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POÉSIES
par André Gibert
Table des matières :
1 C’est accompli — Jean 19:30 [résultats de l’oeuvre de la croix]
3 Regardez en haut, et levez vos têtes — Luc 21:28 [encouragements pour un temps de déclin]
4 Te voir — 1 Cor. 3:12 ; Apoc. 22:4 [contemplation du Seigneur]
5 ÉLIM — Exode 15:27 [compter les bienfaits de Dieu]
6 Veillons — 1 Thess. 5:6 ; Jean 14:19 ; Apoc. 22 :4 [attente du retour du Seigneur]
7 Quelques étrangères [la grâce pour ceux qui ne la méritent pas]
7.1 AGAR — Genèse 16 et 21 ; Gal. 4:21-31
7.5 LA REINE DE SHEBA — 1 Rois 10 ; Luc 11:31
9 Des choses trop merveilleuses — Proverbes 30:18-19 [l’amour du jeune homme pour la jeune fille]
10 Automnales — Ps. 65:6-13 ; 126:5-6 ; Jean 4:35-38 [au soir de la vie, confiance par delà la mort]
11 Devant nous [effort personnel et préconnaissance du Seigneur]
12 ATTENDANT... [le croyant attendant le Seigneur]
13 L’AGNEAU [souffrances et gloire de Christ comme Agneau de Dieu]
14 La Manne cachée [Christ dans son humanité, objet de la méditation du croyant]
15 Saul de Tarse [regardant à la gloire et persécuté]
16 «Au-dessus de toute louange» Néhémie 9:5 [Avant-goût de la louange éternelle]
Cantique — H.C. 211 — ME 1955 p. 56
«C’est accompli». L’oeuvre de grâce est faite,
De la victoire enfin monte le cri.
Celui qui meurt ayant baissé la tête
A triomphé. C’est accompli.
La coupe est bue. En paix il met sa vie.
Dieu trouve en Lui son délice infini ;
Glorifié, dès lors Il glorifie
L’Homme parfait. C’est accompli.
L’homme perdu, du fond de sa misère,
Voit le péché par Jésus aboli.
Pour en payer le terrible salaire,
Il a souffert. C’est accompli.
Du haut en bas Dieu déchire lui-même
Le voile saint. Le chemin établi,
Nouveau, vivant, jusqu’au séjour suprême
Nous est ouvert. C’est accompli.
Des nouveaux cieux à la nouvelle terre
Tout chantera bientôt, d’amour rempli.
Louange à Dieu ! Gloire au Fils, gloire au Père !
À jamais tout est accompli.
Cantique — H.C. 212 — ME 1954 p. 335
Déjà, Seigneur, tes gloires suivent
Les douleurs qui furent ta part.
Au ciel, pour ceux qui par Toi vivent,
Tu parais sous le saint regard.
Dans notre corps, tente fragile,
Chargés, souffrants, nous soupirons
Après l’éternel domicile
Qu’en gloire nous revêtirons.
Mais à travers larmes et peines
Ta voix nous arrive d’en haut,
Prélude aux délices prochaines,
Nous redisant : «Je viens bientôt».
Et, cri d’amour et d’espérance,
La réponse de tes élus
Par l’Esprit Saint vers Toi s’élance
«Amen, oh viens, Seigneur Jésus!»
ME 1982 p. 335
Peuple de Dieu lassé de tes longues errances,
Troupeau du seul Berger, tristement dispersé,
Semeurs aux mains desquels s’altèrent les semences,
Instruments où s’éteint le son clair du passé,
Bâtisseurs insensés contemplant sur le sable
Les débris des maisons que nous pensions fonder,
Vains rêveurs poursuivant un but insaisissable,
Docteurs souillant la plaie en voulant la sonder,
Pèlerins détournés de la terre promise,
Compagnons décevants d’un Chef victorieux
Et qui vont consommant ta déchéance, Église,
Fiancée infidèle à l’Époux glorieux,
Indignes mis à part pour avertir les hommes,
Appelés restés sourds aux accents des vainqueurs,
Incapables témoins et véreux économes,
Comment ne pas crouler dans la honte et les pleurs ?...
— En sommes-nous là, mes frères ?
Laissons-nous le désespoir
Étendre sur nos misères
Dans nos coeurs son voile noir ?
Satan est là, qui pousse à ce désespoir sombre !
Serions-nous parvenus au point de non-retour ?
Le vrai deuil n’est pas fait d’«hélas !» redits sans nombre,
Sa tristesse est d’avoir blessé le saint amour...
Seigneur, ne permets pas que meure l’étincelle,
Relève, toi, nos fronts vers la terre courbés !
Maître, péririons-nous t’ayant dans la nacelle ?
Fais voir aux tiens les flots domptés, les vents tombés !
Ne laisse pas en nous se flétrir l’espérance,
Que les sentiers frayés renaissent sous nos pas,
Que ta voix, nous tirant de tant de somnolence,
Nous arrache aux vapeurs mortelles d’ici-bas !
Émeus nos coeurs, Parole, ô bienfaisante épée !
Flamboiement de l’Esprit, éclaire le chemin !
Église, lève-toi pour être transmuée,
Ton Époux vient, l’éclat du jour sans lendemain
Luit par delà la nuée !
Ô mes frères, debout ! Seigneur Jésus, amen !
ME 1968 p. 166
Lorsque nous te verrons, là-haut, dans la lumière,
Quel émerveillement !
