par ce fait. On pourrait dire que la mort n’a rien changé aux principes auxquels il tenait.

Thola et Jaïr, ainsi que quelques juges venant après Jephté, représentent peut-être plus distinctement que les autres juges, des types de Christ Lui-même. Beaucoup de choses en Jephté et Gédéon, entre autres, ne pourraient être attribuées à notre Seigneur, mais ici, si peu de choses sont dites, que la position et le nom même semblent évoquer Christ. Dans le Psaume 22, Il dit de Lui-même : « Je suis un ver, et non point un homme » (v. 6). Le fait que Celui qui était couronné de la plus grande gloire dans les cieux prenne la dernière place, s’humilie et ne prétende à aucun honneur, nous montre le caractère de Celui qui vient sauver son peuple, que ce soit Israël ou l’Église. C’est Celui qui prend sa place dans l’humiliation qui est apte à juger son peuple et le rassembler, comme ce psaume le montre. Il a pris sa place comme un ver et non un homme, et, mourant ainsi sur la croix, Il se lève d’entre les morts, centre de la bénédiction pour ses frères - le résidu d’Israël, et pour la grande congrégation - la nation tout entière. Alors, toutes les familles de la terre entendront et se rassembleront vers lui pour être bénies. Ainsi, c’est de la croix, comme centre, que rayonne toute bénédiction, et c’est par Lui, dont l’humilité l’a mené à la croix que vient tout espoir de délivrance.

En fait, Thola évoque Christ plus qu’il n’en est un type. Et parce qu’il l’évoque dans son humiliation, il nous offre un tableau du véritable esprit de gouvernement. Contrairement à l’affirmation du moi qui règne ou qui écrase tout ce qui ne se plie pas à sa propre ambition, Thola, avec calme, sans aucun conflit apparent, que ce soit avec des ennemis extérieurs ou avec le peuple, juge fidèlement Israël. C’était un vrai travail, très efficace, et il en sera toujours ainsi.

 

10.1.2    Jaïr

Ce Galaadite (nous reviendrons sur Galaad) jugea Israël 22 ans, et il eut de vrais successeurs qui ont gouverné. « Il avait trente fils, qui montaient sur trente ânons ; et ils avaient trente villes qu’on a nommées jusqu’à aujourd’hui les bourgs de Jaïr « (v. 4). Les descendants de Jaïr sont donc des conducteurs. Ils ne réclament pas cette place, mais ils l’occupent pratiquement. Chacun, dans son propre cercle d’influence peu étendu, a une position d’autorité sur une ville. Ces villes sont nommées d’après leur père, Havoth-Jaïr (les vies de Jaïr) ; elles perpétuent, pour ainsi dire, la vie de Jaïr, même après sa mort.

Jaïr signifie : celui qui donne la lumière. Thola avait suggéré la pensée de l’humiliation de notre Seigneur jusqu’à la mort, Jaïr évoque la pensée qu’Il donne à son peuple sa lumière pour leur croissance. Ces trente villes suggèrent que cette croissance par la vérité se poursuit chez les descendants.

Tout est simple, il n’y a pas de bruit d’armes ! Au milieu de la ruine, après le chaos apporté par Abimélec, il peut y avoir une restauration s’il y a un gouvernement humble et paisible, dans un abaissement qui va jusque dans la poussière. Celui qui règne se tient dans la poussière ; il a d’humbles pensées de lui-même, et est souvent méprisé par les autres. La puissance qui gouverne le peuple de Dieu est celle de la faiblesse qui se repose sur le Tout-puissant. Si, dans notre petitesse, nous prenons place à côté de l’Homme de douleurs dans l’humiliation, nous avons la clé du gouvernement, de la puissance et de l’autorité parmi le peuple de Dieu. On n’a jamais vu le peuple de Dieu prendre sa place avec Thola dans un abaissement complet, sans voir de délivrance.

Dès lors, la connaissance de la vérité divine va transformer le peuple. Les progrès sont alors beaux à voir, et, bien qu’elle puisse ne pas être très visible, il y a là une véritable autorité, ainsi qu’une croissance réelle.

Il est très intéressant de voir que cela se passe en Galaad, de l’autre côté du Jourdain, le côté terrestre de l’héritage. Galaad signifie témoin ou témoignage. Ainsi, en croissant, le peuple de Dieu maintient un véritable témoignage devant le monde. Là où l’ennemi attaque en premier, c’est du côté de Galaad, du côté de notre témoignage, comme nous le verrons plus loin. Il est consolant de voir le peuple de Dieu s’accroître par la lumière de la vérité et maintenir un témoignage, de sorte que le monde lui-même voit la vie de Jaïr.

En fait, ce qui est un vrai témoignage aux yeux du monde, c’est la vie ; ce sont ces villes de Jaïr, ces villes de la vie établies par la lumière de la vérité. Le monde ne peut pas nier la marche avec Dieu ou la croissance spirituelle. Il peut nier la profession et s’en moquer, mais il ne peut mépriser, même s’il affecte de le faire, une vraie croissance spirituelle.

Notons également que la croissance est liée au gouvernement, car c’est ce que signifie le fait de monter des ânons. En Orient, c’était le signe distinctif du souverain. Deborah fait allusion à cette coutume dans son cantique (5 : 10). En entrant à Jérusalem, monté sur un ânon, le Seigneur a été salué comme roi (Jean 12 : 13-14).

Jaïr meurt et est enterré à Kamon. Différentes significations ont été données à ce mot qui dérive de la racine croître. L’une d’elles, champ de céréales, est très significative. En effet, de telles vies ont la promesse de la résurrection avec une récolte abondante.

Quel contraste avec Abimélec, ou plutôt quel remède après lui ! Puissions-nous en apprendre la leçon : être humble et reluire.

 

10.2  Le nouveau déclin du peuple d’Israël

Nous arrivons maintenant à un récit qui, par sa longueur, comme nous l’avons vu, présage de conflits entre les principes de Dieu et les pratiques du peuple. La vie de Jephté va nous fournir matière à réflexion. Nous avons tout d’abord le récit d’un nouveau déclin des fils d’Israël, ce qui n’était pas le cas avec Thola ou Jaïr. Ici, le nombre de leurs dieux est accru au point d’inclure tous les dieux des païens qui les entouraient. « Ils servirent les Baals, et les Ashtoreths, et les dieux de Syrie, et les dieux de Sidon, et les dieux de Moab, et les dieux des fils d’Ammon, et les dieux des Philistins » (v. 6).

L’apostasie semble être plus profonde qu’aucune autre ; elle est telle qu’ils servent tous les dieux possibles, sauf le Dieu vivant. Si la vérité est exclusive, l’erreur, elle, est tolérante. La chair, qui a dix mille façons de se manifester, adore et sert des milliers de dieux. Il n’y en a qu’un devant qui elle ne peut s’incliner, c’est le Dieu vivant ; plus elle multiplie ses dieux, plus elle s’écarte du vrai Dieu. C’est ce que nous avons ici avec Israël. Les livres des prophètes présentent abondamment cette triste situation ainsi que le plaidoyer de la patience divine envers Israël.

Le résultat est inévitable. Si nous avons perdu le sens de l’autorité de Dieu, il ne peut que nous abandonner à l’autorité de ce que nous avons suivi. C’est très important. Cela nous montre, et c’est touchant, que Dieu ne prend pas plaisir à juger ou à châtier. Il laisse simplement son peuple récolter le fruit de sa propre folie. C’est comme s’Il disait : Je ne vous inflige pas ce châtiment, je vous montre simplement le résultat de votre propre mal. - Puisqu’ils servaient les dieux des Philistins et des Ammonites, ils ont donc été livrés à ces peuples pour être écrasés sous leurs talons de fer.

Rendons ce témoignage à Dieu : Son règne est-il parfois pénible ? Son service est-il dur et amer ? Épreuves et difficultés peuvent s’y rattacher, et la chair s’y manifester, mais notre cœur ressent-il comme étant pénible, un joug qui est pourtant « facile à porter » et un fardeau qui est « léger » (Matt. 11 : 28-30) ? L’apôtre de l’amour, l’apôtre qui était le plus près du cœur de Christ, dit que « ses commandements ne sont pas pénibles » (1 Jean 5 : 3). Mais si nous devions témoigner au sujet de la domination du mal, dirions-nous qu’il est léger, ou qu’il est une tyrannie écrasante ? Quel que soit le mal auquel l’âme est asservie, de la simple mondanité à la plus grossière immoralité, de la simple indifférence à Dieu à l’infidélité la plus totale, cet esclavage n’est-il pas terrible et amer pour l’âme ?

Il en était ainsi avec Israël. L’asservissement aux Philistins, dont il est parlé ici, va se poursuivre jusqu’à ce que David les en délivre complètement. Les Philistins ne sont pas encore vraiment vus ici, il y en avait déjà des allusions dans le récit de Shamgar. Cet ennemi, situé sur leur frontière occidentale, entre Canaan et l’Égypte, menaçait de venir à la première occasion. Ici, dans son éloignement de Dieu, le peuple avait ouvert les bras à diverses idolâtries ; aussi, répondant pour ainsi dire à l’invitation, les Philistins prenaient le pouvoir qu’Israël mettait dans leurs mains, et dès lors, allaient dominer.

Mais c’est avec la puissance des fils d’Ammon qui habitent sur la rive Est du Jourdain que Jephté a surtout affaire. Ammon était l’autre fils de Lot. Nous avons déjà vu ce que Moab représentait ; le même enseignement s’applique à Ammon, mais avec des différences propres à son caractère. Ammon, comme Moab, étant lié à Israël par nature, fait penser à la profession qui ressemble extérieurement à la vérité de Dieu, en contraste avec d’autres ennemis qui ne lui ressemblent pas du tout.

Moab représente une profession entièrement vide, accordant toute indulgence à la chair, car Moab était en étroite relation avec Amalek – les convoitises de la chair. La profession que représente Ammon est plus marquée par le pouvoir d’un dominateur que par la satisfaction de la chair. Sihon, roi des Amoréens, roi de Hesbon, dominait de fait les fils d’Ammon, même s’ils préservaient leur identité naturelle. Les Amoréens parlent beaucoup, comme nous l’avons déjà vu ; leurs grands discours ne sont que vanités. Pleins d’eux-mêmes et de leurs propres paroles, ils évoquent donc l’activité de l’esprit humain. C’est la capitale de ce roi qui nous donne la clef du caractère des Ammonites. Hesbon signifie raisonnement. C’est donc l’introduction de l’esprit de l’homme, de la raison, de l’intellect, dans les choses de Dieu.

Nous l’avions déjà vu avec Jabin, roi de Hatsor, l’ennemi du Nord. Une grande similitude existe entre Jabin et Ammon. Dans le cas de Jabin, l’attaque de l’infidélité qui renie totalement le christianisme est plus franche ; ses ressources sont en dehors de la révélation, même si elle applique son raisonnement à la Parole de Dieu, ou formule une théologie. Dans le cas d’Ammon, c’est l’attaque de la profession qui prétend être le christianisme, mais qui ne l’est pas. Elle revendique sa parenté avec le peuple de Dieu, mais détruit sa foi. C’est l’utilisation de l’intellect au sujet de la vérité divine, construisant des systèmes erronés d’après de fausses interprétations de la Parole de Dieu.

Il serait intéressant de retracer l’histoire de l’hérésie parmi le peuple de Dieu. Elle est toujours venue en s’appuyant sur la vérité divine et en y greffant quelque chose de faux. C’est ce qui fait la différence entre le règne d’Ammon et celui de Jabin. Celui-ci vient de l’extérieur introduire sa philosophie, alors qu’Ammon se sert de la vérité pour enseigner l’erreur. Il ne nie pas la révélation, ni l’explique, mais à partir de termes ou de certaines doctrines bibliques, il bâtit un système qui finit par être absolument anti-scripturaire. C’est l’hérésie.

Ceux qui connaissent l’histoire des fausses doctrines, savent comment le gnosticisme, entre autres hérésies, a surgi très tôt dans l’histoire de l’Église, et s’est répandu jusqu’à envelopper presque toute l’Église professante. Ce système philosophique a utilisé des noms divins, et la vérité divine, mais a anéanti le pouvoir de la vérité en faisant usage de celle-ci sans la puissance et l’aide du Saint Esprit, et sans la soumission à la Parole de Dieu. Il est frappant de constater que ce système gnostique soit toujours d’actualité, et que ses enseignements soient, dans une certaine mesure, répandus en Europe. Ce n’est que l’une des nombreuses formes d’hérésie qui est suggérée par cette invasion ammonite.

L’invasion a lieu à l’Est d’Israël, qui est son côté terrestre. Les hauteurs sont plus sûres, mais il faut traverser le Jourdain pour s’y trouver, il faut être associés à Christ dans sa mort et dans sa résurrection. Si nous y sommes en réalité et non pas formellement, la puissance du mal ne peut nous toucher.

La puissance de la fausse doctrine est inimaginable. L’état de la chrétienté envahie par les hérésies est consternant. Elles sont dirigées par des Ammonites, des gens qui ont le nom de chrétien, qui utilisent le langage chrétien, qui parlent avec la Bible en main. Les Ammonites ne sont pas morts à l’heure actuelle : ce sont tous ceux qui, tout en faisant profession de christianisme, utilisent la Parole de Dieu pour servir Satan au lieu de Christ. Cet état de chose est dû non seulement aux attaques venant de l’extérieur, mais aussi à celles venant de l’intérieur, de la profession qui veut reprendre à la foi son ancien territoire ammonite.

La puissance de la fausse doctrine domine toute la partie orientale. Tous sont sous sa domination en Galaad, et à l’est du Jourdain ; elle s’est aussi introduite dans le pays lui-même et a assailli les forteresses de Benjamin, de Juda et d’Éphraïm, qui représentent le cœur et les remparts de l’héritage de Dieu. Il y a eu des moments dans l’histoire de l’Église où une hérésie, comme l’arianisme qui niait la divinité de Christ, s’est tellement propagée dans l’église professante, que les témoins de Christ, comme Athanase, le grand défenseur de la vérité quant à la Personne de notre Seigneur, étaient bannis. De fait, l’empereur Constantin était lui-même un Arien, et la multitude ne faisait que suivre leur leader. Telle est donc la puissance de la fausse doctrine qui envahit le peuple de Dieu par la profession.

 

10.3  La repentance du peuple et la promesse d’une délivrance

L’oppression est si intense que, grâce à Dieu, les fils d’Israël finissent par crier à Dieu, confessant que leur éloignement avait conduit à cet état de choses. Tant que la cause qui a conduit à l’hérésie n’est pas confessée, il n’y aura aucune puissance pour la combattre. Pourquoi la fausse doctrine s’introduit-elle parmi le peuple de Dieu et le tient sous sa puissance ? Si Christ occupait la place qu’Il devrait occuper dans nos cœurs, et s’Il régnait vraiment sur l’Église, l’hérésie pourrait-elle s’introduire sur les lieux élevés de l’héritage de Dieu ? Non, c’est impossible. La profession trouve l’occasion d’introduire de mauvaises doctrines lorsque le cœur se refroidit, et que notre vigilance se relâche. Il est effarant de réaliser combien ce mal s’est propagé dans l’Église aujourd’hui.

Il y a confession, mais Dieu, qui est fidèle, doit leur montrer que s’éloigner de Lui est une chose, mais que c’en est une autre de revenir. Reconnaître la puissance de l’Ennemi après s’être éloigné est un premier pas, mais cela ne nous rapproche pas de Dieu. Après un long châtiment, nous pouvons prendre conscience de notre péché, nous tourner vers Dieu et le Lui confesser sincèrement. Mais pour autant, allons-nous retrouver tout ce que nous avons perdu d’un coup ? Non, il nous faut boire l’eau sur laquelle la poussière du veau d’or a été répandue, et récolter ce que nous avons semé. C’est ce qu’Israël a dû faire. Avec une ironie solennelle, Dieu leur dit : « Allez, et criez aux dieux que vous avez choisis ; eux, vous sauveront au temps de votre détresse ! » (v. 14).

La discipline a un effet béni : ils se tournent vers Dieu. Leur misère les oblige à se détourner de l’ennemi qui les avait séduits, et les conduit à la confession, au moment où le pouvoir de l’ennemi est le plus grand. Etant forcés d’avouer leur péché, ils secouent le joug, ôtent les faux dieux du milieu d’eux, servent l’Éternel et s’abandonnent entre ses mains : « Nous avons péché ; fais-nous selon tout ce qui sera bon à tes yeux ; seulement, nous te prions, délivre-nous ce jour-ci » (v. 15). Dieu ne peut rester impassible devant la misère, quand bien même elle est produite par le péché : « Son âme fut en peine de la misère d’Israël « (v. 16).

 

10.4  Jephté, le huitième juge

Chaque fois qu’il y a une vraie repentance, Dieu ne laissera pas son peuple ; Il le délivrera, au moins partiellement.

Cela nous conduit à considérer la vie de celui qui va délivrer le peuple de Dieu de cette hérésie. Comme Thola, il est méprisé et rejeté. Hormis certaines choses dans la vie de Jephté, celui-ci est un type du Seigneur en plusieurs circonstances. Ses frères le rejettent, ils ne voulaient rien avoir affaire avec lui, ils en avaient honte, et lui n’avait pas d’apparence pour se faire désirer. Jephté nous rappelle Celui qui a été rejeté par ses frères, comme Joseph, autrefois, et comme David plus tard, quand il fut méprisé par ses frères auxquels il apportait un message d’amour, sur le champ de bataille. Ainsi rejeté, Jephté doit quitter son pays. Dans un pays lointain, il rassemble autour de lui ceux qui, comme lui, sont méprisés, les hommes légers, comme ceux qui sont en compagnie de David dans la caverne d’Adullam (1 Sam. 22 : 1-2). C’est avec hésitation que nous disons que Jephté est un type du Seigneur, car il y avait une raison morale pour que Jephté soit rejeté par ses frères – il était « fils d’une femme étrangère » - alors que le Fils de Dieu était pur et sans tache. En gardant cela à l’esprit, son rejet évoque néanmoins Celui qui était « séparé de ses frères ».

 

10.4.1    La victoire sur Ammon

Le seul qui peut donc libérer le peuple de Dieu de la puissance du mal et de la fausse doctrine, est celui qui a lui-même été rejeté par ses frères ; Christ seul a la puissance de délivrer. Le nom même de Jephté est très frappant, il signifie celui qui ouvre, et suggère celui qui nous ouvre la Parole de Dieu. Comment pouvons-nous être délivrés de la fausse doctrine ? C’est quand la Parole de Dieu nous est ouverte, et que la vérité nous illumine. Nos cœurs étant ouverts à son action sur nous, notre œil étant ouvert pour voir les merveilles de la loi de Dieu, la puissance de l’erreur s’enfuira.

Aucun détail stratégique n’est donné sur ce conflit avec Ammon, car la simple lecture de la Bible suffit pour remporter la victoire. Jephté va vers les fils d’Ammon et leur lit, pour ainsi dire, un chapitre de l’Ecriture relatant l’histoire des voies de Dieu, où l’on voit comment Dieu avait renversé Sihon, roi des Amoréens, et avait introduit son peuple dans cet héritage qu’Ammon leur réclamait maintenant. Pendant 300 ans, les fils d’Israël avaient joui de cet héritage de Dieu, sans conflits avec Ammon qui avait été contraint de reconnaître leurs droits. Jephté prend clairement parti contre eux en leur ouvrant cette Ecriture.

Pour agir contre la fausse doctrine, il faut lui opposer la vérité. Si nous sommes nourris de la Parole de Dieu, nous pourrons l’ouvrir à un hérétique, qu’il ait ou non une Bible en main. Si notre cœur a été ouvert par l’Esprit de Dieu à sa vérité, nous pouvons faire face à celui qui détient une mauvaise doctrine, et le vaincre par la puissance de cette Parole.

Sans anticiper, l’alliance que contracte Jephté avec Galaad présage sa défaillance, même s’il a agi pour Dieu. Il dit à Galaad que si l’Éternel lui livrait l’ennemi, il serait leur chef. Il eut été bon que ces hommes fassent alliance pour être soumis à la Parole de Dieu et se laissent diriger par elle. Mais, comme Abimélec avant lui, Jephté a la volonté de régner. Il est, certes, bien supérieur à Abimélec qui n’avait aucune spiritualité, alors que lui se tient pour Dieu, mais il veut être chef et le sera. Il n’a pas accepté d’avoir été rejeté ; il considère cela comme un mauvais traitement au lieu d’y voir la main de Dieu. Il leur rappelle donc qu’ils l’avaient méprisé et que, s’il leur rend service, ils doivent le reconnaître et lui donner une place élevée. Ce désir d’être à la tête, est une des causes qui a conduit à de tristes défaillances.

Il rassemble le peuple et va à la rencontre d’Ammon, sur le terrain de la vérité. Il déploie simplement devant eux leur titre de propriété de cet héritage, leur montrant comment Dieu le leur avait offert et comment, en dépit de l’opposition de Sihon, d’Og et de toutes les puissances ennemies, ils en avaient pris possession. Puis, revendiquant pour Dieu leurs droits à l’héritage, il se moque d’Ammon en face, disant : « Ne possèdes-tu pas ce que ton dieu Kemosh t’a fait posséder ? » (Jug. 11 : 24). Il lance le défi, puis, dans ce conflit dont nous n’avons aucun détail, il remporte une victoire complète et absolue sur la puissance du mal.

Cela nous montre que la victoire sur l’hérésie s’obtient avec la Parole ouverte, avec une conscience et un cœur ouverts. Nous devons d’abord tracer une ligne de séparation entre la fausse doctrine et nous. Le peuple de Dieu ne peut se permettre un seul instant de faire alliance avec ceux qui détiennent une fausse doctrine. En revanche, supporter l’ignorance, et ceux qui n’arrivent pas à saisir pleinement la portée de la vérité divine, est la pensée de Dieu. Un chrétien peut ignorer les vérités prophétiques, ou l’étendue de la rédemption et de ses résultats, cela ne nous empêche pas d’avancer patiemment avec lui.

Mais si un homme remet en question la divinité du Fils de Dieu, niant la véritable humanité et l’incarnation de notre Seigneur, pouvons-nous le suivre ? S’il nie la valeur de l’œuvre expiatoire de Christ, ou tout ce qui touche aux fondements de notre très sainte foi, nous soumettre à lui un seul instant est déloyal envers Celui qui nous a rachetés. Comme Jephté, la seule chose à faire devant une fausse doctrine est de la renier entièrement, avec l’aide de la Parole de Dieu. C’est ainsi qu’il remporte la victoire, et conserve l’héritage qui avait été le leur pendant tant d’années.

 

10.4.2    La défaillance de Jephté et la guerre civile parmi le peuple

Jephté avait fait le vœu que si l’Éternel livrait les fils d’Ammon en sa main, il offrirait en holocauste à l’Éternel tout ce qui sortirait de sa maison. Nous n’approfondirons pas la question de ce qu’a fait Jephté avec sa fille. Malgré tout ce qui a été écrit sur le sujet, il semble que Jephté a fait simplement ce qui est écrit. On ne peut penser qu’un propre juste aux idées bien arrêtées de la trempe de Jephté qui, peu après, prenait les gués du Jourdain et, en toute bonne conscience, égorgeait 42 000 compatriotes, ait été un homme trop tendre pour faire à sa fille ce qu’il avait dit, à savoir de l’offrir en holocauste à l’Éternel. Il n’y a pas plus tyrannique que la conscience d’un propre juste, ni de souffrance plus grandes que celles infligées par une conscience légale.

Plusieurs considèrent que c’est la consécration symbolique de sa fille à la virginité perpétuelle. Mais il semble que le caractère entier de Jephté était tel qu’il était bien capable d’accomplir un tel vœu. On avance qu’il connaissait trop bien les Ecritures, et notamment l’histoire d’Abraham. Mais une conscience faussée pouvait facilement se méprendre sur le commandement de Dieu à Abraham, oubliant que Dieu avait arrêté sa main et qu’il ne l’avait pas sacrifié (Gen. 22 : 12) ; un propre juste égoïste, ayant toujours été irrité par le mépris de ses frères, pouvait bien s’en faire une fausse idée.

Il est triste de voir que ceux qui sont parfois les plus fidèles pour combattre l’hérésie, ne savent pas faire la distinction entre combattre le vrai hérétique, et détruire ce qui nous est le plus cher. L’expérience montre qu’une fermeté inébranlable avec l’Ennemi est souvent suivie d’une même fermeté avec nos frères. Le sacrifice de la fille de Jephté n’est-il pas suivi du massacre de ses frères ? Il semble que l’homme réduise toujours tout à néant ! L’épée de Jephté était tirée, et tout comme il avait tué les Ammonites, il tuerait sa fille, puisqu’il l’avait promis à Dieu, et il tuerait les hommes d’Éphraïm aux gués du Jourdain, car ils s’étaient dressés contre la vérité. La sévérité et la dureté de l’homme l’emportent hélas souvent sur une simple fidélité à Dieu, allant jusqu’à détruire ses propres frères. Ne devons-nous pas en tirer leçon pour nous-même ? Gardons-nous de cet esprit qui ne fait aucune distinction, qui ne discerne pas les âmes qui doivent être sauvées avec crainte, comme le dit l’épître de Jude (v. 23) ? Le peuple de Dieu a trop souvent été traité de la même façon que les ennemis de Dieu.

Il semble que la défaillance de Jephté consiste à utiliser brutalement l’Ecriture sans discernement. Pouvons-nous traiter quelqu’un dont le cœur est rempli d’amour pour Christ et qui désire Lui plaire, de la même manière que quelqu’un qui enseigne des blasphèmes, et des fausses doctrines sur la Personne du Seigneur ? Les Ammonites et les Éphraïmites sont-ils les mêmes pour qu’un même jugement leur soit infligé ? Certainement pas. L’Éphraïmite est un frère israélite, même s’il est prétentieux, même s’il traite les Galaadites de fugitifs d’Éphraïm, même s’il est jaloux de la victoire de Galaad.

Nous pouvons être amenés à devoir faire face à Éphraïm, mais certainement pas en leur prenant les gués du Jourdain, en les contraignant de dire shibboleth, et en éliminant ceux qui ne le prononcent pas assez bien. Shibboleth qui signifie un courant, ce qui divise, fait allusion à ce qui séparait Galaad d’Éphraïm ; c’était donc passer au fil de l’épée ceux d’Éphraïm qui ne pouvaient pas bien se prononcer sur ce qui divisait. Ce n’était plus de la fidélité, mais une destruction insensée. Avec Abimélec, la faillite du gouvernement de l’homme était liée à la recherche de sa propre grandeur, avec Jephté elle est liée à une conscience légaliste, marquée par la dureté et la sévérité. C’est la prétention de l’ascète qui se rend malheureux, et rend tout le monde malheureux autour de lui, surtout lorsqu’il se sert de l’Ecriture par laquelle il juge les hérétiques, et l’applique implacablement à ceux qui ne comprennent pas cela.

Dans l’histoire de l’Église, il y a eu beaucoup de Jephté. Nous sommes horrifiés en pensant aux persécutions du peuple de Dieu menées tant par les catholiques romains que par les protestants.

Si nous voulons exercer une autorité de la part de Dieu, il faut ne pas avoir une vue partielle de l’Ecriture, et ne pas avoir une conscience qui se plaît à faire des choses parce qu’elles sont pénibles.

Jephté semblait penser que Dieu voulait qu’il fasse ce qui lui était pénible, juste parce que c’était pénible. C’est pourquoi il pouvait sacrifier sa fille – ou la bannir de la maison, le principe est le même – puis, ayant goûté au sang, il pouvait tuer 42 000 de ses frères. N’est-il pas solennel que, dans l’histoire de l’Église, ceux qui ont vaincu les hérésies sont ceux qui ont ensuite croisé le fer avec leurs frères, et se sont battus au sujet de choses non vitales ? Aujourd’hui, si nous ne voulons pas être des Jephté, veillons à ne pas avoir une conscience maladive caractérisant l’âme sous la loi, qui presse le peuple de Dieu de questions qui ne sont pas vitales, et qui ne font que diviser les enfants de Dieu entre eux, sans les séparer de leurs ennemis.

Revenons au massacre des hommes d’Éphraïm. Le contraste avec l’attitude de Gédéon dans des circonstances similaires est frappant. L’effronterie d’Éphraïm était peut-être plus grande cette fois-ci, mais l’esprit dans lequel il y a été fait face, complètement différent ! Gédéon, en toute humilité, reconnaît les hommes d’Éphraïm non seulement comme des frères, mais comme plus excellents que lui-même. « Qu’ai-je fait en comparaison de vous « (8 : 2). Gédéon ne cherchait pas à être chef, et n’était pas atteint par leurs reproches. Il rejetait le moi, mais sans le sacrifier, comme si c’était agréable à Dieu.

Si Jephté avait été animé du même esprit que Gédéon, il aurait trouvé d’autres moyens que cette tuerie pour corriger les hommes d’Éphraïm. Sans plaider pour l’indifférence ou la faiblesse, il faut du discernement. C’est là que Jephté a failli, il se vengeait d’un affront personnel, ce n’était pas du zèle pour le Seigneur. C’est parce qu’Éphraïm les avait maltraités, menacés et insultés, que leur colère s’enflamma contre eux.

Éphraïm ne montre que les fruits mûrs d’un orgueil non jugé ; ils s’étaient déjà montrés mais n’avaient jamais été extirpés. C’est un orgueil cherchant une position et une dignité. Il justifie sa prééminence par son passé ou ses dons présents, mais ce n’est qu’orgueil, et volonté propre.

L’orgueil doit être brisé. Dieu ne pourra jamais rien en faire s’il n’est pas jugé ; tout témoignage fidèle mais basé sur l’orgueil sera détruit. Dieu peut patienter, comme dans le cas de Gédéon, ou se servir de la sévérité excessive de Jephté pour l’enseigner. Si Éphraïm avait appris ces leçons, la division du royaume sous Roboam n’aurait pas eu lieu. Il y a ainsi des leçons à apprendre et de Jephté et d’Éphraïm.

 

10.5  Les successeurs de Jephté

En contraste avec la défaillance de Jephté, la dernière partie du chapitre 12 présente le remède à cette triste condition. Comme nous l’avons déjà vu, la brièveté de la description des successeurs de Jephté indique que l’accent sera mis sur le côté de Dieu, plutôt que sur celui de l’homme.

10.5.1    Ibstan

Après la mort de Jephté, Ibtsan de Bethléem fut juge en Israël. La signification du nom Ibtsan est probablement pureté, venant d’une racine signifiant être blanc. La pureté est le remède à la dureté impitoyable qu’exerçait Jephté. La sagesse qui vient d’en haut est « premièrement pure, ensuite paisible » (Jac. 3 : 17). Nous parlons de la dureté de Jephté, sans oublier que l’infidélité du peuple est aussi condamnable. Mais la dureté de Jephté doit être reprise comme elle le mérite. Nous n’avons pas à tuer nos frères sans discernement. Mais nous ne pouvons pas non plus ignorer ce que nos frères détiennent, ce qu’ils font, s’ils sont soumis à Dieu ou non, sans quoi ce serait tomber dans le travers inverse. La sagesse qui vient d’en haut est premièrement pure, et il ne peut y avoir de paix sans la pureté. Sacrifier cela, c’est tout sacrifier.