— Pauvres fils de la terre,
Que peuvent retenir, du trésor sans pareil,
Nos vases de limon ? Comme à l’ardent soleil
Se ferment éblouis les yeux des oiseaux d’ombre,
Tels se ferment nos yeux que tes rayons sans nombre
Viennent frapper. Nos mains, débiles pour chercher,
Tâtonnent vainement, essayant de toucher
Le bord resplendissant de ta robe de gloire.
Comment sonderions-nous ? nous ne savons pas croire !
Nous allons, soupirant dans notre infirmité :
«Hâte l’heure où, le voile obscur enfin ôté,
Faits semblables à toi par l’ineffable grâce,
Nous connaîtrons à fond en voyant face à face !»
— Mais quoi, dans le chemin ne nous suffit-il pas
Que partout ton regard accompagne nos pas,
Que nos noms soient gravés sur ta paume adorable,
Qu’à ton coeur infini notre coeur misérable
Tienne par ce lien de frères et d’amis
Dans lequel à jamais tu nous as réunis,
Et que l’Esprit divin, venu du sanctuaire
Pour faire de nos corps son temple sur la terre
Et d’orphelins les fils du Père par la foi,
Te glorifie en nous et nous parle de Toi ?
De Toi, le Fils de Dieu qui devins Fils de l’homme,
Toi, pour toujours béni sur tout ce qui se nomme
Et qui, pour nous placer dans cette intimité,
Participas, sans tache, à notre humanité...
Hélas, tous les désirs, qui, nés au fond de l’être,
Tous impurs, tous souillés même avant d’apparaître,
S’agitent dans nos coeurs de bonheur assoiffés,
Ne sont que germes morts, par Satan étouffés,
Et des restes en nous des semences divines
Rien n’a pu, dans ces coeurs tout foisonnants d’épines,
Trouver le moindre sol pour éclore et grandir.
Mais Toi, venu du ciel, as fait s’épanouir
De l’homme selon Dieu les beautés immortelles :
Formés en une nuit, boutons frais, fleurs nouvelles,
Fruits mûrs, sur le rameau très-saint, dans la clarté
Harmonisent la grâce avec la vérité !
Toi seul as pu scruter en son fond l’âme humaine
Et la comprendre toute en assumant sa peine.
Sur toi de tous nos maux s’appesantit le faix.
L’accablement marqua tes traits divins défaits
Quand nos tentations assaillaient ta propre âme.
Tu laissas sur tes pieds pleurer l’impure femme,
Tu redonnas son fils à la veuve en sanglots,
Tu vécus pauvre, obscur, en butte aux vils complots ;
Lassé, tu t’asseyais au puits dans la vallée,
Et, caché dans les lieux déserts de Galilée,
Tu priais tout au long des nuits de ton labeur.
Les grâces sur tes pas naissaient de ta douleur
Comme l’encens brûlé donne son parfum rare.
Tu mêlais, en venant ressusciter Lazare,
La majesté divine aux saints frémissements :
En pleurs tu menais deuil avec les coeurs aimants,
Mais qui dira jamais l’infini de ces larmes
Coulant lorsque la voix qui calme les alarmes
Et la seule à laquelle obéissent les morts,
Était près de crier : «Lazare, sors dehors» ?
Tu pleurais, au moment où la grotte fétide
Allait sans disputer céder son mort livide,
Préludant à cette heure où le sinistre lieu,
Vaincu, proclamerait la gloire de ton Dieu,
Lorsque tu surgirais toi-même de la tombe !
Car, venu pour sauver le pécheur qui succombe,
Guérir et non bercer son mal désespéré,
Tu suivais pas à pas ton sentier resserré
Pour aller, sous l’opprobre et dans l’ignominie,
Jusqu’au jardin qui vit ta sanglante agonie,
Jusqu’à ce mont Calvaire où la nuit s’étendit
Quand ton appel vers Dieu monta du bois maudit ...
... Nous suivons en esprit ce chemin de souffrance,
Nous nous taisons devant ta sainte obéissance,
Pour t’adorer, Seigneur, nous ployons les genoux,
Et rien ne nous saisit au plus profond de nous,
Ne nous prend tout entiers et dans tes bras nous jette
Comme te voir, alors que ta coupe s’apprête
Pour l’heure où tu devras, voulant les délivrer,
Mourir pour des pécheurs, sur des pécheurs pleurer !
Mais l’oeil fixé sur Toi maintenant se relève
Avec Toi, pour te voir au ciel où tout s’achève.
Non, il ne suffit pas à l’Esprit du Seigneur,
Il ne te suffit pas à toi, puissant Sauveur,
Que, courbés vers le sol où nous baisons ta trace
Et déchiffrons les traits qu’y déposa la grâce,
Émus au souvenir de l’Homme de douleurs,
Méditant sur Celui qui sema dans les pleurs,
Nous bornions nos regards à cette mort vaincue.
Tu veux que nous suivions, par delà l’étendue,
L’incomparable trace au séjour glorieux ;
Que, tout voile enlevé, de tes jours douloureux,
Nous relisions l’histoire inouïe au ciel même ;
Que l’épine s’évoque auprès du diadème,
Et dans l’or du soleil ton visage meurtri ;
Que là soient racontés le Calvaire, et son cri,
Les clous perçant tes mains, au flanc ta plaie ouverte ;
Que ta gloire, admirée à face découverte,
Rayonnant dans nos coeurs, illumine nos fronts,
Et que nous te voyions comme nous te verrons !
Notre coeur oublieux s’en souvient-il assez,
De tous les frais Élims, verdoyantes retraites,
Que le long du voyage aux éprouvantes traites,
Conduits par son amour nous avons traversés ?
La colonne du peuple, énorme vague lente,
Derrière la nuée où marchait l’Éternel,
Allait, et du désert l’immensité brûlante,
Implacable inconnu, menaçait Israël.