Ibtsan, à la différence de Jephté, a 30 fils et 30 filles. C’est à nouveau un signe de croissance selon Dieu. Au lieu de tuer ses frères et sa fille unique, et mettre fin à tout espoir de perpétuer les principes qu’il défend, ce juge rassemble et peut ainsi multiplier sa famille. Il peut propager les principes de pureté auxquels il tient. Rien de plus n’est dit de son règne. Soyons certains que si la pureté règne, il sera fait face à l’orgueil d’Éphraïm d’une façon ou d’une autre. Il ne lui sera pas permis de se mettre à la tête pour créer une division parmi le peuple de Dieu ; il ne sera pas traité avec indifférence.

 

10.5.2    Elon

Elon le Zabulonite juge Israël pendant dix ans. Il n’est rien dit de plus sinon qu’il a jugé le peuple. Zabulon évoque la communion avec Dieu. Elon (le fort) montre qu’après la pureté vient la force, et en ce sens la prospérité.

Il doit y avoir de la force dans le gouvernement du peuple de Dieu. Ce serait pure folie de l’ignorer. Plaider pour l’insouciance ou l’infidélité aux principes divins serait un grand mal. L’ordre de la maison de Dieu doit être maintenu d’une main ferme. Si nous sommes indifférents à la volonté de Dieu, c’est la fin de tout témoignage à Christ.

Le nombre ne peut entrer en ligne de compte. Si nous n’arrivons pas à nous plier à l’autorité du Christ, de peur de perdre quelqu’un ou de ne pas en gagner, nous n’agissons ni selon la pureté, ni par la force divine. Elle est solennelle la responsabilité de ceux qui entraverait les frères qui s’efforcent de maintenir l’ordre de Dieu.

Il y a un grand besoin de soins pastoraux parmi les saints. Ceux qui ont besoin d’être repris et corrigés, devraient l’être sans retard. « Nous vous y exhortons, frères : avertissez les déréglés, consolez ceux qui sont découragés, venez en aide aux faibles, soyez patients envers tous » (1 Thes. 5 : 14). Ce sont là des provisions complètes pour des soins pastoraux fermes mais tendres. Un mal non repris se répandra jusqu’à devoir être jugé avec une vigueur beaucoup plus grande que s’il l’avait été fidèlement dès le début.

De plus, il ne peut y avoir de gouvernement ferme dans la maison de Dieu s’il n’y a pas le plus grand soin pour la réception des enfants de Dieu à la communion. S’il y a de la faiblesse ici, elle sera partout. Tout doit se faire dans l’amour, mais aussi selon la vérité. Des problèmes surviendront inévitablement si les soins à la réception et les soins pastoraux sont négligés. Que les expériences passées nous servent de leçon pour l’avenir.

 

10.5.3    Abdon

Abdon (servir), est le fils d’Hillel (louange), le Pirhathonite : cela nous parle du service qui émane d’un cœur rempli de louanges. Il habite un lieu qui parle de rédemption et de délivrance. Ce n’est pas un Jephté qui n’avait qu’une règle pour mesurer ceux du peuple à retrancher s’ils n’arrivaient pas à la hauteur. Abdon est disposé à servir par l’amour qui jaillit d’un cœur rempli de louanges. Là où le peuple de Dieu demeure dans Sa maison et déborde de louanges, le service envers les frères s’accomplira, et la maison de Dieu sera gouvernée non par la violence, mais dans la puissance et la force de la pureté. C’est cela et non la négligence qui est l’antidote à la dureté de Jephté. Puissions-nous retenir que pour réagir contre la sévérité il faut ces trois choses : pureté, force et service. Tenons fermement à la pureté de la vérité, soyons fermes là où elle est remise en question, ayons un cœur rempli de louanges, et nous verrons qu’il n’est pas nécessaire d’être des Jephté pour tenir ferme pour Dieu. Usons « des armes de justice de la main droite et de la main gauche » (2 Cor. 6 : 7), nous serons alors gardés des erreurs de toutes parts. Que le Seigneur imprime sur nos cœurs cette leçon dont nous avons tant besoin.

 

11 Samson et les Philistins – Le nazaréat (Jug. 13 à 16)

La dernière biographie du livre des Juges, si nous pouvons l’appeler ainsi, est l’une des plus intéressantes. C’est l’histoire de Samson dont les exploits extraordinaires ont tant de charme pour les enfants. Il semble qu’au début Dieu agisse par le moyen de Samson, comme si le juge agissait lui-même. Mais tout est individuel, sans retombée collective.

Le livre des Juges montre comment un témoignage collectif devait être maintenu par le peuple de Dieu, et combien il a failli en cela. Le récit de Samson présente la dernière tentative pour y arriver, mais cette oeuvre est celle d’un individu et non de tout le peuple. Quel déclin de la puissance spirituelle du peuple ! Ce passage montre la dernière des délivrances qui n’en est pas véritablement une, car Samson lui-même a besoin d’être délivré et a fini par mourir dans les mains de l’ennemi.

Ainsi, le déclin est tel que le sauveur que Dieu suscite a besoin d’être lui-même sauvé. Les instruments que Dieu utilise pour aider son peuple sont à l’image de l’état général du peuple. L’histoire de Samson est le reflet de la nation entière.

La fidélité collective n’est plus, il ne reste guère que la fidélité individuelle. Or s’il en est ainsi dans les affaires collectives, c’est la ruine. Certains disent que de nos jours le témoignage est individuel, même en ce qui concerne les principes collectifs du peuple de Dieu ! Comment maintenir, comme individu, ce qui est collectif ! Lorsqu’il est question de témoignage collectif, qu’entend-on par témoignage individuel, si ce n’est la ruine de ce que Dieu voulait voir maintenu ? Abandonner le témoignage collectif, c’est sacrifier la vérité. Ne renonçons jamais à la responsabilité de maintenir un témoignage à l’unité. Retenons-le fermement quand bien même Satan tenterait de le réduire en pièces, jusqu’à ce que seuls deux ou trois soient laissés pour maintenir un témoignage collectif pour Dieu. Ce sont les sujets importants auxquels nous devons faire face. À la fin de l’histoire de ces délivrances, qu’il est triste de les voir se réduire dans les mains d’un seul homme.

 

11.1  Les nouveaux manquements du peuple de Dieu

Mais prenons le récit dans l’ordre, jusqu’au chapitre seize, pour voir les différentes étapes de cette histoire, et en tirer les leçons, autant que possible.

C’est toujours le même scénario : la faillite du peuple entraîne l’esclavage sous la main de leurs ennemis. Dieu ne permet jamais à l’ennemi de nous dominer, sauf quand Il l’utilise dans son gouvernement, en raison de nos propres défaillances ou de notre éloignement de Lui. Le croyant le plus faible et le plus ignorant sera gardé des ruses et de la puissance de l’Ennemi aussi longtemps que son cœur est vrai, fidèle envers Christ, et que sa conscience est ouverte à la lumière de la Parole et de l’Esprit de Dieu. Que cela est réconfortant !

Satan aime nous voir sous-estimer sa puissance. Il cherche à se faire oublier jusqu’à s’effacer de nos esprits. Comme père du mensonge, il est plus actif quand on y pense le moins. Que pourrions-nous faire face à la puissance et à la malice de Satan, si nous étions livrés à nous-mêmes ?

Face au terrible courant de la mondanité et de la religion charnelle qui voudrait emporter les saints loin de Dieu comme un puissant raz de marée, comment pourrions-nous résister un instant ? Quel réconfort de savoir que le saint le plus faible et le moins instruit, ou le plus jeune enfant de Dieu, est parfaitement à l’abri de tout cela, tant qu’il jouit de la simplicité de la communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. Tant que l’âme demeure tranquillement aux pieds de Jésus, écoutant sa Parole – et là, on ne peut que l’écouter et croître – Satan, malgré toute sa puissance et sa malice, ne pourra réussir à l’arracher de là.

Cela ne fait que souligner la culpabilité de l’Église aujourd’hui. En voyant, autour de nous et parmi nous, la tendance à s’éloigner et la puissance subtile que l’Ennemi a sur le peuple de Dieu et quand nous regardons l’état de l’Église entière, que penser de ce qui a conduit à cet état ? Sachons que le peuple de Dieu est le seul responsable. Ce n’est pas dû à une défaillance de la grâce de Dieu ni de son pouvoir tout-puissant ; Il nous aurait tenus fermes, et gardés comme la prunelle de son œil, si nous L’avions laissé faire.

Nous devrions nous humilier et confesser notre culpabilité en constatant que le peuple de Dieu est captif de l’Ennemi. Nous ne devons jeter la pierre à personne, mais prendre chacun notre part de la faillite générale qui a conduit au chaos actuel qui caractérise le peuple de Dieu. Où est passé le seul troupeau de Christ qui écoute sa voix, conduit par un seul berger, dans la puissance de l’Esprit Saint ? Il a disparu, il est disséminé un peu partout.

Notre éloignement individuel en est responsable. Et plus nos affections envers Christ seront refroidies, plus notre foi faiblira, plus notre œil sera fixé sur autre chose que Christ, plus nous contribuerons à disperser le peuple de Dieu.

Chacun exerce une influence. Le plus simple croyant contribue soit à affermir le lien qui lie pratiquement le corps à la Tête, soit à l’affaiblir. La Parole de Dieu nous dit : « Christ... est mort pour tous afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité » (2 Cor. 5 : 15). Nous sommes au Seigneur, et en ce sens nous sommes aussi à son peuple. Nous avons tous une responsabilité dans la maison de Dieu ; chaque instant que nous vivons est l’occasion de contribuer soit à rapprocher les enfants de Dieu plus près de Lui, soit à les disperser plus qu’ils ne le sont. Le secret pour être un lien utile, c’est une vie de communion avec Dieu, c’est demeurer en Lui. Si c’est le cas, nous resterons ensemble, nous affermirons « ce qui reste, qui est près de mourir », comme il est dit à Sardes (Apoc. 3 : 2).

Même du temps des apôtres, il n’y avait pas d’occasions si opportunes pour que s’expriment la foi, la fidélité et le zèle individuels. Aujourd’hui, dans l’Église, il y a une part de fardeaux à porter pour celle pour laquelle Christ est mort. Qui ne chercherait à connaître la pensée de Dieu concernant l’Église, afin d’entrer dans ses pensées, et porter vaillamment, par la foi, sa part de souffrance aussi bien au service de l’Église qu’au service de Christ qui est mort pour elle ?

Comme aux derniers jours des juges, tout se dégrade. Mais la vie de Samson a été écrite pour que nous prenions garde à ne pas plonger dans le même bourbier de défaillances. Dieu nous décrit les manquements de son peuple comme avertissement, et non pour que nous marchions dans le même sentier. Il nous donne des exemples d’incrédulité, tout comme des exemples pour la foi. Prenons courage, la Parole et l’Esprit de Dieu demeurent au milieu de nous, et la grâce est aussi fraîche aujourd’hui qu’elle l’était à la Pentecôte. Il faut seulement une foi vivante pour s’attacher à Lui, et un esprit d’obéissance pour suivre à tout prix le chemin qu’Il nous a tracé.

Nous n’apprécions pas la noblesse de la vie chrétienne, ni la dignité de notre place dans l’Église à leur juste valeur. Nous les discernons un peu, mais sans en réaliser la grandeur. C’est une place dangereuse, à cause de l’honneur qui y est lié, mais que nous devrions être heureux d’occuper.

C’était une digression, mais elle était nécessaire à cause de la place que la vie de Samson occupe ici. C’est la fin, et nous ressentons que nous devons recevoir cette dernière leçon comme avertissement, pour en tirer vraiment profit. Revenons maintenant à l’ennemi.

 

11.2  Le pays livré en la main des Philistins

Les Philistins sont les ennemis en la main desquels l’Éternel vend son peuple. Nous les avons déjà vus plusieurs fois. Shamgar a remporté une victoire notoire sur eux, juste avec un aiguillon à bœuf. La signification du nom d’Abimélec nous a rappelé ce qu’ils sont ; mais jusqu’à présent, ils n’ont jamais occupé toute la scène. Voici brièvement ce que l’Ecriture semble relever du caractère de ces Philistins.

En premier lieu, ce peuple donne son nom au pays entier. Il est appelé Palestine qui vient de Philistins. Notons que Dieu n’utilise jamais le nom Palestine, en parlant de l’héritage de son peuple ; ce nom désigne toujours un pays hostile. La foi la regarde comme une terre ennemie jusqu’à ce qu’elle soit possédée par le peuple de Dieu. Ainsi dans son chant de triomphe à la mer Rouge, Moïse dit : « L’effroi a saisi les habitants de la Philistie » (Ex. 15 : 14). Ésaïe prononce un malheur sur elle, comme l’un des pays hostiles, aux côtés de Moab et d’autres. Le Psalmiste fait de même : Edom, Moab, et la Philistie sont mentionnées ensemble (Ps. 60).

C’est donc le pays des Philistins, mais ils n’y avaient aucun droit. C’était des intrus, ou, comme leur nom l’indique, des « voyageurs », un peuple sans droit de cité. Ils s’étaient installés le long de la mer, où un chemin facile permettait d’entrer dans le pays. Dieu avait clairement refusé de conduire son peuple par ce chemin, parce qu’il devait être formé à la guerre, et parce qu’il devait être un exemple pour tous les temps que le seul vrai chemin pour entrer dans l’héritage de Dieu passe par la mort et la résurrection.

Le Jourdain parle de la mort et de la résurrection de Christ. Tous ceux qui entrent dans leur héritage de cette façon font partie de son peuple, tandis que ceux qui s’y trouvent, se réclamant du peuple de Dieu, sans avoir vraiment été identifiés avec Christ dans sa mort et sa résurrection, sont des intrus sur le territoire de Dieu. Dans la chrétienté, chacun peut porter le nom de chrétien, et revendiquer toutes sortes de dignités dans l’Église, sans être un vrai chrétien pour autant. Comment discerner ceux qui appartiennent à Christ ? Une chose détermine si nous sommes de droit dans notre héritage : y être entrés par une foi vivante en Christ, en ayant été « identifiés avec lui dans la ressemblance de sa mort et dans la ressemblance de sa résurrection » (Rom. 6 : 5), de sorte que nous sommes pratiquement une nouvelle création, et que nous sommes « vivants à Dieu dans le Christ Jésus » (v. 11) ; le vieil homme a été mis de côté et un nouvel homme est venu à l’existence – un homme vivant dans son héritage, d’une vie de résurrection marquée par une joie éternelle qui ne passera jamais.

Mais ce n’est pas le cas du Philistin. Il s’y introduit par le chemin facile de la profession, voire le chemin du monde. Il ne connaît pas la servitude insupportable de l’Égypte, il n’a aucun sens de la colère divine contre le péché qui nécessite un sacrifice divin. Il n’a pas conscience du Substitut, qui, par amour pour lui, est descendu dans les eaux de la mort et du jugement. Il n’a pas vu les « vagues et les flots » de la mer Rouge ou du Jourdain passer sur ce Substitut, afin de lui ouvrir un chemin pour échapper à la servitude et entrer dans un héritage divin. Non, le Philistin est étranger à tout cela, il emprunte un chemin « court et facile », celui de la nature.

Les Philistins correspondent donc à l’église mondaine liée aux choses terrestres. Dans les épîtres aux sept églises (Apoc. 2 et 3), Pergame représente l’Église associée au monde dont est issue Thyatire, ce grand système mondain qui usurpe la place de Christ. Comme Pergame, caractérisée par ceux qui tenaient la doctrine des Nicolaïtes, Rome représente aussi ce système. Le principe de succession, le cléricalisme, une classe sacerdotale, et le règne de l’homme au lieu du règne de Christ, tout cela caractérise une église mondaine.

À cet état de choses, sont associés la loi, qui fait appel à l’homme naturel, le ritualisme et les ordonnances, « qui ont bien une apparence de sagesse en dévotion volontaire et en humilité » (Col. 2 : 23), mais qui ne sont en fait que l’enflure d’orgueil de la créature. Tout vrai culte met l’homme de côté. Celui-ci disparaît pour ainsi dire, car le parfum de ce qu’est Christ est tellement devant lui qu’il efface toute pensée de lui-même.

Le ritualisme est exactement le contraire. Il comprend des ordonnances charnelles, un culte charnel, tout ce qui flatte l’œil, l’oreille et les sens de l’homme naturel, tout ce qui excite les émotions, en fait, tout ce qui plaît à l’être humain.

Le magnifique rituel de Rome avec ses vêtements, son encens, sa musique, ses cortèges magnifiques, ses processions, ses lieux de culte imposants, sa longue ligne hiérarchique appréciée du monde, ne nécessite ni sens spirituel, ni conduite de l’Esprit par la Parole, ni nouvelle naissance ; chacun peut apprécier ce ritualisme. Ainsi, les Philistins évoquent le monde qui s’introduit dans l’Église et en prend possession par son légalisme, son ritualisme, et sa succession apostolique qui oppriment le peuple de Dieu. L’apôtre appelle cela de « faibles et misérables principes », auxquels nous risquons toujours de vouloir « encore être de nouveau asservis » (Gal. 4 : 9).

Une autre chose est à noter. Même s’ils ne prennent qu’une très petite partie du pays - la Philistie étant l’étroite bande au sud-ouest, le long de la plaine de Sharon, près de l’Égypte -, les Philistins oppriment pourtant tout le peuple de Dieu. Cette tyrannie est particulièrement exercée sur ceux qui auraient dû être les conducteurs parmi le peuple de Dieu. En effet, Juda, qui représente la louange et le gouvernement parmi le peuple de Dieu, était particulièrement exposé aux incursions des Philistins qui se répandaient sur tout leur territoire, les empêchant d’exercer leur privilège et de jouir de leur héritage.

 

11.3  Celui que Dieu va susciter pour délivrer le peuple des Philistins - un Nazaréen

Quel est maintenant le caractère de la personne que Dieu va faire se lever pour délivrer de ces Philistins ? Comme Gédéon en son temps, son caractère devra correspondre au besoin du moment. Dans le cas de Samson il y a deux choses distinctes : ce qu’il était et ce que Dieu voulait qu’il soit. Dans le premier cas, l’histoire donne de nombreux avertissements, et dans le second, nous voyons par qui et comment le peuple de Dieu peut être délivré de la puissance des Philistins, de la puissance d’une religion purement charnelle.

Il est très intéressant de voir où remonte son histoire. Dieu travaille déjà dans ses parents, pas seulement dans l’individu comme pour Gédéon. Il choisit une femme inconnue, comme pour mettre à nouveau l’accent sur la faiblesse. Elle est dans une position de soumission trop insignifiante, du moins aux yeux du monde, pour que son nom soit mentionné. Pensons-nous au nom de la mère de Samson ? Le nom de la mère de Moïse se trouve dans l’Ecriture, mais nous l’oublions vite car il est éclipsé par son fils. Ici, l’Esprit de Dieu ne nous donne même pas le nom de la femme.

Mais elle connaît un autre opprobre, commun à de nombreuses femmes que Dieu a suscitées pour être un canal de bénédiction pour son peuple : elle est stérile. Comme Sara, comme Anne, comme Rebecca, il n’y a pas l’énergie et la force de la nature ; elle est totalement impuissante face à cette épreuve douloureuse. Cette affliction – car bien qu’il n’en soit pas parlé, nous connaissons le désir intense de ces femmes israélites et leur grand opprobre – a certainement produit dans son âme des exercices qui la préparaient à ce que Dieu lui révèle sa volonté. Comme pour Anne, si exercée devant Dieu au sujet de son besoin, Il va répondre à la demande de son âme.

Que peut-il y avoir de plus faible qu’une pauvre femme désarmée et inconnue ? L’impuissance est si grande, si générale, si vague, qu’elle ne peut même pas être nommée. Mais quand elle entend la Parole de Dieu, elle a l’assurance que la force et la vie vont surgir de celle qui n’a pas de nom et dont la faiblesse fait appel à Dieu. Le sentiment de notre totale impuissance ne fait jamais appel à Dieu sans qu’Il s’en serve. Il doit briser notre énergie et notre vigueur naturelles, pour nous faire réaliser notre impuissance et notre inutilité et les utiliser pour sa gloire.

C’est vers la mère de Samson et non vers Manoah, son mari, que va le messager. Il annonce le libérateur qui va délivrer Israël du piège le plus subtil et le plus dangereux qui puisse les enserrer, celui de la Philistie. Il insiste sur le fait qu’il sera Nazaréen, s’abstenant de vin, de boisson forte, du raisin et de tout ce qui vient de la vigne. La mère elle-même devra se garder de tout cela, et dès la naissance de l’enfant, le rasoir ne devra pas passer sur sa tête. Il devait être un Nazaréen de Dieu, comme Samuel ou Jean le Baptiseur, et cela, dès le ventre de sa mère.

En Nombres 6, nous trouvons clairement ce qu’est le Nazaréat. Ce mot signifie « séparation ». Qu’il est tranchant ce terme « séparation », combien il fait mal et paraît être le fait d’un propre juste ! Mais Dieu dit qu’il ne peut y avoir une victoire pour son peuple, que dans le respect du nazaréat, la séparation des choses mêmes que le monde estime absolument nécessaires.

Le vin et le raisin sont une figure de la joie humaine. Le temps des vendanges est un moment de joie qui a toujours été associé aux fêtes, aux chants et à l’allégresse. Au Psaume 4, le psalmiste dit, par la foi : « Tu as mis de la joie dans mon cœur, plus qu’au temps où leur froment et leur moût ont été abondants » (v. 7). Il compare simplement les plus grandes joies de la nature à une joie plus grande et plus profonde. Le vin est comme le couronnement de l’année. Quand la vendange arrive, lorsque tout est mûr, tout est prêt pour en jouir ; le temps du labeur va prendre fin, et le temps du repos et du plaisir approche. Le travailleur pourra bientôt se reposer de tous ses travaux et profiter de la saison des vendanges.

Le vin parle aussi de force humaine. C’est un stimulant : « fortifié par le vin » est une expression courante. Il est dit au Psaume 78 : « Le Seigneur s’éveilla... comme un homme puissant qui, animé par le vin, pousse des cris » (v. 65). La force qui en résulte est, hélas, fictive et éphémère.

Notre joie provient d’une source plus pure que la cuve du vin ; notre force provient d’une source plus puissante que celle qui stimule seulement la nature. Dans l’Ecriture, le vin est une image de tout ce qui stimule et excite la chair. On peut ne pas boire de vin, et être sous son pouvoir, spirituellement parlant. Tout ce qui ne procure qu’énergie, stimulation, ou excitation charnelles dans les choses de Dieu, doit être rejeté.

Dieu ne peut pas utiliser la chair. On entend parfois qu’avoir un fort caractère est une bonne chose, de même que de parler franchement, si c’est utilisé pour Dieu. Cela signifie que Dieu pourrait se servir du vin, de l’énergie naturelle de ce monde, pour Ses intérêts. Non, Il ne peut pas accepter que la chair serve ses intérêts ou ceux de l’Ennemi. Dans la grande majorité des cas, un discours franc, comme on dit, n’est que de l’orgueil, l’absence de maîtrise de soi, l’indulgence de la chair. La franchise du discours importe peu, s’il n’est pas dans la puissance de l’Esprit de Dieu. Sans l’Esprit, un discours franc est un discours charnel et une volonté forte est une volonté charnelle. Ce n’est que l’énergie de la nature et non le nazaréat.

Le nazaréat implique l’absence de tout cela. Si j’ai une forte volonté, elle doit être brisée, car elle ne sera jamais d’aucune utilité. Certains disent que Saul de Tarse avait, de nature, un fort caractère, qui explique sa vie après sa conversion. Si c’était le cas, la grâce de Dieu serait une fiction. S’il n’avait utilisé que l’énergie qu’il avait eu pour le service de la loi et du judaïsme, en l’employant pour le christianisme, il n’y aurait pas de miracle de la grâce.

Quel était le miracle de la grâce ? Celui qui connait l’histoire de Paul dirait vite qu’il a tourné sa forte volonté et son intelligence au service de Dieu. Non ! C’était un beau vase de terre, humainement puissant, mais Dieu l’a transpercé d’une écharde dans la chair, afin qu’il n’ait aucune puissance en lui-même. En effet, la parole que Christ lui a adressée n’était pas : Ma force s’accomplit dans ta force, si elle va de pair avec la mienne, mais « ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (2 Cor. 12 : 9). C’est la leçon du nazaréen ; elle est difficile à apprendre, et elle sonde notre coeur.

Après l’abstention de vin vient la mention des cheveux longs qui ne parlent ni de fierté ni de vigueur naturelle, mais de « déshonneur » pour l’homme. La « longue chevelure » évoque la place de soumission et de dépendance de la femme. « C’est une gloire pour elle » (1 Cor. 11 : 14-15).

Enfin, le contact avec la mort était absolument interdit. Celui qui touchait un cadavre perdait son nazaréat. Dieu est le « Dieu vivant », et tout ce qui n’est pas de lui souille. Bien des choses qui semblent bonnes à première vue relèvent de la mort.

Ce chapitre 13 insiste donc sur la vérité que celui qui libère le peuple de l’emprise des Philistins se doit d’être un Nazaréen. Il doit éviter l’énergie de la vieille nature et prendre une position de faiblesse et d’impuissance totale ; en lui ne doit se trouver que l’énergie de la vie divine. Ainsi, pour être délivrés d’une religion charnelle, nous devons être séparés comme de vrais nazaréens. En réalisant notre impuissance et notre faiblesse, et en refusant l’aide et la force de la vieille nature, nous devons laisser la puissance de Christ se manifester en nous. Combien nous devrions nous réjouir à cette pensée ! Sommes-nous prêts à être utilisés par Dieu comme nazaréens, en connaissant l’humiliation de la chair et de la nature, afin que toute l’excellence soit celle de Christ, et non la nôtre ?

Etre un nazaréen devait être un acte volontaire, il fallait le vouloir : « Si un homme ou une femme se consacre en faisant vœu de nazaréat… « (Nom. 6 : 2). Pour nous, chrétiens, cette force nous est donnée par la lecture de la Parole et l’action du Saint Esprit. Nos cœurs seront ainsi occupés du seul vrai Nazaréen qui ait jamais foulé cette terre ; son nazaréat avait un aspect positif qui l’associait à Dieu, au lieu de le séparer du monde seulement. De fait, Il n’était pas littéralement un Nazaréen comme Jean le Baptiseur qui s’abstenait de toutes sortes de choses : « Jean est venu ne mangeant ni ne buvant » (Matt. 11 : 18), ce qui lui avait valu la remarque d’avoir un démon. Le Fils de l’homme est venu, mangeant et buvant, comme Homme au milieu des hommes. Il n’avait pas besoin de séparation extérieure pour manifester sa justice. Son âme sainte était complètement séparée et consacrée à son Père, et il n’avait besoin de rien pour en rendre un témoignage extérieur. Nul ne pouvait lier son saint nom avec la pensée du péché. Il était tellement absorbé par la volonté de son Père, que le monde lui-même ne pouvait Le qualifier que de ce qu’il était vraiment. Parler de Lui comme un mangeur et un buveur était un mensonge tellement évident que ce n’était même pas sujet à débat. Qui plus est, Il prenait Lui-même ce reproche à son compte. Oui, Il était vraiment l’ami des pécheurs ; il s’identifiait à cette expression. Mais, s’il est l’ami des pécheurs, c’est pour les délivrer de leurs péchés. S’il s’identifie en quelque manière au bas état autour de lui, c’est en grâce, venant prendre sur Lui la conséquence de l’éloignement de l’homme, afin d’associer son peuple à Lui-même dans un vrai nazaréat pour Dieu !

 

11.4  L’offrande apportée par Manoah et sa femme.

Manoah avait prié pour que l’Éternel envoie le messager une seconde fois, et sa prière est exaucée, en grâce. Mais l’ange vient vers la femme de Manoah - il vient toujours vers la faiblesse - puis elle appelle son mari. Manoah désire entendre encore le message, mais il ne reçoit rien de plus que ce que sa femme avait déjà entendu, à savoir des instructions simples quant au nazaréat. Alors, il se dépêche de faire un festin à caractère religieux. Il va amener ce messager à son niveau, bien qu’il l’appelle un homme de Dieu. Offrant son hospitalité, Manoah veut savoir le nom de son hôte, pour lui rendre hommage quand toutes ces choses seront accomplies.

Le nom que le messager lui cache - « Il est merveilleux » - suggère le Nom au-dessus de tout nom. Ne s’applique-t-il pas aussi au nazaréat dont nous avons parlé ? « On appellera son nom : Merveilleux » (Es. 9 : 6). Le nom de qui ? Le nom du seul Nazaréen qui ait jamais vécu. C’est comme si, partant du nazaréat extérieur dont il venait de leur parler, le messager dirigeait les regards vers Celui qui est « Merveilleux, Conseiller, Dieu fort, Père du siècle, Prince de Paix « (Es. 9). Il met Christ devant eux puis, y insiste encore, en montant dans la flamme de l’autel qui s’élevait vers les cieux.

Ce qui était un simple repas hospitalier, à caractère religieux certes, devient un sacrifice offert sur le rocher. Ce rocher évoque le Rocher des siècles, le seul Rocher, la seule chose ferme dans un monde instable. Ce Roc, Jésus Christ, est la seule base de communion avec Dieu. Aussi, le festin n’est pas étalé sur la table de Manoah, mais sur le Rocher qui est le seul fondement de relation et de puissance que peut avoir celui qui veut être un Nazaréen et un témoin de Dieu.

Le messager, qui est l’ange de l’alliance, agit selon le nom qu’il a donné. Il est cet Etranger merveilleux venu à plusieurs reprises pendant la dispensation de l’Ancien Testament, ayant son visage voilé, et son identité cachée. Mais les indices sont suffisants pour nous indiquer que l’Éternel, et l’Ange de l’Ancien Testament sont Jésus, le Dieu Sauveur. Il se révèle donc à ce moment-là. C’est comme s’il disait à cet humble couple sans force : Pour être de vrais nazaréens, vous devez me suivre par la foi là où je suis. Vous devez tout d’abord me voir comme identifié avec le Roc, mais aussi comme l’autel. - Belles figures de la Personne de Christ. Ensuite, le chevreau et le gâteau offerts en sacrifice sur le rocher nous parlent de Son œuvre. Quand il monte dans la fumée du sacrifice, c’est comme s’il leur disait : Vous devez m’identifier avec le Très-Haut qui vous a associés à son sacrifice et au Rocher par lequel il a manifesté sa gloire.

Tout vrai nazaréat, toute vraie séparation et tout vrai témoignage pour Dieu, passe par notre identification avec cette merveilleuse Personne qui n’est autre que Christ. Ainsi, quand nous parlons du nazaréat, de la longue chevelure et de renoncer à ceci ou à cela, c’est plus que du renoncement, c’est avoir l’œil, le cœur et l’esprit remplis de Christ dans la gloire. Il n’y a pas de vrai nazaréat, si l’on n’est pas identifié avec Lui et occupé de Lui. N’est-ce pas ce qu’Il veut dire en Jean 17, quand il dit à son Père : « Je me sanctifie moi-même pour eux » (v. 19) ? Nous le voyons, pour ainsi dire, monter vers Dieu, dans la fumée du sacrifice. S’il prend cette place de Nazaréen, se sanctifiant en se séparant de tout ce qui est de ce monde, c’est pour nous montrer le chemin de la vraie sanctification et du vrai nazaréat, pour que nous le suivions là, et que nous soyons « transformés en la même image » (2 Cor. 3 : 18), en Le suivant et en regardant à Lui.