Ses yeux ardents emplis de la terre promise,
Humble et fier à la fois, le bâton à la main,
En tête des tribus, seul, s’avançait Moïse.
Aaron après lui marchait dans le chemin.
Et puis Juda, Ruben, Éphraïm, Dan, la masse,
Dans la poussière fauve et le soleil de feu,
Suivaient et s’écoulaient comme le reflux passe,
Innombrable troupeau que comptait l’oeil de Dieu.
Par familles groupés, tous, jeunes gens robustes,
Mâles guerriers armés, enfants insoucieux,
Femmes à l’air pensif, lasses, ployant leurs bustes,
Vieillards sur leurs bâtons courbés silencieux,
Tous allaient. Le bétail suivait, cohue immense
Qui, richesse vivante, avec bruit se pressait,
Tandis que sur les chars, orgueilleuse puissance,
L’or, l’argent, les trésors d’Égypte on entassait.
Ainsi le peuple élu cheminait. Dans leur route,
Trompant leur lassitude, ils racontaient entre eux
L’histoire inoubliable, unique sans nul doute,
Du puissant Jéhovah les hauts faits glorieux :
L’esprit encore troublé par toutes ces merveilles,
À peine pouvaient-ils croire leur souvenir.
Comme un songe angoissant d’où joyeux l’on s’éveille,
Ils revivaient l’Égype, et leur constant soupir.
Ils revoyaient la suite étrange des miracles,
Le grand cri, dans la nuit, des Égyptiens frappés,
La pâque, le départ suivant les saints oracles,
La mer, la marche au sein des abîmes coupés,
Les ennemis surpris jetés à la dérive,
Le Pharaon soudain englouti dans les flots,
Le chant de délivrance éclatant sur la rive,
Devant l’onde propice où flottaient les chariots.
Et puis, trois jours de soif ayant aigri leur âme,
Près des eaux de Mara l’on s’était arrêté,
L’amertume arrachait vers Moïse le blâme
Que Dieu calmait, d’un bois mystérieux jeté...
Or, on avait repris la marche monotone.
De nouveau le désert, le soleil, le labeur,
L’eau rare au maigre lit des torrents où s’étonne,
En été, le regard déçu du voyageur.
L’étape ce jour-là s’allongeait, harassante,
Depuis l’aube du jour, et la chaleur gagnait.
Une rumeur montait, lentement grandissante,
Et l’ardeur de la foi dans les rangs s’éteignait.
Ah ! Verrait-on jamais le pays des promesses,
La terre d’Abraham, l’opulent avenir ?
La fatigue et la soif, de leurs âpres détresses,
Obscurcissaient l’espoir, chassaient le souvenir.
“Mourrons-nous donc de soif dans le désert hostile ?
“Est-ce ainsi qu’au repos Moïse nous conduit ?
“Les jours de servitude, au bord du Nil tranquille,
“Étaient-il plus amers que l’épreuve aujourd’hui” ?
Mais une vision lointaine se dessine
Les arides plateaux s’ouvrent. Un cirque frais
S’étend à l’horizon, dans la lumière incline
Vers une nappe d’eau des feuillages dorés !
On doute. Est-il possible ? Est-ce vrai ? L’espérance
Peut-elle se donner libre cours ? N’est-ce pas
D’un mirage trompeur la perfide apparence,
Un supplice de plus à ce peuple si las ?
On approche. L’espoir s’affirme, se précise,
Et la nuée au loin s’arrête. Louez Jah !
Le pas se hâte heureux vers l’attirance exquise.
On foule l’herbe verte, et l’air fraîchit déjà !
Les palmiers accueillants balancent leurs ramures
Au-dessus des bosquets de térébinthes verts,
Et voyez, jaillissante aux douze sources pures,
L’eau, l’eau tant désirée étale ses flots clairs ?
Bientôt, auprès de l’onde, aux reflets magnifiques,
Le camp se déployait dans les sites ombreux,
Retentissant sans fin de l’écho des cantiques
À l’Éternel Sauveur, le Dieu fort des Hébreux.
Le courant des ruisseaux mirait les tentes blanches ;
Les femmes s’empressaient abreuvant les troupeaux,
Se croisaient sous le dôme épais des longues branches,
Leurs vases débordant des généreuses eaux.
Élim, pure oasis ? Élim, divines fêtes !
Oh dites, notre coeur s’en souvient-il assez
De tous les frais Élims, verdoyantes retraites,
Que, le long du voyage aux éprouvantes traites,
Conduits par son amour, nous avons traversés ?
Sentinelles dans la nuit sombre
Épiant le lever du jour,
Nous voyons se dissiper l’ombre
Du sommet de la haute tour.
Jusqu’à la trompette sonore,
Le rôle, dicté par l’Esprit,
C’est d’attendre en veillant l’aurore,
Et le mot d’ordre : Jésus Christ.
C’est Lui qui vient à la lumière,
Lui, le Chef, qui va resplendir.
Sous les beaux plis de sa bannière
Quelqu’un pourrait-il donc dormir ?
Déjà c’est la dernière veille...
Le chant du coq a rententi.
Que nul d’entre nous ne sommeille,
Car le signal prochain, c’est Lui !
Déjà sur la crête lointaine
Des collines, à l’horizon,
Blanchit une ligne incertaine,
Seuil immense de la maison.
Adieu la dernière rafale !
Oh ! Soyons tous sur pied pour voir
Se lever l’aube triomphale,
Couronnement de notre espoir.
Et, dans ses rayons magnifiques,
Remplissant l’espace doré
Tout vibrant des divins cantiques,
Nous verrons le Maître adoré !