Il laisse tout simplement derrière lui la saveur de son nom magnifique et de ce qu’il est devant Dieu, comme puissance de notre témoignage de Nazaréen ici-bas. C’est là le lieu de naissance de Samson, le berceau spirituel de tout Nazaréen de Dieu. C’est là que sont nés les seuls vaillants hommes que Dieu reconnaisse.

En 2 Samuel 23, quand David décrit le vrai roi, il doit ajouter aussitôt : « quoique ma maison ne soit pas ainsi avec Dieu », mais sitôt après il est dit : « Ce sont ici les noms des hommes forts qu’avait David « (2 Sam. 23 : 8). Combien cette connexion est frappante ! La description du roi idéal, qui est comme un matin sans nuage, montre Christ dans la gloire. Dans la mesure où l’âme en est remplie, les hommes forts sont là.

De même, lorsqu’Elie, comme type de Christ, monte aux cieux, il dit à Elisée : « Si tu me vois quand je serai enlevé d’avec toi, il en sera ainsi pour toi » (2 Rois 2 : 10), à savoir une double portion de son esprit reposera sur lui. Alors qu’Elisée voit Elie monter, le manteau d’Elie tombe sur lui, et il devient pratiquement son représentant.

Il en est de même des disciples menés à la montagne des Oliviers - l’olivier est une figure du Saint-Esprit. Ils sont conduits là jusqu’à Béthanie, la maison de l’humiliation, là où le Saint Esprit peut témoigner sans entrave aux cœurs humiliés qui connaissent leur propre faiblesse, et là, ils Le voient monter ; comme Il monte, ils reviennent pour être des témoins pour Lui, occupant la place qu’Il avait laissée sur la terre.

Voilà donc le lieu de naissance spirituel des nazaréens. C’est dans Celui qui monte dans le parfum du sacrifice du Rocher qu’est le secret spirituel de tout vrai témoignage et de toute victoire pour Dieu. Samson commence là à manifester la vigueur de cette vie, avant qu’il n’y ait aucun conflit bien établi, en étant poussé dans le camp de Dan contre les Philistins.

Nous ne serons nazaréens et témoins pour Lui que dans la mesure où nous regarderons, par la foi, là où notre Seigneur est allé. Samson, hélas, n’a pas réussi à vivre dans le chemin que la grâce de Dieu lui avait tracé. Pour s’être éloigné, il a cessé d’être un Nazaréen, et est devenu un monument du gouvernement de Dieu !

Si nous désirons être Nazaréens, entrons par la foi dans ce qui nous rendra vainqueurs du formalisme ambiant. Un Nazaréen est un homme céleste, dont l’espérance est là-haut, dont la vie est « cachée avec le Christ en Dieu » (Col. 3 : 3). C’est ainsi que l’Église a été unie à Christ ; qu’est-elle maintenant ? Que sommes-nous ?

Par la grâce de Dieu et malgré ce que nous réalisons si faiblement, nous sommes unis à Lui pour l’éternité.

 

12 Samson – Alliances et conflits (Jug. 14 à 15)

Le chapitre précédent était une introduction à la vie de Samson. Nous avons vu peu de chose sur lui, sinon ce qui caractérisait sa vie, son service selon le dessein de Dieu, et le caractère particulier de l’ennemi contre lequel Dieu allait l’utiliser pour délivrer Israël.

Nous avons vu aussi que les Philistins représentent la religion charnelle et mondaine, qui introduit la chair dans les choses de Dieu. Cette religion, centrée sur la nature humaine, n’offre aucune certitude par rapport à Dieu, et tyrannise l’homme. Elle introduit le légalisme, le ritualisme et le formalisme de toutes sortes, mais aussi le cléricalisme, le despotisme du clergé, et toutes les contraintes imposées dans le but d’asservir les vrais sacrificateurs de Dieu qui sont affranchis de la loi du péché.

Pour renverser tout cela, il faut être un Nazaréen, et être séparé du mal. Seul le chrétien qui marche et rend témoignage dans la séparation du monde, même religieux, peut manifester puissance et persévérance dans la lutte constante contre les attaques venant de l’extérieur, de ce qui est toujours charnel et formel. Tout le chapitre 13 insiste sur le fait que Samson devait être un vrai Nazaréen ; il devait représenter Dieu lui-même dans sa relation avec les Philistins en demeurant séparé de leur idolâtrie. C’est ainsi qu’il aurait de la puissance sur eux. C’est aujourd’hui encore le propos de Dieu.

 

12.1  Les premières étapes de la vie de Samson

Nous avons maintenant devant nous l’histoire de Samson. En la considérant, et bien que nous sachions ce qu’est la grâce, nous réalisons combien le dessein de Dieu pleinement révélé et la manière avec laquelle nous nous l’approprions dans toute sa profondeur sont deux choses bien différentes. Par exemple, quand nous disons que nous sommes en Christ, il semble exagéré de dire que nous sommes des êtres pécheurs par nature sauvés par la grâce de Dieu, mais ces mots ne le sont pas, car ce sont les mots de l’Ecriture qui nous assurent de notre position en Lui. Comment nous la réalisons pratiquement dans notre vie, comment nous traduisons la grâce et les conseils de l’amour de Dieu d’une manière concrète, tangible et visible aux yeux du monde, c’est autre chose. Ainsi, dans le dessein de Dieu, Samson était un Nazaréen, mais sa vie pratique ne reflétait pas cette position. Nous allons le voir, et c’est une leçon bien humiliante !

 

12.1.1    La descente à Thimna

On ne saurait trop insister sur l’importance de la première étape, car c’est elle qui détermine les suivantes. Pour un jeune homme qui désire se consacrer au service de Dieu, il est impératif que son premier pas soit dans la bonne direction. Quant à Samson, il est dit de son premier pas qu’il descendait !

Nous avons lu, au début du chapitre 2, que l’Ange de l’Éternel avait dû monter de Guilgal à Bokim, car le peuple n’y était plus. Guilgal est la place d’humilité qui nous sied dans la présence de Dieu. Quitter Guilgal, c’est s’élever, c’est une folie, alors que descendre à Guilgal est une attitude bénie. Mais ici, si Samson descend, ce n’est pas sur un chemin d’humilité, car il ne descend pas à Guilgal. Devant Dieu, nous devons descendre, nous abaisser ; mais par rapport au monde, nous devons monter en nous éloignant de lui, et non y descendre.

Les sentiments de la sainteté de Dieu et de notre néant doivent nous garder humbles devant Lui, dans une position d’abaissement. Quant à l’homme, dans nos relations l’un envers l’autre en tant que chrétiens, nous devons nous ceindre d’humilité, mais quant au monde, nous ne devons pas nous abaisser, mais maintenir notre position élevée comme des hommes célestes, séparés des pécheurs.

La première étape de Samson est donc une étape descendante. Il descend à Thimna, et y voit une femme d’entre les filles des Philistins. Il va dans un endroit revendiqué par les Philistins comme leur lot, et là, il fait alliance avec ses ennemis. Par cette première étape, Samson signe donc un pacte avec les ennemis de Dieu.

Il est important qu’un jeune homme qui entre au service de Dieu ne contracte pas d’alliance qui entrave son service, et que chaque décision soit prise dans la dépendance de Dieu avec prière, pour être guidé, surtout pour le choix aussi important que celui d’un conjoint. Il est capital que la jeune fille soit d’une même pensée avec lui, qu’elle appartienne au peuple de Dieu, et qu’elle manifeste la même foi et le même esprit d’obéissance que lui.

La première chose que fait Samson, alors que son témoignage aurait dû être caractérisé par la séparation, est de se lier à l’ennemi ! La question de ses relations et de son témoignage est fixée d’un coup. En se liant intimement aux Philistins, il ne peut être un témoin impartial contre eux. Quant à nous, pouvons-nous porter un témoignage fidèle contre le monde si nous nous lions intimement à lui ? Qui pourrait embrasser une religion charnelle,basée sur le formalisme, ou le cléricalisme et espérer maintenir un témoignage divin qui condamnent de telles pratiques ?

Beaucoup désirent être nazaréens pour Dieu, mais dès la première étape, ils se lient à un état de choses qui est contre sa volonté. On ne peut pas maintenir un témoignage contre un système si l’on s’est identifié étroitement avec lui. Il en coûte pour tout croyant qui désire être fidèle à Christ, et ça fait mal, de maintenir une position de séparation du mal. Samson a détruit tout son témoignage par ce premier acte, et n’a jamais vraiment retrouvé ce qu’il a perdu dès le début de sa vie.

Samson n’a pas la pensée de Dieu dans le pas qu’il fait, mais Dieu a Sa pensée en le laissant le faire, béni soit-Il. Il est au-dessus de nos folies et de nos erreurs. Les parents de Samson ne savaient pas que l’occasion qu’il cherchait pour renverser les Philistins venait de l’Éternel. Le propos de Dieu est une chose, pour nous, l’accomplir en est une autre ; Dieu arrivera à ses fins malgré nos désobéissances, mais nous ne pouvons jamais prétexter ce propos pour les justifier. Nous ne pouvons être collaborateurs de Dieu si nous Lui désobéissons. Ici, bien que Dieu passe par-dessus cette désobéissance pour amener Samson à entrer en conflit avec ses alliés, celui-ci ne peut retirer aucun réconfort d’un tel compromis, car les intérêts de Dieu n’occupent pas ses pensées.

 

12.1.2    Samson attiré par celle qui « plaît à ses yeux »

« Prends celle-là pour moi, car elle plaît à mes yeux » (Jug. 14 : 3). Normalement, par la force donnée de Dieu, un Nazaréen refuse ce qui satisfait les tendances de sa nature pécheresse, il renonce aux mondanités dont beaucoup se régalent. Ici, Samson agit d’abord pour son plaisir. Combien de fois nous empruntons un chemin qui nous unit avec le monde, juste parce qu’il nous plaît ! Samson n’a pas demandé si c’était agréable à l’Éternel. N’avons-nous pas souvent demandé la direction du Seigneur avec la conviction que nos désirs étaient selon lui ? Ne soyons pas surpris de ne pas recevoir de réponse claire, si le Seigneur n’a que la deuxième place. Si nous avons choisi de suivre un chemin, avant de demander le consentement de Dieu, il est certain que sa réponse ne sera pas reçue et ne nous fera pas changer d’avis. Dieu doit être honoré, et il ne peut l’être que s’il a la première place.

Samson entraîne ses parents dans cette souillure, les associant à sa propre folie. Ils avaient été instruits directement de Dieu, aussi, n’avaient-ils aucune excuse. Que pouvait dire Manoah à l’Ange de l’Éternel qui lui avait donné des instructions aussi précises quant à la façon d’élever leur fils qui les entraînait dans son propre chemin ? Ils ne pouvaient pas dire : nous l’avons bien élevé comme un Nazaréen, mais il a quitté le chemin de l’obéissance quand il a grandi. Eux-mêmes l’accompagnaient dans sa désobéissance, malgré quelques protestations.

Il y a un avertissement solennel dans le parcours de ces parents et dans la faiblesse dont ils font preuve en se soumettant à ce qui plaît à Samson. Que de croyants pensent satisfaire leurs consciences en contestant les principes mêmes auxquels ils sont associés ! De nos jours, beaucoup se trouvent dans des systèmes qui ne sont pas selon Dieu. Conscients de cela, ils expriment leur désaccord, mais restent dans ces « églises » malgré tout.

 

12.1.3    Un premier exploit de Samson

Alors qu’il descendait chercher sa femme philistine, Samson exécute son premier exploit. Sans rien en sa main, il « déchire » un lion qui l’avait attaqué (v. 6). Il n’avait encore rien perdu de sa force ni de la fraîcheur de sa vigueur spirituelle. Il ne s’était pas encore souillé par association avec les Philistins.

Mais retirons-en une leçon spirituelle. Faut-il s’étonner de voir un lion rugir contre lui alors qu’il descend au pays des Philistins ? En abandonnant le terrain de Dieu pour un terrain charnel, on ne doit pas être surpris de rencontrer l’assaut de l’adversaire, Satan, qui est « comme un lion rugissant... cherchant qui dévorer » (1 Pier. 5 : 8). Satan excelle dans le chemin de la désobéissance ; il n’y a pas de lion dans le chemin de l’obéissance. C’est le paresseux qui dit : « Il y a un lion rugissant sur le chemin, un lion dans les rues » (Prov. 26 : 13), car personne n’a jamais été tué par un lion dans la rue. Il peut avoir été assailli quand il était désobéissant, mais, comme John Bunyan l’a si bien dit : les lions sont enchaînés pour qu’ils n’atteignent pas le chemin de l’obéissance. Dans le chemin de Dieu, Satan ne peut jamais attaquer, on y est en sécurité ; c’est en le quittant, que l’on risque de rencontrer le lion.

Le chemin de Dieu pour le prophète qui descendait de Juda en Israël était clair, il devait aller témoigner contre le roi d’Israël, sans manger ni boire, et s’en retourner (1 Rois 13). Ce chemin pouvait paraître dangereux, mais il était protégé ; en effet, le roi d’Israël étendit sa main pour se saisir de lui, mais elle sécha, et il ne put la recouvrer qu’à la parole du prophète. Le pouvoir du roi ne pouvait l’atteindre. Mais lorsqu’il a quitté le chemin de l’obéissance, lorsqu’il a écouté le vieux prophète et est allé manger et boire avec lui, alors un lion l’a rencontré et l’a tué (1 Rois 13). C’est en quittant le chemin de Dieu que l’on trouve le lion rugissant.

Les rugissements du lion auraient au moins dû avertir Samson qu’il arrivait sur le territoire de Satan. Certes, il « déchire » le lion comme il l’aurait fait d’un chevreau, ce qui témoigne peut-être d’une certaine foi, mais on devrait éprouver de la honte à rencontrer certains ennemis. Israël ne pouvait retirer aucune gloire d’avoir vaincu Amalek, car s’il a eu à le combattre, c’est parce qu’il était à la traîne. S’ils s’étaient hâtés, Amalek ne les aurait jamais rattrapés (Ex. 17 : 13, Deut. 25 : 17-18). Si quelqu’un dit qu’il a eu un terrible combat avec Satan et que, grâce à Dieu, il a remporté la victoire, il doit se demander pourquoi ce combat avec Satan a dû avoir lieu. A-t-il quitté le chemin de la foi où Dieu le voulait, pour se trouver en territoire ennemi ? C’est très bien de remporter une victoire, mais certaines victoires montrent clairement quelle erreur a nécessité le combat.

 

12.1.4    L’énigme que Samson propose aux Philistins

Plus tard, quand Samson redescend chercher sa femme, il constate qu’un essaim d’abeilles s’est abrité dans la carcasse du lion. Il prend le miel de la carcasse, le mange, en donne à ses parents, puis continue à descendre, forcé de respecter l’alliance qu’il a contractée. Il propose alors cette énigme à ses amis : « De celui qui mange est sorti le manger, et du fort est sortie la douceur » (v. 14).

Nous connaissons l’interprétation généralement donnée, mais il en existe certainement d’autres. La première est celle-ci : Satan est le lion, celui qui cherche à dévorer. Nous étions captifs de Satan et de sa puissance, et c’est pour cela que Christ est descendu pour le renverser « afin que, par la mort, il rende impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable » (Héb. 2 : 14). De même que la victoire sur le lion est l’occasion de fournir de la nourriture, la victoire de Christ devient la source de notre nourriture spirituelle. Assurément, de la croix de Christ nous viennent douceur et nourriture. Une fois Satan vaincu à la croix, nous avons eu accès aux trésors de Dieu, ces ressources inépuisables que nous pouvons faire nôtres pour nous en nourrir. Cette scène peut servir de base pour prêcher l’évangile, mais nous n’y insisterons pas.

Quant à nous, il a pu nous arriver de subir des attaques de Satan par telles menaces ou telles tentations, et, après avoir résisté par la foi, nous avons trouvé de la douceur et une nourriture spirituelle pour nos âmes. C’est ce que semble suggérer le Psaume 23 : « Tu dresses devant moi une table, en la présence de mes ennemis » (v. 5a).

Sur le plan collectif, le diable peut menacer un rassemblement, et les saints, en lui résistant, le feront s’enfuir au loin ; c’est comme s’ils le déchiraient, tandis que, pour la foi, il n’a pas plus de force qu’un chevreau. De cette victoire résulte un riche repas spirituel pour les saints. Par la grâce de Dieu, ces attaques de l’Ennemi ont souvent été l’occasion de grandes bénédictions.

Ces applications évidentes nous sont familières. Cependant, sans les contredire, en considérant les nombreux manquements de Samson et en pensant au but qu’il poursuivait lorsqu’il a rencontré le lion, puis comment il a persisté dans ce chemin après l’avoir tué, nous pouvons y trouver un avertissement très actuel pour nous. Nous nous proposons donc d’aborder...

 

12.1.5    D’autres enseignements à retirer de cette scène du jeune lion

Le pays de Canaan est décrit comme une terre où ruisselaient le lait et le miel. Le miel, qui exprime la douceur, est bon en Canaan, nous pouvons en manger sans aucun danger (Prov. 24 : 13). Grâce à Dieu, dans les champs célestes, nous nous délecterons éternellement de douceur et de graisse. Mais, en territoire Philistin, le miel suggère sûrement autre chose. En rapport avec les sacrifices offerts à Dieu, il était interdit de manger du miel (Lév. 2 : 11), qui symbolise la douceur selon la nature. La douce nourriture céleste convient dans un lieu céleste, mais jouir des douceurs de la nature sur le terrain de l’Ennemi est autre chose. Dans ce sens, manger du miel, c’est se nourrir de ce qui peut vite être un piège pour l’âme. « As-tu trouvé du miel, manges-en ce qu’il t’en faut » (Prov. 25 : 16). « Manger beaucoup de miel n’est pas bon » (v. 27).

Satan peut s’être présenté comme lion rugissant, et avoir été vaincu, mais, de sa carcasse apparemment inoffensive, il se présente sous une autre forme : telle un miel délicat et savoureux, une amitié peut attirer l’âme loin de Dieu. Cette interprétation ne contredit pas l’autre. Si on regarde la parabole du point de vue du vrai nazaréat, comme nous le voyons pour notre Seigneur qui l’a vraiment réalisé, le miel peut représenter les douces et précieuses bénédictions de l’Évangile, mais en l’examinant à la lumière des faits, nous voyons que Samson s’éloignait de Dieu sur un chemin descendant ; Satan, voyant que son rugissement ne l’avait pas effrayé, a essayé de voir quel effet le miel aurait sur lui.

Pauvre Samson ! Il dévoile toujours ses secrets que personne ne devrait savoir, et encore moins les Philistins. Notons qu’il ne les leur révèle pas ouvertement, mais par une énigme. Pourquoi ? N’aurait-il pas dû voir qu’il était en train de se mêler gravement à ce peuple ? Il descendait se marier avec une femme et se retrouve avec trente compagnons philistins - mais quels compagnons pouvaient-ils être pour un homme qui serait leur ennemi acharné ? Il se lie à une seule femme et le voilà associé avec toute une compagnie de Philistins dans sa maison.

L’enseignement est très clair : vous faites un compromis sur un seul point, vous n’adoptez qu’un seul principe pas contraire à la Bible (la femme représente les principes de conduite), et ce seul principe anti-scripturaire en entraînera certainement une foule tout aussi faux. N’en retenir qu’un vous marie à une Philistine, et ses trente compagnons spirituels rempliront votre maison.

Il n’est pas sûr que l’énigme de Samson, dans la bouche d’un homme aussi infidèle, signifie la victoire de Christ sur Satan. En raison de son infidélité, nous ne pouvons guère parler de lui comme un type de Christ dans sa rédemption. Le cœur répugne à y voir en aucune façon notre Seigneur, nous pouvons tout au plus y voir un contraste. Aurait-il été fidèle, Samson aurait été un type de Christ, mais tel qu’il était, il le pouvait difficilement. Pouvons-nous imaginer le Seigneur Jésus descendre s’allier avec ses ennemis de cette façon ? Il est descendu au plus bas, certes, mais pour rencontrer des âmes en grâce. Il est impensable qu’Il se soit associé intimement à des ennemis, ou fait quelque chose qui ait compromis la sainteté de son Père. La pensée de Dieu est bien que « de celui qui mange est sorti le manger, et du fort est sorti la douceur », et que tous ceux à qui Il révèle ce secret aient un vêtement de rechange, c’est-à-dire soient revêtus de la plus belle robe, cependant, en considérant le côté personnel de Samson, nous avons là plutôt un avertissement.

 

12.1.6    L’énigme révélée par Samson à sa femme

Samson finira par révéler son secret, même s’il semble se refuser à le faire. Celui qui fraye avec les ennemis de Dieu, leur proposant d’entrer un peu dans son intimité spirituelle, toutefois sans se confier complètement à eux verra que cette façon de faire même tournera à sa confusion. C’est ce qui est arrivé à Samson. Ses compagnons - bien misérable compagnie pour un Nazaréen - amis de sa femme, menacent d’incendier sa maison, et de la brûler, elle et son père, si elle ne lui extirpe pas le secret. Alors, remplie de peur, elle passe son temps à pleurer - temps de fiançailles qui aurait pu être heureux - sachant que ses compagnons sont assez cruels pour exécuter leur menace, et qu’elle sera tuée si elle n’obtient pas la solution du secret.

Samson voit sa fin arriver parce qu’il a dû tout raconter ; il devra finir par parler de son entière séparation à Dieu, le secret du témoignage et de sa puissance.

Il y a d’autres choses bien tristes dans ce chapitre, mais nous avons vu les grandes lignes des leçons que nous pouvons en tirer pour nous-mêmes. Nous pouvons aussi en faire une application ecclésiastique. Même un homme spirituel qui désire plaire à Dieu, peut être tenté de former des alliances qui ne sont pas selon Dieu. Cela est particulièrement vrai de nos jours où la chrétienté est marquée par de nombreuses activités religieuses, dont beaucoup sont philanthropiques à caractère peut-être évangélique, pour atteindre le cœur des gens.

Par exemple, prenons un croyant sérieux désirant faire quelque chose pour Dieu. Il trouve, peut-être, sa position de Nazaréen plutôt terne, et voit que ceux avec qui il marche dans le chemin de séparation ne sont pas aussi bouillants et zélés pour l’évangile que d’autres qu’il connaît. Il sera tenté de se lier à ceux-ci juste pour des activités évangéliques, en pensant : ces activités ne sont pas très scripturaires, ce n’est pas exactement ce que Dieu veut, mais je vais néanmoins m’y associer. Beaucoup se sont retrouvés entourés par les Philistins, pour avoir simplement sacrifié ce seul point. Ces vérités doivent nous servir d’avertissement dans les questions d’assemblée ; partout où nous cédons sur un seul point, nous verrons à nos dépens que nous devrons céder sur bien d’autres points.

Pour le moment Samson l’emporte sur ses ennemis. Il raconte l’énigme à sa femme qui le rapporte, bien sûr, à leurs compagnons qui lui donnent la réponse. S’apercevant de la trahison, il dit : « Si vous n’aviez pas labouré avec ma génisse, vous n’auriez pas trouvé mon énigme » (v. 18). Ah, si seulement il avait inversé l’expression : Si je n’avais pas labouré avec votre génisse - Non, il leur reproche une alliance que lui-même avait conclue, et à cause de laquelle son secret leur avait été dévoilé. Ce secret ne leur appartenait-il pas ? Comment avait-il eu ce secret, si ce n’est en rencontrant le lion parce qu’il descendait au pays des Philistins. N’avaient-ils donc pas le droit de le connaître ?

 

12.1.7    La descente de Samson à Askalon

Maintenant, il est en opposition ouverte et rompt avec eux, car Samson avait une foi vivante ; il n’était pas mort mais seulement souillé par cette alliance. Il descend donc dans une autre ville, tue des Philistins et rapporte leurs vêtements. Il leur donne, comme pour se moquer, non pas des habits de rechange au sens spirituel, mais simplement d’autres vêtements philistins, semblables à ceux qu’ils portaient. En effet, l’homme qui connaît le secret de l’évangile sans être dans le chemin de Dieu peut changer de vêtement. Beaucoup de gens le connaissent dans leurs têtes, mais pas dans leurs cœurs ; ils peuvent dire que la douceur de la bénédiction de Dieu est venue du renversement de la puissance de Satan, parce qu’ils ont entendu quelqu’un d’autre le dire, mais ne l’ont pas appris pour eux-mêmes. Ils peuvent changer de vêtement, mais que pour un autre de la vieille création ; ils tournent une nouvelle page, ils changent d’attitude, sans que l’âme soit vraiment libérée. Revêtir la plus belle robe signifie qu’un travail de cœur a eu lieu dans la présence de Dieu.

 

12.1.8    La dernière visite à Thimna

Au chapitre 15, l’état de Samson s’aggrave. À l’époque de la moisson, il descend avec un chevreau, pour visiter sa femme, et découvre qu’elle lui a été prise. Assurément, une alliance philistine n’engage personne, que ce soit de leur côté ou du côté de la foi. Samson proteste ; son beau-père, croyant qu’elle avait été abandonnée, l’avait donnée à un ami ; il lui en propose une autre. Les Philistins sont toujours prêts à proposer une nouvelle alliance.

Samson va maintenant se venger personnellement pour cette offense. Cette atteinte personnelle arrive pour essayer de le remettre sur le bon chemin.

Il y a beaucoup d’instructions ici, elles ne nécessitent pas d’illustration. Si nous nous associons à ce qui n’est pas selon Dieu, nous nous exposons à être traités injustement et à en éprouver du ressentiment personnel. Combien de fois des gens disent être maltraités par leurs amis croyants pour lesquels ils ont tant fait. Ils ont travaillé, donné leur argent et leur temps, et n’ont rencontré qu’ingratitude, ce qui a fait naître en eux de la colère et l’envie de se venger. Dans l’assemblée, une querelle est souvent le résultat d’une animosité personnelle, plutôt que d’un zèle pour l’honneur de Dieu.

Ainsi, en colère à cause du traitement qui lui a été infligé, Samson s’en va prendre des chacals (15 : 4) – chose étrange pour un Nazaréen que de toucher aux bêtes les plus immondes de Palestine. Ces animaux se nourrissent de charognes, cachant dans la terre les os qu’elles rongent, pour leur prochain repas putride. Ils sont une image saisissante de la chair, qui se nourrit d’impuretés et de corruption. Samson attrape ces trois cents chacals, les lie, queue à queue, met une torche entre eux et les laisse s’enfuir sans se soucier de ce qu’ils font. Il n’est pas dit qu’il ait tué un seul Philistin par ce moyen ; en revanche il a brûlé les champs de blé et les plantations d’oliviers qui représentent des bénédictions spirituelles auxquelles le peuple de Dieu avait droit dans le pays. Pourquoi ne pas chasser le Philistin et profiter du blé, des olives et des vignes ? Pourquoi les brûler et laisser l’ennemi en vie ?

Trop souvent les conflits personnels et les vengeances ne font que consumer les choses spirituelles que nous devons apprécier, au lieu de consumer l’ennemi. Que de fois, ces chacals lâchés viennent brûler la nourriture de nos âmes ! Comme le dit l’apôtre : « Si vous vous mordez et vous dévorez l’un l’autre, prenez garde que vous ne soyez détruits l’un par l’autre » (Gal. 5 : 15). Ce n’est donc pas une conduite spirituelle de lâcher des chacals comme Samson, pour qui cela semble un jeu.

Même Jephthé, qui était dur, n’a pas lâché de chacals contre l’ennemi. Gédéon, lui, tenait sa torche à la main non pas pour enflammer la chair, mais pour maintenir un témoignage ; la torche et la trompette proclamaient l’épée du Seigneur (Jug. 7 : 20). Samson ne leur ressemble pas, il était dans un bas état moral en faisant cela, il ne combattait pas pour Dieu. Gardons-nous de nous battre avec des chacals, c’est-à-dire de lutter l’un contre l’autre par la chair ou de l’exciter et de l’enflammer. Si vous chuchotez un mot en sachant qu’il va attiser du ressentiment, ou créer des hostilités, c’est que vous êtes prêt à mettre le feu en lâchant un chacal. « Comme un fou qui jette des brandons, des flèches, et la mort, ainsi est l’homme qui trompe son prochain, et qui dit : N’était-ce pas pour plaisanter ? » (Prov. 26 : 18-19).

Les Philistins se vengent sur la femme de Samson et son beau-père en les brûlant au feu. Alors, après avoir attendu trop longtemps, Samson se place enfin à terrain découvert et public, et frappe les Philistins, leur cassant bras et jambes dans un grand carnage (v. 8a). Mais combien est vaine et indigne d’un serviteur de Dieu cette exhibition de force qui, bien que surhumaine, ne semblent pas être une manifestation de la puissance divine.

Ces pensées sont sérieuses ; elles ne sont pas habituellement présentées au sujet de Samson. En considérant sa carrière, on trouve bien des choses sur lesquelles pleurer, et très peu d’heureuses, comme celle que nous avons maintenant à partir du verset 9, tel un trait de lumière dans toute son histoire.

 

12.2  La victoire de Samson sur les Philistins

Nous trouvons maintenant un fait significatif : « Samson descendit, et habita dans une caverne du rocher d’Etam » (15 : 8b), comme « les damans, peuple sans puissance, et qui ont placé leurs maisons dans le rocher » (Prov. 30 : 26). Quand Samson vient loger dans le rocher, ce qui nous parle de se cacher en Christ, nous pouvons nous attendre à quelque chose de mieux.

 

12.2.1    L’intervention des hommes de Juda en faveur des ennemis !

« Les Philistins montèrent, et campèrent en Juda, et se répandirent en Lékhi. Et les hommes de Juda dirent : Pourquoi êtes-vous montés contre nous ? Et ils dirent : Nous sommes montés pour lier Samson, afin de lui faire comme il nous a fait » (v. 9-10). Samson, qui était devenu hors la loi, s’était retiré du combat, avait battu en retraite hors du territoire des Philistins, et s’était réfugié en Juda. Loin de s’avouer vaincus, les Philistins voulaient prendre leur revanche, ils voulaient sa vie.

Mais quel triste tableau dans ce qui suit ! Les hommes de Juda, horrifiés de voir que Samson ose se battre contre les Philistins viennent lui dire : « Ne sais-tu pas que les Philistins dominent sur nous ? » (v. 11). Leur esclavage était si grand, ils étaient si misérables, qu’ils étaient effrayés de voir quelqu’un résister à l’autorité de leurs oppresseurs.

Combien il est vrai que beaucoup de croyants semblent être terrifiés à l’idée qu’un de leur frère résiste aux Philistins qui s’introduisent parmi le peuple de Dieu.

Nous avons déjà fait allusion aux grands principes adoptés parmi les chrétiens professants, telles des pensées non-scripturaires sur la justification, le culte... Nous avons vu comment les Philistins adaptent ces choses à leur façon. Si quelqu’un ose affirmer que ce n’est pas la vérité, et que ce système relève du pouvoir de l’Ennemi, les gens crient au scandale. Il est inconcevable de dire que ces choses ne sont pas scripturaires, il est impossible d’admettre qu’un homme qui n’est pas ordonné prenne de l’action, il est impossible de se réunir sans organisation humaine ! « Ne sais-tu pas que les Philistins dominent sur nous ? », dit-on. Pourquoi soulever des questions qui ne peuvent que déchaîner la puissance de l’Ennemi sur nous ?

Est-ce vraiment exagéré de dire que le peuple de Dieu tremble à la seule pensée de s’opposer à l’autorité du pouvoir qui tient les saints dans sa main ?

 

12.2.2    Livré aux Philistins, Samson remporte une très grande victoire

Samson ne demande qu’une chose aux hommes de Juda : Jurez-moi que vous ne vous jetterez pas sur moi. « Non, disent-ils, nous allons te livrer aux Philistins mais nous ne te tuerons pas » (cf. v. 13). Puisque le lien vital avec le peuple de Dieu est maintenu et qu’ils ne vont pas le retrancher, spirituellement parlant, il accepte d’être livré aux Philistins.

Ils le lient donc avec des cordes pour le livrer aux Philistins en toute sécurité, pensent-ils. Mais - et c’est là le seul rayon de lumière de toute son histoire - en présence de l’Ennemi, la foi réagit, et ces cordes neuves - ces règles que les siens lui ont imposées pour le contenir - brûlent comme de l’étoupe au feu, et n’ont aucun pouvoir sur lui. Cela est étroitement lié au fait d’avoir habité dans la caverne du rocher. C’est très beau de voir cela. Ses frères n’avaient pas la foi pour agir comme lui et ils étaient dans un état moral si bas qu’ils faisaient tout pour le livrer aux mains de l’ennemi, et le rendre prisonnier de ce système contraire à la pensée de Dieu. Mais ici, Samson manifeste une foi simple et Dieu va s’en servir. Les Philistins n’ont aucun pouvoir sur lui, et ce champ de bataille étant dégagé, il va combattre ouvertement contre eux, dans l’énergie de la foi.

Samson prend une arme impure pour l’utiliser contre les Philistins. Il se sert de la mâchoire d’un âne (v. 15), un animal impur, mort qui plus est. L’homme naturel est comme un âne sauvage réputé avoir une forte volonté propre. Samson remporte une victoire, certes, mais avec une arme impure - la chair ou la volonté propre qui ne peuvent que faire souffrir. Que ce soit pour une juste cause ou non, si une mauvaise arme est utilisée, tôt ou tard il y aura des conséquences. Samson n’honore pas son nazaréat, il ne réalise pas que « les armes de notre guerre... ne sont pas charnelles, mais puissantes par Dieu » (2 Cor. 10 : 4). Pour les combats spirituels, il faut utiliser des armes spirituelles et non celles de l’Ennemi, il ne faut pas descendre à son niveau. Samson peut se vanter d’empiler des « monceaux » de Philistins tués avec cette mâchoire comme seule arme (v. 16), mais cette arme est impure, aussi s’étend une ombre sur le moment le plus brillant de sa vie.

 

12.2.3    Le cri de Samson adressé à l’Éternel

Une fois la victoire remportée, une autre lueur survient. C’est la première fois que nous entendons la voix de Samson s’élever vers Dieu (v. 18). « Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant » (Ps. 42 : 2). Même après cette grande victoire, son âme desséchée est terriblement assoiffée ; mais il ne pouvait en être qu’ainsi, après avoir utilisé une arme impure. Alors, il se tourne vers Dieu, l’appelle à l’aide et, dans cet endroit qui porte le nom de sa victoire, Lékhi (« mâchoire »), Dieu fend le rocher creux, et l’eau jaillit pour étancher sa soif (v. 19). Ce rocher, cette eau rafraichissante ne nous parlent-ils pas de Christ ?

Cet épisode de l’histoire de Samson commence et se termine avec le rocher. Il habitait là et Dieu en faisait jaillir l’eau pour le rafraîchir. Le puits est appelé En-Hakkoré, « la source de celui qui crie » à Dieu. C’est en relation avec cette période brillante de sa vie qu’il est dit qu’il jugea Israël vingt ans (v. 20). Ce n’est que séparé des Philistins, en conflit ouvert avec eux, que Samson a pu exercer sa fonction de juge. Il ne pouvait pas juger le peuple quand il s’abaissait à s’allier avec ses ennemis ; il ne le pourra pas quand il tournera la meule dans la maison des prisonniers. Mais pendant cette période de séparation, quand il habitait dans le rocher, quand il brisait les liens avec lesquels son propre peuple l’avait attaché, quand il allait avec l’énergie de la foi, alors, et alors seulement, il pouvait juger le peuple de Dieu.

Nous verrons, avec le chapitre 16, que la fin de la vie de Samson a été une sombre période marquée par la faillite. La lueur a été brève. Il est à espérer qu’il y a eu d’autres actes de fidélité pour Dieu non enregistrés dans ces chapitres.

De ce sixième et dernier des héros d’Israël, nous apprenons quelques leçons qui sont des plus importantes. Elles concernent surtout des échecs, et comme nous le disions au début, tout effort pour voir chez Samson un type de Christ fait violence au sens spirituel. Nous pouvons voir en David un type de Christ dans son rejet, ou dans son royaume final, mais certes pas quand il a péché. Nous pouvons voir en Salomon dans toute sa splendeur et sa gloire un type de Christ, mais pas quand il s’écarte de Dieu à la fin de sa vie. Quand un enfant de Dieu désobéit, est-il une figure de Celui qui a été parfaitement obéissant ? Si nous sommes loyaux envers Lui, une telle interprétation qui heurte la conscience doit être refusée. Cet homme qui aurait pu être un type merveilleux de Christ, n’est, hélas, qu’un phare nous avertissant des écueils sur lesquels il s’est brisé, au lieu de nous inviter à entrer au port.

Cet avertissement tient en cinq mots : « Elle plaît à mes yeux ». Gardons notre nazaréat ; à l’instar de Christ qui « n’a pas cherché à plaire à Lui-même » (Rom. 15 : 3), ne cherchons pas à nous plaire à nous-même.

Puissions-nous nous rappeler que par la croix du Christ, « le monde m’est crucifié, et moi au monde » (Gal. 6 : 14), et que « ceux qui sont du Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises » (5 : 24). « Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi par l’Esprit » (5 : 25), avec l’aide du Seigneur.

 

13 Samson : derniers jours (Jug. 16)

Nous avons vu passer devant nous la période la plus brillante de la vie de Samson, bien qu’elle ait été empreinte de faiblesse. Etaient apparus déjà des signes annonciateurs de nouveaux manquements aux injonctions divines s’il ne se tournait pas résolument vers Dieu. Pourtant, malgré la délivrance partielle accordée quand son cri de détresse était monté au ciel, nous ne voyons que l’esquisse d’un mouvement collectif de retour à un chemin de dépendance parmi le peuple de Dieu.

Auparavant, Samson avait toujours agi individuellement, de son propre chef, bien que de façon désintéressée semble-t-il, car on ne le voit pas tirer parti de ses tours de force et de ses victoires sur les Philistins. Après cette période de mouvement national il agit encore seul. Ainsi, Samson avait grandement failli en tant que conducteur. Il ne s’est pas mis en tête du peuple pour les conduire à la victoire, mais il l’a remportée pour eux. Il manifeste une personnalité forte et individualiste. Partout où celle-ci exclut le peuple de Dieu, apparaît de l’égoïsme qui entraîne faiblesse et finalement faillite du témoignage.

Jamais il n’a associé le peuple avec lui, comme l’ont fait Gédéon et Jephté. Il a toujours agi seul, bien en vue, pour qu’on le voie faire. C’est en relation avec cette période qu’il est parlé de sa fonction de juge. Il n’était pas apte à juger quand il frayait avec les Philistins.

De tels hommes ne sont pas inconnus dans l’histoire de l’Église - des hommes brillants qui ne semblent jamais avoir trouvé leur place comme membres du corps du Christ. Ils ont peut-être ébloui par leur éloquence et ont attiré l’attention sur eux, mais leur ouvrage n’a pas duré. Chaque période de l’histoire de l’Église a connu de tels hommes ; et encore aujourd’hui, ils ne manquent pas. Penons garde de ne pas être l’un d’eux !

Trop souvent le nazaréat n’est pas respecté, les principes des Philistins sont acceptés, et une séparation spirituelle stricte de tout ce qui altère la communion n’est pas maintenue. Par exemple, quelqu’un doué d’une grande éloquence, risquera d’être grisé par le succès et de ne pas « s’abstenir du vin » qu’offre le plaisir de l’autosatisfaction. Cet homme aura des difficultés à s’effacer soi-même, et à rester humble dans le service. Ce principe aux vastes applications est très exerçant. Toute œuvre, même scripturaire, si elle reste individuelle et ne s’identifie pas collectivement avec le peuple de Dieu, selon les directives de sa Parole, est incomplète.

 

13.1  Samson descend à Gaza

Laissant la brillante période de la vie de Samson, considérons le reste de son histoire, hélas bien triste. Dieu Lui-même nous a dépeint ce tableau, afin que nous comprenions comment Il voit les choses. Cette leçon humiliante est nécessaire ; elle agira comme un stimulant spirituel pour nos âmes, comme le font les expériences les plus amères. De même que les médicaments, la médecine de Dieu doit être parfois amère pour agir sur l’âme, pour nous inciter à entrer dans les vrais combats, et montrer si nous sommes pour Dieu ou non.

La ressemblance est frappante entre la première partie de ce chapitre 16, et le début de la vie publique de Samson. Le déclin moral est manifesté par le fait qu’il satisfait ses propres désirs, malgré la souillure morale qu’il contracte. Samson descend à Gaza pour satisfaire sa volonté, sans se soucier du déshonneur porté sur le nom de Dieu et de son peuple. Il descend là, victime de la chair, et si l’on est intérieurement dans cette disposition, cela se manifestera tôt ou tard extérieurement.

En descendant à Gaza, Samson montre un état d’âme qui exigerait un vigoureux et impitoyable jugement de soi-même, mais on ne voit rien de tel. Il peut sembler étrange qu’un homme qui a tant étouffé sa conscience ait une telle puissance. Mais c’est un fait, que la force reste un temps après la disparition de la conscience. Il semble que la miséricorde de Dieu persiste, là où la conscience est endormie ou étouffée ; Dieu désirerait encore parler à l’âme par le moyen de la force encore présente.

Ainsi, en dépit de son misérable état d’âme qui l’a amené là, Samson se lève au cours de sa nuit de plaisir et arrache les portes de Gaza qui le tenaient captif. Il les transporte jusque sur la colline en face d’Hébron, défiant ceux qui pensaient le retenir sûrement avec les portes et leurs barres.

Samson pensait peut-être avoir fait une grande chose en arrachant les portes, et en se délivrant de la puissance qui le tenait ; mais il ne s’est pas vraiment libéré. La miséricorde de Dieu lui parlait et lui montrait qu’il pouvait encore se sortir de là, s’il le voulait, mais il ne l’a pas fait. L’avertissement de Dieu a été vain, car Samson n’a fait qu’exhiber sa force ; dès lors, rien ne pouvait plus empêcher une nouvelle chute.

En fait, cet homme puissant battait en retraite, il fuyait devant les Philistins. Même s’il portait leurs portes sur ses épaules, il fuyait. Il n’avait pas la puissance de leur faire face. Comment en aurait-il eu alors que sa conscience n’était pas droite devant Dieu ?

Il est dit qu’il a porté les portes sur le sommet d’une colline qui est en face d’Hébron, ou qui regarde vers Hébron. C’est comme s’il allait en direction d’Hébron qui était bien plus loin, car Gaza est au bord de la mer, alors qu’Hébron est à plusieurs kilomètres, dans les montagnes de Judée. Il devait y avoir une colline en direction d’Hébron, et Samson semblait s’y rendre. Hébron signifie « communion », mais pour que l’âme retrouve la communion avec Dieu, se débarrasser momentanément d’un pouvoir qui l’asservit ne suffit pas.

Quelqu’un peut être prisonnier d’une chose contraire à la pensée de Dieu, tout en ayant encore assez de puissance pour s’en débarrasser. Il peut tourner le dos à cette chose, et aller vers Hébron, vers la communion. Mais s’il s’arrête, laissant tomber les portes sur la colline, il n’atteindra pas Hébron. Cette victoire partielle lui sera très probablement en piège, car s’il avait vraiment réalisé sa faiblesse, il se serait jeté sur sa face devant Dieu, et une humiliation ultérieure aurait pu être évitée. L’âme partiellement restaurée se dirige vers la communion avec Dieu sans l’atteindre, car elle s’arrête avant. Et si elle est à nouveau prise au piège, ce sera pire, car Dieu ne permet pas de jouer avec la conscience, ou avec sa Parole.

C’était mauvais d’être à Gaza, et si la grâce de Dieu l’en délivrait, c’était pour le ramener à Hébron, à la communion avec Dieu. Mais, n’allant pas jusque-là, il aura à apprendre quel est son vrai besoin dans une chute ultérieure. Quelle leçon pour nous ! Parfois, des restaurations semblent avoir lieu, en ce que l’on voit des renoncements à tels ou tels principes ou associations, mais souvent le renoncement n’est que partiel, car le fruit extérieur est coupé, mais non la racine, et surtout, il n’y a pas de franc retour vers Dieu. Dieu dit : « Si tu reviens... reviens à moi » (Jér. 4 : 1). Il y a danger dans une restauration partielle de la communion ; seule alors une partie du chemin qui va à Hébron est parcourue. Pour une vraie restauration, il faut plus que déposer les portes de Gaza sur la colline qui est en face d’Hébron, il faut un retour à Dieu. Et revenir à Dieu implique de juger le principe qui m’a pris au piège et la racine qui m’a égaré, et quand la racine est jugée, les branches le sont aussi.

C’est l’enseignement que nous pouvons tirer de l’action de Samson qui ne peut que nous faire pleurer. S’il s’en était vanté, nous aurions pu lui demander : Que faisais-tu à Gaza, et de combien t’en es-tu éloigné quand tu l’as quitté ? Ainsi, si quelqu’un parle de la force qu’il a eue pour abandonner telle habitude ou telle association, demandons-lui premièrement pourquoi il se trouvait dans une telle situation, et dans quelle mesure il s’en est éloigné maintenant. A-t-il parcouru toute la distance pour retrouver la communion avec Dieu ?

Concernant l’Évangile, aujourd’hui, beaucoup de prédications sont pour ainsi dire prononcées pour tirer un pécheur de Gaza jusqu’à la colline en direction d’Hébron, mais sans l’amener jusqu’à Hébron. On exhorte à abandonner ceci ou cela, couper telle ou telle association, juger tel ou tel mauvais état d’âme, sans aller au fond des choses, c’est-à-dire juger le moi. Il ne faut pas amener une âme à se croire capable de se libérer des chaînes de ses péchés, mais à se sentir impuissante et coupable devant Dieu. Il faut la conduire au sentiment de sa ruine, de ses péchés et de son indignité, n’ayant que la solution de se jeter aux pieds de la grâce infinie, et trouver dans la croix de Christ le pardon et la délivrance… non pas de Gaza, de telle ou telle mauvaise habitude, mais du moi.

C’est ce qui m’amène dans la présence de Dieu, à Hébron, dans la communion avec Dieu. C’est ce que fait l’Évangile de la grâce de Dieu, en opposition aux appels à améliorer le vieil homme, qui ne conduisent qu’à être comme une truie lavée prête à retourner se vautrer dans la boue (2 Pier. 2 : 22). L’Évangile, en grâce, délivre complètement une âme de quelque situation de laquelle elle était captive, pour jouir de la communion avec Dieu.

Quel réconfort de pouvoir prêcher un tel Évangile, de ne pas laisser des âmes sur une colline peu éloignée de Gaza, livrées à elles-mêmes, sans les mener à Hébron, pour être en communion avec Dieu. Nous avons le grand privilège de déclarer que, par la mort et la résurrection de Christ notre Seigneur, l’âme entièrement libérée est dans la présence de Dieu, chez elle. L’accès dans la présence de Dieu est rendu parfaitement libre par le sang de Christ versé à la croix, de sorte que nous nous approchons de Lui en pleine assurance de foi, pour jouir d’une sainte et heureuse association avec Lui. Le chemin ne s’arrête pas à mi-course, il va jusqu’au bout, jusqu’à Dieu. « Vous qui étiez autrefois loin, vous avez été approchés par le sang du Christ » (Éph. 2 : 13).

Comme chrétiens, nous n’avons pas besoin d’être sauvés à nouveau, mais nous aimons parler de la façon dont on peut être sauvé. Sauvés une fois pour toute, nous pouvons jouir de ces précieuses vérités, et recommander ce chemin avec amour et ferveur à toute âme étrangère à l’amour de Dieu. La grâce divine tire l’âme de son lieu d’esclavage et de la servitude à ses convoitises, la place dans la maison de Dieu, par l’œuvre de Christ et lui donne la paix avec Lui à jamais. Quel précieux Évangile ! C’est le ministère de la réconciliation qui ramène dans la paix de la sainte présence de Dieu, en toute confiance, une âme éloignée et séparée de Lui.

Ce n’est pas ce que Samson a fait, aussi ne devrait-on pas lier le saint nom de notre Seigneur avec une histoire aussi honteuse. On ne devrait même pas y faire référence, comme certains l’ont fait, pour illustrer l’Évangile, à savoir que notre Seigneur aurait enlevé les portes de Gaza, et nous aurait ouvert le chemin pour en sortir. Non, ce que Christ a fait, contraste avec cela. Samson n’a été délivré qu’incomplètement, par la miséricorde de Dieu, d’une convoitise qui était encore son maître, et qui allait encore l’enlacer. Ne lions pas le saint nom de notre Seigneur avec un tel récit honteux.

Un jour, un homme – l’apôtre Paul – est sorti d’une ville d’une manière très différente. C’est par fidélité à Christ qu’il était dans la ville. Les Juifs gardaient les portes de Damas jour et nuit de peur qu’il ne s’échappe. Bien que toute la puissance de Dieu fût de son côté, il n’a pas exhibé follement sa force, aucun miracle n’a eu lieu envers ses ennemis qui gardaient les portes. Paul a été dévalé par une fenêtre dans une corbeille, et s’est enfui, manifestant ainsi sa faiblesse. C’était le caractère d’un vrai nazaréen dont la faiblesse témoignait constamment qu’une autre puissance opérait, et qui ne faisait pas de lui quelqu’un d’exceptionnel, mais un homme humble.

Il est frappant de constater que l’allusion à cette fuite peu glorieuse en 2 Corinthiens 11, soit suivie du chapitre 12 dans lequel est décrite son entrée dans la gloire où il a entendu des choses qu’il n’est pas possible à l’homme d’exprimer. Si Paul n’était que faiblesse, quand il était dévalé dans un panier pour sortir de la ville, c’est dans la gloire qu’il a été ravi, pour voir ce qui était vraiment sien - et vraiment nôtre. Puis, une fois descendu de cette hauteur, le Seigneur lui montre qu’il ne doit pas user de sa force propre, afin que celle de Christ, qui est rendue parfaite dans la faiblesse, soit pour lui.

Vaut-il mieux ressembler à Samson avec sa puissance extraordinaire, ou à Paul, ce faible serviteur, semblable à une biche chassée dans la forêt par des ennemis implacables, descendu dans un panier hors de la ville, fuyant en manifestant sa faiblesse pour prouver que la force éternelle de Christ est pour lui ? Ressembler à Paul veut dire apprendre la leçon de Paul, ressembler à Samson signifie ne pas avoir appris cette leçon-là.

 

13.2  Un piège pour Samson dans la vallée de Sorek

La suite du chapitre est encore plus sombre, et parle sûrement à nos consciences. Samson s’égare à nouveau, comme il était prévisible. Pour celui qui n’est pas vraiment restauré, ce n’est qu’une question de temps pour qu’il aille dans un chemin pire que celui qu’il avait suivi auparavant. Le Seigneur nous donne l’exemple de l’esprit impur qui sort d’un homme, laissant son cœur vide (Luc 11 : 24-25). Il est délivré partiellement. Mais quelle est l’utilité d’être délivré d’un mauvais esprit, si le cœur vide est prêt à ouvrir ses portes, et à inviter sept esprits plus méchants que le premier ?

Samson n’a pas tenu compte de l’avertissement que Dieu a donné en grâce. Quant à nous, collectivement, Dieu permet de brèves périodes de relèvement. Il nous accorde d’être guéris des résultats de nos erreurs, en nous faisant lever des bastions des Philistins où nous étions descendus, et nous faisant sortir d’une manière étonnante de ces Gazas : nous pouvons arracher les battants des portes qui ne sont nullement des barrières. Mais pour une assemblée de Dieu, comme pour un chrétien, cette délivrance partielle peut être le signal d’un nouvel égarement, à moins qu’il n’y ait un vrai jugement de la racine du mal. Si Dieu nous donne des avertissements avec tendresse, nous devons les prendre comme Il le désire – en allant à la racine des choses, que ce soit en assemblée ou individuellement – et non pas comme si tout était maintenant en ordre, et qu’il n’y ait plus besoin de vigilance et de jugement de soi plus profond.

Maintenant Samson retourne à ce dont il avait été délivré, tout comme une assemblée ou un individu en serait capable. Il revient exactement au même endroit, à Gaza. Il est pris au piège dans la vallée de Sorek, la vallée du « piège », par une femme dont le nom était Delila. Il l’aime. Contrairement à une vallée dans le pays, une vallée chez les Philistins ne parle pas d’humilité, mais d’une descente morale et spirituelle. Samson descend dans la vallée, droit au piège. Il va s’y empêtrer, comme nous allons le voir.

Ce n’est pas une puissance extérieure qui l’a attiré là. Ce qui nous amène sous la puissance du mal n’est pas une contrainte extérieure puissante et tenace, mais une chose séduisante, qui plaît au goût et au désir des cœurs. Nous pouvons être certains que Dieu ne laissera jamais les hordes du mal prévaloir contre une âme qui Lui est fidèle de cœur. Les plus faibles et les plus démunis naturellement, possèdent la force de Christ Lui-même, si leurs cœurs sont vrais et Lui sont fidèles. Tous les pièges que l’Ennemi peut placer, toutes les vallées de Sorek, ne peuvent avoir aucun pouvoir sur un saint dont le cœur n’est pas pris au piège par des séductions.

Delila, encore une femme philistine, nous montre que Samson s’égarait toujours en suivant les principes de l’homme naturel qui ne peuvent jamais répondre à la volonté de Dieu, car, en figure, cette femme nous parle de principes de conduite et de témoignage qui ne sont pas selon Dieu, ou qui n’atteignent pas la vérité de Dieu. Samson est attiré dans cette voie par quelque principe du mal auquel il veut se lier, et cet homme fort est pris au piège. Delila qui signifie faiblesse ou impuissance - l’attire et le retient par une puissance qu’il a laissé dominer son cœur, et rien ne peut l’en délivrer.

Samson descend là et s’associe à elle. Les Philistins vont se servir de cette situation. S’étant mis sous la puissance d’un principe qui n’est pas selon Dieu, il va bientôt devoir être soumis à une autre puissance, extérieure. Les Philistins, sans scrupule, offrent de payer cette femme. La première fois, ils ont menacé de brûler la femme et son père par le feu ; maintenant ils proposent 1 100 pièces d’argent, si elle le persuade de révéler le secret de sa force qu’il n’a encore jamais dévoilé.

La citadelle de son cœur était encore inviolée. Il est presque impensable qu’une personne qui avait tant failli comme Samson, ait encore un cœur préservé, qui n’était pas dans les mains de l’ennemi, malgré ses infidélités. La forteresse, le for intérieur de son âme, était encore pour Dieu, qui dans sa miséricorde était providentiellement intervenu en sa faveur. C’est cette citadelle de son cœur que Delila va maintenant assiéger, pour lui en prendre la clé, afin que l’ennemi s’y précipite et en prenne possession.

Quel enseignement spirituel pouvons-nous tirer du fait de révéler le secret de notre force aux ennemis de Dieu ? Le problème n’est pas tant que le secret soit su, mais c’est le fait que le cœur soit prêt à dire un secret au monde. Prenons un exemple du domaine professionnel : nous sommes polis avec les gens que nous rencontrons, mais les relations s’arrêtent là ; nous pouvons avoir des relations temporaires ou permanentes, dans le cadre du travail, mais avec certaines distances ; il n’y a pas de compromission en cela. Mais si l’amitié se resserre, et que des éléments de la vie s’introduisent dans les relations, les choses deviennent encore plus intimes et les secrets du cœur peuvent être mis à nu ; il ne reste plus que ce que les âmes ont en commun. Ce serait ça « dire les secrets » – révéler tout ce qui marque la séparation d’avec un autre.

Tant que je garde mes opinions, je reste moralement séparé de la personne, et suis tout à fait distinct d’elle. Mais si je lui ouvre mes pensées et lui dis les propos secrets de mon esprit, alors nous sommes unis, amis, et il n’y a plus de séparation. Je suis sous l’emprise de cette personne, pour la simple raison que mon cœur lui a été donné. Ce serait le cas d’une femme chrétienne donnant l’affection de son cœur à un incrédule. Mais il existe d’innombrables applications, individuelles et collectives.

Il en fut ainsi avec Samson. La révélation du secret de sa force brisait le mur qui le séparait des Philistins. C’était abandonner la citadelle de son âme, qui avait été gardée intacte jusqu’à ce jour. Nous pensons à des applications pratiques, et nous allons voir comment ce danger existe individuellement, pour les serviteurs du Seigneur en particulier, et pour l’assemblée dans son témoignage collectif devant Dieu, et devant le monde.

Le chrétien est en danger constant de briser le mur de séparation entre son âme et le monde. Souvent, de jeunes chrétiens, le cœur rempli d’amour pour Christ, se réjouissant dans le Seigneur, sont assaillis par de subtiles tentations pour briser cette étroitesse d’esprit qui les sépare du monde. Ces tentations ne se présentent pas de façon mauvaise. Satan présente au chrétien le monde sous son côté inoffensif et attractif, non pas sous son mauvais côté. Alors, s’il a envie de céder, d’avoir des choses en commun, de dire les secrets du cœur, l’âme a capitulé, pas nécessairement en paroles, mais pratiquement dans ce qui la distingue du monde. Si la séparation de l’esprit du monde est brisée dans l’âme, le secret est livré, il est donné aux mains de l’Ennemi, et la force et la puissance spirituelle sont ainsi perdues.

Combien de fois des Samson ont été dépouillés de leur force de cette manière. Ils flirtent avec une petite chose qui semble inoffensive, une bagatelle. Puis d’autres choses se rajoutent – car Satan propose des choses toujours plus séduisantes qui prennent possession de l’esprit – jusqu’à ce qu’enfin, comme le dit Delila, ils disent tout ce qui est dans leur cœur.

C’est comme une écluse sur un canal. Les portes qui retiennent les eaux en amont, les séparent des eaux en aval ; il y a une grande différence de hauteur entre elles. En ouvrant les portes cachées au fond du canal, l’eau passe à travers ces portes, jusqu’à ce que les niveaux soient égaux, alors les portes oscillent librement.

Des relations avec ce monde, ou l’adoption de mauvais principes et des pensées du monde ne sont-elles pas comme ces portes de communication cachées ? Sans parler d’immoralité, n’avons-nous pas de portes ouvertes avec le monde, qui atténuent toute différence avec celui-ci et ne permet plus de distinguer entre le saint et le profane ? Une fois sur le même plan, qu’est-ce qui empêche d’ouvrir grand les vanne, et de laisser entrer tout ce qui est du monde ? Le nazaréat individuel est alors perdu.

Quant au serviteur de Christ, si quelqu’un doit être séparé de l’esprit du monde, de l’esprit du Philistin, c’est bien lui. Le secret de sa force réside dans le jugement de soi, c’est la faiblesse qui s’appuie sur la force du Tout-puissant. S’il n’a pas pris cette place, il n’est pas un vrai serviteur de Christ et n’a pas appris la leçon qu’il n’y a pas de puissance plus à craindre que ces alliances cachées qui ne sont pas selon Dieu. Ces portes cachées, qui l’amèneraient à révéler les secrets de son cœur, et à s’entendre avec le monde, saperont sa force ; aucune capacité, aucune éloquence ne peut jamais remplacer la longue chevelure qui parle d’une vie séparée pour Dieu.

Quant à l’Église, sa chevelure qui était sa gloire est hélas rasée. Aujourd’hui, elle est au même niveau que le monde ; dans son ensemble, c’est une Église mondaine qui ne peut que nous faire pleurer. Quant au témoignage collectif, nous courons les mêmes dangers : le monde nous attire en permanence, insidieusement, et nous sommes en danger de révéler les choses précieuses de Dieu – non pas l’Évangile, mais le secret de nos cœurs – et d’être ainsi sur un même terrain avec le monde qui nous entoure et que nous imitons si facilement.

Cet état de chose s’infiltre même dans les rassemblements les plus soigneux, s’il n’y a pas une attention constante. Nous pouvons hélas constater que l’Ennemi possède tout ce que nous avons, qu’il n’y a pas de secret entre lui et nous, qu’il n’y a pas de mur entre nos âmes et ce qui nous entoure. Certains disent parfois : Pourquoi faire tant de cas de la séparation, alors qu’il n’y a aucune différence entre nous ? Ah, se poser une telle question, montre qu’il n’y a déjà plus de distinction. Le secret est révélé, il ne reste rien.

 

13.3  L’abandon du nazaréat

Penchons-nous maintenant très brièvement sur les étapes qui amènent à révéler des secrets. Samson dit d’abord à Delila une contre-vérité, quand elle demande à connaître le secret de sa force et comment il pourrait être lié. Son premier aveu semble insignifiant, il n’a apparemment pas l’intention de lui faire savoir son vrai secret. Il dit : « Si on me liait avec sept cordelettes fraîches, qui ne fussent pas desséchées, alors je deviendrais faible, et je serais comme un autre homme » (Jug. 16 : 7). Samson devait avoir à l’esprit la façon dont les hommes de Juda l’avaient lié de cordes quand ils l’avaient remis aux Philistins, et comment il les avait rompues comme de l’étoupe. Il refait la même chose, quand Delila dit : « Les Philistins sont sur toi, Samson ! « (v. 9), il rompt les cordes, comme de l’étoupe soumise au feu.

Se vanter d’une victoire passée est le point de départ d’un nouveau piège. Ici, Samson pense à sa victoire sur les Philistins, et se rappelle comment il a brisé les cordes. Il pense rompre les cordes comme la dernière fois  et montrer le merveilleux pouvoir qu’il a ! Et il fait ainsi. Il rompt les cordes, certes, mais il a une « corde fraîche » autour de son âme. C’était se vanter d’une victoire passée en présence de quelqu’un avec qui il n’avait rien à faire et qui ne devait pas le savoir. Il ne lui a pas dit la vérité, ni donné le vrai secret de sa force, mais il l’a trompée, aussi en saurait-elle bientôt plus.