Fille d’Égypte entrée au lit d’Abraham l’Hébreu,
Pour enfanter, esclave, une race indomptée ;
Agar ! errante Agar ! altière et maltraitée,
Étrangère appelée aux visions de Dieu !
Ton fils moqueur troublait les tentes de son père,
Et le voici, mourrant de soif sous l’arbrisseau.
Et toi, le coeur brisé, tu revois le berceau,
Où sans rivale encore, tu l’endormais naguère ;
Puis l’héritier venu, tu laissas Ismaël
L’opprimer, se leurrant d’un trompeur droit d’aînesse.
Comment tenir devant le fils de la promesse ?
Pars, et l’enfant. Mais il vivra, dit l’Éternel.
Il vit, hélas, bravant la semence bénie,
Et je verrai sans cesse en ma terrestre vie
Lutter contre l’Esprit l’irréductible chair,
Rebelle au frein ainsi que l’âne du désert,
Ta descendance, Agar, ô serve (*) inasservie.
(*) Serve : féminin de serf = esclave
Pour toi, Charan lointain bascule dans l’oubli,
Tu laissas sans retour ce qui fut ta patrie.
Déchirée par les dieux, ton coeur n’a pas faibli
Au moment de quitter ta famille attendrie.
Tu ne reviendras plus aux champs araméens,
Au puits où chaque soir ton troupeau venait boire,
À la ville, à la porte, où siègent les anciens,
Aux demeures de pierre, aux palais lourds de gloire.
Te voilà parmi ceux que l’invicible appel
A saisi, dont la foi répond : j’irai, dont l’âme
Tendue avec ferveur vers le but éternel,
Se fonde sur ce Dieu que leur bouche proclame.
Ainsi vers le pays ignoré mais promis,
Abraham était parti, sans frayeur et sans doute ;
Mais toi, dans quelle ardeur d’un jeune coeur épris
Vers l’époux inconnu, tu te mettais en route.
Tu te gardes pour Lui sous ton voile baissé,
Il te mène à la tente où longtemps fut sa mère,
Et le rôle et les biens d’un glorieux passé,
Il les place en tes mains, riche cohéritière.
Vois, prends, tout t’appartient, dit Isaac, l’argent, l’or,
Et le bétail sans nombre, et de mes gens l’armée.
Mais l’avenir, pour nous, réserve plus encore.
Lève dès maintenant ton voile, ô bien-aimée,
Et regarde avec moi, le pays est à nous,
À nos fils pour jamais, la terre de promesse.
Viens, tu la parcourras aux côtés de l’époux.
Je veux t’en révéler chaque jour la richesse,
Monts parfumés, vallons du nord, eaux vives, lait et miel,
Oasis du midi, fruits exquis, mer sereine,
Tout est nôtre en ces lieux aimés de l’Éternel.
Mais tu devras y vivre, étrangère et foraine ;
Tu n’y posséderas qu’une tente, un autel,
Et là-bas, à Mamré, ta couche souterraine.
*
Telle, cherchée au loin par le Saint Serviteur,
Oubliant elle aussi le lieu de sa naissance,
Une épouse nouvelle adore son Seigneur ;
Mais ne trouvant qu’en haut sa divine présence,
Elle marche étrangère au monde, où ce vainqueur
Méconnu, reviendra régner avec puissance.
Et sa foi voit planer la commune espérance
Sur Hébron, où tu dors jusqu’au jour de splendeur,
Rebecca, de l’Église ô prophétique soeur.
Les espions dévalés par la corde noueuse
Et glissés dans la nuit propice à leur départ,
Elle resta longtemps immobile et songeuse,
À sa fenêtre ouverte au-dessus du rempart.
Jéricho reposait, toutes portes fermées.
Leur coeur fondu de peur, mais raidissant leur cou,
Se forçant à narguer des hébreux les armées,
Peuple et roi, refusaient de plier le genou.
Moi seule j’ai compris la menace divine,
Et la juste raison des succès d’Israël.
La verge est étendue et l’orage fulmine ;
Le peuple est une épée aux mains de l’Éternel.
Le jugement s’abat sur nos villes impies,
Elles ont dès longtemps bravé le créateur,
Multiplié le vice, aimé les infamies,
Et les impuretés d’un culte corrupteur.
Seule j’ai craint de Jah la terrible colère ;
Elle balaiera tout, de Guilgal à Sidon.
Il est le Dieu des cieux et des rois de la terre,
Nous l’avons offensé. D’où viendrait le pardon ?
Ainsi je voyais tout crouler dans l’épouvante.
Alors il envoya ces deux hommes ici.
Je les reçus, je crus, je les cachai fervente ;
Ils sont saufs, je n’aurai qu’à bannir tout souci ;
J’ai vu le peuple élu, j’ai parlé son langage,
J’ai livré mes secrets, et reçu le serment
D’être, et les miens, sauvés au jour du grand carnage.
Mais voici que ma foi vacille en ce moment.
Qu’ai je fait ? De trahir ma terrestre patrie,
De mentir, pour laisser aller ces gens en paix ;
Avec des ennemis, moi, j’ai lié partie.
Avec tout mon passé, j’ai rompu désormais.
Et pourquoi, et vers quoi me suis-je donc jetée ?
Sinon le jugement mérité tant de fois.
Qui donc plus que Rahab, triste prostituée,
A de l’homme et des dieux violé toutes les lois.
Comment puis-je prétendre à la faveur insigne
De prendre place un jour au milieu des tribus.
Il n’est aucun espoir pour moi, coupable indigne,
Mon sort de pécheresse est parmi les perdus.
Et pourtant Éternel ! Ô dissipe ces voiles !
Elle passa la nuit dans ce frémissement,
Jusqu’à ce qu’enfin l’aube éteignit les étoiles
Et que se dessina au lointain orient,
La masse du désert, d’où, vers la plaine sombre,
Ce peuple était venu prêt à l’assaut fatal.
Elle vit le jour naître, en traits de feu sans nombre,
Bouche du four ouvert sur son pays natal,
Malheur à moi, c’est là, dit-elle, la fournaise
Qui va, tel un fétu pour jamais m’engloutir.
Non, ne crains pas, espère, et que ton coeur s’apaise,
La lumière en salut pour toi va resplendir ;
Ne crains pas, ô Rahab, car ta foi t’a sauvée ;
Le soleil de justice est là ; sous ses rayons,
Comme d’un bain lustral, tu sortiras lavée ;
Et ton nom sera grand parmi les plus grands noms.
Abaisse tes yeux, vois tout près, plus près encore,
Le sceau de ton rachat, gage du Tout-Puissant.
Et Rahab, vit briller sous les feux de l’aurore
Le cordon écarlate ainsi qu’un jet de sang.
Vient l’heure du repas sous le grand soleil ; lasse
D’avoir erré longtemps parmi les champs de blé,
Auprès des moissonneurs de Boaz a pris place
L’humble glaneuse à qui l’homme riche a parlé.
Et le maître lui fait passer la coupe pleine,
Lui tend le grain rôti, pour la rassassier.
Elle songe ; en son coeur le souvenir ramène
Les images des lieux qu’il lui faut oublier.
Mais à d’autres clartés déjà son oeil s’éveille,
Les propos de Boaz, chantent dans son esprit.
N’a-t-il pas évoqué cet aile sans pareil
Dont, chétif oiselet alla chercher l’abri ?
Tel un aimant que fixe une aiguille obstinée
Du grand Dieu d’Israël, l’invincible pouvoir
L’a prise toute entière, et pour jamais tournée
Vers un sûr, bien qu’encore indiscernable espoir.
La même force qui, dès les murs de sa ville
Naguère l’a dressée contre tout vain retour,
La courbe maintenant sur les épis, docile
Au labeur consenti comme un travail d’amour.
Quand avec Naomi sous son voile dolente
Tu cheminais, aucun regret ne t’arrêta.
Maintenant que vois-tu, glaneuse patiente
À l’horizon doré des moissons d’Éphrata ?
Je vois, bien au-delà, les moissons éternelles,
Et les gerbes sans fin, des générations
Dont la chaîne naîtra de mes noces nouvelles,
Car Boaz me prendra, fille des nations,
Moi, veuve en Israël, et de race maudite.
Et la grâce inscrira l’étrangère, bientôt,
Sous l’inchangeable nom de Ruth la moabite
Au lignage royal de l’Orient d’En-Haut.
J’ai repris mon chemin, vers les bouts de la terre ;
De là j’étais venue entendre en Israël
Ce roi dont le renom se lie en saint mystère
Au grand Dieu des hébreux qu’ils nomment l’Éternel.
Je pensais le frapper par toute ma richesse ;
Mes chameaux fléchissaient sous l’or pur et l’encens ;
J’avais pour l’éprouver ma subtile finesse
Qui, d’énigmes, montait les jeux embarrassants.
Et voici, qu’accueillant mes présents grandioses,
Il m’en fit, Lui, de tels que j’eus honte de moi.
Et je n’eus plus d’esprit, quand je vis toutes choses
Proclamer la sagesse et la gloire du roi.
J’admirai le maintien des serviteurs du trône,
Leur faste, leur ferveur, et l’ordre de la cour.
J’enviai leur bonheur d’entourer sa personne
Et de pouvoir l’entendre à toute heure du jour.
N’importe, je m’en vais comblée ; il m’a dit : Reine,
Va, que mes dons chez toi gardent mon souvenir,
Qu’ils reflètent ma gloire en ta terre lointaine,
Et parlent de celui qui voulut te bénir.
Mais, bien plus précieux que ces merveilles rares,
J’emporte le trésor acquis à son côté,
Lorsqu’en nos entretiens, à mes pièges barbares
Répondaient tant de grâce et tant de vérité.
Comme il savait chasser de mon esprit les nues,
Me parler de la terre, et du ciel, et de Dieu,
Éblouir mon regard de clartés inconnues
Et conduire mon âme au seuil du très saint lieu.
Je m’en vais, le coeur plein de l’indicible joie
Où s’annulent distances et séparations.
Je serai désormais le témoin qu’il envoie,
Le héraut de sa gloire envers ma nation.
J’aurai l’insigne honneur d’enrichir mon royaume
De ce que j’entendis, de tout ce que je vis,
De décrire le temple, interpréter le psaume,
Montrer la foule en fête emplissant le parvis ;
Je veux que mon pays, dorénavant, résonne
Du nom de Salomon, ma ville, mon palais,
Et qu’instruit du vrai Dieu, tout ce qui m’environne
Célèbre sa bonté qui demeure à jamais.
Puis je m’endormirai, jusqu’au jour d’un autre âge,
Qui me verra, du sein des peuples prosternés,
Me lever, l’étrangère, et porter témoignage
Contre des renégats autrefois premier-nés.
Et dans la pourpre et l’or, le Roi des rois lui-même,
Le Roi de gloire, avant tous les siècles prédit,
Fils de l’homme, au front ceint du divin diadème,
Vers lui fera s’asseoir la reine du midi.