Ainsi, si l’on joue avec le mal, y étant lié, essayant de garder une certaine séparation par divers mensonges, le pas est fait et l’âme est vraiment aux mains de l’Ennemi.

Nos consciences doivent être au clair : avoir des relations avec ce qui n’est pas selon Dieu, avec ce qui entrave ma communion avec Lui, jouer avec les choses du monde et les lier aux choses de Dieu, finira, tout comme Samson, par un naufrage et la ruine.

La fois suivante, Samson se sent un peu plus fort : qu’ils me lient avec des cordes neuves, dit-il (v. 11). Ah, si seulement il avait conscience qu’il ajoutait une autre corde à celles qui devaient le lier. Il descendait toujours plus ; la grâce lui accordait encore du temps pour être restauré, mais il refusait d’écouter, et nous le voyons aller plus avant dans le mal.

Il est donc lié avec ces cordes, mais même s’il se délivre, il reste plus étroitement lié que jamais. Cette nouvelle tromperie, quand la conscience a été réveillée par la grâce, montre qu’il est plus en danger que jamais.

 C’est un sujet sérieux et très solennel. Dieu n’a-t-il jamais réveillé notre conscience pour nous délivrer d’un piège, et n’y sommes-nous jamais retournés ? Si tel est le cas, c’est que comme Samson, notre conscience est devenue moins sensible. Il en est de même de l’église.

Puis vient sa troisième réponse. Il joue avec le feu, mais le papillon s’approche de la bougie ! Il arrive maintenant au secret de sa force, en disant : « Si tu tissais sept tresses de ma tête avec le fil à tisser » (v. 13b). Il parle de ses cheveux comme la source de sa force, sans toutefois évoquer qu’il ne fallait pas les raser. Il est, maintenant, près de divulguer le secret de sa force spirituelle, et dire comment elle peut lui être ôtée. Même s’il le dit faussement, il parle de la chose même. C’est comme si un homme parlait au monde de sa foi. Il peut ne pas donner le secret, et ne pas être pleinement identifié avec le monde, mais il parle de la seule chose qui le sépare du monde. De quel droit Samson parlait-il à une Philistine de son nazaréat ? Aucun. Cela nous rappelle Éve parlant avec le serpent.

Alors, il fait le dernier pas. Delila obtiendra tout de lui. Il est certain que quiconque joue avec le mal, ira jusqu’au bout, tout comme ce pauvre Samson, à moins que Dieu n’intervienne, dans sa miséricorde. Prends mes cheveux, dit-il ; voilà le secret, il y est arrivé. Si ses cheveux sont ôtés, son nazaréat est perdu, et il sera aussi faible qu’un autre homme.

Il est significatif qu’il ne parle pas d’abstinence de vin, ou de séparation de la mort ; sa vie passée montre qu’il n’avait pas été prudent quant à ces aspects de son nazaréat. La longue chevelure suggère un esprit de dépendance à l’égard de Dieu, et la conscience de la faiblesse. N’est-il pas possible que ceci reste, bien qu’une sainte séparation de cœur soit perdue ?

La dépendance trouve son expression naturelle et normale dans la prière. Seul le Seigneur, le Nazaréen parfait, a été un homme de prière. Il n’y a pas de plus grand danger que de perdre le sens de la nécessité de la prière ; cela signifie la perte de l’esprit de dépendance, symbolisé par la longue chevelure. Il n’est pas nécessaire d’en dire plus, laissons plutôt la conscience nous parler. La prière est-elle une nécessité absolue ? Est-elle dans nos habitudes ? Parfois, la connaissance de la grâce est utilisée par l’Ennemi afin de diminuer le sentiment de dépendance et ainsi réduire la fréquence des prières. Négliger la prière, risque de faire perdre le nazaréat.

La même chose est vraie d’un témoignage collectif. Si la connaissance de la vérité ne nous garde plus dans l’humilité et nous rend négligents quant à la prière en commun, il est certain que « les Philistins sont sur nous ». Quand la réunion de prière est négligée par le grand nombre, ou qu’il y a peu de participation dans la prière, c’est que le témoignage s’écarte de sa vraie position, même s’il a été utilisé par Dieu auparavant. À moins d’une restauration, il tombera dans le formalisme des Philistins. Puissions-nous y prêter une sérieuse attention.

 

13.4  Samson vaincu par les Philistins

Samson avait dit tant de mensonges que les Philistins ne le croyaient plus, mais, Delila le croyait. Cette pauvre prostituée savait que le secret était révélé ; le monde sait bien quand le chrétien capitule et que le mur de séparation est tombé. Après quoi, Samson s’endort ; la paresse qu’il connaît depuis longtemps se manifeste simplement un peu plus. Il pose sa tête sur les genoux de ce monde misérable ; c’en est fait de lui, il ne se réveille que pour se rendre compte que sa force est à jamais partie par sa propre faute, sans pouvoir être vraiment restaurée.

Combien c’est solennel ! Dieu nous avertit par cet exemple pour éviter une chute semblable. Nous devons le prendre à cœur. Elle dit : « Les Philistins sont sur toi », et ce pauvre Samson, pense faire comme d’habitude. « Je m’en irai comme les autres fois, et je me dégagerai » (v. 20), mais il ne savait pas que sa puissance l’avait quitté. Combien d’âmes se sont mêlées au monde et continuent ainsi, ignorant que leur force spirituelle est partie. Samson, ne sachant pas que l’Éternel s’était retiré de lui, sort. Il a beau se secouer, ayant perdu le secret de sa force – sa dépendance de Dieu, il est devenu comme le plus faible des hommes.

Beaucoup continueront leurs activités, longtemps après avoir perdu leur puissance. Ils peuvent se démener dans un service religieux – le prédicateur dans sa chaire, celui qui visite dans son ministère, le moniteur d’école du dimanche dans sa classe – mais la puissance n’est plus, quelle tristesse et quelle honte !

Si un témoignage nazaréen - autrefois reconnu de Dieu, pose sa tête sur les genoux des Philistins et perd sa chevelure, il peut se vanter de ses prouesses passées, de ses connaissances, de ses réussites, il peut se démener, mais hélas, il doit être dit : I-Cabod (1 Sam. 4 : 21). Que le Seigneur nous garde humbles, pieux et dépendants. Le danger est aussi pour nous, soyons vigilants et sur nos gardes, pour ne pas nous réveiller de nos rêves en nous trouvant irrémédiablement aux mains des Philistins.

Le monde appellera cela devenir fort : mettre de côté son étroitesse indigne d’un homme, son exclusivisme rigide, son obéissance à la lettre, et prendre maintenant place parmi les hommes, et être de quelque utilité ! C’est ce que disent le monde et l’église mondaine, mais la foi pleure le Nazaréen perdu, et ne sera pas consolée. « Ses nazaréens étaient plus purs que la neige ... Leur figure est plus sombre que le noir » (Lam. 4 : 7-8).

Les Philistins prennent Samson, le lient, l’amènent à Gaza même où il s’était rendu de sa propre volonté et s’était amusé follement. Le lieu de son esclavage volontaire devient la scène de son esclavage involontaire. Maintenant, la force même qui lui restait n’est utilisée que pour moudre le grain des Philistins, au lieu de l’être pour juger son peuple, en tant qu’homme de Dieu libre. Quel terrible avertissement pour nous !

Samson perd d’abord sa force par sa propre folie. Ensuite, les Philistins lui crèvent les yeux, car le formalisme ne peut supporter les yeux ouverts. Il perd un discernement qu’il ne retrouvera jamais. Quelle perte irréparable et quelle humiliation ! On a décrit cette triple dégradation ainsi : « lié, aveuglé, broyé » par l’esclavage du péché.

Cette douloureuse leçon peut être appliquée à toute forme de flirt avec le mal. Mais, en nous souvenant que les Philistins représentent la religion mondaine et charnelle dans l’Église, la leçon est bien plus solennelle.

N’oublions pas que les fautes telles que celles de Samson, traduites en langage spirituel, ne signifient pas du mal moral flagrant, mais quelque chose de beaucoup plus insidieux et éminemment respectable, aux yeux du monde. Il existe des systèmes religieux, des doctrines, des pratiques qui sont clairement charnels, tout comme l’était le judaïsme, après l’introduction du christianisme. Tout retour vers ces choses, c’est flirter avec les Philistins. L’Église en est vraiment là aujourd’hui.

Quand Dieu suscite un témoignage nazaréen comme Philadelphie au milieu d’une Thyatire philistine corrompue et d’une Sardes formelle, morte, n’est-il pas significatif qu’après Philadelphie vienne Laodicée, comme si Dieu nous avertissait du danger de retomber dans quelque chose d’aussi mauvais, voire pire que ce dont nous avons été sauvés ? Méfions-nous, veillons et soyons sobres.

À l’instar d’un juge, un témoignage peut « juger Israël ». Tout témoignage selon Dieu agit sur toute l’Église. Qui peut aujourd’hui mesurer l’influence de ce témoignage qui, tandis qu’il est séparé et souvent méprisé, a répandu la lumière de la vérité divine sur de nombreux saints encore asservis aux Philistins ? Ne perdons, en aucune mesure, cette position de dignité, en nous associant avec des principes qui nous priveraient de force et de discernement, et changeraient les hommes de Dieu libres en ‘broyeurs de grain’ pour l’église mondaine.

 

13.5  Le relèvement de Samson

Juste quelques mots sur la mesure de restauration que Dieu accorde. Deux choses sont à noter, l’une quant à Samson, et l’autre quant à Dieu. Les cheveux de Samson ont commencé à repousser. Il avait déjà appris, et apprenait à nouveau qu’il n’y avait pas de force en lui. Le signe de la dépendance, de la séparation et du nazaréat réapparaissait, mais il avait perdu quelque chose qui ne reviendra jamais : il ne recouvrera jamais la vue ! Par ailleurs, Dieu ne restaure jamais pleinement ce qui a été perdu de façon délibérée et réitérée, mais Il peut restaurer partiellement. L’Église aujourd’hui devrait avoir le caractère de Nazaréen pour Dieu. Au cours de son histoire, elle a connu des périodes de restauration, mais reviendrons-nous aux jours apostoliques de la Pentecôte ? Non, l’Église a perdu ses yeux, même si elle retrouve un peu de sa dépendance extérieure. Comme Samson, la force qu’elle a n’est rien, en comparaison avec ce que Dieu lui aurait accordé, si elle ne s’était pas écartée.

Nous pouvons parler de la grâce de Dieu qui restaure, mais ne passons pas rapidement sur le péché qui nous éloigne. Nous pouvons parler de la façon dont Il nous a ramenés, mais cela n’a-t-il pas été avec une perte de discernement ? Avons-nous été ramenés aussi pleinement que si nous ne nous étions jamais écartés ? Que de temps et de talents perdus qui auraient pu bien rapporter pour Lui ! Ils sont perdus définitivement, et si même la force est retrouvée, elle n’est pas accompagnée du discernement qui est perdu. Nous ne pouvons plus en tant qu’église regarder le monde en face. Nous ne pouvons plus nous tenir de cette façon. Nous ne sommes qu’un pauvre résidu restauré par la grâce de Dieu, n’ayant qu’une vision limitée.

Quant à Samson, sa dépendance s’accroît. Il sent sa faiblesse, et retrouve donc sa force. Mais voyons le côté de Dieu. Les Philistins font toujours des erreurs ; Satan fait toujours une œuvre qui le trompe (Prov. 11 : 18). Les Philistins vont maintenant rendre hommage à Dagon, leur dieu. La question n’est maintenant plus entre ce pauvre Samson et les Philistins, mais entre Dagon et Dieu.

Quand l’arche de Dieu a été prise du milieu du camp d’Israël, tant que la question était entre Israël et les Philistins (1 Sam. 5 : 1-2), Dieu l’a laissé partir, car le peuple apostat et pécheur n’avait pas droit à l’arche. Mais quand l’arche a été mise dans la maison de Dagon, et placée devant Dagon, comme reconnaissant sa suprématie, alors Dieu a parlé pour Lui-même et Dagon est tombé ; il en sera toujours ainsi. Ici, en voulant faire une grande fête pour Dagon et lui attribuer la victoire sur Samson, les Philistins ont tout simplement défié Dieu qui, par conséquent, a dû parler, et avec quelle force !

Ils se rassemblent en grandes multitudes pour célébrer une fête à Dagon, et veulent que Samson les amuse. Amuser les Philistins ! Qu’il est tombé bas ! Nous pouvons y voir un homme dont l’éloquence et la connaissance de l’Ecriture sont utilisées pour moudre le grain des Philistins et les amuser, ou flatter l’esprit du monde dans l’église professante. Ah, plus d’un homme qui semble être un véritable Samson n’est que l’esclave aveugle des Philistins.

Dans sa grande miséricorde, Dieu nous a fait recouvrer, dans ces derniers jours, beaucoup de précieuses vérités. Des choses anciennes et nouvelles ont été tirées de sa maison du trésor, pour l’édification et la joie des saints. L’Église tout entière a, directement et indirectement profité, de ce ministère de la vérité.

Au début, la position pour laquelle Dieu a suscité la vérité a connu l’opprobre. Mais les choses ont changé. Les vérités de la venue du Seigneur, de la perfection de la position du croyant en Christ, des divers jugements, des deux natures, sont devenues « populaires ». De la littérature a été diffusée au loin, et des multitudes qui ne connaissent pas la source ecclésiastique d’où est venue cette littérature, en ont profité. Nous ne pouvons qu’en bénir Dieu.

Au début, la vérité séparait du monde et de l’église mondaine ceux qui la recevaient. Elle conduisait les gens à voir qu’ils étaient en dehors du système qui, en tant que système, était Philistin – une religion charnelle. La vérité nous sépare-t-elle maintenant ? Si elle ne nous sépare pas, la force accordée par Dieu n’est-elle pas utilisée pour moudre le grain pour les Philistins ?

Nous ne parlons pas des saints, mais des systèmes qui, trop souvent, les tiennent dans la servitude. N’avons-nous pas une responsabilité ? Nous ne devons ni imposer la vérité ecclésiastique, ni refuser de la propager partout où il y a une oreille pour entendre, mais, n’oublions pas que la vérité, si elle est reçue, fera se soustraire à l’erreur philistine. Souvenons-nous en, et prions pour que Dieu délivre les siens. Que le fait de rendre la vérité populaire, ne conduise pas à mettre en place un système mondain !

Mais Dieu va intervenir, et Il le fait par cet homme dont la faiblesse est maintenant si évidente. Il a été broyé, mené au bout de lui-même, et là, comme il montrait ses prouesses devant les Philistins, il réalise qu’il doit se libérer de cet esclavage et que la seule façon d’y arriver, c’est d’être délivré de lui-même. Samson atteint la fin de son esclavage quand il arrive à la fin de lui-même. Il saisit les deux colonnes de la maison des Philistins – car leur temple n’a pas, comme le temple de Dieu, de Jakin («Il établira»), ou de Boaz («en Lui est la force»), pour le soutenir (2 Chr. 3 : 17). Puis, se courbant, comme s’il reconnaissait sa folie, il écroule la misérable bâtisse dont les ruines l’écrasent ainsi que ses ennemis.

Qu’il est solennel que toute la vie d’un homme doive être sacrifiée. Il a fait naufrage. Il est sauvé comme à travers le feu. Tout est fini. Il n’a vraiment vaincu les Philistins que dans sa propre mort. Ce qui les a achevés, l’a aussi complètement achevé.

Tout à la fin, il est à nouveau insisté sur une leçon déjà vue maintes fois : pour être de vrais vainqueurs, nous devons être vainqueurs sur nous-même. C’est quand Samson en a fini avec lui-même – hélas, à la fin de sa vie – qu’il en a aussi fini avec la puissance de l’ennemi. Pourquoi est-il plutôt rare qu’un lit de mort soit heureux pour un chrétien ? On parle d’un lit de mort heureux comme une chose remarquable, alors que ce devrait être ordinaire pour un croyant qui va à la maison céleste. N’est-ce pas parce que souvent le chrétien ne vient au bout de lui-même que sur son lit de mort ? En fait, sa vie a été passée plus ou moins dans un compromis avec le monde, jusqu’à ce qu’il soit face aux questions éternelles, et la fin de soi arrive avec la fin de vie. Son âme libérée se montre brièvement comme elle monte vers Dieu.

Nous devrions atteindre notre lit de mort du moi bien avant ce terme, assurément. La fin du moi devrait être atteinte à la croix, et nous devrions demeurer là, nous tenant toujours pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus. Atteignons la fin, non par la providence de Dieu, ou sous sa main en châtiment, ou comme Samson l’a fait, en se supprimant la vie, mais calmement et délibérément, appliquant la croix par la foi à tout ce qui est du vieil homme, de sorte que ce n’est plus moi qui vis, mais Christ qui vit en moi (Gal. 2 : 20). Alors, si tel était le cas, ce serait l’inverse, nous commencerions où Samson a fini, avec la mort de soi, et nous finirions, par conséquent, par un vrai nazaréat selon les desseins de Dieu.

Nous avons suivi l’histoire de ce pauvre homme, depuis les conseils de Dieu quant à ce qu’il devait être, et nous voyons qu’il n’a pas accompli la volonté de Dieu dans la séparation du monde ; maintenant, à la fin, nous voyons la raison même de tout cela, il n’avait pas atteint la fin de lui-même. N’attendons pas que ce soit un tremblement de terre qui nous amène à la fin de nous-même. Allons dans notre chambre, allons à la chambre de notre propre cœur, et là, saisissons la vérité de la croix de Christ, et demandons à Dieu par le Saint Esprit d’en faire une réalité pratique dans nos âmes, afin de ne pas l’apprendre par une amère expérience. Puissions-nous apprendre par la vérité la réalité de : « Je suis crucifié avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi. »

 

14 Le développement de l’idôlatrie (Jug. 17-18)

Nous avons fini d’examiner l’histoire des diverses délivrances que Dieu a opérées pour son peuple par différents juges suscités pour cette raison. Le dernier libérateur n’en avait que le nom. Il faisait simplement suite aux juges précédents pour montrer l’aboutissement d’une faiblesse qui s’est hélas manifestée dès le début en ceux que Dieu avait suscités.

Cette faiblesse a eu son point culminant en celui qui était réputé pour sa force, laquelle n’a rien pu faire pour la délivrance pratique du peuple de Dieu, alors qu’elle aurait pu faire des merveilles, si elle avait été utilisée comme il faut. Il est, en effet, possible d’utiliser la puissance de Dieu à mauvais escient ; et combien souvent les personnes richement douées, par grâce, de dons et d’aptitudes que Christ même a donnés, en abusent, soit pour se glorifier, soit pour la gaspiller sans édifier les saints.

Avec Samson se termine l’histoire des délivrances. Il n’y en a plus dans ce livre. Cette pente descendante se termine avec la captivité du libérateur lui-même, au lieu de le voir emmener captive la captivité, comme Deborah le demandait à Barak dans son cantique, au début de ces délivrances. Le temps de Debora et Barak a été, peut-être, le plus brillant de toute cette période. Il n’y a pas de cantique maintenant, mais les soupirs du prisonnier dont la vie s’éteint avec le dernier acte, par lequel il cherchait, non à délivrer les saints, mais à se venger de ses ennemis pour la perte de sa vue.

Du chapitre 17 à la fin, nous avons un récit tout différent. Il ne s’agit plus du déclin d’Israël et de son esclavage entre les mains de l’ennemi, ni de leur bas état les amenant à crier à Dieu qui leur suscite un sauveur pour les délivrer.

Nous voyons d’abord que l’état d’âme de ce peuple loin de Dieu est manifesté - état qui est la cause de leur violence envers leurs semblables, et de leur corruption morale.

Puis, il s’agit des relations à l’intérieur du peuple. Nous avons souvent tendance à inverser les choses, en donnant de l’importance à ce qui n’est que le fruit d’une racine beaucoup plus subtile et profondément cachée que le fruit lui-même. Quiconque lit les récits terribles de la fin du livre aura honte de ses semblables, et que dire quand il s’agit de gens qui portent le nom de chrétien. Mais la violence et la corruption dans leurs relations entre eux venaient de leur éloignement de Dieu, c’est pourquoi la première partie du récit parle de cette relation avec Dieu.

 

14.1  L’idolâtrie introduite parmi le peuple comme système établi

Elle s’étend probablement sur toute la période des juges. En fait, l’idolâtrie instaurée là n’a jamais vraiment cessé, jusqu’à l’introduction de la royauté, aux jours de Samuel le prophète. Elle a commencé de bonne heure avec Dan. Ce que nous avons ici n’est pas postérieur à l’époque de Samson ; le récit est donné selon un ordre moral, et non chronologique. La première partie relatait essentiellement l’histoire externe du peuple – les esclavages et les délivrances extérieurs ; nous avons maintenant l’histoire interne, révélant l’état intérieur du cœur. Cet état était aussi mauvais que le pire esclavage sous lequel l’ennemi extérieur les avait maintenus.

Cette idolâtrie n’était pas vouée à des dieux païens, comme le culte des Baals et des Astartés, ces dieux des nations parmi lesquelles ils avaient habité ou par lesquelles ils avaient été encerclés, mais à des dieux domestiques. Nous verrons l’essor de cette idolâtrie pratiquée par le peuple qui maintenait, apparemment, les noms et la fonction de ceux qui appartenaient à Dieu.

L’apostasie n’allait pas jusqu’à rejeter tout ce qui était en relation avec Dieu. Ce n’était pas l’ennemi extérieur venant comme un fleuve, et effaçant toute trace de Dieu et de Son autorité. Non, c’était des Israélites utilisant pieusement le nom de l’Éternel et l’invoquant pour implorer son secours et ses services, mais qui introduisaient leur propre système, et y liaient le saint nom de Dieu.

Cette forme d’idolâtrie était bien plus dangereuse que l’autre, à cause de sa subtilité. Parmi le peuple professant, ce qui est communément admis comme étant la volonté de Dieu est bien plus dangereux que tout ce qui porte des noms de blasphème qui montrent clairement que ce n’est pas de Dieu.

Cela est mentionné ici, à la fin de ce livre, pour montrer clairement qu’un état d’âme intérieur non jugé parmi le peuple, pendant toute cette période, aboutit à cette horrible apostasie, cette idolâtrie extérieure. C’est aussi ce qui explique la puissance de l’ennemi.

 

14.2  L’idolâtrie en Éphraïm

Voyons maintenant comment les choses ont commencé. Les scènes présentées sont très humiliantes, elles marquent cependant toujours l’idolâtrie.

14.2.1    Michée et sa mère

Un fils vole 1100 pièces d’argent à sa mère qui maudit le voleur, sans savoir que c’est son fils. Il les cache un temps, puis, terrifié par la malédiction, il les rend à sa mère. Celle qui venait de maudire, va maintenant pieusement bénir son fils, non à cause de sa repentance, mais parce qu’elle a recouvré ses pièces. Elle le bénit de l’Éternel, lui disant qu’elle les avait consacrées à l’Éternel pour l’étrange utilisation d’en faire une image taillée.

Elle ne lui donne pour cela que deux cents pièces, soit les deux onzièmes, car quelle que soit la raison de ce que nous mettons à la place de Dieu, cela ne nous coûtera jamais toute notre fortune. L’idolâtrie ne donne donc qu’une partie pour faire son dieu, puis, comme pour rattraper son manque de dévouement, ajoute une énergie professante qui est censé le compenser.

Il est intéressant de noter que cet homme de la montagne d’Éphraïm, se nommait Michée. On aurait pensé qu’un homme portant ce nom - » Qui est comme l’Éternel ? » - serait à l’abri de toute forme d’idolâtrie. En effet, si les noms ont une signification pour le peuple de Dieu, et s’ils sont donnés avec foi, cela devrait se voir.

La mère prend 200 pièces de l’argent recouvré, en fait faire une image taillée, puis semble disparaître de l’histoire, après avoir ainsi prouvé son infidélité. Combien elle contrastait avec les fidèles en Israël, telle la mère de Samson ! Tout est fait avec l’approbation évidente du fils, qui prend l’image taillée, et l’établit dans sa maison comme idole.

Notons qu’il est de la tribu d’Éphraïm au milieu de laquelle le tabernacle était dressé, à Silo. Cette tribu représente les activités de la vie divine en contraste avec Juda, qui représente les vérités de la vie divine. La vérité divine doit être la base de tout culte divin, c’est pourquoi, en Israël, les choses n’ont été établies à leur véritable centre que lorsque, comme nous le voyons au Psaume 78, Dieu abandonne Silo et la tribu d’Éphraïm, et choisit la montagne de Sion qu’il aimait, en disant : « C’est ici mon repos à perpétuité ; ici j’habiterai, car je l’ai désirée. » (Ps. 132 : 14).

Juda représente la vérité divine et la louange qui jaillit d’un cœur éclairé et rempli par la vérité. Éphraïm, qui signifie « porter du fruit », représente la marche et l’activité de la vie divine résultant de la perception de la vérité. Nous l’avons pratiquement illustré dans Marie et Marthe (Luc 10). Marie correspond à Juda. Elle est assise aux pieds du Seigneur écoutant sa parole. À cette place, elle reçoit du Seigneur la vérité, et là, lui étant soumise, elle apprend à connaître la pensée du Seigneur à son égard. Nous devrions tous apprendre de cette manière. Marthe représente le service qui est assurément juste et bon à sa place, mais qui doit toujours provenir de la communion, sinon celui qui sert sera jaloux de celui qui jouit de la communion, comme Éphraïm l’a été de Juda ! Trop de cœurs sont remplis de la jalousie de Marthe, parce qu’ils ne sont pas réellement soumis comme de vrais élèves. Si Juda devient subordonné à Éphraïm qui prend le rôle de conducteur, le mécontentement en résultera, et Christ perdra la place de suprématie dans l’âme.

C’est pour cette raison que l’idolâtrie devient possible. Elle surgit de vies très fertiles en activités. C’est ce qui est caractéristique d’Éphraïm : beaucoup de zèle, beaucoup d’activités justes et bonnes en soi, mais il manque la suprématie de la vérité exerçant son autorité sur l’âme.

De nos jours, il est fréquent de mettre Éphraïm avant Juda, de voir l’activité chrétienne, l’œuvre – parfois seulement philanthropique – éloigner les hommes toujours plus de Dieu, et aboutissant à glorifier l’homme avant la foi et la vérité.

Prenons un vrai service béni, où l’on est occupé de l’objet du service, des hommes et de leurs besoins. Cette activité peut être la présentation de l’évangile aux incrédules, ou de la vérité au peuple de Dieu. Si celui qui présente la vérité ou l’évangile n’est occupé que des auditeurs qui sont devant lui, au point de faire passer la Parole de Dieu au second plan, cela conduira très certainement à l’idolâtrie.

C’est donc un homme de la montagne d’Éphraïm – de la tribu qui suggère fruits, service et travail – qui introduit l’idolâtrie parmi le peuple de Dieu. N’est-ce pas frappant ? En se souvenant aussi comment la tribu d’Éphraïm était constamment jalouse, comme nous l’avions vu dans l’histoire de Gédéon et de Jephté, toujours fière de son service, et de sa propre grandeur, nous voyons clairement comment l’idolâtrie va de pair avec l’orgueil.

Nous avons maintenant des éléments de réponse à la question : Quelle idolâtrie est donc devant nous ici ? Ce n’est pas mettre un faux dieu à la place du vrai, ce n’est pas servir Baal et Astarté, c’est simplement permettre à des activités de la vie divine d’éloigner l’âme de la vérité. Ainsi, le service entraîne l’orgueil, l’orgueil la propre volonté, et la propre volonté à son tour façonne son dieu pour répondre à ses propres désirs, au lieu de se former pour répondre à la volonté de Dieu.

L’idolâtrie n’est pas spécifique à Israël, elle concerne tout homme. La racine de toute idolâtrie est toujours la propre volonté ; c’est se faire un dieu à soi. On commence par le moi et on façonne un dieu, pas forcément en argent ou fait de mains. Si aujourd’hui, il y a peu de risques que des personnes façonnent des dieux de leurs mains, il existe un outil plus dangereux et plus habile que les mains, c’est l’intelligence de l’homme. Partout où le moi se substitue à la volonté de Dieu, l’activité de l’esprit humain façonne un dieu pour se plaire à lui-même, et il le fait au nom du Seigneur, au nom du vrai Dieu !

Aujourd’hui, nous voyons partout ces œuvres faites de mains comme les peintures et les sculptures estampillées du nom de l’Éternel ! À l’époque d’Aaron, il avait été dit au peuple : « Demain, une fête à l’Éternel » (Ex. 32 : 5). Lorsqu’ils s’étaient réunis, ils avaient trouvé le veau que l’homme avait fait, à leur propre image. Aujourd’hui, des hommes n’adorent-ils pas Christ à leur façon, un dieu qu’ils ont eux-mêmes fabriqué, selon leurs propres pensées, et l’appelant du nom du Dieu vivant ? La racine de tout cela parmi les chrétiens professants – sans dénigrer les vraies activités chrétiennes – est la substitution de l’activité chrétienne à la foi chrétienne. La foi doit toujours être à la base, et si elle n’y est pas, une idole quelconque s’y rattachera, quelle que soit la grandeur de l’activité, même si elle porte du fruit pour Dieu.

 

14.2.2    Le Lévite de Juda

Les détails de l’évolution des choses sont très simples. Au verset 5, nous voyons qu’il faut une maison pour placer l’image taillée de Michée, puis il faut un éphod ou vêtement sacerdotal, et des théraphims ou images secondaires, enfin il faut un sacrificateur pour présider sur tout cela. Michée nomme alors un de ses fils à cet effet. Mais il trouve bientôt mieux qu’un sacrificateur selon ses propres pensées, il trouve un sacrificateur de Dieu, au moins en partie.

C’est là qu’intervient le Lévite ; ce détail est très instructif. Le Lévite est un jeune homme de la famille de Juda, qui vient de Bethléhem. Nous avons déjà vu que Juda devrait toujours être prééminent. Ce jeune homme insatisfait quitte ce lieu où se trouve la foi en la vérité divine, et va à la recherche de quelque chose de mieux. À l’instar d’Elimélec qui est parti de Bethléem, la maison du pain, parce qu’il manquait de nourriture, l’homme quitte ici la maison du pain afin d’améliorer sa condition. Comment pourrait-on être mieux ailleurs que dans une maison d’abondance ? Et pourtant, l’incrédulité agit toujours ainsi. L’insatisfaction éloignera toujours quelqu’un de la bénédiction, et l’amènera toujours à une place inférieure à celle qu’il occupait précédemment.

Ce jeune homme va à la montagne d’Éphraïm, et en réponse à la question de Michée le concernant, dit qu’il cherche un lieu et une occupation. Michée lui dit : « Demeure avec moi, et tu seras pour moi un père et un sacrificateur, et je te donnerai dix pièces d’argent par an, et un habillement complet, et ton entretien » (17 : 10). Alors, «  le Lévite consentit à demeurer avec l’homme, et le jeune homme fut pour lui comme un de ses fils. Et Michée consacra le Lévite ; et le jeune homme fut son sacrificateur « (v. 11-12). C’est simple, un homme qui se fait un dieu peut bien, aussi, consacrer un sacrificateur pour en prendre soin ! Michée conclut avec la remarque à l’apparence pieuse : « Maintenant, je connais que l’Éternel me fera du bien, puisque j’ai un Lévite pour sacrificateur » (v. 13).