La route barre de blanc le vallon vert ;
Des peupliers la bordent toute,
Tous arbres sains, droits, hauts dans l’air.
Piliers d’une incomplète voûte,
Bien correctement postés,
En file des deux côtés,
Ils regardent la route
Et les hommes qui passent,
Qui passent sur la route.
Ils sont là de jour et de nuit,
Au sol fixés,
Alignés voilà des ans et des ans ;
Les morts, on les a remplacés.
Toujours intacts, sur leurs deux rangs
Ils montent la garde ;
Leur troupe immobile regarde
Sur la route, passer les hommes, les errants.
Ils sont là sous le soleil,
Sous la pluie haineuse,
Ou la gelée insidieuse.
Et le givre parfois
Tisse pour leur réveil
Sa broderie harmonieuse.
De l’aube claire, au soir morne ils bruissents ;
Quand le vent brutal les cingle, ils gémissent,
Pour se redresser ensuite au soleil.
Mais qu’attendent-ils sous les cieux ?
Qu’espèrent-ils voir sur la route ?
Toujours déçus, l’oeil anxieux,
Jour et nuit, ils la scrutent toute.
Ils voient passer le chemineau braillard,
Le cantonnier qui peine sans courage,
Et leur paternel regard
Suit les vacillements du char
Qui portent les gerbes ou fourrage.
Ils raillent les propos niais des amoureux,
Et bien plus, les airs vaniteux
Que prennent ces gens fous de vitesse,
Dont les autos passent avec fracas entre eux,
Eux que rien ne talonne, ni ne presse.
Ils ont vu des jeunes, des vieux,
De drus gaillard et de tristes malades,
Des importants, des importuns, des odieux ;
Ils ont vu des soldats défiler tout poudreux,
Et leurs chefs chamarrés lourdement glorieux,
Des prêtres, des enfants aux charmantes gambades,
Des rois au temps jadis, de riches ambassades,
Aujourd’hui les troupeaux de rouges camarades.
Ils ont vu des jeunes et des vieux.
Et, toujours déçus, toujours anxieux,
Ils s’attendent, ils attendent dans la lumière ;
Ils redressent leurs têtes altières,
Et la secouant vers les cieux,
Avec mépris, avec tristesse, avec colère,
Ils attendent qu’un homme passe sous les yeux,
Ils attendent pour fermer leur voûte,
Ils attendent qu’un homme passe sur la route.
Ils voient bien l’humanité, cette pauvresse,
Mais c’est de l’homme qu’ils rêvent sans cesse ;
Ils attendent que viennent enfin, pur, rayonnant
De justice et d’amour, l’Homme sacré portant
Sur ses lèvres la grâce, en son coeur la tendresse.
Alors, ils courberont leur haut fût verdoyant,
Et leur arc triomphal frémissant d’allégresse ;
Et, détendus, joyeux d’une ineffable ivresse,
Leur garde cessera, leurs bruits seront des chants.
Quand viendra-t-il l’objet de la longue espérance ?
Avec eux ne voyant qu’orgueil, laideur, souffrance
La terre entière attend et gémit de douleur.
Mais sûre de te voir dans ta magnificence,
Pour t’acclamer enfin elle apprête en silence
L’hommage universel qui va jaillir en choeur,
Christ divin, Roi des rois, Fils de l’homme vainqueur.
Depuis bien des millénaires,
Les navires orgueilleux,
Vont creusant dans les flots bleux
Leurs écumantes ornières
Dont rien ne reste après eux.
Pareillement admirables
Sont, dans les cieux, vos chemins,
Ô gypaètes anciens,
Et vous, avions redoutables,
Issus des travaux humains.
Sur le roc se perd la trace
Du serpent, en vain cherchée
Aussitôt qu’il a passé.
Lacéré partout, l’espace
Est partout recommencé.
Mais, plus merveilleux mystère,
Est la voie où, point par point,
Le jeune homme épris rejoint
Celle qu’il veut sur la terre,
Et retrouve de bien loin.
Qu’importent, luttes nouvelles,
Âpre effort sur âpre effort !
Comptent seul, à l’autre bord,
Pour le navire le port,
Le nid calme pour les ailes,
Et pour l’amour sûr et fort,
Le baiser des coeurs fidèles.
Nous avons vu le jour en un lointain automne,
La saison du fruit mûr et du moût odorant,
Les temps où, pour mourir,le froment s’emprisonne ;
Le cueilleur vient joyeux, le semeur va pleurant.
Et déjà va passer l’automne de nos vies ;
Quels fruits en resteront au céleste cellier ?
Quel blé naîtra de vous, semences enfouies ?
Dieu le sait, qui compta les travaux journaliers.
Douce arrière saison dont le sourire essaie
D’ôter la brume au ciel, les pleurs à l’oeil chagrin ;
Fraîche saison première, où la pluie est versée
Pour amollir le sol où va germer le grain ;
Feux de l’été calmés dans la lumière exquise ;
Charme subtil de l’air quand les jours ont baissé ;
Or des bois reflètant le couchant qui s’irise ;
Vents nouveaux orchestrant les échos du passé ;
Tout enrobe d’espoir les regrets, tout rassure ;
Le maître est sur le seuil de l’hiver redouté,
Et sa main, qui bénit la récolte future,
Imprime aux fruits d’hier leur sceau d’éternité.
*
Vous qui cueillez, vous qui semez, chantez ensemble !
Couronne de bonté, Seigneur, l’an tout entier ;
Affermis notre coeur et notre pas, s’il tremble ;
Couvre encore de tes dons le reste du sentier.
Nous ne referons pas le chemin de la terre,
Mais un autre est ouvert, au-delà du tombeau,
Et nous mène, vainqueurs par le sang du calvaire,
Non à de vains retours mais au monde nouveau.
Quand la voile est déployée
Dirais-tu pourquoi partir ?
Quand la flèche est envoyée
En peux-tu régler le tir ?
Sur la mer guide ta voile ;
Pour t’enseigner n’as-tu pas
Et le soleil, et l’étoile,
Et la carte, et le compas ?
Mais de la flèche rapide,
En vain, voudrais-tu changer
La trajectoire rigide
Jaillie au doigt de l’archer.
Ta vie, ô double prodige,
Que Dieu même a disposé
Est cette nef qu’on dirige
Et la flèche au vol fixé.
Pour gagner le but suprême
Tu dois fournir ton labeur,
Mais là-haut Celui qui t’aime
Règle tout pour ton bonheur.
ME 1979 p. 335
Attendre le Seigneur plus que les sentinelles,
Leurs yeux lourds de sommeil, mais au poste fidèles,
N’attendent dans la nuit, n’attendent le matin...
Te pressentir sautant de colline en colline,
Ô bien-aimé qui viens de la splendeur divine
Ravir la fiancée au paradis lointain...
Avoir l’oreille au guet pour entendre en la nue
Résonner la trompette annonçant ta venue,
Et la voix de l’archange, et le puissant appel...
Avoir les yeux levés, voir l’étoile sacrée
Percer l’ombre, et bientôt l’aube tant désirée
Blanchir au loin, prélude à ton jour éternel...
Avoir la main déjà pour t’ouvrir préparée
Lorsque ton pas connu sera près de l’entrée,
Être trouvé debout, vigilant serviteur...
Se nourrir de l’espoir sanctifiant et ferme,
Se dire l’un à l’autre : «On approche du terme,
Il vient, Il l’a promis, voici le Rédempteur»...
u ² u
Seigneur, ton racheté dès cette terre adore,
Mais languit de te voir, son âme a soif de toi.
De ton Épouse entends tous ces accents de foi
Qu’en son coeur réveillé l’Esprit saint fait éclore !
Dieu garde encor secret l’indicible moment
Où tu te lèveras du trône de ton Père
Pour rassembler les tiens et régner sur la terre
Dont tu feras cesser le long gémissement,
Mais, Fils de l’homme, Roi que les hommes rejettent,
Jésus, bien plus que nous ton âme attend ce jour.
Que sont nos faibles voeux auprès de ton amour,
Époux divin, Agneau dont les noces s’apprêtent ?
Viens. Tu payas le prix. Le monde t’appartient.
Viens, emporte là-haut le trésor qu’il recèle,
Et mets à ta couronne, où l’or pur étincelle,
La perle dont l’éclat reflétera le tien !
Note Bibliquest : Strophe 1 : És. 21:11 ; Ps. 130:6 — Strophe 2 : Cant. d. C. 2:8 — Strophe 3 : 1 Thes. 4:16 —Strophe 4 : 2 Pier. 1:19 — Strophe 5 : Luc 12:36 — Strophe 6 : Luc 2:38 — Strophe 7 : Ps. 63:1 ; Apoc. 22:17 — Strophe 8 : Marc 13:32 ; Rom. 8:22 — Strophe 9 : Luc 19:14 ; Apoc. 19:7 — Strophe 10 : Matt. 13:44-46
ME 1981 p. 334
Nous te verrons prendre le livre,
Bientôt, très saint Agneau de Dieu.
Des temps effrayants doivent suivre,
Mais nous serons dans le saint lieu,
Célébrant l’oeuvre expiatoire,
Et dans notre esprit, Majesté,
Passera toute ton histoire
De l’une à l’autre éternité.
u ² u
... Agneau sans défaut et sans tare
Avant les siècles préconnu,
Pour le croyant tu fus le phare
Dans l’obscur lointain entrevu.
Il te voyait en espérance,
Celui qui lia sur l’autel
Présageant déjà ta souffrance,
Le fils donné par l’Éternel.
Agneau de Dieu, tes créatures
Sur la terre t’ont contemplé
Gardant au milieu des souillures
Ton vêtement immaculé,
Secourable à toute détresse,
Prenant le faix du miséreux,
Touché par une pécheresse,
Touchant toi-même le lépreux.
Agneau muet quand, sataniques,
Des juges vils te condamnaient
Et que par d’autres mains iniques
À la tuerie ils te menaient !
Mais sur la croix, sainte victime,
Pour eux tu demandas pardon,
Et crias du fond de l’abîme :
«Mon Dieu ! pourquoi cet abandon ?»
Agneau glorifié, du trône
Où ton Père t’a fait asseoir,
Lève-toi, portant la couronne,
Investi du divin pouvoir !
Aux yeux de tous tu vas paraître
Mais dès maintenant, à genoux,
Les tiens disent : — Viens, puissant Maître ;
— Viens, dit l’Église à son Époux.
Avant que ta colère broie
Tes ennemis, Agneau royal,
Le ciel retentira de joie
Autour du banquet nuptial.
Auprès de toi, de lin vêtue,
La reine du monde nouveau
Songera, d’amour éperdue :
— Je suis la femme de l’Agneau !
u ² u
... Le livre est dans tes mains percées.
Tu fus immolé, mais vainqueur.
Si tes souffrances sont passées,
Leur mémoire étreint notre coeur.
Nous t’adorons, Agneau de gloire,
Nous exaltons ta charité :
Elle illumine ton histoire
De l’une à l’autre éternité.