C’est presque grotesque ; en considérant ce passage, nous pouvons, hélas, l’appliquer aisément à ce que nous avons autour de nous aujourd’hui. Ce Lévite insatisfait veut améliorer sa condition. Il n’est que lévite ; il a, sans doute, souvent souhaité avec impatience un rôle supérieur, être sacrificateur peut-être, pour avoir non seulement le droit d’administrer les choses divines, mais aussi le droit d’accès à Dieu, pour se tenir entre Dieu et son peuple, devenant ainsi un canal de communication. L’occasion se présente. Michée l’invite chez lui, et lui offre une place de sacrificateur. Il lui confie la charge de tous les intérêts religieux, afin d’en être entièrement déchargé, et lui offre un salaire annuel, afin qu’il soit sans souci pour ses besoins personnels.

Ceci n’est-il pas écrit en prévision de nos jours où tant de lévites insatisfaits sortent de leur place et se démènent pour améliorer leur condition ? Rechercher une position plus élevée amène le serviteur à laisser la maison du pain, spirituellement et pratiquement. Son désir d’avoir une place dans le clergé, n’est-il pas suscité par un peuple tout disposé à ce qu’il prenne cette place ? En effet, nous savons que le cœur de l’homme n’aime pas être en contact trop étroit avec Dieu, il aime bien avoir un intermédiaire. C’est là la raison de la sacrificature. C’est agréable d’avoir quelqu’un qui s’occupe des choses les plus sacrées et les plus délicates de la religion, vous laissant faire ce qui vous plaît avec la conscience tranquille.

Un vrai ministère de la Parole est une chose bénie. Mais rappelons-nous, comme nous l’avons vu dans l’histoire de Gédéon, qu’il n’y a que deux classes de sacrificateurs : d’un côté, l’unique souverain sacrificateur, Christ, dont personne n’oserait usurper la place, et de l’autre, tout le peuple de Dieu. » Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal » (1 Pier. 2 : 9). Le sacerdoce établi par l’homme, lui, détournera toujours un ministère destiné au service, vers la sacrificature. Jadis, le lévite préparait le sacrifice, afin que le sacrificateur puisse l’offrir à Dieu ; aujourd’hui, tout véritable ministère consiste simplement à préparer les matériaux de la vérité divine pour les saints, afin qu’ils puissent les présenter comme le sacrifice de leurs cœurs.

Tout ministère qui prend la place du peuple de Dieu en tant que sacrificateur, usurpe tout simplement la place du Saint Esprit dans les cœurs. Tout service qui s’immisce dans le sanctuaire sacré du cœur du croyant, pour lui dicter son adoration, correspond au lévite qui veut être sacrificateur. Un sacrificateur établi par l’homme conduit toujours à un dieu conçu par l’homme. L’esprit humain s’active à façonner un dieu d’après ses propres pensées. Il prend le nom de Christ, certaines vérités de Christ, son enseignement, etc. et avec ces matériaux – il est significatif que cette idole ait été faite d’argent – il façonne un faux Christ.

Le ministère de Christ, aujourd’hui, parmi le peuple de Dieu, montre-t-il un Christ tel que nous le présente l’Esprit de Dieu dans sa Parole, ou un Christ selon les pensées de l’homme ? La chrétienté n’a-t-elle pas un Christ selon les pensées des hommes ? Un sacerdoce humain ne peut avoir qu’un objet humain à présenter au culte.

Aujourd’hui, le dieu que les hommes professent connaître, et que l’on enseigne dans la chrétienté, n’a-t-il pas été dépouillé de ses attributs, n’est-il pas un homme ?  Certainement. Le dieu dont les hommes parlent aujourd’hui, est-il tout-puissant et souverain, quand ils croient que le pouvoir est en eux-mêmes, qu’ils sont des êtres créés de leur propre volonté, qu’ils ont le libre arbitre, comme ils aiment à dire, et que tout dépend de l’homme ? Ce dieu, a-t-il une sainteté absolue, quand ils le façonnent pour faire répondre son attribut de sainteté à leurs pensées, et non pas selon ce qu’Il a révélé dans Sa sainte Parole ? Est-il un dieu de justice ? Aujourd’hui, il serait hué dans de nombreux endroits, celui qui oserait proclamer la justice inflexible et le jugement d’un Dieu tout-puissant.

Cela explique pourquoi il n’est plus prêché que l’homme est responsable devant Dieu, qu’il aura à répondre au jour du grand trône blanc, et qu’il recevra le jugement éternel pour les actes accomplis dans le corps, s’il n’est pas sauvé. C’est pourquoi rien n’est dit d’un châtiment futur et que ce terrible mot « enfer » a été rayé du vocabulaire des prédicateurs. C’est pourquoi Dieu est présenté de façon si triste, étant dépeint par l’homme à la manière des païens qui rient de leurs propres dieux et pensent pouvoir les tromper. Tout cela est condamné au Psaume 50, où Dieu dit à ceux qui tentent de le faire : « Tu as estimé que j’étais véritablement comme toi » (v. 21).

L’homme s’étant donc fait un dieu, se fait un sacrificateur pour l’aider à adorer son dieu. Pour cela, il ouvre la porte à toute idolâtrie qui a un nom chrétien. Il pense que l’œuvre du Seigneur prospère, et que le Seigneur va le bénir, puisqu’il a un sacrificateur, une maison, un éphod et une image qu’il appelle son dieu. Assurément, rien ne manque, il est satisfait de cette situation.

Mais un état comme celui-là ne peut pas rester statique ; s’il n’est pas jugé, il s’amplifiera. Après avoir vu le cas d’un individu isolé, nous allons maintenant voir comment il se répand, jusqu’à concerner toute la tribu de Dan.

 

14.2.3    La tribu de Dan

Tout comme Juda représente la vérité, qui est à la base de tout gouvernement parmi le peuple de Dieu, ainsi Dan représente l’exécution du gouvernement. Dan signifie juge, comme il est indiqué dans la prophétie de Jacob. « Dan jugera son peuple comme une autre des tribus d’Israël » (Gen. 49 : 16). De façon frappante, Jacob prédit l’apostasie que nous voyons débuter ici.

Il est significatif que les mots « leur lot » soient entre crochets ; ils n’y sont pas dans l’original - il est dit : « [leur lot] ne leur était point échu en héritage ». Pratiquement, ils étaient sans lot, sans héritage. En fait, la tribu de Dan ne l’avait pas conquis. Les Philistins en occupaient une grande partie et, comme nous l’avons vu, les Danites n’étaient pas en mesure d’expulser les Amoréens, de sorte qu’ils étaient chassés dans les montagnes où ils étaient si à l’étroit, qu’ils ne jouissaient pas de leur héritage.

C’est l’occasion idéale pour que l’idolâtrie s’introduise. Ceux qui ne jouissent pas pleinement de leur héritage sont prêts à laisser entrer l’ennemi qui les égarera. Tout comme Israël n’avait pas réussi à entrer en possession de ce qui lui appartenait, ainsi, si le cœur n’est pas rempli de son héritage spirituel et n’en jouit pas, il sera prêt à laisser entrer l’ennemi qui le conduira à l’idolâtrie. Les Danites se démènent, comme le lévite l’avait fait ; « Comme un oiseau erre çà et là loin de son nid, ainsi est l’homme qui erre loin de son lieu » (Prov. 27 : 8).

Un récit assez long nous montre la façon dont ils vont espionner pour acquérir un autre lot. Ils montent au nord du pays ; ce détail évoque le fait de tourner le dos au Seigneur. Ils montent tout au Nord, et reconnaissent un endroit pour eux-mêmes au milieu d’un peuple tranquille. C’est un endroit caché sur lequel régnait Jabin.

Bien sûr, leur conquête ne serait pas condamnable si le lot leur appartenait réellement, mais leur activité n’était pas liée à ce que Dieu leur avait donné. Si elle avait été dirigée contre les Philistins, s’ils s’étaient contentés d’élargir les limites que Dieu leur avait données, cela aurait été sans doute la foi. Mais ici, incapables de jouir de ce que Dieu leur a effectivement donné, ils vont chercher ailleurs un lieu plus facile que celui détenu par les redoutables Philistins. Hélas, le peuple de Dieu recherche souvent la facilité pour s’installer dans un lot plus agréable que celui que Dieu lui a donné, lequel, s’il est peut-être austère, donne pourtant de plus beaux fruits !

Quant à nous, ne nous arrive-t-il pas souvent de choisir ce qui nous coûte le moins, en évitant les ennemis dont nous craignons la puissance, et en essayant de combattre ceux qu’on peut vaincre facilement, mais qui, si nous ne sommes pas vraiment en communion avec Dieu, nous renverseront ? Ainsi, Dan va chercher un lot différent de celui que Dieu lui avait assigné.

Les choses que nous avons d’abord à surmonter sont celles qui sont proches de nous, que nous pouvons craindre, qui nous entravent et nous empêchent de jouir de notre part. Dans l’histoire de l’Église, beaucoup sont partis pour l’œuvre à l’étranger. Si le fait d’aller au loin pour répandre l’évangile est une bonne chose, néanmoins, pour le peuple de Dieu, la première chose, essentielle, est de jouir de notre héritage là où nous sommes.

Si nous ne vainquons pas les difficultés qui nous empêchent de jouir de nos privilèges, nous serons comme Dan, nous détournant de notre propre sphère, nous nous placerons sur un terrain inférieur quant à Dieu et ses intérêts. Il est important pour nous de réaliser que ce sont les compromis et la recherche de chemins plus faciles qui conduisent à déshonorer Dieu, et à lui désobéir.

Comme ils allaient, ces espions reconnaissent la voix du Lévite devenu sacrificateur dans la maison de Michée et lui demandent conseil. Ils demandent la direction à celui qui s’est écarté du chemin sur lequel Dieu l’avait appelé ! Ils demandent conseil, pour ainsi dire, à un dieu façonné par l’homme, un dieu dont les attributs de sagesse, de sainteté et de justice ont été ôtés, un dieu à l’image de la pensée de l’homme, à qui il n’est pas trop difficile d’obéir.

Ils obtiennent, évidemment, la direction qu’ils désirent. Il en est de même des gens aujourd’hui qui interrogent le dieu de leur propre pensée. Lorsque nous demandons l’aide de Dieu, à qui l’adressons-nous : à une idole, ou au Dieu vivant dont la volonté est exprimée dans sa Parole ? Combien de gens disent : le Seigneur m’a conduit ainsi et ainsi, le Seigneur a mis sur mon cœur de faire ceci et cela ! Ils avaient le sentiment de devoir le faire, mais, était-ce le sentiment de Dieu ?

Dieu n’agit pas seulement par la providence, et ne guide certainement pas son peuple par des sentiments non fondés sur sa parole. Nous pouvons dire que le Seigneur nous conduit à faire ceci ou cela, mais si ce n’est pas le Saint-Esprit qui nous conduit par sa sainte Parole, nous risquons d’être dirigés par nos propres sentiments, ou pire, par certaines pensées que l’ennemi aurait mis dans notre esprit, ou par des circonstances paraissant providentielles qu’il aurait disposées. Souvent, on appelle rechercher la pensée du Seigneur le fait de s’enquérir à la maison de Michée, auprès d’un lévite qui prend la place de sacrificateur et d’une icône qui n’est qu’une idole, au lieu de s’enquérir auprès du Dieu vivant et vrai.

Les Danites vont donc explorer le pays, et tout semble répondre à leur attente : c’est une belle terre facile à conquérir ! Ils reviennent alors à Dan, convoquent la tribu, et partent en expédition. Là encore, les choses sont si frappantes qu’elles prêteraient à sourire si ce n’était pas si triste. Cette troupe désire les services d’un homme qui servait dans une petite sphère, n’étant sacrificateur que d’une famille. Ils lui disent : Nous t’offrons mieux, transfère ton système et prend en charge une tribu et non plus seulement une famille insignifiante, ce sera plus utile. N’est-ce pas mieux d’inclure dans ton service toute une tribu d’Israël, au lieu de te limiter à ton petit cercle d’influence ?

Alors, le Lévite, surpris d’un tel avancement et très heureux, considère maintenant comme une direction claire du Seigneur d’entrer dans ce champ d’activité plus étendu. Il croit être conduit à une place plus utile où il y a plus d’activité. Nous ne blâmons pas de vrais services dévoués à Christ, mais cet état de choses où l’homme s’immisce dans le sacerdoce, et usurpe la place que Christ seul peut occuper, au détriment des saints, et au déshonneur de Dieu. Nous devons en avoir horreur, et le fustiger partout où nous le voyons aujourd’hui. Si le Seigneur peut dire du système clérical : « ce que je hais » (Apoc. 2 : 15), haïssons ce qui s’immisce dans les choses de Christ, en remplaçant le Saint Esprit.

Après la vaine résistance de Michée qui constate que la tribu est plus forte que lui et que leurs propositions sont plus fortes que les siennes, le Lévite va tout joyeux dans son nouveau champ d’activité et emmène son idolâtrie – son image taillée, son éphod et tout son attirail – jusqu’à Dan. Là, jusqu’à la captivité du pays (mots significatifs), jusqu’à ce que Dieu vienne en jugement et que l’arche soit enlevée de Silo, cette subtile idolâtrie va régner dans la tribu de Dan. Elle fera lever la pâte tout entière pour aboutir, à n’en pas douter, à une idolâtrie plus profonde, à savoir les deux veaux que Jéroboam, fils de Nebath a mis en place, l’un à Béthel, en Éphraïm, près de l’origine de l’idolâtrie, et l’autre à Dan, l’endroit où elle a culminé.

Ainsi, aux jours de la division sous Jéroboam fils de Nebath, tout Israël apostat est marqué par l’idolâtrie. Combien le mal se propage ! Aujourd’hui, quand nous voyons combien le levain du système clérical a levé dans toute la chrétienté, et comment ceux qui auraient dû être les serviteurs de Christ ont été mis dans un clergé à part, nous ne pouvons pas en parler trop sévèrement. S’il est une chose à laquelle nous devrions résister avec horreur et avec toute notre énergie, c’est ce qui contriste la présence du Saint-Esprit en chaque croyant, qui contrarie la souveraine sacrificature unique de Christ, et le précieux fait que tout croyant a accès au sanctuaire par le sang de Jésus.

Ayons ce mal en horreur, quel qu’en soit le nom (mais les idoles n’ont pas toujours de nom) ; il est facile d’avoir un clergé sans le savoir, c’est de l’idolâtrie, veillons-y. C’est la paresse spirituelle qui se décharge de la responsabilité du culte et des actions de grâces, qui fait qu’un clergé se forme, et qu’ainsi l’idolâtrie apparaît.

L’idolâtrie que nous avons ici n’est que l’aspect intérieur de l’apostasie visible de tout le peuple amené sous la botte des ennemis de Dieu. C’est solennel ! Cet état de choses manifesté ici, n’est-il pas la raison de leur impuissance face à l’ennemi ?

Tout à la fin, il nous est dit que ce lévite est fils de Guershom, fils de Moïse ; lui et ses fils furent sacrificateurs pour la tribu de Dan jusqu’au jour de la captivité du pays. Ce Lévite, qui a pris la place de sacrificateur lié à l’idolâtrie, était descendant de Moïse lui-même, le grand législateur d’Israël. Quelle pensée ! Une descendance spirituelle, ou hériter de caractères spirituels, n’existe pas : » il vous faut être nés de nouveau », a dit Jésus à Nicodème (Jean 3 : 7). Un descendant de Moïse peut devenir le chef de file de l’apostasie, tout autant qu’un roi païen, ennemi de Dieu.

Il est solennel de penser que les descendants de ceux qui ont été proches de Dieu quant à un privilège ou un service, mais qui n’ont pas la même foi, puissent utiliser la spiritualité de leurs ancêtres pour excuser leur propre idolâtrie. Ne voyons-nous pas parfois aujourd’hui des hommes revendiquer la spiritualité de ceux qui ont fondé leur groupement religieux, lesquels avaient vraiment aimé Christ et Lui avaient été fidèles selon leurs lumières ? Ne trouvons-nous pas des gens prétendre à l’excellence spirituelle en tirant profit de la piété de leurs pères ?

Souvenons-nous que la présence du Saint Esprit au milieu du peuple de Dieu règle toutes ces questions. Nous n’avons pas à regarder en arrière à nos pères, à l’époque de Luther, ou de Wesley, ou même de Paul, Dieu merci. Cet Esprit qui a parlé par Paul et qui a donné l’énergie aux serviteurs de Christ qui Lui ont été fidèles dans les jours passés, habite aujourd’hui dans l’Église et dans chaque croyant. Tout croyant est donc un instrument que l’Esprit de Dieu peut utiliser, s’il s’abandonne à lui.

C’est l’Esprit qui nous ouvre les réalités divines et nous garde ainsi de l’idolâtrie. C’est Lui qui nous révèle les beautés et les gloires de Christ, notre vrai sacrificateur, et nous garde ainsi de toute pensée de sacrificature établie humainement. Si les croyants réalisaient la présence de l’Esprit de Dieu demeurant parmi eux, ils trouveraient le remède à cette tendance au cléricalisme et à l’idolâtrie qui y est liée.

Rappelons-nous que l’apôtre Jean, qui parlait si bien de l’amour divin et de la vérité divine, à la fin de son épître consacrée à présenter les réalités de la vie divine pour le croyant, a dit : « Enfants, gardez-vous des idoles » (1 Jean 5 : 21).

Veillons à ne pas avoir de pensées qui ne seraient pas de Dieu. N’éliminons rien de la révélation de l’Esprit, par sa sainte Parole, quant à Dieu et Jésus Christ, notre grand Souverain sacrificateur, et nous éviterons l’idolâtrie.

Réjouissons-nous de notre possession dans la montagne d’Éphraïm, et nous ne serons pas caractérisés par l’insatisfaction qui cherche toujours autre chose ; nous jouirons de notre part en Juda, et la louange en jaillira. Dieu sera ainsi glorifié en nous et parmi son peuple.

Ces dangers si pressants partout, dont Dieu nous avertit, peuvent être évités, même parmi les saints les plus faibles, si la foi se saisit des provisions qu’Il nous donne.

Nous avions vu une partie de la leçon de ces deux chapitres, au chapitre  « De Guilgal à Bokim », mais l’Esprit de Dieu y insiste à nouveau ici, et nous ne pouvons pas l’ignorer. Puisse-t-elle être écrite dans nos cœurs !

 

15 Corruption morale en Israël et gouvernement inefficace (Jug. 19 à 21)

Nous avons vu que la dernière partie du livre, après le récit de la vie de Samson, suit un ordre moral et non pas chronologique. C’est particulièrement le cas avec ces deux derniers chapitres. La scène remonte aux premiers jours de l’occupation du pays par Israël, à l’époque de Phinées, le sacrificateur, qui accompagnait Josué. Ce récit est destiné à nous montrer la source de la corruption, qui a engendré le mal sur lequel nous nous sommes arrêtés. L’apostasie de Dan vient en premier dans cet ordre moral ; elle nous a montré que la racine de tout déclin, qu’il soit moral ou spirituel, est la substitution de quelque chose à la pleine révélation de ce qu’est Christ ; c’est l’idolâtrie qui introduit toujours un homme religieux entre l’âme et Dieu, d’une façon ou d’une autre.

Nous avons insisté sur ce point pour être sensibilisés à ce danger. Car nous ne voulons pas en venir seulement à étudier la portée du livre, son application générale, et critiquer sévèrement ceux qui peuvent avoir moins de lumière, mais nous voulons entendre la voix de Dieu qui veut nous rendre conscients des dangers auxquels nous sommes confrontés dans la vie, car nous savons que de tels dangers existent.

Nous avons vu la racine, et ici nous avons le fruit et la racine. Dieu les réunit pour que le caractère du mal frappe d’horreur nos âmes, et pour que nous voyions comment ils sont liés, afin que nous puissions juger la terrible racine qui produit un tel mal.

 

15.1  La corruption indescriptible du cœur de l’homme

La lecture de ces chapitres nous fait dire : est-il possible que ce soit le tableau de mon cœur ? C’est là la question, il ne s’agit pas de savoir ce qui s’est passé en Israël aux jours où il n’y avait pas de roi, mais de ce dont le cœur de l’homme est capable. Notre Seigneur a dit : « C’est du dedans, du coeur des hommes, que sortent mauvaises pensées, fornications, vols, meurtres, adultères… : toutes ces mauvaises choses sortent du dedans et souillent l’homme » (Marc 7 : 21-23).

 Or c’est le cœur loin de Dieu qui produit ces choses ; par conséquent, l’idolâtrie que nous avons vue est à la racine de cette terrible corruption. L’ignorance des droits de Dieu sur nous entraîne l’ignorance des droits de l’homme. Ce qui caractérise ce que l’on appelle la morale - la décence, l’honneur - disparaît quand Dieu est mis de côté.

 C’est exactement ce que présente le premier chapitre de l’épître aux Romains : une liste de crimes qui nous fait rougir de honte. Elle n’est pas donnée comme le résultat exceptionnel du péché de l’homme, mais comme le fruit normal de son éloignement de Dieu. Cela concerne toute personne non sauvée : « Ils n’ont pas trouvé bon de garder la connaissance de Dieu » (Rom. 1 : 28). Quel homme irréconcilié avec Lui pourrait garder sa connaissance ? Aucun. Aussi les livre-t-Il à un mal comme celui perpétré à Sodome et Gomorrhe, un mal dont on ne peut parler, tant cette corruption est horrible. Ainsi, c’est comme si l’Esprit de Dieu mettait côte à côte la racine et le fruit, et disait aux hommes : Eloignez-vous de Dieu, et vous donnerez libre cours à toute forme de mal dont la chair est capable.

 Quelle leçon humiliante ! Rappelons-nous que ce péché qui est devant nous, vient du cœur corrompu que nous avons par nature. Israël l’avait oublié, et c’est pourquoi ce récit nous est donné ici.

Le mal est si atroce que la nation entière est excessivement choquée et oublie qu’il y a une leçon à apprendre. Pour nous aussi, la leçon sera perdue si, comme Israël, nos esprits ne sont occupés que de cette horreur, et oublient que nos propres cœurs sont capables des mêmes choses. Dieu mesure les choses qui sont en germe et non selon leur accomplissement effectif ; le Seigneur a dit que celui qui regarde une femme pour la convoiter commet l’adultère (Matt. 5 : 28), comme celle surprise par les pharisiens qui s’apprêtaient à la lapider (Jean 8 : 5) ; Dieu regarde au cœur plus qu’à l’apparence extérieure (1 Sam. 16 : 7). En pensant à ces paroles de l’Éternel à son serviteur Samuel, est-ce que le fait que de mauvaises pensées puissent traverser nos esprits, nous est aussi insupportable que cela devrait l’être ? Le croyant qui se tient devant Dieu hait la pensée du péché autant que l’acte lui-même. Si nous craignons le Seigneur, haïssons le mal, sa Parole nous y exhorte : « Ayez en horreur le mal, tenez ferme au bien » (Rom. 12 : 9). Le vrai jugement du péché considère toujours la racine de celui-ci dans le cœur, tout autant que le fruit manifesté dans la vie.

Nous n’entrerons pas dans les détails horribles que nous avons sous les yeux. Il est très humiliant de penser que nous portons en nous ce qui, sans le secours de la grâce et de la sainteté divine, produirait le même mal. Nous nous souvenons d’un vieux chrétien qui, pointant du doigt les ivrognes ou les criminels qui passaient, disait : C’est moi, n’eût été la grâce de Dieu. - Pouvons-nous dire sincèrement la même chose ? Pensons-nous vraiment que nous pourrions être livrés à ces choses, si Dieu, dans sa grâce souveraine, ne s’interposait pas ? Nos cœurs ne devraient-ils pas déborder de louange et de joie, en pensant à la grâce qui nous a arrachés à une corruption pire que ne pourrait être la punition qu’elle mérite.

Grâces à Dieu pour la délivrance de l’esclavage du péché, comme aussi de la colère contre le péché. Rendons grâces aussi parce que la colère contre le péché est la miséricorde de Dieu envers un monde incrédule. C’est ce qui est le mieux pour lui, car il vaut mieux être sous sa colère contre le péché que sous le péché lui-même qui apporte la colère. Il vaut mieux être enfermé dans la prison, où le mal est au moins contenu, plutôt qu’avoir une vie dissolue dans le monde, étant esclaves des terribles convoitises.

 

15.2  Le péché de Guibha

Comme nous l’avons déjà remarqué, le mal survient du laxisme qui caractérisait le peuple. Comme auparavant, voici à nouveau un Lévite. Dieu avait réparti les Lévites parmi les douze tribus, afin de servir de liens pour maintenir le peuple dans une même vie spirituelle, dans une même fidélité à Dieu, à sa maison et à son service. Nous avons déjà vu comment ils ont failli à leur mission, avec le Lévite du chapitre précédent qui s’était fait ministre de l’idolâtrie, conduisant une tribu entière loin de Dieu dans l’idolâtrie.

Ici, au lieu d’œuvrer à souder le peuple, le Lévite le divise. En tout cas, il est frappant de le voir dominé par ses désirs corrompus au lieu de servir les autres. Nous ne le voyons pas les reins ceints de la justice, mais indulgent envers lui-même. Ce laisser-aller le conduira à l’horrible crime.

Sa concubine le quitte pour retourner à la maison de son père. Il va la chercher, s’adonne à la boisson, et passe des jours à manger et à boire. Puis un jour, il part soudain, comme par caprice, pour retourner chez lui, sans doute pour reprendre son service. Malgré l’insistance de son beau-père pour rester un jour de plus, il s’en va, la nuit tombant déjà. Assurément la nuit tombait, pour elle, pour lui, et pour la nation aussi.

Il passe par Jébus (Jérusalem). Pourquoi cette ville d’Israël n’était-elle pas possédée par le peuple de Dieu ? C’était une ville Benjaminite et, comme nous l’avons vu dans la première partie du livre, Benjamin n’avait pas réussi à en prendre possession, alors que, pourtant, elle devait être le centre du gouvernement. En type, Benjamin devait représenter Christ dans son gouvernement royal sur le peuple et sur les nations. La faillite de Benjamin représente celle du gouvernement ; l’autorité de Christ n’est pas reconnue ; ce sont les misérables Gentils qui règnent en maître, et non Benjamin. Les Jébusiens - » qui foulent au pied » - étaient là, piétinant tout ce qui est de Dieu et de l’homme. Mais les Jébusiens étaient aussi au milieu de Benjamin qui faisait pire qu’eux.

Ils vont jusqu’à Guibha, et ils trouvent accueil dans la maison d’un vieillard éphraïmite. C’est là que se commet un abominable forfait identique à celui de Sodome et Gomorrhe. Une fois perpétré ce crime horrible, le Lévite le fait connaître à toute la nation de la façon la plus affreuse qui soit, en coupant le corps de la pauvre femme en morceaux et en les envoyant à chacune des tribus.

 

15.3  La réponse à l’infamie par la violence

 Toute la nation est horrifiée par le crime affreux qui a été commis au milieu d’elle. Qu’est-ce qui les a réveillés ? Pourquoi se rassemblent-ils comme un seul homme ? Pour se venger du mal. C’est le mal qui les a réveillés, c’est le mal qui les rassemble, c’est l’exécution du jugement sur le mal qui arme leurs bras et unit leurs cœurs. Non, le mal ne servira jamais de lien pour garder uni le peuple de Dieu. Avons-nous déjà vu des gens réunis paisiblement pour s’occuper du mal ? Pour un temps, nous pourrons peut-être nous réunir pour avoir des réunions d’humiliation quant au mal, mais ce n’est pas la façon dont Dieu souhaite réunir son peuple.

C’est Christ, le Saint et le Véritable, qui rassemble son peuple. Il nous attire par son amour, et nous tient dans cette sphère où l’exercice des soins dans l’amour, comme des frères unis ensemble, est possible.

C’est la première grande leçon que nous tirons du chapitre 20. Le peuple n’est uni que par le jugement du mal ; pas un d’eux ne retournera chez lui jusqu’à ce que le mal qui a été commis ait été jugé. Un tel rassemblement avait-il déjà eu lieu à Silo pour célébrer la fête de la Pâque ? La fête des Tabernacles avait-elle réuni la nation tout entière dans la joie ou dans un esprit de vengeance ? Dieu invitait son peuple tacitement, chaque année, à venir célébrer la fête pour jouir d’une sainte communion avec Lui. Mais ils préféraient habiter parmi les païens, s’installer à côté de leurs ennemis, et les enseigner. C’est seulement quand ils sont tirés de leur léthargie par cette corruption innommable, qu’ils s’assemblent comme un seul homme. Mais ce qui les attire, ce n’est pas la grâce, ni l’amour, ni la bonté, ni la plénitude de la bénédiction dépeinte dans la corbeille de fruits en Deutéronome 26. Aucune de ces choses ne les rapproche, mais un mal a été commis, et ils sont galvanisés pour un temps dans une apparente fidélité à Dieu.

 Remarquons qu’il n’y a pas un seul commentaire sur l’acte commis. Dieu n’a pas besoin de le prouver, car même l’homme naturel est révolté par ce qui s’est passé, il n’est pas nécessaire de stigmatiser cette horrible corruption. En revanche, l’Esprit de Dieu insiste sur l’état des âmes parmi le reste du peuple, qui les rendait incapables d’exécuter la discipline divine sur les méchants.

Voyons cela de plus près. Un mal a été commis à Guibha de Benjamin. Il est indiqué dans le livre du Deutéronome comment remonter à la source du mal, et comment y faire face. Tout devait se faire posément, avec calme, après mûre réflexion, et surtout, dans la présence de Dieu, dans un esprit de soumission à Dieu. Ces personnes, qui n’étaient pas habituées à demeurer dans la sainte présence de Dieu, prennent un raccourci, pensant que la question est simple. Ils envoient un message laconique à Benjamin : « Et maintenant, livrez-nous ces hommes, fils de Bélial ... afin que nous les fassions mourir et que nous ôtions le mal du milieu d’Israël » (Jug. 20 : 13).

Ce bref message ne peut avoir comme effet que de dresser Benjamin contre ses frères. Toute la tribu est convoquée devant Israël ; cela devient une question de fierté tribale, et Benjamin se ligue contre tout Israël. Il n’est plus tenu compte des hommes de Bélial, on n’entend plus parler de ce qui a été fait. Pourtant, Benjamin n’avait-il pas une conscience comme les autres tribus ? Si la question avait été traitée dans la crainte de Dieu, et dans sa dépendance, Benjamin n’aurait-il pas été aussi prompt que le reste d’Israël à se purifier de cette honte terrible ? Mais quelle soudaine brutalité, quelle dureté et surtout quel orgueil à peine voilé ! Ils devaient se dire : Un tel mal ne pourrait avoir lieu en Issacar ; Éphraïm ne saurait avoir un tel état de choses en son sein ; Benjamin le permet. - Quelle provocation ! L’orgueil de Benjamin est attisé, il oublie complètement l’horrible péché, et dit : Nous ne nous laisserons pas piétiner par Israël, nous résisterons !