Note Bibliquest: Strophe 1 : Apoc. 5 — Strophe 2 : 1 Pier. 1:19 ; Gen. 22:9 — Strophe 3 : Luc 2:8-15 ; 5:13 ; 7:37 — Strophe 4 : Matt. 26 à 27 ; Luc 23 — Strophe 7 Apoc. 5
ME 1977 p. 334
Exode 16:32-36 ; Hébreux 9:4 ; Apocalypse 2:17
Dans une auguste nuit, l’arche mystérieuse,
Derrière le rempart du voile solennel,
Gardait un saint dépôt sous l’aile glorieuse
Des chérubins vers qui descendait l’Éternel.
Là reposaient, sous l’or du propitiatoire,
Les tables où Dieu même avait gravé sa loi,
La verge qui d’Aaron rappelait la victoire,
— Et la cruche d’or pur dont médite la foi,
Car, dans ce triple abri par Moïse placée,
Des soins de Jéhovah permanent souvenir,
Telle que le matin sur la fraîche rosée,
La manne se cachait pour un peuple à venir.
Exacte portion que chaque Israélite
Recueillait aussitôt que le jour avait lui,
Elle était, dans cette ombre où la splendeur habite,
La part de l’Éternel au pain donné par Lui.
Ô délice infini de Dieu, manne adorable,
Jésus, vrai pain du ciel ici-bas présenté,
Tu gardes, mets sans prix de la divine table,
Le mystère éternel de ton humanité !
Si tu donnes la vie aux fils de la poussière,
Si tu restes pour eux le céleste aliment,
Qu’es-tu donc à jamais pour le coeur de ton Père
Qui seul sait la valeur de ton abaissement ?
Et maintenant, voici, récompense suprême,
Part bénie au secret plaisir du très-saint lieu,
À celui qui vaincra tu donneras toi-même
D’en goûter la saveur unique auprès de Dieu.
Oh que, nourris de toi, bien-aimé, sur la terre,
Nous soyons ces vainqueurs luttant jusqu’à la mort
Pour lesquels tu tiens prête, au divin sanctuaire,
La manne pure enclose au flanc du vase d’or !
ME 1983 p. 308
Quand, après trois longs jours de cécité profonde,
Les écailles enfin tombèrent de ses yeux,
Passa, dans le regard qu’il posa sur le monde,
D’un collyre inconnu l’effet mystérieux.
Tout lui sembla soudain futile, chose inerte,
Tout ce qu’il convoitait ne fut plus que néant,
Tout ce qu’il nommait gain lui devint une perte,
Illusion funeste et poursuite du vent.
Rien n’eut de prix pour lui que l’éclatante gloire
D’où Celui qui, l’ayant jusqu’à terre abattu,
Pour en faire un héraut de Sa sainte victoire
Avait dit: «Saul, pourquoi me persécutes-tu?»
Dès lors, sans autre but dans sa terrestre vie
Que de mourir et vivre en Christ ressuscité,
Il eut, couvert d’opprobre et dans l’ignominie,
L’honneur d’être, ô Jésus, pour Toi persécuté!
ME 1976 p. 335
De sublimes harmonies
Enveloppez l’univers,
Ô multitudes bénies,
Éclatez en saints concerts !
Ce n’est plus de la poussière
Que nos voix s’élèveront ;
Nos harpes, dans la lumière,
Entre nos doigts vibreront.
Des rachetés les louanges
Dans le cantique nouveau
Entraîneront les saints anges ;
Tous diront : Gloire à l’Agneau !
Afin qu’au ciel retentisse
L’hymne de l’amour divin
Triomphant par la justice,
L’homme instruit le séraphin.
Tu recevras notre hommage
Pour le joindre, ô Bien-aimé,
À celui qui d’âge en âge
Au Dieu très-saint est donné.
Par toi le culte céleste
Qui jamais ne s’interrompt
Exalte sa grâce, et reste
Pur comme l’or à ton front.
Au plus profond des cieux mêmes,
Dans l’inaccessible lieu,
L’écho des sublimes thèmes
Réjouit le cœur de Dieu.
Toute chose enfin nouvelle,
Il goûte, au secret séjour,
Dans la joie universelle
Le repos de son amour.
Mais le grand flot d’harmonie
Déferle, calme et puissant,
Sur une plage infinie
Où l’extase attend le chant.
La voix même est dépassée ;
Seule, en effluves très doux,
Monte vers Dieu la pensée...
— Et Dieu sera tout en tous.
ME 1980 p. 335
Quelle grâce, ô Seigneur, d’être nommés tes frères
Et de pouvoir en paix attendre ton retour !
Tu nous as délivrés de toutes nos misères,
Notre seul droit, c’est ton amour.
C’est toi qui dans ton sang lavas notre souillure
Et dans nos coeurs troublés fis descendre la paix.
Ô Jésus, pain du ciel, divine nourriture,
Par toi nous vivrons à jamais!
(Hymnes et cantiques, n° 123)
Ah, que dès ici-bas cette vie éternelle
Que ta mort nous acquit, soit vue en tous les tiens !
Et fais-la, telle une eau pure et toujours nouvelle,
Déborder des vases chrétiens.
Bientôt, nos corps changés brillant de ta lumière
Et ta gloire nimbant notre front incliné,
Toi-même introduiras la famille du Père
Dans la maison, ô Premier-né !
Tu nous feras asseoir aux places préparées ;
Là, dès l’éternité tu voulais des humains ;
Là nous contemplerons tes couronnes sacrées
Et les blessures de tes mains.
Nous te verrons sans fin déployer les richesses
De la grâce, trésor dont rien ne vieillira,
Et notre âme, en retour, sans failles ni faiblesses,
Ô Premier-né, t’adorera !