 Les hommes de Benjamin avaient tort, nous l’admettons tout à fait. Ils n’auraient pas dû se dresser de cette manière contre leurs frères, mais être unis à eux dans la condamnation de ce mal horrible. Mais les brusques mesures prises par des propres justes pour traiter la question laissaient les coupables de côté, et en conséquence, c’est à Benjamin qu’ils avaient affaire. Traiter les choses de cette façon, en attisant l’orgueil et la rébellion du cœur naturel, est le plus sûr moyen de produire les mêmes fruits spirituels que ceux que nous avons ici. Quelle chose de prendre les gens par la gorge pour en faire sortir le mal ! Marteler la conscience d’un homme, pour un péché dont il peut être responsable sans en être coupable personnellement, heurtera sa fierté et fera ressortir en lui de l’hostilité, plutôt que de lui faire voir le mal qu’il devrait avoir en horreur et juger. Apprenons bien cette leçon et ne soyons pas comme Israël, qui ne faisait que susciter l’opposition, au lieu d’amener le peuple dans la crainte de Dieu pour juger le mal duquel ils étaient co-responsables. Il n’est pas besoin d’insister ; nous pouvons, hélas, trouver très facilement des exemples d’une telle attitude parmi les saints.

 Tout Israël se rassemble, ils sont enfin unis ; ce que la grâce n’a pas fait, le jugement – ou l’intention de juger – semble le faire. Remarquons ceci : ils avaient soif de sang. On ne voit pas chez eux l’horreur du péché, on ne les voit pas brisés de ce qu’un tel mal ait été possible en Israël. S’ils mettaient Benjamin face à sa responsabilité, pourquoi ne le faisaient-ils pas pour toute la nation ? Si l’on pouvait dire que c’était terrible qu’un tel mal soit possible en Benjamin, pourquoi ne pas dire que c’était terrible qu’un tel mal soit possible en Israël ? Ah, c’est parce qu’ils étaient orgueilleux et propres justes.

Un mal semblable est mentionné dans le Nouveau Testament, parmi les Corinthiens. Il y avait une corruption morale telle qu’elle n’existait pas même parmi les nations. Quel était l’état des saints ? « Et vous êtes enflés d’orgueil, et vous n’avez pas plutôt mené deuil, afin que celui qui a commis cette action soit ôté du milieu de vous ! « (1 Cor. 5 : 2). Ils étaient « enflés », non à cause du péché, mais sans doute parce qu’ils pensaient que, ne l’ayant pas commis eux-mêmes, ils pouvaient remercier Dieu de ne pas être comme celui qui y était tombé. Au lieu d’être brisés et sur leurs faces devant Dieu, lui confessant leur propre état moral qui avait permis qu’un tel mal arrive, ils continuaient de penser à leurs dons, étant ainsi incapables de régler la question.

 Ne pensons pas qu’Israël était en meilleur état en essayant de traiter le mal sans retard. Ils étaient enflés d’orgueil au sujet de leur position vis-à-vis du mal. Ah, ils allaient montrer leur zèle pour le Seigneur ! Mais ce qui les rassemble, c’est une soif de sang, plutôt qu’un zèle pour l’honneur du Seigneur.

Eh bien, Dieu les laisse. Ils sont si déterminés qu’Il ne les retient pas ; ils vont même L’impliquer. Remarquons que la première question qu’ils posent n’est pas : Monterons-nous ? ; mais : « Qui de nous montera le premier... ? » (v. 18). Ils ont décidé de monter contre Benjamin pour se venger sur toute la tribu, et la seule chose qu’ils veulent entendre de l’Éternel, c’est qui montera le premier. Dieu les prend au mot, et dit à Juda de passer en premier. Il y avait environ 26 000 guerriers benjaminites, et quelque 400 000 guerriers israélites. Or Benjamin a tué 22 000 guerriers d’Israël, presque homme pour homme !

 

15.4  La discipline

 Dieu est-il du côté du péché ou du côté de la négligence à juger le péché ? C’est un Dieu saint, mais sa sainteté est plus exigeante que la nôtre. Sa sainteté va sonder les cœurs de ceux qui sont apparemment innocents et les amener au sentiment de leur propre culpabilité, au même titre que les coupables ; c’est pourquoi Il les laisse tomber à terre devant ceux qui se sont rangés orgueilleusement contre eux.

Le peuple de Dieu est souvent déconcerté, même ceux qui sont du bon côté. Certains disent parfois : Ce point de vue est faux, ceux qui le partagent ont tort, personne n’oserait se ranger de leur côté. Quant à ceux-ci, ils ont raison, il est juste de rejeter ce mal. - N’allons pas si vite. Certains disent qu’il n’y a que deux côtés, le bon ou le mauvais : si A a raison, alors B a tort, et si A a tort, alors B a raison. Mais n’y a-t-il pas un troisième côté ? Il se peut que les deux aient tort, et c’est bien là la question. Il y a le côté de l’un, le côté de l’autre, et celui de Dieu. Même s’il semble être lent, c’est ce côté qu’il faut choisir plutôt qu’un jugement du mal sévère et abrupt, qui, par sa sévérité même, amoindrit le sens du péché dans l’âme.

Maintenant, Dieu va leur montrer leur propre péché. Il va leur faire comprendre qu’ils sont sous son gouvernement à cause de leur état général, tout comme l’est Benjamin, à cause de la tolérance du mal parmi sa tribu. C’est pourquoi ils tombent devant les Benjaminites, et sont battus.

Ils se fortifient et montent de nouveau le lendemain. Ils avaient besoin de se fortifier, mais il est bien préférable de faire ce que fit David, quand le peuple parlait de le lapider : « David se fortifia en l’Éternel, son Dieu » (1 Sam. 30 : 6). Le peuple se range de nouveau en bataille là où ils s’étaient rangés le premier jour. Alors, comme entre parenthèses, comme un post-scriptum, montrant la place mineure et secondaire que cela avait dans leurs cœurs, « les fils d’Israël montèrent, et ils pleurèrent devant l’Éternel jusqu’au soir, et ils interrogèrent l’Éternel, disant : M’approcherai-je de nouveau pour livrer bataille aux fils de Benjamin, mon frère ? » (v. 23).

Au début, ils n’avaient pas besoin de l’Éternel. Maintenant, ils s’adoucissent et reconnaissent qu’Il doit intervenir. Pourquoi prier pour tel cas, disent certains, ce n’est pas nécessaire, il ne faut pas importuner le Seigneur, le cas est clair ? Nous demanderons au Seigneur de nous guider pour certains détails mineurs : Qui fera le travail, qui écrira la lettre… ? - Ah, si nous ne réalisons pas que nous avons besoin de Dieu, Il nous l’apprendra. Nous devrons fuir devant les méchants, et nous serons incapables de juger le mal qui reviendra toujours, malgré notre indignation contre lui.

Cette défaite les abaisse et ils pleurent devant l’Éternel, sur leur perte et sans doute sur leur humiliation, car l’orgueil humilié donne plus vite des larmes que la douleur et la sympathie. Cependant, une corde est touchée. Leur frère qu’ils ont combattu mérite le jugement, mais c’est leur frère : Dois-je livrer bataille contre Benjamin, mon frère ? - Comme ils pleurent, ils commencent à réaliser qu’ils ont affaire à leur frère. Dieu dit à nouveau : « Montez » (v. 28). Ce n’est pas un Dieu cruel, Il est assurément l’amour infini, mais le peuple qui a pleuré, prié, et qui semblait avoir raison doit de nouveau passer au crible. Ils fuient une nouvelle fois, et 18000 hommes de plus tombent dans la poussière.

Dieu a-t-il oublié ? Est-il encore une fois du côté du mal ? Devons-nous renoncer, et être indifférents au mal ? Non. Dieu nous dit avec force qu’Il veut que nous jugions le mal en nous plutôt que de le juger chez les autres. Il veut par-dessus tout ce jugement de soi qui nous donnera discernement spirituel et puissance pour pouvoir juger le mal et agir en discipline, que ce soit individuellement, ou collectivement. Nous devons tenir compte de la manière dont Il nous parle.

Il est caractéristique aujourd’hui, dans la chrétienté, que chacun fait ce qui est bon à ses yeux. Le mal n’est pas jugé. Ce n’est peut-être pas une corruption flagrante comme ici, bien que nous ne sachions pas ce qui se fait dans les ténèbres et que nous ne mettions aucune limite au mal qui se commet, même au saint nom de Jésus Christ. Nous vivons un temps où il n’y a pas de puissance pour juger le péché dans la crainte et avec l’aide de Dieu. Chacun fait ce qu’il veut ; il y a très peu de puissance pour exercer la discipline. Des chrétiens professants qui se comportent bien dans leurs églises peuvent se livrer à toutes sortes de mal, sans qu’il y ait de puissance pour y faire face. C’est un état de choses affreux.

La discipline dans l’Église devrait autant s’exercer aujourd’hui qu’à l’époque des apôtres. Le jugement de Dieu sur Ananias et Sapphira n’était pas exceptionnel (Act. 5). Ce ne sont pas les seuls de tous les temps à avoir mal agi dans l’Église, mais Dieu tenait à donner un exemple de jugement du mal. Quant au péché d’Ananias et Sapphira, les mêmes choses ne sont-elles pas commises chaque jour par de vrais chrétiens ? N’y a-t-il personne aujourd’hui qui se donne une réputation de dévouement qu’il n’a pas, ou qui professe donner toute sa vie à Dieu, mais qui en réserve une partie pour lui ? Si l’on désire seulement donner bonne impression, n’est-ce pas le péché d’Ananias et Sapphira ? Et pourtant, où voyons-nous le jugement d’un tel mal ? Cela nécessiterait une grande spiritualité.

Prenons par exemple la mondanité, la convoitise, la médisance, le mensonge ou l’hypocrisie parmi les saints ; où est la puissance pour s’en occuper ? Dieu ne veut-Il pas que ce mal soit jugé dans l’Église ? Certes, mais s’il n’y a pas de puissance pour le faire, c’est parce que pour agir en discipline envers mon frère, je dois tout d’abord avoir le sentiment de mon propre péché, de mes manquements, et me juger moi-même implacablement et profondément. Le Seigneur dit : « Hypocrite, ôte d’abord la poutre de ton œil » (Matt. 7 : 4) – peu importe ce que c’est, si c’est dans mon œil, c’est une poutre, et si c’est dans l’œil de mon frère, c’est une paille, jusqu’à ce que je me sois jugé – « et alors tu verras clair pour ôter la paille de l’œil de ton frère » (v. 5).

C’est ce que Dieu enseignait à Israël, par des pertes et une douleur amère – 18 000 hommes tombent. L’effet de cet enseignement commence maintenant à se faire sentir. Notons qu’ils vont de nouveau devant l’Éternel, mais voyons dans quel état ils se trouvent : « Et tous les fils d’Israël et tout le peuple montèrent... » (Jug. 20 : 26a). Tous sont concernés, c’est sérieux. Il ne suffit pas que quelques personnes seulement soient exercées au sujet du mal. Dans une assemblée, il ne suffit pas que quelques frères soient exercés et s’occupent du mal tranquillement à quelques-uns ; tous les saints doivent être exercés dans leur conscience au sujet de ce qui les a interpellés. Il peut y avoir des péchés cachés, connus seulement de quelques-uns, qui cherchent à s’en occuper dans la crainte de Dieu, mais ici nous parlons de ce qui est au grand jour. La raison pour laquelle il y a si peu de puissance, c’est que tous ne sont pas exercés devant Dieu au sujet du mal.

Tous montèrent à Béthel, à la maison de Dieu, devant l’Éternel. Comme Jacob, ils devaient aller au Dieu de la maison de Dieu, non pas seulement au Dieu d’Israël qui bénit, mais à Celui qui est Seigneur et Maître sur sa maison, et qui va dicter sa volonté. « Ils pleurèrent et demeurèrent là devant l’Éternel, et jeûnèrent ce jour-là jusqu’au soir ; et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de prospérités devant l’Éternel » (v. 26b). Ensuite « les fils d’Israël interrogèrent l’Éternel, (et l’arche de l’alliance de Dieu était là, en ces jours ; et Phinées, fils d’Éléazar, fils d’Aaron, se tenait devant elle, en ces jours), et ils dirent : Sortirai-je encore de nouveau pour livrer bataille aux fils de Benjamin, mon frère, ou cesserai-je ? » (v. 27-28a). Maintenant, ils obtiennent la réponse qu’ils auraient pu avoir au début s’ils avaient demandé le droit chemin. « Et l’Éternel dit : Montez ; car demain je les livrerai en ta main » (v. 28b).

 Notons les exercices qu’ils traversent. Ils montent jusqu’à la maison de Dieu, à Béthel, devant Dieu, dans la présence duquel nous ne pouvons pas être seulement indignés contre le péché. La présence de Dieu nous fait toujours juger le péché en nous, c’est la première chose. Là, dans cette sainte présence, les ressorts mêmes de leurs cœurs sont touchés, et ils pleurent devant l’Éternel. Plus que cela, ils jeûnent. Ce n’est pas une petite chose. Leurs cœurs sont si étreints qu’ils iront jusqu’à ne pas se nourrir ; de plus, ils n’accepteront pas que Dieu, qui hait le mal, leur refuse de monter ; ils sont là, cherchant désespérément sa pensée.

Ensuite, ils s’asseyent là. Ils ne restent pas debout, comme pour dire : Nous sommes sur cette affaire pressante, il nous faut une réponse, sinon nous devons aller de l’avant et la régler. - Le peuple doit aussi apprendre que nous ne devons pas seulement pleurer ou jeûner devant le Seigneur, mais nous asseoir devant Lui et attendre jusqu’à ce qu’Il juge bon de répondre au désir de nos cœurs.

Tout cela nous concerne aujourd’hui. Il y aurait plus de puissance pour appliquer la discipline parmi les saints s’il y avait un tel exercice. Nous devrions beaucoup plus nous asseoir devant le Seigneur, non pour avoir un juste sentiment au sujet du mal – Israël l’avait dès le début – mais pour connaître la pensée de Dieu. Celle-ci n’est révélée que dans sa Parole ; il a une pensée pour tel ou tel cas particulier, et pour l’obtenir nous devons nous attendre au Seigneur. Une hâte inconvenante ne permet jamais d’obtenir sa pensée.

 

15.5  Le relèvement du peuple après l’affaire de Guibha

 Les fils d’Israël sont maintenant dans l’état convenable pour que Dieu leur parle, mais ce n’est pas tout. Non seulement ils pleurent, jeûnent, et attendent devant Dieu, mais ils offrent des holocaustes et des sacrifices de prospérité. Combien c’est approprié. Nous aurions pensé à un sacrifice pour le péché, car ce cas semblait l’exiger. En fait, tout Israël avait péché, mais ils ne le réalisent pas. Quand toute la congrégation avait péché, ils devaient apporter un taureau en sacrifice pour le péché, mais ils ne semblent pas en être arrivés à une confession nationale du péché. Ils ont cependant compris qu’une relation avec Dieu était liée au sacrifice qu’Il avait ordonné comme base de la communion avec Lui. Ils offrent donc des holocaustes et des sacrifices de prospérité. L’holocauste parle de la valeur infinie de Christ et de sa mort, pour Dieu et le sacrifice de prospérité parle de la communion, de la participation à ces choses précieuses. Ainsi, une part du sacrifice de prospérité était offerte à Dieu et une part à l’adorateur. En type, ils offraient à Dieu ce qu’il y a de précieux dans la mort de Christ.

 Un jour, Aaron s’était tenu entre les vivants et les morts, balançant son encensoir qui parle de la valeur de Christ, comme pour intercéder auprès de Dieu sur cette base-là (Nom. 16 : 46-48). Ici, cet holocauste, nous parle aussi de Christ et de son oeuvre. En offrant ce sacrifice à Dieu, c’est comme s’ils disaient : Nous sommes impuissants, à la fin de nous-mêmes, de notre sagesse et de notre force. Nous ne savons que faire, et ce mal plane toujours dans toute son horreur. En tout cas, voici quelque chose qui plaît à Dieu qui nous juge et nous châtie. - Ah, si quelque chose est toujours d’agréable odeur pour Lui, c’est Christ. Et si le peuple de Dieu va, avec humiliation, là où ils peuvent offrir à Dieu la bonne odeur de ce qu’est Christ, ils auront communion avec Lui, il y aura le sacrifice de prospérité, et ils auront une réponse de sa part, comme nous le voyons là. Celle qu’ils obtiennent est une réponse de paix. Il va finalement les aider, et être avec eux, car Benjamin n’a pas appris la leçon qu’il devait apprendre. Dieu doit la lui enseigner, et il va utiliser son peuple pour cela. Il montrera qu’il n’est pas du côté du mal et de cette horrible corruption, mais qu’il doit d’abord apprendre aux siens à se juger eux-mêmes.

 Maintenant ils vont monter contre les fils de Benjamin, mais ils doivent le faire d’une manière qui montre qu’ils ont appris la leçon. Ils doivent montrer leur faiblesse en battant en retraite devant Benjamin, comme à Aï. Une embuscade est placée ; elle vient par derrière et brûle la ville dans laquelle les Benjaminites étaient abrités. Toute la tribu de Benjamin était à leur merci, (il est cependant difficile de penser que Dieu voulait effacer une tribu de cette manière) et ils avaient encore assez de zèle pour exécuter la vengeance jusqu’au dernier degré.

Que signifient cette embuscade et cette façon de battre en retraite devant Benjamin ? N’est-ce pas cet esprit de prière qui traduit notre faiblesse et notre impuissance totale ? C’est la leçon que nous avons tout au long des Juges. Pour exercer la discipline, nous devons avoir le sentiment de notre totale impuissance. Celui qui veut agir comme juge parmi le peuple de Dieu n’aura aucune puissance spirituelle. Pour en avoir, il faut être dans cet esprit de prière, comme semblant fuir, aux yeux de l’ennemi. Laissons celui qui a fait du mal penser qu’il a trop de pouvoir pour que nous puissions avoir affaire à lui. Si notre faiblesse se montre en étant sur nos genoux et en prière, nous verrons bientôt Dieu donner la possibilité d’exécuter la discipline et le gouvernement qu’il veut nous voir exécuter.

De ces propos, il ne faudrait pas retirer l’impression que l’exercice de la discipline n’est plus possible de nos jours, et que nous critiquons tout exercice sincère pour juger le mal. Dieu bénisse la moindre fidélité trouvée parmi les siens ! Mais la première leçon à apprendre de ces chapitres qui nous avertissent sérieusement par ces villes de Benjamin brûlées et par ces maisons endeuillées de tout Israël, est celle de l’humiliation personnelle devant Dieu.

N’avons-nous pas expérimenté cela personnellement ? Ce qui donne aux parents la force pour s’occuper des enfants, ne vient-il pas du jugement de soi devant Dieu ? Ce qui donne à une assemblée la force pour juger le mal au milieu d’elle, n’est-ce pas ce sentiment d’impuissance qui fait mettre les saints sur leurs faces devant Dieu, confessant leurs propres péchés ? Si nous avons ce sentiment d’impuissance et que nous cherchions à obéir à sa sainte volonté, Dieu nous incitera à nous lever de la poussière de devant Lui, et ira devant nous.

Il est certain que Dieu ne voudra jamais que nous excusions le péché, et que nous le tolérions parmi nous. Il ne permettra jamais que nous soyons insouciants de l’honneur de son saint Nom. Nous réclamant du nom de Christ, nous ne pouvons pas, si nous sommes en bon état, être négligents quant à l’existence du mal. Mais la force spirituelle, pour ôter le mal qui cause le bas état des saints et qui déshonore Christ, se trouve dans la maison de Dieu, dans le jeûne et dans les sacrifices spirituels. Plus tôt cette place est prise, plus vite nous trouverons cette puissance.

 La réalisation de ces choses, qui fait partout tellement défaut aujourd’hui, nous concerne tous. De nos jours, la chrétienté est marquée par l’absence de gouvernement qui devrait caractériser tout témoignage pour Dieu. Certains disent parfois : nous devons être caractérisés par une grande connaissance de la vérité. Soit, c’est une grâce, si Dieu nous utilise comme des vases pour transmettre à d’autres sa vérité. Mais un témoignage pour Dieu en ce jour de ruine est un témoignage au gouvernement et à l’autorité du Seigneur parmi son peuple. Prenons Philadelphie, qu’est-ce qui la marque ? C’est la fidélité à Christ et la soumission à sa Parole. Ce n’est pas une grande force, mais tout le contraire : « Tu as peu de force » (Apoc. 3 : 8). Ce n’est pas un feu d’artifices de vérités éblouissant les gens, ce dont se vante Laodicée avec ses connaissances, ses acquis et ses dons. Ce qui caractérise Philadelphie, c’est le brisement, l’obéissance à Christ et la soumission à son autorité malgré les dangers. Philadelphie signifie « amour fraternel ». Le vrai amour fraternel, comme l’apôtre de l’amour nous le dit, c’est quand nous aimons Dieu et que nous gardons ses commandements (1 Jean 5 : 2). J’aime mon frère en me soumettant à Dieu Lui-même.

 Nous dirons peu de choses sur la restauration au dernier chapitre qui montre que celle-ci n’a été que partielle. Dieu n’aurait jamais exigé comme mesure, la destruction complète de la tribu. Ce n’était pas nécessaire. Auraient-ils procédé de la bonne façon, ce qui suit n’avait pas lieu d’être.

Une fois le jugement exécuté, ils s’asseyent et pleurent encore ; ils pleurent de ce qu’ils ont ôté une tribu d’Israël. Leur orgueil est brisé ; leur intégrité nationale n’est plus. Au lieu de douze tribus, il n’y en a que onze ; seuls quelque 600 fugitifs qui se cachaient au rocher de Rimmon sont laissés pour dire que Benjamin n’est plus.

Maintenant, ils vont rétablir Benjamin, mais vont-ils le faire avec justice ? Ils se disent : Ces 600 seront le noyau d’une nouvelle tribu, mais où allons-nous leur trouver des épouses ? Nous avons juré devant Dieu qu’aucun d’entre nous ne donnera sa fille en mariage à Benjamin. - C’était leur serment ! Ils ont alors une façon de raisonner et une procédure très étranges. Ils avaient juré de ne pas leur donner d’épouses, et la première chose qu’ils font est d’aller exterminer les habitants de Jabès de Galaad, excepté les femmes qu’ils pourraient donner comme épouses à Benjamin. C’était une violation de leur serment. Cependant, il n’y avait encore pas assez de femmes pour tous. À l’occasion d’une fête à l’Éternel, ils invitent les hommes de Benjamin à aller kidnapper des femmes – pour ne pas les leur donner eux-mêmes. C’est ainsi qu’ils contournèrent leur serment.

 Cela nous montre qu’ils ne se sont pas encore jugés entièrement ; on peut donc s’attendre à d’autres manifestations similaires qui montrent qu’ils ne se tenaient pas devant Dieu. Cela nous fait dire qu’il n’était pas selon Dieu que toute la tribu soit anéantie. La tribu de Benjamin s’était certes rangée en bataille, mais comme dans le cas de Jephté, ils n’avaient pas le droit de détruire un si grand nombre de leurs frères. Il semble bien qu’il n’y avait pas la puissance spirituelle nécessaire pour exercer le gouvernement de Dieu sur ce peuple. Si le peuple avait été au fond des choses avec Dieu, ils n’auraient pas manifesté cette légèreté morale avec laquelle ils ont rétabli ces quelques-uns restant de la tribu.

Il est très frappant de noter que le premier verset de cette partie (19 : 1) : « En ces jours-là, quand il n’y avait point de roi en Israël » est le même que le dernier (21 : 25) : « En ces jours-là, il n’y avait pas de roi en Israël ; chacun faisait ce qui était bon à ses yeux «. Quelle terrible confusion et quel chaos a produit le fait que chacun faisait ce qui était bon à ses propres yeux !

Mais, quelle aspiration dans cette expression : « Il n’y avait pas de roi en Israël » ! Elle montre que le seul espoir pour le peuple de Dieu était son Roi. Dieu Lui-même aurait pu être leur roi, s’ils ne l’avaient pas refusé et Lui avaient été soumis. Plus tard, ils demandèrent un roi comme toutes les nations, et Il leur donna un roi d’après leurs propres cœurs, le roi Saül, qui ne les délivra pas. Mais ensuite, Dieu leur donna un homme selon son cœur, le roi David qui est un type du roi à venir pour Israël, le roi que la nation attend encore, bien qu’inconsciemment. Par ailleurs, c’est le roi que tout le peuple de Dieu attend, et après lequel, même s’il ne le connaît pas, ce pauvre monde gémit et soupire aujourd’hui.

Quant à nous, ayant parlé de notre responsabilité d’exercer la discipline, n’avons-nous pas le sentiment de ne chercher qu’à maintenir ensemble un petit résidu pour peu de temps ? Qu’attendons-nous ? Est-ce le rétablissement de l’Église telle qu’elle était à la Pentecôte ? Nous ne le verrons jamais dans ce monde. Est-ce de voir les fragments épars de la chrétienté se rassembler en un tout harmonieux, étant soumis à la Parole de Dieu, et marchant à la louange de Christ dans ce monde ? Nous ne le verrons jamais non plus.

Qui attendons-nous ? N’est-ce pas la venue de notre Seigneur pour prendre son Église, l’Épouse de son cœur, hors de cette scène de souillure où elle est étrangère, pour l’emmener, vêtue de ses vêtements immaculés, et être avec Lui éternellement dans la lumière ? Il viendra alors étendre son sceptre sur un monde qui devra reconnaître que la seule main qui peut étendre ce sceptre de justice est celle de Christ. C’est Lui qu’Il a fait roi en Sion pour régner jusqu’aux extrémités de la terre.

 En refermant ce livre des Juges, c’est le désir de la venue du Seigneur qui est devant nous. Comme nous le disions au début, c’est un livre triste, sombre, de faillite, qui se termine sur une scène très décourageante quant à l’homme. Certains diraient que ce livre pessimiste ne peut que nous décourager. Pas du tout. Il est écrit pour nous séparer du monde, pour nous apprendre à nous défier de nous-mêmes, de nos frères, du progrès dont le monde parle. Il doit nous amener à une seule chose, à regarder au Seigneur Jésus, et à désirer ardemment sa venue.

De plus ce livre nous enseigne que nous devons apprendre à nous juger maintenant et à marcher ici-bas dans l’obéissance de la foi, comme si l’Église tout entière était réunie. Nous devons être aussi obéissants au sein d’un petit résidu, que si toute la chrétienté était une, et remercier Dieu pour ce temps de petites choses, qui donne occasion à la foi et à l’obéissance de se montrer comme aux jours les plus brillants de l’histoire de l’Église, quand « la multitude de ceux qui avaient cru était un cœur et une âme » (Act. 4 : 32).

Ainsi, nous nous arrêtons sur ces deux pensées : d’une part, la venue de notre Seigneur comme la seule chose qui peut apporter paix, sainteté et bénédiction à notre âme, et d’autre part, le désir de Lui obéir et de L’honorer, dans la faiblesse et l’impuissance.

« Bienheureux est cet esclave que son maître, lorsqu’il viendra, trouvera faisant ainsi ! » (Luc 12 : 43).

 

16 Le livre du déclin

Normalement et selon un ordre spirituel, le livre des Juges aurait dû nous montrer l’achèvement de ce que Josué avait commencé. Celui-ci présente Israël entrant dans les bénédictions de l’héritage que Dieu lui avait donné ; en type, ce livre nous dit que nous sommes « bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ » (Éph. 1 : 3). Celui des Juges aurait dû par conséquent placer simplement devant nous la progression du peuple dans la jouissance de son héritage, mais nous n’y trouvons que régression dans l’appréciation des pensées de Dieu.

Le livre de Josué s’ouvre sur celui des Juges, deuxième volet de cette page de l’histoire d’Israël. Nous y voyons, hélas, que les jours s’assombrissent, non parce que Dieu a changé ses promesses de bénédiction, mais simplement parce que la foi pour s’en emparer a baissé. Lorsque la foi faiblit, quand on s’écarte de Dieu, il est certain que l’Ennemi s’attaquera au peuple de Dieu, d’une façon ou d’une autre. Tous ces récits soulignent les dangers de l’éloignement d’avec Dieu. Au lieu d’ajouter à son héritage, le peuple le perd. Dans ce livre, Dieu veut nous montrer la folie du déclin, et ses conséquences inévitables.

 

16.1  Rappel des trois parties principales du livre des Juges

La première, comme une introduction, s’étend jusqu’au verset cinq du chapitre trois. Elle nous présente la rébellion du peuple envers Dieu. La deuxième, la principale, qui va jusqu’au chapitre 16, montre la conséquence de cette rébellion : l’esclavage – mais aussi la grâce de Dieu sans cesse en activité qui vole au secours de son peuple pour le restaurer. Cette deuxième partie donne le thème général du livre : le déclin et ses causes.

La troisième partie est formée des cinq derniers chapitres : la corruption intérieure est pleinement manifestée, elle est pire encore que l’esclavage présenté précédemment.

 

16.1.1    L’impossibilité de jouir de l’héritage

Dans la première partie, le point important réside dans le fait que les Israélites n’ont pas répondu à la pensée de Dieu à leur égard, en n’entrant pas en possession de ce que l’Éternel avait mis dans leurs mains. Les ennemis occupaient leur héritage et les empêchaient d’en jouir. Pour le posséder, ils devaient chasser l’ennemi, dans l’énergie de la foi et l’obéissance à Dieu. Les maisons qu’ils n’avaient pas construites, les vignes qu’ils n’avaient pas plantées, les puits qu’ils n’avaient pas creusés, - tout était prêt pour qu’ils en profitent.

Qu’avons-nous eu à faire pour acquérir notre héritage ? Rien, nous avons juste à y entrer. Cette expression est très vraie, nous devons simplement entrer dans les bénédictions que Dieu nous a préparées ; ce qu’il nous faut, c’est le garder simplement par l’obéissance de la foi en résistant au diable (Jac. 4 : 7) qui voudrait nous l’ôter par tous les moyens en nous empêchant d’y entrer pratiquement alors qu’il nous est donné et pleinement révélé dans la Parole de Dieu. L’Ennemi étant repoussé par la foi et l’obéissance à la volonté de Dieu, nous pouvons alors en jouir.

Dans la première partie, nous voyons que le peuple ne parvient pas à occuper le pays, malgré quelques succès encourageants au début. Incapables de faire ce que Dieu leur avait dit, ils sont exposés aux nouveaux assauts de l’ennemi. Car, comme nous le savons par expérience, un ennemi à demi vaincu est un ennemi invaincu ; à moins de renverser complètement la puissance du mal qui veut nous refouler dans un coin de notre héritage, nous la retrouverons tôt ou tard. Nous pensons pouvoir assujettir cet ennemi pour un temps, le considérer peut-être comme secondaire, prétendre exercer sur lui un certain contrôle, comme le disent parfois certains au sujet de la chair, mais s’il n’est pas vraiment vaincu, il nous asservira un jour, soyons-en certains. C’est ce qu’il nous faut retenir de ces premiers chapitres.

Juda commence bien, par de brillants succès ; s’il avait continué ainsi, dans l’obéissance absolue à Dieu, il aurait pris le contrôle entier de son lot. En fait, aucune autre tribu n’a pris, comme Juda, possession des territoires qui lui était confiés ; il est le premier. On peut dire que Juda représente la perception de Christ comme étant la part de son peuple. Jacob ne le dit-il pas déjà prophétiquement à ses fils assemblés : « Toi, Juda, tes frères te loueront » (Gen. 49 : 8) ? Ah, si nous pouvions entrer davantage dans la compréhension de la vérité qui produit l’esprit de louange parmi le peuple de Dieu !

Après Juda, avec une triste régularité, les tribus, l’une après l’autre, échouent à faire ce que Dieu avait mis devant eux. Benjamin, ne parvenant pas à prendre Jérusalem, doit vivre en compagnie des Jébusiens. Quel mélange ! Comme nous l’avons vu, Benjamin a tellement été influencé par cet entourage qu’il a dû être traité comme ces païens, considéré comme ennemi de Dieu, au point d’être presque anéanti. Cela n’est-il pas la conséquence d’avoir échoué à prendre possession de Jérusalem au début ?

De même, les grandes et fortes tribus de Joseph, Éphraïm et Manassé, ne parviennent pas à chasser l’ennemi de leur territoire ; les ennemis vivent dans une ville, et eux dans une autre. Et ainsi, l’une après l’autre, ces différentes tribus ne parviennent pas à prendre possession de ce que Dieu leur avait donné.

Il est facile d’en parler. Il est facile de dire que Manassé aurait dû avancer pour chasser ceux qui habitaient son lot, et qu’Éphraïm comme Zabulon, Aser, Nephtali et Dan ont tous échoué en leur lieu. Mais qu’en est-il de nous individuellement, de façon pratique ? Possédons-nous tout notre héritage ? Que partageons-nous avec l’Ennemi ? Jouissons-nous de tout ce que Dieu nous a donné ? Si ce n’est pas le cas, nos noms peuvent être ajoutés à ceux dont il est dit : « Ne l’ayant pas dépossédé, l’ennemi habite avec eux ».

Nous pouvons rendre l’ennemi tributaire et l’avoir sous contrôle en apparence, mais, même assujetti au tribut, il est plus dangereux que sur le champ de bataille, pour la simple raison que nous avons des liens avec lui, comme Israël ici. Ils se marièrent avec les gens du pays, et ces mariages mixtes les conduisirent à adopter leurs dieux et à être asservis à leurs ennemis.

Notons l’ordre des choses dans la progression du mal : ils ne réussissent pas à chasser les ennemis, ils les rendent tributaires, ils se lient avec eux par mariages, ils adoptent leurs faux dieux et s’éloignent de Dieu, et enfin, conséquence inévitable, Dieu les livre à un ennemi pour leur faire goûter l’amertume de s’être écarté de Lui.

Quant à nous, quelle application pratique pouvons-nous en faire dans notre vie quotidienne ? Nous arrive-t-il de ne pas aller au bout du jugement de nos mauvaises pensées, et de penser les contrôler en nous les rendant pour ainsi dire tributaires ? Retenons-nous un principe mauvais sans l’avoir ôté de nos esprits et jugé complètement ?

Comment peut-on faire usage de principes mauvais en soi, en pensant les contrôler et espérer en être gardé ? Si je fais usage d’une mauvaise chose, je suis lié à ce mal. Et si je suis lié au mal, il est inévitable que je lui serai asservi et, hélas, conduit à une idolâtrie quelconque qui m’entraînera à suivre mes propres pensées, au lieu de me plier à la volonté de Dieu. Par exemple, la Parole nous parle de « la cupidité (qui est de l’idolâtrie) » (Col. 3 : 5).

 

16.1.2    Christ, notre héritage

Dans sa sagesse et sa bonté, l’enseignement sur lequel Dieu insiste, exemple après exemple, dans la première partie de ce livre, est que si nous n’avançons pas et ne faisons pas de progrès, nous reculerons ; si nous n’entrons pas dans ce que Dieu nous a donné dans sa Parole, nous perdrons ce que nous avons déjà, ou, comme il est dit dans le Nouveau Testament : « À quiconque a il sera donné, et il sera dans l’abondance ; mais à celui qui n’a pas, cela même qu’il a lui sera ôté ». (Matt. 25 : 29). Nous en serons privés quant à la jouissance, mais, grâce à Dieu, non pas quant à notre avenir éternel. N’avons-nous pas des exemples, dans nos vies, où n’ayant pas progressé, nous avons reculé ? Ce qui se passe dans nos cœurs, chaque jour de notre vie ne rappelle-t-il pas l’histoire d’Israël avec ses progrès et ses déclins ?

En parlant de nos bénédictions nous devons être clairs, il ne faut pas que ce soit vague. Chacune de nos bénédictions étant en Christ et liée à Lui, il est absolument impossible, pour les saints, de jouir de leurs bénédictions sans jouir de Christ. Il est impossible de nous nourrir des vérités de Dieu sans qu’elles nous mettent en contact personnel et en communion avec le Fils de Dieu Lui-même. Ainsi, l’échec des fils d’Israël à entrer en possession de leurs lots représente notre échec spirituel et celui de l’Église au sens large, non seulement à appréhender certaines vérités, mais à saisir Christ dans sa plénitude.

Toutes les bénédictions qui se trouvent dans la Parole de Dieu n’ont de beauté et de valeur, que parce qu’elles sont en Christ, et en Christ seul. Si Dieu nous donnait toutes les promesses de sa Parole, s’Il nous ouvrait le ciel même dans toute son ineffable beauté, et que nous n’y trouvions pas Christ, il n’y aurait ni bénédiction, ni héritage. Que serait le pardon, s’il n’était pas en Christ ? Que serait la paix avec Dieu ? Nous ne pourrions pas l’avoir, si ce n’est par notre Seigneur Jésus Christ.

Par conséquent, qu’il est solennel de penser que si son peuple ne réussit pas à prendre possession de son lot, il ne saisit pas Christ. Ainsi, en Philippiens 3, Paul, cherchant à saisir ce pour quoi il avait été saisi par Christ, dit, résumant cela en un mot : « pour le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances » (Phil. 3 : 10). Les pères sont caractérisés par la connaissance de Celui qui est dès le commencement (1 Jean 2 : 13). Aussi, chercher à mieux connaître Christ, comme Il nous est révélé dans la Parole de Dieu, c’est ce que signifie chercher à connaître notre héritage et nos bénédictions qui sont en Lui.

 

16.1.3    Les conséquences du fait de ne pas chercher à saisir Christ

Si nous ne persévérons pas à connaître toujours plus ce que nous avons en Christ, nous ne rencontrons que servitudes sur servitudes. Il est dit comme un douloureux refrain que le peuple faisait le mal, se détournait de Dieu, et s’unissait aux gens du pays. Par conséquent, Dieu les vendait aux mains des ennemis l’un après l’autre. Ils étaient ainsi humiliés et amenés au sentiment de leur impuissance, de leur faillite, et de leur éloignement de Dieu. Quand il n’y avait plus aucun secours et qu’ils criaient à Lui, Dieu leur suscitait un sauveur pour les délivrer.

Nous allons voir dans chacun de ces ennemis et chacune de ces servitudes, quel mal est figuré, ce qui n’est pas de Christ ou qui lui est contraire, et dont l’Ennemi se sert pour nous ravir ce que nous avons en Lui. Ensuite, dans le sauveur suscité par Dieu, nous verrons quel caractère de Christ, qu’il a saisi, lui permet de remporter la victoire sur la puissance qui l’asservissait. Ces deux pensées se complètent. Chacun sait sûrement, dans une mesure au moins, quelle est la puissance de l’ennemi, la puissance de ce qui n’est pas Christ. C’est d’elle que l’apôtre Paul parle quand il écrit : « Ce n’est pas ainsi que vous avez appris le Christ » (Éph. 4 : 20). Il ne s’agit pas tant du mal en soi, mais du fait que ce n’est pas Christ. Quelle qu’en soit la cause, c’est ne pas saisir ce qu’Il est.

Voyons brièvement le caractère de ces ennemis : Le premier esclavage est rapporté aux versets 5 à 11 du chapitre 3 : ils servent le roi d’Aram, ou de Mésopotamie, du nom de Cushan-Rishhathaïm. Nous avons vu qu’Aram signifie « exalté », et que la Mésopotamie est liée à Babylone ; la plaine de Shinhar, là où Israël a été amené en captivité, en faisait partie. Ils sont donc assujettis au roi « exalté ». La première chose opposée à Christ et qui assujettit le peuple de Dieu, est l’exaltation de l’homme dont le roi est appelé Cushan-Rishhathaïm, Cushan signifiant « noir » et Rishhathaïm « double iniquité ». Ce nom : « noirceur d’une double iniquité » est suffisamment éloquent pour montrer combien cet ennemi doit être mauvais.

Avec un nom pareil, cet ennemi doit vraiment être l’opposé de Christ. Ici-bas, notre Seigneur était « débonnaire et humble de cœur » (Matt. 11 : 29). Il ne cherchait pas de grandes choses pour Lui-même. Du moment où Il a quitté la gloire du ciel et jusqu’à ce qu’Il y retourne, Il a eu une vie de renoncement et d’humilité. Il s’est anéanti, rendu impopulaire ; son chemin a été un chemin d’abaissement, jusqu’à la croix. C’est tout le contraire d’Aram, de l’exaltation. Quant au croyant et à l’Église, quel est le secret de toute bénédiction ? N’est-ce pas cette humilité d’esprit qui était en Christ ? Tant que nous restons humbles, nous fuirons la puissance de l’Ennemi ; mais, hélas, si nous nous élevons dans nos cœurs et si nous nous exaltons, nous ne ferons que suivre le premier grand transgresseur, Satan lui-même qui s’est élevé contre Dieu.

L’orgueil est l’ennemi numéro un, c’est le plus grand mal qui soit – la noirceur d’une double iniquité ; c’est ce qui a fait tomber Satan ; sa splendeur a causé sa chute. Quelle contradiction : sa beauté est ternie, parce qu’il a cherché à s’élever à cause de cette beauté même. Ainsi, quand un chrétien s’élève, étant satisfait de lui-même et plein d’orgueil, c’est le plus grand mal qui soit, parce que c’est l’exaltation de soi dans un esprit d’indépendance, c’est donc tout l’opposé de ce que Christ a été. Il y a beaucoup de prétention et de contentement de soi à Éphèse et à Laodicée au début de l’Apocalypse – autrement dit pendant toute l’histoire de l’Église.

Ensuite, vient celui qui sauve le peuple de son état. Si l’ennemi est ce qui n’est pas de Christ, celui qui va les délivrer présente un caractère de Christ qui répond au caractère de cet esclavage qui n’est pas selon Lui. Othniel, le libérateur, représente un esprit de foi qui ne compte que sur Dieu. Son nom - « lion de Dieu » - indique que la puissance de Dieu intervient. L’orgueil ne fera usage que de sa propre puissance ; il ne reconnaîtra jamais qu’il en a besoin d’une autre. Quand le peuple reconnaît sa faiblesse et sa servitude, Othniel intervient – la puissance de Dieu opère pour nous. Christ est « la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu (1 Cor. 1 : 24). Le vrai remède, si nous sommes esclaves de l’orgueil, du moi et de ce qui met le moi sur un piédestal aux dépens de Dieu, c’est Christ Lui-même, Christ comme la puissance de Dieu, par qui sont toutes choses. Si nous sommes prêts à reconnaître qu’il n’y a pas de force en nous, qu’il n’y a rien en nous, et que Christ est tout, comme Othniel, Il interviendra.

Othniel n’est pas vraiment un type de Christ. Les juges, d’ailleurs, ne ressemblent guère à Christ ; à la fin, ils sont même tout le contraire de Christ. Saisir Christ par la foi, dans les caractères de ce juge, nous donnera pratiquement la délivrance qui est ici en type.

Suit une autre période de déclin, et un autre libérateur. Nous avons vu en Moab la servitude à une parenté selon la chair qui n’a pas de relation spirituelle avec le peuple de Dieu. Moab, un des enfants de Lot, représente une relation extérieure sans réalité intérieure, c’est la profession. La profession est un ennemi terrible qui s’empare du peuple de Dieu. Hélas, l’Église a été maintes et maintes fois sous le terrible cauchemar d’une profession stérile, sans Christ. Les formes ont pu être orthodoxes, les choses ont pu être tout à fait scripturaires, et pourtant il n’y avait ni puissance, ni joie spirituelle, rien qui réponde à la réalité vivante. Les fils d’Israël, le vrai peuple de Dieu, ont été esclaves de cette profession qui dérobe toute jouissance de l’héritage. La profession est l’opposé de Christ. Connaître Christ, ce n’est pas être religieux ou professant, c’est avoir communion avec le Père et le Fils dans une réalité vivante.

La profession peut se faire une place confortable dans le monde, élever ses édifices religieux, avoir ses services religieux, avoir ses œuvres philanthropiques, et pourtant être glaciale, car elle met Christ de côté. On peut être membre d’une église, être un serviteur, tout en ayant un cœur vide. C’est Christ qui doit être notre part, non pas la profession.

Le remède contre cette profession qui dit être de Christ, mais qui ne l’est pas, est de confesser Christ. Ehud, qui va les libérer de la puissance de la profession, est un « confesseur », comme l’indique son nom. Avec une épée, qui évoque l’épée de l’Esprit, la Parole de Dieu, il délivre le peuple de Dieu pour qu’il n’ait pas qu’une profession sans la vie divine. Christ est le vrai Ehud, dans toute sa plénitude. Il est le témoin fidèle, celui qui a toujours confessé Dieu, et parce qu’Il l’a confessé dans ce monde, Il en a été rejeté. Il est le vrai Confesseur. La puissance de l’Ennemi, qui voudrait nous amener à n’avoir qu’une simple profession, est renversée par la confession de ce que Christ est, et la jouissance du Seigneur Jésus dans l’âme.

Le peuple de Dieu est en danger de n’avoir qu’une profession. En restant sur des expériences passées, au lieu d’avoir une communion présente, il est sous la puissance de Moab, car Moab demeure dans le passé, en un sens. Nous risquons de faire de nos expériences passées, un terrain de profession. Si nous jouissons de Christ de façon vivante, nos lèvres le confesseront.

Mais n’y a-t-il pas autre chose à confesser ? Il nous faut confesser l’état réel des choses, et c’est en reconnaissant que la profession n’est que néant et vide et en le confessant, que la puissance de Christ viendra nous en libérer. Sommes-nous horrifiés à la pensée d’être des professants ? Alors reconnaissons cet état de choses devant Dieu et confessons-le ; il y aura au moins de la réalité, et là où il y en a, Christ s’y trouvera.

Souvenons-nous de la similitude qu’il y a entre l’esclavage de Moab et l’état de l’église à Pergame.

Nous arrivons à l’ennemi suivant, Jabin, roi de Hatsor, et à Debora et Barak, qui l’ont renversé. Nous avons vu que Jabin avait été vaincu par Josué plus de 100 ans auparavant ; or il ressuscite avec la même puissance, et à moins de l’intervention de Dieu, tout le pays d’Israël était sous son emprise. Son nom signifie « intelligence ». C’est l’intellect humain qui s’exalte contre la connaissance de Dieu. C’est le contraire de ce qu’a réalisé Christ, qui a apporté toute sa connaissance aux pieds de son Père. Sa seule pensée était de faire sa volonté. C’est ce qu’Il a aussi placé devant les hommes : « Si quelqu’un veut faire la volonté de celui qui m’a envoyé, il connaîtra, au sujet de cette doctrine, si elle vient de Dieu, ou si je parle de par moi-même » (Jean 7 : 17). Christ est diamétralement opposé à Jabin. La véritable intelligence spirituelle, c’est de connaître Christ, car en Lui « sont cachés tous les trésors de la sagesse et la connaissance » (Col. 2 : 3). Quand l’Église s’est tournée vers la philosophie au lieu de Christ, elle s’est mise sous la domination de Jabin – de l’intellect humain.

Il n’y a qu’un remède à cela ; c’est ce que nous voyons dans Debora et Barak. Debora signifie « la Parole » et Barak, » la foudre » - la puissance de cette Parole, appliquée. Quand la faiblesse – ce qu’évoque la femme – applique la Parole de Dieu à la sagesse et à l’intelligence de l’homme, celle-ci est réduite en poussière. La victoire est remportée quand, dans le sentiment de notre faiblesse, Christ nous est présenté – un Christ dépourvu de la force que le monde apprécie. Le monde méprise la Parole de Dieu qui nous présente un tel Christ.

La faiblesse caractérise non seulement Debora et Jaël, mais aussi Barak qui hésitait, impuissant, jusqu’à ce que la foi d’un vase plus faible, d’une femme, le presse à faire ce que Dieu voulait. Tout le récit parle de faiblesse, et pourtant, c’est le plus brillant de tout le livre.

La victoire de Debora et de Barak sur Jabin est peut-être plus complète que les autres. Elle est célébrée dans un chant de triomphe. Ce cantique célèbre simplement la faiblesse – faiblesse qui exalte Christ, comme l’expose l’apôtre Paul : « Lorsque je suis faible, alors je suis fort » (2 Cor. 12 : 10) et ailleurs, « Je peux tout en celui qui me fortifie » (Phil. 4 : 13). Debora et Barak chantent ce beau chant de louange et de triomphe, une fois le combat terminé. C’est le seul chant de louange dans tout le livre des Juges. Il y en aurait eu davantage, si la faiblesse qui s’appuie sur la force toute-puissante de Dieu avait été plus ressentie. Les triomphes auraient été plus grands et plus durables, s’il y avait eu plus de Debora effacées, dont le nom présente simplement Christ, tel qu’il est révélé dans la Parole de Dieu. Si Dieu doit se servir de nous, soyons revêtus de Christ, afin que ceux qui nous voient ne pensent pas à l’instrument que Dieu utilise, mais à Christ Lui-même, et à la vérité qui est en Lui.

Le froid intellectualisme de Sardes - la période protestante de l’histoire de l’Église - répondrait à l’esclavage de Jabin et à celui d’Ammon, tandis que dans les vainqueurs, nous voyons un peu l’esprit de Philadelphie.

Ensuite vient Gédéon, dont les leçons nous sont bien connues. La puissance de Madian est là. Les Madianites, qui avaient amené Joseph en Égypte, représentent ce qui entraîne le peuple de Dieu dans le monde. Madian signifiant « conflit », ils font penser aux luttes venant des voluptés qui combattent dans nos membres, comme le dit l’apôtre Jacques (4 : 1). Cette invasion madianite est l’invasion terrible du monde dans l’église professante. On la voit partout aujourd’hui. Il n’y a rien de Christ, car le monde ne représente jamais Christ, mais tout le contraire. Partout où le monde prend une place dans le cœur, il en chasse Christ.

La raison est évidente. L’apôtre Jean dit que tout ce qui n’est pas du Père, est du monde. Notons que dans l’évangile de Jean, le Seigneur parle toujours du Père. C’était sa joie de confesser le Père ; c’est le plaisir du monde de supplanter le Père. Donc, ce qui n’est pas de Christ, lui est opposé ; tel est le monde, qu’il entre dans nos cœurs individuellement, ou qu’il opprime l’Église collectivement.

Gédéon va libérer le peuple de la puissance de Madian. Pour cela, comme pour Debora et Jaël, la faiblesse est manifestée, et maintenant, elle doit être complète ; non seulement Gédéon, mais tout le peuple doit réaliser sa faiblesse. Dans ce récit, la pensée constante est le dépouillement d’une chose après l’autre, d’un soutien après l’autre, jusqu’à ce que Gédéon soit laissé, avec sa petite troupe, en présence de cette puissante horde qui couvre toute la surface du pays. Ils ne sont que 300, avec des trompettes et des torches, sans même une épée en main, si ce n’est celle sur leurs lèvres, quand ils crient : « L’épée de l’Éternel et de Gédéon !» (Jug. 7 : 20). C’est l’épée de la Parole (Éph. 6 : 17), plutôt que l’épée maniée à la main.

Ils sont dépouillés de toute force, au point d’être assimilés à un gâteau de pain d’orge, roulant au milieu du camp et abattant une tente. Ils sont presque cela, vraiment ; ils sont l’objet du mépris de l’ennemi. Mais dans leur faiblesse et leur impuissance, ils ont sur leurs lèvres l’épée de l’Éternel ; et si cette épée est de leur côté, que feraient-ils d’une épée d’homme ? Si la trompette dont ils font usage proclame la puissance de Dieu et si la lumière qu’ils détiennent peut briller, s’ils sont « comme des luminaires dans le monde, présentant la parole de vie « (Phil. 2 : 15-16), quel besoin ont-ils de l’aide de l’homme ? Ainsi, Gédéon et sa petite troupe nous parlent de la puissance du Christ qui repose sur la faiblesse de l’homme. Paul pouvait dire : « Je me glorifierai donc très volontiers plutôt dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ demeure sur moi. » (2 Cor. 12 : 9).

Nous voyons la puissance du monde à Pergame, à Sardes et à Laodicée, alors qu’en Gédéon nous voyons les vainqueurs dans les églises, dont celle à Philadelphie.

Ensuite nous passons à Jephté. L’ennemi est maintenant Ammon, le frère de Moab. Il représente la profession, comme Moab, non plus sous l’aspect sensuel et mondain, mais plutôt sous l’aspect intellectuel, étroitement lié à Jabin. Il suggère le rationalisme glacial qui s’empare de l’Église. Les fils d’Ammon revendiquent leur droit à l’héritage qu’Israël occupe depuis longtemps. Ce que nous avons dit de Jabin, concernant la façon de considérer la parole de Dieu, s’applique aussi ici. Les rationalistes la lisent de façon purement intellectuelle, estimant qu’elle peut être critiquée, passée au crible pour en éliminer les fautes et garder ce que l’on peut accepter. S’autoriser cela est opposé à l’esprit de Christ qui a toujours magnifié la Parole de Dieu ; toute question était réglée quand il citait l’Ecriture. Quelle leçon ! Le Fils de Dieu coupait court à toute discussion, en citant simplement la Parole de Dieu. Le rationalisme voudrait nous priver de ce caractère de Christ qui est la fidélité à la Parole de Dieu. Les fils d’Ammon disent que nous pouvons être chrétiens de nom, des professants, tout en niant la Parole de Dieu qui est notre titre au christianisme. Ammon ne règne-t-il pas autour de nous aujourd’hui, quand on voit l’homme trafiquer la Parole de Dieu par son intelligence humaine, et se permettre de la juger au lieu d’être jugé par elle.

Quelle terrible oppression ! La délivrance vient par Jephté, qui signifie « il ouvre ». Ainsi, Christ a ouvert l’intelligence des disciples pour comprendre les Ecritures (Luc 24 : 32), et Il nous ouvre la Parole de Dieu, pour être libérés du rationalisme. Il nous a ouvert le ciel, afin que nous connaissions notre position devant Dieu. Il est le Révélateur, Celui qui nous rend claire la Parole de Dieu. C’est parce qu’Il nous l’ouvre, que nous sommes délivrés des raisonnements de la chair et de la puissance de l’intellectualisme. Y a-t-il plus misérable que celui qui est esclave de son propre raisonnement, et qui s’en glorifie ?

Essayant de voir simplement comment Christ est chaque fois le remède à ces maux, nous passons rapidement sur le reste de la vie de Gédéon, et de celle de Jephté ; nous ne nous attardons pas non plus sur la sombre histoire d’Abimélec.

Nous pouvons résumer tout cela en quelques mots. Gédéon aspire au sacerdoce, supplantant ainsi Christ ; Abimélec s’empare du pouvoir royal, prenant la place que Christ seul peut occuper ; Jephté, dans sa dureté, ne reflète pas la douceur et la bonté de Christ qui ne sont pas moins efficaces pour diriger, car la direction du Seigneur se réalise dans l’amour et la grâce.

Enfin, après Jephté, nous voyons l’invasion, ou plutôt la suprématie des Philistins, et la délivrance que Dieu va opérer par le moyen de Samson, le Nazaréen. Les Philistins représentent encore la profession mais d’une manière plus forte. Au début, nous les voyons associés à Moab, en ce que Shamgar les a vaincus juste après la victoire d’Ehud sur les Moabites. Les Philistins représentent une profession plus active, qui affirme sa suprématie, qui veut donner son nom à tout l’héritage du peuple de Dieu et en assurer le contrôle complet.

Nous voyons Christ tout au long du livre. En prenant chacune des délivrances et en remplaçant le libérateur par Christ Lui-même, la seule puissance qui peut vraiment nous délivrer, nous aurons non pas une délivrance partielle et incomplète comme dans les Juges, mais une vraie victoire, véritable et durable par Christ. « Grâce à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus Christ. »

 

16.1.4    La corruption intérieure pleinement manifestée

Nous arrivons à la troisième et dernière partie du livre. Nous n’en parlerons que dans le cadre du sujet placé devant nous. L’introduction de l’idolâtrie venait du fait que le peuple n’acceptait pas Christ comme l’image du Dieu invisible ; ils cherchaient à se faire une image de Dieu selon leurs propres pensées, une conception partielle et pas comme Il s’est révélé dans la personne de notre Seigneur. Alors, quand Dieu est altéré dans les pensées, l’idolâtrie arrive et l’homme se corrompt rapidement. Dans la terrible corruption à Guibha et la façon avec laquelle l’affaire a été traitée, nous avons vu, quand Dieu est abandonné et que Christ comme l’image et le représentant de Dieu est mis de côté, comment l’homme méprise son prochain, et en arrive à commettre contre lui toutes les abominations auxquelles les gens de Sodome se livraient.

Quel tableau terrible du cœur humain ! Quand Israël fait justice – en propre juste – pour traiter ce mal affreux toléré par la tribu de Benjamin où il avait été commis, on voit l’impuissance de la vengeance humaine à accomplir la justice de Dieu. La discipline est exercée à l’extrême, anéantissant presque toute une tribu. Agir charnellement est totalement inefficace ; Dieu doit les briser, les humilier et leur enseigner encore cette leçon de la faiblesse humaine, sur laquelle il est insisté tout au long du livre.

Tout se résume dans l’expression finale : « En ces jours-là, il n’y avait pas de roi en Israël « (Jug. 21 : 25). Le soupir qui parcourt tout le livre s’exprime là ; il montre le désir que l’Esprit de Dieu a mis dans le cœur du peuple : la venue de Christ Lui-même. C’est le seul remède au mal parmi nous.

 

16.2  Tenir ferme pour Christ en un jour de ruine

En arrivant à la fin de notre étude, nous insistons sur l’énorme responsabilité qui pèse sur ceux dont les yeux ont été ouverts aux réalités sur lesquelles nous nous sommes arrêtés. Où sont les Gédéon, les Jephté, les Barak ? Où sont les apôtres, les martyrs, les témoins de l’Église ? Ils ont disparu. Ils ne peuvent plus se tenir à la brèche, ou élever la bannière de Christ. « Ils se reposent de leurs travaux » (Apoc. 14 : 13), attendant la récompense de leur fidélité.

Mais l’Ennemi est toujours là, comme nous l’avons vu abondamment, et l’Église est toujours là pour maintenir le témoignage à la vérité face au mal qui abonde. Hélas, les esclavages spirituels sont un fait actuel - mais où sont les libérateurs ?

Les cherchons-nous près de nous, ou au loin ? Ne pensons pas à quelqu’un dont le nom et le service sont connus, mais qui est à l’autre bout du monde, regardons près de chez nous. Si nous pleurons sur les désolations, si nous avons faim de la Parole de Dieu, si nous sommes brisés et impuissants, alors pourquoi pas nous ? Pourquoi Dieu ne nous utiliserait-Il pas, malgré notre faiblesse, comme instrument pour délivrer son peuple ?

Quel honneur et quelle joie d’être jugés dignes de tenir ferme pour Christ, pour son Église, pour la vérité, en un jour de ruine ! Tenir ferme, le confesser, mourir pour Lui, s’il le faut ! L’ensemble du peuple a-t-il succombé, les principes sont-ils abandonnés, les intérêts de Dieu sont-ils délaissés ? Alors, au nom de Christ, n’y en aurait-il qu’un pour maintenir la vérité, qu’il le fasse. Le Tout-puissant est avec lui !

En parcourant l’ensemble du livre depuis le début, nous voyons que le grand absent est Christ ; le Fils de Dieu n’a pas la suprématie, son autorité et sa puissance manquent partout. Seuls, de temps à autre, on voit brièvement quelques aperçus de Christ qui s’évanouissent dans une nuit plus sombre, parce que Christ Lui-même n’est pas là.

Si Christ n’a pas autorité sur l’âme, il ne peut y avoir de restauration pour l’Église, ni de position juste. Nous pouvons être froidement rigoureux sur le plan théologique et ecclésiastique, dénoncer le mal des systèmes et les incohérences des chrétiens professants, être pharisiens dans notre conduite, mais nous ne sommes rien, à moins d’avoir Christ – Christ dans sa Personne bénie, dans sa toute-suffisance, dans la plénitude de son amour et l’attrait de sa Personne. Il est le seul qui puisse diriger et délivrer son peuple. C’est Lui qu’il nous tarde de voir.

Il y a une joie dans les conflits, une joie à garder la vérité, une joie à faire face à l’Ennemi, si c’est par la foi, une joie à s’abaisser et à réaliser notre faiblesse ; toutes ces joies ne sont qu’un avant-goût de cette grande joie que nos cœurs attendent avec Lui, celle de Le voir. Et quand nous le verrons, que son Église le verra, lorsque nous serons pris pour être avec Lui, alors, et alors seulement, nous serons conformes à son image. Mais ici-bas, pour être ses représentants, nous lui ressemblerons pratiquement et lui serons en témoignage, dans la mesure où il aura autorité sur nos pensées, nos motifs, nos désirs , et sur toutes nos vies, de sorte que nous pourrons dire avec Paul : « Pour moi, vivre, c’est Christ. » (Phil. 1 : 21).

Au milieu de la confusion dans laquelle nous vivons et de la désolation que l’orgueil et l’égoïsme de l’homme ont introduites, face à la méchanceté de Satan et des séductions du monde, quelle bénédiction de pouvoir dire avec un autre cantique : J’ai entendu la voix de Jésus, ne me dites rien de plus ; j’ai vu le visage de Jésus, toute mon âme est émue.

Nous satisfait-Il, remplit-Il nos âmes ? A-t-Il pris possession de nous et marchons-nous en communion avec Lui ? Si c’est le cas, malgré la ruine qui nous entoure, et face au poids de notre responsabilité, nous aurons une puissance qui nous permettra de faire face à tout – Christ et Christ seul.

Ah, que nous puissions Le posséder, rechercher sa Parole, sa sainte volonté, son autorité, son honneur ; que tout soit centré sur Lui et provienne de Lui ; que le lien entre Lui et chacun de ses rachetés soit reconnu ; que nous ne cherchions qu’à refléter Christ, dans une vie brisée et dans le jugement de nous-même ! Puissions-nous désirer avoir l’honneur de représenter Christ, d’être remplis de Lui !

 

●        Du ciel Jésus viendra ; au ciel Il nous prendra :

●        Vivons pour Lui.

●        Il dit : « Je viens bientôt ». Gardons le bon dépôt.

●        Veillons ; déjà la nuit pâlit et fuit.

« Amen ; viens, Seigneur Jésus ! « (Apoc. 22 : 20).